PREMIÈRE PARTIE
UNE MISSION N'OFFRANT QU'UNE VISION PARTIELLE DES DÉPENSES LIÉES À L'IMMIGRATION, DANS UN CONTEXTE D'ABSENCE DE MAÎTRISE DES FLUX

I. UN CONTEXTE MIGRATOIRE TOUJOURS TENDU ET INCONTRÔLÉ

A. UNE ABSENCE DE DONNÉES FIABLES PRÉJUDICIABLE À L'EXAMEN PAR LE PARLEMENT DU BUDGET DE L'IMMIGRATION

L'examen de la mission « Immigration, asile et intégration » du projet de loi de finances s'effectue dans un contexte marqué par l'absence de données fiables permettant d'évaluer clairement la situation migratoire de la France, ce qui en réduit grandement la portée.

Ce problème d'insuffisance de chiffres fiables et de sincérité de la part de l'exécutif est accentué par l'absence de consolidation des différents coûts de l'immigration.

Les dépenses de l'État induites par l'immigration ne se limitent pas à la mission « Immigration, asile et intégration ». Le coût estimé de la politique française de l'immigration et de l'intégration est de 5,8 milliards d'euros en 2018, de 6,4 milliards d'euros en 2019, de 6,7 milliards d'euros en 2020 et 6,9 milliards d'euros en 2021. Il a ainsi augmenté de plus d'un milliard d'euros en quatre ans.

Ce coût, issu du document de politique transversale (DPT) « Politique française de l'immigration et de l'intégration » annexé au projet de loi de finances pour 2021, auquel contribuent 19 programmes répartis au sein de 13 missions budgétaires, ne prend en réalité en compte que les dépenses directes et orientées à titre principal vers les étrangers.

Part des crédits de paiement de la mission « Immigration, asile et intégration » par rapport à l'ensemble des crédits de la « Politique française de l'immigration et de l'intégration »

(en %)

Source : commission des finances, d'après le document de politique transversale « Politique française de l'immigration et de l'intégration » annexé au présent projet de loi de finances

Le rapporteur spécial estime que certaines dépenses de l'État, comme celles relatives à l'AME, intégralement destinées à des immigrés, pourraient être intégrées à la mission « Immigration, asile et intégration », afin d'apporter une vision davantage consolidée du coût réel de cette politique publique.

Il est regrettable, à cet égard, que le ministère de l'intérieur, pourtant chef de file de cette politique, ne soit pas en mesure d'apporter de réponse aux questions du rapporteur spécial 1 ( * ) relatives aux coûts de l'immigration supportés par les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale.

Le cas des mineurs étrangers non accompagnés, dont le nombre recensé par le ministère de la justice s'élève en 2019 à 16 760, est à cet égard symptomatique, puisqu'il a plus que doublé depuis 2016. L'Assemblée des départements de France (ADF) évalue pour sa part le nombre de mineurs non accompagnés pris en charge à environ 40 000 2 ( * ) . Leur prise en charge échappe pourtant largement à l'État.

Nombre de personnes déclarées mineurs étrangers
non accompagnés recensés par le ministère de la justice

Source : cellule MNA de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (ministère de la justice)

Le coût de la prise en charge de ces personnes incombe essentiellement aux départements, au titre de l'aide sociale à l'enfance 3 ( * ) , et était évalué à environ 2 milliards d'euros en 2018 par l'Assemblée des départements de France 4 ( * ) .


* 1 Réponses aux questionnaires budgétaires.

* 2 Assemblée des départements de France, Fiche info « L'accueil des MNE dans les départements », février 2019.

* 3 Dont ils représentent environ 15 % des bénéficiaires.

* 4 Assemblée des départements de France, Fiche info « L'accueil des MNE dans les départements », février 2019.

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