LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement réduisant les crédits de la mission de 6,591 millions d'euros :

- 4,57 millions d'euros d'économies pour « tenir compte des votes intervenus dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2019 » ;

- une majoration de 0,2 million d'euros au titre des décisions annoncées lors du rendez-vous salarial du 18 juin 2018 :

- une diminution de 2,2 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 2,1 millions d'euros en crédits de paiement (CP) car le Gouvernement a souhaité « rapatrier, au sein du nouveau " Fonds pour l'accélération du financement des start-up d'État " créé par amendement au présent projet de loi de finances, les crédits déjà existants en faveur des start-up d'État ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 17 octobre 2018, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Michel Canévet, rapporteur spécial, sur la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

M. Vincent Éblé , président . - Nous avons le plaisir d'accueillir trois collègues rapporteurs pour avis d'autres commissions : M. Jean-Yves Leconte, sur les programmes « Coordination du travail gouvernemental » et « Protection des droits et libertés » à la commission des lois, M. Olivier Cadic, sur le programme « Coordination du travail gouvernemental » à la commission des affaires étrangères et de la défense, et Mme Chantal Deseyne, sur la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) à la commission des affaires sociales.

M. Michel Canévet , rapporteur spécial . - La mission représente 1,33 milliard d'euros, et se divise en trois programmes : le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental », le programme 308 « Protection des droits et libertés », qui correspond au budget d'autorités administratives indépendantes (AAI), et le programme 333 « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées », correspondant aux loyers des directions départementales interministérielles (DDI), aux moyens de fonctionnement des secrétariats généraux pour les affaires régionales (SGAR) et aux dépenses des personnels des services du Premier ministre, en particulier les services interministériels départementaux des systèmes d'information et de communication (Sidsic). À périmètre constant, les crédits de paiement augmentent de 14 millions d'euros. Une importante mesure de périmètre, de 164 millions d'euros, affecte la mission en raison de la suppression des loyers budgétaires et du transfert de la direction interministérielle de la transformation publique vers le ministère de l'action et des comptes publics, qui est chargé de la réforme de l'État.

Côté ressources humaines, la mission enregistre un gain net de 24 emplois, compte tenu des suppressions et des créations. J'avais attiré l'attention l'année dernière sur la nécessité de créer des postes à l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) : la lutte contre les cyberattaques est en effet une priorité absolue. Elle a été dotée de moyens en personnels supplémentaires, comme la direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État (Dinsic) et le groupement interministériel de contrôle (GIC) - les « grandes oreilles », qui procèdent aux écoutes. L'Anssi gagne 42 emplois, le GIC 15 ; la CNIL en gagne également 15, le Défenseur des droits 2, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) 2 et la Commission nationale consultative des droits de l'homme 1. En contrepartie, on procède à 36 suppressions de postes. Si l'Anssi est importante, le GIC est lui aussi de plus en plus sollicité.

La Dinsic est compétente pour les systèmes d'information. Notre commission s'est souvent étonnée des errements de l'État s'agissant de ses systèmes d'information : Sirhen, système d'information des ressources humaines de l'éducation nationale, a été un désastre. Celui-ci a été évité pour les paiements agricoles réalisés par l'Agence de services et de paiement dont nous parlait mercredi dernier la Cour des comptes - mais nous ne sommes pas passés loin. Il y a eu des dégâts considérables sur le terrain. Comme l'évoquait Alain Houpert, les agriculteurs ont beaucoup souffert de l'incapacité de l'État à distribuer les aides de la politique agricole commune (PAC). Si on a pu s'en sortir, c'est que la Dinsic a été appelée au secours pour mettre de l'ordre. Aujourd'hui, son avis conforme est requis lorsque le coût d'un programme informatique dépasse 9 millions d'euros. Je crois que c'est insuffisant et qu'il faudrait abaisser ce seuil à 5 millions d'euros. Il est préférable de s'assurer a priori que la réalisation du programme est possible, plutôt que rattraper la situation a posteriori .

À titre d'information, les fonds spéciaux gérés par le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) s'élèvent à 67,2 millions d'euros.

Concernant les autorités administratives indépendantes (AAI), leur installation dans le nouveau centre Ségur-Fontenoy a permis des mutualisations, qu'il faut poursuivre, dans le domaine de la gestion des ressources humaines ou des marchés publics. Seule la CNIL résiste ; je ne crois pourtant pas que le niveau de son recours aux marchés publics le justifie. Je souhaite que les efforts de mutualisation se poursuivent ; aussi, je proposerai un amendement de réduction de crédit.

