Rapport n° 792 (2021-2022) de Mme Christine LAVARDE , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 juillet 2022

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N° 792

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 juillet 2022

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi,
adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée,
de
règlement du budget et d' approbation des comptes de l' année 2021 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME II

CONTRIBUTIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

ANNEXE N° 11a

Écologie, développement et mo bilité durables

(Programmes 113 « Paysages, eau et biodiversité », 181 « Prévention des risques », 174 « Énergie, climat et après-mines », 345 « Service public de l'énergie », 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables »)

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : FINANCEMENT DES AIDES AUX COLLECTIVITÉS POUR L'ÉLECTRIFICATION RURALE

Rapporteur spécial : Mme Christine LAVARDE

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) :

10 , 16 et T.A. 2

Sénat :

787 (2021-2022)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Les dépenses de la mission s'élèvent à 25,5 milliards d'euros en AE et à 25 milliards d'euros en CP , ce qui représente des augmentations respectives de 49,4 % et 49,6 % à périmètre courant par rapport à l'exécution 2020. L'exécution des crédits de la mission en 2021 s'est ainsi révélée très supérieure aux autorisations budgétaires données en loi de finances initiale (+ 8,8 % pour les AE et 9,1 % pour les CP), en raison de mesures de soutien à l'économie et aux ménages (notamment le versement d'un chèque énergie exceptionnel) et d'un report massif de crédits de 2020 sur 2021 concernant la régénération du réseau ferroviaire.

2. Les ouvertures en cours de gestion ont été accordées dans le cadre des lois de finances rectificatives : au total, le solde net des ouvertures et des annulations opérées en LFR s'est élevé à 590 millions d'euros en AE et à 489,6 millions d'euros en CP . Le programme 174 a été principalement concerné, avec une ouverture de 533 millions d'euros en AE et 436 millions d'euros en CP dans le contexte du versement d'un chèque énergie exceptionnel.

3. La consommation de crédits est inférieure au montant des crédits ouverts, en raison notamment de la sous-consommation des crédits dédiés à la recapitalisation de la SNCF. Toutefois, hors cette recapitalisation, 97 % des crédits ouverts ont été consommés, soit un taux de consommation des crédits ouverts similaire à celui de 2020.

4. Les dépenses fiscales rattachées à titre principal à la mission s'élèvent à 4,7 milliards d'euros. Or, leur pilotage reste insuffisant. Aucune dépense fiscale n'a ainsi fait l'objet d'une évaluation particulière en 2021. Il importe désormais de mieux évaluer les impacts environnementaux et économiques des dépenses fiscales les plus coûteuses rattachées à la mission.

5. Le plafond d'autorisations d'emplois (PAE), fixé pour 2021 à 36 438 ETPT, est respecté. En exécution, il s'est élevé à 36 289 , soit une sous-exécution de 149 ETPT, Depuis 2016, le PAE de la mission a diminué de 14 %, et s'est accompagné d'une déqualification de la structure des emplois du ministère : la sur-exécution des schémas d'emplois est allée de pair avec un moindre recrutement d'agents de catégories A et B que prévu et davantage de recrutements d'agents de catégorie C. Or, le ministère a besoin plus que jamais de personnels qualifiés pour mener la transition écologique en cours et exercer ses missions .

6. La prime de rénovation énergétique , destinée en 2020 aux ménages les plus modestes, a été élargie aux ménages aux revenus « intermédiaires » en 2021, et a disposé de 740 millions d'euros de crédits en loi de finances initiale pour 2021 sur le programme 174. Ces crédits ont été complétés par des crédits du plan de relance (2 milliards d'AE et 915 millions d'euros de CP pour 2021), augmentés en cours d'année de 200 millions d'euros ouverts par la première loi de finances rectificative. Sur ces 1 855 millions d'euros de CP ouverts, seuls 1 298 millions d'euros ont été consommés, soit un taux de consommation des crédits ouverts de 70 % . Cette sous-consommation concerne principalement les crédits portés par le plan de relance, et témoigne à la fois d'un manque d'articulation entre les deux vecteurs budgétaires de la prime et de cohérence du pilotage de l'aide.

7. En légère baisse (- 4 %) en 2021, les deux aides à l'acquisition de véhicules propres présentent des dynamiques très prononcées mais inversées : en forte hausse pour le bonus (+ 66 %) et en nette baisse pour la prime à la conversion (- 70 %). Le rapporteur spécial note que les crédits consacrés aux aides à l'acquisition de véhicules propres demeurent élevés mais, compte-tenu des enjeux de transition écologique du parc de véhicules et de la conjoncture très délicate du secteur automobile, il estime que les soutiens pourraient être encore accentués. À ce titre, il se félicite que le Gouvernement ait décidé de reporter la diminution des barèmes du bonus qui était prévue au 1 er juillet 2022 et ait publié le 22 avril 2022 le décret relatif à l'expérimentation d'un prêt ne portant pas intérêt pour financer l'acquisition d'un véhicule dont les émissions de dioxyde de carbone sont inférieures ou égales à 50g/km.

8. En raison d'une campagne exceptionnelle additionnelle visant à octroyer une aide complémentaire de 100 euros à l'ensemble des 5,8 millions de ménages concernés par le dispositif du chèque énergie , les crédits consacrés au dispositif ont fortement augmenté en 2021 : 1 425 millions d'euros en AE et 1 123 millions d'euros en CP. Comme le laissait présager le niveau trop optimiste affiché en LFI pour 2021, le taux d'usage constaté du chèque énergie s'est révélé nettement inférieur aux prévisions.

9. Suite à la suppression du Compte d'affectation spéciale (CAS) « Transition énergétique » au 1 er janvier 2021, le programme 345 « Service public de l'énergie » porte désormais l'ensemble des crédits relatifs aux charges de service public de l'énergie (CSPE) . À 9,2 milliards d'euros, elles ont progressé de 8,5 % en un an. Les charges au titre de l'année 2021, connues lors de la publication de la délibération de la Commission de régulation de l'énergie au cours du mois de juillet 2022, devraient être bien moindres du fait du niveau élevé des prix de l'électricité sur le marché de gros. Alors que le dispositif de soutien à l'injection de biométhane était manifestement en phase d'emballement, le rapporteur spécial se félicite qu'il ait été ajusté par l'arrêté du 23 novembre 2020. Il regrette cependant qu'une fois encore, malgré les alertes du régulateur, l'État n'ait pas fait preuve d'une réactivité suffisante.

11. Si l'exécution des crédits du CAS (FACE) s'améliore, notamment s'agissant des AE, la sous-consommation des CP ouverts reste manifeste avec un taux d'exécution inférieur à 50 %. Par ailleurs, le rapporteur spécial estime qu'il est regrettable que les modifications réglementaires intervenues à la fin de l'année 2020, n'aient toujours pas permis d'établir une nouvelle définition des zones relevant de l'électrification rurale.

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2021

1. Une augmentation importante des crédits de la mission par rapport à 2020 en loi de finances initiale pour 2021, résultant largement de mesures de périmètre

En loi de finances initiale pour 2021, la mission « Écologie, développement et mobilité durables » bénéficiait de 23,4 milliards d'euros d'autorisations d'engagement (AE) et de 22,9 milliards d'euros de crédits de paiement (CP), soit respectivement 8,2 milliards d'euros d'AE et 7,5 milliards d'euros de CP supplémentaires par rapport aux prévisions faites en loi de finances initiale pour 2020.

Cette hausse des crédits apparaissait toutefois très artificielle, car elle résultait de nombreux changements de périmètre :

- avec la suppression du CAS « Transition énergétique », les crédits concernés (près de 7 milliards d'euros) ont été inscrits sur le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » et sur le programme 345 « Service public de l'énergie » ; le programme 174 a également reçu les crédits dédiés à la prime de rénovation énergétique, suite à la transformation définitive du crédit d'impôt pour la transition énergétique (+ 350 millions d'euros en AE et CP) ;

- la suppression du CAS « Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs » a entraîné la budgétisation des crédits afférents sur le programme 203 « Infrastructures et services de transport » (311 millions d'euros en AE et 290 millions d'euros en CP) ;

- la budgétisation des crédits du fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit fonds Barnier, sur le programme 181 « Prévention des risques » a conduit à une augmentation des crédits du programme de 415 millions d'euros en AE et de 205 millions d'euros en CP.

