B. LE REFUS PERSISTANT DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE DE RÉPONDRE À L'URGENCE DE LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME

1. La volonté du Sénat de conforter sans délai les dispositions de la loi « SILT »

Le Sénat et l'Assemblée nationale se rejoignent sur l'utilité des quatre dispositions introduites par la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme , dite loi « SILT », pour prendre le relai de l'état d'urgence et arrivant à leur terme le 31 décembre 2020.

Les dispositions d'application temporaire de la loi « SILT »

Les quatre mesures de la loi « SILT » arrivant à échéance le 31 décembre 2020 et concernées par l'article 1 er du projet de loi sont les suivantes :

- les périmètres de protection 2 ( * ) , qui peuvent être mis en place par arrêté préfectoral afin d'assurer la sécurité d'un lieu ou d'un événement exposé à un risque d'actes de terrorisme à raison de sa nature et de l'ampleur de sa fréquentation ;

- la fermeture des lieux de culte 3 ( * ) dans lesquels « les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent provoquent à la violence, à la haine ou à la discrimination, provoquent à la commission d'actes de terrorisme ou font l'apologie de tels actes » ;

- les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (MICAS) 4 ( * ) , qui permettent au ministre de l'intérieur d'imposer une ou plusieurs obligations aux personnes présentant une menace de nature terroriste (assignation sur le territoire de la commune ou du département, interdiction de paraître, obligation de pointage, etc .) ;

- les visites domiciliaires et saisies (perquisitions administratives) 5 ( * ) .

En première lecture, le Sénat a toutefois jugé que le report de quelques mois du débat de fond sur l'avenir de ces dispositions n'était pas justifié compte tenu du bilan positif tiré de leur application, tant par les assemblées parlementaires, dans le cadre de l'exercice de leurs prérogatives de contrôle, que par le Gouvernement 6 ( * ) .

C'est pourquoi, soucieux de consolider sans délai l'arsenal de lutte contre le terrorisme, il a adopté une nouvelle rédaction de l'article 1 er en vue de procéder à une pérennisation immédiate des quatre dispositions de la loi « SILT » .

Tirant les conséquences des deux années de travaux de contrôle conduits par sa commission des lois sur l'application de cette loi 7 ( * ) , le Sénat a, dans le même temps, apporté plusieurs ajustements à ces dispositions , afin d'en renforcer l'efficacité. Il s'agissait en particulier :

- d' étendre le champ de la mesure de fermeture administrative prévue par l'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure à d'autres lieux connexes aux lieux de culte ;

- de renforcer l'information des autorités judiciaires sur les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance ;

- d' élargir les possibilités de saisies informatiques dans le cadre d'une visite domiciliaire lorsqu'il est fait obstacle, par l'occupant des lieux, à l'accès aux données présentées sur un support ou un terminal informatiques.

Lors de la discussion en séance publique, le Sénat a également adopté un amendement de M. Jean-Yves Leconte et des membres du groupe socialiste, écologiste et républicain, visant à intégrer dans la loi la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel excluant toute discrimination dans la conduite des vérifications au sein des périmètres de protection 8 ( * ) .

2. Le rétablissement, par l'Assemblée nationale, de son texte de première lecture

La commission mixte paritaire sur le projet de loi, qui s'est tenue le 22 octobre 2020, a échoué sur une divergence de calendrier, l'Assemblée nationale souhaitant se donner plus de temps de réflexion avant de consolider un arsenal législatif à l'efficacité pourtant désormais largement établie .

Ainsi que le relevait le député Didier Paris, rapporteur du projet de loi pour l'Assemblée nationale, « les solutions [proposées par le Sénat] sont loin d'être aberrantes, mais elles fermeraient un échange que nous voulons maintenir ouvert, dans le cadre d'un prochain projet de loi, afin de prendre le temps de formuler nos propres propositions et d'en débattre avec vous » 9 ( * ) .

L'Assemblée nationale a maintenu cette position en nouvelle lecture et rétabli son texte sur l'article 1 er du projet de loi , conduisant à la prorogation « sèche » des dispositions de la loi « SILT » jusqu'au 31 juillet 2021.

Elle a procédé, par cohérence, aux modifications de coordination nécessaires au sein de l'article 3 relatif à l'application outre-mer du projet de loi.


* 2 Art. L. 226-1 du code de la sécurité intérieure.

* 3 Art. L. 227-1 et L. 227-2 du même code.

* 4 Art. L. 228-1 à L. 228-7 du même code.

* 5 Art. L. 229-1 à L. 229-6 du même code.

* 6 Le rapport du Gouvernement remis au Parlement relatif au bilan de la deuxième année de mise en oeuvre de la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 fait état d'« une appropriation et [d'] une maitrise de ces instruments de police par l'autorité administrative » et d'« une utilité opérationnelle avérée ayant permis de faire face à une menace terroriste demeurant à un niveau particulièrement élevé ».

* 7 Voir le rapport d'information de M. Marc-Philippe Daubresse, fait au nom de la commission des lois, n° 348 (2019-2020), déposé le 26 février 2020. Ce document est consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/notice-rapport/2019/r19-348-notice.html

* 8 Décision n° 2017-695 QPC du 29 mars 2018.

* 9 Compte rendu de la commission mixte paritaire du 22 octobre 2020, rapport n° 71 (2020-2021) de MM. Marc-Philippe Daubresse, sénateur et Didier Paris, député, fait au nom de la commission mixte paritaire, déposé le 22 octobre 2020. Ce document est consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l20-071/l20-071.html

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