Rapport n° 98 (2018-2019) de M. Louis-Jean de NICOLAY , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 31 octobre 2018

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N° 98

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 31 octobre 2018

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur la proposition de loi (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE) portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires et sur la proposition de loi organique (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE) relative à la nomination du directeur général de l' Agence nationale de la cohésion des territoires ,

Par M. Louis-Jean de NICOLA•,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Hervé Maurey , président ; MM. Claude Bérit-Débat, Patrick Chaize, Gérard Cornu, Ronan Dantec, Alain Fouché, Guillaume Gontard, Didier Mandelli, Frédéric Marchand, Mme Nelly Tocqueville, M. Michel Vaspart , vice-présidents ; Mmes Nicole Bonnefoy, Pascale Bories, MM. Jean-François Longeot, Cyril Pellevat , secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Jérôme Bignon, Joël Bigot, Jean Bizet, Jean-Marc Boyer, Mme Françoise Cartron, M. Guillaume Chevrollier, Mme Marta de Cidrac, MM. Jean-Pierre Corbisez, Michel Dagbert, Michel Dennemont, Mme Martine Filleul, MM. Jordi Ginesta, Éric Gold, Mme Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Benoît Huré, Olivier Jacquin, Mme Christine Lanfranchi Dorgal, MM. Olivier Léonhardt, Jean-Claude Luche, Philippe Madrelle, Pierre Médevielle, Louis-Jean de Nicolaÿ, Jean-Jacques Panunzi, Philippe Pemezec, Mme Évelyne Perrot, M. Rémy Pointereau, Mme Angèle Préville, MM. Jean-Paul Prince, Christophe Priou, Charles Revet, Mmes Nadia Sollogoub, Michèle Vullien .

Voir les numéros :

Sénat :

2 , 43 , 99 et 100 (2018-2019)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 31 octobre sous la présidence de M. Hervé Maurey (UC - Eure), président, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a examiné le rapport de M. Louis-Jean de Nicolaÿ (LR - Sarthe) et établi son texte d'une part, sur la proposition de loi n° 2 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires, déposée par M. Jean-Claude Requier et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen (RDSE), d'autre part, sur la proposition de loi organique n° 43 relative à la nomination du directeur général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires, déposée par les Présidents Hervé Maurey et Jean-Claude Requier .

Le premier texte comporte 12 articles visant à définir le statut, les missions, l'organisation, le fonctionnement et les moyens financiers et humains de la future Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT).

Le second comporte un article unique visant à prévoir que la nomination du directeur général de la future ANCT s'exerce après avis public de la commission compétente de chaque assemblée , selon les dispositions du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

La commission a souhaité validé cette première étape de la création de l'ANCT , et rappelle que la création d'un guichet unique pour les collectivités territoriales est un voeu exprimé depuis près de deux ans par le Président du Sénat et de nombreux élus, dont le Président Hervé Maurey et votre rapporteur Louis-Jean de Nicolaÿ, dans leur rapport consacré à l'aménagement du territoire en 2017 1 ( * ) . La commission avait déjà eu à connaitre, il y a quelques mois, de ce sujet, à l'occasion de l'examen du rapport de Louis-Jean de Nicolaÿ sur la proposition de loi n° 466 (2017-2018) relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale de nos collègues Philippe Bas, Bruno Retailleau et Mathieu Darnaud 2 ( * ) .

Souhaitant que l'objectif d'un aménagement durable et innovant des territoires soit replacé au coeur des politiques de cohésion, la commission de l'aménagement du territoire a adopté 27 amendements, dont 23 à l'initiative de son rapporteur , pour faire évoluer le texte selon trois axes principaux :

- en premier lieu, renforcer le poids des élus dans la gouvernance de l'agence , en instaurant la parité au sein du conseil d'administration de l'agence, entre les représentants de l'État et de ses établissements publics d'une part, et les représentants des élus locaux et nationaux ainsi que des agents de l'établissement, d'autre part ( article 3) . Elle a, en outre, institué un comité local de la cohésion territoriale ( article 5 ) afin de renforcer l'information et l'association des élus locaux aux actions de l'agence dans les territoires, en particulier à l'échelle départementale. Elle a également prévu que les conventions pluriannuelles conclues par l'agence avec d'autres établissements publics de l'État seront transmises pour information au Parlement ( article 7 ) ;

- en second lieu, garantir la prise en compte des territoires les plus fragiles dans les champs d'intervention de l'ANCT , en imposant à l'agence d'adopter une approche différenciée selon les territoires et en précisant son intervention dans les zones en difficulté pour des raisons géographiques, démographiques, sociales et économiques ;

- en troisième lieu, assurer le succès de l'agence et la transparence de son fonctionnement , en sécurisant l'entrée en vigueur de plusieurs dispositifs, notamment l'intégration de l'Agence du numérique, que la commission a fixée au 1 er janvier 2021 pour tenir compte des inquiétudes et craintes exprimées.

Votre commission a également codifié les dispositions relatives à l'ANCT au sein du livre II de la première partie du code général des collectivités territoriales afin d'améliorer la clarté et l'intelligibilité de la loi, qui constituent des objectifs à valeur constitutionnelle.

Au-delà, votre commission a regretté la méthode utilisée sur ce texte et les incertitudes entourant les moyens de la future agence ainsi que l'impréparation du Gouvernement sur le volet de la simplification des normes applicables aux porteurs de projets locaux.

Votre commission relève qu'il s'agit de la troisième proposition de loi déposée sur le bureau d'une Assemblée , et rappelle que le Gouvernement a échoué à obtenir du Parlement une habilitation à légiférer par ordonnance pour créer l'agence lors de l'examen du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) en séance publique au Sénat. Elle déplore l'absence d'évaluations préalables sur ce projet, dans la mesure où celles-ci auraient permis de mieux identifier les besoins auxquels l'agence devra répondre et les leviers, notamment législatifs, à activer en conséquence.

Dans ce contexte, votre commission appelle le Gouvernement à prendre ses responsabilités sur trois sujets de préoccupation majeure : la question des ressources d'intervention dont bénéficiera l'agence ; celle de la rationalisation des interventions de l'État dans les territoires et, enfin, celle de l'association des élus locaux et nationaux à la gouvernance de l'ANCT.

D'abord, votre commission relève que si le préfet Serge Morvan , cinquième commissaire général à l'égalité des territoires (CGET) en quatre ans , a bien rendu son rapport de préfiguration de l'agence au Premier ministre à l'été 2018, ce rapport n'a pu être accessible que grâce à l'action d'une organisation syndicale , qui l'a publiée sur son site internet 3 ( * ) . Elle déplore en conséquence ce manque de transparence même si elle comprend la gêne du Gouvernement quant au contenu de ce rapport, en comparaison du périmètre administratif actuellement envisagé pour l'agence. Il n'y a, en effet, pas de révolution dans la politique d'aménagement du territoire et le risque est bien établi de voir l'agence représenter « un arbre de plus dans la forêt » des établissements publics et opérateurs de l'État.

Ensuite, votre commission rappelle que l' ANCT devra porter une attention particulière aux territoires les plus en difficulté .

Enfin, votre commission sera vigilante quant à l'évolution des dotations aux territoires : les crédits d'intervention de l'agence ne doivent en aucun cas venir en soustraction des moyens accordés aux collectivités territoriales au titre, par exemple, de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) ou de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL). Elle rappelle, à ce titre, que les collectivités publiques locales réalisent 70 % de l'investissement public alors que leurs dépenses ne représentent que le quart des dépenses totales des administrations publiques.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a examiné conjointement la proposition de loi n° 2 (2018-2019) portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires et la proposition de loi organique n° 43 (2018-2019) relative à la nomination du directeur général de cette agence. Le Gouvernement a décidé d'engager la procédure accélérée pour l'examen de ces deux textes.

Déposée le 2 octobre 2018 au Sénat par M. Jean-Claude Requier et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, la proposition de loi n° 2 comporte 12 articles ayant pour objet de définir le statut, les missions, l'organisation, le fonctionnement et les moyens financiers et humains de la future ANCT.

La proposition de loi n° 43, déposée au Sénat le 16 octobre 2018 par MM. Hervé Maurey et Jean-Claude Requier comporte un article unique visant à prévoir que la nomination du directeur général de la future Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) s'exerce après avis public de la commission compétente de chaque assemblée, selon les dispositions du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution

Régulièrement annoncée depuis près de deux ans, la création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires doit permettre de lutter contre les multiples fractures - numérique, sanitaire et sociale, économique, relative aux mobilités - qui traversent les territoires.

Ces fractures françaises, bien connues et au sujet desquelles votre rapporteur a déjà eu l'occasion d'alerter votre commission, que ce soit lors de l'examen de la proposition de loi n° 466 (2017-2018) relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale de nos collègues Philippe Bas, Bruno Retailleau et Mathieu Darnaud 4 ( * ) ou de l'adoption du rapport d'information n° 565 (2016-2017) sur la politique d'aménagement du territoire, élaboré avec le Président Hervé Maurey 5 ( * ) , grèvent la cohésion sociale et territoriale de notre pays.

Si cette agence n'est pas une solution miracle aux problèmes de dynamisme que connaissent certains territoires, elle constitue une première étape pour replacer l'objectif d'un aménagement durable et innovant du territoire national au coeur des politiques de cohésion.

C'est à la lumière de ces impératifs que votre commission a examiné conjointement les deux textes qui lui sont soumis, lors de sa réunion du mercredi 31 octobre 2018.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LE CONTENU DES PROPOSITIONS DE LOI

A. UN PROJET QUI PEINE À VOIR LE JOUR

La création de l'Agence nationale de la cohésion des territoires est évoquée depuis près de deux ans, que ce soit par le Président du Sénat, de nombreux élus, ou le Président de la République ainsi que plusieurs membres du Gouvernement, par la voix de M. Julien Denormandie, secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires, de M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires, ou de Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'Intérieur. Il est donc temps que cessent les atermoiements du Gouvernement sur ce sujet .

Depuis l'annonce du Président de la République à la Conférence nationale des territoires le 17 juillet 2017, un an s'est écoulé avant que le Premier ministre ne confie la mission de rédiger un rapport de préfiguration de cette agence 6 ( * ) à M. Serge Morvan , préfet, ancien directeur général des collectivités locales au ministère de l'Intérieur et nommé commissaire général à l'égalité des territoires en remplacement de M. Jean-Benoît Albertini. Serge Morvan est ainsi la cinquième personne à occuper ce poste en quatre ans 7 ( * ) .

Entre temps, deux propositions de loi ont été déposées et examinées par le Parlement : la proposition de loi n° 303 créant une Agence nationale pour la cohésion des territoires de notre collègue Philippe Vigier, à l'Assemblée nationale, et la proposition de loi n° 466 relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale de nos collègues Philippe Bas, Bruno Retailleau et Mathieu Darnaud.

En outre, à l'occasion de l'examen en séance publique, au Sénat, du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique , le Gouvernement avait déposé un amendement visant à obtenir une habilitation à légiférer par ordonnance pour créer cette agence , dont le texte était rédigé comme suit 8 ( * ) :

« I. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, à prendre par voie d'ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de créer une agence de l'État dotée de la personnalité morale, compétente pour l'ensemble du territoire national, chargée de lutter contre les fractures territoriales et d'accompagner les mutations des territoires, en conduisant des programmes d'intervention et en soutenant, en lien avec les collectivités territoriales et les autres opérateurs de l'État, des projets territoriaux.

Cette ordonnance fixe notamment :

1° Les instances de gouvernance de cette agence, leur rôle, les modalités de désignation de leurs membres et les catégories de personnes représentées en leur sein, incluant notamment des élus locaux et nationaux ;

2° Les conditions dans lesquelles des personnes publiques intervenant dans les domaines de compétence de l'agence, en particulier des établissements publics, sont soit intégrées à l'agence, soit associées à la conduite de ses missions ;

3° Les conditions dans lesquelles les représentants de l'État au niveau déconcentré peuvent agir en qualité de délégué territorial de l'agence ;

4° Les catégories de ressources publiques ou privées de l'agence ;

5° Les modalités de transfert des personnels et des biens, droits et obligations des administrations et des établissements publics intégrés à l'agence.

II. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, à prendre par voie d'ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de créer une réserve thématique visant à ce que toute personne volontaire puisse servir des projets de territoire soutenus par l'agence.

III. - Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chacune des ordonnances prévues au I et II.

IV. - Dans un délai de douze mois à compter de l'entrée en vigueur de l'ordonnance prévue au I, le Gouvernement remet un rapport au Parlement relatif à la mise en place de l'agence. Ce rapport analyse en outre, à la suite de cette mise en place :

- la simplification des démarches visant à faciliter l'émergence de projets de territoires ;

- la prise en compte de la différenciation de territoires pour proposer une réponse adaptée ;

- la proximité de la réponse apportée aux acteurs locaux selon le principe de subsidiarité pour soutenir leur projet de territoire . »

Compte tenu de ces délais, votre rapporteur ne peut que se féliciter de voir enfin la création de l'ANCT discutée au Parlement avec le soutien de l'exécutif. Le Gouvernement a d'ailleurs décidé, dès le 4 octobre 2018, d'engager la procédure accélérée pour l'examen de la proposition de loi portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires.

B. LA PROPOSITION DE LOI N° 2 : LA CRÉATION D'UN ÉTABLISSEMENT PUBLIC DE L'ÉTAT

Votre rapporteur relève que l'intention des auteurs de la présente proposition est de créer une agence à vocation nationale , alors que la proposition de loi n° 466 de nos collègues Philippe Bas, Bruno Retailleau et Mathieu Darnaud visait à concentrer l'action de l'agence sur les territoires les plus fragiles, à savoir ruraux et périurbains , qui sont éligibles à la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) 9 ( * ) soit plus de 34 000 communes et 1 120 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscale propre.

Les auteurs de la proposition de loi indiquent ainsi : « L'ANCT a par conséquent vocation à agir sur tous les territoires de la République , quelles qu'en soient les caractéristiques, avec un accent particulier qui devra être mis sur les territoires les plus fragiles, aussi bien en zone rurale qu'en zone urbaine , en France hexagonale comme dans les Outre-mer. La promesse de l'égalité républicaine est une exigence qui ne peut plus attendre.

Votre rapporteur sera attentif à ce que la vocation urbaine de l'agence ne l'emporte pas sur sa vocation rurale.

En outre, cette proposition de loi s'inspire du rapport de préfiguration de Serge Morvan mais n'en retient pas toutes les options , notamment s'agissant de son périmètre, qui apparaît en définitive restreint par rapport à l'ambition initialement affichée d'un « guichet unique » de l'État pour soutenir l'ensemble des projets des collectivités territoriales, quelles que soient leurs thématiques (mobilités, transition écologique, renouvellement urbain, appui en ingénierie technique, recherche de financements).

En suivant cette logique et notamment la partie du rapport du préfigurateur consacrée aux « moyens adaptés pour une agence agile » 10 ( * ) , votre rapporteur comprend qu'il a été question de fusionner un nombre très important d'opérateurs de l'État et d'établissements publics au sein d'une grande Agence nationale de la cohésion des territoires , tels que l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA), l'Agence du numérique (ANUM) et le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA).

L'annexe 7 du rapport de prolifération de Serge Morvan s'aventurait même à dresser un bilan financier consolidé de ce que pourraient être les moyens de l'agence avec une hypothèse d'intégration de l'ANRU, de l'ANAH, de l'EPARECA et de l'Agence du numérique :

Source : rapport de préfiguration du préfet Serge Morvan, page 64.

Sur ce point, votre rapporteur constate que l'ambition initiale du préfigurateur a été tempérée. L'exposé des motifs de la proposition de loi précise : « l'ANCT doit être innovante dans son action. Elle doit être en capacité de coordonner et mobiliser les opérateurs de l'État intervenant dans le domaine de l'aménagement et de la cohésion des territoires, quel que soit leur statut [...].

D'une part, l'Agence nationale de la cohésion des territoires intégrera l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA), l'Agence du numérique et une large partie du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) .

D'autre part, elle passera avec les autres opérateurs de l'État oeuvrant dans les domaines de l'aménagement et de la cohésion des territoires des conventions fixant les objectifs et les moyens partagés mis en oeuvre dans les territoires . Ces conventions fixeront la façon dont les ressources des opérateurs pourront être mobilisées au profit des projets locaux accompagnés par l'ANCT. Ces conventions devront être conclues dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi. [...]. »

Au-delà, la mission de coordination de l'agence devrait également comprendre un volet purement administratif, comme le précise l'exposé des motifs :

L'Agence veillera à optimiser les moyens qui lui sont confiés. À ce titre, le directeur général de l'ANCT présentera sous 18 mois à compter de la promulgation de la présente loi, un schéma de mutualisation des fonctions supports de tout ou partie des opérateurs mentionnés. »

La proposition de loi comporte les dispositions suivantes :

- l' article 1 er vise à créer l'Agence nationale de la cohésion des territoires sous la forme d'un établissement public de l'État, compétent sur l'ensemble du territoire de la nation ;

- l' article 2 définit les missions de l'agence. Il prévoit notamment la dissolution de l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et le transfert des deux tiers de l'Agence du numérique à l'ANCT, en cohérence avec l'article 3 du décret d'attribution de la ministre de la Cohésion des territoires qui prévoit qu'elle a autorité, conjointement avec le ministre de l'économie et des finances, sur l'Agence du numérique 11 ( * ) ;

- l' article 3 organise la gouvernance de l'ANCT, administrée par un conseil d'administration composé de représentants de l'État, pour plus de la moitié de ses membres, de représentants des collectivités territoriales, de deux parlementaires, ainsi que de représentants de la Caisse des Dépôts et consignations et du personnel ;

- l' article 4 dispose que l'agence est dirigée par un directeur général qui réunit un comité d'action territoriale composé des directeurs généraux de quatre établissements publics : l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) ;

- l' article 5 prévoit que les services déconcentrés de l'État et en particulier le préfet constituent le guichet d'entrée pour les projets des collectivités territoriales qui souhaitent le soutien de l'agence ;

- l' article 6 fixe les différentes recettes de l'agence ;

- l' article 7 prévoit que l'agence conclut des conventions pluriannuelles tripartites avec l'État et l'ANRU, l'ANAH, l'ADEME ainsi que le CEREMA pour fixer des objectifs et des financements partagés ;

- l' article 8 dispose que l'agence emploie des fonctionnaires de l'État, des contractuels de droit public et des salariés soumis au code du travail ;

- l' article 9 prévoit que l'Agence nationale de la cohésion des territoires sera présente aux conseils d'administration respectifs de l'ADEME et du CEREMA ;

- l' article 10 organise le transfert, à l'agence, de la majorité des agents du Commissariat général à l'égalité des territoires et de l'Agence du numérique ainsi que des salariés de l'EPARECA et il acte la dissolution de cet établissement ;

- l' article 11 renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de fixer les conditions d'application de la loi ;

- l' article 12 vise à gager les éventuelles conséquences financières de la présente proposition de loi pour l'État.

C. LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE N° 43 : ASSOCIER LE PARLEMENT AU CHOIX DU FUTUR DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'AGENCE

Partant du constat que la politique d'aménagement du territoire est aujourd'hui « éclatée entre des guichets et des acteurs divers », le Président de la République avait affirmé, devant le congrès des maires le 24 novembre 2017 : « l'État doit parler d'une voix et d'une voix cohérente dans le montage de vos projets, que vous n'ayez pas affaire à des guichets avec chacun sa lecture du sujet et je souhaite que les administrations et les opérateurs de l'État, comme de la Caisse des dépôts et consignations, soient mis au service des projets des territoires de manière cohérente. Je veux un État facilitateur de vos projets » 12 ( * ) .

Avant de poursuivre : « Il faut une simplification de l'État à sa tête pour avoir une agence unique. Chaque ministre y portera sa voix, les crédits qu'il y a développés, défendus à l'Assemblée et la cohérence de sa politique, mais cette agence unique permettra une grande simplicité » 13 ( * ) .

Le futur directeur général de cette agence occupera donc un poste sensible, cristallisant de nombreuses attentes politiques, aussi bien du côté des collectivités territoriales que du côté de l'État : en conséquence, un droit de regard du Parlement est légitime .

L'article unique de la présente proposition de loi organique, déposée par Hervé Maurey et Jean-Claude Requier, modifie ainsi le tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution pour prévoir que la nomination du directeur général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires s'exerce après avis public de la commission compétente de chaque assemblée.

Le Sénat, en particulier, représentant constitutionnel des collectivités territoriales, pourra donc veiller à l'adéquation entre le profil de la personne pressentie pour occuper ce poste et les attentes des élus locaux et des populations dans les territoires.

Le Gouvernement a décidé d'engager, le 17 octobre 2018, la procédure accélérée pour l'examen de ce texte.

D. L'AVIS DU CONSEIL D'ÉTAT : UNE CONSULTATION À L'INITIATIVE DU PRÉSIDENT DU SÉNAT

Par lettre du 3 octobre 2018, le Président du Sénat a saisi le Conseil d'État de la proposition de loi portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires. Le Conseil d'État a rendu son avis lors de l'Assemblée générale du 25 octobre dernier, sur le projet d'avis de la section de l'administration, présenté par Mme Catherine de Sallins, rapporteur.

Cet avis, n° 395974, a été rendu public par le Président du Sénat, après l'accord de l'auteur de la proposition de loi, M. Jean-Claude Requier. Il figure en annexe au présent rapport.

Votre rapporteur se félicite que le Président du Sénat ait recouru à la faculté que lui offre le dernier alinéa de l'article 39 de la Constitution et l'article 4 bis de l'ordonnance 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.

Sans reprendre de façon exhaustive les observations et suggestions formulées par le Conseil d'état, développées plus loin, votre rapporteur attire l'attention de votre commission sur quatre points spécifiques de cet avis :

- d'abord, si le Conseil d'État estime que ce nouvel établissement public hybride entre un établissement public administratif et un établissement public industriel et commercial ne relève pas d'une nouvelle catégorie d'établissement public, l' intervention du législateur est nécessaire à plusieurs titres ;

- ensuite, le Conseil d'État s'interroge sur la capacité de ce nouvel établissement à d'assurer la coordination des actions de l'État et de ses opérateurs mieux que ne le fait aujourd'hui le CGET ;

- Le Conseil d'État attire l'attention du pouvoir réglementaire sur la nécessité de définir des procédures de décision efficaces pour effectivement répondre aux attentes des porteurs de projets locaux, ces prévisions relevant du domaine réglementaire ;

- enfin, le Conseil d'État relève que l'établissement devra être doté de ressources suffisantes pour exercer sa mission , tant à l'échelle nationale que locale.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE

A. LA NÉCESSITÉ D'UNE STRUCTURE DE SOUTIEN AUX TERRITOIRES LES PLUS FRAGILES

Votre rapporteur estime que la création de cette agence doit s'appréhender selon trois axes principaux : un premier axe lié à la géographie de notre pays, à ses dynamiques économiques, sociales et culturelles ; un second axe lié à la clarté et la lisibilité de l'action de l'État dans les territoires ; un troisième axe lié à la gouvernance et à la transparence de l'action de l'agence.

S'agissant du premier axe, votre rapporteur appelle de ses voeux la création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires compte tenu des fractures multiples qui traversent le pays et au sujet desquels il a déjà eu l'occasion d'attirer l'attention de la commission, notamment lors de l'examen de la proposition de loi n° 466 relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale : « Votre rapporteur pour avis et le Président Hervé Maurey avaient évoqué, dans leur rapport précité consacré à l'aménagement du territoire, le besoin d'un guichet unique pour les territoires . C'était le sens de la proposition n° 23 de ce rapport : « s'appuyer sur les nouveaux EPCI pour reconstituer une capacité locale d'ingénierie, et faciliter l'accès aux ressources et conseils de l'État par un guichet unique ». Si la Directive nationale d'orientation sur l'ingénierie d'État dans les territoires, publiée par le Premier ministre le 10 mars 2016, témoignait d'une prise de conscience de l'ampleur de l'effort humain et technique à consacrer au développement des territoires, la traduction de cette ambition, dans les structures de l'administration et dans les services apportés aux territoires demeure, sinon perfectible, du moins partielle . »

Concernant l'intégration de l'agence du numérique , à la suite des observations formulées par nos collègues Hervé Maurey et Patrick Chaize dans leur rapport d'information de 2015 sur l'aménagement numérique du territoire 14 ( * ) , votre rapporteur considère qu'il est tout à fait positif de lier la question de l'aménagement et de la cohésion des territoires à celle du numérique .

L'accélération du déploiement des réseaux de communications électroniques en fibre optique , l'amélioration de la couverture mobile du territoire et le développement, auprès du public, des outils numériques et des savoir-faire associés sont des éléments essentiels pour la cohésion territoriale et sociale.

Au-delà, votre rapporteur est conscient de la nécessité de s'extraire d'un constat trop caricatural et binaire, visant à opposer l'urbain au rural , ainsi que de nombreux rapports et travaux parus ces derniers mois le relèvent, à l'image du Rapport sur la cohésion des territoires de juillet 2018 élaboré par le CGET 15 ( * ) et des travaux collectifs sur Les systèmes urbains 16 ( * ) qui mettent l'accent sur l'importance d'adopter une approche relationnelle pour comprendre les dynamiques à l'oeuvre dans les territoires. Votre rapporteur souligne, à cet égard, que 62 % des personnes habitant en zones rurales associent d'abord la ruralité à la qualité de vie quand les Français l'associent d'abord à des difficultés socio-économiques (46 % des citations) 17 ( * ) .

Il rappelle toutefois que certains territoires, en particulier ruraux et périurbains, sont traversés par des difficultés plus importantes et que leur spécificité est précisément un manque de capacité d'ingénierie technique et financière pour concevoir des projets de modernisation et de revitalisation. Aussi, l'étude précitée montre également un fort mécontentement parmi les ruraux, qui déclarent ne pas avoir accès à des services publics (64 % d'entre eux se disent abandonnés par l'État).

Votre commission souhaite que l'agence soutienne en priorité les projets innovants des collectivités territoriales. Les exemples sont nombreux : que ce soit en matière de mobilités, d'alimentation saine, durable et de proximité, de reconquête de la biodiversité, de création de nouveaux espaces de vie commune, les territoires foisonnent d'initiatives innovantes qui dessinent les contours d'une nouvelle cohésion sociale et territoriale . Sur ce point, votre rapporteur a pris connaissance avec intérêt des travaux de la « Mission Coworkin » dont le rapport consacré aux tiers lieux illustre l'intelligence des territoires et les possibilités offertes par les nouvelles technologies pour mieux concilier vie sociale et professionnelle ainsi que leur capacité à renforcer la cohésion territoriale et sociale 18 ( * ) .

Sur le volet de la simplification de l'action de l'État et de l'amélioration de sa lisibilité par les élus et les citoyens , les échanges de votre rapporteur avec plusieurs personnalités, en particulier le Président du Conseil national d'évaluation des normes, Alain Lambert, révèlent l'impréparation du Gouvernement sur cette question. Par exemple, le contenu du contrat de cohésion territoriale n'est pas précisé, de même que ses modalités de conclusion et son calendrier de déploiement.

Le rapport de préfiguration de Serge Morvan évoque la création de ce contrat de cohésion territoriale pour intégrer les quelques 1 235 outils de contractualisation existant actuellement entre l'État et les collectivités territoriales. Interrogé par votre rapporteur, le Gouvernement n'envisage pas de définition législative de ce contrat, à ce stade, mais précise : « la définition d'un projet de territoire ANCT sera ainsi l'occasion de faire converger les différents contrats sectoriels existants trouvant à s'appliquer sur un même territoire de référence, pour rendre plus lisibles, plus simples et plus cohérentes les modalités d'intervention de l'État sur un même territoire de référence. C'est le sens de la République contractuelle voulue par le Gouvernement et qui nous incite à construire de nouvelles méthodes de travail entre l'État et les territoires ». Votre rapporteur laisse chacun apprécier la portée opérationnelle de cette assertion .

Enfin, sur le volet de la gouvernance et de l'association des élus, qu'ils soient locaux ou nationaux , votre rapporteur relève que cet objectif est peu compatible avec un conseil d'administration composé très majoritairement de représentants de l'État, en plus d'un directeur général nommé par le pouvoir exécutif. La proposition de loi n° 466 relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale retenait une formule de parité entre l'État et les collectivités, mieux à même de servir cet objectif.

Il serait également nécessaire de prévoir, à l'échelle locale, l'association des élus aux actions de l'agence . Sans tomber dans l'excès, qui consisterait à créer une structure inutilement rigide ou déconnecté du mode opératoire souple de l'ANCT, la mise en place d'un comité local de la cohésion territoriale permettrait de marquer une relation de confiance, partenariale et de respect entre l'État et les territoires. En l'absence d'une telle association, le risque d'une recentralisation rampante de la politique d'aménagement et de soutien aux territoires pourrait exister.

B. PLUSIEURS ÉVOLUTIONS INTRODUITES PAR VOTRE COMMISSION POUR RENFORCER LE POIDS DES ÉLUS DANS L'AGENCE, ACCOMPAGNER SA MONTÉE EN CHARGE ET AMÉLIORER LA RÉDACTION DU TEXTE

Lors de sa réunion du mercredi 31 octobre, votre commission a adopté 27 amendements , dont 23 à l'initiative de votre rapporteur et 4 sous-amendements, selon quatre objectifs principaux :

- Revoir la gouvernance de l'ANCT pour une meilleure association des élus locaux et nationaux. Votre commission a ainsi adopté un amendement à l' article 3 pour instituer, au sein du conseil d'administration de l'agence, la parité entre d'une part, les représentants de l'État et de ses établissements publics et, d'autre part, les représentants des élus locaux et nationaux ainsi que des agents de l'établissement. Le président du conseil d'administration de l'agence sera par ailleurs choisi au sein du collège des élus locaux et votre commission a prévu de doubler le nombre de députés et sénateurs qui y siégeront. À l' article 5 , votre commission a adopté un amendement à l'initiative de votre rapporteur, visant à instituer un comité local de la cohésion territoriale à l'échelle départementale, rassemblant les élus locaux concernés par des projets soutenus par l'agence autour du préfet, délégué territorial de l'ANCT.

- Renforcer la prise en compte des territoires les plus fragiles. À l' article 2 , votre commission a adopté un amendement précisant que l'agence s'intéressera à l'ensemble des zones caractérisées par des difficultés géographiques, démographiques, sociales et économiques, incluant les zones de revitalisation rurale ainsi que plusieurs sous-amendements incluant dans les missions de l'agence des actions en faveur du maintien des services publics et de la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs. Votre commission a également inclut la lutte contre le changement climatique dans le champ des missions de l'agence.

- Simplifier le paysage administratif en matière d'aménagement. C'est notamment le sens d'un amendement portant article additionnel après l'article 3 de la proposition de loi et adopté par votre commission pour permettre le rattachement futur d'autres établissements publics de l'État évoluant sur des périmètres complémentaires ou connexes à celui de l'ANCT. Un amendement adopté par votre commission à l' article 7 vise également à renforcer la coordination entre les acteurs de l'ANCT et celles de l'État et de l'ADEME, de l'ANRU, de l'ANAH, du CEREMA, de la Caisse des Dépôts et consignations et des agences régionales de santé (ARS). Suivant la recommandation du Conseil d'État dans son avis sur la proposition de loi, votre commission a renforcé le comité d'action territoriale dans ses prérogatives. Des conventions pluriannuelles seront conclues entre ces établissements pour définir des objectifs et des moyens partagés ; elles feront l'objet d'une transmission au Parlement.

- Améliorer la qualité juridique du texte, en codifiant ses dispositions au sein du code général des collectivités territoriales, en supprimant des dispositions à caractère réglementaire et en sécurisant les dispositifs d'entrée en vigueur. C'est l'objectif de plusieurs amendements adoptés par votre commission, à l' article 1 er du texte par exemple, ou encore aux articles 2, 5, 6, 8 et 10.

Enfin, votre commission a prévu que l'intégration de l'Agence du numérique au sein de l'ANCT s'effectuerait le 1er janvier 2021 , répondant ainsi aux inquiétudes et craintes qui se sont manifestées lors des travaux préparatoires de votre rapporteur, concernant un potentiel ralentissement de la mise en oeuvre du plan « France Très haut débit » et des différentes actions actuellement conduites par l'Agence du numérique au service de la couverture mobile des territoires et du développement des usages numériques auprès du public.

EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI

Titre Ier Création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires

À l'initiative de votre rapporteur, votre commission a adopté l'amendement COM-35 , tendant à insérer une division additionnelle intitulée « Titre I er - Création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires » avant l'article 1 er de la présente proposition de loi, afin de structurer le texte examiné.

Article 1er (Chapitre Ier du titre III du livre II de la première partie [nouveau] et article L. 1231-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Définition du statut juridique de l'Agence nationale de la cohésion des territoires

Objet : cet article vise à créer une institution publique nationale dénommée « Agence nationale de la cohésion des territoires » (ANCT), qui revêt le caractère d'un établissement public de l'État.

I. Le droit en vigueur

Établissement public administratif, établissement public industriel et commercial, établissement public sui generis , agences

L' article 34 de la Constitution réserve au législateur la compétence pour fixer les règles relatives à « la création de catégories d'établissements publics ». Parmi ces règles figurent « la détermination et le rôle de leurs organes de direction et d'administration, les conditions de leur élection ou de leur désignation, la détermination des catégories de personnes représentées au sein des conseils des établissements, celle des catégories de ressources dont peuvent bénéficier ces établissements, la nature et les fonctions des composantes internes ainsi que les conditions de désignation ou de l'élection de leurs organes de direction et d'administration dès lors que ces composantes sont dotées de compétences qui leur sont propres » 19 ( * ) .

Un établissement public tient généralement sa qualification de la loi : il est soit administratif, soit industriel et commercial. Dans le silence de la loi ou du règlement constitutif, il revient alors au juge de trancher quant au caractère de l'établissement. Celui-ci tient compte de l'objet de la mission de l'établissement, de la nature de ses activités , de ses modalités de fonctionnement ou encore de l'origine des ressources dont il dispose 20 ( * ) . Ainsi que le soulignait Bruno Genevois dans ses conclusions sur l'arrêt Tribunal des conflits Société Interfrost FIOM 21 ( * ) , « le critère de la compétence (du juge) est fondé sur la nature intrinsèque du service et non sur le statut de celui. Ainsi, ce n'est pas la qualité d'établissement public industriel et commercial qui détermine la compétence judiciaire de principe, c'est le caractère commercial et industriel du service géré ». Dès lors, l'existence d'établissements publics dits « à double visage », associant l'une et l'autre des composantes classiques d'un établissement public, a été affirmée 22 ( * ) . Dans son arrêt du 29 décembre 2004 Blanckeman , le Tribunal des conflits a clarifié le principe de la répartition des compétences des ordres de juridiction : « lorsqu'un établissement public tient de la loi la qualité d'établissement public industriel et commercial, les litiges nés de ses activités relèvent de la compétence judiciaire, à l'exception de ceux relatifs à celles de ses activités qui, telle la réglementation, la police ou le contrôle, ressortissent par leur nature de prérogatives de puissance publique ».

