EXAMEN EN COMMISSION

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MERCREDI 17 JUIN 2020

Mme Catherine Troendlé, rapporteur . - Il s'agit aujourd'hui d'examiner en deuxième lecture cette proposition de loi, sur laquelle nous nous étions déjà penchés en octobre.

Proposé par M. Jean-Charles Colas-Roy, membre du groupe La République En Marche de l'Assemblée nationale, et qui en a aussi été le rapporteur, ce texte a pour objet de faire décroître le taux de mortalité très important des arrêts cardiaques en France. Nous avions naturellement souscrit à cet objectif en première lecture, mais une analyse juridique scrupuleuse nous avait poussés à supprimer sept articles parmi les douze contenus dans la proposition de loi, au motif que ces dispositions n'entraient pas dans le champ de l'article 34 de la Constitution ou, pour certaines, étaient déjà satisfaites. Le superflu étant ôté, nous avions parfait les dispositions restantes, en réécrivant l'article 1 er , en précisant la rédaction de l'article 11 et en autorisant, à l'article 7, certains personnels de santé à accomplir les actes de sensibilisation au secourisme aux côtés des acteurs de la sécurité civile. C'est donc un véhicule plus léger, mais plus efficace que nous avions renvoyé à l'Assemblée nationale.

Le texte qui nous est soumis montre que notre démarche a été comprise. Ainsi nos collègues députés ont-ils conservé la majeure partie des modifications adoptées par nos soins, nous proposant un compromis qui me semble acceptable.

Ils ne sont pas revenus sur l'essentiel de la réécriture de l'article 1 er , relatif au régime de la responsabilité civile et pénale du sauveteur mais y ont apporté deux modifications. D'une part, ils ont réintroduit le terme « citoyen sauveteur », que nous avions remplacé par « sauveteur occasionnel et bénévole », estimant que le terme « citoyen » était sans lien avec l'objet de la proposition de loi car consubstantiel aux droits civiques et politiques qui lui sont reconnus par le droit positif. Je maintiens ma position à ce sujet ; pour autant, cette réintroduction ne constitue pas une malfaçon rédhibitoire, d'autant que le rapporteur à l'Assemblée nationale a clarifié, dans son rapport, la manière dont ce terme doit être entendu. D'autre part, a également été réintroduit le détail des gestes devant être mis en oeuvre par le citoyen sauveteur, mention que nous avions ôtée, car elle nous semblait susceptible de décourager toute action. À nouveau, je regrette cette réintroduction, mais je n'y vois pas de grief insurmontable.

Les suppressions ou adoptions conformes de six articles dans leur version issue des travaux du Sénat sont à compter dans les motifs de satisfaction. Mais quatre articles écartés ont été repris dans le nouveau texte proposé par l'Assemblée nationale. Il s'agit des articles 2 et 4 relatifs à la sensibilisation des élèves au secourisme et au droit à la formation aux gestes de premier secours pour les salariés, que nous avions écartés au motif qu'ils étaient de nature réglementaire et déjà satisfaits par le droit en vigueur. Nous avions également écarté l'article 6, instaurant une journée nationale de lutte contre l'arrêt cardiaque : cette création n'entre pas dans le domaine de la loi et il existe déjà de nombreuses journées, mondiales ou régionales, consacrées au coeur, à la lutte contre les arrêts cardiaques ou aux premiers secours. Enfin, a été réintroduit l'article 12 bis , enjoignant au Gouvernement de rendre un rapport annuel au Parlement ; il n'est sans doute nul besoin de vous rappeler la position du Sénat sur la question des rapports...

Ces réintroductions n'étaient pas souhaitables sur le fond, mais je crois qu'elles constituent un prix raisonnable à payer pour trouver un compromis avec l'Assemblée nationale. Même si la qualité de la loi est une victime collatérale de cet accord, je vous propose donc d'approuver le texte sans modification.

M. Philippe Bas, président . - Merci de votre exposé sur un sujet qui vous tient particulièrement à coeur.

M. Yves Détraigne . - J'ai toujours du mal à comprendre ce que ce texte apporte. Est-il vraiment nécessaire ? Que va-t-il changer ?

M. François Bonhomme . -Le fait que, pendant le confinement, les gens n'aient pas consulté leur médecin pour des signaux faibles pouvant annoncer des accidents cardiaques risque de créer des difficultés dans les mois à venir et d'alourdir les chiffres. Il faudra évaluer ce phénomène et mettre cette évaluation au bilan négatif de la gestion de l'épidémie de Covid-19.

M. Jean-Luc Fichet . - L'appellation « citoyen sauveteur » a tout son sens, tout comme cette loi, qui est une bonne loi. Je soutiendrai aussi l'idée d'une journée nationale du coeur ; des précédents ont montré que cela pouvait se faire par la loi. Nous sommes en tout cas pleinement satisfaits de voir cette proposition de loi aboutir.

Mme Catherine Troendlé, rapporteur . - Ce texte n'est pas inutile, monsieur Détraigne : il consolide un pan de la jurisprudence en matière de responsabilités civile et pénale. Ce n'est pas mal !

Je suis d'accord, monsieur Bonhomme, sur la nécessité d'un suivi des phénomènes que vous mentionnez, mais cela dépasse le cadre de cette proposition de loi.

Vous expliquez, monsieur Fichet, votre attachement au terme « citoyen sauveteur ». J'ai, quant à moi, précisé, dans mon rapport en première lecture, pourquoi il m'importait que le terme « citoyen » demeure rattaché au contexte précis dans lequel il s'inscrit, qui n'est pas celui de ce texte. C'est pourquoi le rapporteur à l'Assemblée nationale a pris le soin de clarifier sa position. Il sera très important, le jour où un juge voudra se prononcer sur une affaire, qu'il puisse retrouver ces explications et sache pourquoi le terme « citoyen » a été réintroduit dans le texte.

S'agissant de la journée nationale, le Conseil constitutionnel a rendu une décision sur le sujet, considérant que ce type de décisions relève plutôt du domaine réglementaire. En tant que juristes, il est normal que nous cherchions à rédiger des textes respectueux de ses décisions.

Enfin, il existe au moins quatre textes de loi relatifs aux gestes qui sauvent. Le plus ancien, remontant à 2004, impose une formation au secourisme à tous les élèves de troisième, et nous atteignons un taux d'environ 90 % d'élèves formés. Mais, si l'Éducation nationale et le ministère de l'intérieur s'accordent pour permettre aux sapeurs-pompiers de délivrer des formations en classe, nous pourrons monter encore en puissance. Cela va dans le bon sens. Nous devons soutenir toutes les mesures qui peuvent permettre de sauver des vies.

Une précision enfin, si vous souhaitez déposer des amendements, le champ du texte se limite aux premiers secours : formation, acteurs, matériel et modalités.

Mme Muriel Jourda . - Je m'abstiens sur ce texte.

La proposition de loi est adoptée sans modification.

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