Dix postes sont supprimés dans les Sidsic, issus de la mutualisation des différents services informatiques des administrations déconcentrées. Prévoir ainsi des pools de personnel spécialisé est astucieux, mais ils agrègent des corps et des statuts très différents, ayant pour des fonctions similaires des conditions statutaires et salariales très différentes, ce qui n'est jamais bon...

Le site de Ségur-Fontenoy accueille des AAI, mais aussi des services du Premier ministre - depuis 2017 pour la CNIL et depuis 2018 pour les autres administrations. L'opération de déménagement s'est bien passée. La mise à disposition des locaux, prévue en septembre, a pu avoir lieu en juin. La Société de valorisation foncière et immobilière (Sovafim), mandatée par le Gouvernement, a bien travaillé. L'État lui verse un loyer jusqu'en 2029, soit 370 millions d'euros ; après cette date, il redeviendra propriétaire du site. L'idée était notamment de faire des économies grâce à la mutualisation.

Le budget annexe « Publications officielles et information administrative » est géré par la direction de l'information légale et administrative (DILA), qui était chargée jusqu'à il y a peu de l'édition du Journal officiel imprimé, qui est maintenant dématérialisé. Celle-ci gère des sites internet : « legifrance.fr », qui présente la législation à jour, « service-public.fr », qui informe les citoyens sur l'action publique et donne accès aux différents sites de démarches administratives dématérialisées, et le nouveau site de la Documentation française.

La DILA est financée pour la moitié de son budget d'un peu moins de 180 millions d'euros par le Bulletin officiel des annonces de marchés publics (BOAMP) et le Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (Bodacc). Mais les droits à payer pour la publicité de la transmission des entreprises ont été supprimés l'année dernière et le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte) prévoit la gratuité des annonces relatives aux créations d'entreprises. La DILA a beaucoup évolué. Son personnel, de 763 emplois en 2017, passera en 2019 à 663 - moins 100 en trois exercices ! Ses efforts de gestion sont corroborés par son recentrage sur trois sites : outre Ségur-Fontenoy, la DILA est désormais concentrée rue Desaix, avec un centre d'appel à Metz. Réduire ainsi recettes et dépenses va dans le sens bienvenu d'une moindre pression exercée sur les entreprises.

Je propose deux mesures sur cette mission. La seule dépense fiscale rattachée à ce budget est l'exonération d'imposition sur le revenu du traitement relatif à la légion d'honneur à titre militaire et à la médaille militaire. Puisque nous voulons réduire les niches fiscales...

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Combien cela représente-t-il ?

M. Michel Canévet , rapporteur spécial . - Pas grand-chose... Le traitement est de 6,10 euros par an pour les 40 000 légionnaires sur les 100 000 qui pourraient en bénéficier et de 4,57 euros pour la médaille militaire, concernant quelque 100 000 bénéficiaires potentiels, car tout le monde ne le réclame pas. Résultat ? Les coûts administratifs sont beaucoup plus élevés que le montant des traitements eux-mêmes, soit 700 000 euros. C'est une gabegie à laquelle il faut remédier en prenant nos responsabilités. Soyons clairs : 4,57 euros par an ne change pas la face du monde pour les gens qui les reçoivent...

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - D'autant plus qu'il faut retirer de cette somme le coût du timbre pour faire sa demande !

M. Michel Canévet , rapporteur spécial . - Je propose également un amendement de réduction de crédits. Si le budget relatif à la coordination du travail gouvernemental, dont l'essentiel est constitué par des dépenses de fonctionnement, ne montre pas l'exemple, il sera difficile de solliciter les gestionnaires des autres missions pour faire les économies nécessaires.

Mme Nathalie Goulet et M. Vincent Delahaye . - Très juste !

M. Michel Canévet , rapporteur spécial . - Mon amendement vise à réduire les crédits de 14,1 millions d'euros. La réduction serait de 13,1 millions pour le programme « Coordination du travail gouvernemental », dont 1,5 million pour le titre 2. Certes, l'Anssi et le GIC ont besoin de personnels ; mais l'Anssi a 18 emplois qui auraient dû être créés cette année et ont été reportés pour 2019. Les recrutements seront donc possibles. Le budget du SGDSN prévoit 17 millions d'euros de plus en 2019 que ce qu'il avait dépensé en 2017. Retirer 13,1 millions d'euros ne mettra pas en danger le fonctionnement de ces organismes.

