MISSION « ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE L'ÉTAT » - M. JACQUES GENEST, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2017

A. UNE FORTE AUGMENTATION DES DÉPENSES DE LA MISSION

1. Une augmentation des dépenses de la mission principalement liée au cycle électoral et à un changement de périmètre...

Les dépenses de la mission ont augmenté de 11,9 % (pour les crédits de paiement ) tandis que les autorisations d'engagement mobilisées ont été supérieures de 13,1 % par rapport au niveau de 2016.

Le cycle électoral et un changement de périmètre expliquent près des deux tiers de cette augmentation.

Évolution des dépenses de la mission

(en millions d'euros)

Programme

2016

2017

Variation

Administration territoriale (307)

1 669,5

1 705,3

+ 36

Vie politique, cultuelle et associative (232)

232,8

370,8

+ 138

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur (216)

797,2

943,5

+ 146,3

Total

2 699,5

3 019,6

+ 320,1

Source : RAP 2017

Appréciée au regard des trois programmes de la mission, la dynamique des dépenses, annoncée par les ouvertures de la loi de finances initiale, a été cependant nuancée. Forte pour les programmes 232 et 216, elle a été plus mesurée, mais supérieure à l'inflation pour le programme 307 « Administration territoriale ».

Les programmes de la mission AGTE

Les trois programmes de la mission « AGTE » sont, on le rappelle, d'une inégale densité budgétaire, le programme 307 (« Administration territoriale ») regroupant environ 54,4 % des crédits de paiement (1 690,7 millions d'euros ouverts en 2017 par la loi de finances initiale).

Les deux autres programmes, « Vie politique, cultuelle et associative » (232) pour 470,1 millions d'euros d'ouvertures en 2017, année marquée par un échéancier électoral dense qui détermine le profil budgétaire du programme, et « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » (216) avec 945,7 millions en loi de finances initiale pour 2017, mobilisent, le premier, 15,1 % des moyens (à comparer aux 3,9 % de l'exercice précédent), le second 30,4 % des crédits.

Cette répartition prend en compte une certaine irrégularité de la structure de la mission en raison d'un cycle électoral dont les effets sur la programmation et l'exécution des crédits ouverts en loi de finances initiale sont chroniquement significatifs.

La programmation financière de la mission adoptée en loi de finances initiale avait annoncé une hausse des dépenses.

Évolution des crédits de la mission dans la loi de finances initiale

(crédits de paiement en millions d'euros)

Programme

2016

2017

Variation

Administration territoriale (307)

1 641,8

1 690,7

+ 48,9

Vie politique, cultuelle et associative (232)

99,4

470,1

+ 370,7

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur (216)

788

945,7

+ 157,7

Total

2 529,2

3 106,5

+ 577,3

Source : RAP 2016 et 2017

En ce qui concerne les ouvertures de crédits de paiement, sur les 577,3 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires ouverts en 2017 (+ 22,8 %), 370,7 millions d'euros avaient été inscrits au profit du programme 232, soit près des deux tiers des crédits supplémentaires, le reliquat étant principalement rattachable à une forte progression des crédits ouverts au titre du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », programme de soutien du ministère (+ 157,7 millions d'euros), pour une large partie (100,4 millions d'euros) du fait d'un changement de périmètre budgétaire (voir infra) .

Les ouvertures de crédits pour 2017 ont donc été d'emblée marquées par les effets du cycle électoral, particulièrement dense au cours de l'année.

Son impact se vérifie également, mais à un moindre degré, quand on considère la progression effective des dépenses par rapport à 2016.

Pour soutenue qu'elle a été (+ 320,1 millions d'euros), celle-ci s'est révélée cependant globalement moins forte en exécution que prévu. L'augmentation des dépenses du programme 232 de 138 millions d'euros (+ 59,3 %), rend compte de 43 % de la progression des dépenses totales de la mission, soit moins qu'escompté du fait d'un niveau de dépenses plus élevé que programmé en 2016, mais aussi d'un niveau de dépenses moins élevé en 2017 que prévu. Il faut relever que cette dernière sous-consommation des crédits n'est pas équivalente à des économies définitives si bien que des reports de crédits exerceront un impact haussier sur les dépenses de 2018, qui dépasseront les crédits ouverts.

De son côté, l'alourdissement des dépenses du programme de soutien 216, plus proche de la prévision, ressort comme particulièrement marqué avec 146,3 millions d'euros de plus qu'en 2016 (+18,4 %).