En exécution , les dépenses de la mission s'élèvent à 25,5 milliards d'euros en AE et à 25 milliards d'euros en CP , ce qui représente des augmentations respectives de 49,4 % et 49,6 % à périmètre courant par rapport à l'exécution 2020.

Évolution des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » en 2021, y compris fonds de concours et attributions de produits

(en millions d'euros)

Programme

2020

2021

Exécution
/prévision 2021

Exécution 2021/2020

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

En volume

En %

En volume

En %

203 «Infrastructures et services de transport »

AE

5481

6569,2

6025,8

8069,6

2043,8

33,9%

1500,4

22,8%

CP

5716,4

5909,1

5847,6

7749,8

1902,2

32,5%

1840,7

31,2%

205 «Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture »

AE

165,8

154,4

163,5

167

3,5

2,1%

12,6

8,2%

CP

167

159,9

168

165,7

- 2,3

- 1,4%

5,8

3,6%

113 «Paysages, eau et biodiversité»

AE

205,1

196,3

240,2

229,2

- 11

- 4,6%

32,9

16,8%

CP

211,3

190,6

240,2

240,8

0,6

0,2%

50,2

26,3%

159 «Information géographique et cartographique»

AE

487,4

500,7

481,9

477,5

- 4,4

- 0,9%

- 23,2

- 4,6%

CP

487,4

501,1

481,9

477,7

- 4,2

- 0,9%

- 23,4

- 4,7%

181 «Prévention des risques»

AE

830,3

795,7

1244,1

1088

- 156,1

- 12,5%

292,3

36,7%

CP

830,3

804,7

997,3

923,6

- 73,7

- 7,4%

118,9

14,8%

174 «Énergie, climat et après-mines»

AE

2488,6

2916

2552

2782,4

230,4

9,0%

- 133,6

- 4,6%

CP

2398,8

2828,3

2464,6

2731,9

267,3

10,8%

-96,4

- 3,4%

345 « Service public de l'énergie »

AE

2596,2

2605,4

9149,4

9149,4

0

0,0%

6544

251,2%

CP

2673,2

2974,1

9149,4

9149,4

0

0,0%

6175,3

207,6%

217 «Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables»

AE

2569,7

2918,6

2860,8

2827,4

- 33,4

- 1,2%

- 91,2

- 3,1%

CP

2553,1

2948,8

2881,1

2872,2

- 8,9

- 0,3%

- 76,6

- 2,6%

355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État »

AE

408,8

400

692

688,8

- 3,2

- 0,5%

288,8

72,2%

CP

408,8

400

692

688,8

- 3,2

- 0,5%

288,8

72,2%

Total

AE

15 233

17 056,3

23 409,7

25 479,3

2069,6

8,8%

8423

49,4%

CP

15 446,3

16 716,6

22 922,1

24 999,9

2077,8

9,1%

8283,3

49,6%

AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. Prévision : prévision en loi de finances initiale, y compris les prévisions de fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP). Exécution : consommation constatée dans le projet de loi de règlement.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

L'exécution des crédits de la mission en 2021 s'est ainsi révélée très supérieure aux prévisions réalisées en loi de finances initiale (+ 8,8 % pour les AE et 9,1 % pour les CP), en raison de mesures de soutien à l'économie et aux ménages (cf. infra ).

L'écart entre les prévisions et l'exécution est principalement imputé sur le programme 203 « Infrastructures et services de transports » et s'explique par un report de crédits massif de 4,5 milliards d'euros en AE et de 4,4 milliards d'euros en CP. Ce report de crédit s'explique essentiellement par le concours de 4,05 milliards d'euros , décidé dans le cadre du plan de relance ferroviaire et dédié à financer le programme de régénération du réseau. Ces crédits, votés en 2020, ont transité par la mission « Plan d'urgence » puis par le CAS « Participations financières de l'État » avant d'être versés à la SNCF qui les a elle-même reversés au fonds de concours dédié à financer la régénération du réseau ferroviaire qui abonde le programme 203. Ces 4,05 milliards d'euros doivent être versés à SNCF Réseau de façon échelonnée sous forme de subventions d'investissement. Le premier versement, pour 1 645 millions d'euros, a été réalisé en février 2021. Aussi, ces 4,05 milliards d'euros de crédits de fond de concours ont-ils fait l'objet d'un report intégral sur l'exercice 2021. Suite au versement de la première tranche en 2021, un nouveau report de 2 405 millions d'euros a été réalisé sur l'exercice 2022.

Le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » présente également une consommation d'AE et de CP supérieure aux crédits votés respectivement de près de 230 et 267 millions d'euros (soit une augmentation de près de 10 %), dans le contexte du versement d'un chèque énergie exceptionnel de 100 euros en fin d'année 2021 pour un coût de 560 millions d'euros afin de répondre à la flambée des prix de l'énergie.

Certains programmes enregistrent quant à eux une sous-exécution des crédits votés. S'agissant du programme 181, près de 924 millions d'euros ont été consommés en 2021, soit près de 15 % de plus qu'en 2020 - mais 7,5 % de moins que les prévisions inscrites en loi de finances initiale (cf. infra ).

2. Des ouvertures de crédits importantes en cours d'année, afin de soutenir l'activité économique et les ménages

Les crédits de la mission s'élèvent en exécution à 25,5 milliards d'euros en AE et à 25 milliards d'euros en CP , soit 2,1 milliards d'euros au-delà des crédits votés en loi de finances initiale.

L'exercice 2021 de la présente mission a en effet été marqué par des ouvertures de crédits importantes en loi de finances rectificative , finançant des soutiens à l'économie et aux ménages (cf. infra , chèque énergie exceptionnel de 100 euros, mais aussi compensation d'une part des pertes de recettes de l'AFITF). Au total, ce sont plus de 28 milliards d'euros de CP qui ont été ouverts sur la mission pour l'année 2021.

Les reports de crédits de 2020 apparaissent très importants (4,5 milliards d'euros en CP), et proviennent principalement de fonds de concours et du programme 203. En fonds de concours, il s'agit principalement des crédits liés à la recapitalisation de la SNCF, qui ont été rattachés à la fin de l'année 2020 et n'ont pas été dépensés (4 milliards d'euros).

Les ouvertures en cours de gestion ont été accordées dans le cadre des lois de finances rectificatives : au total, le solde net des ouvertures et des annulations opérées en LFR s'est élevé à 590 millions d'euros en AE et à 489,6 millions d'euros en CP . Si ce niveau d'ouvertures apparaît moins important qu'en 2020, il reste très supérieur à celui constaté les années précédentes.

Les ouvertures de crédits ont principalement porté sur :

- le programme 174, qui a bénéficié d'une ouverture de 533 millions d'euros en AE et 436 millions d'euros en CP dans le contexte du versement d'un chèque énergie exceptionnel, décidé en décembre 2021 ;

- le programme 203, avec une ouverture de 95 millions d'euros en AE et en CP principalement afin de financer une dotation exceptionnelle à l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) en compensation de son déficit de recettes ;

- le programme 205, pour financer une aide exceptionnelle de 45 millions d'euros destinée à la compagnie Britanny Ferries .

Ouverture et consommation des crédits de paiement
sur la mission en 2021

(en millions d'euros)

Source : Cour des comptes

Outre les annulations de réserve de précaution, les annulations ont principalement porté sur les programmes 113, 174 et 181.

La consommation de crédits est toutefois inférieure au montant des crédits ouverts : le taux de consommation des crédits ouverts s'élève à 82 % en AE et à 88 % en CP.

