TITRE III

AMÉLIORER LES GARANTIES PROCÉDURALES EN MATIÈRE D'ASSISTANCE ÉDUCATIVE

Article 7
Recours à une formation collégiale de jugement
en matière d'assistance éducative

Cet article propose que le juge des enfants statuant en matière d'assistance éducative puisse renvoyer une affaire particulièrement complexe devant une formation collégiale.

La commission a supprimé l'obligation que la formation collégiale soit composée de trois juges des enfants et a précisé qu'elle devra être composée en priorité de juges des enfants ou de juges ayant exercé ces fonctions.

I - Le dispositif proposé

Au regard de la particularité de l'assistance éducative, la loi a prévu de confier la compétence de cette matière à un juge spécialisé, le juge des enfants , ainsi que le prévoient les articles 375-1 du code civil 80 ( * ) et L. 252-2 du code de l'organisation judiciaire 81 ( * ) .

En matière d'assistance éducative, le juge des enfants juge en formation de juge unique et la collégialité n'est ni prévue par les textes ni permise par la jurisprudence .

Les dispositions du code civil et du code de procédure civile prévoient que le juge des enfants prend des décisions en matière d'assistance éducative et qu'il peut à tout moment modifier ses décisions d'office ou à la requête des parents, du mineur, de la personne à qui il a été confié ou du ministère public. En outre, les mesures d'assistance éducative sont prises par le juge des enfants du lieu où demeure, selon le cas, l'un des parents, le tuteur du mineur ou la personne, ou le service à qui l'enfant a été confié ; à défaut, par le juge du lieu où demeure le mineur. En cas de changement de de lieu de résidence, le juge doit se dessaisir au profit du juge du lieu de la nouvelle résidence, sauf ordonnance motivée 82 ( * ) .

Il résulte de ces dispositions que plusieurs juges des enfants ne peuvent être simultanément compétents pour statuer sur le fond, en matière d'assistance éducative, relativement à la situation d'un mineur déterminé , ainsi que l'a jugé la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 2 mars 1982 83 ( * ) .

Or, le juge des enfants peut être saisi de dossiers particulièrement complexes pour lesquels l'assistance d'autres juges pourrait être utile à sa décision. En effet, le juge des enfants peut avoir à traiter des cas dans lesquels les parents remettent en cause l'autorité du juge, où la situation familiale est marquée par d'importantes conflictualités, où un ou plusieurs membres de la famille sont poursuivis pour des crimes ou délits ou reviennent de zones de guerre. Rappelons enfin que les décisions du juge des enfants ont d'importantes conséquences pour l'enfant et sa famille.

Ces raisons ont conduit un certain nombre de magistrats à développer des formes de collégialité en matière d'assistance éducative, en dehors de tout cadre légal défini , contrairement aux autres juges spécialisés en matière civile pour lesquels le recours à une formation collégiale est prévu par la loi, à l'image du juge aux affaires familiales qui peut renvoyer une affaire à la formation collégiale du tribunal judiciaire 84 ( * ) .

Pour remédier à cette situation qui n'apparaît pas pleinement satisfaisante, le présent article propose que le juge des enfants puisse renvoyer une affaire particulièrement complexe à une formation collégiale .

À cette fin, le du présent article crée une nouvelle section au sein du code de l'organisation judiciaire, composée d'un article L. 252-6 qui prévoit qu'en matière d'assistance éducative, si la particulière complexité de l'affaire le justifie, le juge des enfants peut ordonner le renvoi à la formation collégiale du tribunal judiciaire qui statue comme juge des enfants . Il est précisé que la formation collégiale est présidée par le juge des enfants saisi de l'affaire.

Le du présent article procède à une coordination au sein du code de l'organisation judiciaire en regroupant au sein d'une section 1 intitulée « Institution et compétence » les articles L. 252-1 à L. 252-5, en cohérence avec l'insertion proposée.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

La commission des affaires sociales a adopté un amendement de M. Didier Martin précisant que le renvoi à la formation collégiale pourra être ordonné à tout moment de la procédure .

En séance publique, les députés ont adopté un amendement de Mme Valérie Six précisant que la formation collégiale devra être composée de trois juges des enfants en exercice .

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le rapporteur soutient la mesure proposée par le présent article qui permettra au juge de renvoyer certaines affaires très complexes devant une formation collégiale . Après avoir entendu plusieurs juges des enfants, il considère en effet qu'au regard des conséquences des décisions prises et de la complexité de certaines situations, il peut être opportun que le juge soit assisté par ses pairs.

