C. UNE AIDE À GÉOMÉTRIE VARIABLE POUR LES CATHÉDRALES

1. La montée en charge du Plan « cathédrales »...

Les crédits d'investissement déconcentrés, dédiés au financement des opérations de restauration de monuments historiques appartenant à l'État pour lesquelles la maîtrise d'ouvrage est exercée par les DRAC, devraient croître de 7 millions d'euros en CP, pour atteindre 53,77 millions d'euros (+ 13,1 % par rapport à la loi de finances).

Cette progression est concentrée, à hauteur de 5 millions d'euros en CP, sur le financement des travaux des cathédrales, à l'image de Saint-Sauveur d'Aix-en-Provence, de Saint-Gervais-Saint-Protais à Soissons et de Notre-Dame d'Amiens.

Les rapporteurs spéciaux relèvent par ailleurs la fin du financement du plan de mise en sécurité des cathédrales, monuments appartenant à l'État, par des subventions en principe destinées aux collectivités territoriales ou aux propriétaires privés. 2 millions d'euros étaient ainsi prévus sur cette ligne budgétaire en loi de finances pour 2020.

Ce plan « cathédrales », doté de 40 millions d'euros, bénéficiera par ailleurs de 80 millions d'euros supplémentaires en AE et 30 millions d'euros supplémentaires en CP au titre de la mission « Plan de relance ».

2. ... contraste avec l'absence de financement public pour la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris

Cette montée en charge de l'aide aux cathédrales est plus que nécessaire au regard des événements récents, qu'il s'agisse de l'incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris ou de celle de Nantes. Elle appelle cependant une remarque quant aux travaux entourant justement la restauration du bâtiment parisien 12 ( * ) .

L'établissement public administratif chargé de la restauration et de la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris (EP RNDP), institué par la loi du 29 juillet 2019 13 ( * ) est entré en fonction le 2 décembre dernier. L'établissement public fait partie de la liste des opérateurs de l'État du programme 175.

La commission des finances avait, à l'occasion des débats sur le projet de loi, exprimé ses réserves quant au coût de l'établissement public 14 ( * ) . Cette préoccupation a été rejointe par la Cour des comptes qui relève, dans un rapport public thématique publié en septembre dernier, un coût de fonctionnement de 5 millions d'euros par an, pour 39 ETPT (le montant total des rémunérations devant atteindre près de 4 millions d'euros) 15 ( * ) .

Reste que ce coût apparaît indolore pour l'État, car l'établissement ne bénéficie pas pour son financement de fonds publics et voit son financement presque intégralement assumé par les dons perçus 16 ( * ) . 184,4 millions d'euros de dons ont été collectés au 31 décembre 2019, les promesses de dons atteignant au total 824 millions d'euros.

Le ministre de la culture s'était pourtant engagé au Sénat sur une participation de l'État, lors des travaux préparatoires sur le projet de loi pour la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale. Il avait, en effet, indiqué que « l'État (devait) prendre sa part de financement dans la restauration de Notre-Dame de Paris » et qu'« il y (aurait) quoi qu'il en soit des subventions budgétaires du ministère de la culture à l'établissement public » 17 ( * ) . La loi elle-même prévoit, à l'article 2, que « les fonds recueillis au titre de la souscription nationale sont exclusivement destinés au financement des travaux de restauration et de conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et de son mobilier dont l'État est propriétaire ». La maîtrise d'ouvrage devrait en conséquence, être exclue du financement par les dons. La Cour relève en outre que plus du quart des effectifs (11 employés, 7 étant affectés au pôle communication et 4 au pôle opération, en charge de la valorisation du parvis) n'ont qu'un lien ténu avec la conservation et la restauration de la cathédrale.

Il apparaît aujourd'hui que seul le loyer de l'établissement, évalué à 213 000 euros annuels, est pris en charge par le ministère de la Culture depuis le mois d'octobre dernier. Les locaux utilisés appartiennent aux services du Premier ministre et donnent lieu au versement d'un loyer à France Domaine.

Cet absence de financement public n'est pas sans susciter d'interrogation au regard de l'aspect symbolique de ce chantier. Elle semble par ailleurs trahir l'intention du donateur. Elle n'est pas, enfin, compensée par une tutelle renforcée de la part du ministère de la culture. Ainsi, le contrat d'objectifs et de permanence de l'établissement n'est, pour l'heure, toujours pas signé. Il convient de rappeler à ce stade que le coût du chantier de restauration générera des recettes de TVA qui auraient pu largement financer la charge administrative.


* 12 Interrogée par les rapporteurs spéciaux, la direction générale des patrimoines a confirmé la fin des travaux de conservation fin 2021 et le début concomitant des travaux de restauration.

* 13 Loi n° 2019-803 du 29 juillet 2019 pour la conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale et décret n° 2019-1250 du 28 novembre 2019 relatif à l'organisation et au fonctionnement de l'établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris.

* 14 Projet de loi pour la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale à cet effet, Avis n° 519 (2018-2019) de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances, déposé le 22 mai 2019.

* 15 La conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris - Premier bilan, rapport public thématique de la Cour des comptes, septembre 2020.

* 16 Ces dons, qui ouvrent droit à une réduction d'impôt, donnent lieu à une dépense fiscale de l'État.

* 17 Audition devant la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat, 16 mai 2019.

Page mise à jour le

Partager cette page