Le recours à la formule de l'établissement public s'opère pour des raisons très diverses, ce qui explique son succès et la plasticité de la notion . Pour des raisons politiques, d'optimisation, d'association d'autres personnes à la mise en oeuvre d'une politique publique ou tenant à une volonté de soustraire l'application d'une politique aux règles de droit commun régissant l'activité de l'administration (personnels, comptabilité), l'établissement public est utilisé pour répondre à des objectifs très divers. Le Conseil d'État rappelle à cet égard, dans son étude de 2009 consacrée aux Établissements publics 23 ( * ) , que « le droit des établissements publics n'a rien d'un jardin à la française (...) à chaque création ou modification des règles d'un établissement public, [les initiatives législatives] conduisent à de fréquentes interrogations quant au véhicule normatif adéquat, quant à la marge de manoeuvre dont on dispose au regard d'une catégorie déjà existante, et quant à l'appréciation de ces questions par le juge ».

Aussi, le législateur est intervenu à de nombreuses reprises pour instituer de nouvelles catégories d'établissement public, parmi lesquels les établissements publics fonciers et d'aménagement 24 ( * ) , les établissements publics de coopération culturelle (EPCC) 25 ( * ) , les « exploitants publics » 26 ( * ) ou encore les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPSCP) 27 ( * ) .

Il résulte d'une jurisprudence constante 28 ( * ) que des établissements publics doivent être regardés comme entrant dans une même catégorie dès lors que leur activité s'exerce territorialement sous la même tutelle administrative et présente une spécialité analogue (décision n° 79-108 L du 25 juillet 1979).

En principe « tout établissement doit être techniquement rattaché à une personne morale » 29 ( * ) , c'est-à-dire soit à l'Etat, soit à une collectivité territoriale. La règle de rattachement est même conçue comme une des règles constitutives d'une catégorie d'établissements publics 30 ( * ) . En outre, le critère de la territorialité exclut de comparer un établissement public à un service à compétence nationale, qui n'exerce pas de missions territorialisées.

Le critère de la spécialité analogue a connu une appréciation de plus en plus souple, conduisant à des situations parfois surprenantes et le Conseil d'État rappelle ainsi dans son étude précitée de 2009 que « seul l'énoncé de cas ou de situations particulières permet d'apprécier cette relative variabilité du degré de contrôle exercé ».

Le critère de la spécialité analogue sur la voie de la simplification ?

Si la ligne de partage entre loi et règlement s'est progressivement déplacée au profit du second, c'est principalement sous l'effet d'une appréciation de plus en plus souple de la notion de spécialité analogue . L'examen des notes et fiches des sections administratives du Conseil d'Etat et, dans une moindre mesure, de la jurisprudence de la section du contentieux, fait en effet apparaître une propension croissante à se satisfaire d'analogies largement entendues. Le critère de la spécialité analogue a toujours fait l'objet d'appréciations contrastées, sans d'ailleurs que les raisons justifiant que soit reconnue la compétence du législateur ou celle du pouvoir réglementaire ne ressortent toujours clairement. Seul l'énoncé de cas ou de situations particulières permet d'apprécier cette relative variabilité du degré de contrôle exercé.

Ainsi, alors que le CNRS (CE, 17 juin 1985, Syndicat national des chercheurs scientifiques et autre, R. p. 185), le port autonome constitué entre l'Etat et la ville de Strasbourg (section des travaux publics, 24 août 1993, Loi portant approbation d'un avenant à la convention intervenue le 20 mai 1923 entre l'Etat et la ville de Strasbourg relative à la constitution du port rhénan de Strasbourg en port autonome), EDF et GDF (section des travaux publics, 24 octobre 1996, n° 359 765, Projet de décret modifiant l'article 20 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, « en raison de la nature et de l'ampleur des missions assignées à chacun d'eux », EDCE 1996 p. 191), l'ANFR (section de l'intérieur, 14 février 1995, n° 357 187, Projet de décret relatif à la création de l'Agence nationale des fréquences radioélectriques, EDCE 1995 p. 207) ont été regardés comme ne se rattachant à aucune catégorie préexistante, des solutions plus souples ont été retenues pour Météo-France jugé comparable, « eu égard à son objet, à la nature de ses activités et aux règles de tutelle auxquelles il est soumis » , à d'autres établissements non identifiés par la décision (CE, 12 avril 1995, Syndicat national des ingénieurs et techniciens de la météorologie nationale, T. p. 615) ou encore pour le Centre de sécurité sociale des travailleurs migrants (section sociale, 19 juillet 1994, n° 356 402).

Ce critère reste la pierre angulaire du contrôle exercé sur la création des établissements publics . L'on trouve ainsi, y compris dans la période récente, des avis ou décisions marquant les limites du pouvoir réglementaire : l'on peut par exemple citer l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), qui a été considérée comme constituant à elle seule une catégorie dont les ressources devaient être définies par la loi (section des travaux publics, 8 mars 2005, n° 371 188, Projet de décret relatif aux conditions d'attribution des aides à la construction, à l'acquisition et à la réhabilitation des logements et modifiant le code de la construction et de l'habitation), ou encore l'établissement chargé des sondages, diagnostics et opérations de fouille d'archéologique préventive, doté d'un monopole (AG, 4 février 1999, n° 363 144, Projet de loi relatif à l'archéologie préventive, EDCE 2000 p. 76).

Ce fut également le cas de l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), dont l'Assemblée générale a considéré qu'elle ne pouvait être regardée comme ayant une spécialité analogue à celle de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Acsé), en raison des différences tenant à la nature des aides versées et aux publics visés par les deux agences (EDCE 2005 p. 99).

Longtemps, pour que le critère de la spécialité analogue soit considéré comme rempli, une double exigence a semblé prévaloir : il fallait non seulement que l'activité soit de même nature, mais encore qu'elle s'exerce dans le même domaine d'intervention que celui de l'établissement de référence.

Il y a quelques années, la section des finances prenait encore soin, pour estimer que la Masse des douanes, qui a pour objet essentiel de pourvoir au logement des agents des services extérieurs de la DGDDI, faisait partie de la même catégorie que l'Economat des armées, EPIC chargé de l'approvisionnement en denrées et fournitures des corps de troupes, que leurs missions étaient comparables - « procurer à l'administration ou aux agents publics des biens ou des services utiles à l'accomplissement des missions dont ils ont la charge » - mais aussi qu'elles s'exerçaient « dans un domaine voisin » (section des finances, 7 janvier 1997, n° 356 905, EDCE 1998 p. 80). De même, des activités communes d'expertise, de surveillance et de contrôle ne suffisaient pas à la section sociale pour classer l'Office de protection contre les rayonnements ionisants dans la même catégorie que l'Agence française du médicament et l'Agence française du sang : elle prenait soin de relever en outre qu'il s'agissait, dans les trois cas, d'assurer la protection sanitaire de la population (section sociale, 8 février 1994, n° 355 649, EDCE 1994 p. 198). Le critère de spécialité analogue semblait donc répondre à une double exigence, de nature et de domaine d'intervention.

L'exigence d'une analogie concernant le domaine d'intervention paraît avoir fait l'objet d'un abandon progressif ces dernières années .

Cette évolution s'est faite en quatre temps :

• le Conseil d'État, dans ses formations administratives, a d'abord estimé qu'une école nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers ne pouvait être regardée comme constituant une nouvelle catégorie compte tenu de l'existence de nombreux autres établissements de formation de fonctionnaires placés sous la tutelle de l'Etat (AG, 2 avril 2002, n° 367 494, Projet de loi relatif à la modernisation de la sécurité civile, EDCE 2003 p. 65) ; dans le même ordre d'idées, mais plus récemment, la section sociale a estimé que le centre national de gestion de praticiens et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière ne constituait pas une catégorie nouvelle d'établissements publics, eu égard à l'existence du centre national de gestion de la fonction publique territoriale, qui a un même rattachement territorial et une spécialité analogue (section sociale, 27 mars 2007, n° 380 072, Projet de décret relatif à l'organisation et au fonctionnement du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, EDCE 2008 p. 145) ;

• les cercles et foyers militaires ont ensuite été regardés comme relevant de la catégorie constituée par les centres régionaux des oeuvres universitaires institués par le code de l'éducation (AG, 2 décembre 2004, n° 370 793, Projet d'ordonnance relatif à la partie législative du code de la défense) ;

• l'établissement public national ayant pour mission de promouvoir le sport et la pratique sportive par l'attribution de concours financiers a été jugé, de manière plus audacieuse, comme ne constituant pas à lui seul une nouvelle catégorie dès lors que plusieurs établissements nationaux existants, tels le Centre national de la cinématographie, le Centre national du livre et le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz, avaient également pour mission de contribuer à promouvoir des activités par l'attribution de concours financiers (AG, 23 septembre 2005, n° 372 184, PLF 2006, EDCE 2006 p. 68)40 ;

• enfin, l'Assemblée générale a considéré que l'EPA dénommé « Agence nationale des titres sécurisés », créé en vue « de développer, d'acquérir, d'exploiter et de maintenir les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de procédures sécurisées permettant la délivrance de titres réglementaires » , ne relevait pas d'une nouvelle catégorie d'établissements publics dès lors qu'il existait déjà d'autres établissements ayant pour objet la mise en commun des moyens des administrations (AG, 21 septembre 2006, n° 373 638, PLF 2007).

La question se pose de savoir jusqu'où pousser un tel assouplissement . Pourrait ainsi être envisagé un abandon plus assumé de la composante du domaine d'intervention d'un établissement public, pour ne plus apprécier le critère de la spécialité analogue qu'au regard de la nature des activités exercées.

L'idée paraît d'autant plus intéressante qu'il serait alors possible d'identifier par avance un certain nombre d'activités-types, permettant ainsi d'apprécier le critère de la spécialité analogue de façon à la fois plus rapide et plus fiable. Relèveraient par exemple de la même catégorie les établissements rassemblant et/ou répartissant des moyens, ceux soutenant une activité au moyen d'aides financières. Dans cette optique, ne seraient retenues que les missions principales, sans prendre en compte les activités ne présentant qu'un caractère accessoire.

Une telle simplification rencontrerait assurément certaines limites . D'une part, la frontière entre la nature des activités et les domaines d'intervention est, dans la pratique, moins nette qu'en théorie : c'est le cas par exemple des établissements d'enseignement ou des établissements culturels, dont les fonctions se confondent largement avec le champ dans lequel ils interviennent - ceux de l'éducation et de la culture. D'autre part, se poserait également la question de savoir comment apprécier la spécialité analogue dans des cas de combinaisons d'activités ou de fonctions. Il ne s'agirait pas en effet que l'effet simplificateur escompté se voit absorbé ou même, plus que compensé, par un excessif raffinement de la distinction entre les différentes modalités d'intervention.

Mais ces objections ne paraissent pas dirimantes . En premier lieu, la circonstance qu'une modalité d'intervention soit spécifique à un domaine particulier ne remet pas véritablement en cause la pertinence de l'adoption d'une grille de lecture centrée sur le seul critère des fonctions exercées. En second lieu, les cas de cumul de fonctions ou d'activités pourraient être appréciés au regard des critères simples, tels que ceux de fonction dominante, ou de profil de fonctions analogue.

Source : Conseil d'État, étude annuelle 2009, Établissements publics, p. 34-37.

Enfin, il convient de relever l'utilisation de plus en plus fréquente de la notion d'agence, au sujet de laquelle le Conseil d'Etat s'interrogeait en 2012 dans son rapport public Les agences, une nouvelle gestion publique ? Il relevait ainsi que de nombreuses agences sont créées du fait de l'émergence d'une nouvelle politique publique ou de la volonté des responsables politiques de lui donner une ampleur accrue mais les objectifs de modernisation de la gestion ou de réorganisation administrative ont conduit à des créations erratiques d'agences 31 ( * ) . Il existe ainsi des agences d'expertise 32 ( * ) , de financement 33 ( * ) ou encore de mutualisation des moyens 34 ( * ) . Le Conseil d'Etat définit l'agence comme « un organisme autonome exerçant une responsabilité structurante dans la mise en oeuvre d'une politique nationale » 35 ( * ) .

Les modèles comparables à la future ANCT

En premier lieu, la dénomination « institution publique nationale » choisie par les auteurs de la présente proposition de loi fait écho à celle retenue par le législateur lors de la création de Pôle Emploi 36 ( * ) et aujourd'hui inscrite à l'article L. 5312-1 du code du travail.

En second lieu, parmi les opérateurs des « premier et deuxième cercle » identifiés par le préfet Morvan dans son rapport de préfiguration, une grande diversité de statuts se dégage (voir tableau ci-après).

Nom

Forme juridique

Tutelle

ANRU

Établissement public industriel et commercial (EPIC)

Ministre chargé de la ville et plus précisément le Commissariat général à l'égalité des territoires 37 ( * ) .

EPARECA

Établissement public industriel et commercial (EPIC)

Tutelle conjointe :

- Ministre chargé du commerce ;

- Ministre chargé de la ville ;

- Ministre chargé de l'urbanisme.

CEREMA

Établissement public administratif (EPA)

Ministres chargés du développement durable, de l'urbanisme et des transports.

ADEME

Établissement public industriel et commercial (EPIC)

Ministres chargés de l'environnement, de l'énergie et de la recherche.

ANAH

Établissement public administratif (EPA)

Tutelle conjointe :

- Ministres chargé du logement ;

- Ministre chargé des finances.

Source : rapport de préfiguration - S. Morvan.

II. La proposition de loi initiale

Le présent article dispose, en son premier alinéa, que l'Agence nationale de la cohésion des territoires est une « institution publique nationale » créée sous la forme d'un établissement public de l'État.

Le deuxième alinéa prévoit que l'agence exerce ses missions sur « l'ensemble du territoire national ». Cette notion recouvre l'ensemble des collectivités territoriales de la République mentionnées à l'article 72 de la Constitution, c'est-à-dire « les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 ». Sont ainsi inclues dans le champ d'intervention de l'agence, l'ensemble des collectivités territoriales du territoire métropolitain, les départements et les régions d'outre-mer mentionnés à l'article 73 de la Constitution régis par le principe d'identité législative et les collectivités d'outre-mer de l'article 74, régies par le principe de spécialité législative ainsi que la Nouvelle-Calédonie.

III. La position de votre commission

Le Conseil d'État souligne, dans son avis rendu à la demande du Président du Sénat, que de nombreuses particularités de l'ANCT justifient que la loi intervienne pour créer cette agence.

Cette position fait écho à l'avis rendu par la section de l'administration du Conseil d'État au sujet d'un projet de décret portant statut de l'établissement public administratif dénommé « Institut de Formation aux Carrières Administratives, Sanitaires et Sociales (IFCASS) » : « un décret ne peut légalement créer un nouvel établissement public placé sous la même tutelle administrative que s'il possède une spécialité analogue à celle d'une catégorie d'établissements ayant été créée par la loi et à la condition, en outre, de se conformer aux règles constitutives de la catégorie de rattachement définies par le législateur, quand bien même la loi comporterait, sur ce point, un degré de précision allant au-delà de ce qu'implique la notion de règle constitutive [...] la condition tenant au respect des règles constitutives ne peut être regardée comme remplie dès lors qu'au regard des catégories de personnes représentées en son sein, la composition de son conseil d'administration ne s'aligne sur aucune des catégories d'établissements publics avec lesquelles il présente une spécialité analogue » 38 ( * ) .

Relevant qu'il existe d'autres établissements créés par la loi ayant le même objet que celui de l'agence - le soutien aux projets des collectivités territoriales et acteurs et la contribution à l'aménagement et à la cohésion des territoires - tels que l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) ou le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), le Conseil d'État affirme, dans son avis rendu sur la proposition de loi, que ce nouvel établissement public « ne relève pas d'une nouvelle catégorie d'établissements publics » 39 ( * ) . Il ajoute également que « si l'agence prendra la suite du Commissariat général à l'égalité des territoires, les transferts de compétence n'incluent pas les prérogatives qui sont le propre d'une direction d'administration centrale telles que la conception d'une politique ou la tutelle sur des établissements », le cas contraire étant de nature à jeter le doute sur la constitutionnalité d'une telle formule d'agence au regard du principe posé par l'article 20 de la Constitution selon lequel le Gouvernement « dispose de l'administration ».

L'ANCT doit être conçue comme un établissement public hybride entre un établissement public administratif et un établissement public industriel et commercial, pour exercer au mieux les missions qui lui sont confiées par l'article 2 de la présente proposition de loi. C'est d'ailleurs ce que relève le Conseil d'État dans son avis : « Si l'activité dominante de cette agence revêtira ainsi un caractère administratif, elle inclura aussi des missions à caractère industriel et commercial, qui sont celles aujourd'hui exercées par l'EPARECA ».

Au-delà, au regard de la jurisprudence parfois insaisissable concernant la création d'une catégorie d'établissement public, votre rapporteur s'en tient, à ce stade, à l'avis rendu par le Conseil d'État.

Il souligne également que la mission de coordination des interventions de l'Etat à destination des territoires, confiée par la présente proposition de loi à l'Agence nationale de la cohésion des territoires, est un élément d'originalité importante, que votre commission entend conforter.

Outre un amendement rédactionnel avant l'article 1 er visant à mieux structurer le texte ( COM-35 ), votre commission a souhaité procéder à la codification des dispositions relatives à la création de l'Agence de la cohésion des territoires au sein du livre II de la première partie du code général des collectivités 40 ( * ) dans un objectif de clarté et d'intelligibilité du droit 41 ( * ) et harmoniser la dénomination du statut de l'agence avec celle retenue par le législateur lors de la création de Pôle Emploi (amendement COM-20 ).

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 2 (article L. 1231-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Définition du cadre d'intervention et des missions de l'agence

Objet : cet article a pour objet de définir les missions de l'Agence nationale de la cohésion des territoires.

I. Le droit en vigueur

Les missions des établissements publics de l'État : cadre général et questions de gouvernance

Il résulte d'une jurisprudence constante qu'un établissement public ne peut exercer des activités étrangères à sa mission comme l'a précisé le Conseil d'État dans sa décision Société consortium française de localisation , « sauf si ces activités constituent le complément normal de sa mission et sont directement utiles pour l'amélioration des conditions d'exercice de celle-ci » 42 ( * ) . Le principe de spécialité , qui régit les établissements publics, implique en effet qu'un établissement public n'a pas de compétence général e 43 ( * ) .

Aussi, il importe que les missions d'un établissement public soient définies avec suffisamment de précision d'une part, pour ne pas empiéter sur celles d'un autre établissement et, d'autre part, pour se distinguer des services d'une administration centrale.

Au sujet de l'ANAH, de l'ANRU et de l'Acsé, le Conseil d'État formulait plusieurs observations dans son rapport de 2009 sur les Établissements publics qui méritent d'être rappelées (voir encadré ci-dessous).

L'organisation territoriale des établissements publics :
un équilibre qui reste à trouver

La création de ces établissements publics procède d'une logique d'autonomisation d'une politique publique, qui, en un sens, n'est pas poussée jusqu'au bout, puisque l'action de ces établissements repose largement sur le recours aux moyens des services déconcentrés de l'État . Leur structure est ainsi calquée sur celle des régions et des départements ; leur fonctionnement s'appuie souvent sur l'expertise et les moyens des services déconcentrés de leur ministère de tutelle ; parfois même, pour l'ANPE, l'ANRU ou le CNDS, le préfet est leur délégué territorial. Le Conseil d'État, dans ses formations consultatives, a eu l'occasion de s'interroger sur la pertinence d'une telle organisation.

Des arguments d'ordre pratique peuvent plaider en faveur d'une telle formule . La mise en place de services déconcentrés spécifiques à ces établissements publics conduirait soit à doublonner en partie les fonctions des services déconcentrés de l'État correspondants, soit à les amputer partiellement de leurs moyens techniques et humains, ce qui va à l'encontre des plus élémentaires principes de bonne gestion. C'est également permettre à l'État et à ses représentants au niveau local, d'assurer, malgré la fragmentation croissante des compétences en matière de politique publique, le rôle de coordination et d'animation qui est au coeur de sa mission.

L'on peut néanmoins s'interroger sur la pertinence de ce qui, à force de créations successives et rapprochées, donne le sentiment d'une volonté de dessiner par petites touches un nouveau modèle d'action administrative, dans lequel l'État s'appuie sur de multiples établissements publics nationaux dotés de structures déconcentrées, auxquels il confie des politiques publiques à part entière, sans les leur abandonner complètement . Le fait que le préfet qui est d'abord et avant tout, en vertu des dispositions de l'article 72 de la Constitution, le représentant de chacun des membres du Gouvernement, soit désigné comme délégué territorial de certains établissements publics ne va pas sans risque de contradiction. Il est alors à la fois représentant d'un établissement public et du ministre qui exerce, au niveau central, la tutelle sur cet établissement. L'exercice de ce double rôle est intrinsèquement source d'interférence, et ce risque augmente à mesure que rôles annexes ou supplémentaires se multiplient. Au surplus, la réintroduction du préfet dans le fonctionnement d'établissements publics érigés en personnes publiques autonomes constitue, de façon quelque peu paradoxale, une forme de recentralisation des compétences au niveau local. Enfin l'on peut souligner qu'un tel rôle de représentation est plus difficile encore à exercer pour le compte d'un établissement qui n'est pas administratif mais industriel et commercial, et dont les personnels sont assujettis aux règles du droit privé. Cette circonstance rend également délicate la mise à disposition pure et simple d'agents de l'État au bénéfice des établissements concernés. Le recours aux moyens en personnels des services déconcentrés de l'État peut soulever des difficultés au regard du droit communautaire dans le cas des établissements publics exerçant dans des secteurs marchands concurrentiels.

En tout état de cause, une telle pratique devrait impérativement être mieux encadrée , notamment par la conclusion, entre les établissements publics concernés et les ministères centraux, de conventions qui permettraient de clarifier et d'expliciter de manière plus détaillée le rôle du préfet ainsi que la nature des relations entre les établissements nationaux et les services déconcentrés des ministères. Mais même avec ces aménagements, la généralisation d'une telle organisation ne paraît pas souhaitable.

Source : étude annuelle précitée du Conseil d'État 2009.

L'établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA)

Les missions de l'EPARECA, créé par la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, sont définies au chapitre V du titre II du livre III du code de l'urbanisme.

L' article L. 325-1 du code de l'urbanisme précise le statut et les missions de l'EPARECA : « Il est créé un établissement public national pour l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux.

Cet établissement à caractère industriel et commercial est doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière.

Il a pour objet de favoriser l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et les territoires retenus au titre du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés mentionné à l'article 25 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion.

À cette fin, il assure, après accord des conseils municipaux des communes ou des organes délibérants des établissements publics de coopération communale ou des syndicats mixtes visés à l'article L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales 44 ( * ) concernés, la maîtrise d'ouvrage d'actions et d'opérations tendant à la création, l'extension, la transformation ou la reconversion de surfaces commerciales et artisanales situées dans ces zones. Il peut passer convention avec les communes, établissements publics ou syndicats mixtes concernés.

Si la requalification des quartiers ou des territoires définis au troisième alinéa le nécessite, l'établissement peut intervenir à proximité de ceux-ci. »

L' article 325-2 du même code confère la possibilité à l'EPARECA d'accomplir « tous actes de disposition et d'administration nécessaires à la réalisation de son objet » 45 ( * ) .

L' article L. 325-3 précise que l'EPARECA est administré par un conseil d'administration composé en nombre égal de représentants de l'État, d'une part, d'un membre du Sénat, d'un membre de l'Assemblée nationale, de représentants des collectivités territoriales, des professions commerciales et artisanales et du secteur associatif, de personnalités qualifiées, d'autre part.

L' article L. 325-4 renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de déterminer les modalités d'organisation et de fonctionnement de l'établissement ainsi que la composition de son conseil d'administration.

L'Agence du numérique

L'Agence du numérique, service à compétence nationale créé par le décret n° 2015-113 du 3 février 2015 46 ( * ) est chargée, aux termes de l' article 2 de ce décret, de « l'impulsion, de l'animation et de l'accompagnement des projets et des initiatives numériques mentionnés aux articles 3 à 5 et développés dans les territoires par les collectivités publiques, les réseaux d'entreprises, les associations et les particuliers. »

L' article 3 du décret précité précise que l'agence assure le pilotage et la mise en oeuvre du déploiement du plan « France très haut débit » : elle « accompagne et conseille les collectivités territoriales dans la préparation de leurs projets de déploiement de réseaux à très haut débit [...] veille à l'organisation, au niveau local, d'une concertation entre les opérateurs de communications électroniques et les collectivités territoriales [...] déploie le plan « France très haut débit » et à ce titre : - prépare les conventions entre l'État, les collectivités territoriales et les opérateurs prévues par le plan ;
- procède, en associant les services de l'État concernés, à l'instruction des projets déposés et s'assure du respect du cahier des charges de l'appel à projets ; - contribue à la préparation des conventions de soutien relatives aux aides allouées et en assure le suivi administratif et financier ; - assure le suivi des projets sur les plans technique et financier et instruit les demandes de décaissement transmises par les collectivités territoriales ; - propose les évolutions du plan et de ses modalités de mise en oeuvre
». Elle contribue également à « l'harmonisation des référentiels techniques et des modalités d'accès aux différents réseaux à très haut débit [...] met en place un observatoire du plan « France très haut débit » permettant de suivre son avancement et le déploiement des réseaux à très haut débit [...] assure la promotion du plan et la diffusion des meilleures pratiques auprès des collectivités territoriales [et] peut être consultée en cas de travaux relatifs à l'aménagement numérique du territoire ».

L' article 4 du même décret prévoit également que l'agence « assure le pilotage et la mise en oeuvre des actions du programme « Quartiers numériques », également dénommé « French Tech » , et l'accompagnement des initiatives candidates à l'octroi du label du même nom. [...] A cette fin :
1° Elle assure la coordination et l'animation des différentes actions du programme « Quartiers numériques » ; 2° Elle accompagne les porteurs de projets dans la construction de leurs projets s'inscrivant dans ce programme : projets de métropoles candidates à la labellisation portés par des collectivités territoriales conformément au cahier des charges pour l'octroi du label ; projets de programmes d'accélération de la croissance des entreprises innovantes de création récente et des entreprises numériques ; opérations d'attractivité internationale ; 3° Elle propose et met en oeuvre, au niveau national, des actions au bénéfice des territoires labellisés ; 4° Elle assure l'animation des écosystèmes numériques associés aux labels ; 5° Elle assure la promotion des événements et des acteurs du programme « Quartiers numériques » auprès des autorités publiques, des investisseurs français et internationaux et, plus largement, des acteurs internationaux de l'innovation ; 6° Elle peut être consultée sur les évolutions du cadre réglementaire relatif au financement des entreprises innovantes et à l'encouragement à l'entrepreneuriat.
»

Enfin, l' article 5 du même décret précise que l'agence doit favoriser « la diffusion des outils numériques et le développement de leur usage auprès de la population . À cette fin : 1° Elle propose et coordonne les mesures permettant de généraliser l'accès à internet dans l'ensemble de la société et de définir et développer des outils, des services, des usages et des compétences numériques innovants dans l'ensemble de la société ; 2° Elle assure une veille des meilleures pratiques relatives à l'appropriation des outils numériques sur le territoire, à destination des collectivités territoriales, des associations et des collectifs citoyens ; 3° Elle apporte ses conseils et son expertise aux collectivités territoriales, aux associations, aux collectifs citoyens et aux réseaux d'entreprises pour leurs projets de développement des usages et des services numériques dans les territoires. Elle organise les modalités du recensement de ces projets et des besoins auxquels ils répondent, en lien avec l'ensemble des départements ministériels concernés ; 4° Elle peut être consultée en cas de travaux relatifs à l'appropriation territoriale des outils numériques et à la mise en place des espaces publics numériques. »

II. La proposition de loi initiale et l'avis du Conseil d'État

1) La proposition de loi initiale

Le I prévoit que l'ANCT intervient sur le territoire national à des fins d'aménagement et de cohésion des territoires. Elle doit favoriser le développement de l'action territoriale de l'État, conduire des programmes nationaux territorialisés, accompagner les collectivités territoriales et les « acteurs locaux » dans leurs projets « y compris numériques », fournir une offre d'ingénierie aux porteurs de projets et participer au renforcement territorial de l'accès aux soins.

Le II transfère à l'ANCT les missions assignées à l'EPARECA par l'article L. 325-1 du code de l'urbanisme.

Le III confère à l'ANCT tout ou partie des missions assignées à l'Agence du numérique par le décret précité du 3 février 2015.

2) L'avis du Conseil d'État

Dans son avis sur la proposition de loi, le Conseil d'État relève que la future Agence nationale de la cohésion des territoires « regroupera trois des structures pouvant intervenir au profit des collectivités territoriales, notamment l'Agence du numérique qui joue un rôle essentiel dans la réduction de la « fracture numérique », et restreindra ainsi le nombre de leurs interlocuteurs . »

Jugeant positive l'orientation opérationnelle selon laquelle l'agence s'appuiera sur les représentants de l'État comme interlocuteurs uniques des collectivités territoriales et aura « vocation à unifier les instruments de contractualisation proposés à celles-ci sur le modèle du contrat « coeur de ville » », il souligne cependant « la nécessité de veiller à ce que le pouvoir règlementaire définisse des procédures de décision efficaces permettant au nouvel organisme de répondre aux attentes des collectivités territoriales et d'assurer pleinement sa mission de coordination des actions et projets des autres services et opérateurs de l'État . Il conviendra également qu'il soit doté, tant au plan national que local, des ressources suffisantes » 47 ( * ) .

Le Conseil d'État constate également que, tel que rédigée, la proposition de loi ne reprend pas les dispositions du code de l'urbanisme relatives aux actes que l'EPARECA peut prendre pour l'accomplissement de ses missions alors qu'elles relèvent des règles constitutives de l'établissement.

Il suggère, enfin, de définir plus clairement les missions générales de l'Agence nationale de la cohésion des territoires , afin de mieux les distinguer de celles du Commissariat général à l'égalité des territoires. Il relève, par ailleurs, que « la disposition prévoyant la fixation par convention des objectifs de l'agence dans le domaine du numérique relève du pouvoir réglementaire ».

III. La position de votre commission

Votre commission se félicite que l'accès aux soins soit identifié comme une priorité d'action pour la future agence. Interrogé par votre rapporteur, le CGET précise à cet égard qu'un travail de réflexion est en cours au sein du ministère pour établir les voies et moyens de la coordination des actions de l'agence sur ce volet, avec les agences régionales de santé, qui jouent un rôle de pilotage dans cette politique publique 48 ( * ) .

Votre rapporteur est également sensible à l'approche retenue par le rapport de préfiguration de Serge Morvan qui souhaite que l'ANCT inscrive son action dans une logique ascendante , en partant des projets des collectivités territoriales, plutôt qu'une logique descendante, qui consisterait uniquement à décliner au plan local des politiques publiques conçues par l'administration centrale. Ce faisant, l'agence pourra garantir l'égalité entre les collectivités territoriales et pleinement respecter le principe de leur libre administration.

Au I du présent article, votre commission a adopté un amendement, à l'initiative de votre rapporteur, clarifiant les missions de l'agence, en prévoyant qu'elle prend en compte les particularités, les fragilités et les besoins de chaque territoire et qu'elle soutient notamment les projets locaux en faveur de la transition écologique et de la lutte contre le changement climatique ( COM-30 rect .). Ont également été adoptés plusieurs sous-amendements de précision : le COM-44 de M. Gontard et Mme Assassi visant à préciser que l'agence peut soutenir les projets locaux en faveur du maintien des services publics, le COM-42 de MM. Dantec, Gold et Corbisez précisant que l'agence assure la mise en oeuvre de la politique de l'État en matière d'aménagement durable , ainsi que le COM-41 de M. Pointereau précisant que l'agence intervient également pour la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs.

Au II, elle a adopté un amendement COM-32 de votre rapporteur précisant l'inclusion, dans le périmètre des interventions de l'ANCT relatives à l'aménagement et à la restructuration des espaces commerciaux, de l'ensemble des zones caractérisées par les handicaps géopolitiques, économiques ou sociaux mentionnées à l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 et des zones de revitalisation rurale (article 1465 A du code général des impôts). Elle a également adopté un amendement COM-31 de votre rapporteur conférant à l'ANCT les mêmes prérogatives que celles précédemment dévolues à l'EPARECA.

Au III, votre commission a adopté un amendement rédactionnel et de suppression de certaines dispositions à caractère réglementaire ( COM-28 ).

Enfin, elle a adopté un amendement ( COM-26 rect. ) de votre rapporteur afin de prévoir, au regard des enjeux opérationnels liés au transfert de l'Agence du numérique, de reporter son intégration au 1 er janvier 2021, laissant le soin aux ministres chargé de l'aménagement et de la cohésion des territoires et chargé du numérique de définir les modalités de ce transfert par voie conventionnelle pour garantir une intégration réussie de l'Agence du numérique à l'ANCT.

Au-delà, votre rapporteur partage l'interrogation soulevée par le Conseil d'État dans son avis au sujet de « la capacité de ce nouvel établissement public national d'assurer, mieux que ne le fait aujourd'hui une direction d'administration centrale, la coordination des actions de l'État et de ses différents opérateurs ».

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 3 (Chapitre II du titre III du livre II de la première partie [nouveau] et article L. 1232-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Conseil d'administration

Objet : cet article précise le mode de gouvernance et d'administration de l'Agence nationale de la cohésion des territoires.

I. Le droit en vigueur

Au nombre des règles constitutives d'une catégorie d'établissements publics, figure notamment « la détermination et le rôle de leurs organes de direction et d'administration, les conditions de leur élection ou de leur désignation », ainsi que le précise le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 93-322 DC du 28 juillet 1993 sur les établissements à caractère scientifique, culturel et professionnel.

Comme le soulignait votre rapporteur dans son avis rendu sur la proposition de loi relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale 49 ( * ) , plusieurs modèles de gouvernance sont possibles pour les établissements publics (voir tableau ci-dessous).

Établissement

Forme juridique

Gouvernance

ANRU

Établissement public industriel et commercial (EPIC)

Conseil d'administration 50 ( * ) de 36 membres :

- 18 administrateurs d'État ;

- 4 représentants des collectivités territoriales ;

- 8 représentants d'organismes intervenant dans la politique du logement social ;

- 1 représentant de l'organisation nationale représentative des locataires ;

- 5 personnalités qualifiées en matière de politique de la ville

ANAH

Établissement public administratif (EPA)

Conseil d'administration 51 ( * ) de 24 administrateurs :

- Un collège composé de représentants de l'État et de ses établissements publics ;

- Un collège composé d'élus nationaux et locaux, de représentants de l'Assemblée des départements de France (ADF), de l'Assemblée des communautés de France (ACF) et de l'Association des maires de France (AMF) ;

- Un collège composé de personnalités qualifiées comprenant notamment deux représentants d'Action logement Groupe, un représentant des propriétaires, un représentant des locataires et un représentant des professionnels de l'immobilier.