L'amendement tend également à retirer 1 million d'euros au programme « Protection des droits et des libertés ». La CNIL a dépensé 16 millions d'euros en 2017 et se voit attribuer un budget de 18,8 millions d'euros; un petit effort de 500 000 euros n'obèrera pas son action. Quant au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), qui a dépensé 37 millions d'euros en 2017, et pour qui il était prévu 37,57 millions, il semble raisonnable de lui demander de fonctionner à moyens constants. C'est l'AAI dont le budget est de loin le plus important.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je soutiens l'amendement du rapporteur spécial. L'exemple doit venir d'en haut. Y a-t-il d'autres AAI ou organismes payant des loyers élevés, comme c'était le cas de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde) qui occupait un ancien siège de banque ?

Il faut faire attention à l'immobilier : il peut y avoir des dérapages. Certains organismes ne respectent pas le ratio de mètres carrés.

M. Jean-Yves Leconte , rapporteur pour avis de la commission des lois . - Je suis mal à l'aise : en ce qui me concerne, je n'ai pas commencé mes auditions. Je suis impressionné de voir combien vous êtes capables de faire les rapports aussi vite, sachant que les bleus budgétaires sont arrivés il y a peu... (Sourires.) Si la logique est de dire : « les crédits augmentent, ce n'est pas bien, il faut qu'ils baissent. », ils ne sont pas nécessaires...

M. Vincent Éblé , président . - Il nous arrive de les augmenter !

M. Jean-Yves Leconte , rapporteur pour avis . - Il est regrettable que certains loyers soient comptés dans d'autres missions ; cela ne permet pas d'avoir une vision du coût complet. Dans le cadre de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », des économies peuvent entraîner des dépenses ultérieures. Compte tenu du cyberrisque, l'Anssi a besoin d'attirer des professionnels aux compétences particulières, qui peuvent s'employer facilement dans le privé. Or on leur offre des contrats à durée déterminée. Les difficultés de recrutement de l'Anssi ne doivent pas servir à faire baisser son budget. Car ce sont bien ces difficultés qui expliquent que des postes ne soient pas pourvus. Certaines attaques ont coûté des dizaines de millions d'euros aux entreprises françaises. Ce n'est pas en mégotant sur quelques milliers d'euros à l'Anssi qu'on défend l'intérêt national.

Concernant les AAI, il est légitime de s'intéresser aux deux plus importantes. Concernant le CSA, on peut s'interroger sur la persistance d'un même périmètre d'action, alors que des médias de plus en plus importants apparaissent, mais lui échappent... Dans ces conditions, pourquoi son budget augmente-t-il ?

En revanche, la CNIL, après l'adoption du Règlement général sur la protection des données (RGPD), ne doit plus seulement protéger le citoyen contre l'État, mais aussi surveiller l'utilisation des données par les opérateurs. La France doit continuer à être un leader européen dans ce domaine. Pourquoi réduire ses moyens ?

Concernant la DILA, sans auditions, je dirai que si les moyens baissent, il faut veiller à la qualité. Il y a beaucoup de progrès à faire.

M. Vincent Delahaye . - Toujours plus de dépenses !

M. Olivier Cadic , rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères et de la défense . - Personne ne peut dédaigner les menaces cyber. J'ai auditionné Guillaume Poupard, directeur général de l'Anssi, qui a évoqué le turn-over dont souffre son agence, ces emplois étant très recherchés dans le privé. Il a exprimé une frustration : il n'a pas pu recruter à cause d'un problème de disponibilité de fonds, qui a aujourd'hui été réglé - il pense donc pouvoir enfin remplir son objectif. N'oublions pas que la lutte contre les menaces cyber doit suivre une courbe ascensionnelle dans la loi de programmation militaire. La cyberdéfense est une priorité de la défense nationale. Je vous invite à revoir l'Anssi pour vérifier que la réduction de son plafond d'emploi est une bonne idée. Pour ma part, je n'en suis pas convaincu.

Mme Chantal Deseyne , rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales . - La Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) voit ses crédits de 2018 reportés en 2019, avec une réduction de 2 équivalents temps plein. Je suis favorable aux propositions du rapporteur : il faut restructurer les missions pour assurer une stabilité dans les charges.

