EXAMEN EN COMMISSION

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Réunie le mercredi 26 janvier 2022, sous la présidence de Mme Catherine Deroche, présidente, la commission examine le rapport de Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur, sur la proposition de loi (n° 568, 2019-2020) tendant à expérimenter un chèque emploi petites communes pour l'emploi d'agents contractuels et vacataires.

Mme Catherine Deroche , présidente . - Mes chers collègues, nous commençons nos travaux avec l'examen du rapport et du texte de la commission sur la proposition de loi de M. Louis-Jean de Nicolaÿ et plusieurs de ses collègues tendant à expérimenter un chèque emploi petites communes pour l'emploi d'agents contractuels et vacataires.

Je salue ceux de nos collègues qui participent à cette réunion en visio-conférence.

Notre collègue Louis-Jean de Nicolaÿ a été convié à assister à cette réunion et je lui donnerai la parole après le rapporteur, Christine Bonfanti-Dossat.

Mme Christine Bonfanti-Dossat , rapporteur . - Nous avons tous ici le souci de simplifier autant que faire se peut la vie des élus locaux, en particulier de ceux des plus petites communes, qui sont les moins bien armés face aux responsabilités qui leur incombent et à l'ampleur de la tâche à mener.

Pour autant, nous devons veiller à ce que les mesures de simplification en leur faveur soient compatibles avec les exigences de la gestion des deniers publics, la préservation du contrôle démocratique, la garantie des droits des agents publics et l'intérêt général.

Forte de cette conviction, je vous présenterai dans un instant mon rapport sur la proposition de loi tendant à expérimenter un chèque emploi petites communes pour l'emploi d'agents contractuels et vacataires, déposée par notre collègue Louis-Jean de Nicolaÿ, dont je tiens à saluer la présence parmi nous ce matin.

En dépit du caractère crucial de la question soulevée par ce texte, et compte tenu d'un certain nombre d'obstacles à la mise en oeuvre du dispositif qui nous est soumis, je vous proposerai de soumettre au Sénat une motion tendant au renvoi de la proposition de loi à la commission.

Pour commencer, il m'appartient de vous proposer un périmètre pour l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution.

Je considère qu'il comprend des dispositions relatives aux modalités de déclaration, de paiement de la rémunération et de recouvrement des cotisations et contributions sociales des agents contractuels et vacataires des communes ; à la procédure de recrutement des agents contractuels et vacataires de la fonction publique territoriale.

En revanche, j'estime que ne présenteraient pas de lien, même indirect, avec le texte déposé des amendements relatifs aux modalités de déclaration, de paiement de la rémunération et de recouvrement des cotisations et contributions sociales des agents contractuels et vacataires des départements, des régions, de la fonction publique hospitalière et de la fonction publique de l'État ; aux modalités de déclaration, de paiement de la rémunération et de recouvrement des cotisations et contributions sociales des agents titulaires de la fonction publique territoriale, de la fonction publique hospitalière et de la fonction publique de l'État ; à la procédure de recrutement des agents titulaires de la fonction publique territoriale, de la fonction publique hospitalière et de la fonction publique de l'État ; aux dispositifs simplifiés de déclaration et de recouvrement des cotisations et contributions sociales à destination des particuliers employeurs, des associations et des entreprises.

De tels amendements seraient donc déclarés irrecevables par notre commission en application de l'article 45 de la Constitution.

Les employeurs sont tenus d'accomplir de nombreuses formalités en matière de déclaration et de paiement de leurs salariés. Or certains d'entre eux, structures de petite taille ou particuliers, ne disposent pas des ressources nécessaires à la satisfaction de ces obligations, qu'il s'agisse des compétences requises, des moyens de recruter des salariés dédiés à ces tâches ou tout simplement du temps. Dans un tel contexte, la réglementation risquerait de constituer un frein à la dynamique de l'économie et de l'emploi.

C'est la raison pour laquelle l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (Urssaf) a développé, depuis les années 1990 plusieurs dispositifs simplifiés de déclaration, de paiement de la rémunération et de recouvrement des cotisations et contributions sociales des salariés à l'intention des employeurs du secteur privé.

