TROISIÈME PARTIE - LE FINANCEMENT DE LA VIE POLITIQUE ET LES MOYENS GÉNÉRAUX DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR

I. LE FINANCEMENT DE LA VIE POLITIQUE

A. LE BUDGET D'UNE ANNÉE SANS RENDEZ-VOUS ÉLECTORAL SIGNIFICATIF SUR LE PLAN FINANCIER

1. Un retour à des bases budgétaires de temps électoral calme

Les crédits du programme 232 baissent de 344,2 millions d'euros, cette baisse touchant particulièrement l'action du programme consacrée aux élections (- 344,6 millions d'euros). Une partie du budget de 2018 supportera un reliquat du coût des scrutins de 2017, dont la totalité des besoins n'avait pas été budgétée dans la loi de finances pour 2017.

Évolution des crédits du programme 232 (2017-2018)

Ouverts en LFI pour 2017

Demandés pour 2018

Évolution 2018-2017

Action 01 - Financement des partis

68,7

68,7

0

Action 02 - Organisation des élections

391,2

46,6

- 344,60

Action 03 - Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques

7,0

7,6

0,60

Action 04 - Cultes

3,0

2,8

- 0,20

Action 05 - Vie associative

0,10

0,089

- 0,04

Total programme 232

470,0

125,8

- 344,20

Source : projet annuel de performances 2018

La programmation pour 2018 est marquée par l'hypothèse d'une économie de 0,7 million d'euros correspondant à dématérialisation de l'envoi de la propagande électorale dans le cadre des scrutins organisés en 2018. De la même manière, la programmation à long terme de la mission se fonde sur une économie de 414,3 millions d'euros de même origine pour la période de 2018 à 2022. Or, le Parlement a systématiquement rejeté ces mesures, considérant qu'elles portraient atteinte à la sincérité des scrutins.

Sur ce point les informations fournies à votre rapporteur spécial comportent quelques éléments de contradiction. D'un côté, elles insistent sur les inconvénients de la propagande sous forme papier. Il est indiqué que le coût prévisionnel de l'élection du Président de la République est de 218,1 millions d'euros et celui des élections législatives est de 199,4 millions d'euros. Pour ces élections, les dépenses liées à la propagande électorale (mise sous pli, acheminement au domicile de l'électeur, remboursement aux candidats) représentent respectivement 61 % et 55 % du coût total de l'élection.

Concernant l'externalisation de la mise sous pli, le Gouvernement observe que peu de sociétés ont une capacité logistique suffisante pour traiter les documents de propagande dans des délais très contraints, particulièrement lorsqu'il n'y a qu'une semaine entre les deux tours de scrutin. Pour les élections organisées en 2017, seule une dizaine de prestataires différents ont été retenus sur l'ensemble du territoire métropolitain et la même société a été retenue par 50 % des préfectures ayant recours à une externalisation.

Ces prestataires n'investissent plus sur le segment de la propagande électorale. Le parc machine est vieillissant (impression, mise sous pli, etc.) et n'est plus rentabilisé par d'autres travaux, en raison de la dématérialisation globale du circuit papier. Les clients de ces entreprises (journaux, vente par correspondance, etc.) ont, en effet, dématérialisé leurs envois. La rentabilité des opérations électorales - certes importante mais ponctuelle - ne justifie plus des investissements dans les outils.

Pour autant, pour les élections présidentielles et législatives de 2017, plus de 70 % des préfectures ont opté pour une externalisation de la mise sous pli de la propagande électorale à un prestataire privé sans que, pour l'élection présidentielle, les plis de propagande adressés aux électeurs aient subi des difficultés notables. Le ministère observe toutefois que pour les élections législatives, le traitement de la propagande des candidats a connu une avarie sur le site d'un prestataire où étaient confectionnés les plis de propagande de certains départements des régions Auvergne-Rhône-Alpes et d'Occitanie. Certains électeurs n'ont pas reçu leur pli de propagande à temps.

Votre rapporteur spécial n'en tire pas le sentiment que la propagande soit appelée à disparaître, préférant mettre l'accent sur la perspective d'une amélioration du suivi des électeurs, qu'il conviendra cependant de vérifier au cours des prochaines années. À la suite d'un rapport de l'inspection générale de l'administration de 2014 qui estimait que 500 000 électeurs (1,1 % des inscrits) étaient concernés par de mauvaises inscriptions, trois lois ont été adoptées le 1 er août 2016 en vue de rénover les modalités d'inscription sur les listes électorales grâce à la création d'un répertoire électoral unique. Ce dispositif, opérationnel avant le 31 décembre 2019, sera financé à hauteur de 0,6 million d'euros sur le programme 232, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018.

2. Le financement des partis politiques entre inertie et volatilité

Le régime applicable à l'aide publique aux partis et groupements politiques est défini par les articles 8 à 10 de la loi du 11 mars 1988.