Cette sous-exécution résulte principalement de la sous-consommation des crédits sur fonds de concours (2,7 milliards d'euros de fonds de concours n'ont pas été consommés), notamment des crédits dédiés à la recapitalisation de la SNCF (2,4 milliards d'euros sont programmés pour des années ultérieures, sur les 4 milliards d'euros prévus).

D'après la Cour des comptes, si l'on neutralise la sous-consommation des crédits sur fonds de concours, 97 % des crédits ouverts ont été consommés, soit un taux de consommation des crédits ouverts similaire à celui de 2019 et de 2020 (hors recapitalisation de la SNCF).

Ainsi, au total, le rapporteur considère que la gestion des crédits de la mission a été maîtrisée, et que si le taux de consommation baisse légèrement, il reste élevé.

3. Une mission peu concernée par des mesures de régulation budgétaire en 2021

Le taux de mise en réserve initiale des crédits de la mission a été relativement faible : il s'est élevé à 4 % hors titre 2, contre 3 % en 2020 et à 0,5 % pour le titre 2 - certaines lignes budgétaires ont été exonérées de réserves : c'est notamment les cas pour les crédits du fonds Barnier, et les dépenses budgétées en 2020 sur les CAS « Transition énergétique » et « SNTCV ».

Comme en 2020, la quasi-totalité de la réserve a été annulée ou libérée en cours d'année. Ainsi, 380 millions d'euros en CP hors titre 2 ont été gelés en début d'année. 73 millions d'euros de CP ont été annulés, et 319 millions d'euros ont été libérés, pour financer notamment une partie du chèque énergie exceptionnel, le congrès de l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature et de ses ressources (UICN).

Ainsi, comme en 2020, les crédits réservés n'ont pas fait l'objet d'une annulation intégrale au cours de la gestion 2021.

4. Les dépenses fiscales, dont le coût s'élève en 2021 à 4,7 milliards d'euros, nécessitent un pilotage plus resserré

Les dépenses fiscales rattachées à titre principal à la mission s'élèvent à 4,69 milliards d'euros . L'année 2021 marque le rattachement à la présente mission d'une dépense fiscale auparavant rattachée à la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », le taux réduit de taxe intérieure de consommation sur le gazole non routier sous condition d'emploi hors secteur agricole, qui représentait 1,3 milliard d'euros en 2020.

Après neutralisation de ce rattachement, le total du coût des dépenses fiscales en 2021 apparaît en baisse de 617 millions d'euros par rapport à 2020.

Ainsi, les dépenses fiscales représentent près du quart des crédits budgétaires de la mission , et près du tiers si l'on neutralise les crédits auparavant retracés au sein du compte d'affectation spéciale « Transition énergétique », désormais portés par la mission.

Ces dépenses fiscales sont majoritairement concentrées sur deux programmes, le programme 174 (56 %) et le programme 203 (41 %).

Évolution des principales dépenses fiscales
rattachées à la mission entre 2020 et 2021

(en millions d'euros)

Dépenses fiscales

2020

Chiffrage initial 2021

Chiffrage actualisé 2021

Évolution 2021 actualisé / 2020

Tarif réduit (remboursement) pour le gazole utilisé comme carburant par les véhicules routiers de transport de marchandises d'au moins 7,5 tonnes

1 510

1 274

1 408

-102

Tarif réduit pour le gaz naturel et le méthane utilisés dans les installations grandes consommatrices d'énergie et soumises au régime des quotas d'émission de gaz à effet de serre du dispositif ETS

437

467

467

+30

Tarif réduit du gazole non routier autre que celui utilisé pour les usages agricoles

1 040

600

1 150

+110

Tarif réduit pour le gazole utilisé par les exploitants de transport public routier en commun des voyageurs

200

225

197

-3

CITE

1 084

390

300

-784

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les deux principales dépenses fiscales de la mission sont le tarif réduit (remboursement) pour le gazole utilisé comme carburant par les véhicules routiers de transport de marchandises d'au moins 7,5 tonnes (1,4 milliard d'euros) et le tarif réduit du gazole non routier autre que celui utilisé pour les usages agricoles (1,15 milliard d'euros), représentant la moitié du coût des dépenses fiscales en 2021.

L'un des faits marquants est la hausse du coût de la dépense fiscale relative au gazole non routier (GNR) autre que celui utilisé pour les usages agricoles, qui passe de 600 millions d'euros estimé initialement pour 2021 à 1,15 milliard d'euros. Alors que l'article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 prévoyait la suppression de cette dépense fiscale au 1 er juillet 2021, la loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021 l'a repoussée au 1 er janvier 2023, ce qui explique l'écart entre la prévision du coût pour 2021 et le chiffrage actualisé . Compte tenu des difficultés rencontrées par les secteurs concernés, en particulier celui du BTP, ce nouveau report apparaît légitime dans les conditions actuelles. Toutefois, la lisibilité de l'action publique et la sécurité juridique nécessaires aux acteurs économiques ne sont pas gagnantes dans cette perpétuelle procrastination fiscale.

Il est également à noter la baisse du coût du CITE , qui s'éteint progressivement depuis le 31 décembre 2020. La loi de finances pour 2020 a en effet engagé la réforme du CITE : en 2020, le dispositif était maintenu sous la forme d'un crédit d'impôt pour les ménages aux revenus « intermédiaires », tandis que pour les ménages modestes, cette aide a été versée sous forme de prime. En 2021, les ménages aux revenus « intermédiaires » ont à leur tour pu bénéficier de la prime de rénovation énergétique. En conséquence, le coût du CITE diminue, et le montant afférent aux travaux effectués les années précédentes s'élève à 300 millions d'euros en 2021 et est estimé à 150 millions d'euros pour 2022 . Cette prime de rénovation énergétique est désormais budgétisée sur le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » (cf. infra ).

En tout état de cause, le pilotage de ces dépenses fiscales reste insuffisant. Aucune dépense fiscale n'a fait l'objet d'une évaluation particulière en 2021. Or, la Cour des comptes relève que 5 dépenses fiscales ne sont pas chiffrées, tandis que 22 concernent moins de 300 bénéficiaires.

Le projet de loi de finances pour 2021 a toutefois été élaboré à partir d'une démarche de construction d'un « budget vert » , s'appuyant sur les travaux de la mission conjointe de l'Inspection générale des finances et du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), qui a proposé une méthode en septembre 2019 1 ( * ) afin d'identifier et de classer les dépenses budgétaires et instruments fiscaux selon leurs impacts environnementaux, qu'ils soient positifs ou négatifs. Un jaune budgétaire, le « rapport sur l'impact environnemental du budget de l'État », a été annexé au même projet de loi, et consacre une partie à la fiscalité environnementale, en évaluant les impacts sur les ménages et les entreprises.

Ainsi, 48 % des dépenses budgétaires et fiscales de la présente mission sont favorables à l'environnement (18 milliards d'euros 2 ( * ) ) et 4,9 milliards d'euros sont défavorables à l'environnement (soit la moitié de l'ensemble des dépenses défavorables du budget de l'État).

Plus précisément, les dépenses fiscales défavorables à l'environnement représentent 2,6 milliards d'euros en prévision pour 2021, et les dépenses fiscales favorables 1,2 milliard d'euros.

Le dispositif de remboursement de TICPE protège par exemple principalement le secteur des transports , en ciblant les entreprises qui utilisent beaucoup de carburants, comme le transport routier ou encore le transport routier en commun de voyageurs, afin de préserver la compétitivité des entreprises françaises de ces secteurs face à la concurrence internationale.

Toutefois, le rapporteur spécial partage le constat du CGEDD, qui, dans une étude récente, affirmait : « apporter une aide à des secteurs peut s'avérer légitime, mais il serait plus efficace que cette aide transite par d'autres canaux (qu'une dépense fiscale) : ainsi, elle ne jouerait pas pour les entreprises de ces secteurs comme une désincitation à limiter leur consommation de carburant, en raison des exonérations qui s'appliquent » 3 ( * ) . Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), dans son rapport sur la fiscalité environnementale 4 ( * ) , porte le même constat et propose que les dépenses fiscales attachées à la TICPE soient réorientées vers des objectifs favorables à l'environnement.