EPARECA

Établissement public industriel et commercial (EPIC)

Conseil d'administration de 20 membres :

- 10 représentants de l'État

- Un membre du Sénat, un membre de l'Assemblée nationale, 2 représentants des collectivités territoriales, 3 représentants des professions commerciales et artisanales, un représentant du secteur associatif et deux personnalités qualifiées 52 ( * ) .

CEREMA

Établissement public administratif (EPA)

• Conseil d'administration de 21 membres :

- 6 représentants de l'État ;

- 5 représentants des collectivités territoriales ;

- 5 personnalités qualifiées ;

- 5 représentants des salariés.

• Conseil stratégique : émet un avis à destination du Conseil d'administration préalablement à ses délibérations concernant les orientations stratégiques de l'établissement. Il est composé des représentants de l'État et des représentants des collectivités territoriales (à nombre égal) 53 ( * ) .

• Conseil scientifique et technique et comités d'orientation nationaux et territoriaux.

ADEME

Établissement public industriel et commercial (EPIC)

• Conseil d'administration de 26 membres 54 ( * ) :

- Un représentant du Sénat et un représentant de l'Assemblée nationale ;

- 10 représentants de l'État ;

- 3 représentants des collectivités territoriales ;

- 5 personnalités qualifiées ou représentants d'associations de protection de l'environnement agréées ;

- 6 représentants des salariés.

• Commissaire du Gouvernement : secrétaire général du ministère chargé de l'environnement.

• Conseil scientifique (minimum 15 membres).

Source : rapport de préfiguration du préfet Serge Morvan.

Les membres qui siègent au sein des organes de direction sont choisis en fonction de leur compétence et représentent les différentes parties prenantes aux missions assumées par l'établissement. Si la fixation du nombre de leurs membres revêt un caractère réglementaire, la structure des différents collèges peut être fixée par la loi.

En outre, aux termes du II de l'article LO 145 du code électoral, seule une loi peut prévoir que des parlementaires siègeront dans des organismes extérieurs au Parlement.

II. La proposition de loi initiale et l'avis du Conseil d'État

1°) La proposition de loi initiale

Le premier alinéa prévoit que l'agence est administrée par un conseil d'administration, qui règle par ses délibérations les « affaires de l'établissement », cette expression incluant l'ensemble des questions liées à la gestion des personnels, des finances, de la stratégie de l'agence ainsi que ses relations avec d'autres organismes.

Le même alinéa prévoit que le conseil d'administration comprend d'une part, au moins pour la moitié de ses membres, des représentants de l'État et, d'autre part, un député, un sénateur, des représentants des collectivités territoriales (communes, établissements publics de coopération intercommunale, départements, régions) et de la Caisse des Dépôts et consignations ainsi que des salariés et des agents publics de l'agence.

Le deuxième alinéa du présent article prévoit que des représentants de l'ANRU, de l'ANAH, de l'ADEME et du CEREMA siègent au conseil d'administration, avec voix consultative.

Le troisième alinéa fixe le nombre maximum de membres du conseil d'administration à dix-sept.

Le dernier alinéa prévoit que le président du conseil d'administration est élu parmi les membres représentants les collectivités territoriales.

2°) L'avis du Conseil d'État

Dans son avis, le Conseil d'État relève que « si la définition des catégories de personnes qui délibéreront au sein du conseil d'administration de l'agence, représentants de l'État, parlementaires, représentants des collectivités territoriales et représentants des agents et des salariés, et la précision selon laquelle le conseil d'administration élit son président parmi les représentants des collectivités territoriales se rattachent aux règles constitutives de celui-ci, tel n'est pas le cas du nombre de membres qui y siégeront (décision 67-47 L, 12 décembre 1967, syndicat des transports), même exprimé sous forme de plafond. 55 ( * ) »

III. La position de votre commission

Votre commission a souhaité renforcer le poids des élus locaux et nationaux dans la gouvernance de l'agence, compte tenu du fait que la vocation de l'ANCT est avant tout de s'intéresser aux territoires.

Dès lors, votre commission a adopté un amendement COM-21 rect. de rédaction globale de l'article visant à modifier la gouvernance de l'agence, qui prévoit désormais la parité des sièges entre d'une part, des représentants de l'État et de ses établissements publics et, d'autre part, des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, deux députés et deux sénateurs, ainsi que des représentants du personnel. L'élection du président du conseil d'administration parmi les représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements est naturellement maintenue. L'amendement précise également que le conseil d'administration déterminera dans son règlement intérieur les modalités de prévention des conflits d'intérêts. Enfin, il prévoit que l'agence est dirigée par un directeur général nommé par décret.

Votre commission a également adopté un sous-amendement COM-43 de M. Gontard et Mme Assassi visant à instaurer la parité homme-femme au conseil d'administration.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 3 bis (nouveau) (article L. 1232-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Rattachement d'autres opérateurs à l'Agence nationale de la cohésion des territoires

Objet : cet article vise à prévoir la possibilité, pour des établissements publics intervenant sur des périmètres complémentaires ou connexes à celui de l'Agence nationale de la cohésion des territoires, d'être rattachés à celle-ci.

I. Le droit en vigueur

L' article L. 131-1 du code de l'environnement , tel qu'il résulte de l'article 20 de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, dispose qu'un établissement public de l'État régi par ledit code « peut être rattaché à un ou plusieurs établissements publics de l'État, à la demande des deux tiers des membres de son conseil d'administration et après avis du ou des établissements auxquels ce rattachement est demandé, afin de mettre en commun des services et moyens ».

À l'heure actuelle, plusieurs entités et programmes publics interviennent sur des périmètres connexes et/ou complémentaires à destination des collectivités territoriales :

• l' Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), créée en 200 3 intervient dans les 450 quartiers de la politique de la ville au titre du Programme national de renouvellement urbain et dans 250 quartiers spécifiques au titre du Nouveau Programme national de renouvellement urbain ;

• l' Agence nationale de l'habitat (ANAH), créée en 1971 , conduit en particulier des programmes de rénovation et de revitalisation de quartiers fragiles ;

• l' Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux (EPARECA), créé en 1996 , intervient dans une logique de revitalisation et de promotion de projets commerciaux et artisanaux de proximité ;

• le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), créé en 2014 , apporte actuellement une expertise publique pour le développement des territoires ;

• le Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) ne propose que très peu de solutions en ingénierie, sauf éventuellement aux territoires de montagne, dans le cadre des comités de massif, ainsi que le précisait Jean-Benoît Albertini lors de son audition devant la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable le 21 février dernier. Le CGET porte également le Programme Action coeur de ville , annoncé par le ministre de la cohésion des territoires le 27 mars dernier, devrait intervenir dans 222 villes moyennes et mobiliser 5 milliards d'euros ;

• l' Agence du numérique , service à compétence nationale créé par le décret 2015-113 du 3 février 2015 et rattachée au ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, est chargée de « l'impulsion, de l'animation et de l'accompagnement des projets et des initiatives numériques » ;

• enfin, la Banque des territoires , lancée le 30 mai dernier par la Caisse des dépôts et consignations, vise à s'inscrire en complémentarité des acteurs existants.

Si le rapport de préfiguration de Serge Morvan pouvait laisser présager une ambition forte de l'État en matière de rationalisation des interventions de ses services et de ses établissements publics à destination des territoires 56 ( * ) , dans une logique de « guichet unique » ainsi que l'avait annoncé le Président de la République lors de la Conférence nationale des territoires, la présente proposition de loi retient un scénario a minima en intégrant l'EPARECA et l'Agence du numérique à la future Agence nationale de la cohésion des territoires.

II. La position de votre commission

Le présent article inséré par votre commission à l'initiative de son rapporteur (amendement COM-22 ), prévoit la possibilité pour un établissement public de l'État disposant d'une compétence connexe ou complémentaire à celle de l'agence d'y être rattaché à la demande des deux tiers des membres de son conseil d'administration et après avis de l'agence, afin de mettre en commun des services et moyens.

Si votre rapporteur a été sensible à l'argument consistant à considérer que la fusion d'établissements de cette envergure (96 ETP à l'ANRU, 115 ETP à l'ANAH, 2 796 ETP au CEREMA et 894 ETP à l'ADEME) constituerait une opération très complexe, il juge néanmoins que la réussite de l'agence tiendra à une association étroite de l'ensemble de ces opérateurs à l'action de l'ANCT . Cette évolution serait de nature à réduire les coûts de structure, favoriser la diffusion de cultures professionnelles différentes au sein de l'administration et à mieux coordonner les actions de l'État dans les territoires, au bénéfice de ceux-ci.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 4 (supprimé) Organisation nationale de l'agence

Objet : cet article, supprimé par votre commission, visait à préciser d'une part le mode de nomination du directeur général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et, d'autre part, la composition du « comité d'action territoriale », réuni par le directeur général pour assurer la coordination des actions de l'agence avec d'autres établissements publics intervenant sur des périmètres connexes et complémentaires.

I. Le droit en vigueur

Nomination aux emplois de direction des établissements publics

L'article 1 er de l'ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l'État, pris pour l'application de l'article 13 de la Constitution, prévoit qu'il est pourvu en conseil des ministres « aux emplois de direction dans les établissements publics, les entreprises publiques et les sociétés nationales quand leur importance justifie inscription sur une liste dressée par décret en conseil des ministres ».

En outre, dans sa décision n° 95-177 L du 8 juin 1995 , le Conseil constitutionnel a considéré que les mots « en conseil des ministres » attachés à différentes dispositions codifiées ou non 57 ( * ) étaient de nature réglementaire.

Par ailleurs, il est rare de trouver dans la loi la précision selon laquelle un établissement public de l'État est dirigé par un directeur général nommé par décret . L'Agence nationale pour la cohésion et l'égalité des chances, qui a été intégrée au sein du Commissariat général à l'égalité des territoires, était par exemple dirigée par un directeur général nommé par l'État (ancien article L. 121-15 du code de l'action sociale), tout comme le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) 58 ( * ) .

La précision relative à la direction d'une agence ou d'un établissement public relève du pouvoir réglementaire, sauf à mettre en place un système de gouvernance spécifique qui justifie l'intervention du législateur. Aussi, la direction générale de l'Agence nationale de la rénovation urbaine a été précisée par décret 59 ( * ) .

Coordination des actions de plusieurs établissements publics

À l'heure actuelle, la coordination des actions de plusieurs établissements publics s'effectue soit au niveau ministériel central , soit par le recours au droit souple , en particulier la formalisation de conventions fixant les objectifs et moyens partagés que plusieurs établissements mettent en oeuvre au service d'une politique ou d'un projet.

Dans son étude de 2009 consacrée aux Établissements publics 60 ( * ) , le Conseil d'État relevait que la formule de l'établissement public est parfois sollicitée pour « associer plus directement d'autres personnes à l'exercice de certaines missions : participation des usagers ou du personnel à la gestion du service public, coopération entre l'État et les collectivités territoriales. Cette logique participative fonctionne aussi à un deuxième degré, un établissement public pouvant, plus facilement que l'État, diversifier ses moyens d'action en concluant des partenariats avec d'autres personnes morales dont l'activité est proche de la sienne , ou même « au carré », certains établissements publics pouvant participer, avec d'autres personnes morales, à la création et au fonctionnement d'un autre établissement ».

En outre, les conseils d'administration des établissements publics de l'État sont parfois composés de représentants d'autres établissements publics, ce qui garantit l'association de ceux-ci au suivi de la politique de l'établissement. C'est notamment le cas pour l'Agence nationale de l'habitat (article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation).

II. La proposition de loi initiale

Dans sa version initiale, le présent article précisait l'organisation, à l'échelle nationale, de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). Son premier alinéa dispose que l'agence est dirigée par un directeur général nommé par décret en conseil des ministres.

Le deuxième alinéa précise la composition du « comité d'action territoriale » réuni par le directeur général de l'agence pour assurer « le suivi et l'exécution » des conventions pluriannuelles prévues à l'article 7 du texte. Celui-ci est composé des directeurs généraux de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA).

III. La position de votre commission

En lien avec les modifications opérées à l'article 3, relatif au mode de gouvernance de l'agence, et à l'article 7, relatif aux conventions pluriannuelles conclues par l'ANCT avec l'État et les établissements publics régulièrement mentionnés dans la présente proposition de loi (ANAH, ANRU, CEREMA, ADEME) et compte tenu du caractère réglementaire de certaines dispositions qu'il contient 61 ( * ) , votre commission a adopté l'amendement COM-27 de suppression proposé par votre rapporteur.

Compte tenu de l'importance de la future ANCT, votre rapporteur considère toutefois que la nomination du directeur général de l'agence doit faire l'objet d'un décret en conseil des ministres, pris après avis public des commissions compétentes de chaque assemblée, comme le prévoit la proposition de loi organique dont l'examen est joint à celui de la présente proposition de loi.

Votre commission a supprimé cet article.

Article 5 (article L. 1232-3 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Organisation territoriale de l'agence

Objet : cet article a pour objet de prévoir les modalités d'organisation de l'action de l'Agence nationale de la cohésion des territoires dans les circonscriptions administratives de l'État et de créer un comité local de la cohésion des territoires.

I. Le droit en vigueur

Le représentant de l'État agissant comme délégué territorial d'un établissement public

Il résulte de la jurisprudence du Conseil d'État que seule la loi peut prévoir que les représentants de l'État sont les délégués territoriaux d'un établissement public . La décision Fédération chimie énergie et autres du 20 février 2013 62 ( * ) , relative à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie classe, en effet, cette précision parmi les règles constitutives d'une catégorie d'établissement public .

Comme le rappelle le Conseil d'État dans son étude annuelle de 2012 Les agences, une nouvelle gestion publique , plusieurs configurations peuvent être retenues en matière d'articulation entre les agences et les services déconcentrés de l'État. Relevant que l'organisation territoriale des agences est variée et souvent complexe, le Conseil d'État distingue quatre types d'organisation : « les agences purement nationales dépourvues de relais locaux, les agences dont les relais locaux se confondent avec les services déconcentrés de l'État, les agences dotées de guichets ou de délégations territoriales et enfin les agences purement territoriales » 63 ( * ) .

Aussi, plusieurs agences s'appuient sur les préfets (de département ou de région) pour décliner leurs actions sur le territoire national : c'est notamment le cas de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine 64 ( * ) (ANRU), de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) 65 ( * ) ou encore de FranceAgriMer 66 ( * ) .

Le Conseil d'État rappelait, au sujet de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Acsé), ancêtre du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), les complexités qui prévalent en la matière : « Reprenant les missions du Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations (FaSILD), l'Acsé a initialement hérité de ses directions régionales et disposait donc de services territoriaux propres. Cependant, la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances qui a créé l'Acsé avait également prévu que le préfet de département serait le délégué local de l'agence.

L'Acsé disposait donc de deux réseaux territoriaux, l'un qui lui était propre et l'autre placé sous l'autorité des préfets. La situation a par la suite été unifiée dans le cadre de la réforme de l'administration territoriale de l'État (RéaTE) : en vertu d'un décret du 5 novembre 2009, les directions régionales de l'acsé ont été intégrées aux nouvelles directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS) de l'État. L'Acsé se range donc désormais pleinement dans la catégorie des agences dont les relais territoriaux sont les services de l'État, comme l'ANRU, l'ANAH et FranceAgriMer.

Son organisation territoriale demeure cependant complexe. Elle s'appuie à la fois sur les DRJSCS au niveau régional et sur les directions départementales de la cohésion sociale ou de la protection des populations et de la cohésion sociale au niveau départemental 67 ( * ) . Le directeur général de l'Acsé désigne dans chaque région et dans chaque département un délégué territorial adjoint, sur proposition du préfet concerné. Dans les faits, au niveau régional, il s'agit du directeur de la DRJSCS ou de l'un de ses adjoints ; au niveau départemental, il peut aussi bien s'agir du préfet délégué à l'égalité des chances, du sous-préfet à la ville, du directeur départemental de la cohésion sociale, du secrétaire général de la préfecture, d'un sous-préfet d'arrondissement voire du directeur de cabinet du préfet. Les équipes territoriales chargées de l'Acsé ont donc connu une histoire différente selon le niveau territorial : au niveau régional, elles ont été intégrées dans les services déconcentrés de l'État tandis qu'au niveau départemental elles passaient d'un service déconcentré à l'autre, selon des schémas d'organisation très variables d'un territoire à l'autre. On peut y voir une illustration du questionnement permanent qui entoure l'articulation entre agences et État déconcentré. »

Dès lors, soit l'agence dispose de services territoriaux et le préfet doit alors être en mesure de coordonner leurs interventions avec celles de ses services déconcentrés et d'autres établissements publics, soit elle ne dispose pas de services territoriaux propres et doit s'appuyer sur les services déconcentrés de l'État.

Le rôle de coordination du préfet a par ailleurs été progressivement renforcé : ainsi le décret n° 2010-146 du 16 février 2010 modifiant le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'État dans les régions et départements a prévu que le préfet puisse réunir les représentants d'établissements publics au sein du comité de l'action régionale (CAR).

Le décret n° 2012-509 du 18 avril 2012 pris en application de l'article 59-1 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 modifié relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action de l'État dans les régions et départements a ensuite complété le décret du 29 avril 2004 susmentionné pour prévoir que « le préfet coordonne les actions de l'établissement avec celles conduites par les administrations et les autres établissements publics de l'État » 68 ( * ) . La mention de la nécessité, pour le préfet, de passer une convention avec l'établissement public dont il assure la représentation locale pour préciser les conditions dans lesquelles il met une partie de ses services à disposition de l'établissement a été supprimée mais demeure, aux yeux de votre rapporteur, une condition nécessaire pour parvenir à une gouvernance locale efficace des établissements publics s'appuyant sur les préfets.

Au-delà, si le Conseil d'État estime, dans son avis sur la proposition de loi, qu'il « appartient au pouvoir réglementaire de préciser à quel niveau d'organisation administrative se situent ces délégués territoriaux », le législateur peut estimer nécessaire de viser le niveau administratif qui lui paraît le mieux à même de conduire la politique publique en cause.

Le rapport du préfigurateur Serge Morvan fait du département l'échelon de mise en oeuvre des projets 69 ( * ) : « l'appui en ingénierie pour élaborer les contrats sera organisé au niveau départemental qui pourra faire appel aux ressources régionales ». L'échelon départemental est également conçu comme la porte d'entrée, le guichet unique des projets des collectivités territoriales.

Les conditions de délégation de signature

S'agissant des délégations de signature, l'avis n° 365886 du 5 juillet 2013 rendu par le Conseil d'État (section du contentieux, 2 e et 7 e sous-sections réunies), précise que « le préfet de département peut, pour l'exercice des compétences qui lui sont conférées par les lois et les règlements, donner délégation de signature aux chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'État sur lesquels il a autorité, pour les matières qui relèvent des attributions de ces services et pour ce qui concerne l'activité de ces services qui s'exerce dans les limites du département. Les attributions des services déconcentrés sont fixées par les textes qui organisent ces services et définissent leurs missions, sans qu'ait d'incidence à cet égard la répartition des attributions, au niveau central, entre les membres du Gouvernement ».

Sur ce point, le rapport du préfigurateur Morvan avance l'idée que « le préfet de département, délégué territorial de l'Agence, désignera un coordonnateur pour chacune des démarches d'élaboration de contrat. Il pourra s'agir d'un sous-préfet, d'un DDT-M (en charge du Nouveau conseil aux territoires) ou suivant les cas, d'un représentant de l'un des opérateurs intervenant sur le territoire » 70 ( * ) .

La recherche de modes de gestion plus souples , fondés sur l'autonomie des agents des services déconcentrés responsables de certains volets des missions de l'Agence nationale de la cohésion des territoires, paraît justifier l'intervention de la loi.

II. La proposition de loi initiale

Le premier alinéa du présent article précise que le représentant de l'État dans le département est le délégué territorial de l'agence.

Le second alinéa précise que les préfets peuvent subdéléguer leurs compétences ou leurs signatures dans des conditions définies par décret.

III. La position de votre commission

Votre rapporteur est favorable à cette organisation territoriale , qui fait du préfet de département un « guichet unique » pour les demandes des collectivités territoriales visant à bénéficier de l'appui de l'ingénierie de l'ANCT.

L'échelon départemental a prouvé son efficacité par le passé et constitue le bon maillage pour assurer la proximité des interventions de l'État à l'égard du public.

Votre rapporteur souligne que la proposition de loi se distingue du rapport de préfiguration de S. Morvan sur ce point , qui conçoit le préfet de région comme un niveau de régulation et de mobilisation des équipes d'appui : « Le préfet de région, délégué régional de l'Agence, animera un comité régional rassemblant les partenaires de niveau régional de l'Agence : la direction régionale de la Caisse des dépôts, les délégués régionaux des opérateurs, s'il en est d'accord, le Conseil régional et tout autre acteur régional concerné. Ce comité examinera les demandes d'intervention émanant du niveau départemental, régulera leur exécution en fonction des moyens disponibles et mobilisera les ressources nécessaires pour accompagner les projets. Si les ressources existantes au sein de la région, notamment les agents de la task force placée auprès du SGAR, ne permettent pas de couvrir l'ensemble des besoins, le préfet de région pourra saisir le niveau national pour bénéficier d'un appui de la task force nationale ou d'un prestataire privé mobilisé dans le cadre du marché à bons de commande passé au niveau national 71 ( * ) . »

Votre rapporteur relève que l'insertion d'une précision selon laquelle le préfet de région est également le délégué territorial de l'agence lui paraît inutile pour fonder le rôle dévolu à ce dernier par le rapport de préfiguration de Serge Morvan.

L'article 2 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 précité, en confiant au préfet le rôle de garantir la cohérence de l'action de l'État dans la région et en lui donnant « autorité sur les préfets de département » sauf dans certaines matières purement régaliennes (ordre public, contrôle administratif des actes des collectivités territoriales, contrôle de l'entrée et du séjour des étrangers), permet en effet d'ores et déjà aux préfets de région de remplir le rôle que souhaiterait leur assigner le rapport de préfiguration de S. Morvan.

La commission a adopté, outre un amendement rédactionnel ( COM-23 ), un amendement ( COM-40 ) de votre rapporteur précisant la nécessité pour le préfet d'assurer la cohérence des actions de l'agence d'une part, avec les soutiens apportés aux projets locaux par l'agence départementale mentionnée à l'article L. 5511-1 du code général des collectivités territoriales et, d'autre part, avec les décisions (notamment relatives aux conventions territoriales d'exercice concerté d'une compétence) prises au sein de la conférence territoriale de l'action publique, mentionnée à l'article L. 1111-9 du même code.

Ce même amendement prévoit également la création d'un comité de la cohésion territoriale dans chaque département, qui réunit les représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements ainsi que les autres acteurs locaux publics ou privés intéressés pour assurer le suivi de l'exécution des projets soutenus par l'agence. Ce comité sera présidé conjointement par le représentant de l'État dans le département et un élu désigné à chaque séance.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 6 (Chapitre III du titre III du livre II de la première partie [nouveau] et article L. 1233-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Ressources de l'agence

Objet : cet article prévoit les catégories de ressources dont bénéficie l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT).

I. Le droit en vigueur

Les recettes « classiques » des établissements publics de l'État

Ainsi que le note le Conseil constitutionnel dans sa décision DC n° 93-322 du 28 juillet 1993 sur les établissements à caractère scientifique, culturel et professionnel, le législateur est seul compétent pour définir les règles constitutives d'une nouvelle catégorie d'établissements publics , en l'occurrence « les catégories de ressources dont peuvent bénéficier ces établissements ».

Votre rapporteur avait déjà eu l'occasion, lors de l'examen de la proposition de loi n° 466 relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale, de rappeler que les catégories de ressources prévues pour les établissements publics sont généralement similaires .

Ainsi, l'article 12 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine prévoit que  ces recettes sont constituées par : les subventions de l'État ; les contributions de la société mentionnée à l'article L. 313-19 du code de la construction et de l'habitation ; les subventions de la Caisse des dépôts et consignations ; le produit des emprunts qu'elle est autorisée à contracter, dans la limite d'un plafond fixé par décret ; la rémunération des prestations de service de l'agence, les produits financiers, les produits de la gestion des biens entrés dans son patrimoine et le produit de la vente des biens et droits mobiliers et immobiliers ; les dons et legs ; exceptionnellement, en 2011,2012 et 2013, une fraction, fixée conformément au plafond prévu au I de l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, du produit de la taxe locale sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage, affecté à l'établissement public « Société du Grand Paris », créé par l'article 7 de la loi n° 2010-597 du 3 juin  010 relative au Grand Paris, en application du C du I de l'article 31 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 ; les dividendes et autres produits des participations qu'elle détient dans ses filiales ou dans les sociétés dans lesquelles elle détient une participation ; les concours financiers de la Caisse de garantie du logement locatif social ; les contributions issues du fonds mentionné au premier alinéa de l'article L. 452-1-1 du code de la construction et de l'habitation.

Si l'on peut douter que l'Agence nationale pour la rénovation urbaine soit, dans les faits, alimentée par chacune de ces catégories de recettes, dont l'énumération témoigne davantage d'une volonté d'exhaustivité du législateur que d'un besoin en adéquation avec la réalité de ses missions, l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux bénéficie quant à lieu de recettes directement liées à l'exercice de sa mission industrielle et commerciale.

Font ainsi partie des ressources de l'établissement : les dotations financières prévues au quatrième alinéa de l'article L. 325-1 du code de l'urbanisme ; les contributions qui lui sont apportées par les collectivités locales, établissements publics et sociétés nationales ainsi que toutes autres personnes morales publiques ou privées intéressées et qui peuvent comprendre des ressources affectées ; le produit des emprunts qu'il est autorisé à contracter, dans la limite d'un plafond de 20 millions d'euros ; la rémunération de ses prestations de services ; le produit de la gestion des biens entrés dans son patrimoine ; le produit de la vente des biens et droits mobiliers et immobiliers ; les dons et legs.

La notion d'opérateur

La définition d'un opérateur repose traditionnellement sur trois critères cumulatifs : l'exercice d'une activité de service public se rattachant à la mise en oeuvre d'une politique publique par un organisme distinct de l'État (doté d'un statut juridique public ou privé), un financement assuré majoritairement par l'État (ce qui n'exclut pas la conduite, par l'opérateur, d'activités marchandes) 72 ( * ) et un contrôle direct de l'État , consistant à disposer d'une capacité à orienter les décisions de l'établissement.

La loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances prévoit, au 5° de son article 51 , que sont joints au projet de loi de finances de l'année : « Des annexes explicatives développant conformément aux dispositions de l'article 5, pour l'année en cours et l'année considérée, par programme ou par dotation, le montant des crédits présentés par titre et présentant, dans les mêmes conditions, une estimation des crédits susceptibles d'être ouverts par voie de fonds de concours. Ces annexes sont accompagnées du projet annuel de performances de chaque programme précisant :

a) La présentation des actions, des coûts associés, des objectifs poursuivis, des résultats obtenus et attendus pour les années à venir mesurés au moyen d'indicateurs précis dont le choix est justifié ;

b) L'évaluation des dépenses fiscales ;

c) La justification de l'évolution des crédits par rapport aux dépenses effectives de l'année antérieure, aux crédits ouverts par la loi de finances de l'année en cours et à ces mêmes crédits éventuellement majorés des crédits reportés de l'année précédente, en indiquant leurs perspectives d'évolution ultérieure ;

d) L'échéancier des crédits de paiement associés aux autorisations d'engagement ;

e) Par catégorie, présentée par corps ou par métier, ou par type de contrat, la répartition prévisionnelle des emplois rémunérés par l'État et la justification des variations par rapport à la situation existante ;

f) Une présentation indicative des emplois rémunérés par les organismes bénéficiaires d'une subvention pour charges de service public prévue au II de l'article 5 et la justification des variations par rapport à la situation existante ».

Parmi les 486 opérateurs recensés par le projet de loi finances pour 2018, figurent notamment l'Agence nationale de l'habitat, qui bénéficie de crédits du programme 135 « Urbanismes, territoires et amélioration de l'habitat », l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, qui bénéficie de crédits du programme 147 « Politique de la ville géré par le Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) », l'Agence de l'environnement de la maîtrise de l'énergie, bénéficiant de crédits du programme 181 « Prévention des risques » ou encore le CEREMA, bénéficiant de crédits du programme 159 « Expertise, information géographique et météorologique ».

Les opérateurs reçoivent donc une subvention pour charges de service public, sont soumis à un plafond d'autorisation d'emplois voté chaque année par le Parlement, et leur activité donne lieu à la mise en place d'un pilotage et d'une gouvernance spécifiques. La circulaire du Premier ministre du 26 mars 2010 relative au pilotage stratégique des opérateurs de l'État prévoit ainsi que les ministères évaluent les résultats de leurs opérateurs et leur fixent des objectifs de politique publique. Ce cadre a été consolidé par la circulaire du Premier ministre du 23 juin 2015 relative au pilotage des opérateurs et des autres organismes publics contrôlés par l'État, qui recommande un renforcement des instruments de tutelle pour associer les opérateurs à la maîtrise des dépenses publiques.

Votre rapporteur rappelle ainsi qu'en 2018, les financements publics d'État à destination des opérateurs dépassent 51 milliards d'euros et que les opérateurs rémunèrent 404 472 équivalent temps plein (ETP) 73 ( * ) .

L'Agence nationale de la cohésion des territoires aura vocation à rejoindre les autres opérateurs de l'État dont le Parlement votera les crédits et les plafonds d'emplois.

II. La proposition de loi initiale

Le présent article prévoit que l'Agence nationale de la cohésion des territoires pourra bénéficier des ressources suivantes : des subventions de l'État et, le cas échéant, d'autres personnes publiques ou privées ; des financements participatifs ; des crédits apportés par les entreprises aux fondations territoriales au titre de leur engagement en faveur de leur responsabilité territoriale ; le produit des contrats et des conventions ; les revenus des biens meubles et immeubles ; les dons et legs ; le produit des aliénations ; d'une manière générale, de toutes les recettes autorisées par les lois et règlements.

III. La position de votre commission

Tenant compte des observations formulées par le Conseil d'État, la commission a adopté un amendement de votre rapporteur qui simplifie l'énumération des catégories de recettes dont bénéficiera l'ANCT et permet de garantir que l'agence pourra bénéficier de l'ensemble des recettes dont bénéficie actuellement l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) pour le bon exercice de ses missions ( COM-24 ).

Votre rapporteur précise à cet égard que cette rédaction couvre les dividendes et autres produits des participations détenues par l'agence dans ses filiales ou les sociétés dans lesquelles elle détient une participation, les financements participatifs et les crédits apportés par les entreprises aux fondations territoriales au titre de leur engagement en faveur de leur responsabilité territoriale.

Votre rapporteur attire également l'attention sur la nécessité, pour le pouvoir réglementaire, de prévoir une comptabilité adaptée aux missions de la future ANCT et permettant de prendre en compte à la fois son caractère administratif et son caractère d'établissement public industriel et commercial. La définition de ce régime comptable devrait s'inscrire, pour la partie des missions de l'agence ayant un caractère administratif, dans le cadre du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (décret « GBCP ») .

En outre, dans le cas où des ressources seraient affectées à l'agence en loi de finances, il conviendrait de veiller à ce qu'elles soient, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées , ainsi que l'exige la jurisprudence du Conseil constitutionnel (CC, n° 2005-530 DC, 29 décembre 2005, Loi de finances pour 2006).

Au-delà, votre rapporteur s'inquiète de la capacité du ministère de la cohésion des territoires à porter l'Agence nationale de la cohésion des territoires en l'état actuel de la nomenclature budgétaire.

Dans son avis sur le projet de loi de finances pour 2018 74 ( * ) , il relevait à cet égard que l'érosion des crédits du programme 112 piloté par le CGET depuis plusieurs années est peu compatible avec le projet d'une Agence nationale de la cohésion des territoires. Le transfert, réalisé en 2018, des contrats de ruralité au programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » paraît, dans ce contexte, encore plus inopportun au regard de l'importance du projet de l'ANCT pour les territoires ruraux.

À périmètre budgétaire constant, c'est-à-dire après intégration pure et simple des programmes 112 et 147, le risque existe de voir la vocation urbaine de l'agence l'emporter sur sa vocation rurale et périurbaine compte tenu de l'importance relative du programme 147 par rapport au programme 112.

Enfin, il serait opportun, aux yeux de votre rapporteur, que l'ANCT puisse être désignée pour gérer des crédits du Programme des Investissements d'Avenir, compte tenu de ses missions.

Votre rapporteur attire donc l'attention de votre commission sur la nécessité, pour le Gouvernement, de tirer les conséquences de la création de l'agence dès la loi de finances pour 2019, pour donner une véritable portée à la présente proposition de loi.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 6 bis (nouveau) (article L. 1233-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Création de filiales et participation au capital d'organismes publics ou privés

Objet : cet article vise à prévoir la possibilité, pour l'Agence nationale de la cohésion des territoires, de créer des filiales et d'intervenir au capital d'organismes actifs dans le champ de ses missions, déterminées à l'article 2 de la présente proposition de loi.

I. Le droit en vigueur

Ainsi que le soulignait votre rapporteur lors de l'examen de la proposition de loi n° 466 (2017-2018) de nos collègues Philippe Bas, Bruno Retailleau et Mathieu Darnaud, certains établissements publics créent des filiales et prennent des participations au capital de sociétés, de groupements ou d'organismes qui opèrent dans le champ de leurs missions.

C'est notamment le cas de l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, pour les besoins de ses activités, ou de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine 75 ( * ) .

II. La position de votre commission

Introduit par votre commission à l'initiative de son rapporteur (amendement COM-25 ), l'article 6 bis propose d'introduire dans la présente proposition de loi la possibilité pour l'ANCT de créer ou céder des filiales, d'acquérir, d'étendre ou de céder des participations dans des sociétés, groupements ou organismes actifs dans ses domaines de compétence : soutien aux collectivités territoriales, offre d'ingénierie et développement de la politique de l'État en matière d'aménagement et de cohésion.

Votre rapporteur considère que cette disposition doit permettre à la future ANCT de répondre au mieux aux besoins des territoires ruraux et périurbains, notamment lorsqu'elle opérera en remplacement de l'EPARECA, dont c'est un des modes d'action courants.

L'association de l'ANCT au capital de sociétés locales, par exemple, est de nature à accélérer la mise en oeuvre des programmes locaux de développement économique et social durable.