Le présent article ne donne la faculté de renvoi à une formation collégiale qu'au juge des enfants saisi de l'affaire, contrairement au contentieux devant le juge aux affaires familiales ou le renvoi est de droit à la demande des parties. Le rapporteur considère que limiter cette faculté au juge des enfants est cohérent avec la particularité de l'assistance éducative, procédure d'ordre public pour laquelle le juge ne tranche pas un litige mais ordonne des mesures destinées à la protection de l'enfant. L'option retenue évite ainsi les risques de judiciarisation excessive de la procédure et de conflictualité entre les parties.

S'il approuve la modification apportée à l'Assemblée nationale visant à ce que le renvoi puisse être ordonné à tout moment de la procédure , qui apporte une certaine souplesse au dispositif, le rapporteur n'est pas favorable à la condition posée quant à la composition de la formation collégiale .

En effet, la modification apportée par les députés, qui exige que la formation collégiale soit composée de trois juges des enfants en exercice semble, en théorie, la meilleure solution pour s'assurer que la formation de jugement sera parfaitement compétente pour apprécier les affaires particulièrement complexes qu'elle aura à connaître. Elle sera toutefois inapplicable dans de nombreuses juridictions .

Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, seuls 153 tribunaux judiciaires comportent au moins un juge des enfants localisé et 24 tribunaux judiciaires n'ont qu'un juge des enfants . Le présent article, tel qu'adopté à l'Assemblée nationale, ne pourrait donc être applicable qu'au sein des grands tribunaux judiciaires, à moins de faire appel à des juges pour enfants d'autres tribunaux, possibilité qui se heurtera à d'importantes difficultés matérielles. Il n'est donc pas satisfaisant de prévoir un dispositif dont l'application ne pourra être effective sur l'ensemble du territoire et qui sera source d'inégalité de traitement des justiciables selon leur lieu de résidence .

La rédaction initiale du présent article, qui ne précisait pas la composition de la formation collégiale, était alignée sur ce qui est notamment prévu pour la formation collégiale statuant en tant que juge aux affaires familiales. Elle permet ainsi aux tribunaux judiciaires de s'adapter tant au cas d'espèce qu'aux effectifs de leurs tribunaux pour la composition des formations collégiales. Cette rédaction permettait ainsi l'application effective du dispositif proposé dans l'ensemble des tribunaux judiciaires . Le rapporteur souscrit toutefois à l'appréciation des députés sur le fait que les juges des enfants sont les mieux placés pour statuer en formation collégiale sur des dossiers complexes.

Pour ces raisons, la commission a adopté l'amendement COM-63 du rapporteur tendant à supprimer la condition que la formation collégiale soit composée de trois juges des enfants en exercice et à préciser que cette formation collégiale devra être composée en priorité de juges des enfants en exercice ou de juges ayant exercé les fonctions de juges des enfants.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 7 bis
Désignation par le juge d'un avocat pour l'enfant capable de discernement

Cet article propose que le juge des enfants puisse demander au bâtonnier la désignation d'un avocat pour l'enfant capable de discernement, lorsque son intérêt l'exige.

La commission a complété cet article afin que les services de l'aide sociale à l'enfance puissent demander au juge qu'il saisisse le bâtonnier pour la désignation d'un avocat pour l'enfant capable de discernement.

I - Le dispositif proposé

Le présent article est issu de cinq amendements identiques du Gouvernement, de la rapporteure, de Mme Monique Limon, de M. Paul Christophe et de M. Erwan Balanant, adoptés en séance publique à l'Assemblée nationale.

Il complète l'article 375-1 du code civil afin de prévoir que le juge des enfants pourra demander au bâtonnier la désignation d'un avocat pour l'enfant capable de discernement, lorsque son intérêt l'exige .

La présence d'un avocat dans la procédure d'assistance éducative est encadrée par des dispositions réglementaires figurant à l'article 1186 du code de procédure civile, qui prévoient que peuvent faire le choix d'un conseil ou demander au juge que le bâtonnier leur en désigne un d'office :

- le mineur capable de discernement ;

- les parents ;

- le tuteur ou la personne ou le représentant du service à qui l'enfant a été confié.

Il est précisé que la désignation doit intervenir dans les huit jours de la demande et que ce droit est rappelé aux intéressés lors de leur première audition.

La disposition proposée par le présent article permettrait ainsi au juge de décider de la désignation d'un avocat pour l'enfant discernant si celui-ci n'en fait pas la demande et s'il estime que son intérêt l'exige .