Le rapporteur spécial partage donc la recommandation de la Cour des comptes, qui propose de mieux évaluer les impacts environnementaux et économiques des dépenses fiscales les plus coûteuses rattachées à la mission .

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

A. LES ACTIONS DU PROGRAMME 174 SONT DE PLUS EN PLUS DIVERSIFIÉES, ET LE SUIVI DE L'EXÉCUTION DE SES CRÉDITS, PARTAGÉS EN PARTIE AVEC LE PLAN DE RELANCE, SE COMPLEXIFIE

Le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » a enregistré une nouvelle fois d'importantes mesures de périmètre en loi de finances initiale pour 2021. Ainsi, dans le cadre de la disparition du CAS « Transition énergétique » , le programme 174 s'est-il vu attribuer certains des crédits auparavant portés par ce CAS mais aussi par le programme 345, le tout pour environ 12 millions d'euros en CP. Il s'agit des crédits relatifs aux études relatives aux énergies renouvelables, à l'organisation des consultations publiques, au développement des interconnexions, au médiateur de l'énergie ainsi qu'aux coûts d'ingénierie et de traitement des dossiers contentieux liés à l'ancien mécanisme de contribution au service public de l'énergie.

Comme pour d'autres programmes de la mission, l'articulation des crédits du programme 174 avec les crédits du programme 362 « Écologie » de la mission « Plan de relance » pose question : les crédits de la prime de rénovation énergétique sont par exemple portés à la fois par le présent programme et par le programme 362, alors qu'il s'agit du même dispositif ; il en va de même pour le financement des aides au nouvellement du parc automobile. Ce double portage budgétaire complexifie le suivi de l'exécution des crédits et l'évaluation de l'efficacité des dispositifs .

Les dépenses du programme passent de 2,8 milliards d'euros en CP en 2020 à 2,7 milliards d'euros (- 3,4 %, - 96 ,4 millions d'euros). Toutefois, alors que les prévisions s'élevaient en 2021 à 2,5 milliards d'euros de CP, l'exécution dépasse de 11 % ces prévisions, pour atteindre 2,7 milliards d'euros.

Cette diminution des crédits par rapport à 2020 découle principalement d'une baisse importante des crédits dédiés à l'acquisition de véhicules propres (- 752 millions d'euros), qui apparaît supérieure à la hausse des crédits consacrés au chèque énergie , qui a bénéficié d'un abondement de crédits en LFR (+ 435 millions d'euros), et de la prime de rénovation énergétique (+ 255 millions d'euros par rapport à 2020).

1. Une exécution des crédits alloués à la prime de rénovation énergétique inférieure aux prévisions : un pilotage du dispositif à revoir

L'article 15 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 a créé la prime de transition énergétique en remplacement du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) et des aides « Habiter mieux agilité » de l'Agence nationale de l'Habitat (ANAH).

En 2020, cette prime, dénommée « MaPrimeRénov' » s'est adressée aux ménages les plus modestes. En 2021, les ménages aux revenus « intermédiaires » qui continuaient en 2020 à bénéficier du CITE ont été éligibles à la prime de rénovation. La loi de finances initiales pour 2021 prévoyait donc 740 millions d'euros de crédits budgétaires (en AE et CP) en 2021 pour la prime de rénovation énergétique sur le programme 174.

De nouveaux bénéficiaires de la prime ont été inclus dans le dispositif, avec un élargissement aux propriétaires bailleurs et aux copropriétés, ainsi qu'aux ménages aux revenus élevés. Ces crédits ont donc été complétés par d'autres crédits alloués sur la mission « Plan de relance » : 2 milliards d'euros d'AE sur deux ans sont ainsi prévus sur l'action 01 « Rénovation énergétique » du programme n° 362 et 915 millions d'euros de crédits de paiement pour 2021.

En outre, 200 millions d'euros supplémentaires ont été ouverts en CP par la première loi de finances rectificative 5 ( * ) pour 2021, afin de financer l'accélération des décaissements du dispositif.

Au total, ce sont donc 740 millions d'euros sur le programme 174 et 1 115 millions d'euros sur le programme 362 en CP qui ont été ouverts au bénéfice de la prime de rénovation énergétique en 2021.

Sur ces 1 855 millions d'euros de CP ouverts, seuls 1 298 millions d'euros ont été consommés, soit un taux de consommation des crédits ouverts de 70 %.

Crédits ouverts et consommés en 2021 sur le dispositif de la prime
de rénovation énergétique (en CP)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La sous-consommation est manifeste s'agissant des crédits portés par le programme 362 de la mission « Plan de relance » et témoigne à la fois d'un manque d'articulation entre les deux vecteurs budgétaires de la prime et de cohérence du pilotage de l'aide.

D'après la Cour des comptes, la convention de gestion entre l'État et l'ANAH signée le 20 avril 2021 prévoyait que l'élargissement du public bénéficiaire serait financée par les crédits prévus sur le programme 362 de la mission « Plan de relance », tandis que le programme 174 continuait de financer les dépenses du périmètre 2020 de la prime (à savoir les ménages modestes). Les crédits du plan de relance pouvaient être destinés aux anciens bénéficiaires en dernier recours.

Or, « fin 2021, il est apparu que cette clé de répartition pouvait ne pas avoir été respectée. Les crédits inscrits sur le programme 174 n'ont pas suffi à satisfaire le besoin des premiers bénéficiaires, nécessitant un appel insuffisamment retracé aux crédits du programme 362 » 6 ( * ) .

La Cour indique que 83 % des crédits consommés en 2021 ont été destinés aux publics bénéficiaires en 2020, les ménages modestes et très modestes, soit l'intégralité des crédits du programme 174 et la moitié des crédits du programme 362.

De surcroît, les crédits prévus sur le programme 362 pour les « nouveaux » bénéficiaires de la prime en 2021 ont été moins consommés qu'initialement prévu.

Ainsi, compte tenu de la sous-exécution des crédits de la prime de rénovation énergétique, qui contraste avec les besoins importants en la matière pour atteindre nos objectifs en matière de transition énergétique, le rapporteur spécial souhaite que les objectifs assignés à la prime soient rapidement redéfinis, tant en termes de publics bénéficiaires qu'en termes de moyens alloués.

Il importe enfin qu'une évaluation de l'efficience du dispositif puisse être fournie régulièrement au Parlement, et qu'un meilleur suivi de l'exécution des crédits puisse être proposé dans les documents budgétaires.

2. Répartis entre les missions « Écologie » et « Plan de relance », les crédits dédiés aux dispositifs d'aide à l'acquisition de véhicules propres ont diminué de 4 % en 2021

Les crédits consacrés au financement des aides à l'achat ou à la location de véhicules neufs ou d'occasion émettant peu de CO 2 (bonus) ainsi qu'à la mise au rebut de véhicules fortement émetteurs de CO 2 (prime à la conversion) sont retracés à l'action 03 « Aides à l'acquisition de véhicules propres » du programme 174. En 2021 et en 2022, une partie des crédits ouverts à l'action 07 « Infrastructures de mobilités vertes » de la mission « Plan de relance » est également consacrée au financement de ces aides.

a) L'évolution des crédits consacrés au bonus écologique et à la prime à la conversion présente des tendances marquées et inversées

En 2021, les crédits consommés sur le programme 174 en faveur des aides à l'acquisition de véhicules propres se sont élevés à 506 millions d'euros en AE et 505 millions d'euros en CP. À ces dépenses, il convient d'ajouter les crédits, plus conséquents, consacrés aux mêmes dispositifs, portés par le programme 362 « Écologie » de la mission « Plan de relance ».

L'évolution des dépenses (CP) consacrées aux aides
à l'acquisition de véhicules propres entre 2017 et 2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Ainsi, au total, les crédits consacrés aux aides à l'acquisition de véhicules propres en 2021 se sont élevés à 1,2 milliard d'euros , en recul de 4 % par rapport à 2020.