Votre rapporteur souligne, à la suite des observations formulées par la Cour des comptes en juin 2014 dans son rapport consacré à l'ANR U 76 ( * ) , que ces décisions de création d'entités et de prise de participation doivent néanmoins faire l'objet d'une évaluation préalable approfondie , pour évaluer les risques auxquels elles exposent l'agence et la valeur ajoutée qu'elles apportent par rapport à l'action d'autres opérateurs.

Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 7 (article L. 1233-3 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Conventions pluriannuelles conclues entre l'ANCT, l'État et les établissements publics intervenant sur des périmètres connexes et complémentaires (ANRU, ANAH, ADEME, CEREMA)

Objet : cet article vise à prévoir que des conventions pluriannuelles sont conclues entre l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), l'État et les établissements publics mentionnés à l'article 4 de la présente proposition de loi (ANRU, ANAH, ADEME, CEREMA) dans les trois mois à compter de sa promulgation, pour définir les objectifs et les moyens et modalités de financement des actions menées par l'ANCT.

I. Le droit en vigueur

La convention, mode d'action publique

Différents contrats sont conclus entre l'État et les collectivités territoriales en matière d'aménagement du territoire (voir encadré ci-après). Le Commissariat général à l'égalité des territoires relève à cet égard qu'il existe actuellement environ 1 235 outils de contractualisation entre l'État et les collectivités pour la mise en oeuvre d'une politique publique (contrats de pays, de ruralité, de revitalisation etc.). Au sujet de ce type de contrat, le Conseil constitutionnel a jugé qu'« aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle ne s'oppose à ce que l'État passe des conventions avec les diverses collectivités territoriales de la République, telles que les communes, les départements, les régions et les territoires d'Outre-Mer » 77 ( * ) .

Selon le commentaire de Louis Favoreu , cité dans le rapport public de 2008 du Conseil d'État Le contrat, mode d'action publique et de production de normes , « cette absolution constitutionnelle peut-être bien évidemment transposée à toute convention entre personnes publiques ».

Le contrat en matière d'aménagement du territoire

Ancêtres des contrats actuels conclus entre personnes publiques, des chartes d'autonomie sont, dès l'Ancien Régime, négociées avant d'être octroyées à certaines villes . La planification et les préoccupations liées à l'aménagement du territoire ont débouché, dans la seconde partie du XXe siècle, sur « une politique contractuelle de l'État dans ses rapports avec les institutions décentralisées » 78 ( * ) . Outre la planification quasi-contractuelle 79 ( * ) (IVe Plan couvrant les années 1962-1965) puis contractuelle (Ve Plan couvrant les années 1966-1970) et les contrats de plan État-région (CPER ), ont vu le jour à cette époque les contrats de plan entre l'État et les communautés d'agglomération puis urbaines 80 ( * ) , les contrats d'aménagement des villes moyennes 81 ( * ) ou encore les contrats de pays 82 ( * ) . Le succès de ces différentes formules a été limité à l'époque : en dix ans n'ont été signés que 70 conventions d'aménagement et 200 contrats de pays.

La loi du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification 83 ( * ) a tenté d'harmoniser ces diverses formes de contrats et a relancé le processus de contractualisation. Aux termes de son article 11 « l'État peut conclure avec les collectivités territoriales, les régions et les entreprises publiques ou privées et éventuellement avec d'autres personnes morales, des contrats de plan comportant des engagements réciproques des parties en vue de l'exécution du plan et de ses programmes prioritaires (...). Le contrat de plan conclu entre l'État et la région définit les actions que l'État et la région s'engagent à mener conjointement par voie contractuelle pendant la durée du plan ».

[...] La loi du 29juillet 1982 portant réforme de la planification faisait coexister trois documents distincts : le plan de la nation, le plan de la région qui « détermine les objectifs à moyen terme du développement, social et culturel de la région pour la période d'application du plan de la nation » et le CPER, dont la vocation était d'assurer la compatibilité des plans des régions entre eux ainsi qu'avec le plan de la nation. Le plan de la région devait précéder le CPER en indiquant l'objet et la portée de ce dernier. Comme les financements permettant sa réalisation figuraient dans le CPER négocié par la suite et déterminaient les marges de manoeuvre de la région, le plan de la région a été rapidement absorbé par le CPER lui-même, au point d'être finalement supprimé en 1994. Par ailleurs, les CPER de la deuxième génération ayant été signés en 1989, avant le vote du plan de la nation (IXe Plan), et ceux de la troisième génération l'ayant été en 1994, en l'absence de toute planification nationale, ils sont finalement devenus un document unique et autonome de planification. Puis, en 1996, la durée d'exécution des CPER a été prolongée d'une année par l'État, compte tenu des retards d'engagements alors constatés et du souhait de coordonner désormais le calendrier de ces contrats avec celui des fonds structurels européens 84 ( * ) . Enfin, sur décision du Gouvernement prise lors du comité interministériel d'aménagement du territoire du 6 mars 2006, les contrats de plan État-région ont été remplacés par les contrats de projet.

Ces derniers couvrent un champ plus restreint qu'autrefois et sont recentrés sur trois axes correspondant à la stratégie européenne de Lisbonne : compétitivité et attractivité du territoire, promotion du développement durable et cohésion sociale. Ils sont focalisés sur les grands projets d'infrastructure mais confèrent davantage de liberté en prévoyant la possibilité d'introduire un volet spécifique à certains territoires.

Source : Conseil d'État, rapport public 2008, Le contrat, mode d'action publique et de production de normes, pages 330-332.

Le recours à l'instrument contractuel (ou conventionnel) vise à améliorer la coordination des actions des établissements publics de l'État entre eux et à l'égard des collectivités territoriales. Il constitue un mode d'action souple, permettant le partage d'objectifs et l'évaluation de résultats sur des projets communs . Le Conseil d'État recommandait même, dans le rapport public précité, que ces conventions puissent devenir « un outil de gestion interne de l'administration au même titre que la circulaire dans l'ordre unilatéral » 85 ( * ) .

Si la décision Jamart de 1936 86 ( * ) a longtemps été interprétée comme limitant le pouvoir d'organisation d'un chef de service à l'édiction d'arrêtés, de circulaires ou de notes de service, une autre interprétation pourrait aujourd'hui prévaloir, faisant de mesures d'organisation négociées ou conventionnelles un mode d'organisation du service.

La circulaire dite Rocard de 1989 87 ( * ) et la circulaire dite Juppé de 1995 88 ( * ) , prises pour la réforme des modes d'organisation et d'actions des services publics, visaient déjà à la généralisation de ce mode de gestion, davantage orienté vers la performance.

Une volonté de coordination entre les actions des établissements publics de l'État intervenant en soutien des collectivités territoriales

Interrogés par votre rapporteur, les différents organismes parties prenantes de la présente proposition de loi (ANRU, ANAH, ADEME, CEREMA) lui ont faire part de l'existence de telles conventions conclues entre ces établissements pour coordonner leurs interventions à l'égard des collectivités territoriales.

Dans son rapport de préfiguration, le préfet Morvan allait plus loin, en évoquant l'idée d'un droit de tirage de l'ANCT sur les fonds alloués à d'autres opérateurs (points 3.2 et 3.3 du rapport) : « S'ils ne sont pas fusionnés avec l'Agence, ils [ADEME, CEREMA, Atout France, Business France, AFD] devront impérativement lui être liés via une convention prescriptive déterminant leur contribution aux activités de l'Agence. Pour rendre effective cette contribution, l'Agence se verra transférer une partie de leur subvention pour charges de service public. L'Agence versera cette subvention au fur et à meure de l'atteinte des objectifs qu'elle aura fixés aux opérateurs concernés. Elle devra piloter au plus près les activités de ces opérateurs et l'attribution de leurs aides aux collectivités territoriales pour qu'elles soient intégrées aux contrats de cohésion territoriale ».

Cette idée va au-delà du simple modèle conventionnel de mise en commun de moyens et suppose une coordination ex ante ainsi que la détermination des modalités selon lesquelles ces établissements pourront participer au financement des projets de l'ANCT.

II. La proposition de loi initiale

Le premier alinéa de l'article 7 prévoit que les conventions pluriannuelles conclues entre l'Agence nationale de la cohésion des territoires, l'État et les opérateurs mentionnés à l'article 4 de la présente proposition de loi (ANRU, ANAH, ADEME et CEREMA) déterminent les « objectifs et les moyens partagés mis en oeuvre dans les territoires ».

Le second alinéa précise le contenu de ces conventions : elles doivent prévoir les conditions dans lesquelles les établissements susmentionnés participent au financement et à la mise en oeuvre d'actions sur les territoires de projet de l'agence.

Le troisième alinéa dispose que ces conventions devront être conclues dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente proposition de loi.

III. La position de votre commission

Votre rapporteur relève que de telles conventions peuvent être conclues même dans le silence de la loi, au regard de la liberté contractuelle reconnue aux personnes publiques et dans la même logique que le constat dressé par le Conseil d'État dans son avis rendu à la demande du Président du Sénat 89 ( * ) .

Compte tenu de l'importance de la mission de coordination des actions des opérateurs de l'État dévolue à l'Agence nationale de la cohésion des territoires, votre commission considère toutefois que ces conventions pluriannuelles tripartites ont toute leur place dans la présente proposition de loi. Elle a ainsi adopté un amendement de rédaction complète de l'article ( COM-34 ), d'une part, pour tirer les conséquences de la suppression de l'article 4 opérée par votre commission, sur la proposition de votre rapporteur et, d'autre part, pour renforcer l'importance du comité d'action territoriale et des conventions pluriannuelles susmentionnées. Ces dernières feront ainsi l'objet d'une transmission aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat. Cette transmission permettra aux parlementaires de suivre effectivement les projets pluriannuels de l'agence et d'adresser au Premier ministre tout commentaire sur leur exécution.

Enfin, ce même amendement prévoit, pour des motifs de sécurité juridique et d'organisation administrative, que le délai de trois mois prévu pour la conclusion de ces conventions, à compter de la promulgation de la présente loi, soit calculé à partir de la publication du décret nommant le directeur général de l'agence.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 8 (article L. 1233-4 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Personnels de l'agence

Objet : cet article détermine les statuts des personnels que l'agence peut employer ainsi que leurs institutions représentatives.

I. Le droit en vigueur

Le régime juridique applicable aux personnels d'un établissement public

Dans les établissements publics administratifs, en application de l' article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires , sauf dérogation prévue par une disposition législative, « les emplois civils permanents de l'État, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont, à l'exception de ceux réservés aux magistrats de l'ordre judiciaire et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires, occupés soit par des fonctionnaires régis par le présent titre, soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l'ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut. » Les contractuels sont également soumis à un régime droit public (TC, 25 mars 1996, Préfet de la région Rhône-Alpes, Préfet du Rhône et autres c/ Conseil de prud'hommes de Lyon).

Dans les établissements publics industriels et commerciaux, le droit privé prévaut, tant pour les relations individuelles que collectives (à l'exception du directeur et du comptable quand ce dernier a la qualité de comptable public 90 ( * ) ).

Pour rester acceptable, la complexité des statuts du personnel des établissements publics doit être justifiée

Les questions afférentes au personnel sont, dans les établissements comme ailleurs dans l'administration ou dans les entreprises, au coeur des problématiques quotidiennes de gestion . La principale préoccupation reste d'avoir les moyens d'attirer les compétences et les talents, ainsi que ceux de les conserver autant que possible.

La particularité des établissements publics en la matière réside sûrement dans la bigarrure des situations juridiques en termes de personnels : on trouve ainsi une quasi-continuité de configurations entre les deux extrêmes que sont, d'une part, les établissements n'employant que des agents publics, et majoritairement des titulaires, et d'autre part, ceux n'employant que des salariés de droit privé. Les situations sans conteste les plus lourdes sur le plan de la gestion sont celles de la mixité, lorsque celle-ci impose de doublonner, au sein de l'établissement, chacune des instances de représentation ou de dialogue social au sein de l'établissement.

Force est de constater qu'il n'apparaît pour autant ni souhaitable, ni véritablement possible, d'éviter une telle diversité, qui est aussi la conséquence de la très grande souplesse inhérente à la formule de l'établissement public. Au-delà des particularités sectorielles, historiques ou culturelles qui justifient souvent l'adoption de tel ou tel statut, on doit souligner à quel point les attentes et les opinions qu'ont les dirigeants des établissements publics auditionnés quant aux mérites ou aux inconvénients de l'une ou l'autre formule sont souvent contradictoires : si le statut de droit privé est spontanément associé à l'idée d'une plus grande souplesse de gestion, cette idée est parfois démentie dans les faits, tandis que le statut de droit public est parfois vu comme un atout, en ce qu'il peut notamment offrir un cadre protecteur qui facilite les recrutements.

[...] Deux remarques de portée générale :

D'une part les difficultés les plus importantes que rencontrent les établissements publics en termes de gestion du personnel sont liées aux statuts spécifiques dont certains d'entre eux sont dotés et qui ont pour conséquence d'enfermer les agents de ces établissements dans des carrières presque sans issue, tant les possibilités d'évolution et de mobilité sont restreintes. L'expérience tend à montrer que de tels statuts pèsent toujours sur la vie des établissements ; ils ne sont donc pas à recommander. Lorsqu'un établissement public est soumis à un régime de droit public, il y a plutôt lieu de faire application de la loi portant statut de la fonction publique afin de pouvoir faire jouer la mobilité.

D'autre part, les années récentes ont montré une tendance, lors de la création de nouveaux établissements publics, à multiplier de façon parfois excessive, les catégories de personnels auxquelles ces établissements peuvent recourir. L'idée est sans doute de doter les structures de la « boîte à outils » la plus complète, afin de lui conférer le plus de souplesse possible. On constate toutefois que dans la pratique, la bigarrure des statuts est moins un facteur de souplesse que de lourdeur et de rigidité. Il est surtout nécessaire qu'existe, au sein d'un établissement, la plus grande cohérence possible entre ses missions, les conditions dans lesquelles celles-ci peuvent être assurées, et les possibilités qui s'offrent à ses gestionnaires en termes de recrutement et de gestion du personnel. Autrement dit, l'essentiel est avant tout d'assurer la cohérence de la personne morale autonome qu'est un établissement public, en lui conférant les conditions les plus adéquates à son développement. À cet égard, la question du statut du personnel de l'établissement devrait constituer un passage obligé et important de l'étude d'impact précédant la création de tout nouvel établissement public, afin de s'assurer que ce statut procède non d'un réflexe ou d'une préférence plaqués à l'aveugle sur le fonctionnement de la nouvelle structure, mais d'un choix stratégique, en adéquation avec l'identité de cette structure.

Source : étude précité du Conseil d'État, Les Établissements publics, 2009, p. 53-54.

Par exemple, lors de la création de Pôle Emploi, la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi prévoyait que l'ensemble du personnel de la nouvelle agence serait régi par une convention collective dans le cadre du code du travail, à l'exception des agents issus de l'Agence nationale pour l'emploi qui souhaiteraient opter pour le maintien de leur statut de droit public. Dans le cadre de leurs litiges individuels, si l'agent est soumis au droit privé, le conseil des prud'hommes est compétent. Dans le cas où l'agent est soumis au droit public, le tribunal administratif est compétent. Enfin, s'agissant des conflits collectifs, le code du travail s'applique 91 ( * ) .

Dans le même ordre idée, lors de la création de Voies navigables de France par la loi n° 2012-77 du 24 janvier 2012 , l'établissement public industriel et commercial du même nom s'est transformé en établissement public administratif pour intégrer les personnels de l'État qui étaient précédemment employés dans les services déconcentrés de l'État.

Un établissement public peut ainsi employer tout type de personnel, à condition qu'il en ait reçu la faculté par la loi.

Les instances de représentation du personnel dans les établissements publics

Le premier alinéa de l' article 12 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État dispose que « les organismes consultatifs au sein desquels s'exerce la participation des fonctionnaires de l'État, définie à l'article 9 du titre I er du statut général, sont notamment : le Conseil supérieur de la fonction publique de l'État, les commissions administratives paritaires, les comités techniques et les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ».

Le I et le II de l' article 15 de la loi 11 janvier 1984 précitée dispose :

« I.- Dans toutes les administrations de l'État et dans tous les établissements publics de l'État ne présentant pas un caractère industriel ou commercial, il est institué un ou plusieurs comités techniques.

En cas d'insuffisance des effectifs, la représentation du personnel d'un établissement public peut être assurée dans un comité technique ministériel ou dans un comité technique unique, commun à plusieurs établissements.

II.- Les comités techniques connaissent des questions relatives à l'organisation et au fonctionnement des services, des questions relatives aux effectifs, aux emplois et aux compétences, des projets de statuts particuliers ainsi que des questions prévues par un décret en Conseil d'État. Les incidences des principales décisions à caractère budgétaire sur la gestion des emplois font l'objet d'une information des comités techniques. Les modalités de mise en oeuvre du service civique font l'objet d'une information annuelle des comités techniques.

Les comités techniques établis dans les services du ministère de la défense, ou du ministère de l'intérieur pour la gendarmerie nationale, employant des personnels civils ne sont pas consultés sur les questions relatives à l'organisation et au fonctionnement des organismes militaires à vocation opérationnelle, dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État. »

Le I et le II de l' article 16 de la loi du 11 janvier 1984 précitée disposent :

« I. - Dans toutes les administrations de l'État et dans tous les établissements publics de l'État ne présentant pas un caractère industriel ou commercial, il est institué un ou plusieurs comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

II. - Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des agents dans leur travail, à l'amélioration des conditions de travail et de veiller à l'observation des prescriptions légales prises en ces matières. »

S'agissant des salariés de droit privé, l' article L. 2311-1 du code du travail dispose :

« Les dispositions du présent titre sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'à leurs salariés.

Elles sont également applicables :

1° Aux établissements publics à caractère industriel et commercial ;

2° Aux établissements publics à caractère administratif lorsqu'ils emploient du personnel dans les conditions du droit privé.

Ces dispositions peuvent, compte tenu des caractères particuliers de certains des établissements mentionnés aux 1° et 2° et des instances de représentation du personnel éventuellement existantes, faire l'objet d'adaptations, par décrets en Conseil d'État, sous réserve d'assurer les mêmes garanties aux salariés de ces établissements. »

L' article L. 2312-8 du même code dispose :

« Le comité social et économique a pour mission d'assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière de l'entreprise, à l'organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production.

Le comité est informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, notamment sur :


1° Les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs ;

2° La modification de son organisation économique ou juridique ;

3° Les conditions d'emploi, de travail, notamment la durée du travail, et la formation professionnelle ;

4° L'introduction de nouvelles technologies, tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ;

5° Les mesures prises en vue de faciliter la mise, la remise ou le maintien au travail des accidentés du travail, des invalides de guerre, des invalides civils, des personnes atteintes de maladies chroniques évolutives et des travailleurs handicapés, notamment sur l'aménagement des postes de travail.


Le comité social et économique mis en place dans les entreprises d'au moins cinquante salariés exerce également les attributions prévues à la section 2.
»

L' article L. 2312-9 du même code dispose :

« Dans le champ de la santé, de la sécurité et des conditions de travail, le comité social et économique :

1° Procède à l'analyse des risques professionnels auxquels peuvent être exposés les travailleurs, notamment les femmes enceintes, ainsi que des effets de l'exposition aux facteurs de risques professionnels mentionnés à l'article L. 4161-1 ;

2° Contribue notamment à faciliter l'accès des femmes à tous les emplois, à la résolution des problèmes liés à la maternité, l'adaptation et à l'aménagement des postes de travail afin de faciliter l'accès et le maintien des personnes handicapées à tous les emplois au cours de leur vie professionnelle ;

3° Peut susciter toute initiative qu'il estime utile et proposer notamment des actions de prévention du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes définis à l'article L. 1142-2-1. Le refus de l'employeur est motivé. »

Dans son avis rendu à la demande du Président du Sénat, le Conseil rappelle que « seule une loi peut mettre en place des structures de représentation du personnel dérogeant à celles prévues selon le cas par les statuts de la fonction ou par le code du travail et s'écarter des règles constitutives de la catégorie d'établissement à laquelle ce nouvel établissement se rattache ».

Il résulte de ce qui précède que la loi pourrait mettre en place un comité social et économique unique pour la gestion des personnels de l'Agence nationale de la cohésion des territoires, qu'ils soient fonctionnaires de l'Etat, agents non titulaires de droit public ou salariés.

II. La proposition de loi initiale

Tirant les conséquences du caractère hybride du nouvel établissement public créé par la présente proposition de loi, les alinéas 1 à 4 du présent article prévoient que l'agence peut employer des agents de droit public (fonctionnaires de l'État et contractuels) et des salariés soumis au droit du travail.

Les alinéas 5 à 9 précisent la forme des instances de représentation du personnel : l'alinéa 6 met en place un comité technique compétent pour les fonctionnaires de l'État et les agents non titulaires de droit public ; l'alinéa 7 institue un comité social et économique pour les salariés régis par le code du travail mais prévoit qu'il n'exerce pas les missions confiées au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

Le huitième alinéa précise que le directeur général de l'agence réunit conjointement le comité technique et le comité social et économique pour connaître des sujets communs à l'ensemble du personnel, dans le respect de leurs attributions respectives.

Le neuvième alinéa institue, auprès du directeur général de l'agence, un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail compétent pour l'ensemble des personnels. L'avant dernière phrase précise que ce comité est informé et consulté sur les questions intéressant les conditions d'emploi et de travail, notamment la durée du travail et la formation professionnelle 92 ( * ) . Il peut également susciter toute initiative qu'il estime utile et proposer notamment des actions de prévention du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes définis à l'article L. 1142-1, qui ne peuvent être refusées qu'après avis motivé de l'employeur. La dernière phrase renvoie à un décret en Conseil d'État le soin d'en fixer la composition et le fonctionnement.

III. La position de votre commission

La décision de suppression d'un établissement public ne nécessite pas d'être préalablement soumise pour avis aux instances de celui-ci. Néanmoins, en modifiant l'organisation de services d'administration centrale d'un ministère, la présente proposition de loi entre dans le champ de l'article 34 du décret n° 2011-184 qui prévoit que sont soumis au comité technique non seulement les projets de textes mais aussi les questions relatives à l'organisation et au fonctionnement des administrations, établissements ou services. Votre rapporteur relève, à cet égard, que si la présente proposition de loi entre dans le champ des dispositions susmentionnées, il n'existe pas de procédure de consultation prévue au niveau législatif, comme c'est le cas pour les projets de texte à caractère social (article L. 1 du code du travail). Votre rapporteur appelle le Gouvernement à procéder à cette consultation, afin de garantir la bonne information des agents concernés.

Au-delà, votre commission a adopté un amendement COM-36 qui vise à simplifier les modalités de représentation du personnel au sein de l'agence en fusionnant les trois comités de gestion du personnel institués par la proposition de loin en un seul comité compétent pour l'ensemble des personnels (fonctionnaires de l'État, contractuels de droit public et salariés de droit privé), dans un souci de simplification et de bonne gestion, ainsi que l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 le permet désormais.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Titre II Dispositions transitoires et finales

À l'initiative de votre rapporteur, votre commission a adopté l'amendement COM-37 , tendant à insérer une division additionnelle intitulée « Titre II - Dispositions transitoires et finales » avant l'article 9 de la présente proposition de loi.

Article 9 (article L. 131-4 du code de l'environnement et article 46 de la loi n° 2013-431 du 28 mai 2013) Composition des conseils d'administration de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA)

Objet : cet article vise à prévoir la présence de représentants de l'Agence nationale de la cohésion des territoires aux conseils d'administration respectifs de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA).

I. Le droit en vigueur

Il est loisible au législateur de retenir ou non la formule selon laquelle siègent au conseil d'administration d'un établissement public « des représentants de l'État » 93 ( * ) ou de faire explicitement mention « des représentants de l'État et des établissements publics » 94 ( * ) .

L'article 131-4 du code de l'environnement dispose que le conseil d'administration de l'ADEME est composé : de représentants de l'État ; d'un député et d'un sénateur ; de représentants de collectivités territoriales ; de personnalités qualifiées, de représentants d'associations de protection de l'environnement agréées au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement et de représentants de groupements professionnels intéressés ; de représentants du personnel dans les conditions définies au deuxième alinéa de l'article 4 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

L'article 46 de la loi n° 2013-431 du 28 mai 2013 portant diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transport dispose que le conseil d'administration du CEREMA est composé : de représentants de l'État ; d'élus représentant les collectivités territoriales ; de personnalités qualifiées extérieures à l'établissement choisies en raison de leur compétence, parmi lesquelles des personnes issues du monde des associations d'usagers et de protection de l'environnement ; de représentants élus du personnel de l'établissement.

II. La proposition de loi initiale

Le premier alinéa du présent article prévoit que des représentants de l'Agence nationale de la cohésion des territoires pourront siéger au conseil d'administration de l'ADEME.

Le second alinéa prévoit la même faculté, pour des représentants de l'ANCT, de siéger au conseil d'administration du CEREMA.

III. La position de votre commission

Votre rapporteur est favorable à ces dispositions, qui permettront à l'agence de suivre les projets et les orientations retenus par ces établissements.

La précision que des représentants de l'ANCT puissent siéger au conseil d'administration de l'ANAH n'apparaît pas utile puisque l'article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation le permet.

En outre, il semble délicat, à ce stade, de prévoir que des représentants de l'agence siègent au conseil d'administration de l'ANRU, compte tenu de la tutelle exercée par le CGET sur cette agence.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 9 bis (nouveau) Tableau annexé à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution Audition du directeur général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires par les commissions compétentes en matière d'aménagement du territoire de chaque assemblée

Objet : cet article additionnel a pour objet de prévoir que la nomination du directeur général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires s'exerce après avis public de la commission compétente en matière d'aménagement du territoire de chaque assemblée.

I. Le droit en vigueur

En application de l'article 13 de la Constitution, une loi organique détermine les emplois ou fonctions pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Il revient à la loi ordinaire de déterminer les commissions permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés.

II. La position de votre commission

Introduit par votre commission à l'initiative de son rapporteur, par l'adoption de l'amendement COM-19 , l'article 9 bis vise à modifier le tableau annexé à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010, par coordination avec la modification de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 effectuée par la proposition de loi organique n° 43 déposée par MM. Hervé Maurey et Jean-Claude Requier.

Il prévoit que le directeur général de la future agence sera nommé après avis public des commissions compétentes en matière d'aménagement du territoire de chaque assemblée.

Votre rapporteur est tout à fait favorable à l'audition du futur directeur général de l'ANCT par les commissions compétentes du Parlement. S'agissant d'un poste sensible, cristallisant de nombreuses attentes politiques, aussi bien du côté des collectivités territoriales que du côté de l'État, un droit de regard du Parlement est indispensable.

Le Sénat, représentant constitutionnel des collectivités territoriales, pourra ainsi veiller à l'adéquation entre le profil de la personne pressentie pour occuper ce poste et les attentes des élus locaux et des populations dans les territoires.

Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 10 (article L. 411-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, article L. 144-5 du code de commerce, article L. 321-14 du code de l'urbanisme, article 26-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, article 28 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, article 17 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, article 22 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine) Conditions du transfert des établissements ou services intégrés à l'Agence nationale de la cohésion des territoires

Objet : cet article a pour objet de prévoir la dissolution de l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux et le transfert de ses personnels, ainsi qu'une partie de ceux du Commissariat général à l'égalité des territoires et de l'Agence du numérique.

I. Le droit en vigueur

Lorsqu'un établissement tient son existence de la loi, seul le législateur peut intervenir pour prononcer sa dissolution. Il n'en va pas de même pour un service à compétence nationale, tel que l'Agence du numérique, créée par le décret n° 2015-113 du 3 février 2015.

L'établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux (EPARECA)

L'EPARECA a été créé par la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville. Ses missions sont définies au chapitre V du titre II du livre III du code de l'urbanisme (articles L. 325-1 à L. 325-4 et R. 325-1 à R. 325-9). Dans ce cadre, l'établissement, placé sous la tutelle conjointe des ministres chargés de la ville, de l'urbanisme et du commerce, accompagne les collectivités qui le saisissent pour des opérations de restructuration commerciale et artisanale à toutes les étapes du projet (études préalables, projet immobilier, gestion locative, transfert).

L'EPARECA rassemble 43 salariés de droit privé. Il bénéficie d'une dotation de l'État provenant du programme 134 - Développement des entreprises et du tourisme, qui représente 5,7 millions d'euros. Avec les produits de son activité industrielle et commerciale, son budget atteint au total 33 millions d'euros. Il signe un contrat d'objectifs et de performance au titre de son statut d'opérateur de l'État 95 ( * ) .

Son intervention est historiquement ciblée dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et s'effectue en coordination avec d'autres établissements publics de l'État (ANRU, ANAH, établissements publics fonciers).

L'établissement intervient à ce jour dans plus de 120 opérations. Il conclut des conventions avec les collectivités territoriales à chaque étape du projet. Il a su constituer une équipe pluridisciplinaire permettant d'intégrer l'application des règles de droit public et celles issues du droit privé. Aussi, l'EPARECA se voit appliquer à la fois le décret relatif à la gestion budgétaire et comptable publique de 2012 96 ( * ) et les règles de la comptabilité privée, pour la gestion de ses actifs.

La loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) 97 ( * ) a habilité, en son article 174 et à titre expérimental pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de la dite loi, l'EPARECA à exercer ses missions dans le champ des opérations de revitalisation de territoire prévues à l'article L. 303-2 du code de la construction et de l'habitation.

L'Agence du numérique

L'agence du numérique est un service à compétence nationale rattaché à la direction générale des entreprises du ministère de l'économie et des finances, créé par le décret n° 2015-113 du 3 février 2015 pour assurer quatre missions principales : le déploiement du Plan France Très Haut débit (2013-2022) visant à déployer la fibre optique sur l'ensemble du territoire ; la plateforme France Mobile, dont l'objectif est l'identification et le traitement des problèmes de couverture mobile ; la conduite du programme Société Numérique, dont l'ambition est à la fois technologique et culturelle et vise à favorise la diffusion des usages numériques auprès du public 98 ( * ) (il s'agit de la plus petite des missions de l'Agence du numérique à ce jour, avec 6 EPT de catégorie A+) ; enfin, l'initiative dite « French Tech » qui constitue un label destiné à valoriser la croissance des entreprises françaises en lien avec les nouvelles technologies de l'information, de la communication et de l'innovation.

Ainsi que le précisait l'article 2-1 du décret n° 92-604 du 1 er juillet 1992 portant charte de la déconcentration antérieurement à son abrogation, un service à compétence nationale peut se voir confier « des fonctions de gestion, d'études techniques ou de formation, des activités de production de biens ou de prestation de services ainsi que toute autre mission à caractère opérationnel présentant un caractère national et correspondant aux attributions du ministre sous l'autorité duquel ils sont placés ».

L'article 2 du décret n° 2015-510 du 7 mai 2015 portant charte de la déconcentration reprend le principe selon lequel un service à compétence national n'exerce pas de missions territorialisées : « la répartition des missions entre les administrations centrales, les services à compétence nationale et les services déconcentrés s'organise selon les principes fixés par le présent décret. Sont confiées aux administrations centrales et aux services à compétence nationale les seules missions qui présentent un caractère national ou dont l'exécution, en vertu de la loi, ne peut être déléguée à un échelon territorial.

Les autres missions, notamment celles qui intéressent les relations entre l'État et les collectivités territoriales, sont confiées aux services déconcentrés. »

Le Commissariat général à l'égalité des territoires

Créé par le décret n° 2014-394 du 31 mars 2014 , le Commissariat général à l'égalité des territoires a repris les anciennes missions assurées par la délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR), le Secrétariat général du comité interministériel des villes (SGCIV) et l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Acsé).

Il constitue un service d'administration centrale, initialement à la disposition du Premier ministre (et des ministres qui en reçoivent l'attribution) et aujourd'hui rattaché au ministre de la cohésion des territoires, en application du deuxième alinéa de l'article 20 de la Constitution , mais conduit également des programmes d'action territorialisés, à l'image du pilotage de la politique de la ville (programme 147) et de l'impulsion et de la coordination de la politique d'aménagement du territoire (programme 112) à travers le Fonds national d'aménagement du territoire, la prime d'aménagement du territoire et divers dispositifs contractuels dont le recensement est d'ailleurs peu aisé.

Parmi ses derniers programmes nationaux en date, Action Coeur de ville a été annoncé par le ministre de la Cohésion des territoires le 27 mars dernier. Il cible 222 villes moyennes et devrait mobiliser plus de 5 milliards d'euros sur cinq ans, dont 1 milliard d'euros de la Caisse des dépôts en fonds propres et 700 millions d'euros en prêt, ainsi que plus d'un 1,5 milliard d'Action logement et 1,2 milliard d'euros provenant de l'Agence nationale de l'habitat.

Les modalités de transfert d'un établissement public : l'exemple de l'Agence pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Acsé)

L'Acsé, créée par la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances, a été dissoute par la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine (article 14). Cet article disposait :

« I .- Les activités de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances sont transférées à l'État suivant des modalités et un calendrier, prévus par décret, au plus tard le 1er janvier 2016.

À cette date, l'établissement public Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances est dissous et ses biens, droits et obligations sont transférés à l'État. Ce transfert est réalisé à titre gratuit et ne donne lieu à aucune indemnité ou perception de droits, impôts ou taxes de quelque nature que ce soit, à aucun versement d'honoraires au profit des agents de l'État, ni au versement prévu à l'article 879 du code général des impôts. »

Le décret n° 2015-129 du 5 février 2015 fixant les modalités et le calendrier de transfert des activités de l'agence est ensuite intervenu pour préciser l'application de cette disposition : il précisait ainsi la date effective de dissolution de l'agence (reportée une fois) ainsi que les modalités des transferts de personnels entre l'agence et le ministre chargé de la ville.

Coordination

L' article L. 411-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique fixe la liste des immeubles pouvant être cédés de gré à gré ou concédés temporairement à des personnes de droit privé ou de droit public, à la condition qu'elles les utilisent aux fins prescrites par le cahier des charges annexé à l'acte de cession ou de concession temporaire. Son 9° fait référence aux immeubles expropriés par l'EPARECA en vue de la création, l'extension, la transformation ou la reconversion des espaces commerciaux et artisanaux dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

L' article L. 144-5 du code de commerce prévoit que la disposition selon laquelle « les personnes physiques ou morales qui concèdent une location-gérance doivent avoir exploité pendant deux années au moins le fonds ou l'établissement artisanal mis en gérance » 99 ( * ) n'est pas applicable à l'État ; aux collectivités territoriales ; aux établissements de crédit et aux sociétés de financement ; aux majeurs faisant l'objet d'une mesure de protection légale ou aux personnes faisant l'objet de soins psychiatriques en raison de troubles mentaux dans les conditions fixées par les articles L. 3211-2 et L. 3212-1 à L. 3212-12 du code de la santé publique, en ce qui concerne le fonds dont ils étaient propriétaires avant la mesure de protection légale ou avant la survenance de l'hospitalisation ; aux héritiers ou légataires d'un commerçant ou d'un artisan décédé, ainsi qu'aux bénéficiaires d'un partage d'ascendant, en ce qui concerne le fonds recueilli ; à l'établissement public créé par l'article L. 325-1 du code de l'urbanisme ; au conjoint attributaire du fonds de commerce ou du fonds artisanal à la suite de la dissolution du régime matrimonial, lorsque ce conjoint a participé à son exploitation pendant au moins deux ans avant la dissolution du régime matrimonial ou son partage ; au loueur de fonds de commerce, lorsque la location-gérance a pour objet principal d'assurer, sous contrat d'exclusivité, l'écoulement au détail des produits fabriqués ou distribués par lui-même ; aux loueurs de fonds de commerce de cinéma, théâtres et music-halls ; aux titulaires d'une autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du code des transports en vue d'assurer l'exploitation de cette autorisation conformément à l'article L. 3121-2 du même code.

