EXAMEN EN COMMISSION

La commission s'est réunie le mercredi 20 octobre 2021 pour l'examen du présent rapport. À l'issue de la présentation faite par les rapporteures, le débat suivant s'est engagé :

M. André Reichardt . - Je félicite les auteures et rapporteures ; la mobilisation que nous constatons traduit l'intérêt pour ce sujet, c'est un progrès quand nous aspirons à une action forte à l'échelon européen. Une observation : en changeant le titre, pour mentionner seulement les violences faites aux femmes, on exclut les violences faites aux hommes, qui sont certes statistiquement très faibles, comparées aux violences faites aux femmes, mais qui existent cependant. Je crois que nous devrions en tenir compte, de même qu'il faut inclure les violences faites, en raison du genre, aux LGBTQ+.

M. Ludovic Haye . - Le harcèlement en ligne est transfrontalier, est-il de ce fait distinct du cyber-harcèlement ? Les deux doivent-ils être traités à part, ou intégrés ?

M. François Calvet . - Vous dites que l'Espagne est en avance, ce n'est pas ce que nous constatons dans les territoires qui lui sont frontaliers. À Perpignan, l'exploitation sexuelle des femmes bat son plein avec le trafic routier venu d'Espagne, rien ne change malgré l'action conduite depuis des années, nos voisins le savent bien - la Province de Catalogne a même proposé d'intervenir à nos côtés.

M. Jean-François Rapin , président . - Effectivement, mais il est possible qu'il y ait un décalage dans le temps entre l'adoption de normes nouvelles, et leur application effective. L'avance des Espagnols semble en tout cas reconnue en matière législative.

Mme Marta de Cidrac . - Je salue le travail de la Délégation aux droits des femmes sur ce sujet. Le changement de titre de la PPRE ne me choque pas, tant les chiffres des violences faites aux femmes sont alarmants ; il est important que le message porte loin et que nous pointions précisément ce que nous visons - d'autant que notre pays est directement concerné, beaucoup de femmes, en France aussi, subissent des violences.

Mme Laurence Harribey , rapporteure . - Les auteures de cette PPRE nous ont demandé d'en changer le titre, j'ai respecté leur volonté. Cela dit, je m'étais également interrogée, d'autant que la question du genre est déjà effective dans le droit mais que, statistiquement, les violences s'exercent très majoritairement sur des femmes.

Nous ne distinguons pas le harcèlement en ligne et le cyberharcèlement, les deux sont intégrés dans la PPRE.

Quant à l'avance normative espagnole, elle ne fait pas de doute et elle est le fruit d'une volonté politique effective, qui explique que nos voisins ont avancé plus vite que nous : je crois que c'est utile de le reconnaître. Lors de nos auditions, des écarts d'application entre régions espagnoles nous ont été rapportés, qui expliquent sans doute le constat dressé par notre collègue. En 2020, le Groupe d'experts du Conseil de l'Europe sur l'action contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (GREVIO) a publié son premier rapport sur l'Espagne, rapport qui déplorait effectivement d'importantes différences découlant de l'importante autonomie des régions espagnoles.

M. André Reichardt . - Je n'ai pas d'opposition effective au changement de titre de la PPRE, je le dis d'autant plus librement qu'il y a deux mois, j'ai assisté au colloque organisé par la Délégation aux droits des femmes, sur les violences faites aux femmes mannequins : il me semble que l'idée d'une PPRE est venue alors.

Mme Laurence Harribey , rapporteure . - C'est exact.

M. André Reichardt . - Cependant, je crois utile de mentionner, dans le texte de la PPRE, que les violences visées sont aussi celles qui sont faites en raison du genre.

M. Ludovic Haye . - Attention, aussi, à ne pas créer de doublons avec les mécanismes d'alerte qui existent déjà, comme la ligne d'urgence de l'Éducation nationale contre le cyber-harcèlement.

Mme Laurence Harribey , rapporteure . - Effectivement, il faut y veiller. Les auditions nous ont donné des pistes de travail intéressantes qu'il nous faudra poursuivre.

La commission a conclu à l'adoption de la proposition de résolution européenne ainsi modifiée.

Proposition de résolution européenne tendant à
renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu l'article 2 du traité sur l'Union européenne,

Vu les articles 8 et 83 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatifs au principe de l'égalité entre les hommes et les femmes et à la lutte contre l'exploitation sexuelle des femmes,

Vu le chapitre I er de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,

Vu la convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique signée à Istanbul le 11 mai 2011,

Vu la directive 2011/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011 concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes et remplaçant la décision-cadre 2002/629/JAI du Conseil,

Vu la directive 2011/99/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 relative à la décision de protection européenne,

Vu la directive 2012/29/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité et remplaçant la décision-cadre 2001/220/JAI du Conseil,

Vu la communication de la Commission du 5 mars 2020 intitulée : « Une Union de l'égalité: stratégie en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes 2020-2025 »,

Vu la résolution 2021/2035 pour l'identification de la violence fondée sur le genre comme un nouveau domaine de criminalité énuméré à l'article 83, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne du 16 septembre 2021 du Parlement européen,

Considérant que l'État de droit nécessite le respect des principes fondamentaux de l'égalité entre les hommes et les femmes ;

Considérant les difficultés rencontrées pour consacrer un cadre juridique commun dans le droit européen en matière de lutte contre les violences subies par les femmes ;

Considérant l'absence d'une législation européenne spécifique à la lutte contre les violences fondées sur le genre et notamment subies par les femmes ;

Considérant les ambitions annoncées par la stratégie de l'Union européenne en faveur de l'égalité hommes-femmes 2020-2025 ;

Demande au Gouvernement d'élaborer avec ses partenaires européens un cadre juridique commun à la lutte contre les violences faites aux femmes, qu'elles soient physiques ou sexuelles ;

Demande l'élaboration d'une directive européenne sur la mise en place d'un cadre juridique commun à la lutte contre les abus et les violences faites aux femmes, reprenant les dispositions de la convention d'Istanbul ;

Souhaite notamment que cette directive européenne enjoigne aux États membres l'établissement de mesures visant à lutter contre toutes les formes de violence faites aux femmes, dont :

- des mesures pénales minimales, mesures définies au préalable selon les standards préétablis par les institutions du système juridique européen,

- des mesures de prévention, de soutien et de protection des victimes de telles violences, facilitant notamment l'accès des victimes à la justice, dès le premier signalement des violences, y compris en milieu hospitalier,

- des mesures visant à assurer la coopération entre les États membres et l'échange de bonnes pratiques, d'informations et d'expertise ;

Invite le Gouvernement à faire valoir cette position dans les négociations au Conseil.

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