B. LA HAUSSE DES DÉPENSES DE PENSIONS N'EQUIVAUT PAS NÉCESSAIREMENT À UNE HAUSSE DU POUVOIR D'ACHAT DES PENSIONNÉS

La hausse de long terme des dépenses de pensions des fonctionnaires civils et militaires de l'État est attribuée pour environ 58,3 % à l'augmentation de la valeur moyenne de la pension (+ 2,4 % par an).

L'autre facteur d'augmentation des dépenses réside dans la croissance des effectifs de pensionnés. Ils ont progressé de 1,7 % par an si bien qu'en 2018 le nombre des pensionnés civils atteignait à peu près 1,8 fois le niveau de 1990.

Évolution du nombre des pensionnés depuis 1990

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique 2019++

Ces données appellent des analyses complémentaires afin de cerner plus précisément les composantes de la dynamique des dépenses de pensions et d'en suggérer quelques conclusions sur la politique implicitement suivie en la matière.

1. La forte progression du nombre des pensionnés a ralenti ces dernières années

Le nombre des bénéficiaires de pensions civiles a enregistré une augmentation de l'ordre de 800 000 depuis 2000 (soit plus de 80 %) dans un contexte de baisse du nombre des pensions militaires.

On relève néanmoins un ralentissement de la croissance du nombre des pensionnés à partir de 2010, notamment en raison d'évolutions institutionnelles, qui joueraient encore sur la dynamique du volume des pensions l'an prochain (voir ci-dessous).

Depuis 2010, l'ensemble des pensions civiles de droits directs ou dérivés n'a progressé que de 12,5 %, contre une augmentation de 60 % lors de la décennie précédente, les pensions de droit direct augmentant d'un peu plus de 14 %

Évolution du nombre des pensionnés civils de la fonction publique d'État (2010-2019)

Source : réponse au questionnaire de la rapporteure spéciale

Dans la fonction publique militaire, la progression a été encore plus limitée (+ 0,4 %).

Évolution du nombre des pensionnés militaires de la fonction publique d'État (2010-2019)

Source : réponse au questionnaire de la rapporteure spéciale

2. La hausse de la valeur moyenne des pensions est tributaire d'un effet de noria dont l'impact en valeur réelle est affaibli ces dernières années du fait du décrochage des bases de liquidation de l'inflation

Sur longue période, la pension moyenne servie aux différentes catégories de retraités de la fonction publique a connu des augmentations en valeur plus ou moins fortes selon les types d'emplois concernés.

Évolution de la valeur de la pension moyenne par catégorie et de l'inflation (2000-2017)

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique 2019

Ces évolutions proviennent de deux facteurs très différents, parmi lesquels il y a lieu de mentionner ici un effet de noria .

Les pensions nouvellement liquidées sont supérieures aux pensions du stock en raison, en particulier, des progrès des rémunérations au fil des générations qui ont élevé la base liquidative des pensions, et conduisent à élever la valeur moyenne de la pension.

Ainsi pour les fonctionnaires de l'État, l'indice moyen de liquidation est passé de 498 en 1992 à 612 en 2010. Il est de 649 en 2017. Pour les fonctionnaires territoriaux, l'indice moyen est passé de 352 en 1992 à 440 en 2010 et 464 en 2017.

Le graphique ci-après qui recense la valeur des pensions liquidées au cours de chacune des années de 2000 à 2017, et les évolutions au cours de la période concernée, montre par exemple qu'en 2017 la valeur moyenne d'une pension nouvellement liquidée au titre de la fonction publique civile de l'État était supérieure à la valeur moyenne des pensions de cette catégorie de 250 euros (soit un montant supérieur de plus de 13 %).

Évolution de la valeur de la pension moyenne des nouveaux pensionnés par catégorie et inflation (2000-2017)

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique 2019

Cependant, corrigées de l'inflation, ces évolutions, appréciées sur une longue période, se sont traduites par une croissance moyenne annuelle des pensions plus modérée.

Éléments sur la progression de la valeur moyenne des pensions du stock dans différents cas

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique 2019

Pour les ouvriers de l'État et les fonctionnaires hospitaliers la progression réelle a été de l'ordre de 0,74 % et 0,62 %, plus forte que pour les fonctionnaires civils et militaires (environ 0,34 %) les fonctionnaires des collectivités territoriales fermant la marche avec une croissance de 0,16 %.

Le graphique ci-dessus montre également que la revalorisation des pensions liquidées à partir de 2000 a été beaucoup plus heurtée. La valeur moyenne des pensions liquidées, inversant une nette tendance à la hausse de 2000 à 2011, a stagné depuis 2012.

Le ralentissement, puis le gel entre 2010 et 2016 de la valeur du point d'indice ont pesé sur la progression de la valeur moyenne des pensions nouvellement liquidées.

Pour la plupart des compartiments de la fonction publique, il en est résulté un décrochage de la croissance de la valeur liquidative moyenne par rapport à l'inflation qui s'est accentué au cours de la période la plus récente.

Croissance de la pension moyenne nouvellement liquidée par rapport à l'inflation dans les différents compartiments de la fonction publique

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique 2019

Au total, l'effet noria, qui a exercé un fort impact à la hausse sur les dépenses de pensions, s'est modéré au cours de la décennie ouverte en 2010 du fait d'un moindre nombre de départs en retraite et d'un ralentissement de la progression des assiettes de liquidation des pensions, qui, pour la plupart des compartiments de la fonction publique, s'est traduit par une augmentation moins forte que celle des prix.

Pour autant, le renouvellement du stock des pensionnés constitue un facteur autonome d'augmentation des dépenses du compte d'affectation spéciale, qui traduit les effets de l'augmentation générale des revenus liée à la croissance économique.

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