SECONDE PARTIE :
LES STIPULATIONS DES TRAITÉS

I. LE TRAITÉ D'EXTRADITION

Le texte finalement retenu par les parties correspond à un projet proposé par la France qui, comme les traités qu'elle a précédemment conclus dans ce domaine, s'inspire largement de la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957.

Ses dispositions permettront de fluidifier les échanges franco-vietnamiens en matière d'extradition.

A. LE CHAMP D'APPLICATION

Aux termes de l'article premier, les parties s'engagent à se livrer réciproquement , et selon les dispositions du traité, « toute personne qui, se trouvant sur le territoire de l'une des parties, est poursuivie pour une infraction pénale ou recherchée aux fins d'exécution d'une peine privative de liberté , par les autorités judiciaires de l'autre partie, pour un fait donnant lieu à extradition » .

Les faits entrant dans le champ d'application sont définis à l'article 2. Ils concernent :

- toute infraction passible, au regard de la législation des deux parties, d'une peine privative de liberté d'au moins un an ;

- toute demande aux fins d'exécution d'une peine, prononcée par l'autorité judiciaire compétente de la partie requérante, lorsque la durée restant à purger est d'au moins six mois ;

- ainsi que les infractions en matière de taxes, d'impôts, de douane et de change.

L'extradition peut également être accordée pour des faits distincts et punis par la législation des deux parties, même si certains d'entre eux ne satisfont pas aux deux premiers critères précités.

B. LES MOTIFS DE REFUS D'EXTRADITION

1. Les motifs obligatoires
a) La nature de l'infraction

En application de l'article 3, toute demande d'extradition doit être refusée si elle concerne des infractions politiques - ou connexes à de telles infractions -, ou encore des infractions exclusivement militaires .

La partie requise doit également opposer son refus si elle considère que la demande est présentée pour des raisons tenant à la race, la religion, la nationalité ou aux opinions politiques de la personne concernée, ou que la situation de cette personne risque d'être aggravée pour l'une de ces raisons.

b) Le jugement et la prescription

L'extradition est également refusée si la personne réclamée devait être jugée par un tribunal n'offrant pas les garanties fondamentales de procédure , ou si elle devait exécutée une peine infligée par un tel tribunal.

En application du principe non bis in idem , l ' extradition n'est pas davantage accordée si la personne réclamée a fait l'objet d'un jugement définitif, dans la partie requise, au titre de l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée, ou qu'elle a bénéficié d'une mesure d'amnistie ou de grâce.

La prescription de l'action publique ou de la peine , conformément à la législation de la partie requise, constitue également un motif de refus . La partie requise tiendra toutefois compte, dans la mesure où sa législation le permet, des actes effectués par la partie requérante qui ont pour effet d'interrompre ou de suspendre la prescription.

c) La peine de mort

La peine capitale est appliquée au Vietnam ; quinze infractions, dont le trafic de stupéfiants, sont aujourd'hui passibles de cette peine ( cf. supra ).

Le dernier paragraphe de l'article 3 prévoit à ce titre que toute demande d'extradition pour une infraction punie de la peine de mort dans la partie requérante sera rejetée , sauf à ce que cette partie donne les garanties suffisantes qu'une telle peine ne soit ni requise, ni prononcée, ni exécutée.

Le cas échéant, ces garanties seraient communiquées, par la voie diplomatique, sous la forme d'une note verbale. De telles garanties, qui engagent le pouvoir judiciaire quant au prononcé et à l'exécution de la peine, n'auraient pas pu être présentées par la partie française - si la peine de mort était toujours en vigueur - en raison du principe de séparation des pouvoirs.

La partie française avait proposé de consacrer un article du traité à la peine capitale et de retenir un mécanisme de substitution de peine , analogue à celui prévu par la convention d'extradition franco-marocaine 7 ( * ) . La partie vietnamienne a cependant fait valoir qu'un tel mécanisme n'était pas compatible avec son système juridique , et a également souhaité que la question de la peine capitale soit appréhendée au titre des motifs de refus de l'extradition. Le libellé du dernier paragraphe de l'article 3 est néanmoins conforme aux standards habituellement mis en oeuvre par la France, et conforme à la jurisprudence du Conseil d'État 8 ( * ) .

2. Les motifs facultatifs
a) La compétence

L'article 4 précise que la demande d'extradition peut être refusée si les autorités judiciaires de la partie requise sont compétentes pour connaître l'infraction visée par la demande . Il en va de même si, à raison de cette même infraction, ces autorités ont poursuivi la personne réclamée, ou qu'elles ont décidé de ne pas engager de poursuites ou d'y mettre fin.

b) Le lieu de commission de l'infraction

La demande de remise peut être rejetée lorsque l'infraction a été commise hors du territoire de la partie requérante , et que la législation de la partie requise n'autorise pas la poursuite dans un tel cas 9 ( * ) .

c) Le jugement par un État tiers

La partie requise peut aussi refuser de remettre une personne ayant déjà fait l'objet d'un jugement définitif (condamnation, relaxe ou acquittement) dans un État tiers du chef de la même infraction.

d) Les considérations humanitaires

Enfin, une clause humanitaire a été introduite afin que l'extradition soit facultative si elle susceptible d'avoir des conséquences graves pour la personne réclamée du fait de son état de santé ou de son âge.


* 7 Cf. loi n° 2010-610 du 7 juin 2010.

* 8 Conseil d'État, section, 27 février 1987, Fidan , req. n° 78665.

* 9 C'est-à-dire lorsqu'elle ne connaît pas, dans son droit, de critère de compétence extraterritoriale semblable à celui mis en oeuvre par la partie requérante.

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