B. L'INTRODUCTION SURPRISE DE LA CRÉATION D'UNE BRANCHE « AUTONOMIE » PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

1. Des moyens publics éclatés

Le financement de la dépendance est éclaté et dépend de plusieurs types d'acteurs :

- l'État , sur qui repose notamment la charge de différents crédits d'impôts et la prise en charge de prestations telles que l'allocation aux adultes handicapés (AAH) ;

- la sécurité sociale, essentiellement au travers de l'assurance maladie , à la fois au travers du financement direct des soins stricto sensu, et au travers du versement de deux contributions à la CNSA (l'une au titre des établissements et services pour personnes âgées et l'autre au titre des établissements et services pour personnes handicapées) ;

- la CNSA , attributaire de ressources fiscales propres ;

- les conseils départementaux , qui assurent le cofinancement des dépenses de dépendance sur le terrain avec les crédits de la CNSA répartis sur le territoire par les agences régionales de santé (ARS). Il incombe également aux départements de financer certaines prestations comme l'aide sociale à l'hébergement (ASH) pour les personnes les plus précaires accueillies en établissements ;

- les personnes elles-mêmes ou via leurs organismes complémentaires, au travers du « reste à charge ».

Le rapport de la concertation « grand âge et autonomie » rédigé par Dominique Libault a résumé dans le schéma suivant la répartition des charges en matière de dépendance à partir des données de la DREES pour l'année 2014.

Répartition des dépenses en matière de dépendance

Source : Rapport sur la concertation grand âge et dépendance

Les usagers se trouvent donc face à une multiplicité de guichets, source de complexité.

2. Un besoin de ressources supplémentaires de plus de 10 milliards d'euros en 2030

Le rapport « Libault » a permis de donner une certaine visibilité financière sur les besoins de financement à assurer au cours des prochaines années, tant pour ce qui concerne l'évolution due à l'augmentation du nombre de personnes âgées dépendantes et les dépenses nécessaires pour améliorer la qualité du service rendu.

S'agissant du simple facteur démographique , le rapport estime ainsi que, par rapport à l'année 2018, la hausse des dépenses devrait s'élever à 2,1 milliards d'euros en 2024 (1,6 milliard pour les soins à domicile et 0,5 milliard pour la demande en établissement) et à 4,3 milliards d'euros en 2030 (3,3 milliards d'euros pour les soins à domicile et 1 milliard en établissement).

S'agissant de l'amélioration du service rendu, dont l'opportunité politique sera à apprécier dans un autre cadre que le présent rapport, le rapport « Libault » a identifié un besoin de financement supplémentaire, toujours par rapport à 2018, de 4,8 milliards d'euros d'ici à 2024 et de 6,1 milliards d'euros à l'horizon 2030.

Globalement , le besoin de financement supplémentaire à assurer par rapport à 2018, devrait donc s'élever à 6,9 milliards d'euros en 2024 et 10,4 milliards d'euros en 2030 .

L'enjeu du financement apparaît donc très lourd pour les prochaines années.

3. La demande d'un rapport dont le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale anticipe les conclusions

Face à ces enjeux, les deux projets de loi proposaient, dans leur version initiale :

- de flécher vers la perte d'autonomie, à partir de 2024, une part de CSG de 2,3 milliards d'euros actuellement consacrée au remboursement de la dette sociale ;

- de mieux identifier les dépenses consacrées à l'autonomie dans les lois de financement de sécurité sociale ;

- de transmettre au Parlement avant fin septembre un rapport étudiant l'opportunité de créer un nouveau risque et, éventuellement, une nouvelle branche de la sécurité sociale.

Risque et branche

En matière de sécurité sociale, la notion de risque, se définit comme tout type d'événement susceptible de réduire le revenu des travailleurs et justifiant l'affiliation à un ou plusieurs régimes. Le code de la sécurité sociale identifie aujourd'hui pas moins de neuf hypothèses d'affiliation : maladie, invalidité, maternité, paternité, vieillesse, veuvage, décès, accidents du travail, maladies professionnelles.

La notion de branche apparaît également du code de la sécurité sociale à l'article L. 200-2, qui en dénombre en effet quatre : « 1° maladie, maternité, invalidité et décès ; 2° accidents du travail et maladies professionnelles ; 3° vieillesse et veuvage ; 4° famille » .

La notion de branche est devenue essentiellement financière, chaque branche devant se maintenir à l'équilibre. Les LFSS fixent ainsi, par branche, les objectifs de dépense de l'ensemble des régimes obligatoires de base. Elle répond également à une logique d'organisation autour d'une caisse centrale (CNAM, CNAV, CNAF) et d'un réseau territorial.

Les députés ont conservé le schéma proposé par les textes initiaux, mais ont anticipé les conclusions du rapport en inscrivant dès à présent dans le projet de loi la création d'un nouveau risque et d'une nouvelle branche « Autonomie » de la sécurité sociale , gérée par la CNSA.

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