Ces dispositions s'inscrivent dans un cadre conventionnel, législatif et réglementaire permettant au mineur d'être entendu et assisté dans toutes les procédures qui le concernent.

? Le droit international prévoit que l'enfant discernant soit entendu et assisté au cours des procédures qui l'intéressent

La Convention internationale des droits de l'enfant prévoit en son article 12 que : « 1. Les États parties garantissent à l'enfant qui est capable de discernement le droit d'exprimer librement son opinion sur toute question l'intéressant , les opinions de l'enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. 2. À cette fin, on donnera notamment à l'enfant la possibilité d'être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l'intéressant , soit directement, soit par l'intermédiaire d'un représentant ou d'un organisme approprié, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale. »

La Convention européenne sur l'exercice des droits des enfants prévoit quant à elle en son article 3 que « un enfant qui est considéré par le droit interne comme ayant un discernement suffisant , dans les procédures l'intéressant devant une autorité judiciaire, se voit conférer les droits suivants, dont il peut lui-même demander à bénéficier : a. recevoir toute information pertinente ; b. être consulté et exprimer son opinion ; c. être informé des conséquences éventuelles de la mise en pratique de son opinion et des conséquences éventuelles de toute décision ».

Le principe selon lequel l'enfant bénéfice de droits dans les procédures judiciaires l'intéressant est décliné dans le droit national, tant en matière civile et qu'en matière pénale.

? En matière pénale, l'enfant est obligatoirement assisté d'un avocat

Aux termes de l'article 4-1 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante (abrogé), « le mineur poursuivi doit être assisté d'un avocat . À défaut de choix d'un avocat par le mineur ou ses représentants légaux, le procureur de la République, le juge des enfants ou le juge d'instruction fait désigner par le bâtonnier un avocat d'office. »

Le nouveau code de la justice pénale des mineurs, en vigueur depuis le 30 septembre 2021, prévoit en son article L. 12-4 que « le mineur poursuivi ou condamné est assisté d'un avocat. Le mineur participe au choix de son avocat ou effectue ce choix dans les conditions prévues par le présent code. Lorsqu'un avocat a été désigné d'office, dans la mesure du possible, le mineur est assisté par le même avocat à chaque étape de la procédure. »

Le critère du discernement détermine la responsabilité pénale du mineur , l'article 122-8 du c ode pénal disposant que « les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables des crimes, délits ou contraventions dont ils ont été reconnus coupables, dans des conditions fixées par une loi particulière qui détermine les mesures de protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation dont ils peuvent faire l'objet ».

? En matière civile, l'enfant discernant peut être entendu et assisté d'un avocat

Aux termes de l'article 388-1 du code civil, « le mineur capable de discernement est informé par le ou les titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, le tuteur ou, le cas échéant, par la personne ou le service à qui il a été confié de son droit à être entendu et à être assisté d'un avocat dans toutes les procédures le concernant ».

Dans ce cadre, le mineur bénéficie de droit de l'aide juridictionnelle , ainsi que le prévoit l'article 9-1 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : « dans toute procédure le concernant, le mineur entendu dans les conditions mentionnées à l'article 388-1 du code civil, s'il choisit d'être entendu avec un avocat ou si le juge procède à la désignation d'un avocat, bénéficie de droit de l'aide juridictionnelle ».

Le discernement est donc un critère déterminant pour l'exercice des droits de l'enfant dans la procédure. Il n'existe pas de définition juridique du discernement et celui-ci doit être déterminé par le juge , en fonction de chaque situation. À cet égard, la Cour de cassation considère que le seul critère de l'âge ne peut être suffisant pour déterminer le discernement de l'enfant 85 ( * ) . Le juge doit ainsi apprécier, selon l'affaire à juger et les informations qu'il recueille à propos de l'enfant, si celui-ci est capable de comprendre la situation et d'exprimer sa volonté.

La capacité de discernement de l'enfant lui permet alors d'exercer des droits dans le cadre de la procédure d'assistance éducative : le mineur discernant peut saisir le juge des enfants, être entendu par le juge, être assisté d'un avocat, consulter le dossier, faire appel de la décision du juge des enfants 86 ( * ) .

Doivent toutefois être distingués l'exercice des droits dans la procédure d'assistance éducative et la participation de l'enfant au procès . Ainsi, l'enfant non discernant se trouve néanmoins au centre du procès en assistance éducative et son absence de discernement ne fait pas obstacle à ce que le juge puisse l'entendre , l'article 1182 du code de procédure civile prévoyant que le juge « entend toute autre personne dont l'audition lui paraît utile » .