L'inclusion des crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance dans le programme suscite un alourdissement des dépenses de 72,9 millions d'euros en crédits de paiement (en retrait de près de 30 millions d'euros par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale), soit à peu près la moitié du supplément de dépenses. Pour être partiellement optique, cette progression des dépenses n'en correspond pas moins à la dérive de certaines charges, en particulier des charges juridiques et contentieuses, sur laquelle votre commission des finances avait pu formuler de clairs avertissements.

Par rapport à ces deux programmes, le programme 307, qui est le principal programme de la mission en termes financiers, et est également le programme le plus « pilotable » de la mission, enregistre une progression de ses dépenses de 2,1 %, supérieure à celle envisagée en loi de finances initiale.

2. Une dynamique tirée par les dépenses de fonctionnement et des dépenses de personnel qui, malgré un schéma d'emplois négatif, augmentent, mais plus modérément
a) Une forte progression des dépenses de fonctionnement et d'intervention

Les dépenses de fonctionnement et d'intervention de la mission progressent de plus de 38 % en 2017.

En 2017, l'augmentation des dépenses de la mission est attribuable pour près des neuf dixièmes à l'accroissement des dépenses de fonctionnement (60 %) et d'intervention (29 %).

Plus modéré, l'alourdissement des dépenses de personnel contribue à 12,5 % de l'élévation des charges.

Les dépenses de la mission AGTE sont majoritairement des dépenses de personnel.

Le poids de ces dépenses varie cependant d'une année à l`autre à raison des particularités du programme 232 qui porte presque exclusivement des dépenses de fonctionnement ou d'intervention et dont l'ampleur des dotations est dépendante du calendrier électoral.

L'exercice 2017, qui enregistre une réduction de la part relative des dépenses de personnel dans le total des charges budgétaires de la mission à 64,6 % contre 70,6 % en 2016 le confirme dans la mesure où cette variation résulte pour moitié de l'augmentation des dépenses liées au cycle électoral.

Structure des dépenses de la mission AGTE par nature

2016 (A)

2017 (B)

Variation B/ A

Dépenses de personnel

70,6 %

64,6 %

- 6

Autres dépenses

29,4 %

35,4 %

+ 6

dont :

Fonctionnement

23,3 %

27 %

+ 3,7

Investissement

2 %

1,7 %

-0,3

Interventions

4,1 %

6,7 %

+ 2,6

Opérations financières

NS

0,0 %

NS

Total

100 %

100 %

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du rapport annuel de performances de la mission pour 2017

Le recul de 6 points est compensé par un alourdissement du poids relatif des dépenses de fonctionnement de 3,7 points et des dépenses d'intervention, au demeurant plus élevées que prévu dans la loi de finances initiale, de 2,6 points.

Données sur l'exécution des crédits de la loi de finances initiale
par nature de dépenses

(en millions d'euros)

Réalisation 2016 (A)

Prévision 2017 (B)

Réalisation 2017 (C)

C-A

C-B

Dépenses de personnel

1 908,6

2 041,2

1 949,1

+ 40,5

- 92,1

Autres dépenses

791,0

1 128,0

1 070,6

+ 279,6

- 57,4

dont :

Fonctionnement

628,8

833,9

815,6

+ 186,8

- 18,3

Investissement

53,5

113,5

52,5

- 1

- 61,0

Interventions

108,5

180,5

202,4

+ 93,9

+21,9

Opérations financières

0,3

0

0

- 0,30

0

Total

2 699,6

3 169,2

3 019,7

+ 320,1

- 149,5

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du rapport annuel de performances de la mission pour 2017

En ce qui concerne les dépenses d'intervention, leur progression résulte pour l'essentiel du changement de périmètre de la mission déjà signalé avec l'inclusion des crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance.

S'agissant des dépenses de fonctionnement, les programmes 232 et 216 sont responsables de la quasi-totalité de leur hausse. Pour ce dernier programme, la progression est due aux dépenses de contentieux (voir infra ) tandis que pour le programme relatif au financement de la vie politique ce sont les coûts des élections tenues en 2017 qui en expliquent la dynamique.

b) Malgré un schéma d'emplois a priori économe, une progression des dépenses de personnel

La mission AGTE est placée sous l'influence d'une réorganisation de ses effectifs censée prolonger la forte réduction de long terme des emplois rémunérés par la mission. Il s'agit du plan préfecture nouvelle génération (PPNG), qui prévoit la suppression de 1 300 ETPT en trois ans.