L' article L. 321-14 du code de l'urbanisme autorise l'État à créer des établissements publics d'aménagement ayant pour objet de favoriser l'aménagement et le développement durable de territoires présentant un caractère d'intérêt national. Son 2° prévoit notamment que ces établissements publics peuvent se voir déléguer par l'Établissement public national pour l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux la maîtrise d'ouvrage des opérations définies à l'article L. 325-1 du code de l'urbanisme accomplir les actes de disposition et d'administration définis à l'article L. 325-2 du même code.

L' article 26-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis prévoit la possibilité pour l'assemblée générale des copropriétaires, par dérogation aux dispositions de l'avant-dernier alinéa de l'article 26 de la même loi, de décider à la double majorité qualifiée au premier alinéa dudit article les aliénations de parties communes et les travaux à effectuer sur celles-ci liés à la réalisation des missions de l'EPARECA, définies aux termes des articles L. 325-1 et suivants du code de l'urbanisme.

L' article 28 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville prévoit que les projets dont l'EPARECA assure la maitrise d'ouvrage (ou délègue cette maîtrise d'ouvrage) sont soumis pour autorisation à la Commission nationale d'aménagement commercial après consultation de la commission départementale d'aménagement commercial, qui rend son avis dans un délai d'un mois à compter de sa saisine. Passé ce délai, l'avis est réputé rendu.

L' article 17 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine prévoit en son second alinéa qu'un décret en Conseil d'État prévoit les modalités selon lesquelles, pour les ensembles immobiliers comportant des locaux commerciaux, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine coordonne ses interventions avec celles de l'Établissement public national pour l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux.

L' article 22 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine dispose que « Les actions et opérations définies au troisième alinéa de l'article L. 325-1 du code de l'urbanisme ayant fait l'objet d'une décision du conseil d'administration de l'établissement avant la publication du décret prévu au II de l'article 5 de la présente loi et précédemment situées en zone urbaine sensible ou dans les territoires faisant l'objet d'un contrat urbain de cohésion sociale sont menées à leur terme par l'établissement. »

II. La proposition de loi initiale

Le présent article organise d'une part, la dissolution de l'EPARECA (I) et, d'autre part, le transfert, à l'Agence nationale de la cohésion des territoires, des personnels travaillant au sein du Commissariat général à l'égalité des territoires, à l'EPARECA et à l'Agence du numérique (II).

Le premier alinéa précise que l'EPARECA est dissous au 1 er janvier de l'année qui suit la promulgation de la présente loi et abroge les articles du code de l'urbanisme qui s'y rapportent.

Le deuxième alinéa prévoit la reprise, par l'ANCT, des biens, droits et obligations de l'EPARECA.

Le troisième alinéa prévoit la conclusion d'une convention entre l'ANCT et l'EPARECA pour prévoir les relations entre les deux établissements d'ici à cette dissolution.

Le quatrième alinéa prévoit le transfert, à l'ANCT, des personnels des établissements mentionnés : le cinquième alinéa prévoit le transfert des agents exerçant leurs fonctions au sein du CGET à l'exception de ceux assurant des fonctions d'administration centrale.

Le sixième alinéa organise le transfert des agents de l'Agence du numérique, à l'exception de ceux affectés à la mission French Tech.

Le septième alinéa prévoit le transfert des personnels de l'EPARECA.

Enfin, le huitième alinéa prévoit que les fonctionnaires précédemment détachés au sein des établissements et services susmentionnés sont détachés d'office au sein de l'ANCT jusqu'au terme prévu de leur détachement.

III. La position de votre commission

Votre rapporteur prend acte du transfert de ces établissements et de leurs personnels à l'ANCT.

Il considère que le maintien de l'initiative « French Tech » auprès du ministre de l'économie et des finances se justifie au regard de la mission de promotion des entreprises françaises à l'international qu'elle remplit et se félicite que les sujets liés au déploiement et au renforcement des réseaux de communications électroniques soient rapprochés du ministre de la cohésion des territoires car ils jouent un rôle majeur pour la cohésion des territoires.

Sans remettre en cause l'économie générale du dispositif prévu par les auteurs de la proposition de loi et afin de tenir compte des remarques formulées par le Conseil d'État 100 ( * ) , votre commission a adopté, à l'initiative de votre rapporteur, deux amendements procédant à des précisions rédactionnelles permettant de le sécuriser ( COM-38 et COM-39 ) et visant à effectuer les coordinations juridiques consécutives à la dissolution de l'EPARECA dans les codes et les lois en vigueur ( COM-29).

Enfin, en cohérence avec le report au 1 er janvier 2021 de l'entrée en vigueur des dispositions relatives à la reprise par l'ANCT des missions dévolues actuellement à l'Agence du numérique, votre commission a adopté un amendement COM-33 prévoyant le transfert des personnels de ce service à compétence nationale à l'ANCT le 1 e janvier 2021.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 11 Conditions d'application de la présente loi

Objet : cet article prévoit qu'un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application de la présente loi.

I. Le droit en vigueur

L'intervention d'un décret en Conseil d'État est nécessaire pour compléter la création ou la transformation d'un établissement public , même en dehors des cas où il est prévu par une loi si l'on entend déroger à des dispositions fixées par décret en Conseil d'État. L'article 37 de la Constitution dispose, en effet, que « les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire ».

En général, ces décrets comportent quatre titres, consacrés respectivement aux dispositions générales, à l'organisation et au fonctionnement de l'établissement public en question, à son régime financier et à des dispositions diverses.

Il s'agit, notamment de préciser :

- le ministre de tutelle , qui doit assurer, dans ses missions, le service public dont il est prévu de confier la gestion ;

- les missions de l'établissement , au regard du respect du principe de spécialité ;

- le siège de l'établissement ;

- le régime administratif de l'établissement et le fonctionnement de ses organes dirigeants (conseil d'administration, direction, conseil de surveillance, autres comités) ainsi que sa structure. L'effectif des membres du conseil d'administration doit ainsi être précisé par décret, de même que ses attributions et la fréquence de ses réunions ;

- les pouvoirs du responsable exécutif de l'établissement , dont la fonction peut être distincte ou cumulée avec celle de président du conseil d'administration ;

- l' organisation interne de l'établissement, notamment son régime financier, la structure des services et le recrutement des personnels. Il conviendrait également d'identifier et de désigner les services de l'État qui apporteront leur concours au fonctionnement de l'Agence dans les territoires ;

- enfin, la procédure nécessaire à la dissolution éventuelle de l'établissement et notamment les règles de consultation.

En outre, plusieurs textes s'imposent aux établissements publics : il en va ainsi de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public pour ce qui concerne la composition et le fonctionnement de certains conseils d'administration, de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public et du décret n° 79-153 du 26 février 1979 relatif à la durée du mandat de président et de dirigeant des établissements publics.

II. La proposition de loi initiale

Le présent article prévoit l'intervention d'un décret en Conseil d'État pour fixer les conditions d'application de la présente loi.

III. La position de votre commission

Suivant l'avis du Conseil d'État, votre rapporteur a proposé à votre commission de retirer un certain nombre de dispositions à caractère réglementaire de la proposition de loi .

Il entend cependant que le pouvoir réglementaire fasse bon usage des marges dont il dispose et sera notamment attentif à ce qu'il précise :

- les conditions dans lesquelles le comité d'action territoriale remplira le rôle que lui assigne le législateur ;

- les conditions dans lesquelles les préfets, délégués territoriaux de l'ANCT, pourront subdéléguer leurs compétences et signatures ;

- les modalités de conclusion des conventions pluriannuelles mentionnées à l'article 7 de la présente proposition de loi et, plus largement, les modalités de coordination des actions de l'ANCT avec celles des autres opérateurs identifiés par la proposition de loi (ADEME, ANRU, ANAH, CEREMA) ;

- le fonctionnement des organes de dialogue social de l'agence ;

- les modalités de la dissolution de l'EPARECA et du transfert des contrats des salariés et de ses biens, droits et obligations à la nouvelle agence.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 12 (supprimé) (articles 575 et 575 A du code général des impôts) Conséquences financières éventuelles de la présente loi

À l'initiative de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement COM-18 de suppression de cet article.

S'agissant d'un projet régulièrement annoncé 101 ( * ) dans des enceintes officielles 102 ( * ) , il n'est pas nécessaire de gager la présente proposition de loi.

Votre commission a supprimé cet article.

Votre commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE DE LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE

Article unique (Tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution Avis public des commissions permanentes compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat pour la nomination du directeur général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires

Objet : cet article unique a pour objet de prévoir que la nomination du directeur général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires s'exerce après avis public de la commission compétente de chaque assemblée.

I. Le droit en vigueur

L' article 13 de la Constitution confère au Président de la République un pouvoir général de nomination aux emplois civils et militaires.

Afin de conférer une importance particulière à certaines nominations à la tête d'organismes ou d'établissements publics, en rapport avec leur objet et la volonté politique qui a présidé à sa création, l' article 5 de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la V ème République a prévu, au dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution, l'institution d'une procédure d'avis des commissions compétentes de chaque assemblée et la possibilité pour celles-ci de s'opposer à une nomination aux 3/5e des suffrages exprimés au sein des deux commissions.

La loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution recense, en annexe, la liste des emplois ou fonctions pour lesquels le pouvoir de nomination du Président de la République doit s'effectuer dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution.

La loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution identifie, pour chaque emploi ou fonction soumis à ladite procédure, la commission compétente de chaque assemblée chargée d'entendre la personne pressentie pour occuper lesdits emploi ou fonction.

II. La proposition de loi initiale

Compte tenu de l'ambition initialement affichée par le Président de la République lors de la Conférence nationale des territoires, visant à créer un nouvel établissement public au service des collectivités territoriales, la présente proposition de loi organique, déposée par Hervé Maurey et Jean-Claude Réquier, prévoit que le directeur général de l'ANCT est entendu par les commissions permanentes compétentes de chaque assemblée.

III. La position de votre commission

Votre commission est tout à fait favorable à l'application de la procédure prévue au dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution à la nomination du futur directeur général de l'ANCT. S'agissant d'un poste sensible, cristallisant de nombreuses attentes politiques, aussi bien du côté des collectivités territoriales que du côté de l'État, un droit de regard du Parlement est légitime.

Le Sénat, en particulier, représentant constitutionnel des collectivités territoriales, pourra ainsi veiller à l'adéquation entre le profil de la personne pressentie pour occuper ce poste et les attentes des élus locaux et des populations dans les territoires.

Votre commission a adopté l'article unique de la proposition de loi organique sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

I. AUDITION DE MME JACQUELINE GOURAULT, MINISTRE DE LA COHÉSION DES TERRITOIRES ET DES RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

M. Hervé Maurey , président . - Mes chers collègues, nous sommes très heureux d'accueillir ce matin Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Je crois pouvoir dire au nom de tous mes collègues que nous nous réjouissons de la création de ce grand ministère des territoires, et du fait qu'il soit confié à une sénatrice connaissant bien, de surcroît, les collectivités locales et les territoires.

Madame la Ministre, nous avons ainsi un a priori favorable sur ce nouveau format et suret les responsabilités qui vous ont été confiées. Mais bien sûr, c'est sur pièce, si je puis dire, que nous jugerons de la volonté et de la capacité de ce gouvernement à agir en faveur des territoires. Dans une récente interview, vous avez dit que vous ne perceviez pas de colère chez les élus locaux. Je crois que nous avons surtout perçu, en ce qui nous concerne, de l'inquiétude, un découragement et parfois même une certaine désespérance, qui expliquent en grande partie le nombre record de démissions de maires que l'on a pu observer ces derniers mois et ces dernières années. Votre ministre délégué, M. Sébastien Lecornu, a déclaré, pour sa part, qu'il voulait être le ministre du « parler vrai ». Je crois que cela est attendu des Français et en l'occurrence des élus locaux. Je vous donnerai un exemple : le gouvernement a annoncé l'année dernière qu'il n'y aurait pas de baisse des dotations. Or, 2 200 communes ont constaté une baisse de la DGF (dotation globale de fonctionnement). Ils ont ainsi eu le sentiment que ce « parler vrai » n'était pas au rendez-vous. Je veux également attirer votre attention, Madame la Ministre, sur le fait que dans votre interview au Figaro, vous mentionnez la généralisation de la couverture mobile du territoire en 4G. Or, malheureusement, celle-ci ne se fera pas avant la fin de ce quinquennat - on peut peut-être l'espérer pour la fin du quinquennat suivant. On aura l'occasion d'en reparler, mais je souhaitais mentionner cet exemple pour insister sur le fait qu'il faut « parler vrai » et agir vraiment.

Je crois que, dans notre commission, nous sommes unanimes pour dire que l'aménagement du territoire ne doit plus être le parent pauvre des politiques publiques. À cet égard, je souhaite vous remettre le rapport que nous avons écrit l'année dernière avec Louis-Jean de Nicolaÿ portant le titre : « l'aménagement du territoire, plus que jamais une nécessité ». Nous l'avions également remis à votre prédécesseur, M. Jacques Mézard. J'espère qu'il pourra inspirer votre action au quotidien. Nous préconisons notamment une action qui ne coûterait pas un centime : le fait de mesurer davantage, lorsque l'on souhaite mettre en oeuvre une politique publique, l'impact qu'elle a sur les territoires. Jusqu'à présent, lorsque l'on vote une loi sur la santé, lorsque l'on décide de fermer des lignes de transport, on ne soucie jamais de l'impact sur l'aménagement du territoire. Intégrer cette dimension et cette transversalité serait - il me semble - très apprécié des élus et des territoires.

Nous avons aujourd'hui deux sujets principaux sur lesquels nous souhaitions vous entendre : la proposition de loi de notre collègue Jean-Claude Requier - qui assiste ce matin à la réunion de notre commission-, visant à créer une Agence nationale de la cohésion des territoires et la mission « Cohésion des territoires » du projet de loi de finances pour 2019, plus particulièrement les programmes 112 et 162, dont Louis-Jean de Nicolaÿ est le rapporteur.

Avant de vous donner la parole, je voulais vous indiquer que nous nous posons trois questions sur cette Agence nationale de la cohésion et des territoires. Quels sont réellement l'utilité, la valeur ajoutée et l'intérêt d'une telle agence ? Nous nous interrogeons d'autant plus que la proposition de loi n'a pas fait l'objet d'une étude d'impact. Par ailleurs, pourquoi le périmètre retenu est-il celui-ci ? Certains le trouvent trop large, d'autres au contraire trop réduit. Cela concerne notamment la mission de préfiguration du préfet Serge Morvan. Actuellement, le texte de la proposition de loi prévoit d'inclure uniquement le Commissariat général à l'égalité des territoires, l'EPARECA (l'établissement public d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux) et l'Agence du numérique. Enfin, quels sont les moyens dont va disposer l'agence ? Nous n'avons pas d'a priori. D'ailleurs, lorsque l'on m'a interrogé sur cette agence il y a plusieurs mois, j'ai indiqué que tout dépendrait du format, des moyens et du périmètre de cette agence.

En ce qui concerne le projet de loi de finances pour 2019, je rappellerai que la loi de programmation des finances publiques prévoit une baisse des moyens de la mission « Cohésion des territoires » de 18 milliards d'euros en 2017 à 15 milliards d'euros en 2020. Dans le projet de loi de finances pour 2019, seuls les crédits consacrés à la politique de la ville augmentent, ce qui n'est évidemment pas pour rassurer les territoires ruraux.

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, je suis très heureuse de me retrouver parmi vous, à la tête de ce nouveau grand ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Le changement de périmètre et le rassemblement de deux ministères répondent, je le crois, à l'attente des élus. Le gouvernement a ainsi clairement affirmé sa volonté de placer les territoires au coeur de toutes ses politiques publiques. Je me réjouis d'être devant vous pour expliquer l'action que nous mènerons dans ce ministère, de concert avec Sébastien Lecornu et Julien Denormandie. Nous aurons en outre l'occasion de nous revoir dans cette assemblée qui émane des collectivités territoriales.

La proposition de loi portant création d'une Agence nationale de cohésion des territoires est une proposition de loi du groupe RDSE. Nous avons déjà entamé les travaux avec le rapporteur Louis-Jean de Nicolaÿ.

Vous m'interrogez sur l'utilité de cette agence. En juillet 2017, le président de la République a annoncé la création de l'Agence nationale de la cohésion des territoires pour répondre à la demande des élus locaux, portée en particulier par François Baroin. Il avait demandé clairement qu'il y ait un outil au service des territoires, notamment pour les territoires les plus défavorisés. Depuis cette date, deux initiatives ont été prises, l'une parlementaire, l'autre gouvernementale. Cela démontre la volonté commune de concrétiser cette annonce. La proposition de loi dont il est question ici est un troisième vecteur législatif et le gouvernement entend y apporter son soutien. Bien sûr toute proposition de loi est perfectible. Nous avons également pouvoir prendre en compte l'avis du Conseil d'État qui a été saisi par le Président du Sénat : il nous a donné un certain nombre de recommandations.

Comme il s'agit d'un texte technique, je souhaitais au préalable vous éclairer sur la philosophie du gouvernement. Je répondrai également à vos questions sur la gouvernance, le périmètre, etc.La décentralisation a profondément redessiné le périmètre des compétences dévolues à l'État et aux collectivités en matière de politiques publiques. Elle a imposé à l'État de repenser son action qui était auparavant essentiellement prescriptive pour passer à une démarche de facilitateur pour les collectivités territoriales. Nous avons évoqué cette question il y a deux jours, dans le cadre d'« Action publique 2022 », et notamment la nécessité - et je sais que le président Maurey y est très attaché - de « toiletter le système » pour éviter les doublons entre l'organisation de l'État et celle des collectivités territoriales.

Comme vous le savez, je me déplace souvent et je rencontre de nombreux élus locaux, pleins d'énergie, d'idées et de solutions. Je sais tout l'attachement des élus à leur territoire, qu'ils veulent développer. C'est évident et normal de croire au potentiel de son territoire. Toutefois, ils ont parfois du mal à concrétiser ces projets en raison d'manque d'ingénierie. Je connais suffisamment les territoires pour savoir que certaines collectivités ont mis en place des structures - certains départements, des intercommunalités - qui répondent à ce manque d'ingénierie des communes. Toutefois, cela n'est pas une généralité. L'Agence nationale de cohésion des territoires permettra de combler les vides et apportera une aide concrète aux élus, en particulier dans les territoires les plus fragiles. Je souhaite faire un point sémantique, car on utilise aujourd'hui beaucoup ce mot de territoire. D'ailleurs, j'ai été très surprise, lors d'une rencontre à laquelle j'ai assisté entre l'association des maires ruraux de France et le Premier ministre, d'entendre celle-ci regretter que l'agence ne soit pas orientée vers les communes. Je souhaite tordre immédiatement le cou à cette idée. L'Agence nationale de cohésion des territoires sera destinée à apporter son soutien et son appui y compris aux communes. Évidemment, toutes les communes font aujourd'hui partie d'intercommunalités, et donc les réflexions se font sur un périmètre plus large.

L'aide de l'État apportée aux territoires est évidemment financière - et je reviendrai sur les crédits concernant la cohésion des territoire. L'aide financière ne se limite pas à cette mission budgétaire, puisqu'il y a également la mission « relations avec les collectivités territoriales » qui comporte la DGF. Il faut également intégrer le financement d'investissements. Mais au-delà de ces aspects financiers, se trouvent surtout les capacités techniques d'ingénierie pour concrétiser les projets. On entend souvent les élus dire qu'ils manquent de capacités techniques et d'ingénierie. L'agence pourra ainsi mobiliser les ressources dont disposent l'État et ses opérateurs, au profit de ceux qui portent localement des projets. Je vais illustrer mes propos par un exemple concret : la couverture mobile et numérique. Vous le savez, il existe encore un nombre important de zones blanches, à la fois en téléphonie mobile et pourl'accès à internet. L'État a investi près de 3,3 milliards d'euros pour les réseaux internet fixe et plus de 3 milliards d'euros sur la téléphonie mobile. Le gouvernement est particulièrement mobilisé pour accélérer l'arrivée d'internet à très haut débit. Dans cette politique publique, nous travaillons en partenariat total avec les collectivités territoriales. Ce sont par exemple les collectivités territoriales qui choisissent les sites dans lesquels les pylônes seront installés en priorité. C'est cette méthode que nous souhaitons déployer dans tous les domaines à travers l'agence. Il s'agit de mobiliser davantage les moyens de l'État et de ses opérateurs en partant des besoins des territoires et en travaillant main dans la main avec les collectivités territoriales.

Il s'agit bien sûr d'une approche nouvelle, pragmatique, à partir des besoins du terrain, pour construire des réponses adaptées. Cela se traduit par une aide sur mesure - il ne s'agit pas de proposer un kit qui devrait s'appliquer partout, mais au contraire une boite à outils, s'adaptant aux différents territoires.

Nous avons souhaité qu'il y ait pour les élus locaux un point de contact unique - j'ai beaucoup insisté sur ce point dans mes anciennes fonctions, lorsque j'étais ministre auprès du ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb.

Le délégué territorial de l'agence sera le préfet.. Cela répond à une volonté importante de simplification, pour ne pas créer un nouveau « machin » ce que les élus d'ailleurs ne veulent pas et m'ont dit de manière explicite.

En ce qui concerne le périmètre de l'agence, s'il est essentiel, à court terme, de ne pas entraver son fonctionnement par des débats complexes, le gouvernement ne pourra pas être favorable à des amendements qui réduiraient son périmètre tel qu'il est prévu par le texte.

En ce qui concerne la mission budgétaire « Cohésion des territoires », il s'agit de l'une des deux missions dont dispose mon ministère dans la conduite de ses politiques publiques à destination des territoires. Elles mobilisent conjointement 84 milliards d'euros en 2019 dont 48 milliards d'euros pour la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et 36 milliards d'euros pour la mission « Cohésion des territoires ».

Le budget dédié à la coordination de la politique d'aménagement du territoire est porté par le programme 112, au sein de la mission « Cohésion des territoires ». En 2019, le projet de loi de finances prévoit 201,7 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une progression de 3,8 % par rapport à 2018, et 243,1 millions d'euros en crédits de paiement, soit une diminution de 4 % par rapport à l'année dernière. En matière d'aménagement du territoire, l'État doit accompagner davantage les projets des collectivités territoriales pleinement compétentes dans ce domaine. Nous travaillons en partenariat avec les collectivités territoriales, avec trois principes : la subsidiarité, la modularité et la déconcentration.

La subsidiarité signifie que l'État doit conduire une action pertinente là où doit s'exprimer la solidarité nationale - par exemple dans le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, ou encore en Creuse. La modularité est essentielle car l'intervention de l'État, pour être efficiente, doit s'adapter aux spécificités et aux enjeux de chaque territoire. Ce ne sont pas les mêmes moyens, ni les mêmes recettes que l'on applique sur tout le territoire. Enfin, la déconcentration est également fondamentale car c'est au plus près du terrain que ce soutien de l'État peut s'exprimer.

Le programme 112 porte plusieurs dispositifs qui vont permettre en 2019 de garantir la poursuite des politiques partenariales d'aménagement et de cohésion des territoires. Je pense tout d'abord au plan « action coeur de ville », qui vise à répondre au constat de la perte d'attractivité d'un grand nombre de centres-villes, de petites et moyennes villes. Ces territoires qui se sentent délaissés et qui se dévitalisent nécessitent une action spécifique. Mon prédécesseur a mis en place cette « action coeur de ville » qui a pour objectif de redynamiser, d'offrir aux habitants des villes moyennes des conditions de vie plus performantes. C'est notre mission d'aménagement du territoire. Elle vise aussi une approche intercommunale pour favoriser le maintien ou l'implantation d'activités en coeur de ville, et améliorer les conditions de vie. 222 villes moyennes ont été définies comme « pôles d'attractivité ». C'est un programme ambitieux, de plus de 5 milliards d'euros, en lien avec trois partenaires : la Caisse des dépôts et consignations, Action Logement et l'Agence nationale de l'habitat (ANAH). Je suppose qu'un certain nombre d'entre vous ont eu, dans leur département, des villes choisies dans le cadre de ce programme.

Le deuxième volet d'action concerne le fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), doté de crédits en hausse en 2019. Il constitue un levier de financement important des partenariats avec les collectivités. Le projet de loi de finances prévoit 166 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit 13 millions d'euros en plus que l'année dernière, et 161 millions d'euros en crédits de paiement, soit 14 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2018. Les crédits alloués aux contrats de plan État-régions (CPER) progressent en 2019, notamment pour financer l'intégration de contrats spécifiques : 129,8 millions d'euros en autorisations d'engagement et 113 millions d'euros en crédits de paiement, ce qui constitueaussi une augmentation, respectivement de 8 et 11 millions d'euros. C'est un outil de dialogue au niveau régional entre l'État et les collectivités territoriales. Le volet territorial de ces CPER, financé par le fonds national d'aménagement et de développement du territoire, permet le soutien de nombreux projets et notamment les centres bourgs, mais aussi la rénovation des quartiers prioritaires de la politique de la ville, ou l'accompagnement des territoires à forts enjeux. En 2019, l'accent sera mis notamment sur les territoires dont les enjeux ont été confirmés par des contrats particuliers : le bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais, le Calaisis ou encore Châlons-en-Champagne, qui permettront de renforcer ces territoires. Par ailleurs, 9 nouveaux contrats de convergence en outre-mer vont voir le jour.

Enfin, ces crédits vont permettre de poursuivre le développement des maisons de services au public. 15,7 millions d'euros sont programmés en autorisations d'engagement, soit une augmentation de 57 % par rapport à 2018. Ces maisons ont connu un franc succès avec 1 350 créations. Je n'oublie pas que nous le devons aussi à notre partenaire La Poste.

Nous devons avancer sur la question de l'inclusion numérique pour permettre à tous nos concitoyens la maîtrise des nouveaux usages. Je suis allée la semaine dernière en Ardèche et j'ai pu voir concrètement, dans un département moteur sur le numérique, des exemples de nouveaux usages du numérique. Ainsi, des systèmes de télémédecine ont été mis en place entre l'hôpital et des maisons de retraite.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ . - Tout à l'heure, je présenterai mon rapport sur la proposition de loi de notre collègue Jean-Claude Requier, que je salue. Beaucoup de gens attendent cette Agence de cohésion nationale des territoires, notamment dans les territoires les plus fragiles. La grande déception serait - si vous me permettez cette expression - que la montagne accouche d'une souris. Je crois que l'efficacité de cette agence va reposer sur son organisation à la fois au niveau national et territorial. Nous ferons des propositions à travers des amendements. Je sais que l'on ne partage pas les mêmes vues sur la gouvernance et l'organisation de l'agence. Pour moi, il est extrêmement important que cette agence montre une très grande efficacité. Je suis toutefois inquiet lorsque je vois que dans le projet de loi de finances pour 2019, les crédits diminuent au moment même où l'agence, qui se veut être un outil supplémentaire, complémentaire, est créée. Certes, l'essentiel de son action se fera à partir de 2020, mais je suis inquiet sur la façon dont les choses sont préfigurées pour 2019. Nous aurons le temps de revenir sur ces différents points, lors de l'examen du rapport et des amendements.

En ce qui concerne le projet de loi de finances pour 2019, je constate que l'érosion du programme 112 géré par le Commissariat général à l'égalité des territoires se poursuit. 242 millions d'euros ont été accordés en 2018 ; en 2019 les crédits sont en baisse de 10 millions d'euros par rapport à 2018. Ce programme regroupe des dépenses fiscales importantes à hauteur de 450 millions d'euros ; les dépenses de personnel et de fonctionnement du Commissariat général pour un montant de 20 millions d'euros ; les dépenses d'intervention à destination des entreprises, la prime d'aménagement du territoire, les contrats État-régions.

Le programme 162 « Interventions territoriales de l'État », rattaché au Premier ministre est stable avec 25 millions d'euros en crédits de paiement demandés pour 2019 contre 27 millions d'euros en 2018. La question de son rattachement au ministère de la cohésion des territoires devrait être posée, afin de montrer qu'il y a véritablement une volonté de coordination des politiques publiques liées à l'aménagement du territoire.

Les crédits du programme 157, consacré à la politique de la ville et également géré par le Commissariat général à l'égalité des territoires, sont pour leurs parts en forte hausse : 85 millions d'euros supplémentaires sont accordés en crédits de paiement et plus de 200 millions en autorisations d'engagement. Cela n'est pas pour rassurer sur l'attention portée aux territoires ruraux et périurbains, qui sont également exposés à de multiples fractures.

Dans ces conditions, trois séries de questions s'imposent. Jugez-vous cette évolution des crédits à disposition du Commissariat général à l'égalité des territoires compatible avec l'ambition d'une Agence nationale de la cohésion des territoires ? Quand les conséquences financières de la création de l'agence seront-elles tirées ? Dans le projet de loi de finances pour 2020 ? Faut-il s'attendre à une évolution de l'architecture budgétaire ?

Par ailleurs, pouvez-vous faire le point sur la situation du fonds national d'aménagement du territoire ? La lisibilité de ses interventions est faible, entre le soutien aux contrats de plan État-régions et d'autres actions d'attractivité et de soutien aux entreprises et aux collectivités.

Enfin, que deviendra le programme 112 ? Est-ce l'agence qui affectera des crédits aux contrats de plan État-régions ? En ce qui concerne le programme 147, comment sera-t-il réparti entre l'Agence nationale de la cohésion des territoires et l'ANRU par exemple ?

Mme Jacqueline Gourault ministre . - En ce qui concerne les ressources dont disposera l'agence, l'article 6 de la proposition de loi précise qu'elle bénéficiera de subventions de l'État ou d'autres personnes publiques ou privées, de financements participatifs, de crédits apportés par les entreprises aux fondations territoriales au titre de leur engagement en faveur de leur responsabilité territoriale, des produits des contrats et conventions, des revenus des biens meubles et immeubles, du produit des aliénations et de toutes recettes autorisées par la loi et le règlement. Votre rapporteur a souhaité, par un amendement, clarifier ces ressources, et le gouvernement y est favorable. En ce qui concerne les moyens d'intervention de l'Agence nationale de cohésion des territoires, ils seront constitués par les moyens et ressources des opérateurs intégrés : le Commissariat général à l'égalité des territoires, l'Etablissement public d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, l'Agence du numérique. La deuxième catégorie de ressources et moyens sera fixée par convention avec l'ANRU, l'ADEME, le CEREMA. La troisième catégorie des ressources sont les subventions de l'État, définies en loi de finances - la DETR notamment - et qui seront à la main des préfets. Il y aura en outre la mobilisation des fonds de la Banque des territoires : d'ici 2022, 5 milliards d'euros en fonds propres seront utilisables, en plus des prêts importants sur fonds d'épargne. S'ajoutent les apports de personnes privées, de fondations, et le financement participatif.

Je sais que certains s'interrogent sur une attribution intégrale des programmes 112 et 147 à la future agence. Cela ne semble pas être la voie à privilégier pour deux raisons. Tout d'abord, je considère que les programmes budgétaires doivent continuer à être portés par les ministres, les administrations centrales, qui en assument la responsabilité directe avec le Parlement. En outre, le ministère de la cohésion territoriale et des relations avec les collectivités territoriales continuera à disposer d'une administration centrale, avec une partie du Commissariat général à l'égalité des territoires, et devra disposer de crédits pour fonctionner.

Je tiens également à dissiper devant vous tout malentendu. Comme vous le savez, les crédits 112 et 147 sont très fortement déconcentrés au niveau des préfets. Dès lors que ces derniers seront les délégués territoriaux de l'Agence nationale de cohésion des territoires, les crédits des programmes 112 et 147 seront mobilisés par l'agence au profit des projets portés par les collectivités territoriales. Ce qui compte, avant tout, c'est que les crédits soient affectés aux projets sur les territoires. Je ne veux pas recréer une usine à gaz.

Les conséquences financières de la création de l'Agence nationale de cohésion des territoires pourront être abordées dans le cadre d'un projet de loi de finances rectificative ou, à défaut, dans le projet de loi de finances pour 2020. Mais cela n'empêchera pas l'agence de fonctionner dès 2019.

En ce qui concerne le programme 112 en 2019, le gouvernement indique une augmentation, les parlementaires une baisse.

M. Hervé Maurey , président . - C'est le « parler vrai » que je mentionnais tout à l'heure.

Mme Jacqueline Gourault, ministre . - En 2019, le budget du programme est en augmentation en autorisations d'engagement de 4 % par rapport à 2018, et en baisse de 4 % en crédits de paiement. Cette baisse résulte principalement des crédits complémentaires accordés aux contrats de plan État-régions et aux maisons de services au public. L'essentiel des crédits du programme - 90 % en autorisations d'engagement et 72 % en crédits de paiement - relève du fonds national d'aménagement et de développement du territoire, dont les crédits progressent en 2019 de 8 % en autorisations d'engagement, et représentent 161 millions d'euros en crédits de paiement.

M. Hervé Maurey , président . - Pouvez-vous préciser un point ? Vous avez dit, il me semble, que la DETR alimentera l'Agence nationale de cohésion des territoires.

Mme Jacqueline Gourault, ministre . - Les deux tiers de la DETR alimentent des projets locaux. En revanche, la DETR ne financera pas l'Agence nationale de cohésion des territoires en tant que telle. La DETR sera utilisée uniquement pour accompagner les projets. Le préfet dispose déjà de ces crédits déconcentrés et la DETR aidera les projets sur les territoires, mais pas le fonctionnement de l'agence.

