B. LA HAUSSE DES DÉPENSES DE PENSIONS N'EQUIVAUT PAS NÉCESSAIREMENT À UNE HAUSSE DU POUVOIR D'ACHAT DES PENSIONNÉS

La hausse de long terme des dépenses de pensions des fonctionnaires civiles et militaires de l'État est attribuée pour environ 57 % à l'augmentation de la valeur moyenne de la pension (+ 2,4 % par an). L'autre facteur d'augmentation des dépenses réside dans la croissance des effectifs de pensionnés. Ils ont progressé de 1,7 % par an si bien qu'en 2016 le nombre des pensionnés atteignait à peu près 1,8 fois le niveau de 1990.

Ces données appellent des analyses complémentaires afin de cerner plus précisément les composantes de la dynamique des dépenses de pensions et d'en suggérer quelques conclusions sur la politique implicitement suivie en la matière.

1. Une forte progression du nombre des pensionnés

Le nombre des bénéficiaires de pensions civiles, qui a presque doublé entre 1990 et 2014, a enregistré une croissance supérieure à la moyenne dans un contexte de baisse du nombre des pensions militaires.

Évolution du nombre des pensionnés civils de la fonction publique
d'État et de la fonction publique territoriale

Source : Cour des comptes, « Les pensions de retraite des fonctionnaires ». Octobre 2016

On relève néanmoins un ralentissement de la croissance du nombre des pensionnés à partir de 2010, en raison d'évolutions institutionnelles qui joueraient encore sur la dynamique du volume des pensions l'an prochain (voir ci-dessous).

2. La hausse de la valeur moyenne des pensions est tributaire d'un effet de noria

Sur longue période, la pension moyenne servie aux différentes catégories de retraités de la fonction publique a connu des augmentations plus ou moins fortes selon les types d'emplois concernés.

Évolution de la valeur de la pension moyenne par catégorie et inflation
(2000-2016)

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique 2018

Pour les ouvriers de l'État et les fonctionnaires hospitaliers la progression a été de l'ordre de 2 %, plus forte que pour les fonctionnaires civils et militaires (environ 1,75 %), les fonctionnaires des collectivités territoriales fermant la marche avec une croissance de 1,52 %.

Ces augmentations proviennent de deux facteurs très différents, parmi lesquels il y a lieu de mentionner ici un effet de noria .

Les pensions nouvellement liquidées sont supérieures aux pensions du stock en raison, en particulier, des progrès des rémunérations au fil des générations qui ont élevé la base liquidative des pensions, et conduisent à élever la valeur moyenne de la pension.

Le graphique ci-dessous qui recense la valeur des pensions liquidées au cours de chacune des années de 2000 à 2016, et les évolutions au cours de la période concernée, montre par exemple qu'en 2016 la valeur moyenne d'une pension liquidée au titre de la fonction publique de l'État était supérieure à la valeur moyenne des pensions de cette catégorie de 322,5 euros (soit un montant supérieur de plus de 17 %).

Il montre également que la revalorisation des pensions liquidées à partir de 2000 a été beaucoup plus heurtée que pour la pension moyenne, l'année 2011 enregistrant même une baisse de la valeur moyenne des pensions alors liquidées (- 56 euros, soit - 2,6 %).

Évolution de la valeur de la pension moyenne des nouveaux pensionnés
par catégorie et inflation (2000-2016)

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique 2018

Enfin, il ressort du graphique que la valeur moyenne des pensions liquidées, inversant une nette tendance à la hausse de 2000 à 2011, a stagné depuis 2012 (subissant même un recul de 0,06 % malgré une augmentation de l'indice de liquidation).

Néanmoins, malgré cette évolution, une part importante de l'élévation du montant moyen des pensions versées provient ainsi du renouvellement de la population des retraités.

Cet effet noria a exercé un fort effet à la hausse sur les dépenses de pensions, qui tend à se modérer, mais constitue un facteur autonome d'augmentation des dépenses du compte d'affectation spéciale.

3. ... et doit être appréciée en fonction de l'inflation observée

L'inflation a atteint 23,5 % entre 2000 et 2016. Malgré certaines évolutions qui ont pu retarder l'application des règles d'indexation, les pensions ont, en général, été indexées sur les prix.

La valeur de la pension moyenne en stock dans la fonction publique d'État, pour avoir augmenté de l'ordre de 32 % en seize ans, n'a connu une amélioration en valeur réelle que de 6,9 %, très inférieure à la croissance en volume du produit intérieur brut sur la même période. Cette progression résulte entièrement de la hausse des bases liquidatives dans un contexte où, désormais, au mieux, les pensions sont indexées sur l'inflation.

Depuis 2012, selon la réponse au questionnaire de votre rapporteur spéciale, la pension moyenne des civils (montant principal et accessoires) a progressé de 2,1 %. Cette progression demeure en deçà de l'inflation sur la période 2012 - 2016 qui s'élève à 3,2 %. De ce fait la pension moyenne en euros constants décroît depuis 2012. De son côté, la pension moyenne des militaires (montant principal et accessoires) décroît de 0,3 % en euros courants sur la même période.

Par ailleurs, malgré la valeur plus élevée des pensions servies, le taux de remplacement (rapport de leur valeur à la rémunération d'activité perçue avant le départ en retraite) tend à baisser. Cette évolution résulte à la fois du durcissement des règles de liquidation du fait des réformes du système de retraite et de l'alourdissement des éléments indemnitaires dans la structure des rémunérations payées aux fonctionnaires, qui traduit un processus de rétractation lente du champ d'application du régime.

Observation n° 1 : Après une augmentation entre 1990 et 2012 résultant de facteurs complexes, en particulier des gains salariaux des agents publics, les dépenses de pensions de retraite des fonctionnaires civils et militaires de l'État tendent à ralentir au point que la pension moyenne voit sa valeur réelle diminuée, cette évolution étant plus défavorable encore pour la pension moyenne des militaires en retraite. Dans ce contexte, après une année 2017 « atypique », les dépenses de pensions du CAS progresseraient de 1,3 % avec cependant une croissance un peu plus forte pour les seules dépenses de pensions du programme 741.

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