Répartition des dépenses consommées (CP) en 2021
entre les programmes 174 et 362

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les dynamiques du bonus, en forte hausse (+ 66,2 %) et de la prime, en baisse significative (- 70,2 %), sont inversées .

Le rapporteur spécial note que les crédits consacrés aux aides à l'acquisition de véhicules propres demeurent élevés néanmoins, compte-tenu des enjeux de transition écologique du parc de véhicules et de la conjoncture très délicate du secteur automobile, il estime que les soutiens pourraient être encore accentués . À ce titre, il se félicite que le Gouvernement ait décidé très récemment 7 ( * ) de reporter la diminution des barèmes du bonus qui était prévue au 1 er juillet 2022. Une ouverture de 400 millions d'euros de crédits complémentaires est ainsi proposée par le Gouvernement en 2022 dans le cadre du projet de loi de finances rectificative actuellement en discussion au Parlement. Le rapporteur spécial note cependant que 55 millions d'euros de crédits avaient été annulés sur le programme 174 à l'occasion du décret d'avance n° 2022-512 du 7 avril 2022.

L'article 107 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, prévoit l'expérimentation d'un prêt à taux zéro pour l'acquisition d'un véhicule électrique ou hybride. Cette expérimentation doit démarrer à compter du 1 er janvier 2023 et pour une durée de deux ans. Le décret n° 2022-615 du 22 avril 2022 8 ( * ) encadrera le dispositif.

b) Malgré la baisse de son montant, le nombre de bonus délivrés et les crédits consacrés au dispositif ont fortement augmenté en 2021

Le 1 er juillet 2021, le montant du bonus a été réduit de  1 000 euros . Malgré cette décision, l'engouement pour le dispositif ne s'est pas démenti et le nombre de bonus délivré n'a cessé de croître (+ 131 % en un an). En 2021, 1 021 millions d'euros d'AE et 1 020 millions de CP ont été consommés pour financer la délivrance de bonus, soit des hausses de 67,1 % et 66,1 % par rapport à 2020 .

Le rapporteur spécial a noté qu'en 2021, le bonus a été étendu aux vélos cargo et renforcé pour les véhicules utilitaires légers (VUL). Il constate néanmoins l'échec manifeste du bonus destiné à l'acquisition de véhicules lourds à propulsion électrique ou hydrogène . En dépit de son engagement à le faire, le Gouvernement n'a toujours pas ajusté ce dispositif actuellement inopérant .

Nombre de véhicules ayant fait l'objet d'un bonus
entre 2017 et 2021

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

c) Le dispositif ayant été rendu plus restrictif, le nombre de primes délivrées et les crédits qui lui ont été consacrés en 2021 ont considérablement baissé

Le 1 er juillet 2021, les critères d'attribution de la prime à la conversion ont été rendus plus restrictifs . En effet, depuis cette date, les véhicules Crit'Air 2 sont exclus du dispositif de la prime et le plafond d'émissions de CO2 applicable à un véhicule neuf a été abaissé à 132 g/km. Ainsi, en 2021, le nombre de primes délivrées a-t-il poursuivi sa décrue pour s'établir à 117 000. Les crédits consacrés au dispositif se sont élevés à 192 millions d'euros, soit un montant plus de trois fois moins important qu'en 2020 . Le rapporteur spécial a noté qu'en 2021 la prime a été étendue aux vélos électriques et renforcée pour les VUL.

L'évolution du nombre de primes à la conversion
distribuées entre 2015 et 2021

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Du 1 er janvier 2018 au 31 décembre 2020, un peu plus de 910 000 primes ont été versées.

3. Toujours marqué par un taux d'usage réel plus faible que les prévisions, le chèque énergie a été complété par un dispositif exceptionnel en réponse à la hausse des prix de l'énergie

En LFI pour 2021, les crédits prévus au titre du dispositif du chèque énergie s'élevaient à 812,2 millions d'euros en AE 9 ( * ) et 714,6 millions d'euros en CP. Cependant, la hausse des prix de l'énergie qui est intervenue au cours du second semestre 2021, en particulier s'agissant du gaz, a conduit le Gouvernement à prévoir une campagne exceptionnelle additionnelle visant à octroyer une aide complémentaire de 100 euros à l'ensemble des 5,8 millions de ménages concernés par le dispositif du chèque énergie. Cette campagne exceptionnelle a conduit à engager 560 millions d'euros d'AE supplémentaires en fin d'année 2021.

Ainsi, au total, en 2021, 1 425 millions d'euros d'AE et 1 123 millions d'euros de CP ont été exécutés pour financer le dispositif, soit des hausses respectives de 72,3 % et de 63,5 %.

Évolution des crédits consacrés au chèque énergie entre 2020 et 2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La prévision du taux d'usage global de la campagne 2021 avait été fixée à 87,5 %. En réalité, comme ce fut le cas en 2020, ce taux s'est révélé bien plus bas : 81,8 % . Dans son rapport budgétaire sur le projet de loi de finances initiale pour 2021, le rapporteur spécial avait souligné que la prévision de taux d'usage affichée lui paraissait résolument optimiste en comparaison des résultats constatés au cours des années passées. Il considère néanmoins que l'administration doit développer les mécanismes susceptibles d'accroître ce taux , au premier rang desquels le dispositif dit de pré-affectation du chèque énergie.

Les dépenses au titre du chèque énergie en 2020 ont permis de rembourser des titres de la campagne 2020 pour 680 millions d'euros et des titres de la campagne 2020 pour 52 millions d'euros. Ils ont également permis d'accompagner 55 000 logements au titre de l'aide spécifique aux résidences sociales pour 6,3 millions d'euros, contre 9,7 millions d'euros en 2020.

B. DANS UN CONTEXTE DE BAISSE CONTINUE DU PLAFOND D'EMPLOIS, LA QUESTION DE LA DÉQUALIFICATION DES EMPLOIS DU MINISTÈRE SE POSE DE NOUVEAU

Les dépenses de personnel ( titre 2 ), qui représentent 11 % des CP exécutés de la mission (2,69 milliards d'euros), sont réparties entre le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement durable et de la mer » et le programme 181 « Prévention des risques », auquel sont rattachées les dépenses de personnel de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). La quasi-totalité des crédits et des emplois sont imputés sur le programme 217 (2,65 millions d'euros). Les crédits de titre 2 représentent d'ailleurs 92 % des CP du programme 217.

Le plafond d'autorisations d'emplois (PAE), fixé pour 2021 à 36 438  ETPT, est respecté. En exécution, il s'est élevé à 36 289 , soit une sous-exécution de 149 ETPT, contre une sous-exécution de 151 ETPT en 2020.

Depuis 2016, le PAE de la mission a diminué de 14 %, passant de 42 257 ETPT à 36 289 ETPT.

Exécution du plafond d'emplois de la mission entre 2017 et 2021

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le plafond d'emplois de la mission a donc connu une diminution de 4 799 ETPT ces cinq dernières années. La Cour des comptes rappelle que la diminution du plafond d'emplois s'élève même à près de 49 % depuis 2008, année où le plafond d'emplois atteignait 73 986 ETPT, une diminution allant certes de pair avec les modifications du périmètre d'intervention du pôle ministériel.

Par ailleurs, si le schéma d'emplois a été ajusté en cours de gestion, passant de - 779 ETP à - 720 ETP, il a également été respecté : l'exécution atteint - 744 équivalents temps plein (ETP), soit une sur-exécution de 24 ETP (contre 13 en 2020).

Le rapporteur spécial partage cependant une nouvelle fois les inquiétudes formulées par la Cour des comptes 10 ( * ) s'agissant de la déqualification de la structure des emplois du ministère .

En effet, depuis 2014, la sur-exécution des schémas d'emplois est allée de pair avec un moindre recrutement d'agents de catégorie A que prévu et davantage de recrutements d'agents de catégories B et C. Si ce procédé permet une moindre consommation de crédits de personnel, il participe d'un processus de « dépyramidage » ou de déqualification dont les effets en matière de perte de compétences sont particulièrement dommageables en termes de gestion des ressources humaines.