Il s'agit principalement du chèque emploi service universel (CESU), créé en 1994, auquel peuvent recourir les particuliers qui emploient à domicile de salariés réalisant des prestations de services à la personne ; du chèque emploi associatif, créé en 2004, utilisable par les associations à but non lucratif, les fondations dotées de la personnalité morale et les associations de financement électoral ; et du titre emploi service entreprise, créé en 2004 également, et destiné aux entreprises relevant du régime général de sécurité sociale.

En utilisant l'une de ces offres, l'employeur est réputé satisfaire à l'obligation d'établissement d'un contrat de travail écrit. Il peut acquitter tout ou partie du montant de la rémunération de ses salariés et procéder de manière simplifiée à la déclaration et au paiement des cotisations sociales ; à la déclaration et au reversement des montants donnant lieu au prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu ; à l'accomplissement des formalités obligatoires liées à l'embauche et à l'emploi de salariés, comme la déclaration auprès de l'Urssaf, la confection des bulletins de paie et les déclarations relatives aux cotisations et contributions sociales, sur la base desquelles l'Urssaf établit pour le compte de l'employeur la déclaration sociale nominative (DSN).

Obligatoire depuis 2017 pour tous les employeurs privés et depuis 2022 pour tous les employeurs publics, la DSN, qui se substitue à quarante-cinq déclarations sociales, permet de mutualiser la collecte des données, partagées entre les organismes sociaux selon leurs besoins.

La proposition de loi de notre collègue Louis-Jean de Nicolaÿ vise, dans un double souci de soutien au recrutement d'agents contractuels et vacataires, et de simplification administrative, à transposer au secteur public local les dispositifs simplifiés existant dans le secteur privé.

Le texte prévoit ainsi l'expérimentation, pour une durée de trois ans, d'un chèque emploi petites communes permettant aux communes de moins de 5 000 habitants de simplifier les déclarations et formalités liées à l'emploi, pour une durée maximale de trois mois, d'agents contractuels et vacataires. Les sommes versées par ce biais ne pourraient excéder 5 % de la masse salariale brute de la commune, tandis qu'une attestation mensuelle d'emploi délivrée par l'Urssaf se substituerait, pour les agents concernés, au bulletin de paie. Pour les seuls vacataires, l'utilisation de ce dispositif serait réputée valoir acte d'engagement.

Comme tous les employeurs, les petites communes font face, en matière d'embauche, à des difficultés de taille que notre collègue Louis-Jean de Nicolaÿ a mises en lumière.

Il s'agit d'abord, pour certaines d'entre elles, de difficultés financières, après des années de recul des dotations de l'État. La direction générale des finances publiques (DGFiP) a toutefois précisé que, sur la période récente, entre 2019 et 2021, les recettes de fonctionnement des communes de moins de 3 500 habitants ont augmenté plus rapidement que leurs dépenses de fonctionnement, à hauteur de 4,4 % contre 2,2 %.

Il s'agit également de difficultés d'ordre procédural. Les collectivités ne peuvent en effet recourir à des agents contractuels ou à des vacataires qu'en des circonstances très précises déterminées par la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

Lorsque la loi les y autorise, elles doivent, en outre, respecter une procédure strictement encadrée permettant de garantir l'égal accès aux emplois publics et la préservation des droits des agents publics.

Il s'agit, enfin, de difficultés de recrutement. Comme l'ont rappelé l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), l'Association des maires ruraux de France (AMRF) et la Fédération nationale des centres de gestion (FNCDG), il s'agit davantage d'une problématique de pénurie de candidats dans certains territoires que de lourdeurs administratives à l'embauche.

Or les organismes que j'ai entendus dans le cadre de mes travaux ont unanimement considéré que le déploiement d'une offre simplifiée ne constituait pas une solution adaptée et était difficilement envisageable.

D'abord, les centres de gestion, auxquels 94 % des communes adhèrent obligatoirement, fournissent une aide précieuse aux petites communes en matière de gestion des personnels. En effet, ceux-ci peuvent mettre à leur disposition des agents pour assurer le remplacement d'agents momentanément indisponibles, pour assurer des missions temporaires, pour pourvoir à la vacance d'un emploi ou pour affecter ces agents à des missions permanentes.

