CHAPITRE III
RESPONSABILITÉ CIVILE

Article 7
(art. L. 211-10 du code de la sécurité intérieure)
Responsabilité civile pour les dommages
causés lors d'une manifestation

Dans sa rédaction initiale, l'article 7 de la proposition de loi tendait à créer une présomption de responsabilité civile « collective » des personnes condamnées pénalement pour des infractions commises à l'occasion du déroulement d'une manifestation sur la voie publique pour la réparation des dommages de toute nature résultant de ladite manifestation.

Une telle rédaction semblait aller à l'encontre des règles fondamentales de la responsabilité civile puisqu'une action civile en réparation ne peut aboutir, en principe, que si est rapportée par la victime la triple preuve d'un fait générateur de responsabilité, d'un préjudice réparable et d'un lien de causalité entre le fait et le préjudice.

De plus, elle paraissait ne pas être conforme au bloc de constitutionnalité. Il résulte, en effet, de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 que tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. L'atteinte portée à ce principe de responsabilité personnelle et directe ne peut être admise qu'à la condition « que l'obligation qu'elle crée soit en rapport avec un motif d'intérêt général ou de valeur constitutionnelle et proportionnée à cet objectif » 21 ( * ) . Toutefois, les dispositions initiales de l'article 7 ne paraissaient pas répondre à cette condition.

C'est pour l'ensemble de ces raisons que votre commission avait préféré abandonner le dispositif initial pour lui privilégier le régime de responsabilité de l'État pour les dommages dus aux attroupements et rassemblements, défini à l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure.

Cependant, elle avait jugé nécessaire de s'assurer que les responsables, sur le plan pénal, de ces dommages participent effectivement à l'indemnisation des victimes . Elle avait donc proposé de compléter l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure en y introduisant la possibilité pour l'État d'exercer « une action récursoire contre les personnes ayant participé à tout attroupement ou rassemblement armé ou non armé, lorsque leur responsabilité pénale a été reconnue par une décision de condamnation devenue définitive . »

La commission des lois de l'Assemblée nationale a précisé les modalités d'exercice par l'État de son action récursoire. Estimant que l'imputabilité du dommage aux auteurs devrait pouvoir s'établir par tout moyen, elle a souhaité détacher la possibilité d'une action récursoire de la nécessité d'une condamnation pénale . Elle a également indiqué que le recours ne devait être ouvert que contre les personnes à l'origine du fait dommageable.

Enfin, la commission des lois de l'Assemblée nationale a voulu établir les conditions exactes dans lesquelles l'action récursoire contre les auteurs du fait dommageable devrait s'exercer, choisissant pour ce faire les conditions de droit commun prévues aux articles 1240 et suivants du code civil. Compte tenu de ce renvoi, une telle action ne serait donc recevable que si la triple preuve d'un fait générateur de responsabilité (faute ou fait d'une chose), d'un préjudice réparable et d'un lien de causalité entre ce fait et le préjudice était rapportée par la victime.

Votre commission constate que les précisions apportées par l'Assemblée nationale respectent et renforcent les principes qui l'avaient amenée à réécrire l'article 7. La volonté d'adresser un message de fermeté aux manifestants à l'origine des dommages par l'inscription de la possibilité par l'État d'exercer une action récursoire contre eux et d'inciter l'État à y avoir davantage recours est préservée. La disposition pourra être plus facilement mise en oeuvre puisque l'action récursoire pourra s'exercer sans qu'une condamnation pénale soit nécessaire, sur le seul fondement de la responsabilité civile. Cette dernière, telle que formulée aux articles 1240 et suivants du code civil, présente toute les garanties constitutionnelles nécessaires.

Votre commission a adopté l'article 7 sans modification .

*

* *

Votre commission a adopté la proposition de loi sans modification .


* 21 Cf. la décision n° 2015-517 QPC du 22 janvier 2016, Fédération des promoteurs immobiliers, sur la prise en charge par le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre de l'hébergement des salariés du cocontractant ou du sous-traitant soumis à des conditions d'hébergement indignes.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page