Si cette tendance était moins marquée en 2019, elle a repris en 2020 et se poursuit en 2021 : la Cour estime ainsi que depuis 2014, 681 emplois de catégorie A ont été détruits au-delà des cibles pour « créer » 1 167  emplois de catégorie C. Or, le ministère a besoin plus que jamais de personnels qualifiés pour mener la transition écologique en cours et exercer ses missions . La Cour des comptes recommande ainsi la mise en place d'un plan ministériel de gestion prévisionnelle des ressources humaines pour remédier à ce problème. Cette démarche a été engagée en 2021 et est toujours en cours.

C. LE PROGRAMME 113 « PAYSAGES, EAU ET BIODIVERSITÉ » EST MARQUÉ EN GESTION PAR LES CONSÉQUENCES DU DOUBLE REPORT DU CONGRÈS MONDIAL POUR LA NATURE

240,8 millions d'euros de CP ont été consommés en 2021 sur le programme 113, soit une augmentation de 26 % par rapport à 2020 (+ 50 millions d'euros) . Cette augmentation résulte principalement de :

- l'augmentation de la subvention pour charges de service public de l'Office français de la biodiversité (+ 10 millions d'euros) ;

- la budgétisation en loi de finances initiale pour 2021 de crédits consacrés à des mesures nouvelles (domaine public maritime, renforcement des aires protégées, dotation aux parcs nationaux, renforcement des missions d'intérêt général menées par l'Office national des forêts, bien-être animal).

Toutefois, les CP consommés sont inférieurs de près de 7 % aux crédits ouverts en 2021 . Près de 18,4 millions d'euros n'ont pas été consommés en 2021.

Exécution budgétaire du programme 113 en crédits de paiement
pour l'exercice 2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des données de Chorus

Cette sous-consommation résulte des difficultés de financement rencontrées en gestion s'agissant du congrès mondial de la nature de l'UICN, qui s'est tenu à Marseille en septembre 2021, après deux reports en raison de la crise sanitaire. D'après la Cour des comptes, le coût final du congrès s'est élevé à 24,2 millions d'euros, contre 20 millions d'euros prévus initialement et 17 millions de financement arrêtés.

D'après le rapport annuel de performances annexé à la présente mission, un dégel de 7,6 millions d'euros de la réserve de précaution (dont le montant s'élevait à 8,2 millions d'euros initialement) a eu lieu en cours d'exercice afin de permettre au programme de couvrir les besoins en AE pour l'organisation du congrès. Un surgel a été opéré à hauteur de 2,3 millions d'euros en AE et de 12,9 millions d'euros en CP en novembre, annulé par la loi de finances rectificative du 1 er décembre 2021.

D. LE PROGRAMME 181 « PRÉVENTION DES RISQUES » EST MARQUÉ EN 2021 PAR L'INTÉGRATION DES CRÉDITS DU FONDS BARNIER

En 2021, 1 088 millions d'euros d'AE et 923,6 millions d'euros de CP ont été consommés sur le programme, soit une augmentation de 292 millions d'euros en AE et 119 millions d'euros en CP par rapport à 2020 (+ 37 % et + 15 % respectivement).

La loi de finances pour 2021 a en effet intégré le budget du Fonds de prévention des risques naturels majeurs au programme 181. Les crédits alloués au fonds en 2021 s'élevaient initialement à 205 millions d'euros, en AE et en CP . Toutefois, 50 millions d'euros d'AE supplémentaires ont été budgétés pour faire face aux suites de la tempête Alex dans les Alpes-Maritimes d'octobre 2020 .

Par ailleurs, il a été décidé de créer une dotation supplémentaire en AE afin de couvrir les opérations ayant déjà fait l'objet d'une délégation de crédits aux services déconcentrés par arrêté interministériel, mais n'ayant pas encore été concrétisée par un acte valant engagement de l'État. Ainsi, une dotation de 160 millions d'euros d'AE complémentaires a donc été votée en loi de finances pour 2021 .

Les AE prévues en loi de finances initiale pour 2021 pour le fonds « Barnier » s'élevaient à 415 millions d'euros, et les CP à 205 millions d'euros. En exécution, les AE s'élèvent à 300 millions d'euros et en CP, à 162,1 millions d'euros, soit des taux d'exécution respectifs de 72 % et 79 %.

D'après le rapport annuel de performances, les AE « de base » (hors AE complémentaires) ont atteint 256 millions d'euros, soit 100 % de leur budgétisation initiale (l'écart avec la prévision de 205 millions d'euros en AE « de base » ayant été financé par fongibilité interne dans le programme) témoignant d'un rythme soutenu pour cette première exécution de la budgétisation du fonds. Toutefois, seule la moitié des AE complémentaires a été consommée (82 millions d'euros). S'agissant des CP, le taux de consommation apparaît en hausse par rapport à la moyenne des décaissements sur la période 2015-2020. Le solde des CP non consommés (43 millions d'euros) fait l'objet d'un report en 2022.

E. LES CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE : LE PROGRAMME 345 « SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE » A INTÉGRÉ LES CRÉDITS PORTÉS PAR LE FEU CAS « TRANSITION ÉNERGÉTIQUE »

Alors qu'en 2020, le périmètre du programme 345 avait déjà fortement évolué du fait du transfert vers le programme 174 des crédits du chèque énergie, il a de nouveau été bouleversé en 2021 suite à la suppression du compte d'affectation spéciale (CAS) « Transition énergétique » (TE). En effet, jusqu'en 2020, les charges de service public de l'énergie étaient portées à la fois par le programme 345 et par le CAS TE . Celui-ci ayant été supprimé par la loi de finances pour 2020 à compter du 1 er janvier 2021, c'est désormais le programme 345 qui retrace l'ensemble de ces dépenses . À compter du 1 er janvier 2021, le programme 345 retrace ainsi les crédits autrefois portés par les programmes 764 « Soutien à la transition énergétique » et 765 « Engagements financiers liés à la transition énergétique » du CAS TE.

En conséquence, la maquette budgétaire du programme 345 a été profondément revue. Elle s'articule désormais autour des sept actions suivantes :

- Action 09 « Soutien aux énergies renouvelables électriques en métropole » ;

- Action 10 « Soutien à l'injection de biométhane » ;

- Action 11 « Soutien dans les zones non interconnectées (ZNI) au réseau métropolitain » ;

- Action 12 « Soutien à la cogénération au gaz naturel et autres moyens thermiques » ;

- Action 13 « Soutien aux effacements de consommation » ;

- Action 14 « Dispositions sociales pour les consommateurs en situation de précarité » ;

- Action 15 « Frais divers ».

En 2021, les crédits consommés, en AE et en CP, se sont élevés à 9 149 millions d'euros , un montant correspondant aux prévisions établies en LFI. En comparaison des crédits correspondants exécutés en 2020 sur le programme 345 et le CAS TE, les montants de crédits consommés en 2021 ont augmenté de 8,5 % . Cette hausse s'explique par le développement continu du parc de production d'électricité à partir d'énergies renouvelables, par le développement du nombre d'installations injectant du biométhane et de la quantité de gaz injecté ou encore par le développement de nouvelles installations renouvelables en ZNI.

La flambée des prix de l'énergie , et tout particulièrement celle des cours du marché de gros de l'électricité, a une profonde incidence sur le mécanisme de compensation des charges de services public de l'énergie (CSPE) par l'État. Elle a pour conséquence une diminution très sensible de ces charges . Dès sa délibération n° 2021-230 du 15 juillet 2021, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) a revu à la baisse de 1,2 milliards d'euros les CSPE au titre de l'année 2021. Toutefois, en raison de la hausse considérable des prix de l'énergie qui a suivi cette délibération, exceptionnellement, la CRE a pris une délibération rectificative le 7 octobre 2021 afin de porter à la connaissance des pouvoirs publics les incidences massives que devraient avoir les dernières évolutions des prix de l'électricité sur les CSPE effectives au titre de 2021 et de 2022. Dans cette délibération, elle estimait notamment que les CSPE au titre de l'année 2021 pourraient être inférieures de 1,5 milliard d'euros aux prévisions. La délibération de la CRE du 13 juillet 2022 a même constaté une baisse 11 ( * ) plus significative encore puisqu'elle a atteint 1,9 milliard d'euros. Les CSPE au titre de l'année 2021 ont ainsi été ramenées à 6 121,6 millions d'euros.