M. Michel Canévet , rapporteur spécial . - La CNIL, relogée à Ségur-Fontenoy, n'a plus un loyer prohibitif, mais elle pourrait mutualiser davantage avec ses voisins. La HATVP est toujours hébergée dans des locaux loués, car il n'y a pas assez de place à Ségur-Fontenoy. Les mutualisations sont en cours et la CNIL a encore des efforts à faire. Le ratio de 12 m 2 par poste de travail est respecté à Ségur-Fontenoy.

Jean-Yves Leconte, la CNIL, qui a dépensé 16 millions d'euros en 2017, se verrait attribuer 18,52 millions d'euros en 2019. Si nous lui demandons un effort de 500 000 euros, cela lui laisse toujours deux millions d'euros de plus ! Ce n'est pas mal, surtout dans un contexte où l'on demande des efforts à tous.

Nous faisons porter une économie de 1,5 million d'euros en dépenses de personnel sur le programme 129. Son action 02 relative à la coordination de la sécurité et de la défense - à qui nous demandons un effort et dont fait partie l'Anssi - a dépensé 80,5 millions d'euros en dépenses de personnel en 2017. Elle se verrait attribuer 97,2 millions en 2019 : même si l'on lui enlevait 1,5 million d'euros, cela fait toujours 16 millions d'euros de plus, soit 20 % !

Nous faisons toujours un effort pour l'ANSSI, mais pondéré par le fait que la difficulté de recrutement oblige à reporter les embauches. La revalorisation des régimes indemnitaires à l'Anssi est une nécessité, car avec la rigidité des statuts de fonctionnaires, nous ne pourrons pas attirer les profils dont nous avons besoin. L'Anssi a de grosses difficultés pour recruter, car les conditions salariales sont bien plus avantageuses dans le privé. Il faudrait accentuer les mesures de revalorisation prévues en donnant plus de latitude au directeur de l'Anssi, comme d'ailleurs au directeur de la Dinsic.

Concernant la Mildeca, elle est engagée dans un nouveau programme d'action quinquennal et cela se passe plutôt bien.

M. Jean-Claude Requier . - Merci pour ce rapport clair et synthétique ; le rapporteur jongle avec allégresse avec les chiffres et les sigles...

Nous soutiendrons l'amendement concernant la légion d'honneur et la médaille militaire. Les anciens combattants que nous rencontrons souhaiteraient que le contingent de la médaille militaire soit plus important, mais ne parlent jamais de cette petite rente. Combien d'emplois ont-ils été économisés grâce à l'opération Ségur-Fontenoy ? Que sont devenus la douzaine d'anciens locaux parisiens, souvent très bien placés ?

M. Roger Karoutchi . - Nous sommes très forts pour créer des postes dans les structures de contrôle... En revanche, France Stratégie, lointain héritier du commissariat au plan, qui pourrait nous informer sur ce qui va se passer dans dix ou vingt ans, voit ses emplois supprimés. C'est dommage...

M. Thierry Carcenac . - Merci à Michel Canévet pour son rapport très intéressant. Je partage son avis sur la Dinsic : un contrôle a priori des projets informatiques est préférable, d'autant que les dérives de coût sont fréquentes. Pour l'Opérateur national de paie, le coût du projet a augmenté de 143 % en très peu de temps. Descendre le seuil à 5 millions d'euros serait déjà très bien : il y a des projets à 4,5 millions d'euros qui dépassent largement ce seuil en cours de réalisation...

En commission l'an dernier, Claude Nougein et moi-même avions déjà proposé que, dans certains secteurs, des recrutements avec d'autres grilles que celles de la fonction publique soient possibles pour faire face aux difficultés de recrutement. Nous étudierons la possibilité de déposer un amendement sur cette question.

Concernant l'immobilier de l'État, l'opération Ségur-Fontenoy est mise en avant pour les économies de budget. Par ailleurs, les loyers budgétaires disparaissent, ce qui occasionne un débasage. Hier, la directrice de l'immobilier de l'État nous a confié vouloir conserver la référence aux loyers budgétaires.

La Sovafim a fait du bon boulot, de l'avis général ; or elle va disparaître. Avec Michel Bouvard, nous avions travaillé sur un rapport que je vous présenterai avec Claude Nougein sur le thème : faut-il une foncière publique ? Nous en avions une, la Sovafim, et elle va être absorbée pour sa partie logement par la Caisse des dépôts et consignations. C'est dommage.