? La représentation du mineur par un administrateur ad hoc

Pour l'assistance et la représentation des mineurs, la loi a également prévu qu'ils puissent être représentés par un administrateur ad hoc . L'article 388-2 du code civil prévoit que lorsque dans une procédure les intérêts du mineur apparaissent en opposition avec ceux de ses représentants légaux, le juge des tutelles ou, à défaut, le juge saisi de l'instance lui désigne un administrateur ad hoc chargé de le représenter . En matière d'assistance éducative, cette personne doit être indépendante de la personne morale ou physique à laquelle le mineur est confié.

L'administrateur ad hoc est désigné par le juge pour représenter l'enfant lorsque son intérêt l'exige. En fonction de l'intérêt de l'enfant, il peut être désigné au sein de la famille, parmi les proches de l'enfant ou parmi les personnes inscrites sur la liste de la Cour d'appel qui recense les personnes habilitées à exercer cette fonction 87 ( * ) . Lorsqu'ils sont désignés à partir de cette liste, les administrateurs ad hoc qui représentent un mineur bénéficient d'une indemnité et du remboursement de leur frais de déplacement.

L'administrateur ad hoc est alors chargé de représenter et d'assister le mineur dans toutes les étapes de la procédure . Pour l'enfant non discernant , il peut exercer en son nom les droits du mineur dans la procédure, notamment la désignation d'un avocat.

II - La position de la commission

Il convient de rappeler la particularité de l'office du juge des enfants en matière d'assistance éducative . Bien que statuant en matière civile, le juge des enfants n'a pas pour mission de trancher un litige entre deux parties, mais d'ordonner les mesures nécessaires à la protection de l'enfant au regard de ses besoins fondamentaux. Cette configuration confère donc à l'enfant une place particulière dans le procès en assistance éducative . En outre, les décisions du juge des enfants ont vocation à s'adapter à la situation de l'enfant, qui évolue avec le temps. Elles n'apportent pas de solutions définitives, à la différence des décisions de justice qui tranchent un litige.

Dans cette procédure d'ordre public se pose la question de la défense des intérêts de l'enfant au regard de ses besoins fondamentaux.

De nombreux professionnels de l'aide sociale à l'enfance, juges et avocats entendus par le rapporteur plaident pour la désignation systématique d'un avocat pour l'enfant, qu'il soit ou non capable de discernement . Au-delà de la difficulté d'évaluer le discernement, qui n'est pas précisément défini et qui dépend de l'appréciation du juge, ils considèrent que l'enfant non discernant a besoin d'un défenseur puisqu'il ne peut pas faire valoir ses intérêts par lui-même .

Le rapporteur ne partage pas cette appréciation , puisque s'il représente un enfant non discernant, l'avocat apportera un avis subjectif de ce qu'est selon lui l'intérêt de l'enfant. Il ne pourra pas porter la parole de l'enfant si celui-ci n'est pas capable de s'exprimer. Dans cette situation, le juge des enfants est le mieux à même de faire émerger l'intérêt objectif de l'enfant, par le recueil éventuel de sa parole, l'audition des parents et par les informations et les évaluations qui lui sont transmises par les services sociaux. Il ne semble donc pas souhaitable de systématiser la présence de l'avocat pour l'enfant , au risque de judiciariser excessivement la parole de l'enfant et de multiplier les avis subjectifs sur ses besoins.

D'autres professionnels, dont des juges des enfants, également entendus par le rapporteur, sont opposés à la systématisation de la présence de l'avocat pour tout enfant, pour les raisons précédemment évoquées et considérant que l'assistance éducative est une procédure souple et particulière, centrée sur les intérêts de l'enfant. Les possibilités actuelles de désignation d'un avocat pour l'enfant et la faculté qu'il soit représenté par un administrateur ad hoc permettent déjà de garantir la défense des droits de l'enfant en assistance éducative.

Compte tenu du droit du mineur discernant à se faire assister d'un avocat s'il le souhaite, la modification proposée par le présent article n'apporte qu'une possibilité supplémentaire, qui consiste à ce que le juge désigne un avocat pour l'enfant discernant s'il n'en fait pas lui-même la demande et si son intérêt l'exige. Cette mesure renforce ainsi les pouvoirs du juge des enfants et est cohérente avec la particularité de la procédure en assistance éducative et de l'office du juge des enfants.