Exécution des crédits votés du programme 345 « Service public de l'énergie »
en 2021 (CP)

(en millions d'euros)

2020

(exécuté) 12 ( * )

2021

(LFI)

2021

(exécuté)

Exécution 2021 / exécution 2020

(en %)

Exécution 2021
/ LFI 2021

(en %)

09- Soutien aux énergies renouvelables électriques en métropole

5 611,7

5 684,5

5 772,6

+ 2,9 %

+ 1,5 %

10- Soutien à l'injection de biométhane

217,5

543,8

496,0

+ 128,0 %

- 8,8 %

11- Soutien dans les zones non interconnectées (ZNI) au réseau métropolitain

1 783,0

2 136,7

2 137,9

+ 19,9 %

+ 0,1 %

12- Soutien à la cogénération au gaz naturel et autres moyens thermiques

748,5

677,6

677,6

- 9,5 %

-

13- Soutien aux effacements de consommation

6,0

6,0

0,0

- 100 %

- 100 %

14- Dispositions sociales pour les consommateurs en situation de précarité

24,9

28,3

21,1

- 15,3 %

- 25,4 %

15- Frais divers

41,3

72,4

43,3

+ 4,8 %

- 40,2 %

Total programme

8 432,9

9 149,4

9 149,4

+ 8,5 %

-

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Désormais, la majeure partie des crédits du programme 345 est retracée à l'action 09 « Soutien aux énergies renouvelables électriques en métropole ». La consommation de crédits s'est élevée à 5 773 millions d'euros, un niveau supérieur de 1,5 % aux prévisions de la LFI et en progression de 2,9 % par rapport à 2020.

Le dynamisme des dépenses liées au dispositif de soutien à l'injection de biométhane est manifeste (+ 128 %) même si les crédits constatés en 2021 (496 millions d'euros) se sont révélés inférieurs de 8,8 % à la prévision initiale. 4,5 TWh de biométhane ont été injectés en 2021 tandis que la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) prévoit d'atteindre 6 TWh annuels en 2023. Alors que le dispositif de soutien à l'injection de biométhane était manifestement en phase d'emballement et qu' une bulle spéculative de même nature que celle qu'a pu connaître le photovoltaïque au début des années 2010 était en formation , le mécanisme a été ajusté par l'arrêté du 23 novembre 2020. Ce décret baisse le tarif d'achat, prévoit sa dégressivité trimestrielle et renforce les conditions d'accès aux contrats. Ces évolutions sont censées limiter la rémunération moyenne des capitaux investis à un taux de 7 %. Si le rapporteur spécial se félicite de cette révision indispensable pour garantir le bon usage des fonds publics et éviter les effets d'aubaine, il déplore qu'une fois encore , malgré les alertes du régulateur, l'État n'ait pas fait preuve d'une réactivité suffisante .

En 2021, les crédits consacrés aux mécanismes de péréquation en faveur des ZNI ont accéléré leur tendance haussière en progressant de près de 20 %, conséquence de l'installation de nouvelles installations renouvelables sur ces territoires. Ils ont ainsi atteint les 2 138 millions d'euros. Compte-tenu des enjeux financiers de cette nécessaire péréquation, il convient de s'assurer du bon dimensionnement des centrales installées dans les ZNI .

Conformes à la prévision établie en LFI, les crédits consacrés au soutien à la cogénération ont entamé leur décrue alors que le dispositif de soutien a été abrogé en application de la PPE.

F. LE CAS « FINANCEMENT DES AIDES AUX COLLECTIVITÉS POUR L'ÉLECTRIFICATION RURALE » (FACÉ)

1. Le CAS FACÉ permet le financement d'aides à l'électrification rurale

Le CAS FACÉ retrace, en dépenses, les aides versées aux autorités organisatrices de la distribution publique d'électricité (AODÉ) 13 ( * ) . Le CAS est alimenté en recettes par une contribution des gestionnaires des réseaux de distribution publique d'électricité 14 ( * ) . Fixé par arrêté, le taux de cette contribution répond à une logique de péréquation entre zones urbaines et rurales.

Pour l'année 2021, l'arrêté du 8 novembre 2021 15 ( * ) avait fixé le taux de contribution à :

- 0,197036 centime d'euro par kilowattheure pour les communes urbaines (contre 0,1880438 en 2020) ;

- 0,039407 centime d'euro par kilowattheure pour les communes rurales (contre 0, 0376088 en 2020).

Le CAS comprend deux programmes :

- le programme 793 « Électrification rurale », qui concentre 99,8 % des AE et 99,3 % des CP exécutés sur le CAS en 2021, vise à financer le renforcement, la sécurisation et l'extension des réseaux d'électrification rurale ;

- le programme 794 « Opérations de maîtrise de la demande d'électricité, de production d'électricité par les énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d'utilité publique et intempéries » finance des actions de production décentralisée d'électricité dans les zones non interconnectées (ZNI), en particulier dans les collectivités ultramarines, ainsi que dans les sites isolés.

La politique de regroupement des communes et la création de communes nouvelles a conduit certaines d'entre elles à dépasser les 5 000 habitants, seuil à partir duquel une commune n'est plus automatiquement éligible aux aides du FACÉ. Pourtant, beaucoup d'entre elles continuent à présenter les mêmes caractéristiques rurales que par le passé.

Alors que l'année 2021 est la première au cours de laquelle s'applique le nouveau cadre réglementaire relatif aux aides pour l'électrification rurale, il est regrettable que les modifications réglementaires intervenues à la fin de l'année 2020 16 ( * ) , n'aient toujours pas permis d'établir une nouvelle définition des zones relevant de l'électrification rurale .

2. L'exécution budgétaire du CAS reste marquée par une sous-consommation sensible de ses CP

Depuis 2018, le CAS se voit systématiquement attribuer 360 millions d'euros de crédits en LFI. En 2021, la consommation des AE (336 millions d'euros) a diminué de 5,0 % par rapport à 2020. En revanche, alors qu'elle avait diminué de façon très significative en 2020 (- 22,3 %), du fait des conséquences de la crise, la consommation des CP s'est fortement redressée en 2021 (+ 16,2 %) tout en restant néanmoins en retrait (de 10 %) du niveau atteint en 2019 (382 millions d'euros). Le rapport annuel de performance (RAP) annexé au présent projet de loi de règlement incrimine à nouveau les conséquences de la crise pour expliquer cette faible consommation de CP. Les taux de consommation des AE et des CP au regard des crédits adoptés en LFI sont respectivement de 93,2 % et de 95,8 %.

En prenant en compte la totalité des crédits ouverts en 2020, y compris les crédits de reports (34 millions d'euros en AE et 355 millions d'euros en CP), la consommation des crédits s'est établie à 91 % en AE mais à moins de 50 % en CP .

D'année en année, l'intégralité des crédits non consommés sont systématiquement reportés sur l'exercice suivant. Aussi, en 2022, les reports de crédits se sont élevés à 51 millions d'euros en AE et 371 millions d'euros en CP .

La sous-consommation des CP ouverts constatée en 2021 s'expliquerait, d'après l'administration, par les effets de la crise sanitaire, la mise en oeuvre du nouveau cadre réglementaire et les élections départementales.