Plus de 90 % des centres de gestion assurent actuellement un service de remplacement et 42 % d'entre eux proposent à leurs affiliés de réaliser toutes les tâches liées à la confection des paies.

Les centres de gestion fournissent également aux collectivités des prestations d'aide à la définition de leurs besoins en personnels, à la conduite des entretiens d'embauche et à la rédaction des contrats de travail et des arrêtés de nomination. D'après l'AMRF, les maires interrogés seraient globalement satisfaits des services de leur centre de gestion. Lorsque ce dernier n'assure pas la mission de remplacement, les communes peuvent faire appel à des sociétés d'intérim. Il en va de même lorsqu'elles doivent faire face à une vacance temporaire d'emploi, à un accroissement temporaire d'activité ou à un besoin occasionnel ou saisonnier.

Rappelons, par ailleurs, que les élus peuvent également solliciter l'intercommunalité en vue de la mise à disposition de personnels ou opter pour le recours à une association fournissant des prestations de services.

En somme, le dispositif prévu par la proposition de loi serait probablement utilisé par un nombre marginal de communes. J'attire votre attention, à ce propos, sur l'absence d'attractivité financière de ce dispositif.

Contrairement au CESU, qui est cumulable avec le crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile, aucune mesure de soutien financier en faveur des communes ne serait attachée au titre emploi qui leur serait dédié.

J'ajoute que celui-ci n'exonérerait pas les communes utilisatrices du paiement de l'indemnité de fin de contrat, également appelée « prime de précarité », due, depuis le 1 er janvier 2021, aux contractuels dont la durée du contrat est inférieure à un an.

Par ailleurs, la simplification des procédures de recrutement, de déclaration et de paiement des agents des communes n'est, pour l'heure, pas envisageable, en raison de leur encadrement par le droit de la fonction publique et les principes de la gestion budgétaire et comptable publique.

De fait, un certain nombre de formalités doivent être accomplies pour recruter un agent contractuel ou vacataire.

D'abord, le vote d'une délibération par le conseil municipal afin d'autoriser la création d'un emploi dans le cas des contractuels ou d'autoriser le recrutement en ce qui concerne les vacataires. Il est alors nécessaire d'inscrire les crédits afférents au budget et, dans certains cas, de transmettre la délibération à la préfecture en vue du contrôle de légalité.

Ensuite, l'obligation de publicité de la création ou de la vacance de l'emploi s'impose s'il s'agit d'un emploi permanent ouvert aux contractuels.

Enfin, la rédaction d'un contrat de travail écrit précisant le motif de recours à un contractuel ou, dans le cas des vacataires, un acte d'engagement précisant les conditions de recrutement et faisant apparaître les éléments justifiant la qualité de vacataire, c'est-à-dire l'accomplissement d'un acte déterminé, la discontinuité des tâches dans le temps et une rémunération attachée à l'acte.

Compte tenu de ces obligations légales et réglementaires, le chèque emploi petites communes ne permettrait pas d'accélérer outre mesure les embauches en vue de répondre à des besoins ponctuels.

De surcroît, je rappelle qu'en vertu du principe fondamental de séparation de l'ordonnateur et du comptable public ce dernier doit s'assurer de la régularité de la dépense ordonnée par le premier au moyen de pièces justificatives. Or la quasi-totalité des contrôles effectués sur la rémunération des agents publics est réalisée à l'aide du bulletin de paie.

Si, comme le prévoit la proposition de loi, une simple attestation d'emploi devait se substituer à ce document, le comptable ne pourrait ni satisfaire à ces contrôles réglementaires ni, par conséquent, mettre en paiement la rémunération des agents concernés. Malheureusement, l'Urssaf m'a indiqué ne pas être en mesure d'émettre un tel document, compte tenu des spécificités liées à la paie des agents publics.

Aussi la mise en conformité du dispositif avec la réglementation en vigueur entraînerait-elle la disparition des éléments de simplification qu'il contient.