Le rapporteur soutient donc le dispositif proposé. Il considère qu'il est important de faciliter la désignation d'un avocat pour l'enfant, sans la rendre systématique, afin de s'adapter à la situation et à l'intérêt de l'enfant. Les services de l'aide sociale à l'enfance étant également bien placés, par les évaluations qu'ils conduisent, pour apprécier l'opportunité de la désignation d'un avocat pour l'enfant, le rapporteur a déposé un amendement COM-64 prévoyant que les services de l'ASE pourront demander au juge de saisir le bâtonnier pour la désignation d'un avocat pour l'enfant capable de discernement . La commission a adopté cet amendement du rapporteur.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 8
Renforcement de l'information du juge

Cet article propose de renforcer l'information du juge en cas de changement du lieu de placement de l'enfant décidé par les services de l'aide sociale à l'enfance.

La commission a adopté cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

En vertu de l'article L. 223-3 du code de l'action sociale et des familles, lorsque le service de l'ASE auquel est confié l'enfant en application d'une mesure judiciaire d'assistance éducative envisage de modifier le lieu du placement de l'enfant , il en informe le juge compétent au moins un mois avant la mise en oeuvre de sa décision.

Cette disposition vise à justifier auprès du juge les changements de lieu de placement, qui peuvent être perturbateurs pour les enfants, et de limiter ainsi ces changements au strict nécessaire, afin d'éviter les ruptures de prise en charge .

Toutefois, cet article L. 223-3 prévoit deux exceptions à l'information du juge . Elle n'est pas applicable :

- en cas d'urgence ;

- pour l'enfant de plus deux ans confié à une même personne ou à un même établissement pendant moins de deux années, en cas de modification prévue dans le projet pour l'enfant.

Le présent article entend lever ces dérogations à l'obligation d'informer le juge. Il modifie l'article L. 223-3 afin de prévoir :

- en vertu du , qu'en cas d'urgence le juge sera informé « dans les meilleurs délais » ;

- en vertu du , la suppression de la dérogation qui portait sur les enfants de plus de deux ans confiés à la même personne lorsque la modification était prévue dans le projet pour l'enfant.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

? En commission , les députés ont adopté un amendement de Mme Perrine Goulet fixant le délai d'information du juge en cas d'urgence à 48 heures. Cet amendement précise que le délai d'information du juge en cas de séparation d'une fratrie sera aussi fixé à 48 heures. En outre, les services de l'ASE devront justifier leur décision de modification du lieu de placement.

? En séance publique , les députés ont adopté un amendement de précision de la rapporteure.

L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.

III - La position de la commission

Le rapporteur soutient le dispositif proposé , qui conduira les services du département à mieux justifier de l'opportunité et de la nécessité d'un changement du lieu de placement. En effet, ces changements peuvent perturber l'enfant et susciter des ruptures de prise en charge qui doivent être évaluées préalablement . Il est en outre favorable à la suppression des exceptions à l'information du juge qui n'apparaissaient pas justifiées.

Cette obligation renforcée d'information créera néanmoins une contrainte supplémentaire pour les départements dans leur gestion des placements des enfants. Cette contrainte semble acceptable dans la mesure où l'information du juge ne requiert pas de formalisme particulier. Il est en outre essentiel que le juge compétent soit informé de l'évolution de la prise en charge du mineur pour qu'il puisse statuer de façon éclairée. Pour ces raisons, le rapporteur a proposé d'adopter cet article sans modification.

La commission a adopté cet article sans modification.


* 80 Art. 375-1 du code civil : « Le juge des enfants est compétent, à charge d'appel, pour tout ce qui concerne l'assistance éducative. »

* 81 Art. L. 252-2 du code de l'organisation judiciaire : « Le juge des enfants est compétent en matière d'assistance éducative. »

* 82 Art. 375-6 du code civil, art. 1181 et 1184 du code de procédure civile.

* 83 Cass, civ. 1 re , 2 mars 1982, n° 81-80.001 P.

* 84 Art. L. 213-4 du code de l'organisation judiciaire.

* 85 Cass., 1 re civ., 18 mars 2015, n° 14-11.392.

* 86 Si la loi ne fait pas entrer le critère du discernement dans la capacité du mineur à saisir le juge des enfants ou à interjeter appel, la Cour de cassation a néanmoins considéré qu'il incombait au juge du fond de vérifier que l'enfant possède un discernement suffisant pour exercer ces prérogatives (Cass., 1 re civ., 21 novembre 1995, n° 94-05.102).

* 87 Art. 1210-1 du code de procédure civile.

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