M. Patrick Chaize . - Pour moi, il n'y a pas de débat sur l'utilité de l'Agence nationale de cohésion des territoires. Il y a des exemples similaires très encourageants. Je pense notamment à l'Agence du numérique, dont il faut saluer le travail. C'est justement sur cette agence que je veux axer ma question. Le précédent gouvernement avait trois secrétaires d'État s'intéressant à la question du numérique : un auprès du Premier ministre, un auprès du ministre chargé de la cohésion des territoires, et un auprès de Bercy. On aurait pu penser qu'au moment du remaniement, les choses allaient peut-être se préciser, et j'ai besoin de votre éclairage sur ce point. Le secrétaire d'État qui était auprès du Premier ministre est parti à Bercy en indiquant que, dans les faits, les moyens étaient à Bercy, et que, dès lors, il était intéressant de s'en rapprocher. Or, aujourd'hui, j'entends que l'Agence du numérique va revenir, dans le cadre de votre projet, auprès du ministère de la cohésion des territoires. Je ne remets pas en cause le fait que le numérique soit un outil d'aménagement du territoire. Mais ce qui m'inquiète c'est, alors que Julien Denormandie porte le sujet du numérique dans votre ministère, le fait que l'Agence nationale de cohésion des territoires serait portée plutôt par Sébastien Lecornu. J'avoue que je m'y perds un peu.

Par ailleurs, vous avez évoqué dans vos propos l'inclusion numérique. Vous avez indiqué qu'il s'agit d'un sujet relevant de votre ministère. Or, à mon sens, le secrétaire d'État au numérique, est toujours à Bercy, en l'occurrence M. Mounir Mahjoubi.

Enfin, vous avez évoqué les questions financières, en indiquant que 3,3 milliards d'euros ont été injectés sur le numérique, et notamment sur l'aménagement du territoire. Cette somme a été consommée, et l'aménagement du territoire n'est pas terminé. Il manque une « rallonge » financière. Je me bats depuis plusieurs mois pour dénoncer le fait que la plateforme qui permettait aux collectivités de déposer des dossiers a été fermée de façon unilatérale, et j'allais dire un peu en catimini. Quelles sont les perspectives sur ce sujet ?

M. Hervé Maurey , président . - Madame la Ministre, nous solliciterons auprès de vous une audition spécifique sur le numérique. En effet, nous devions auditionner Julien Denormandie le jour où il a changé de portefeuille. Nous avions convenu avec lui de faire régulièrement le point sur la couverture numérique, fixe et mobile. Beaucoup de questions sont en attente de réponses sur ce sujet et on ne pourra pas les traiter aujourd'hui.

Mme Jacqueline Gourault, ministre . - L'Agence nationale de cohésion des territoires devrait être rattachée au ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités locales. C'est donc moi qui la pilote. Bien évidemment, j'ai à mes côtés un ministre qui sera aussi amené à traiter de ce sujet. Quant à Julien Denormandie, il s'est beaucoup intéressé à ce sujet, qu'il maîtrise d'ailleurs bien. Tout ce qui relève de la conceptualisation, de la technique, de la technologie du numérique relève de Mounir Mahjoubi. Mais, à partir du moment où on passe dans l'exécution de projets et programmes locaux, il nous semble évident que cela ressort de la compétence de mon ministère.

M. Jean-François Longeot . - Madame la Ministre, je me félicite de votre nomination à la tête de ce ministère. Les réflexions que je vais présenter sont celles du groupe centriste. À quoi servira l'Agence nationale de cohésion des territoires et surtout pourquoi le choix a été fait, pour son périmètre, de n'englober qu'une partie de l'Agence du numérique ? La même question se pose pour le Commissariat général à l'égalité des territoires. En outre, pourquoi ne pas englober également les questions environnementales, à travers l'Agence nationale de la biodiversité ?

En ce qui concerne la gouvernance territoriale, quel sera l'échelon d'intervention de l'agence : intercommunal, métropolitain, départemental, régional ?

En matière d'ingénierie, vous l'avez évoquée, un certain nombre de territoires ont déjà mis en place une ingénierie, qui peut émaner des départements, ou des intercommunalités, . Est-ce qu'il y aura alors un doublon ? L'État va-t-il prendre en charge l'ingénierie ?

Enfin, le financement sera-t-il constitué par l'addition des financements existants ou y a-t-il des possibilités de financements supplémentaires ? Quelle sera la territorialisation du financement des projets ? N'y a-t-il pas un risque de recentralisation régionale ? Comment seront désignés les élus appelés à participer au conseil d'administration ? La création de l'agence se fera-t-elle à nombre d'emplois publics constants ?

Enfin, les crédits du FISAC (Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce) seront en extinction dans le prochain projet de loi de finances. L'Agence nationale de la cohésion des territoires va-t-elle reprendre les anciens financements liés aux anciennes missions du FISAC ?

Mme Nelly Tocqueville . - Je me réjouis de la création de cette agence, qui veut répondre à une demande des élus locaux. Comme le disait le Président Maurey, la crise des vocations, telle qu'elle se présente aujourd'hui, nous inquiète, en particulier dans les territoires les plus ruraux.

Ma question porte sur les modalités de représentation des élus locaux dans cette instance qui, à ce jour, semblent peu définies. Vous avez dit que la porte d'entrée serait le préfet pour simplifier les procédures, en tant que délégué territorial de l'agence. Est-il prévu de permettre une participation directe des élus au conseil d'administration de l'agence ? Si tel est le cas, quelles sont les modalités envisagées ? Je pense notamment à une participation des communes les plus petites. S'oriente-t-on plutôt vers la création d'un conseil stratégique dans lesquels les élus seraient majoritaires, et dans quelle proportion ?

M. Christophe Priou . - Je sortirai du texte pour parler du contexte. Nous sommes à trois semaines du Congrès des maires. Je pense que vous avez bénéficié, en je m'en réjouis, d'un certain contexte, pour votre nomination et la mise en place d'un portefeuille de plein droit du ministère des territoires.

Il se trouve qu'aujourd'hui, il y a une campagne insidieuse et odieuse peut-être initiée à partir du centre mondial de l'intelligence politique française située à Bercy sous l'intitulé « balance ton maire » qui a scandalisé les élus locaux. J'étais dernièrement à Châteaubriant, où le maire s'est retrouvé sur cette fameuse liste, pour avoir augmenté la fiscalité d'un pourcent cette année, alors qu'en dix-huit années de mandat, il avait baissé cette dernière de 22 %. Je crois qu'il serait de bon goût de mettre fin à cette campagne cynique et populiste qui avait sciemment pour but de faire l'amalgame avec le hashtag « balance ton porc ». Je rappelle que, par rapport à ce dernier message relayé de manière internationale, si les faits dénoncés conduisent à la reconnaissance d'une qualification de viol, cette dernière, en droit français est passible de la cour d'assises. Je pense que votre ministère pourrait prendre une initiative heureuse du type « touche pas à mon maire ». Comme le disait mon collègue, nous avons eu du mal en 2014 à trouver des candidats, y compris pour composer une liste unique. En 2020, nous aurons des communes où il n'y aura pas de liste. Beaucoup de collègues le disent : en milieu rural, nous savons que les subventions et les dotations, c'est de l'argent public et qu'il n'y en a plus beaucoup. Mais le respect et la considération ne coûtent rien, et ils n'ont pas de prix. C'est ce respect et cette considération que les élus demandent aujourd'hui. En conclusion, Madame la Ministre, à l'aube du Congrès des maires, s'il ne faut pas insulter l'avenir, il ne faut pas non plus négliger le présent.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Comme mes collègues, je me félicite de la création de cette agence. Vous avez dit que le gouvernement avait décidé de la créer. Dès lors, pourquoi ne pas avoir déposé un projet de loi, qui nous aurait évité un rétropédalage de dernier minute pour prendre ce compte les recommandations de l'avis du Conseil d'État, qui nous a été transmis très tardivement ?

Le rapport de Serge Morvan, qui vous accompagne, est excellent. Il part du principe qu'il faut absolument se doter d'un contrat unique, le contrat de cohésion territoriale. Il est vrai qu'à l'heure actuelle, les collectivités sont confrontées à de multiples contrats, issus du volet territorial des CPER, ou des contrats de ruralité, des contrats de territoire,. sans oublier bien évidemment les différents appels à projets. Dans la prochaine génération de CPER, va-t-on promouvoir ce contrat unique de cohésion territoriale, permettant de clarifier les choses ?

Ma troisième question porte sur l'articulation locale. Nous savons que nos sous-préfets et nos préfets ont de multiples compétences. Nous avions à une certaine époque des sous-préfets développeurs. Quelle articulation va se mettre en place localement afin d'assurer une fluidité ?

Enfin, pouvez-vous nous confirmer que l'agence ne facturera pas ses prestations ?

M. Éric Gold . - Le groupe RDSE a construit cette proposition de loi afin de répondre aux attentes des élus locaux et de lutter contre la fracture territoriale. Il y a une volonté d'instaurer une logique de guichet unique. Un des points essentiels de ce texte est l'intégration de l'Agence du numérique dans l'Agence nationale de cohésion des territoires. Je souhaite vous entendre sur ce point, et notamment sur le délai de cette intégration.

Mme Françoise Cartron . - Cette agence est désirée, attendue par tous les élus. Mais vous connaissez aussi le climat ambiant dans nos collectivités territoriales. Je crois qu'il y a, pour le gouvernement, un pari à réussir cette agence, face à des élus qui sont aujourd'hui en grande méfiance par rapport à tout ce qui peut venir de l'État.

Cette agence aura des rôles différents en fonction de ce qui se passe déjà sur les territoires. Dans un territoire où un département a déjà mis en place des outils d'accompagnement, comment va se faire l'articulation avec l'agence, le préfet, délégué de cette dernière sur le terrain, et l'exécutif du département qui s'est déjà beaucoup investi ? Il pourrait avoir l'impression, ou bien qu'il y a une volonté de le remettre au pas par le biais du préfet, ou bien que cette action est inutile. Vous savez tout comme moi les polémiques qui peuvent naître rapidement de telles ambiguïtés. J'aimerais bien avoir une clarification, afin que les élus puissent, en pleine confiance, se tourner vers cette agence.

M. Guillaume Gontard . - Je ne vais pas revenir sur les besoins d'ingénierie. Il s'agit d'une vraie attente des élus locaux, qui s'est exprimée lors de plusieurs précédents Congrès des maires. Les élus portent l'innovation, la transition énergétique et écologique. Ils ont besoin de cette ingénierie et de cet accompagnement. J'ai donc plutôt un a priori favorable sur cette Agence nationale de la cohésion des territoires. Toutefois, j'ai besoin d'avoir des précisions sur son financement pour m'assurer qu'elle ne soit pas une coquille vide. Il y a eu plusieurs annonces, en particuliersur près de 3 milliards d'euros qui seraient affectés à cette agence. Le rapport de Serge Morvan évoque la somme de 5 milliards d'euros d'ici 2022. Vous avez également évoqué la Caisse des dépôts.

En ce qui concerne les orientations de cette agence, le rapport de Serge Morvan parle de cette dernière comme d'une entreprise au service de ses clients. Il n'est pas ou peu question d'habitants ou d'élus. Ma question rejoint un point évoqué par un collègue : puisqu'on a des clients, le service proposé à ces derniers est-il payant ? Je regrette que l'on ait oublié les mots d'égalité et d'équité au profit du mot « cohésion ». Enfin, quelles sont les garanties pour que cette agence s'adresse directement aux territoires ruraux les plus fragiles ? Comment la répartition va-t-elle se faire entre la politique de la ville et les territoires ruraux ? Je rejoins également mes collègues sur les questions de gouvernance et de représentation des élus locaux.

M. Jean-Claude Luche . - Je vais essayer de refaire un peu d'histoire. J'ai connu, comme certains, la période à laquelle l'État via la direction départementale de l'équipement (DDE) et la direction départementale de l'agriculture et de la forêt (DDAF) accompagnait les collectivités territoriales. Il y a eu un certain nombre de fusions de services qui s'appellent désormais les directions départementales des territoires (DDT). L'État nous a alors expliqué qu'il ne pouvait plus assumer un certain nombre de prestations pour les communes. De ce fait, elles se sont organisées - et les départements se sont également impliqués. Dans mon département, j'ai créé une agence d'ingénierie départementale qui se substitue aux anciens services de l'État. Quels seront les moyens humains de l'Agence nationale de cohésion des territoires localement ? Si le périmètre d'action est le département, je constate que les préfets répètent régulièrement qu'ils sont confrontés à une réduction des effectifs - et je crois que c'est également la volonté de ce gouvernement. Je n'ai pas d'a priori positif ou négatif sur cette agence, mais je manque de visibilité sur les moyens d'action - au-delà des moyens financiers - qui lui seront attribués.

M. Guillaume Chevrollier . - Les élus, les collectivités territoriales ont besoin d'un soutien de l'État. Les élus attendent du concret, pour les problèmes de téléphonie mobile et de numérique, pour les collectivités qui ne rentrent pas dans le dispositif « coeur de ville », mais qui ont quand même envie de revitaliser leur centre-bourg,... Quels moyens financiers sont prévus pour mettre en oeuvre tous ces projets ? Comme l'ont dit plusieurs de mes collègues, la problématique est de venir en aide aux petites collectivités. Comment cette agence entrera en contact avec eux, pour apporter un concours à des élus parfois démobilisés ?

Au-delà de ce texte, vous l'avez dit, dans nos territoires, nous avons des élus pleins d'énergie, motivés pour valoriser leur territoire. Mais pourtant, il y a un certain malaise qui s'exprime. Comment revitaliser et redonner goût à l'engagement citoyen ? J'imagine que vous avez pris connaissance des propositions de la délégation aux collectivités territoriales du Sénat visant à faciliter l'engagement et l'exercice du mandat local. Quel regard portez-vous sur ces propositions ?

M. Didier Mandelli . - Cette agence s'inscrit bien sûr, et cela a été évoqué par mes collègues, dans le droit fil de ce que souhaitent les élus. En réalité, les collectivités territoriales n'attendent qu'un guichet unique, un interlocuteur pour répondre aux différentes problématiques.

Nous avons reçu le commissaire à l'égalité des territoires. Je fais partie de ceux qui pensent que l'on aurait pu élargir les missions de ce Commissariat général. Il me semble que cela aurait été plus sain, plutôt que de créer une nouvelle structure. Je rejoins également mon collègue Guillaume Gontard sur la disparition de l'égalité au profit de la cohésion des territoires. Dans votre propos introductif, vous n'avez pas évoqué ce lien avec le Commissariat général à l'égalité des territoires qui a d'ores-et-déjà un grand nombre de missions. Comment cela va-t-il s'articuler ? On voit bien qu'il y a un redéploiement des crédits et le passage d'un budget à un autre. Mais est-ce que les budgets seront plus conséquents qu'aujourd'hui, ou bien allons-nous assister à la création, pour reprendre votre expression, d'un nouveau « machin » qui ne sera pas utile aux collectivités territoriales ?

M. Charles Revet . - Pourquoi créer une nouvelle agence et pour quoi faire ? Jusque dans les années 1980, il y avait des grandes agences nationales, mais en petit nombre. À une question écrite qui lui a été posée, le Premier ministre a indiqué dans les années 2010 qu'il y avait à ce moment-là environ 60 agences qui employaient près de 500 000 personnes. Aujourd'hui, ce sont près d'un million de personnes qui travaillent pour ces dernières, dont le nombre a fortement augmenté.

Vous avez indiqué, Madame la Ministre, que le délégué territorial serait le préfet. Ce qui compte pour les élus, c'est de s'avoir à qui ils doivent s'adresser. Cela me va bien que le préfet soit chargé de la coordination pour cette nouvelle agence. Mais, lorsqu'un maire portera un dossier au préfet, il aura alors une double casquette. En effet, ce qui est demandé à l'agence n'est pas la même chose que ce que le maire va demander aux services de l'État. Comment le préfet fera-t-il pour arbitrer ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre . - J'ai l'impression qu'il y a un certain nombre de malentendus dans vos questions. Je vais donc préciser certains points.

Il s'agit d'une Agence nationale de cohésion des territoires. Il n'y aura pas d'agences locales. Nous créons un outil de coordination de l'ingénierie. Ce sont les préfets qui, localement, seront les représentants de l'agence, selon les besoins exprimés par les territoires. Le rôle du préfet sera d'aller prendredans l'ingénierie existante ici et là, afin de coordonner les besoins d'un projet d'un territoire.

En ce qui concerne le périmètre de l'agence, le Commissariat général à l'égalité des territoires sera la base de la nouvelle agence, ainsi que l'EPARECA - avec ses 43 salariés - afin de redynamiser l'artisanat et le commerce -, l'Agence du numérique avec ses 40 équivalents temps plein, à l'exception de la French Tech qui reste dans le portefeuille de Mounir Mahjoubi. Des conventions seront passées avec l'ANAH, le CEREMA, l'ADEME, mais aussi l'ANRU. Si le projet concerne le logement, il faut faire appel à l'ANRU. Je vais passer la parole à Serge Morvan pour répondre aux questions qui portent sur son rapport, notamment sur l'utilisation des expressions « clients » et « entreprise ».

M. Serge Morvan. - Le fonctionnement actuel, et je me fonde sur mon expérience en tant qu'ancien préfet des Yvelines, n'est pas satisfaisant. Nous n'arrivons pas à coordonner l'action de l'État et de ses opérateurs,qui sont multiples. De ce fait, il y a une multitude d'approches individuelles, dans lesquelles la fonction territorialisée est parfois insuffisamment développée. Vous le savez aussi bien que moi, les élus nous font part du fait qu'il y a trop d'interlocuteurs, un maquis trop important de règles, et une impossibilité de coordonner l'action de tous ces interlocuteurs. Un opérateur ne fonctionne pas comme une administration centrale, et si l'administration centrale assure une tutelle sur les opérateurs sur instruction du ministre, elle n'arrive pas forcément, via cette tutelle, à intervenir sur le mode de fonctionnement des opérateurs. C'est pour cela qu'il faut créer un opérateur nouveau qui coordonne finalement l'action des opérateurs, et qui soit au service des préfets : cette agence nationale, dont le fonctionnement est déconcentré au service des préfets. Les préfets aujourd'hui ne disposent pas des outils ni de la connaissance du fonctionnement des différents opérateurs. On peut le regretter, mais il faut passer par la création d'une nouvelle agence pour arriver à une situation qui fonctionnera mieux, au service des collectivités locales et de leurs projets.

Dans le rapport, les mots « d'approche client » sont utilisés. Il s'agit de montrer et de souligner, avec des termes peut-être un peu discutables, le fait que l'on change de paradigme. Cette agence est au service des élus et des habitants. Les mots « services » et « clients » ne doivent pas être compris au sens premier du terme. Mais dans le langage actuel, l'expression « approche client » est ce qui se rapproche le plus de ce que l'on veut faire. Bien évidemment, le plus important sont les élus porteurs de projets, les habitants qu'ils représentent. Le recours à l'expression « approche client » est utilisé pour signaler qu'il ne faut pas maintenir la verticalité descendante qui existe aujourd'hui. Pour que la verticalité soit vertueuse, il faut qu'elle soit ascendante.

La question de la relation de cette agence avec les services d'ingénierie mis en place par les intercommunalités et les communes a été posée. L'agence est là pour accompagner un élu qui porte un projet, mais qui n'arrive pas à le faire aboutir, pour plusieurs raisons : parce que parfois il manque des moyens pour y arriver, qu'il manque d'ingénierie -mot valise pour indiquer le manque de moyens pour monter des projets -, mais aussi parce qu'il y a une multitude d'interlocuteurs et qu'il manque un interlocuteur bien identifié. Certes, l'ingénierie d'État existe aujourd'hui, c'est le rôle des services de la DDT. Mais cette direction a été touchée par les restructurations récentes. Il est hors de question, me semble-t-il, que l'État puisse se substituer aux ingénieries mises en place localement. Il n'en a ni les moyens, ni la volonté. Je me félicite ainsi qu'il y ait des agences techniques départementales, des agences d'urbanisme. Elles font un travail remarquable. Notre objectif est une mobilisation générale autour des projets, qui est le résultat d'un dialogue entre les porteurs de projets, le préfet et les collectivités territoriales qui peuvent apporter une aide en ingénierie. Ainsi, l'ingénierie mise à disposition est à la fois l'ingénierie d'État, mais aussi celle des collectivités territoriales qui souhaiteront participer au tour de table. Je n'ai pas d'inquiétude sur ce point. Les élus départementaux et les élus régionaux veulent aider leurs territoires. Il s'agit ainsi de le faire en cohérenceavec l'ensemble des services de l'État.

Mme Jacqueline Gourault, ministre . - Je souhaite réaffirmer que le gouvernement veut, par cette agence, répondre à une demande émanant des élus locaux. Je ne veux pas citer d'exemples précis, mais vous en connaissez, il y a des endroits en France, où il y a tout à portée de main, et d'autres dans lesquels il n'y a rien du tout. Cette agence sera ainsi tournée vers les territoires les plus démunis et les plus défavorisés. Si un porteur de projet a déjà tout à portée de main, il n'aura pas besoin de faire appel à l'Agence nationale de cohésion des territoires.

En ce qui concerne les financements, il faut faire la différence entre les financements qui resteront sur l'ensemble des territoires, à travers les dotations classiques que j'ai évoquées tout à l'heure, et la volonté du gouvernement de proposer un soutien aux territoires les plus démunis, les plus en difficulté.

Le FISAC ne relève pas de mon ministère mais de Bercy, qui gère la transition. Mais je tiens à rappeler que le programme « action coeur de ville » mobilise 5 milliards d'euros, et le FISAC 15 millions d'euros de cette enveloppe. Ce programme a donc des ambitions beaucoup plus larges que le FISAC. Le débat parlementaire, j'en suis sûre, va se poursuivre sur ce point.

J'ai condamné dès sa sortie le hashtag « balance ton maire », en disant qu'il s'agissait d'un amalgame douteux et que le gouvernement ne saurait cautionner ce genre de déclarations extrêmement malheureuses.

Vous m'avez interrogée sur les raisons de recourir à une proposition de loi, plutôt qu'un projet de loi. Il y a eu une tentative de faire voter un article d'habilitation à légiférer par ordonnance, qui a échoué. Il me semble que le ministre qui m'a précédée, Jacques Mézard, et qui a mis ce projet sur les rails, souhaitait au fond, que le véhicule législatif soit une proposition de loi. C'est la raison pour laquelle le gouvernement soutient aujourd'hui cette proposition de loi, dans la mesure où elle respecte une certaine philosophie générale.

En matière de gouvernance, il est essentiel que les élus disposent d'une large place, dans la mesure où il s'agit d'une agence au service de leurs projets. Ces dispositions relèvent du pouvoir réglementaire. Mais d'ores-et-déjà, il semble que devraient pouvoir siéger les représentants des ministères principalement concernés par les actions de l'agence - ministère chargé du numérique, ministère de la transition écologique, ministère de la santé. En ce qui concerne la représentation des élus locaux, elle devra bien sûr représenter la diversité des territoires, mais aussi ceux qui ont le plus besoin de cette agence. Nous solliciterons également les parlementaires et les associations d'élus, pour préciser les conditions de désignation de ces représentants. La composition du conseil d'administration doit, bien évidemment être équilibrée, mais elle ne doit pas représenter je ne sais quel rapport de forces entre les territoires et le gouvernement. La coopération doit être naturelle et chacun doit y trouver sa place. Je rappelle également que la Caisse des dépôts, la Banque des territoires ont vocation à participer à ce conseil d'administration.

Nous nous sommes interrogés sur l'intégration du CEREMA. Près de 3 000 agents y travaillent. D'ailleurs, dès que l'on a parlé de l'Agence nationale de cohésion des territoires, il y a eu des manifestations locales, témoignant d'une inquiétude des agents. Le CEREMA dispose de beaucoup de ressources. Mais pour des raisons de lourdeur, il me paraît plus intéressant de passer une convention avec ce dernier, plutôt que de l'intégrer dans l'agence. Je crois également que le CEREMA doit changer de culture. J'ai été longtemps élue locale, et je connais le CEREMA parce qu'ils sont intervenus à Blois. Mais si l'on fait un micro-trottoir parmi les élus, je ne suis pas sûre qu'il soit connu par la majorité d'entre eux. Cette agence travaille essentiellement avec l'État et n'a pas tout à fait pris en compte les évolutions récentes entraînées par les dernières lois de décentralisation. Le CEREMA doit devenir un outil au service des collectivités territoriales. Il dispose de compétences de haut niveau, de très bons techniciens. Certains étaient auparavant dans les DDE. Le CEREMA doit être utilisé pour telle ou telle compétence précise, sur des dossiers.

Le gouvernement souhaite que l'Agence nationale de cohésion des territoires soit rapidement opérationnelle. Nous envisageons de la créer sur les bases que je vous ai exposées. Bien évidemment, tout est perfectible et si des évolutions sont nécessaires, nous les ferons.

Vous m'avez interrogée sur les moyens de garantir que cette agence profitera aux territoires les plus fragiles et aux territoires ruraux. C'est mon rôle, en tant que ministre, de m'en assurer. L'élu qui a besoin d'aide va aller voir le préfet. Je me suis battue pour que ce soit le préfet qui représente l'agence dans les territoires, car vous le savez, tous les acteurs locaux sont constamment en contact avec le préfet. Le préfet est donc une porte d'entrée sur de très nombreux dossiers. À titre personnel, j'ai regretté par le passé, la création d'agences régionales qui étaient éloignées des territoires, et qui devenaient des agences vivant sur elles-mêmes, sans aucune relation - si j'ose dire - avec les préfets de département. Ici, on remet un outil sur les territoires, pour être au plus près des élus.

Mme Angèle Préville . - C'est une intention louable de créer cette Agence nationale de cohésion des territoires. Mais je me pose un certain nombre de questions. Comment va-t-elle s'articuler avec ce qui existe déjà et fonctionne bien ? Dans mon département du Lot, il existe un syndicat d'aménagement du territoire, qui nécessite pour pouvoir faire appel à son ingénierie une simple adhésion. Tout se passe très bien, nous mettons déjà en place cette verticalité ascendante vertueuse que vous avez mentionnée tout à l'heure. Je rejoins ainsi le questionnement de plusieurs de mes collègues : comment cette nouvelle agence va-t-elle s'articuler avec les services qui existent déjà ?

Par ailleurs, vous n'avez pas évoqué les fonds européens. Je souhaite ainsi avoir des précisions sur les fonds européens qui seront mis en oeuvre dans le cadre de cette agence.

M. Alain Fouché . - Madame la Ministre, nous avons confiance en vous, car vous n'êtes pas une technocrate, mais quelqu'un du terrain qui connaît parfaitement la ruralité. Cela me paraît très important pour une ministre chargée de mettre en place cette agence.

J'ai présidé pendant une vingtaine d'années le département de la Vienne et nous avons mis en place une agence technique départementale employant actuellement une quarantaine de personnes. Elle a remplacé la DDAF et la DDE dans l'aide apportée aux travaux des communes. Tout comme mes collègues, je m'interroge sur l'articulation entre cette nouvelle agence et les structures existantes.

Par ailleurs, je pense que ce seront, dans les faits, les personnels du préfet qui interviendront. Le préfet s'entourera de « sachants », comme on dit aujourd'hui. Il travaillera avec le porteur de projet, en liaison avec le département, les collectivités et les parlementaires.

Enfin, vous parliez tout à l'heure des crédits. Or, je m'inquiète de ce que le projet de budget pour 2019 prévoit pour le fonds de péréquation de la taxe professionnelle, notamment en ce qui concerne les taxes sur les réseaux et les centrales nucléaires. Cela avait été figé définitivement en 2009. Cette année on va connaître une baisse de 2%, qui va se poursuivre pendant un certain nombre d'années, en lien avec le démantèlement des centrales nucléaires. Certaines communes risquent ainsi de voir les subventions accordées au titre de ce fonds de péréquation diminuer.

M. Benoît Huré . - Madame la Ministre, je me réjouis de votre nomination. Les défis auxquels vous êtes confrontés sont grands, et votre savoir-faire et votre expérience de terrain sont autant de chances pour réussir. Il faut réussir maintenant, car la défiance de nos concitoyens vis-à-vis de tous ceux qui exercent une part de l'action publique est très grande. Nous devons réduire - je dirais même colmater - les différentes fractures qui se sont installées entre les territoires et les catégories sociales. Il est urgent de mettre fin à ce sentiment d'abandon - sans doute excessif - qui est le terreau de tous les populismes. Nous avons cette responsabilité en ligne de mire. Un constat est là : les écarts de richesse n'ont jamais été aussi grands entre chacun de vos concitoyens, nos catégories sociales, mais aussi entre nos territoires. Ces derniers sont ainsi de 1 à 40 voire à 50. Or, les missions à assumer sont les mêmes. Vous nous avez rassurés en nous disant que l'Agence nationale de cohésion des territoires s'adressera aux territoires qui ont le plus de difficultés. Il faut également donner une plus grande réalité à la péréquation. Cette dernière n'est plus une question d'options. La cohésion de nos territoires passe par la péréquation. Je pense que l'absence de volonté des départements de mettre en place une péréquation entre eux leur a porté préjudice.

En tant qu'élus nationaux, nous sommes certes là pour relayer les inquiétudes de nos concitoyens, mais également pour leurs expliquer les réformes qui doivent être engagées. Aujourd'hui, il n'y a plus d'argent public, et il faut faire mieux avec moins de moyens. La transition sera difficile. Vous parliez ce matin sur France 2 de la réforme de la fiscalité locale. Cela fait 30 ans que j'entends parler de cette réforme : la taxe d'habitation est la fiscalité la plus injuste qui existe. Mais, dès que l'on met le métier sur l'ouvrage, tout le monde prend peur. Or, c'est justement à ce moment-là qu'il faut donner des perspectives. Je crois que si vous affichez une volonté d'une plus grande équité entre les territoires, les citoyens pourraient plus facilement avoir confiance.

Enfin, si nous voulons faire réussir notre pays dans ce moment difficile, il faudra associer nos concitoyens, pour que ces derniers soient un peu plus acteurs de l'action publique, et moins spectateurs. Cela passe par une plus grande proximité.

M. Jacques Bigot. - J'ai bien compris que la porte d'entrée territoriale de cette agence sera le préfet du département. Vous avez également expliqué que la déclinaison concrète de celle-ci sera différente en fonction des besoins des territoires. Il y a une inquiétude de certains élus locaux qui voient se profiler une recentralisation rampante. Je crois que les élus attendent un guichet unique, à leur écoute et à leur service. Il ne faudrait pas que l'agence ou ses succursales départementales deviennent un mille-feuilles d'agences et de bureaux d'études.

Il a été dit lors des interventions que les questions du périmètre et de la gouvernance étaient importantes. L'Agence du numérique a été évoquée, mais il y en a d'autres, comme l'ADEME. Or, l'ADEME ne s'occupe pas uniquement d'aménagement du territoire.Selon quelles modalités sera-t-elle intégrée dans le conseil d'administration ? Enfin, en matière de gouvernance, quelle sera la part des élus et des agences dans l'inter-opérationnalité de l'Agence nationale de cohésion des territoires ? Celle-ci est-elle envisagée comme un outil facilitateur comme le souhaitent les élus, ou bien comme un prescripteur de projets de territoire ? Enfin, quelle est sa plus-value ? Nous sommes encore dans le flou sur ces points, et comme il s'agit d'une proposition de loi, il n'y a eu ni étude d'impact, ni avis du conseil d'État. Certes nos amendements vont enrichir ce texte. Enfin, cette agence disposera-t-elle d'un budget propre ?

M. Hervé Maurey , président . - Je rappelle qu'il y a quand même eu un avis du Conseil d'État, puisque le Président du Sénat a décidé de le saisir. En revanche, il n'y a pas d'étude d'impact.

M. Jean-Marc Boyer . - Ce matin, le mot « territoire » a été prononcé une centaine de fois. Je pense qu'il serait important qu'on ait une définition précise de ce qu'est un territoire dans le cadre de ce projet de loi. Parle-t-on de la commune, de l'intercommunalité, des cantons, des départements, ... ?

L'objectif de cette agence est de faciliter la coordination avec les départements. Par contre, qu'en est-il de la coordination avec les régions, qui sont les gestionnaires des fonds européens, avec les agences régionales de santé, lorsque la question de l'accès au soin est évoquée ? Nous connaissons tous l'indépendance prononcée des agences régionales de santé vis-à-vis des préfets.

Vous avez dit, Madame la Ministre, que cette agence était l'émanation de la volonté des maires et des élus sur le terrain. Ma question paraîtra peut-être un peu provocatrice. Dans le cadre de la répartition de la DETR, en tant que parlementaire, nous participons à une pseudo-représentation. Dans les faits, on ne sert à rien, puisque le préfet décide pratiquement tout seul. Nous sommes simplement convoqués pour donner notre avis sur des subventions dont le montant dépasse 100 000 euros. Sur le terrain, les maires nous posent une question : a-t-on des crédits à allouer à leurs projets ? Or la réserve parlementaire a été supprimée. Certains élus n'ont pas intégré cette donnée. La création de cette Agence nationale de cohésion des territoires ne pourrait-elle pas être l'occasion de revenir sur cette décision, qui permettrait - bien sûr dans le cadre d'une procédure objective et claire - d'avoir un retour du pouvoir de décision et de participation des élus et des parlementaires que nous sommes ?

Mme Marta de Cidrac . - Madame la Ministre, tout comme mes collègues, je vous félicite pour votre nomination. Certains d'entre nous se réjouissent de la création de cette Agence nationale de cohésion des territoires, d'autres sont dubitatifs. J'avoue qu'à titre personnel, je suis plutôt dans le camp des seconds. Un certain nombre de questions vous ont déjà été posées, notamment sur le numérique par notre collègue Patrick Chaize. J'aurais aimé avoir un peu plus d'éclaircissements sur le projet numérique qui pourrait se décliner dans nos territoires. Vous avez dit que l'objectif de cette agence est d'être au plus près des territoires, mais vous avez également indiqué que cette agence était une agence nationale et n'avait pas vocation à se décliner dans les territoires. Pouvez-vous clarifier vos propos ? Enfin, nous avons bien compris que l'agence avait une vocation de coordination. Certains de mes collègues vous ont interrogée sur la gouvernance. Ma question est plus pragmatique : à combien estimez-vous le coût de fonctionnement de cette structure et d'où viendraient les fonds - à moins que vous nous annonciez ce matin que cette structure ne coûtera rien ?

M. Olivier Jacquin . - Madame la Ministre, je souhaite vous féliciter pour votre nomination et salue « l'infirmière en chef de la Macronie ». C'est l'expression qu'a utilisée ce matin Thomas Legrand sur France Inter. Pour moi, cela montre l'attente qui pèse sur vous, et je vous souhaite beaucoup de courage.

En ce qui concerne l'Agence nationale de cohésion des territoires, j'ai beaucoup apprécié le diagnostic effectué par le préfet Serge Morvan dans son rapport. J'ai cru comprendre que cette agence aurait surtout vocation à s'intéresser à des projets complexes du type de l' « action coeur de ville », où il est difficile de réunir de l'ingénierie. Toutefois, je vous entends répéter ce matin, Madame la Ministre, que cette agence a aussi vocation à aller vers les communes les plus fragiles. Je pense que vous créez une attente. Je me demande comment vous allez faire. Je me permets de vous mettre en garde : « qui trop embrasse mal étreint ». Avec quels effectifs allez-vous pouvoir réaliser cette prouesse ? Je signale au passagequ'avec cette réforme, les préfets, qui gèrent déjà la DETR, vont être remis sur un piédestal : non seulement les élus devront être très républicains, mais ils devront être presque aimables à leur égard.