Un dernier obstacle s'oppose à l'adoption de cette proposition de loi par notre commission.

En effet, comme l'a rappelé l'Urssaf, l'expérimentation de ce titre emploi impliquerait son développement complet. S'il n'est pas possible d'évaluer avec précision le coût de ce déploiement, la direction de la sécurité sociale l'estime aux alentours de 12 millions d'euros, alors que le dispositif expérimental ne serait vraisemblablement utilisé que de façon très marginale.

À titre de comparaison, le titre emploi service entreprise (TESE), qui permettait à 70 000 entreprises de déclarer chaque mois 150 000 salariés en 2021, n'est pas encore « rentable » compte tenu du faible nombre d'utilisateurs au regard du coût induit par la gestion de cette offre simplifiée.

En tout état de cause, la feuille de route de l'Urssaf est chargée de réformes d'ampleur en cours et à venir, notamment le transfert du recouvrement des cotisations sociales dues à plusieurs caisses de retraite et le passage de l'ensemble de la fonction publique à la DSN depuis le 1 er janvier. Le déploiement d'un nouveau dispositif simplifié ne pourrait intervenir, au mieux, avant 2025.

Toutes ces problématiques ne pouvant être résolues aisément, mais la question soulevée par notre collègue faisant écho aux préoccupations de bien des élus locaux, j'estime qu'il est nécessaire de mener une réflexion plus large sur les moyens d'assouplir la gestion par les collectivités locales de leurs ressources humaines, de renforcer leurs capacités de recrutement et d'accroître l'attractivité des emplois publics territoriaux.

Sur ce dernier point, la ministre de la transformation et de la fonction publiques a confié une mission à plusieurs spécialistes, dont le rapport devrait être remis dans les jours ou les semaines à venir.

Parmi les enjeux identifiés par la Fédération nationale des centres de gestion figurent, entre autres, le strict encadrement des procédures de recrutement, les niveaux de rémunération, les inégalités de traitement entre fonctionnaires et contractuels exerçant les mêmes fonctions ou la mauvaise adaptation du recrutement par concours aux besoins des collectivités. Autant de sujets sur lesquels le Sénat fera entendre la voix des territoires.

Par conséquent, je vous propose de soumettre au Sénat une motion tendant au renvoi du texte à la commission.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , auteur de la proposition de loi . - Je remercie l'ensemble des collègues qui ont cosigné cette proposition de loi. Il ne s'agit pas d'un problème nouveau, l'Assemblée nationale ayant examiné un texte similaire en 2006, mais celui-ci ne concernait que les communes de moins de 1 000 habitants.

Dans la Sarthe, sur 355 communes, 175 communes comptent moins de 1 500 habitants. Quasiment la moitié des communes pourrait donc être concernée par cette mesure. Je comprends les difficultés soulevées par la transposition au secteur public local d'un chèque emploi service issu du secteur privé. L'idée n'est pas de supprimer des emplois dans la fonction publique. Il s'agit simplement de permettre exceptionnellement, par exemple le temps d'une matinée, aux communes rurales d'employer une personne pour faire face à un besoin ponctuel. C'est une solution plus simple que d'adresser une demande auprès du centre de gestion, d'autant que des garde-fous sont prévus puisque les sommes utilisées par la commune au titre du chèque emploi petites communes ne peuvent excéder 5 % de la masse salariale brute, pour une durée maximum de trois mois.

J'ai bien noté que l'ensemble des administrations estime que cette proposition de loi est extrêmement compliquée à mettre en oeuvre. En 1991, les arguments devaient être les mêmes lors de la mise en place du CESU. Pourtant, plus de 2 millions de personnes l'utilisent aujourd'hui !

Je ne vois aucun inconvénient à retravailler ce dossier afin qu'il trouve une issue plus favorable. Je ne m'oppose bien évidemment pas au souhait de Mme le rapporteur de renvoyer ce texte à la commission. J'ai soumis l'idée d'un chèque emploi à l'ensemble des maires des petites communes au moment de la campagne sénatoriale de 2020. Leur accueil a été plutôt favorable puisque j'ai été réélu !

