D. UN RENOUVELLEMENT ATTENDU DU SYSTÈME D'ALERTE DES POPULATION À TRAVERS LE « 112 INVERSÉ »

1. Le SAIP : un projet qui envisageait initialement un vecteur d'alerte par téléphone, avant d'être abandonné en 2018

Initié en 2009 par le ministère de l'intérieur, le système d'alerte et d'information des populations (SAIP) fait suite à la préconisation du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 : « La France doit, tout d'abord, disposer d'un moyen d'information rapide de sa population. À ce titre, un réseau d'alerte performant et résistant sera mis en place, [...] pour utiliser au mieux la diversité des supports aujourd'hui possibles : sirènes, SMS, courriels, panneaux d'affichage public ... »

Dans son rapport d'information consacré au SAIP 13 ( * ) , le rapporteur spécial avait critiqué le choix contestable de faire des sirènes « le principal vecteur » du Système d'alerte, au détriment du volet « mobile » , qui aurait davantage contribué à le moderniser. Ce dernier n'avait ainsi bénéficié que d'1,6 million d'euros entre 2016 et 2018 , afin de couvrir le déploiement de l'application SAIP. Cette dernière s'est avérée infructueuse et a été abandonnée.

Le rapporteur spécial préconisait néanmoins de réorienter ce volet mobile vers le déploiement du Cell broadcast, une technologie permettant la diffusion d'une alerte claire et immédiate par SMS. Il déplorait à cet égard que les PLF précédents ne prévoient aucun crédit à cet effet, alors que ce moyen d'alerte se faisait de plus en plus nécessaire , comme l'illustrait l'exemple de l'incendie de l'usine Lubrizol à l'automne 2019.

La commission d'enquête sénatoriale chargée d'évaluer la gestion des conséquences de cet incendie avait ainsi relayé cette préoccupation , recommandant notamment de « tester en grandeur réelle, d'ici 2021, le dispositif de cell broadcast et en tirer les enseignements en termes d'alerte des populations et de comportements à adopter. » 14 ( * )

Non seulement nécessaire, un système d'alerte par téléphone sera même bientôt obligatoire en France d'ici juin 2022, date butoir pour la transposition de la directive n°2018/1972 du 11 décembre 2018 établissant un code européen des communications électroniques.

L'article 110 de cette même directive prévoit justement que « lorsque des systèmes d'alerte du public sont en place, les alertes publiques sont transmises à tous les utilisateurs finaux concernés par des fournisseurs de services mobiles de communications interpersonnelles fondés sur la numérotation . Les utilisateurs finaux concernés devraient être considérés comme étant ceux qui sont situés dans les zones géographiques potentiellement touchées par des urgences ou des catastrophes majeures, imminentes ou en cours, pendant la période d'alerte, selon les prescriptions des autorités compétentes . »

2. Le retour nécessaire d'un dispositif d'alerte par téléphone avec le « 112 inversé », financé dès 2021 par le plan de relance

Le 24 septembre 2020, le ministre Gérald Darmanin a annoncé à Rouen la mise en place d'une solution d'alerte et d'information des populations par téléphone mobile , un an après l'incendie de Lubrizol. Le ministère de l'intérieur indique en effet que cet outil sera développé à partir du recours probable à l'une et/ou à l'autre des deux technologies permettant d'en respecter les termes: le Cell broadcast et la diffusion de SMS géolocalisés (LB SMS) .

Les crédits correspondants à cette reprise du volet « mobile » du SAIP ne sont cependant plus retracés par le programme 161. Ils auraient vraisemblablement dû être pris en charge par le programme 216 et pilotés par la DNUM du ministère de l'intérieur. Ils sont finalement intégrés à la mission « Plan de relance », et s'élèvent à 37 millions d'euros en AE et CP pour 2021 .

Le projet, désormais baptisé « Reverse 112 » ou « 112 inversé », doit compléter les outils d'alerte existants « par une composante géolocalisée des populations qui permettra aux citoyens se trouvant dans une zone à risque d'être, en cas de crise imminente ou en cours, alertés sur la nature de celle-ci et informés des dispositions à prendre immédiatement » . 15 ( * )

Une enveloppe complémentaire de 13 millions d'euros couvrira la finalisation du projet, qui représente donc un montant total de 50 millions d'euros . Ces crédits financeront également l'adaptation des réseaux des opérateurs de télécommunications, une décision du Conseil d'État de 2012 ayant confirmé que la dépense supportée par les opérateurs, en investissement, devait être couverte par l'État.


* 13 Rapport d'information n° 595 (2016-2017), Le système d'alerte et d'information des populations : un dispositif indispensable fragilisé par un manque d'ambition, de Jean Pierre Vogel, fait au nom de la commission des finances - 28 juin 2017.

* 14 Rapport d'information n° 480 (2019-2020) de la commission d'enquête chargée d'évaluer la gestion des conséquences de l'incendie de l'usine Lubrizol.

* 15 Projet annuel de performance de la mission « Plan de relance » pour 2021.

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