B. UN EFFORT PARTICULIER POUR ACCOMPAGNER LES BESOINS DE LA CNDA, « PREMIÈRE JURIDICTION ADMINISTRATIVE FRANÇAISE » EN TERMES D'AFFAIRES JUGÉES

En 2019, les moyens de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) atteindront un niveau certes inédit, mais adapté à sa situation. Avec 47 814 requêtes traitées à la fin 2017, la CNDA est en effet « la première juridiction administrative française par le nombre d'affaires jugées », comme l'a rappelé notre collègue François-Noël Buffet, alors rapporteur du projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie 5 ( * ) .

1. Une maîtrise des délais de jugement contrainte par une hausse chronique du nombre de recours entrants
a) Des objectifs de réduction des délais de jugement en voie de réalisation

Bien qu'elle ait considérablement réduit ses délais moyens de jugement - de près de 15 mois en 2010 à 6 mois et 12 jours en 2017, la CNDA peine à atteindre les objectifs de délai moyen fixés par le législateur depuis 2015 - cinq semaines pour la procédure à juge unique (procédure accélérée) et cinq mois pour les procédures en formations collégiales (procédure normale) 6 ( * ) .

Ces cibles n'ont encore jamais été atteintes et ne devraient pas l'être en 2018. Les délais moyens ont même été révisés à la hausse en raison des mouvements sociaux qui ont affecté la CNDA entre février et juillet dernier et d'une augmentation prévue d'environ 21 % des entrées pour 2018.

Les objectifs pour 2019 sont toutefois égaux à ceux fixés par la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 portant réforme du droit d'asile , compte tenu des nouvelles estimations du nombre de recours et des nouveaux moyens dont disposerait la CNDA .

Le raccourcissement du délai prévisible moyen de jugement permettrait également de participer à l'atteinte d'un autre objectif : le déstockage des affaires en instance devant la Cour. En effet, le stock d'affaires non traitées en fin d'année augmente depuis plusieurs années et se situe à un niveau préoccupant. Plus de 40 000 affaires pourraient ainsi demeurer non jugées à la fin 2018, soit plus du double du stock de 2016 et un nombre 1,5 fois supérieur au stock de 2017 .

b) Une augmentation exceptionnellement forte du contentieux de l'asile

Depuis plusieurs années, la CNDA fait face à un accroissement chronique d'affaires entrantes . Celles-ci dépendent directement du nombre de demandes d'asile et surtout du nombre de décisions de refus de ces demandes rendues par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) 6 ( * ) , lesquelles suscitent un taux de contestation très élevé (entre 80 et 90 % chaque année). En raison d'un important déstockage mené ces dernières années, le nombre d'affaires traitées par l'Ofpra a augmenté plus vite que le nombre de demandes d'asile .

Le nombre d'affaires entrantes à la Cour a ainsi bondi de 34 % en 2017 et devrait à nouveau fortement progresser en 2018 pour atteindre 65 000 recours déposés . Cette augmentation s'inscrit dans une tendance durable : le nombre d'affaires a progressé chaque année et a ainsi augmenté de 140 % entre 2008 et 2017.

Cependant, la tendance devrait s'inverser pour 2019, le nombre de nouveaux recours devant s'élever à 56 000 . Il resterait tout de même supérieur au niveau constaté en 2017, aussi la situation de la CNDA doit-elle être surveillée de près.

2. Une augmentation des moyens qui s'avère nécessaire

Afin de réduire les délais de jugement et résorber le stock élevé des affaires pendantes, la Cour bénéficiera une nouvelle fois de créations d'emplois, dans la continuité des lois de finances précédentes.

Évolution du nombre de recours entrants et des créations d'emplois pour la Cour nationale du droit d'asile

(en milliers et en ETPT)

Années

2014

2015

2016

2017

2018 (1er semestre)

2018 (année pleine, estimation)

2019 (estimation)

Nombre d'entrées

37,3

38,8

39,9

53,6

25,3

65

56

Emplois créés

15

23

24

40

51

102 7 ( * )

122

Source : commission des finances, d'après les réponses du Conseil d'État au questionnaire budgétaire et les documents budgétaires

Sur les 132 nouveaux emplois du programme 165, 122 seront destinés à la CNDA, dont 70 emplois de rapporteurs. Par ailleurs, 5 emplois de magistrat administratif sont transférés afin d'occuper les postes de président des 5 nouvelles chambres prévues en 2019.

Le plafond d'emplois de la CNDA s'élèvera ainsi à 648 ETPT , pour un total de 36,8 millions d'euros 8 ( * ) . Son effectif dépassera désormais l'ensemble des effectifs des 8 cours administratives d'appel réunies.

Après la création de 4 chambres en 2018, 5 nouvelles chambres s'ajouteront en 2019, amenant ainsi le nombre total de chambres à 22 . Alors que les locaux de la Cour sont répartis dans quatre lieux différents et que ses besoins immobiliers ne cessent de s'étendre, un projet de relogement de la Cour, associé à celui du tribunal administratif de Montreuil est à l'étude. La forte augmentation des AE du programme en 2019, essentiellement destinée aux dépenses immobilières (+ 61,7 millions d'euros ) contribuera à 99 % au financement de ce projet, lequel fera par ailleurs l'objet d'une évaluation socioéconomique préalable.


* 5 Rapport de M. François-Noël Buffet, sur le projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie.

* 6 En 2017, 72 % des décisions rendues par l'Ofpra concernaient des refus.

* 7 Une augmentation du plafond de 51 emplois avait été votée pour 2018. L'écart vient d'une correction technique sur la réalisation du schéma d'emplois pour 2018.

* 8 Éléments imputés sur l'action 07 « Cour nationale du droit d'asile ». Cette action n'inclut pas les dépenses financées par les services centraux du Conseil d'État (direction de l'équipement, informatique...) au bénéfice de la CNDA, celles-ci étant retracées sur l'action 06 « Soutien ».

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