Je ne cherche pas à compliquer les choses. Cette proposition de loi mérite sans doute d'être améliorée. En tout état de cause, les communes rurales, qui ont aujourd'hui des difficultés à recruter des secrétaires de mairie et du personnel, apprécieraient qu'on leur simplifie la tâche afin qu'elles puissent embaucher ponctuellement les jeunes de la commune.

Mme Christine Bonfanti-Dossat , rapporteur . - Chacun s'accorde à reconnaître qu'il faut simplifier la paperasse des petites communes, qui manquent de personnel pour effectuer les remplacements. Sur le fond, nous sommes tous d'accord. Pour autant, sur la forme, la mise en place d'un tel système s'avère aujourd'hui impossible. L'Urssaf nous a annoncé que nous n'y parviendrons, au mieux, qu'à compter de 2025. Nous avons donc fait preuve de sagesse en décidant de surseoir à l'examen de cette intéressante proposition de loi afin de réfléchir à un texte plus solide. Il s'agit d'éviter toutes les oppositions que nous avons pu rencontrer au cours des différentes auditions.

Mme Frédérique Puissat . - Je vous remercie, madame le rapporteur, de nous avoir éclairés sur cette proposition de loi que j'ai cosignée avec plusieurs de mes collègues. Louis-Jean de Nicolaÿ soulève une vraie question pour laquelle les petites communes n'ont aucune réponse. Une commune de 5 000 habitants est-elle petite ? J'aurais plutôt mis la jauge à 500 habitants. Vous avez rappelé que les centres de gestion pouvaient aider au recrutement, mais ce n'est pas ce qui se constate sur le terrain. Certes, les élus sont globalement satisfaits, mais c'est oublier un peu vite que ce sont souvent leurs amis qui composent en grande partie les conseils d'administration des centres de gestion... Quant à l'intérim, il n'est pas monnaie courante. On essaie donc, en général, de piocher dans les habitants de la commune pour trouver une ou deux personnes susceptibles d'effectuer des remplacements. À mon sens, cette simplification aurait été la bienvenue. Je vous remercie de ne pas avoir fermé la porte au débat. Quand j'entends tous les arguments qui nous ont été opposés lors des auditions, je me dis que l'on a besoin d'un choc administratif dans ce pays. Il sera peut-être permis grâce aux prochaines échéances électorales...

Mme Cathy Apourceau-Poly . - Le groupe CRCE n'a pas cosigné cette proposition de loi. Un certain nombre de dispositifs sont déjà en place et il conviendrait plutôt de les améliorer. Nous sommes tous conscients qu'il existe des problèmes administratifs lourds à gérer pour certaines communes. Le Pas-de-Calais, dont je suis l'élue, compte 890 communes, dont 787 communes de moins de 3 500 habitants et 640 communes de moins de 1 000 habitants. Les remontées du terrain font état d'un besoin de simplification. Néanmoins, comme l'a souligné Frédérique Puissat, la problématique des communes diffère en fonction de leur taille. Contrairement aux communes de 300 habitants, les communes de 5 000 habitants ont du personnel et peuvent traiter avec les centres de gestion. Il n'en va pas de même en ruralité profonde : ce sont d'ailleurs souvent les élus qui tondent les pelouses ou qui effectuent les remplacements dans les restaurations scolaires !

Par ailleurs, vous ne traitez pas le problème au fond et vous passez sous silence tous les moyens supprimés pour la ruralité au cours de ces dernières années, qu'il s'agisse des fermetures de trésoreries, de la suppression de la taxe d'habitation ou de la perte de 13 milliards d'euros au titre de la dotation globale de fonctionnement (DGF).

Je ne suis pas de ceux qui disent qu'il ne faut rien faire, mais je défends mordicus le statut de la fonction publique territoriale. Il y a également matière à réflexion dans nos centres de gestion. Nous pourrions, par exemple, disposer de pools de ressources spécifiques par bassins d'emploi. Quoi qu'il en soit, la lourdeur administrative est effectivement un véritable souci.