Ma deuxième interrogation porte sur la réforme de la taxe d'habitation. Elle rend nécessaire une refonte de la fiscalité locale - qui a été annoncée et prévue pour 2019. Quelles seront les grandes orientations ? Il serait indispensable, si on fait ce « big bang » de la fiscalité locale, de revoir la répartition de la DGF qui est tellement illisible qu'elle est devenue injuste - et je reprends ici les termes du rapport de Mme Pires Beaune qui malheureusement n'a eu aucune suite.

Mme Nicole Bonnefoy . - Après la suppression des DDAF, des DDE et des aides techniques aux petites communes, les départements se sont organisés pour compenser ces disparitions, avec notamment la création d'agences départementales. C'est le cas dans mon département - la Charente - où 320 des 400 communes adhèrent à l'agence technique départementale créée en 2014. Cette dernière répond parfaitement aux attentes des élus. Vous avez dit tout à l'heure, que l'agence nationale viendra combler les vides en matière d'ingénierie. Dans le cas de mon département, par exemple, est ce que l'agence interviendra ou pas ? Il y a une inquiétude des agences qui existent déjà : elles s'interrogent sur la façon dont la coordination va se faire.

Il serait important que cette agence ait un rôle d'animation, qu'elle soit un lieu d'échanges entre toutes les formes d'ingénieries publiques, afin d'améliorer la synergie entre les différents acteurs. Elle pourrait être aussi - et je n'ai pas entendu ce point être évoqué - un portail centralisateur de tous les appels à projets nationaux des différents ministères, pour que les collectivités disposent d'un accès facilité à l'information. Nous considérons qu'il faut plutôt conforter les départements qui ont pris à bras le corps ce rôle d'ingénierie opérationnelle à l'échelon départemental : c'est celui le plus pertinent pour assurer une proximité, une efficacité et une réactivité.

En résumé, comment cette coordination va se faire, notamment avec les départements ? Quels moyens vont pouvoir être accordés aux préfets, qui en manquent par ailleurs ?

M. Michel Dagbert . - Madame la Ministre, je salue le volontarisme dont vous faites preuve dans la promotion de cette agence. Toutefois, je crains que cela suscite beaucoup d'attente dans les territoires. Le département du Nord-Pas-de-Calais a été cité à deux reprises pour des contrats différents. Je rejoints à cet égard mon collègue Jean-Michel Houllegatte, lorsqu'il exprime le voeu de voir l'ensemble de ces partenariats réunis sous un même label. Vous avez évoqué le contrat pour le bassin minier, le contrat du Calaisis ; nous avons également les contrats de pays, les contrats pour les bourgs centres, ... Si cette agence a vocation à clarifier les choses, je m'en réjouis. Ma préoccupation est pour les communes. Dans le département du Pas-de-Calais, qui dispose d'une agence d'ingénierie, il y a 740 communes rurales. Vous imaginez donc bien les attentes que peuvent avoir les maires. En effet, il n'y a pas d'un côté des maires qui ont plein de bonnes idées, et de l'autre, des maires qui n'en ont aucune. Cependant, la capacité de répondre aux attentes des populations et des territoires est une question de moyens. Mon interrogation porte sur l'articulation de cette agence. J'ai bien compris le rôle du préfet, et cela ne me pose aucun problème. Ce dernier pourra facilement discuter avec le département et l'agence d'ingénierie départementale. En revanche, de nombreux élus locaux se retrouveront confrontés à des schémas prescriptifs régionaux en matière économique notamment. En matière de commerce et d'artisanat, le schéma régional s'impose. Il en est de même avec le SRADDET. Ces derniers doivent trouver une traduction dans les PLU et les plans locaux d'urbanisme intercommunaux.

M. Jean-Pierre Corbisez . - Dans vos propos, vous avez indiqué que certains territoires n'auront pas besoin de cette agence. J'ai présidé une agglomération de 130 000 habitants et j'ai pris, à un moment donné, la compétence du très haut débit. J'ai pu bénéficier, grâce à la région qui m'a contacté, de fonds européens pour le développement de la fibre - ces derniers risquaient de remonter à Bruxelles s'ils n'étaient pas utilisés. Certes, il reste un coût de fonctionnement pour la fibre, mais cela reste raisonnable. Toutefois, je me mets à la place de mes collègues des secteurs ruraux, qui ont besoin, à la fois pour leurs habitants et leurs zones artisanales et économiques, du très haut débit. Aussi, je pense que cette agence est une priorité absolue. M. Serge Morvan a indiqué tout à l'heure que cette agence sera au service des élus. Je me permets d'intervenir en tant qu'élu d'un secteur plutôt urbain. Il serait bien que cette nouvelle agence permette de réduire le temps administratif des études de l'ANRU. Aujourd'hui, ce temps tue le projet. Comme l'ont dit certains collègues, le temps et la lenteur administrative profitent aux populistes. Il faut que cette agence soit un facilitateur pour les maires des élus des communes urbaines où parfois - et vous le savez - le populisme est très présent. Lorsqu'un projet de l'ANRU est à cheval sur plusieurs exercices d'un mandat électoral, cela pose des problèmes.

M. Ronan Dantec. - Le titre de cette agence est extrêmement ambitieux. À travers les questions, on constate que les attentes sont très diverses. Mon interrogation fait écho à ce qui vient d'être dit sur les régions. Je vous ai entendu, et je suis d'accord avec vous sur le fait que certains territoires n'ont pas vraiment besoin d'une aide, tandis que d'autres ont plus de difficultés. Or, on a donné aux régions le rôle d'aménagement du territoire. Dès lors, n'y a-t-il pas un constat que les régions font face à certaines difficultés pour remplir cette mission ? L'agence va-t-elle se doter d'un rôle de discussion avec les régions pour leur signaler des territoires fragiles dans lesquels elles n'interviennent pas et s'interroger - en toute bienveillance - sur la manière d'intervenir plus fortement sur les territoires concernés ?

Il me semble par ailleurs important de réfléchir à la doctrine d'aménagement du territoire que l'on souhaite en France. S'il n'y a pas de nouveau cycle de décentralisation économique et de créations d'emplois sur les territoires fragiles, on pourrait faire des « actions coeur de ville », tirer des câbles de fibre optique, cela ne marchera pas. L'agence, qui est de portée nationale, se dote-t-elle d'actions descendantes, essayera-t-elle d'identifier un certain nombre d'activités économiques qui pourraient revivifier ces territoires en difficulté et absorbés par les métropoles ou l'Île-de-France ? Ou bien, est ce que cette agence exclut d'elle-même cette question économique, qui est le socle de la cohésion des territoires ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre . - Je sens à travers vos interrogations une inquiétude par rapport aux structures existantes sur le territoire. Je vois s'exprimer parmi vous un certain nombre d'anciens présidents des conseils départementaux. Il ne s'agit pas d'entrer en concurrence avec les agences créées par les collectivités territoriales. L'Agence nationale de cohésion des territoires est là pour être complémentaire lorsque l'on aura besoin d'elle. Je ne peux pas l'exprimer plus clairement. Le préfet sera le représentant de l'agence localement. Il n'y aura pas de structures locales avec des fonctionnaires. Le préfet sera chargé de coordonner les éventuelles interventions. Il y a au sein des agences des personnels extrêmement techniques et compétents - j'évoquais tout à l'heure le CEREMA - qui pourront être le bras armé de l'agence localement.

L'agence est un outil qui sera le plus décentralisé possible. La décision ne sera pas prise au niveau national, mais par le préfet.

Je n'ai jamais été, à titre personnel, très favorable aux appels à projets. En effet, ce sont toujours les mêmes qui répondent, c'est-à-dire ceux qui ont les moyens, l'ingénierie, les fonctionnaires pour le faire. Ce que l'on propose de faire est exactement l'inverse. On part du territoire et l'État apporte un soutien. C'est le projet qui fait le territoire ; on répond à la demande qui en émane.

Les projets peuvent venir, si je puis dire, de partout. Ainsi, mêmes des pôles d'équilibre territorial et rural, qui ne sont pas des collectivités territoriales, pourront demander de l'aide à l'agence via le préfet, à partir du moment où ils portent un projet. Toutes les entités - à l'exception du canton qui n'a désormais plus qu'une dimension électorale - pourront bénéficier d'une assistance technique.

La peur d'un doublon avec les structures existantes a été évoquée. Il ne s'agit pas de concurrencer ce qui existe déjà. Je connais la sensibilité des départements sur ce sujet.

Je n'ai pas abordé la question des fonds européens, car les régions sont désormais autorités de gestion.

En ce qui concerne la fermeture des centrales thermiques à charbon, une aide sera nécessaire. On aura deux enveloppes de péréquation. De mémoire, il y a actuellement quatre centrales thermiques à charbon qui vont fermer, dont une en Loire-Atlantique à Cordemais. Il y a bien évidemment un devoir de l'État d'accompagner ces fermetures - vous le savez, elles sont extrêmement polluantes - et les territoires concernés. Pour effectuer cette transition financière, il y aura une première enveloppe de solidarité nationale - par l'État - et une deuxième via la péréquation.

Monsieur Huré, j'ai bien compris le sens de votre question. C'est la raison pour laquelle nous faisons des contrats spécifiques pour ces territoires en grande difficulté. Nous serons d'ailleurs chez vous, la semaine prochaine, à Charleville-Mézières, dans le cadre de la commémoration du centenaire de la Grande Guerre. Des contrats spécifiques existent dans les Ardennes, dans la Nièvre, en Creuse. Lorsque je cite ces départements, vous voyez le type de territoires concernés. L'Agence nationale de cohésion des territoires sera très utile et importante. La volonté du gouvernement est de répondre plus précisément aux territoires. Il faut apporter des réponses plus précises, faire ce que j'appelle du « cousu main ».

Je partage votre avis sur la nécessité d'une péréquation renforcée entre les départements. Nous sommes en train de négocier pour mettre au point une péréquation à la fois horizontale et verticale. Il y a en France, des départements très riches et qui peuvent se permettre des investissements ; et d'autres très pauvres.

J'ai été interrogée sur une volonté de recentralisation du Gouvernement. Au contraire, faire du préfet le délégué territorial de l'Agence est l'opposé de la recentralisation. Nous ne serons pas prescripteurs mais accompagnateurs.

En ce qui concerne la DETR, il s'agit de crédits d'État. Il est donc normal que ce soit le préfet qui les répartissent. En outre, et depuis toujours, les élus locaux se tiennent aux côtés du préfet lors de cette répartition. On dit toujours qu'il faut faire confiance à l'intelligence territoriale et aux élus locaux. Or, dans le cas présent, ils sont aux côtés du préfet. Le préfet décide, avec les élus locaux, des thématiques prioritaires. Puis, bien sûr, le préfet, sur cette base, détermine les territoires qui en ont le plus besoin. Les préfets n'ont pas pour objectif de conserver ces crédits, mais au contraire d'aider les territoires. Lorsque l'on a supprimé la réserve parlementaire, il y a eu un long débat sur le rôle des parlementaires dans la répartition des crédits de la DETR. Ils sont aujourd'hui aux côtés du préfet et des élus locaux - il me semble qu'ils sont quatre par département. Dans certains départements, les parlementaires s'arrangent et tournent, s'entendent sur les territoires, dans d'autres ce n'est pas le cas. Certes, vous n'avez pas la main sur la DETR, mais c'est normal car il s'agit de crédits d'État. Vous pouvez donner votre avis, et il faut demander au préfet de vous écouter.

M. Hervé Maurey , président . - Je parle sous le contrôle de tous mes collègues qui siègent dans ces commissions. On ne sert à rien. Le préfet ne nous demande notre avis que pour les demandes de subvention supérieures à 100 000 euros, ce qui limite considérablement le champ d'action. Nous ne sommes même pas informés des demandes d'un montant inférieur. Nous ne sommes pas non plus informés des raisons qui conduisent le préfet à faire son choix. De surcroît, même lorsque des priorités sont établies en concertation avec les élus locaux et les parlementaires, le préfet n'est pas obligé de les suivre. Dans mon département, nous avions mis en première priorité les réserves incendie. Or, le préfet n'a retenu aucun des projets relatifs à cette thématique, car il considérait que ce n'était pas une priorité. Aujourd'hui, vraiment, le fonctionnement de ces commissions n'est absolument pas satisfaisant. J'ai déposé une proposition de loi à ce sujet - ouverte à cosignatures - et nous allons essayer de modifier les choses par voie d'amendement, afin que les parlementaires ne soient pas là uniquement pour faire de la figuration.

Mme Jacqueline Gourault, ministre . - L'article 34 de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique prévoit que le préfet communique aux membres de la commission « DETR » cinq jours francs avant toute réunion, une note explicative de synthèse sur les affaires inscrites à l'ordre du jour. Cette note est, dans les mêmes délais, transmise aux parlementaires élus dans le département. Si certains préfets ne le font pas, il faut nous faire remonter cette information.

M. Hervé Maurey , président . - Mais cela concerne uniquement les dossiers pour des subventions supérieures à 100 000 euros.

Mme Jacqueline Gourault, ministre . - J'ai constaté qu'il y avait des pratiques très différentes entre les départements. Certains préfets faisaient preuve de beaucoup plus de transparence que d'autres. Nous avons publié une circulaire, pour indiquer aux préfets qu'ils devaient être le plus transparent possible. Si certains préfets font encore de la résistance, il faut nous le dire.

M. Serge Morvan. - En ce qui concerne le fonctionnement de l'Agence nationale de cohésion des territoires, à partir du moment où elle est constituée par la fusion d'une grande partie du Commissariat général à l'égalité des territoires, de l'Agence du numérique, son budget de fonctionnement sera une proportion de cette fusion. Il n'y a donc pas de coûts supplémentaires. J'espère effectivement, qu'au fur et à mesure de son fonctionnement, on trouvera des synergies, qui permettront de mieux encore répartir les crédits entre les différents acteurs.

Le budget d'intervention reprend essentiellement les crédits des outils existants.

Mme Jacqueline Gourault, ministre . - M. Corbisez, j'ai entendu votre appel concernant l'ANRU. Si l'agence peut servir à réduire les délais d'examen de l'ANRU, je crois que cela sera aussi quelque chose d'important. Vous aurez un outil qui sera vraiment facilitateur, qui aura pour but d'accompagner les territoires, afin de réduire la fracture territoriale - même si ce mot est très usité aujourd'hui. L'objectif est d'aller vers les territoires qui ne sont pas en capacité de s'en sortir seuls pour des raisons historiques, de désindustrialisation, de baisse très importante de la démographie, ...

Les élus locaux nous ont demandé de mettre en place l'Agence nationale de cohésion des territoire - François Baroin l'a ainsi demandée au Président de la République. Dans sa création, il y a l'objectif d'être aux côtés des territoires les plus fragiles. Je pense que l'agence ne sera pas utile - et encore, on ne sait jamais - aux grandes métropoles. Dans certains départements, où des structures peuvent déjà exister, nous venons simplement pour être des facilitateurs, un outil complémentaire, et surtout pas pour défaire ce qui existe. Dans certains territoires également, il existe des « vides », des interstices.

Vous m'avez interrogée pour savoir si les services de l'Agence seront gratuits. Aujourd'hui, lorsque vous faites appel au CEREMA, le service est payant. Mais, vous n'aurez pas à payer le service de coordination que jouera le préfet. En outre, sur la gratuité des services proposés, il faut avoir en tête le droit de la concurrence. Nous devrons faire attention à ce que les tarifs que nous proposerons respectent ce droit. En effet, actuellement, vous pouvez faire appel à de l'ingénierie privée, et il ne s'agit pas de faire de la concurrence déloyale.

M. Benoît Huré . - Je viens d'un territoire pauvre, mais il me semble important qu'il y ait une contribution - certes d'un montant raisonné et raisonnable. Pour moi, il ne faut pas que ce service soit totalement gratuit.

M. Christophe Priou . - Le 18 octobre dernier, s'est tenue une réunion au sujet de la centrale thermique de Cordemais autour de François de Rugy. Arrêter de produire de l'énergie fossile à la centrale de Cordemais, c'est une chose, mais il faut prendre en compte le contrat de transition énergétique. Les salariés d'EDF ont mis en place un « process combustion » afin de produire de l'énergie à partir de déchets verts. Nous souhaitons que ce contrat de transition énergétique rejoigne le contrat d'avenir promis par l'État en compensation de l'abandon de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Je tiens à le dire, car près de 1 500 employés sont concernés.

M. Serge Morvan. - Si vous me le permettez, Madame la Ministre, je souhaite apporter une précision sur le coût de l'agence. Evidemment, la prestation de l'agence en tant que telle sera gratuite. De même, aujourd'hui, vous ne payez pas une prestation de l'ANRU. Mais dans les projets complexes mis en place actuellement, chaque composante doit obtenir des financements. Cela doit se faire dans le cadre du droit de la concurrence, lorsqu'il s'agit de projets se situant dans le secteur privé. En outre, il y aura, comme aujourd'hui, des subventions, des prêts, ainsi que la prise en compte de la situation de chacune de ces collectivités. Les collectivités les plus en difficulté ne pourront de toute manière pas prendre sur leur budget des projets complexes. Il y aura un examen au cas par cas. Mais je tiens à être clair : il n'y aura pas de paiement d'une prestation à l'agence en tant que telle, car elle sera au service des élus.

Vous avez posé une question relative aux opérateurs qui ne sont pas directement intégrés à l'Agence nationale de cohésion des territoires. Ceux-ci sont intégrés à sa gouvernance par deux aspects : d'une part, ils participent au conseil d'administration, tel que c'est prévu dans la proposition de loi à ce stade ; en outre, leur directeur sera membre d'un comité d'action territoriale réuni plusieurs fois par mois si cela est nécessaire, par le directeur ou la directrice général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires, afin d'assurer la mise en oeuvre des conventions d'objectifs et de moyens partagés. De ce fait, il y a une participation croisée des opérateurs, pour coordonner leurs actions, et pour que le préfet puisse se servir de cette coordination pour parler d'une seule voix auprès de vous.

Enfin, concernant le niveau régional, les projets des territoires sont examinés et donnent lieu à un « tour de table » au niveau départemental. En effet, c'est le préfet de département ou les sous-préfets de département qui sont les plus proches des territoires. C'est une agence de proximité, déconcentrée et décentralisée que l'on met en place. Bien évidemment, toutes les collectivités intervenant sur le territoire doivent être associées le mieux possible, notamment les régions. Il y a une nécessité de pouvoir faire de la coordination au niveau régional, car certains opérateurs sont organisés au niveau régional. Je pense à l'ADEME notamment, ou encore la Caisse des dépôts et consignations. Mais le délégué territorial le plus important est le préfet de département.

Mme Jacqueline Gourault, ministre . - Naturellement, nous n'avons pas vocation à intervenir sur les politiques régionales et les schémas des régions. Ce n'est pas le travail de l'agence. Elle est là pour aider les projets des territoires.

Le débat sur cette proposition de loi aura lieu la semaine prochaine au Sénat. Nous sommes très heureux que ce texte arrive en séance. Le fait que cela soit une proposition de loi nous a aussi permis de trouver une place dans le calendrier parlementaire. Le gouvernement souhaite que cette Agence nationale de cohésion des territoires soit mise en place le plus rapidement possible. Je ne doute pas que nous aurons un débat riche et fructueux en séance. Si cette agence doit faire l'objet d'adaptations dans les mois et les années qui viennent - comme tous les outils - nous le ferons. À partir de son fonctionnement, on pourra voir s'il faut l'améliorer.

Dans tous les cas, je souhaite rappeler qu'elle ne fera pas de concurrence aux structures existantes, qu'elle est destinée aux territoires qui en ont besoin, et que l'agence sera entièrement déconcentrée au niveau du préfet du département.

M. Hervé Maurey , président . - Nous allons maintenant examiner en commission le rapport sur la proposition de loi et la proposition de loi organique etun certain nombre d'amendements. Vous avez vu, Madame la Ministre, que ce texte pose beaucoup de questions. Il y en aura d'autres en séance publique. Le rapporteur vous fera des propositions pour améliorer encore ce texte.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat .

II. EXAMEN DU RAPPORT ET DES TEXTES DE LA COMMISSION SUR LA PROPOSITION DE LOI N° 2 ET LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE N° 43

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - La proposition de loi portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), déposée au Sénat le 2 octobre dernier par Jean-Claude Requier et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen (RDSE), comprend douze articles destinés à installer une instance dont nous parlons depuis deux ans. La proposition de loi organique visant à l'audition, en application de l'article 13 de la Constitution, du directeur général de l'agence par les commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, a, pour sa part, été déposée par Hervé Maurey et Jean-Claude Requier ; elle comporte un article unique.

Dès 2017, nous avions, avec le président Hervé Maurey, évoqué la création d'une telle agence dans le cadre de notre rapport consacré à l'aménagement du territoire. Le Président de la République avait alors saisi la balle au bond, si je puis dire, et annoncé la création d'une structure, d'abord lors de la Conférence nationale des territoires, qui s'est tenue au Sénat le 17 juillet 2017, puis devant le congrès des maires de France le 24 novembre de la même année. Le projet a depuis été confirmé à plusieurs reprises par le Gouvernement, par la voix de Jacques Mézard, de Julien Denormandie ou, plus récemment, de Jacqueline Gourault.

Avant de vous présenter le contenu des articles et les amendements que je vous proposerai d'adopter, je souhaite vous faire part de trois remarques liminaires.

D'abord sur la méthode, que je regrette. Les atermoiements du Gouvernement ont conduit certains collègues à anticiper ses projets. Je pense à la proposition de loi déposée en octobre 2017 à l'Assemblée nationale par Philippe Vigier et, bien sûr, à la proposition de loi de nos collègues Philippe Bas, Bruno Retailleau et Mathieu Darnaud, dont vous m'aviez confié le rapport pour notre commission. Plus récemment, le Gouvernement a souhaité, en vain, être habilité à légiférer par ordonnance pour créer l'agence, à l'occasion de l'examen du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) en séance au Sénat. Cette initiative intervenait alors que le préfet Serge Morvan, ancien directeur général des collectivités locales au ministère de l'intérieur et cinquième commissaire général à l'égalité des territoires en quatre ans, avait été chargé par le Premier ministre de préfigurer la création de l'agence. Nous avons pris connaissance de son rapport grâce à une publication syndicale...

Au-delà de l'absence d'étude d'impact, puisque nous examinons une proposition de loi, la concertation aurait dû être davantage approfondie : j'ai disposé d'à peine quatre semaines pour étudier les dispositions du texte, consulter une douzaine d'organismes et préparer des amendements. Il est heureux, dans ce contexte, que le Président du Sénat ait eu recours à la faculté que lui offre par le dernier alinéa de l'article 39 de la Constitution de saisir le Conseil d'État, afin qu'il rende un avis sur les dispositions de la présente proposition de loi, qui a utilement éclairé mes travaux.

Nous avons, en outre, pu nous entretenir avec Alain Lambert, président du Conseil national d'évaluation des normes. Notre échange a révélé l'impréparation du Gouvernement quant à la simplification des procédures imposées aux collectivités territoriales dans la définition et la conduite de leurs projets.

Je remarque ensuite combien l'ambition du texte et celle du Gouvernement semblent en deçà des attentes de nos concitoyens et des élus locaux. Les fractures françaises sont nombreuses et bien connues - dans l'accès au numérique, dans l'accès aux soins, avec le problématique des déserts médicaux, dans l'accès aux services publics et dans le domaine de la mobilité - ; elles constituent autant de freins à la cohésion et à l'ascension sociales. Je me réjouis à cet égard de l'examen prochain du projet de la loi d'orientation des mobilités ; les mobilités représentent un prisme intéressant pour aborder la cohésion sociale et territoriale et constituent autant de leviers pour soutenir les territoires les plus fragiles. Hélas, la présente proposition de loi ne traite nullement de ces sujets. L'article 40 de la Constitution interdisant aux parlementaires d'étendre les missions de l'ANCT par voie d'amendement, il serait heureux que le Gouvernement adopte une approche décloisonnée des missions de l'agence, expression que nous entendons souvent mais qui peine à se matérialiser, au risque qu'elle ne soit qu'un arbre de plus dans la forêt des acteurs étatiques.

Enfin, l'État doit prendre ses responsabilités, notamment s'agissant des ressources de l'agence, à propos desquelles la frilosité du Gouvernement interroge, de la rationalisation des interventions des différents établissements publics de l'État à destination des territoires et de l'association des élus locaux et nationaux à la gouvernance de l'ANCT. Elle ne pourra agir utilement qu'à condition que l'État partage une ambition commune avec les territoires et qu'il ne soit pas seul maître à bord. Je souhaite que les territoires soient considérés comme des partenaires égaux que l'on ne cherche pas à amadouer, même si la proximité des élections municipales ne doit laisser aucun doute sur l'impératif politique qui préside aux intentions du Gouvernement. J'attire son attention et la vôtre sur le fait que le financement de l'agence ne doit en aucun cas venir en soustraction de moyens actuellement accordés aux collectivités territoriales. Lorsqu'est donné d'une main ce qui est repris de l'autre, cela finit toujours pas se voir et les élus locaux ne sont pas dupes... À cet égard, la possibilité que les crédits de la Dotation d'équipements des territoires ruraux (DETR) puissent être considérés comme des ressources sur lesquelles l'agence exercerait un droit de tirage m'inquiète particulièrement.

L'article 1 er de la proposition de loi crée l'ANCT sous la forme d'un établissement public de l'État, compétent sur l'ensemble du territoire national et qui, indique le Conseil d'État, ne constituera pas une nouvelle catégorie d'établissement public. Cette considération appelle le législateur à distinguer ce qui relève du domaine de la loi au titre des caractéristiques de l'agence qui feraient exception à la catégorie à laquelle elle se rattache a priori , et ce qui relève du pouvoir réglementaire.

L'article 2 définit les missions de l'agence. Il prévoit notamment la dissolution de l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) et le transfert des deux tiers de l'Agence du numérique à l'ANCT. Pour mémoire, le décret d'attribution de la ministre de la cohésion des territoires lui donne autorité, conjointement avec le ministre de l'économie et des finances, sur l'Agence du numérique.

L'article 3 organise la gouvernance de l'ANCT, gérée par un conseil d'administration composé de représentants de l'État, pour plus de la moitié des membres, de représentants des collectivités territoriales, de parlementaires, ainsi que de représentants de la Caisse des Dépôts et consignations et du personnel.

L'article 4 dispose que l'agence est dirigée par un directeur général qui réunit un comité d'action territoriale composé des directeurs généraux de quatre établissements publics : l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA).

L'article 5 prévoit que les services déconcentrés de l'État, en particulier le préfet, constituent le guichet unique d'entrée pour les projets des collectivités territoriales qui demandent le soutien de l'agence.

L'article 6 fixe les différentes recettes de l'ANCT. L'article 7 prévoit qu'elle conclut des conventions pluriannuelles tripartites avec l'État et l'ANRU, l'ANAH, l'ADEME et le CEREMA pour fixer des objectifs et des financements partagés. L'article 8 précise que l'agence emploie des fonctionnaires de l'État, des contractuels de droit public et des salariés soumis au code du travail, renforçant son statut hybride entre établissement public administratif (EPA) et établissement public industriel et commercial (EPIC).

L'article 9 procède à des coordinations pour prévoir la présence de l'ANCT au sein des conseils d'administration respectifs de l'ADEME et du CEREMA. L'article 10 organise le transfert, à l'agence, de la majorité des agents du Commissariat général à l'égalité des territoires (DGET), de l'Agence du numérique et des salariés de l'EPARECA, et acte la dissolution de cet établissement. Enfin, l'article 11 renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de fixer les conditions d'application de la loi et l'article 12 contient les dispositions classiques de gage financier.

Certaines dispositions vont dans le sens, satisfaisant, d'une déconcentration de la politique d'aménagement du territoire : l'ANCT devra partir des projets des territoires, dans une logique ascendante. D'autres appellent davantage notre vigilance, comme la question des ressources dont disposera l'agence. Il paraît à cet égard invraisemblable de devoir attendre la loi de finances pour 2020 pour en savoir plus...

Je rappellerais, au-delà de cette analyse, deux remarques formulées dans mon rapport sur la proposition de loi précitée de Philippe Bas, Bruno Retailleau et Mathieu Darnaud. Nous devons, d'une part, cesser de multiplier les appels à projet pour nous rapprocher du terrain ; il faut développer une nouvelle méthode. Si le rapport de préfiguration de Serge Morvan prévoit la fusion des 1 235 contrats existants entre l'État et les territoires, le contrat de cohésion sera long à mettre en place. L'agence, d'autre part, doit concentrer son action sur les territoires les plus fragiles, en particulier ruraux et périurbains, dont l'accès à une ingénierie technique et financière est difficile.

En conséquence, je vous proposerai de faire évoluer le texte, avec trois objectifs principaux. D'abord, j'ai souhaité revoir la gouvernance pour une meilleure association des élus locaux et nationaux. Le remplacement du conseil d'administration par un directoire assisté d'un conseil de surveillance permettra d'assurer un pilotage plus stratégique de l'agence. La parité entre l'État et ses établissements publics d'une part et les élus locaux et nationaux et les représentants du personnel d'autre part sera garantie. Le nombre de parlementaires sera augmenté et le rôle du comité d'action territoriale renforcé. Je vous proposerai, en outre, de créer un comité local de la cohésion territoriale pour associer les élus aux côtés du préfet.

Ensuite, j'ai cherché à renforcer la prise en compte des territoires les plus fragiles et à mobiliser les missions de l'EPARECA reprises par l'agence dans les zones caractérisées par des handicaps géographiques, sociaux et économiques. Cela me semble essentiel pour la cohésion des territoires. Enfin, j'ai souhaité simplifier le paysage administratif en matière d'aménagement du territoire, mieux organiser la transition entre l'Agence du Numérique, l'EPARECA et l'ACNT et ouvrir la voie au regroupement d'autres établissements publics au sein de l'agence dans un souci de bonne utilisation des deniers publics et de lisibilité de l'action publique. Par ailleurs, sans dénaturer le travail de notre collègue Jean-Claude Requier, je vous proposerai d'améliorer la qualité juridique du texte, en codifiant ses dispositions au sein du code général des collectivités territoriales, en supprimant des dispositions à caractère réglementaire et en sécurisant les dispositifs d'entrée en vigueur.

Malgré ces améliorations, le vote de la présente proposition de loi ne doit pas être considéré comme un blanc-seing donné au Gouvernement : il s'agit d'une première étape. Nous devrons rester vigilants : les territoires les plus fragiles doivent être entendus.

M. Hervé Maurey , président . - Soyez remercié pour la clarté de votre présentation et pour l'important travail que vous avez mené dans des délais contraints. Nous avons déjà eu un large débat sur l'ANCT avec Jacqueline Gourault, qui pourra se poursuivre en séance publique ; je vous propose d'examiner immédiatement les amendements.

EXAMEN DES ARTICLES

Division additionnelle avant l'article 1 er

L'amendement rédactionnel COM-35 est adopté et devient une division additionnelle.

Article 1 er

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Les amendements COM-20 , COM-5 et COM-6 sont en discussion commune. Mon amendement COM-20 harmonise la dénomination de l'agence retenue par les auteurs de la proposition de loi avec celle retenue par le législateur pour Pôle emploi. Il procède également à la codification de l'ANCT dans le code général des collectivités territoriales.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Nous n'avons eu connaissance de l'avis du Conseil d'État, qui préconisait la codification de certaines dispositions, que le 26 octobre.

M. Hervé Maurey , président . - Ce délai n'est pas imputable à la commission.

M. Jean-Claude Requier , auteur de la proposition de loi . - J'ai été en lien sur ce texte avec le Conseil d'État et puis vous assurer qu'il s'y tient un langage que ne comprendrait pas la majorité des élus locaux... Pour la complète information de chacun, cet avis sera rendu public et annexé au rapport de notre collègue Louis-Jean de Nicolaÿ.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - L'amendement COM-5 définit la tutelle de l'agence : cette précision n'est pas du domaine de la loi. J'y suis donc défavorable. Je demande le retrait de l'amendement COM-6, satisfait pas l'article 2 qui prévoit que l'ANCT pourra être saisie par toute collectivité territoriale par l'intermédiaire du préfet.

L'amendement COM-20 est adopté et les amendements COM-5 et COM-6 deviennent satisfait ou sans objet.

L'article 1 er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article additionnel après l'article 1 er

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - L'amendement COM-7 est intéressant sur le fond mais sa normativité n'est pas établie et son dernier alinéa relève du domaine réglementaire. Par ailleurs, la co-construction s'effectuera au travers du conseil de surveillance qui arrêtera les orientations stratégiques de la politique de l'ANCT et permettra un dialogue entre l'État et les élus. J'en demande le retrait ou, à défaut, y serai défavorable.

L'amendement COM-7 n'est pas adopté.

Article 2

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-30 rend plus lisibles les missions de l'agence et sa logique ascendante : elle partira des projets locaux et des demandes des collectivités territoriales. Son action ne saurait être prescriptive ou coercitive à l'égard des territoires. Il est en discussion commune avec le sous-amendement COM-41 , les amendements COM-4 , COM-8 et COM-1 , ainsi qu'avec les amendements identiques COM-3 , COM-15 et COM-16 .

Je suis favorable au sous-amendement COM-41, qui intègre la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs aux missions de l'ANCT, ainsi qu'à l'amendement de précision COM-4, dont je propose aux auteurs la transformation en sous-amendement à mon amendement COM-30. Je suis, en revanche, défavorable à l'amendement COM-8 de suppression des dispositions relatives à l'EPARECA et à l'Agence du numérique. Je vous proposerai un amendement pour différer l'intégration de l'Agence du numérique au 1 er janvier 2021.

S'agissant de l'amendement COM-1, sous réserve de le transformer en sous-amendement à mon amendement COM-30, j'y suis favorable : il est utile que l'agence traite également du maintien des services publics. Enfin, pour ce qui concerne les amendements identiques COM-3, COM-15 et COM-16, je propose de rectifier mon amendement COM-30 pour intégrer les objectifs de transition écologique et de lutte contre le changement climatique. En conséquence, j'en demande le retrait.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Nous souhaitons que l'ANCT soit davantage une structure de coordination que de fusion de divers organismes. Vous considérez d'ailleurs vous-même que l'intégration de l'Agence du numérique est prématurée, en raison de la mise en oeuvre du plan France très haut débit.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Il me semble effectivement préférable, de faire application d'un principe de précaution en la matière ; que le CGET et l'EPARECA se chargent du lancement de l'ANCT avant que l'Agence du numérique, qui fonctionne convenablement, y soit intégrée.

