AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le modèle agricole développé dans notre pays depuis l'après-guerre repose, plus qu'ailleurs en moyenne, sur une forte dépendance aux produits phytopharmaceutiques. L'utilisation quasi-systématique des pesticides dans l'agriculture a pourtant suscité, dès les années 1970, des interrogations quant à ses effets sur l'environnement. Elle est aujourd'hui largement remise en cause, avec la prise de conscience croissante par les pouvoirs publics et nos concitoyens, des risques qu'elle fait peser sur la santé humaine. Les pesticides et leurs effets sur la santé sont devenus un sujet de préoccupation et de mobilisation majeur, suscitant de nombreux rapports, en particulier parlementaires, et la mise en place par le législateur en 2014 d'un système de phytopharmacovigilance piloté par l'Anses 1 ( * ) .

La mission commune d'information menée en 2012 sous la présidence de notre collègue Sophie Primas faisait ainsi état d'une « urgence sanitaire » encore insuffisamment prise en compte 2 ( * ) . Au regard notamment des données collectées par les épidémiologistes dans le secteur agricole, le rapport de notre collègue Nicole Bonnefoy dressait le constat d'un système conduisant à une sous-déclaration et à une sous-reconnaissance des maladies professionnelles liées à l'exposition aux produits phytopharmaceutiques.

Dans ce prolongement, la proposition de loi soumise à notre assemblée a pour objet d'améliorer la prise en compte par notre législation des dommages occasionnés par l'exposition aux pesticides.

Certes, un encadrement plus étroit des pesticides a progressivement été mis en place par la réglementation en vigueur. Ce cadre est nécessairement amené à évoluer en fonction des connaissances disponibles, comme l'illustrent les récentes discussions sur l'autorisation du glyphosate. De même, des progrès ont été recherchés en matière de prévention. Cependant, la nécessité de renforcer la prévention, dont chacun partage le constat, ne nous autorise pas à écarter la question de la réparation lorsque des dommages ont été subis. Prévention et réparation ne sont pas antinomiques.

Partant de ce principe, la proposition de loi portant création d'un fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques prévoit, sous certaines conditions, l'indemnisation des préjudices résultant de l'exposition à ces produits en allant au-delà de la simple réparation forfaitaire que notre législation sociale limite aux victimes professionnelles. Elle est l'occasion de poser un cadre normatif rigoureux, prudentiel et qui sera amené à évoluer. Sur des points fondamentaux en effet, le niveau de connaissances que les pouvoirs publics ont acquis est aujourd'hui suffisant pour ne pas prendre le risque de différer le travail du législateur au motif que ces connaissances sont encore en progrès.


* 1 Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.

* 2 Rapport d'information n° 42 (2012-2013) « Pesticides : vers le risque zéro » fait au nom de la mission commune d'information sur les pesticides et leur impact sur la santé et l'environnement par Mme Nicole Bonnefoy.

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