M. Dominique de Legge . - Merci pour votre rapport. Je partage l'avis de Roger Karoutchi sur notre capacité à renforcer le contrôle plutôt qu'à préparer l'avenir... Puisqu'on parle de transparence, le Gouvernement a-t-il été transparent sur les postes qu'il propose de créer à la HATVP ? Même question pour le Défenseur des droits et la Commission nationale consultative des droits de l'homme.

M. Marc Laménie . - Merci au rapporteur pour son travail de qualité. Nous, nous les connaissons bien, mais dans l'opinion publique, qui connaît ces AAI et autres structures, qui se multiplient alors que les services publics disparaissent du terrain ? Pourquoi les 362 millions d'euros consacrés à la coordination de la défense ne sont-ils pas rattachés à la mission « Défense » ? Au sein du programme, à quoi correspondent les 122 millions d'euros de la ligne « Soutien » ?

M. Jean-Marc Gabouty . - Je mettrai de côté l'Anssi, secteur sensible qui mérite plus d'emplois, mais est confronté à des difficultés de recrutement. Pour le reste, il faut faire preuve de discernement. Compte tenu des avancées technologiques et des efforts, nous devrions observer une décélération beaucoup plus rapide des postes et des crédits. La DILA n'est qu'un des services de l'État ayant des fonctions de reproduction et de communication : celles-ci pourraient être mutualisées, y compris avec l'Imprimerie nationale, qui est une société anonyme dont tout le capital est détenu par l'État. Et je ne parle pas de la Société anonyme de composition et d'impression des Journaux officiels (Sacijo), dont les coûts sont totalement non-concurrentiels... Certains ministères consacrent plusieurs milliers de mètres carrés dans les quartiers les plus chers de Paris à des installations qui sont utilisées à 15 ou 20 % de leur capacité, ce qui fait monter la part du coût d'investissement dans le document final de 30 %, contre 5 % dans le privé.

M. Rémi Féraud . - Merci à Michel Canévet pour son rapport. Je ne sais pas si son siège a un loyer onéreux, mais je vois que le budget de la Mildeca est en baisse. Je fais ce constat, et parallèlement je constate que la stratégie du Gouvernement en matière de lutte contre la toxicomanie n'est toujours pas présentée. En quelques années, un quart du budget de cette mission a été amputé. Le Gouvernement fait très peu d'efforts dans la lutte contre les conduites addictives, alors que la consommation des opiacés est en hausse avec l'explosion de la consommation de crack. La diminution de 2 emplois poursuit la dégradation de l'an dernier : ce n'est pas très bon signe pour la prise en charge des addictions.

Mme Nathalie Goulet . - Puisqu'on parle des écoutes du GIC, il faudrait aborder la question du dérapage des contrats relatifs à la plateforme nationale des interceptions judiciaires (PNIJ), censée coûter 8 millions d'euros initialement et qui coûte aujourd'hui 110 millions d'euros - et cela ne marche toujours pas ! Ne parlons pas de Louvois - le logiciel unique à vocation interarmées de la solde - ou des appels d'offres de ministères régaliens remportés par Microsoft. Ne pourrions-nous pas imaginer une mission de contrôle sur ces questions ? Concernant la PNIJ, il n'y a pas de contrôle entre le début de l'opération et la fin : il n'y a aucune garantie ni aucun contrôle budgétaire, et l'Intérieur et la Justice se renvoient la patate chaude...

M. Michel Canévet . - La PNIJ relève du ministère de la justice et concerne les interceptions judiciaires ; nous parlons aujourd'hui du GIC et des interceptions de sécurité. Je n'ai pas vérifié si la Dinsic avait pu s'exprimer sur le projet PNIJ, c'est un sujet qui peut être étudié.

Jean-Claude Requier, 2 315 emplois sont présents sur le site Ségur-Fontenoy, dont les travaux ont coûté 200 millions d'euros. Pourquoi a-t-on choisi la Sovafim ? Parce qu'elle n'avait plus d'activité et que cela permettait de ne pas la supprimer. L'année dernière, on évaluait à 150 millions d'euros le patrimoine libéré à céder. Aujourd'hui, on estime que cela rapporterait entre 200 et 250 millions d'euros, soit plus que le coût des travaux à Ségur-Fontenoy. L'Assemblée nationale a acheté l'hôtel de Broglie pour 65 millions d'euros, d'autres cessions sont en cours. A priori , oui, cela devrait être une bonne opération.