Exécution des crédits du CAS par programme en 2021

(en euros)

Programme

Crédits exécutés 2019

Crédits exécutés 2020

Crédits votés LFI 2021

Crédits exécutés 2021

Exécution 2021
/ exéc. 2020

Exécution 2021
/ LFI 2021

(en %)

(en %)

793 « Électrification rurale »

AE

343 314 597

350 436 557

353 500 000

335 028 924

- 4,4 %

- 5,2 %

CP

380 196 945

296 044 175

353 500 000

342 205 609

+ 15,6 %

- 3,2 %

794 « Opérations de maîtrise de la demande d'électricité, de production d'électricité par les énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d'utilité publique et intempéries »

AE

1 134 374

2 840 114

6 500 000

601 268

- 78,8 %

- 90,7 %

CP

1 555 968

663 982

6 500 000

2 546 262

+ 283,5 %

- 60,9 %

Total

AE

344 448 971

353 276 671

360 000 000

335 630 193

- 5,0 %

- 6,8 %

CP

381 752 913

296 708 157

360 000 000

344 751 870

+ 16,2 %

- 4,2 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les recettes du CAS continuent de se maintenir entre 375 millions d'euros et 380 millions d'euros. En 2021, elles se sont ainsi établies à 377 millions d'euros, en légère progression de 0,4 % sur un an. Comme en 2020, le solde du CAS est excédentaire en 2021, à hauteur de 32 millions d'euros.

Le CAS présente encore un montant d'engagements souscrits non couverts significatif bien qu'en diminution progressive. Ainsi, en 2021, il s'est établi à 234,5 millions d'euros , en baisse de 12,5 % en un an. Il est un héritage lié à la reprise en 2012 d'engagements, à hauteur de 410 millions d'euros, pris avant cette date par EDF. Il apparaît nécessaire d'avancer rapidement sur la conception d'un plan d'apurement crédible.

Équilibre du CAS « Financement des aides aux collectivités
pour l'électrification rurale » en 2021 (en crédits de paiement)

(en euros)

Programme

Recettes

Crédits exécutés

Solde

793 « Électrification rurale »

342 205 609

794 « Opérations de maîtrise de la demande d'électricité, de production d'électricité par les énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d'utilité publique et intempéries »

2 546 262

Total

376 933 776

344 751 870

+ 32 181 906

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Après avoir connu une forte baisse en 2020, du fait de la crise, le taux de consommation des crédits du programme 793 s'est redressé en 2021 pour s'établir à 95 % pour les AE et 97 % pour les CP. Le montant de CP consommés en 2021 a ainsi progressé de 15,6 % en un an.

Alors que ce programme avait longtemps fait l'objet d'une sous-exécution, le taux de consommation qui avait été constaté en 2019 venait corroborer ce que le sénateur Jacques Genest relevait dans son rapport de contrôle sur la gestion et l'utilisation des aides aux collectivités pour l'électrification rurale : huit ans après sa création , « le FACÉ semble aujourd'hui avoir trouvé un certain rythme de croisière » dans l'instruction des dossiers et le paiement des aides 17 ( * ) . Après la bonne performance enregistrée en 2019, l'année 2020 avait fait figure de coup d'arrêt. La gestion 2021 semble confirmer les progrès amorcés deux ans plus tôt .

Il conviendra néanmoins de veiller à ce que la tendance se confirme sur le long terme afin d'estimer le caractère structurel de l'amélioration des modalités de gestion du CAS.

Par ailleurs, si l'on prend en compte l'ensemble des crédits ouverts sur le programme, fortement majorés par les reports structurels, la consommation de CP reste inférieure au seuil de 50 % .

Exécution du programme 793 par action
en 2021

(en euros)

Numéro et intitulé de l'action

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits votés

Crédits exécutés

Taux de consommation

Crédits votés

Crédits exécutés

Taux de consommation

3 Renforcement des réseaux

164 000 000

167 398 245

102,1 %

164 000 000

159 646 084

97,3 %

4 Extension des réseaux

42 000 000

28 157 548

67,0 %

42 000 000

33 977 713

80,9 %

5 Enfouissement et pose en façade

41 700 000

41 685 013

99,9 %

41 700 000

37 240 304

89,3 %

8 Fonctionnement

300 000

157 293

52,4 %

300 000

241 236

80,4 %

9 Déclaration d'utilité publique (Très haute tension)

500 000

0

0,0 %

500 000

25 912

5,2 %

10 Intempéries

7 000 000

0

0,0 %

7 000 000

6 481 412

92,6 %

11 Sécurisation de fils nus 18 ( * )

98 000 000

96 900 826

98,9 %

98 000 000

104 592 947

106,7 %

Total

353 500 000

335 028 924

94,8 %

353 500 000

342 205 609

96,8 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Depuis la création du CAS, les crédits du programme 794 font systématiquement l'objet d'un phénomène de sous-consommation massif. Face à cette situation, le rapporteur spécial avait la conviction que le maintien des crédits du programme 794 au même niveau depuis la création du FACÉ n'était plus pertinent . Aussi, avait-il accueilli favorablement le passage de 7,2 millions d'euros à 4,8 millions d'euros des crédits destinés à ce programme dans le cadre de la LFI pour 2019. Néanmoins, en 2021, la LFI avait prévu une nouvelle hausse des crédits afin de les porter à 6,5 millions d'euros.

En 2021, le taux de consommation des AE est tombé à 9,3 % tandis que celui des CP se redressait passant, en une année, de 13,8% à 39,2 %

Les difficultés d'exécution des crédits du programme 794 s'expliquent par l'absence de projets d'ampleur en outre-mer, les difficultés à monter les dossiers , mais également par les retards constatés sur le programme d'électrification de Mafate . Le rapport annuel de performance annexé au présent projet de loi de règlement des comptes souligne une consommation de crédits sensiblement inférieure aux prévisions sur ce projet. Il indique néanmoins que les dernières avancées techniques et administratives sont de nature à permettre « une accélération du rythme des opérations en 2022 » . Le rapporteur spécial prend note de cet optimisme en espérant qu'il se traduise concrètement au cours de l'exercice 2022.


* 1 « Green budgeting : proposition de méthode pour une budgétisation verte » , rapport de la mission IGF/CGEDD publié le 25 septembre 2019.

* 2 La Cour des comptes note dans sa note d'exécution budgétaire que le chèque énergie, à vocation sociale, est considéré comme favorable à l'environnement - son exclusion conduirait à réduire de 800 millions d'euros les dépenses de la mission considérés comme favorables à l'environnement.

* 3 Les aides dommageables à l'environnement, une réalité complexe, Commissariat général au développement durable (CGDD), décembre 2017.

* 4 La fiscalité environnementale au service de l'urgence climatique, Conseil des prélèvements obligatoires, septembre 2019.

* 5 Loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021.

* 6 Note d'exécution budgétaire relative à la présente mission.

* 7 Par le décret n° 2022-960 du 29 juin 2022 relatif aux aides à l'acquisition ou à la location de véhicules peu polluants.

* 8 Relatif à l'expérimentation d'un prêt ne portant pas intérêt pour financer l'acquisition d'un véhicule dont les émissions de dioxyde de carbone sont inférieures ou égales à 50 grammes par kilomètre.

* 9 Finalement, 831 millions d'euros d'AE ont été consommés en 2021 pour la campagne classique du chèque énergie.

* 10 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2021 de la mission.

* 11 Par rapport à la délibération de la CRE du 15 juillet 2021.

* 12 Retraitements réalisés à partir des crédits exécutés en 2020 sur le programme 345 et le CAS TE.

* 13 C'est-à-dire les collectivités ou syndicats d'électrification détenteurs de la maîtrise d'ouvrage des travaux sur les réseaux de distribution.

* 14 Assise sur le nombre de kilowattheures (kwh) distribués à partir d'ouvrages exploités en basse tension l'année précédente.

* 15 Arrêté du 8 novembre 2021 relatif au taux 2021 de la contribution due par les gestionnaires des réseaux publics de distribution d'électricité pour le financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale.

* 16 Le décret n° 2020-1561 du 10 décembre 2020.

* 17 « Le FACÉ : un outil indispensable mais perfectible au service de la qualité de l'électricité dans le monde rural », Rapport d'information n° 422 (2016-2017) de M. Jacques Genest, fait au nom de la commission des finances le 15 février 2017.

* 18 Fusion des anciennes actions 6 et 7.

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