Le montant global des crédits inscrits à cet effet dans la loi de finances de l'année est divisé en deux fractions égales :

- une première fraction répartie entre des partis et groupements politiques en fonction de leurs résultats lors du dernier renouvellement général de l'Assemblée nationale ;

- une seconde fraction spécifiquement répartie entre les partis et groupements politiques représentés à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Pour l'année 2018, un montant de 68,67 millions d'euros est inscrit. Cette enveloppe est stable en valeur depuis plusieurs années.

Évolution de la dotation prévue au titre du subventionnement des partis politiques (2008-2018)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Conformément à l'article 9 de la loi du 11 mars 1988, modifié par la loi n° 2014-873 du 4 août 2014, la première fraction de l'aide publique est attribuée :

- soit aux partis et groupements politiques qui ont présenté lors du plus récent renouvellement de l'Assemblée nationale des candidats ayant obtenu chacun au moins 1 % des suffrages exprimés dans au moins cinquante circonscriptions ;

- soit aux partis et groupements politiques qui n'ont présenté des candidats lors du plus récent renouvellement de l'Assemblée nationale que dans un ou plusieurs départements d'outre-mer, ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française ou dans les îles Wallis et Futuna et dont les candidats ont obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés dans l'ensemble des circonscriptions dans lesquelles ils se sont présentés.

La répartition de cette première fraction de l'aide publique s'effectue proportionnellement au nombre des suffrages obtenus lors du dernier renouvellement de l'Assemblée nationale par les candidats se réclamant de ces partis.

Concrètement, le mécanisme repose sur un principe déclaratif organisé comme suit.

En vue d'effectuer la répartition de cette première fraction, les candidats à l'élection législative ont indiqué, s'il y avait lieu, dans leur déclaration de candidature, le parti ou groupement politique auquel ils se rattachaient.

Le troisième jeudi précédant le premier tour au plus tard, les partis ou groupements politiques ont déposé au ministère de l'intérieur, en vue de bénéficier de la première fraction des aides prévues à l'article 8 de la loi du 11 mars 1988 susvisée relative à la transparence financière de la vie politique, la liste complète des candidats qu'ils présentaient aux élections législatives

L'attribution de la totalité de la première fraction de l'aide publique est conditionnée au respect du principe de parité (art. 9-1 de la loi du 11 mars 1988).

Ainsi, lorsque, pour un parti ou un groupement politique, l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe rattaché au parti dépasse 2 % du nombre total de ces candidats, le montant de la première fraction qui lui est attribué est diminué d'un pourcentage égal à 150 % de cet écart rapporté au nombre total de ces candidats.

Par ailleurs, pour bénéficier de l'aide publique, les partis doivent avoir respecté les obligations comptables prévues à l'article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 précitée.

La seconde fraction de l'aide publique est attribuée aux partis et groupements politiques bénéficiaires de la première fraction, proportionnellement au nombre de députés et de sénateurs qui ont déclaré au bureau de leur assemblée, au cours du mois de novembre de chaque année, y être inscrits ou s'y rattacher.

Chaque parlementaire ne peut indiquer être inscrit ou rattaché à ce titre qu'à un seul parti ou groupement.

En réponse au questionnaire du rapporteur spécial de la commission des finances, le ministère de l'intérieur a fait la réponse, décevante, suivante :

« À ce stade, il manque trop d'informations pour présenter une répartition de l'aide publique de 2018. Le décret est attendu pour la fin de mois de mai 2018 . À cette date, le ministère disposera des éléments nécessaires pour finaliser le calcul, c'est-à-dire :

- le respect des obligations comptables par les partis politiques ;

- les suffrages décomptés en application de l'article L.O. 128 du code électoral ;

- le renouvellement du Sénat et le rattachement des parlementaires pour la seconde fraction de l'aide publique au mois de novembre 2017 » .

Votre rapporteur spécial rappelle les éléments de répartition observés ces dernières années (voir l'annexe n° 1 au présent rapport). Il en ressort que les partis politiques se sont vus attribuer une fraction globalement stables des subventions financées par le programme. Par contraste, les résultats des élections législatives du mois de juin 2017 devraient entraîner de profondes modifications.

La sensibilité du financement de partis politiques qui, pour nombre d'entre eux, sont inscrits dans l'histoire politique et parlementaire longue du pays, à des évènements politiques dont la pérennité n'a par définition pas été démontrée peut être considérée comme excessive au regard de la réalité de structures politiques auxquelles l'histoire a conféré une forme de consécration.

Compte tenu d'une certaine volatilité de l'opinion publique, il pourrait être envisagé de lisser des évolutions ponctuelles en introduisant une troisième fraction dans l'enveloppe de financement des formations politiques.

Par ailleurs, votre rapporteur spécial observe que la consommation des crédits est fréquemment en-deçà des dotations ouvertes en lois de finances du fait de l'application des sanctions pour défaut de respect des règles concernant la parité. Ainsi, pour l'année 2016, dernière année d'exécution complète d'une loi de finances, celles-ci ont entraîné une sous consommation des crédits ouverts de 5,651 millions d'euros, soit plus de 8 % des ouvertures de crédits de la loi de finances pour 2016.

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