C. LA CRÉATION D'UNE FONCIÈRE PUBLIQUE DOIT ÊTRE ENVISAGÉE

En Italie, la société Invimit , détenue à 100 % par l'État italien, assure une fonction de portage, en recevant certains biens immobiliers publics pour leur transformation ou leur valorisation .

De tels outils ont existé en France , avec des succès nuancés, à l'instar de la Société de valorisation foncière et immobilière (Sovafim), société anonyme entièrement détenue par l'État et créée en 2006 afin de valoriser les biens immobiliers de Réseau ferré de France (RFF). Elle comprenait également des filiales, dont la SAS Sovapar3, dédiée à l'immobilier pénitentiaire.

La Sovafim est aujourd'hui en voie d'extinction ; une partie de ses activités pourrait être reprise par la Caisse des dépôts et consignations.

Dans le cadre de la réflexion engagée par le Gouvernement en vue de créer une foncière publique, vos rapporteurs spéciaux souhaitent relever deux exemples concrets pour lesquels le recours à un tel outil apporterait une réelle plus-value .

Le premier exemple porte sur l'immobilier pénitentiaire .

Dans le cadre de la campagne des élections présidentielles, Emmanuel Macron s'était engagé à construire 15 000 places de prison supplémentaires . Le plan pénitentiaire présenté par la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, le 12 septembre dernier en Conseil des ministres 29 ( * ) prévoit la construction de 7 000 places avant 2022 , tandis que les 8 000 autres places seraient initiées d'ici cette date, en vue de leur construction effective d'ici 2027.

Au-delà de la création de nouvelles places de prison, plusieurs établissements pénitentiaires devront être entièrement réhabilités .

Dans le projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, en cours d'examen par le Parlement, c'est un montant total de 1,7 milliard d'euros de crédits qui serait consacré à la construction de nouveaux établissements pénitentiaires jusqu'en 2022. Des procédures accélérées en matière d'urbanisme sont proposées à son article 51.

Un tel montant risque toutefois de se révéler insuffisant pour atteindre les objectifs annoncés par le Gouvernement, d'autant plus qu'il ne sera plus fait recours aux partenariats public-privés. En effet, selon l'Apij, le coût d'une place de prison dans une maison d'arrêt d'environ 500 places peut être estimé à près de 200 000 euros. Pour atteindre l'objectif de 15 000 places engagées d'ici 2022, environ 3 milliards d'euros seraient nécessaires.

À cet égard, une partie de la difficulté pourrait être surmontée en recourant à une structure de portage immobilier .

En effet, la construction d'un nouvel établissement pénitentiaire s'opère souvent dans le cadre de la fermeture d'anciens établissements, devenus inutiles et pouvant être cédés. En confiant ces établissements inutiles à une structure publique ad hoc , il serait alors possible de dégager des marges de manoeuvre budgétaires en amont.

Le second exemple porte sur les infrastructures d'hébergement qui pourraient être rendues nécessaires par la création du service national universel . Ainsi que le détaille le rapport du groupe de travail remis au Président de la République sur ce sujet au printemps dernier 30 ( * ) , ce sont au moins 80 000 places d'hébergement qui seraient requises pour accueillir l'ensemble d'une classe d'âge à l'occasion de l'engagement obligatoire d'un mois prévu entre 15 ans et 18 ans. Selon les estimations, environ 1,75 milliard d'euros d'investissements en infrastructures serait nécessaire.

À ce stade, la direction de l'immobilier de l'État n'a pas été sollicitée. Néanmoins, si ce projet devait se concrétiser, il sera indispensable de recourir à cette direction afin d'identifier les biens susceptibles de répondre aux besoins d'hébergement ainsi que de procéder aux rénovations et mises aux normes indispensables à l'accueil d'un jeune public.

Les réorganisations territoriales des armées et de la gendarmerie se sont traduites, ces dernières années, par la désaffection de nombreuses casernes dans les territoires, pour lesquelles l'État éprouve souvent des difficultés à trouver une réaffectation ou un acquéreur.

Dans ce cadre, il pourrait être intéressant de créer une structure publique ad hoc chargée de procéder à la transformation des sites identifiés pour accueillir les jeunes et d'en assurer l'entretien. Pour l'État, l'intérêt serait, outre la capitalisation initiale de la structure, de disposer d'une meilleure prévisibilité du coût complet du dispositif.


* 29 Voir la communication relative à la politique pénitentiaire en Conseil des ministres du 12 septembre 2018.

* 30 Voir le rapport relatif à la création d'un service national universel, établi par le général de division Daniel Menaouine, rapporteur du groupe de travail, 26 avril 2018.

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