II. POUR LA COUPE DU MONDE DE FOOTBALL, UN PARTENARIAT PLUS AMBITIEUX ET PLUS FORMALISÉ

Comme l'indique l'étude d'impact annexée au projet de loi : « Cet accord doit permettre la mise en place d'un partenariat à la hauteur de la relation de confiance et d'amitié qui unit les deux pays - pour cet événement d'envergure internationale et dont la visibilité sera considérable. Au terme de ses procédures nationales de ratification, l'accord constituera le premier instrument juridiquement contraignant conclu entre les deux États dans le domaine de la sécurité intérieure. Il créera un cadre de coopération que les Parties pourront décliner en fonction des besoins capacitaires qui seront identifiés. Il constituera à cet égard, le pendant de l'accord de statut des forces signé entre les gouvernements des deux États le 24 novembre 2019 , qui constituera le support juridique auquel s'adossera la partie de la coopération bilatérale relative à la Coupe du Monde de football de 2022 relevant du champ de compétence du ministère des Armées ; dans la mesure où les militaires de gendarmerie bénéficient des dispositions de cet accord, ce parallélisme juridique semblait d'autant plus nécessaire. »

1. Les objectifs poursuivis pour assurer la sécurité de la Coupe du Monde de football

Le ministère de l'Intérieur m'a précisé que les deux objectifs principaux de cet accord sont les suivants :

- d'une part permettre aux forces de sécurité qatariennes, dont l'expérience en matière de gestion des risques liés à un grand événement de ce type est limitée, de réagir de manière coordonnée et proportionnée aux événements auxquels elles ne manqueront pas d'être confrontées ;

- d'autre part créer les conditions d'une parfaite complémentarité d'action entre forces régaliennes et acteurs de la sécurité privée, à qui sera confiée la gestion de l'intérieur et des abords des stades mais aussi des fan-zones, des hôtels, etc. Le faible volume des forces en présence et l'absence de sécurité privée structurée, bien que compensés par un vaste programme de recrutement et de formation à la gestion de foule, ne permettront pas au Qatar d'assurer seul la gestion de la sécurité d'un tel événement.

Dans le cadre de cette Coupe du Monde et dans un contexte de forte concurrence, le ministère de l'Intérieur français (gendarmerie nationale, police nationale, sécurité civile, préfecture de police de Police), s'appuyant sur la relation historique qui s'est nouée entre la gendarmerie nationale et la force de sécurité intérieure, se distingue en proposant une offre vaste et intégrée : une proposition-socle fédérant des compétences et savoir-faire transversaux (planification, intervention spécialisée, gestion de l'ordre public) et des pôles d'expertise ciblés (lutte anti-drones, neutralisation des explosifs, troisième dimension, cyber, etc.).

Cette offre, de nature à couvrir l'ensemble du spectre des besoins de sécurité d'un grand événement sportif, pourra s'appuyer sur les grandes directions opérationnelles du ministère (gendarmes, policiers et pompiers), pour des missions de conseil et d'accompagnement voire également par un appui opérationnel au partenaire qatarien.

Cette offre permettra d'accompagner les forces locales avant et pendant la compétition, par le transfert d'une expertise de haut niveau et des échanges croisés. Elle aura aussi comme effet de soutenir les industriels français dans la présentation de solutions adaptées aux besoins exprimés par le partenaire et de développer les savoir-faire dans la perspective d'événements sportifs organisés par la France (Coupe du Monde de rugby, jeux olympiques, etc.).

La partie qatarienne doit formuler plus précisément, à brève échéance, ses besoins institutionnels et opérationnels, en fonction desquels l'offre de coopération française sera modulée.

Sur le plan financier, l'article 12 de l'accord prévoit que l'essentiel de la charge liée aux actions de coopération incombe à la Partie qui en bénéficie. Les modalités pratiques de mise en oeuvre de ces dispositions feront l'objet d'un protocole financier, additionnel au présent accord, lorsque les principales modalités de la coopération française auront été précisées.

2. La protection juridique des agents français

Il a été jugé indispensable de prévoir dans le présent accord des garanties fortes au bénéfice des agents français qui se rendraient sur le territoire qatarien aux fins de la mise en oeuvre du présent accord. Ces dispositions, pleinement conformes aux engagements internationaux de la France et à ses exigences constitutionnelles, sont les mêmes que celles qui sont habituellement insérées dans les accords dits de « statut des forces » (pour la coopération militaire).

Ainsi, tout membre du personnel de la Partie d'envoi bénéficiera des garanties relatives au droit à un procès équitable au sens de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CESDH) et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966.

On relèvera notamment que l'accord garantit, de manière non limitative, le droit d'être jugé au Qatar dans un délai raisonnable ; le droit d'être représenté selon son choix, ou d'être assisté dans les conditions prévues par le droit de l'État de la Partie d'accueil ; le droit de communiquer avec un représentant de l'ambassade de la Partie d'envoi et, lorsque les règles de procédure le permettent, le droit à la présence de ce représentant aux débats ; le droit d'être informé, avant l'audience, des accusations portées contre lui ; le droit d'être confronté avec les témoins à charge ; ou le droit de ne pas être poursuivi pour tout acte ou négligence qui ne constitue pas une infraction à la législation de l'État de la Partie d'accueil au moment où cet acte ou négligence a été commis.

En outre, l'accord (paragraphes 10 et 11 de l'article 9) organise une protection contre l'application de la peine capitale ou d'autres traitements inhumains et dégradants au sens de l'article 3 de la CESDH.

Au travers de l'accord, le Qatar s'est en effet engagé d'une part à ce que la peine de mort, ainsi que les peines contraires aux engagements résultant des conventions internationales auxquelles la France est partie, ne soient ni requises, ni prononcées, et d'autre part à ce que, dans l'hypothèse où de telles peines seraient prononcées, elles ne soient pas appliquées. Ces dispositions protègeront à titre principal les agents français, lorsqu'ils se trouvent sur le territoire qatarien ; mais elles bénéficieront également aux agents qatariens qui, lorsqu'ils sont soumis à la juridiction française, ne pourront pas être remis aux autorités qatariennes en cas de demande d'extradition ou d'éloignement.

Ces dispositions offriront donc une parfaite sécurité juridique aux agents français du ministère de l'Intérieur qui participeront aux activités de coopération qui seront mises en oeuvre en vue de la Coupe du Monde de football 2022 et durant l'événement, à l'instar des garanties dont bénéficieront les agents du Ministère de la Défense, en vertu par l'accord bilatéral relatif au statut des forces.

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