N° 482

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 3 juin 2020

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois (1) sur la proposition de loi , adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à protéger les victimes de violences conjugales ,

Par Mme Marie MERCIER,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Bas , président ; MM. François-Noël Buffet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Di Folco, MM. Jacques Bigot, André Reichardt, Mme Sophie Joissains, M. Arnaud de Belenet, Mme Nathalie Delattre, MM. Pierre-Yves Collombat, Alain Marc , vice-présidents ; M. Christophe-André Frassa, Mme Laurence Harribey, M. Loïc Hervé, Mme Marie Mercier , secrétaires ; Mme Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Philippe Bonnecarrère, Mmes Agnès Canayer, Maryse Carrère, Josiane Costes, MM. Mathieu Darnaud, Marc-Philippe Daubresse, Mme Jacky Deromedi, MM. Yves Détraigne, Jérôme Durain, Mme Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Jean-Luc Fichet, Pierre Frogier, Mmes Françoise Gatel, Marie-Pierre de la Gontrie, M. François Grosdidier, Mme Muriel Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Henri Leroy, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Jean Louis Masson, Thani Mohamed Soilihi, Alain Richard, Vincent Segouin, Simon Sutour, Mmes Lana Tetuanui, Claudine Thomas, Catherine Troendlé, M. Dany Wattebled .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

2478 , 2587 et T.A. 390

Sénat :

285 et 483 (2019-2020)

L'ESSENTIEL

Réunie le mercredi 3 juin 2020 sous la présidence de Philippe Bas (Les Républicains - Manche), la commission des lois a adopté , sur le rapport de Marie Mercier (Les Républicains - Saône-et-Loire), la proposition de loi n° 285 (2019-2020) visant à protéger les victimes de violences conjugales .

Cette proposition de loi issue de l'Assemblée nationale fait suite au Grenelle des violences conjugales qui s'est tenu à l'automne dernier. Elle transcrit certaines de ses préconisations en matière civile comme en matière pénale. Elle déborde toutefois du strict champ de la lutte contre les violences conjugales pour inclure des mesures visant à protéger les mineurs ou à prévenir les violences, au-delà du cadre des violences intrafamiliales.

Si certaines mesures seront sans doute utiles en pratique, d'autres apparaissent d'une portée limitée : ajustements apportés à des dispositifs existants, clarifications rédactionnelles, mesures de précision, création de circonstances aggravantes, codification d'une jurisprudence, demande de rapport... occupent une grande place dans cette proposition de loi. Peu de dispositions semblent susceptibles de faire évoluer substantiellement la manière dont s'organise la lutte contre les violences conjugales.

Sur proposition de son rapporteur, la commission a adopté treize amendements afin de renforcer certains dispositifs, d'améliorer la rédaction d'autres dispositions et de supprimer des articles dont l'apport lui est apparu incertain.

Tout l'enjeu va maintenant être de mettre en oeuvre, sur le terrain, un arsenal législatif étoffé, ce qui suppose de mener un travail de formation auprès des policiers, des gendarmes et des magistrats, de consacrer des moyens aux associations qui soutiennent les victimes, de favoriser la libération de la parole par des campagnes de communication, de favoriser l'éducation dès le plus jeune âge ou encore d'agir dans le domaine du logement afin de faciliter l'éviction du conjoint violent du domicile conjugal.

I. LE TROISIÈME TEXTE DE LA LÉGISLATURE CONSACRÉ À LA LUTTE CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX ENFANTS

La proposition de loi visant à protéger les victimes de violence conjugale présentée par les députés Bérangère Couillard et Guillaume Gouffier-Cha, et par les membres du groupe La République en Marche (LaREM) et apparentés, est examinée après l'adoption de la loi Schiappa en 2018 et de la loi Pradié en 2019.

Elle a notamment pour objectif d'inscrire dans la loi les propositions de nature législative issues du Grenelle contre les violences conjugales, dont les conclusions ont été présentées le 25 novembre 2019.

A. UN ARSENAL LÉGISLATIF DÉJÀ ÉTOFFÉ PAR LES LOIS SCHIAPPA ET PRADIÉ

Le Parlement a déjà fait évoluer la législation depuis deux ans, puisque deux textes ont été votés depuis le début de la législature dans le but de combattre plus efficacement les violences commises à l'encontre des femmes et des enfants.

1. La loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes

La loi n° 2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, dite loi Schiappa, ne vise pas spécifiquement les violences conjugales ou intrafamiliales mais contient un ensemble de mesures destinées à lutter contre les violences faites aux femmes et à mieux protéger les mineurs.

Elle a notamment institué une nouvelle infraction d' outrage sexiste afin de mieux sanctionner le « harcèlement de rue ». Elle a élargi la définition du harcèlement en ligne afin de pouvoir réprimer plus efficacement les situations où une personne est victime d'attaques coordonnées sur internet, sans que les agissements soient nécessairement répétés par chaque agresseur.

En ce qui concerne la protection des mineurs, la loi a précisé la définition du viol afin que ce crime soit plus facile à caractériser lorsque la victime est mineure. Elle a également porté le délai de prescription à trente ans à compter de la majorité de la victime.

2. La loi visant à agir contre les violences au sein de la famille

La loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille, dite loi Pradié du nom de notre collègue député Aurélien Pradié (Les Républicains - Lot), auteur de la proposition de loi initiale, porte plus spécifiquement sur la question des violences commises au sein du couple ou au sein de la famille.

Elle a donné une base légale à l'utilisation d'un nouvel outil de prévention des violences conjugales - le bracelet anti-rapprochement - dont le port peut être ordonné par le juge pénal. Ce bracelet électronique permet de prévenir la victime que son conjoint violent se rapproche et provoque une alerte dans un centre de surveillance afin que les forces de police ou de gendarmerie interviennent si le conjoint violent n'obtempère pas après un premier avertissement. Le dispositif devrait être opérationnel à la fin de l'année, compte tenu du temps nécessaire au lancement des appels d'offres et à la constitution des équipes.

Cette loi a également réformé le régime juridique de l' ordonnance de protection , afin qu'elle soit délivrée dans des délais plus brefs par le juge aux affaires familiales (JAF) et que le recours au bracelet anti-rapprochement puisse être proposé dans ce cadre de manière à prévenir la répétition des violences.

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