France Stratégie a été installée à Ségur-Fontenoy et bénéficie d'une mutualisation de certaines fonctions : elle n'a plus besoin de personnel pour l'accueil ou pour les marchés publics ; la réduction de 9 postes peut s'expliquer ainsi. Le regroupement sur un seul site lui a également permis d'être plus opérationnelle grâce à une grande synergie.

Thierry Carcenac, vous posez une bonne question. Une foncière d'État est sans doute préférable à un partenariat public-privé (PPP) ; or nous avons beaucoup de prisons à construire... Les utilisateurs sont satisfaits, il n'y a pas eu de dépassement du coût, l'entrée dans les locaux s'est faite plus tôt que prévu.

Marc Laménie, il y a treize AAI dans le périmètre de la mission, sur une quarantaine. Le SGDSN n'est pas rattaché à la mission Défense, car il s'agit d'un service du Premier ministre. Quant à la direction des services administratifs et financiers (DSAF), elle mutualise toutes les fonctions support pour les services du Premier ministre.

Dominique de Legge, les créations de postes à la HATVP sont justifiées par les missions supplémentaires : les gouvernements changent plus vite que prévu, les lois de l'année passée amènent du travail supplémentaire, comme le répertoire numérique des représentants d'intérêts...

M. Vincent Delahaye . - Allons bon !

M. Michel Canévet , rapporteur spécial . - Pour le Défenseur des droits, les critères de discriminations se sont multipliés et il a été désigné compétent pour les droits des travailleurs détachés. Mais il a fait des économies considérables avec son installation à Ségur-Fontenoy, car ses loyers étaient très onéreux.

Jean-Marc Gabouty, les imprimeries dont vous parlez ne sont pas dans le périmètre, sauf celle de la DILA. Perdre 100 emplois en trois ans, ce n'est pas rien ; l'immobilier a été rationalisé autour de Desaix et de Ségur-Fontenoy. La DILA est dans une démarche d'économies.

M. Jean-Marc Gabouty . - Pas suffisamment.

M. Michel Canévet , rapporteur spécial . - Il reste à gérer l'extinction progressive de la Sacijo, société anonyme intégrée à la DILA.

Les crédits de la Mildeca ne baissent pas : aux 17,5 millions d'euros de crédits, il faut ajouter 13 millions de fonds de concours. Son budget est donc un peu supérieur aux 28,7 millions d'euros qu'elle avait dépensés en 2017.

La stratégie numérique de l'État est loin d'être au point. Il y a 18 500 agents qui s'occupent d'informatique, en majorité à la direction générale des finances publiques (DGFiP). Il y a encore beaucoup d'efforts à faire pour que l'État soit en ordre de marche.

L'amendement n° 1 a été adopté.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » sous réserve de l'adoption de son amendement et l'adoption sans modification du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

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Réunie à nouveau le jeudi 22 novembre 2018, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission des finances a procédé à l'examen de l'équilibre, des missions (dont la mission « Défense » précédemment examinée et réservée), des budgets annexes, des comptes spéciaux et des articles rattachés de la seconde partie

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - S'agissant de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », la commission des finances a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par son amendement et a adopté sans modification ceux du budget annexe. En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté sans modification les crédits de la mission et du budget annexe. En seconde délibération, elle a minoré les crédits de la mission de 6,6 millions d'euros. Après avoir pris acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, je vous propose de confirmer l'adoption des crédits de la mission tels que modifiés par l'amendement de notre rapporteur spécial Michel Canévet, qu'il propose cependant de rectifier par un amendement n° 2, et de confirmer l'adoption sans modification du budget annexe.

M. Michel Canévet , rapporteur spécial de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » . - Mon amendement tendait à réduire les crédits de la mission pour la rendre exemplaire. Je l'ai cependant modifié pour tenir compte des décisions prises à l'Assemblée nationale, en réduisant de 8,9 millions d'euros les crédits du programme 129 et de 0,8 million d'euros les crédits du programme 308 « Protection des droits et libertés ».

Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » tels que modifiés par son amendement rectifié et d'adopter sans modification les crédits du budget annexe « Publications officielles et informations administratives ».

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