M. Hervé Maurey , président . - Les auteurs des amendements COM-4 et COM-1 semblent favorables à leur transformation en sous-amendements COM-42 et COM-44 à l'amendement COM-30 du rapporteur.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - En conséquence, mon amendement COM-30, rectifié, sera ainsi rédigé après intégration des trois sous-amendements : L'Agence nationale de la cohésion des territoires a pour mission, en tenant compte des particularités, des fragilités et des besoins de chaque territoire, de soutenir les collectivités territoriales dans la définition et la mise en oeuvre de leurs projets, notamment en faveur du maintien des services publics, de la transition écologique, de la lutte contre le changement climatique, de l'accès aux soins et du numérique. À ce titre, elle propose une offre d'ingénierie adaptée aux porteurs de projets et apporte un concours humain et financier aux collectivités territoriales. Elle assure la mise en oeuvre de la politique d'aménagement durable et de cohésion des territoires et la coordination des interventions de l'État et de ses établissements publics, en conduisant des programmes nationaux territorialisés.

Les sous-amendements COM-41, COM-44 et COM-42 sont adoptés et l'amendement COM-30 rectifié est adopté. Les amendements COM-8, COM-3, COM-15 et COM-16 deviennent satisfaits ou sans objet.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-32 précise que l'ANCT s'occupera des territoires les plus en difficulté. La garantie de la cohésion nationale et territoriale en dépend.

Mme Françoise Cartron . - Je suis un peu gênée par l'emploi du terme « handicaps » pour qualifier les difficultés auxquelles sont confrontés certains territoires.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Nous avons repris le terme figurant dans la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire

M. Hervé Maurey , président . - Il n'est inscrit que dans l'objet de l'amendement.

L'amendement COM-32 est adopté.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-31 reprend les dispositions du code de l'urbanisme relatives à l'EPARECA, pour que l'agence opère dans des conditions identiques.

L'amendement COM-31 est adopté.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-28 conforte la démarche ascendante dans laquelle l'agence doit s'inscrire et procède à des modifications rédactionnelles.

L'amendement COM-28 est adopté.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-26 rectifié a un double objet : il sécurise juridiquement l'entrée en vigueur des dispositions relatives à la reprise des missions de l'EPARECA par l'agence et reporte au 1 er février 2021 l'intégration de l'Agence du numérique. Sur ce point, j'ai entendu vos craintes et je souhaite que nous puissions adopter une position de compromis, qui ne remet pas en cause le fait de lier le numérique et la cohésion des territoires. Pour gérer au mieux la transition, l'amendement prévoit que les ministres en charge de l'aménagement du territoire et du numérique définiront par convention les moyens permettant d'assurer une intégration réussie à l'agence.

M. Jean-Pierre Corbisez . - Le développement du haut débit représente une priorité pour nos territoires. Pourquoi, dès lors, décaler l'intégration de l'Agence du numérique à l'ANCT ?

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - En écoutant la ministre, des interrogations émergent quant au fonctionnement de l'agence. Après sa création, le CGET la rejoindra dès 2019, suivie de l'EPARECA au 1 er janvier 2020, ce qui permettra d'observer les conditions de leur intégration. L'Agence du numérique est reconnue par les territoires : ne la fusionnons par trop rapidement à l'ANCT au risque de la déstabiliser.

M. Patrick Chaize . - Je partage l'analyse de notre rapporteur. Du reste, les projets numériques, lancés depuis plusieurs années, n'iront pas plus rapidement si l'Agence du numérique est intégrée à l'ANCT. L'Agence du numérique se trouve dans une phase dynamique de son action. Alors qu'elle vient de perdre, pour des raisons personnelles, son directeur, il ne s'agit pas de la déstabiliser davantage. Attendons que l'ANCT soit installée pour envisager son intégration. Par ailleurs, s'agissant du numérique, sujet transversal, les responsabilités de chacun gagneraient à être précisées.

M. Ronan Dantec . - Considérer qu'il existerait des difficultés techniques à une intégration rapide de l'Agence du numérique à l'ANCT ne me convainc pas. Au contraire, l'agence doit pouvoir, dès son installation, compter le numérique, levier économique fort pour les territoires, au nombre de ses compétences. Il faut donner de la puissance à cette nouvelle instance ! Certes, des dispositions transitoires pourraient être envisagées, mais le numérique doit figurer dans les missions de l'agence dès sa construction.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Le numérique sera bien intégré aux missions de l'ANCT ; il s'agit uniquement de décaler l'intégration du personnel de l'Agence du numérique et la reprise de la conduite du Plan « France très haut débit »

M. Hervé Maurey , président . - Monsieur Corbisez, justement parce que le numérique est essentiel au développement de nos territoires, nous devons veiller à ne pas fragiliser le bon déroulement des actions menées par l'Agence du numérique.

M. Ronan Dantec . - L'équipe dirigeante de l'Agence du numérique devrait à tout le moins intégrer l'ANCT dès sa création.

M. Hervé Maurey , président . - Nous aurons ce débat en séance publique. Nous partageons la même volonté de développer le numérique dans nos territoires.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Nous devrons également débattre de l'organisation de l'agence.

L'amendement COM-26 rectifié est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article additionnel après l'article 2

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - L'amendement COM-9 est satisfait par la nouvelle rédaction de l'article 2, qui prévoit désormais une meilleure prise en compte des territoires fragiles par l'agence. J'en demande donc le retrait ou, à défaut, y serai défavorable.

L'amendement COM-9 n'est pas adopté.

Article 3

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-21 , en discussion commune avec les amendements COM-10 et COM-2 , modifie le modèle de gouvernance de l'ANCT en instaurant un directoire, concentré sur la gestion opérationnelle et courante de l'agence, et un conseil de surveillance, conçu comme une instance de dialogue sur les orientations stratégiques de l'établissement et de contrôle de l'action du directoire. Le nombre de parlementaires présents au conseil de surveillance serait le double de celui initialement prévu au conseil d'administration ; le poids de l'État serait limité à la moitié des voix et le président du conseil de surveillance serait élu parmi les membres représentant les collectivités territoriales.

En raison du choix d'intégrer l'Agence du numérique à l'ANCT en 2021, je suis défavorable à l'amendement COM-10. Je suis, en revanche, favorable à l'amendement COM-2, sous réserve de le transformer en sous-amendement à mon amendement COM-21 et d'en adapter la rédaction à la réforme de la gouvernance proposée.

M. Charles Revet . - Votre proposition ne rappelle la création des grands ports maritimes lors de laquelle la gouvernance avait aussi fait l'objet de vifs débats. Finalement, l'État a conservé la mainmise sur ces structures et les résultats apparaissent plus que mitigés... La composition des organes de gouvernance est essentielle. En l'espèce, le fait que le préfet porte deux casquettes doit nous rendre attentifs à ce que les élus locaux ne soient pas privés de leurs responsabilités. Pour ma part, je vais étudier soigneusement la proposition de loi avant de me décider à la voter. Dans votre amendement, le pouvoir revient au directoire, nommé par l'État. Sachez que les grands ports maritimes français souffrent de la concurrence allemande et néerlandaise à cause des dysfonctionnements de leur gouvernance.

M. Hervé Maurey , président . - L'amendement de notre rapporteur renforce le poids des élus dans le conseil de surveillance de l'agence.

M. Charles Revet . - Peu importe : seul le directoire dirige !

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - À la place d'une gouvernance associant d'une part, un directeur général et, d'autre part, un conseil d'administration réglant par ses délibérations l'ensemble des affaires de l'établissement, il est proposé d'instaurer un mode de gouvernance plus souple, s'organisant autour d'un directoire, composé de deux membres, et d'un conseil de surveillance associant, avec voix délibérative, des représentants de l'État disposant de la moitié des voix, deux députés et deux sénateurs, des représentants des collectivités territoriales et des salariés et agents publics de l'agence. La disposition relative aux représentants d'établissements publics siégeant avec voix consultative, d'ordre réglementaire, serait supprimée et le président du conseil de surveillance serait choisi parmi les représentants des collectivités territoriales.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Les conseils de surveillance des hôpitaux ne font qu'enregistrer ce que dicte l'Agence régionale de santé (ARS)... Je préfère encore un conseil d'administration !

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - J'ai fait le choix de la souplesse en libérant le conseil de surveillance de la gestion courante pour qu'il se consacre aux questions stratégiques.

M. Charles Revet . - Mais, encore une fois, le directoire dirige...

M. Michel Vaspart . - Les entreprises privées fonctionnent ainsi. Pourrions-nous envisager que les prérogatives du conseil de surveillance de l'agence soient renforcées par rapport au système traditionnel, afin qu'il ne traite pas seulement des questions stratégiques ? Sinon, les élus n'auront guère de pouvoir. À défaut, il convient de renforcer leur poids au sein du conseil d'administration.

M. Hervé Maurey , président . - Ce débat est essentiel.

M. Olivier Jacquin . - Si notre rapporteur souhaite s'assurer de l'efficacité de l'ANCT, le conseil de surveillance pourrait prévoir des délégations de pouvoir, sans le confier à un directoire.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Le conseil de surveillance, paritaire entre les représentants de l'État et des élus, pourrait étudier les conventions conclues par l'ANCT avec l'Etat et les différents établissements évoqués (ADEME, ANRU, ANAH, CEREMA. Mais si vous souhaitez qu'un conseil d'administration traditionnel gère l'agence, soit.

M. Hervé Maurey , président . - Je vous propose de réserver l'article 3 à la fin de l'examen de la proposition de loi.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Je vous indique que notre amendement COM-10 instaure une parité entre l'État et les élus au sein du conseil d'administration et y retire la Caisse des dépôts et consignations, qui ne peut être juge et partie.

L'article 3 est réservé.

Article additionnel après l'article 3

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-22 permet le rattachement d'autres établissements publics à l'ANCT pour ouvrir la voie à une rationalisation des interventions de l'État dans les territoires.

L'amendement COM-22 est adopté et devient article additionnel.

Article 4

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Le comité d'action territoriale est transféré à l'article 7 de la proposition de loi pour lui donner une base légale et renforcer ses compétences. En conséquence, mon amendement COM-27 , en discussion commune avec l'amendement COM-11 , supprime l'article 4.

L'amendement COM-27 est adopté, l'amendement COM-11 devient satisfait ou sans objet et l'article 4 est supprimé.

Article 5

L'amendement rédactionnel COM-23 est adopté.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-40 poursuit un double objectif. En premier lieu, il impose au préfet de prendre en compte d'une part, les initiatives locales des collectivités soutenues par leurs agences départementales, constituées, en application de l'article L. 5511-1 du code général des collectivités territoriales, par un département, des communes et des établissements publics intercommunaux pour apporter une assistance d'ordre technique, juridique ou financier à des projets et, d'autre part, les décisions prises au sein de la conférence territoriale de l'action publique mentionné à l'article L. 1111-9-1 du même code relatives à l'organisation des compétences entre collectivités. En second lieu, il institue un comité local de la cohésion territoriale dans chaque département, pour assurer le suivi de l'exécution des projets auxquels l'agence apportera son concours humain et financier. Il sera co-présidé par le préfet et un élu local. Cette organisation locale me semble essentielle tant pour garantir la préservation de l'autonomie des collectivités territoriales que pour assurer la transparence sur les actions soutenues par l'agence. Dès lors, l'amendement COM-12 relatif à la gouvernance locale de l'ANCT, en discussion commune, est satisfait.

M. Jean-Michel Houllegatte . - L'amendement COM-40 semble avoir été déposé comme la cavalerie dans un western...

L'amendement COM-40 est adopté et l'amendement COM-12 devient satisfait ou sans objet.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article additionnel après l'article 5

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - L'amendement COM-17 crée une commission locale de contrôle des attributions des financements de l'ANCT. Il ne me semble pas correspondre au mode opératoire de l'agence : l'ANCT n'a pas vocation à distribuer des financements mais à construire, à partir du souhait exprimé par les collectivités, des projets pour leurs territoires. En outre, son objectif d'une meilleure association des élus locaux à l'action territoriale de l'agence me semble satisfait par mon amendement COM-40 précité. J'en demande donc le retrait ou, à défaut, y serai défavorable.

L'amendement COM-17 n'est pas adopté.

Article 6

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-24 précise, suivant l'avis du Conseil d'État, les catégories de ressources dont bénéficie l'ANCT. Aux termes de l'article 34 de la Constitution, le législateur est compétent pour définir les catégories de ressources d'un établissement public. Mon amendement satisfait, dès lors, l'amendement COM-13 , en discussion commune.

M. Guillaume Gontard . - Il est indiqué que l'agence pourra percevoir des rémunérations sur des prestations de service.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Ce point concerne les prestations proposées par l'actuel EPARECA.

L'amendement COM-24 est adopté et l'amendement COM-13 devient satisfait ou sans objet.

L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article additionnel après l'article 6

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-25 permet à l'agence de créer des filiales et de prendre des participations dans des organismes actifs dans le champ de ses missions. La précision est utile pour lui permettre de mieux exercer ses missions. L'EPARECA recourt déjà à ce type de montage.

M. Charles Revet . - Quel serait le rôle de ces filiales ?

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - À titre d'illustration, l'EPARECA rachète des commerces, les transforme et les remet à disposition de commerçants. L'établissement dispose, par exemple, de filiales immobilières.

L'amendement COM-25 est adopté et devient article additionnel.

Article 7

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-34 tire les conséquences de l'avis rendu par le Conseil d'État concernant le caractère réglementaire des dispositions concernant le comité d'action territoriale. En conséquence, il renforce ses prérogatives afin de lui donner une base légale. Ce comité lui permettra de coordonner les interventions des différents opérateurs : l'ANRU, l'ANAH, l'ADEME, le CEREMA, les agences régionales de santé (ARS) et la Caisse des Dépôts et consignations. En outre, l'amendement renforce l'information du Parlement sur les actions de l'agence : les conventions pluriannuelles conclues entre l'État, l'ANCT, l'ANRU, l'ANAH, l'ADEME et le CEREMA lui seront transmises et il pourra formuler toute observation qu'il jugera utile.

L'amendement COM-34 est adopté.

L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 8

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-36 rassemble les trois comités de gestion du personnel institués par la proposition de loi en un seul, compétent pour l'ensemble des personnels dans un souci de simplification et bonne gestion, en lien avec le code du travail tel qu'il résulte des ordonnances dites « travail et dialogue social » de septembre 2017.

L'amendement COM-36 est adopté.

L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Division additionnelle avant l'article 9

L'amendement rédactionnel COM-37 est adopté.

Article 9

L'article 9 est adopté sans modification.

Article additionnel après l'article 9

M. Hervé Maurey , président . - Je vous propose de réserver la discussion sur l'article additionnel proposé par notre rapporteur, compte tenu de son lien avec l'article 3 de la proposition de loi précédemment réservé.

Article 10

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-29 garantit la sécurité juridique des dispositions relatives à la dissolution de l'EPARECA et procède aux coordinations nécessaires. Il est en discussion commune avec l'amendement COM-14 , auquel je suis par cohérence défavorable, et avec mon amendement rédactionnel COM-33 rectifié.

Les amendements COM-29 et COM-33 rectifié sont adoptés.

L'amendement COM-14 n'est pas adopté.

L'amendement rédactionnel COM-39 est adopté.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-38 garantit les droits des fonctionnaires précédemment rattachés au CGET et à l'EPARECA.

L'amendement COM-38 est adopté.

L'article 10 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 11

L'article 11 est adopté sans modification.

Article 12

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-18 supprime une mention inutile : il n'est pas nécessaire de gager une proposition de loi dont l'objet a été régulièrement évoqué dans les instances officielles.

L'amendement COM-18 est adopté et l'article 12 est supprimé.

La réunion, suspendue à 11 h 40, reprend à 11 h 45.

Article 3 (précédemment réservé)

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Je vous propose, à la suite de nos échanges, une nouvelle rédaction pour l'article 3 de la proposition de loi, relatif à la gouvernance de l'agence, avec mon amendement COM-21 rectifié. L'article préciserait désormais que le conseil d'administration de l'agence règle par ses délibérations les affaires de l'établissement, qu'il comprend, en nombre égal, d'une part, des représentants de l'État et de ses établissements publics et, d'autre part, des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, deux députés et deux sénateurs, ainsi que des représentants du personnel, qu'il élit son président parmi les membres représentant les collectivités territoriales et qu'il détermine dans son règlement intérieur les modalités de prévention des conflits d'intérêts. L'agence serait dirigée par un directeur général nommé par décret.

M. Charles Revet . - Si vous le nommez par décret, l'État aura la main !

M. Hervé Maurey , président . - Nous ne pouvons éviter cette procédure de nomination. Le rapporteur a entendu votre préférence pour un conseil d'administration au sein duquel la place des élus serait renforcée et l'équilibre avec les représentants de l'État assuré. L'objectif de parité entre les hommes et les femmes sera garanti grâce à l'amendement COM-2 devenu le sous-amendement COM-43 à l'amendement COM-21 rectifié.

M. Michel Vaspart . - Les parlementaires seront-ils représentés au sein du conseil d'administration ?

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Absolument ! Le conseil d'administration comptera deux députés et deux sénateurs, contre un député et un sénateur dans le texte initial de la proposition de loi

M. Jean-Michel Houllegatte . - Qu'entendez-vous s'agissant de l'équilibre entre l'État et les élus ?

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Les sièges du conseil d'administration seront équitablement répartis entre l'État et les représentants de ses établissements publics, d'une part, et, d'autre part, les représentants des élus locaux, des parlementaires et du personnel.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Qu'en est-il de la Caisse des dépôts et consignations ?

Mme Michèle Vullien . - En cas d'égalité des votes, comment le conseil d'administration se positionnera-t-il ?

M. Hervé Maurey , président . - Nous devons expertiser ce point d'ici à la séance publique compte tenu de la modification apportée à l'amendement du rapporteur à l'article 3.

Mme Nelly Tocqueville . - Est-ce précisé dans la proposition de loi ?

M. Jean-Pierre Corbisez . - Il conviendra, en tout état de cause, que les sièges au conseil d'administration soient en nombre pair.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . -La notion d'établissements publics englobe la Caisse des dépôts et consignations. M. Hervé Maurey , président . - L'article 3 nécessitera probablement des ajustements rédactionnels et de coordination du texte de la commission, auxquels nous procéderons en tant que nécessaire. Vous pourrez, par ailleurs, proposer des améliorations et des précisions en séance publique.

Le sous-amendement COM-43 et l'amendement COM-21 rectifié sont adoptés. L'amendement COM-10 devient satisfait ou sans objet.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article additionnel après l'article 9 (précédemment réservé)

M. Louis-Jean de Nicolaÿ , rapporteur . - Mon amendement COM-19 rectifié, dont j'ai modifié la rédaction compte tenu de votre préférence pour le maintien d'un conseil d'administration, tire les conséquences de la proposition de loi organique déposée par nos collègues Hervé Maurey et Jean-Claude Requier, qui impose l'audition du directeur général de l'agence par les commissions compétentes du Sénat et de l'Assemblée nationale. L'association des élus et l'information du Parlement s'en trouveront renforcés.

L'amendement COM-19 rectifié est adopté et devient article additionnel.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

M. Hervé Maurey , président . - La proposition de loi organique que j'ai déposée avec notre collègue Jean-Claude Requier complète utilement la proposition de loi portant création de l'ANCT en prévoyant l'audition, avant sa nomination par décret, de son directeur général par les commissions compétentes du Sénat et de l'Assemblée nationale.

M. Charles Revet . - Un appel à candidatures est-il prévu pour ce poste ?

M. Hervé Maurey , président . - Comme pour tout établissement public, l'État proposera une candidature.

La proposition de loi organique est adoptée sans modification.

La réunion est close à 11 h 55.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Lundi 15 octobre 2018 :

- Agence du numérique : M. Antoine Darodes , directeur, Mme Orianne Ledroit , directrice de la mission Société Numérique, MM. Zacharia Alahyane , directeur de la mission France Mobile, et Régis Baudoin , directeur de la mission France Très Haut Débit.

Mardi 16 octobre 2018 :

- Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) : Mme Hélène Geoffroy , présidente ;

- Caisse des dépôts : MM. Olivier Sichel , directeur de la Banque des territoires, et Philippe Blanchot directeur des relations institutionnelles ;

- Commissariat général à l'égalité des territoires : MM. Serge Morvan , commissaire général, et Éric Lajarge , directeur de cabinet.

Mercredi 17 octobre 2018 :

Table ronde :

- Association des maires de France : MM. Wilfried Schwartz , maire de La Riche, Sylvain Bellion , responsable du service Ville Urbanisme Habitat, et Mme Charlotte de Fontaines , chargée des relations parlementaires ;

- Association des départements de France : Mme Christine Bouquin , présidente du département du Doubs, MM. Philippe Herscu , conseiller aménagement du territoire, et Jérôme Briend , conseiller décentralisation ;

- Assemblée des communautés de France : MM. Charles-Éric Lemaignen , premier vice-président, conseiller métropolitain d'Orléans métropole, Nicolas Portier , délégué général, et Mme Amandine Fouché , responsable des relations parlementaires ;

- Association nationale des pôles d'équilibre territoriaux et ruraux et des pays : MM. Raymond Vall , président, sénateur du Gers, et Michaël Restier , directeur.

Jeudi 25 octobre 2018 :

- Cabinet de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales : M. Marc Chappuis , directeur adjoint de cabinet, Mme Juliette Part , conseillère aménagement du territoire, et M. Julien Autret , conseiller parlementaire.

Vendredi 26 octobre 2018 :

Auditions téléphoniques :

- M. Alain Lambert , président du Conseil national d'évaluation des normes ;

- M. Pierre Jarlier , président du CEREMA.

Contributions écrites :

- Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat (APCMA)

- CINOV - Fédération des syndicats des métiers de la prestation intellectuelle du Conseil, de l'Ingénierie et du Numérique ;

- Régions de France ;

- France urbaine ;

- Association des petites villes de France ;

- Association des maires ruraux de France ;

- Syntec-Ingénierie - fédération professionnelle des entreprises d'ingénierie.

AVIS DU CONSEIL D'ÉTAT


* 1 Aménagement du territoire, plus que jamais une nécessité , rapport d'information n° 565 (2016-2017) de MM. Hervé Maurey et Louis-Jean de Nicolaÿ, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

* 2 Voir le rapport n° 539 (2017-2018) fait par M. Louis-Jean de Nicolaÿ, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

* 3 https://www.cfdt-ufetam.org/rapport-de-configuration-de-lanct-juin-2018/.

* 4 Voir le rapport n° 539 (2017-2018) précité de M. Louis-Jean de Nicolaÿ.

* 5 Voir le rapport n° 565 (2016-2017) précité.

* 6 Lettre de mission du Premier Ministre à M. Serge Morvan, 18 juin 2018.

* 7 Le CGET a été créé par le décret n° 2014-394 du 31 mars 2014 et reprend les anciennes missions assurées par la délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR), par le Secrétariat général pour le comité interministériel des villes (SGCILV) et par l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Acsé) créée par la loi du 31 mars 2006.

* 8 http://www.senat.fr/amendements/2017-2018/631/Amdt_1069.html.

* 9 Article L. 2234-2 du code général des collectivités territoriales.

* 10 Rapport de préfiguration de Serge Morvan, pages 30-38 et annexe 10.

* 11 Décret n° 2018-913 du 24 octobre 2018 relatif aux attributions du ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

* 12 Discours du Président de la République Emmanuel Macron au 100 ème congrès des maires de France.

* 13 Ibidem.

* 14 Couverture numérique des territoires : veiller au respect des engagements pour éviter de nouvelles désillusions, rapport n° 193 (2015-2016) fait par MM. Hervé Maurey et Patrick Chaize au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

* 15 Ce rapport, élaboré conjointement par le CGET et les associations d'élus, fait état de cinq dynamiques territoriales différentes en France, qui nécessitent de replacer la question de la cohésion territoriale au coeur des politiques publiques et de construire des programmes différenciés selon les territoires, pour prendre en compte leurs spécificités.

* 16 Article collectif : Sandrine Berroir, maître de conférences (Université Paris-Diderot et UMR géographie-cités), Nadine Cattan, directrice de recherche au CNRS (UMR Géographie-cités), Frédéric Dobruszkes, FNRS Research Associate (Université Libre de Bruxelles), Marianne Guérois, maîtres de conférence (Université Paris-Diderot, UMR Géographie-cités), Fabien Paulus, maître de conférence (Université de Strasbourg), Céline Vacchiani-Marcuzzo, maître de conférences (Université de Reims-Champagne, UMR Géographie-cités).

* 17 Étude de Familles rurales « Territoires ruraux : perceptions et réalités de vie », octobre 2018.

* 18 Rapport Tiers lieux, un défi pour les territoires , de Patrick Levy-Waitz, avec l'appui du CGET. 2018.

* 19 Décision n° 93-322 DC du 28 juillet 1983 sur les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel.

* 20 CE, Assemblée, 16 novembre 1956.

* 21 TC, 12 novembre 1984.

* 22 TC, 10 février 1949, Guis et CE, 3 décembre 2003, Houté.

* 23 Etude annuelle, Conseil d'État, 2009.

* 24 Loi n° 85-729 du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en oeuvre de principe d'aménagement (article L. 321-1 et suivants du code de l'urbanisme).

* 25 Loi n° 2002-6 du 4 janvier 2002 relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle (article L. 1431-1 du code général des collectivités territoriales).

* 26 Loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et à France Télécom.

* 27 Loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur (articles L. 711-1 et suivants du code de l'éducation).

* 28 CE, 11 octobre 1985 , Syndicat général de la recherche agronomique CFDT et autres, n° 28106 ; CE, 12 avril 1995, Syndicat national des ingénieurs et techniciens de la météorologie, n° 150922, T.).

* 29 CE, avis, 16 juin 1992, EDCE 1992.

* 30 CE, 25 octobre 2004, Asaro et autres.

* 31 Page 38 du rapport précité.

* 32 Agence française de sécurité sanitaire des aliments, Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire par exemple.

* 33 Agence française de développement, Agence de financement des infrastructures de transport.

* 34 Agence de mutualisation des universités et établissements, Réunion des musées nationaux.

* 35 Page 57 du rapport précité.

* 36 Article 2 de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi).

* 37 Article 2 du décret n° 2014-394 du 31 mars 2014 portant création du Commissariat général à l'égalité des territoires.

* 38 Conseil d'État, rapport public 2018 - Activité juridictionnelle et consultative des juridictions administratives en 2017, p. 295.

* 39 Troisième alinéa du point 3.

* 40 Suivant la suggestion formulée par le Conseil d'État dans son avis sur la proposition de loi (cinquième alinéa du point 3).

* 41 Décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999.

* 42 Conseil d'État, 2 / 6 SSR, du 29 décembre 1999, 185970, mentionné aux tables du recueil Lebon.

* 43 Conseil d'État, Section des travaux publics, 7 juillet 1994, n° 356089, Avis « Diversification des activités d'EDF/GDF ».

* 44 Cet article précise que les syndicats mixtes « constitués exclusivement de communes et d'établissements publics de coopération intercommunale et ceux composés uniquement d'établissements publics de coopération intercommunale sont soumis aux dispositions des chapitres Ier et II du titre Ier du livre II » de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales.

* 45 Notamment l'acquisition des fonds commerciaux ou artisanaux ainsi que, le cas échéant, par voie d'expropriation, des immeubles ou droits réels immobiliers nécessaires aux opérations correspondant à son objet, la cession des immeubles ou les fonds acquis et la délégation de la gestion des fonds commerciaux ou artisanaux acquis à un ou plusieurs locataires gérants.

* 46 Décret n° 2015-113 du 3 février 2015 portant création d'un service à compétence nationale dénommé « Agence du numérique ».

* 47 Avant-dernier et dernier alinéas du point 3 de l'avis n° 395974.

* 48 Article L. 1431-2 du code de la santé publique.

* 49 Avis n° 539 (2017-2018) précité.

* 50 Article 11 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

* 51 Article R. 321-4 du code de la construction et de l'habitation.

* 52 Article R. 325-1 du Code de l'urbanisme.

* 53 Article 46 de la loi n° 2013-431 du 28 mai 2013 portant diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transports.

* 54 Article R. 131-4 du Code de l'environnement.

* 55 Point 7 de l'avis n° 395974 de l'Assemblée générale du Conseil d'État.

* 56 Voir l'annexe 6 du rapport de S. Morvan.

* 57 Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, code des ports maritimes, code de la santé publique, loi n° 75-1 du 3 janvier 1975 portant création du Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou, loi n° 82-155 de nationalisation du 11 février 1082, loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

* 58 Article 46 de la loi n° 2013-431 du 28 mai 2013 portant diverses dispositions en matières d'infrastructures et de services de transports.

* 59 Article 11 du décret n° 2004-123 du 9 février 2004 relatif à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, modifié par le décret n° 2015-299 du 16 mars 2015 relatif à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine.

* 60 Étude précitée adoptée par l'assemblée générale le 15 octobre 2009.

* 61 Voir les points 8 et 9 de l'avis n° 395974 adopté par l'Assemblée générale du Conseil d'État. Séance du 25 octobre.

* 62 Conseil d'État, n° 360307.

* 63 Page 91 de l'étude mentionnée.

* 64 La loi du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine disposait que l'ANRU « prend appui » sur les préfets avant que l'article 61 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales introduise la formule de « délégué territorial ».

* 65 Aux termes de l'article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 66 Aux termes de l'article L. 621-6 du code rural et de la pêche maritime.

* 67 Les départements les plus peuplés ont une direction départementale de la protection des populations et une direction départementale de la cohésion sociale distinctes, tandis que les deux structures sont rassemblées dans les départements moins importants.

* 68 Article 3 du décret n° 2012-509 du 18 avril 2012.

* 69 Page 31 du rapport France Territoires précité.

* 70 Ibidem.

* 71 Ibidem.

* 72 L'article 5 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux finances publiques liste les catégories de charges budgétaires de l'État parmi lesquelles les subventions, de fonctionnement, pour charges de service public.

* 73 Jaune « Opérateurs de l'État » annexé au PLF pour 2018.

* 74 Avis n° 113 (2017-2018) présenté au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable par M. Louis-Jean de Nicolaÿ.

* 75 L'article 3 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine a complété les dispositions de l'article 10-3 de la loi précitée du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

* 76 Enquête réalisée à la demande de la commission des finances du Sénat, en application de l'article 58-2° de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 77 CC, 19 juillet 1983, n° 83-160 DC.

* 78 R. Chapus, DAG 1, Montchrestien, 11 e édition n° 488.

* 79 E. Arrighi de Casanova, « Les quasi-contrats du plan », Dr. Soc., 1965, p. 341 ; F. Batailler, « Une nouvelle technique d'économie concertée : les “quasi-contrats” pour l'exécution du plan », RSF, 1964, p. 345.

* 80 Décret n° 70-1221 du 23 décembre 1970, publié au Journal officiel du 25 décembre 1970 ; J.-P. Duport, « Les contrats de plan », Moniteur des Travaux publics, 1971, p. 45 ; Y. Pimont, « Les contrats de plan », Revue de sciences financières, 1971, p. 697.

* 81 Circulaire du ministre de l'équipement, n° 74-112 du 4 juillet 1974, Moniteur des Travaux publics, 17 août 1974, p. 124

* 82 Circulaire de la DATAR du 11 juillet 1975 puis circulaire du 30 mars 1977, P. Rolland, « Les contrats de pays », Revue de droit public, 1979, p. 1338 ; D. Pépy, « Une formule originale : les contrats de pays », Revue administrative, 1975, p. 623.

* 83 JORF, 30 juillet 1982 ; AJDA, 1982, p. 615 et p. 577, commentaire H. Jacquot.

* 84 Rapport public 2008 du Conseil d'État précité : « La construction européenne a renforcé l'échelon régional à l'intérieur des États membres. Dans les années 1980 et dans la foulée de la création du comité des régions, la Commission a tenté de s'appuyer davantage sur l'échelon régional pour sortir d'un face-à-face exclusif avec les États membres et assurer une meilleure application directe du droit et des politiques communautaires à l'échelon local. La création des fonds structurels (FEOGA, FSE, FEDERE...) s'inscrit dans cette logique. Les règlements qui les régissent prévoient un large recours au contrat, y compris pour fixer les montants alloués aux régions. L'effet structurant de ces fonds a d'ailleurs été tel que la planification régionale a fini par se caler entièrement, à la fois en ce qui concerne sa périodisation, sa forme contractuelle et ses orientations, sur celle des fonds européens, qui la financent à hauteur de 30 % environ. Même si les États membres centralisent et rendent compte de l'emploi des fonds, la négociation part de l'échelon régional et remonte jusqu'à Bruxelles. Autrement dit, sur ce point, la construction européenne a conforté la pratique préexistante de contractualisation de l'aménagement du territoire déjà largement pratiquée chez nous et lui a permis de prendre une plus grande ampleur ».

* 85 Page 490 du rapport public précité.

* 86 CE, Sect., 7 février 1936.

* 87 Circulaire du Premier ministre du 23 février 1989.

* 88 Circulaire du Premier ministre du 26 juillet 1995.

* 89 Point 9 de l'avis n° 395974 de l'Assemblée générale du Conseil d'État.

* 90 CE, 8 mars 1957, Jalenques de Labeau et TC, 20 juin 1994, Barlaud, pour l'application au fonctionnaire mis en position de détachement.

* 91 Voir la réponse du Secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation à Mme Brigitte Gonthier-Maurin (Hauts-de-Seine, CRC-SPG), le 10/03/11.

* 92 3° de l'article L. 2312- 8 du code du travail.

* 93 Article 11 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, pour l'Agence nationale pour la rénovation urbaine.

* 94 Article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation, pour l'Agence nationale de l'habitat.

* 95 Le dernier contrat d'objectifs et de performance de l'EPARECA avec l'État a été signé le 13 juillet 2016.

* 96 Décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012.

* 97 Loi n°... du ... portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.

* 98 La Mission Société Numérique conduit notamment l'élaboration et la mise en oeuvre de la Stratégie nationale pour un numérique inclusif, en lien avec le chantier 25 de la Conférence nationale des Territoires.

* 99 Article L. 144-3 du même code.

* 100 Points 14 et 15 de l'avis n° 395974 de l'Assemblée générale du Conseil d'État.

* 101 Que ce soit par M. Julien DENORMANDIE, secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires, lors de l'examen par l'Assemblée nationale de la proposition de loi créant une Agence nationale pour la cohésion des territoires de notre collègue Philippe Vigier, le 7 décembre 2017, par M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires le 30 mai 2018 à l'occasion du lancement de la Banque des territoires et par M. Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'Intérieur, lors de l'examen par le Sénat de la proposition de loi relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale de nos collègues Philippe Bas et Mathieu Darnaud, le 12 juin 2018.

* 102 Voir le rapport d'information n° 401 (2007 2008) de notre ancien collègue Jean ARTHUIS, au nom de la commission des finances du Sénat.

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