D. UNE STRATÉGIE À REPENSER

Votre rapporteur spécial reste assez réservé sur les contours de la mission d'Olivier Courson, qui peuvent apparaître contradictoires, en voulant accroître les moyens de l'influence française tout en appelant à une réduction des moyens qui lui sont assignés.

De la présentation sommaire des conclusions qui lui en a été faite, votre rapporteur spécial retient avant tout la possibilité d'un rapprochement de FMM avec l'Agence française de développement. Un fléchage des crédits de celle-ci doit permettre notamment de renforcer la présence de FMM en Afrique. Plus largement, le montant des actions menées par FMM et pouvant relever de l'aide au développement est estimé à une somme comprise entre 20 et 30 millions d'euros. Reste à adapter les critères d'éligibilité des projets en ce qui concerne l'audiovisuel. Les projets financés par l'AFD le sont dans le cadre d'une aide limitée à une durée de 4 ans, ce qui peut apparaître peu efficient s'agissant des investissements audiovisuels. L'octroi annoncé en 2020 d'un financement (1,2 million d'euros) pour développer le pôle de langues africaines de RFI permettra d'évaluer les contours de ce partenariat.

S'il partage le souhait du Gouvernement de réformer l'audiovisuel public, votre rapporteur spécial rappelle que ce projet doit également aboutir à une mise en avant de la spécificité de l'audiovisuel extérieur. Le rôle de la puissance publique est en effet de contribuer au financement de missions permettant de renforcer la présence française dans le monde, face à une concurrence particulièrement agressive. Votre rapporteur spécial souhaite donc que soit sanctuarisé un pourcentage de la contribution à l'audiovisuel public, qui serait consacré à l'audiovisuel public extérieur 24 ( * ) . Cette sanctuarisation pourrait être précédée d'une modification de la répartition de la contribution à l'audiovisuel public entre les différents affectataires.

Cette part réservée financerait uniquement des dépenses afférentes au renforcement de la présence française dans le monde et non des dépenses courantes de fonctionnement. Elle impliquerait un rapprochement des ministères chargés des affaires étrangères et de la culture en vue d'élaborer les priorités en la matière. Il convient de rappeler à ce stade qu'un représentant du ministère chargé des affaires étrangères participe au conseil d'administration de FMM. L'agence CFI détenue par FMM est par ailleurs principalement soutenue par ce ministère, via le programme 209.

Cette refonte de la gouvernance et cet élargissement du financement impliquent, dans le même temps, une amélioration des outils de suivi budgétaire, ciblant notamment l'utilisation, par zone géographique, des crédits affectés.

S'agissant des synergies, le ministère comme le rapport Courson table sur la réforme de l'audiovisuel à venir et le cadre de la holding pour les développer. Les annonces en la matière ne convainquent pas votre rapporteur spécial (cf supra). Les mutualisations existent déjà, notamment entre FMM et TV5 Monde. Les deux groupes participent ainsi :

- à Vrai ou Fake ?, la plateforme de décryptage de l'information et d'éducation aux médias commune aux sociétés de l'audiovisuel public et hébergée sur le site de franceinfo, mise en ligne le 6 juin 2018 ;

- à Culture Prime, l'offre numérique culturelle commune aux sociétés de l'audiovisuel public lancée en novembre 2018 ;

- au groupement qui s'est constitué entre les sociétés du secteur pour choisir un prestataire du prochain Centre opérationnel de sécurité commun.

Votre rapporteur spécial s'interroge cependant sur un rééquilibrage entre TV5 Monde et France 24. Le positionnement de TV5 est aujourd'hui nettement orienté vers la culture et le divertissement, par le biais de la diffusion de programmes produits par les chaînes des services publics français, suisse, belge et québécois. Fort de cette évolution, la question du maintien d'une rédaction autonome peut-être posée. Une éventuelle suppression pourrait conduire à un redéploiement de crédits vers FMM.

Observation n° 12 : la réduction des moyens imposée aux sociétés de l'audiovisuel public fragilise considérablement toute ambition en faveur de l'audiovisuel extérieur. Faute de sanctuarisation des moyens et de rapprochement effectif avec l'Agence française de développement, France Médias Monde ne peut rivaliser avec les stratégies déployées par les grandes puissances mais aussi par certains de nos partenaires européens.


* 24 Votre rapporteur pour avis a fait adopter par le Sénat à l'occasion de l'examen des projets de loi de finances pour 2018 et pour 2019 deux amendements visant à majorer la dotation de FMM de respectivement 1,9 millions d'euros et 5 millions d'euros. Ils n'ont pas été retenus lors de l'examen de ces textes à l'Assemblée nationale.

Page mise à jour le

Partager cette page