B. UNE RECONSTRUCTION ENCORE INACHEVÉE MALGRÉ L'INVESTISSEMENT DE L'ÉTAT

1. Gérer l'urgence

Pour les services de l'État, la priorité, immédiatement après la catastrophe, a d'abord été de répondre à l'urgence en mettant en place un pont aérien et maritime qui a acheminé de l'eau (deux millions de bouteilles et des unités mobiles de production), de la nourriture (350 tonnes de denrées alimentaires, 35 000 rations militaires) et du matériel pour les réparations (bâches, outillages, etc. ).

Pour mettre fin aux pillages qui ont eu lieu dans les jours qui ont suivi le passage du cyclone, un important déploiement de forces de sécurité a été organisé à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, avec l'envoi de plus de 600 sapeurs-pompiers et militaires de la sécurité civile, 750 gendarmes, 140 policiers et 960 militaires.

Au plus fort de la crise, plus de 3 000 professionnels et bénévoles étaient présents, ce qui correspond à environ une personne pour dix habitants à Saint-Martin 5 ( * ) .

Selon les chiffres rendus publics par le Gouvernement en novembre 2018, le dispositif d'urgence mis en place à Saint-Martin et Saint-Barthélemy a coûté au total plus de 160 millions d'euros.

2. Des moyens importants pour la reconstruction

Dès le 14 septembre 2017, a été créée une délégation interministérielle pour la reconstruction des îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, dirigée par le préfet Philippe Gustin, chargée de coordonner l'action des différents services de l'État.

a) Le rétablissement des réseaux et la réouverture des services publics

La priorité a été le rétablissement des réseaux d'électricité et de communication, essentiels à la vie quotidienne de la population. Le retour de l'électricité pour la totalité de la population a été obtenu en moins de cinq semaines. Les réseaux de téléphonie mobile ont également été rapidement remis en état, le délai ayant été plus long pour le téléphone fixe.

Le trafic commercial maritime a pu reprendre peu de temps après la catastrophe, ce qui a permis d'approvisionner les commerces, et les liaisons aériennes ont repris dès la mi-septembre.

En matière de santé publique, les centres hospitaliers ont pu fonctionner immédiatement et des dispensaires ont été installés dans des structures provisoires.

Malgré la destruction complète de trois écoles et d'un collège à Saint-Martin, tous les élèves ont pu reprendre les cours à compter du 6 novembre 2017.

Le rétablissement du réseau d'eau, particulièrement vétuste, a demandé plus d'efforts. En novembre 2018, quatorze mois après le cyclone, le Gouvernement indiquait toutefois que la potabilité de l'eau était garantie « quasiment partout » sur l'île.

b) Une reconstruction qui demeure inachevée

L'État a consenti un effort financier important en faveur de Saint-Martin : selon les chiffres communiqués par la direction générale des outre-mer (DGOM), l'enveloppe globale atteint 53 millions d'euros, hors dépenses de personnel, pour financer la reconstruction et pour financer 17 millions d'euros d'aides sociales exceptionnelles versées aux sinistrés.

En complément, le Fonds de solidarité de l'Union européenne (FSUE), dont la mission est d'aider les territoires à faire face aux grandes catastrophes naturelles, a versé une somme de 46 millions d'euros, dont seulement une partie (28 millions) a pu être dépensée à ce jour en raison des retards administratifs accumulés par la collectivité.

Deux ans après le passage d'Irma, le chantier de la reconstruction n'est cependant toujours pas arrivé à son terme.

Concernant les logements , les informations les plus précises portent sur le parc social, géré par trois bailleurs (SIG, SIKOA et Semsamar). Pour accélérer la reconstruction, l'État et la collectivité ont signé une convention créant un Fonds unique pour le logement (FUL), déclinée avec chacun des trois bailleurs. La convention a permis le versement, en 2019, d'un premier acompte de trois millions d'euros. Le solde, d'un montant équivalent, sera versé fin 2020, dès lors qu'il aura été vérifié que les engagements pris auront été tenus.

À ce jour, 74 % des logements sinistrés ont été réhabilités, le traitement des autres logements devant être achevé d'ici août 2020. L'état d'avancement de la reconstruction est inégal entre les trois bailleurs, la Semsamar apparaissant comme la plus avancée, puisqu'elle a terminé le gros oeuvre et prévoit d'achever les travaux intérieurs en avril 2020.

En parallèle, de nombreuses constructions illégales, souvent en bord de mer, ont été reconstruites avec des moyens de fortune ; elles demeurent naturellement très vulnérables .

Un comité opérationnel co-présidé par la préfète et par le procureur de la République a été mis en place, en octobre 2018, pour lutter contre l'habitat indigne et insalubre.

La réhabilitation des établissements scolaires endommagés est en passe d'être achevée, hormis pour le collège de Quartier d'Orléans, qui va connaître d'importants travaux de rénovation, financés par le FEDER à hauteur de 7,7 millions d'euros, et qui sera livré en 2020.

Le centre hospitalier Louis Constant Fleming poursuit ses travaux de reconstruction, après avoir subi des dommages dont le montant est évalué à 9,4 millions d'euros. Le coût de la reconstruction a aggravé la situation financière déjà précaire de l'établissement, ce qui a conduit l'agence régionale de santé (ARS) à le placer sous administration provisoire à compter du mois d'avril 2019.

c) Une activité touristique durablement impactée

L'activité touristique, essentielle dans l'économie insulaire, n'a pas encore retrouvé son niveau d'avant-crise.

Les entreprises de l'île ont pourtant bénéficié de mesures de soutien exceptionnelles, avec notamment un moratoire d'un an sur les cotisations sociales patronales et un renforcement du dispositif de chômage partiel pour les aider à faire la jonction jusqu'à la saison touristique suivante.

Pourtant, les trois plus grosses structures hôtelières de l'île (Club Orient, Beach Hotel et Secrets) ne sont toujours pas opérationnelles, la réouverture du Club Orient restant même hypothétique. La réouverture des principaux hôtels est aujourd'hui un enjeu majeur, la programmation aérienne s'établissant en fonction de l'offre d'hébergement disponible sur le territoire.

Avant le passage d'Irma, Saint-Martin offrait une capacité de 1 136 chambres d'hôtel. Selon l'association des hôteliers de Saint-Martin, le parc hôtelier et les guest houses ne proposaient que 869 chambres mi-2019. Selon les chiffres communiqués par la préfecture de Saint-Martin et Saint-Barthélemy, un nombre important d'ouvertures pourrait cependant intervenir au cours du second semestre, les services de l'État tablant sur un total de 1 333 chambres à la fin de l'année, ce qui représenterait une hausse de 17,5 % par rapport au nombre de chambres avant-cyclone .

Outre la reconstruction des infrastructures, il est important également de relancer la marque « Saint-Martin » : une convention a été signée entre Atout France, l'opérateur de l'État en charge du développement du tourisme, et la collectivité territoriale afin de promouvoir davantage la destination, notamment auprès du public américain.


* 5 Ces données sont issues notamment du rapport « Repenser les îles du Nord pour une reconstruction durable » de M. Philippe Gustin, préfet, délégué interministériel à la reconstruction des îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin (novembre 2017).

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