Cet objectif implique logiquement une réduction progressive du plafond d'emplois de la mission.

Les données du tableau ci-dessous paraissent témoigner d'une difficulté à s'inscrire dans cette trajectoire dans la mesure où le plafond d'emplois s'est trouvé augmenté de 847 ETPT par rapport à la consommation de 2016 (passant de 32 277 ETPT à 33 124 ETPT).

Évolution des emplois en 2017 (en ETPT)

(en ETPT)

Programme

Réalisation 2016

LFI+LFR+

Réalisation 2017

Écart

2017/2016

Écart 2017 réalisés/ 2017 prévus

Transferts en

gestion

Administration territoriale (307)

25 797

26 371

25 985

+ 188

- 386

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur (232)

6 437

6 702

6 432

-5

- 270

Vie politique, cultuelle et associative (207)

43

51

50

+7

- 1

Total

32 277

33 124

32 467

+ 190

- 657

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Toutefois, cette donnée n'est pas pleinement probante dans la mesure où elle a intégré un certain nombre de transferts en gestion ainsi que des effets en année pleine de mesures antérieures.

En revanche, il est plus significatif d'observer que le nombre d'ETPT consommés s'est finalement trouvé supérieur de 190 unités par rapport à 2016.

Ce supplément de moyens a été concentré sur le programme 307 (+ 188 ETPT).

Ces emplois correspondent pour l'essentiel à un renforcement des centres d'expertise et de ressources titres (CERT) mis en place en application du PPNG (+ 32 ETPT) principalement pour le CERT chargé de la délivrance des certificats d'immatriculation, de l'impact de l'augmentation des besoins liés à l'accueil des étrangers (+ 94 ETPT) et de la mise en oeuvre du pacte de sécurité.

Dans ces conditions, les schémas d'emplois de la mission ont été révisés.

Le RAP pour 2017 indique que la baisse des ETP a été plus faible qu'anticipée pour le programme 307, à - 485 contre une prévision de - 500. Il présente une décomposition de ces mouvements faisant ressortir que le PPNG a suscité la suppression de 685 ETP tandis que les besoins nés du pacte de sécurité et de l'accueil des migrants ont entraîné la création de 200 ETP.

Cette présentation est sans doute un peu flatteuse dans la mesure où les suppressions d'emplois imputées au plan PPNG ne prennent pas nécessairement en considération un certain nombre de besoins apparus en cours d'exercice et qui n'ayant donné lieu qu'à des recrutements tardifs n'ont pas exercé au cours de l'exercice 2017 tout leur potentiel d'augmentation des emplois du programme 307. De la même manière, la variation des effectifs au titre de l'accueil des migrants pourrait se révéler sensiblement plus forte en année pleine que celle retracée par le ministère.

Celui-ci a très largement recouru à des emplois temporaires pour assurer les plans de charge correspondant au terme de recrutement en cours d'année. Mais, il est d'ores et déjà prévu que l'opération « 1 000 mois vacataires » destinée à assurer l'accueil des étrangers (avec un effet de 84 ETPT en 2017) soit reconduite en 2018, pour un effet en année pleine de 100 ETPT. Quant aux besoins complémentaires d'effectifs en lien avec la mise en oeuvre du PPNG apparus une fois déployées les réorganisations de process , ils pourraient n'être pas tout à fait stabilisés.

Quant au programme 216, la réduction de sa consommation en ETPT résulte d'un changement de périmètre lié aux modifications apportées aux conditions de prise en charge des emplois des cabinets du ministre de l'aménagement du territoire et de son secrétariat d'État.

En bref, malgré la réalisation d'un schéma d'emplois de - 500 ETP, le nombre des ETPT rémunérés par la mission a subi une augmentation de 190 unités par rapport à 2016.

Modeste en volume, elle a néanmoins contribué à l'accroissement de 1,7 % des dépenses de personnel de la mission (+40,6 millions d'euros).

Cette évolution traduit plusieurs mesures, les unes générales, comme l'augmentation de la valeur du point d'indice (8,9 millions d'euros supplémentaires) ou l'application du protocole PPCR (5,9 millions d'euros), d'autres, catégorielles. Parmi celles-ci figurent les mesures de restructuration liées à la mise en oeuvre du PPNG, qui devrait se traduire par un coût pérenne pour la mission.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page