Mme Monique Lubin . - Je partage en grande partie les propos de notre rapporteur. Je ne suis pas favorable à cette proposition de loi, qui contribue à accélérer la précarisation de l'emploi, dans la droite ligne des attaques en règle menées depuis quelques années contre le statut de l'emploi public auquel je tiens particulièrement.

Pour avoir été maire d'une toute petite commune, je ne méconnais pas les problèmes que vous soulevez, mais il existe des solutions. Les centres de gestion proposent des services de remplacement. Il existe également des mutualisations via les communautés de communes. Par ailleurs, je ne crois pas que ce chèque emploi petites communes permettra de recruter les bonnes personnes. J'ajoute qu'il existe des solutions au travers de l'économie sociale et solidaire (ESS). Je préside une association d'insertion qui permet à un certain nombre d'intervenants de donner un coup de main dans les communes. Cette proposition de loi a le mérite de poser le problème, mais les solutions préconisées ne nous semblent pas acceptables.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ . - Je ne suis pas spécialement attaché au seuil de 5 000 habitants, si ce n'est que la commune dont j'étais maire compte 4 500 habitants...

Mme Catherine Deroche , présidente . - On n'est jamais si bien servi que par soi-même !

Mme Véronique Guillotin . - Cette proposition m'a séduite. La solution proposée me paraît agile et simple à mettre en oeuvre, d'autant qu'elle ne viendra pas télescoper les autres solutions de la fonction publique ni s'y opposer. Il s'agirait d'un outil de simplification supplémentaire dans la boîte à outils des petites communes. Je salue donc cette proposition de loi, tout en entendant les remarques formulées par Mme le rapporteur.

Mme Christine Bonfanti-Dossat , rapporteur . - Pour répondre à Cathy Apourceau-Poly et à Frédérique Puissat, le seuil d'habitants me paraît également trop élevé, c'est un point qu'il faudra revoir. D'après la direction générale des collectivités locales (DGCL), à partir de 3 000 habitants, les communes disposent généralement d'un agent dédié à cette fonction.

Quelle que soit la taille de la commune, le problème relevé aussi bien par l'AMF que par l'AMRF est la faible attractivité de la fonction publique territoriale, sans doute en raison de la pénibilité du travail et de la faiblesse des rémunérations.

En réponse à Monique Lubin, d'après l'AMRF, les maires sont globalement satisfaits des centres de gestions. Je rappelle également que 94 % des communes y adhèrent obligatoirement. C'est aussi ce qui ressort de nos auditions.

Pour défendre notre collègue Louis-Jean de Nicolaÿ, je rappelle que cette proposition de loi ne concerne pas du tout les fonctionnaires, ce qui, d'ailleurs, pourrait causer des difficultés en ce qui concerne la déclaration sociale nominative.

Enfin, je veux dire à Véronique Guillotin que nous sommes tous d'accord sur le bien-fondé de cette proposition de loi. C'est la raison pour laquelle nous allons continuer d'y travailler. En revanche, elle n'est pas du tout applicable en l'état. Serait-il bon de forcer les lignes en période électorale ? Il me paraît plus sage de prendre notre temps et de travailler davantage ce dossier.

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

Article unique

Mme Catherine Deroche , présidente . - Je rappelle que notre rapporteur suggère d'approfondir le sujet soulevé par la proposition de loi par le dépôt d'une motion de renvoi à la commission.

Si le principe du dépôt de cette motion est adopté, cela suppose que notre commission rejette l'article unique. En conséquence, la discussion en séance porterait, en application de l'article 42 du Règlement du Sénat, sur la proposition de loi initiale.

Le dépôt d'une motion de renvoi à la commission est décidé.

L'article unique n'est pas adopté.

Conformément au premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion en séance portera en conséquence sur le texte initial de la proposition de loi déposée sur le Bureau du Sénat.

Mme Catherine Deroche , présidente . - La séance est prévue le mardi 1 er février prochain, sauf si le groupe Les Républicains demandait d'ici là le retrait du texte de l'ordre du jour du Sénat, ce qui n'est pas exclu.

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