D. UNE STABILITÉ APPARENTE DU NIVEAU DES RECETTES D'EXPLOITATION DU BACEA QUI RECOUVRE PLUSIEURS ÉVOLUTIONS SIGNIFICATIVES

La loi de finances initiale pour 2017 prévoyait des recettes de 2 032,7 millions d'euros pour le BACEA en 2017. Le niveau des recettes effectivement enregistrées en gestion devrait être globalement conforme à l'estimation de la loi de finances pour 2017.

Le présent projet de loi de finances prévoit que les recettes du BACEA seront stables en 2018 par rapport à 2017 et atteindront 2 038,2 millions d'euros .

Le dynamisme de la redevance de route ( 8,1 millions d'euros de recettes supplémentaires), la hausse de 6 millions d'euros des recettes de la taxe de l'aviation civile (TAC) mais également l'affectation au BACEA de deux nouvelles recettes - la taxe Bâle-Mulhouse et la fraction de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TS) excédant son plafond - pour des montants de respectivement 6 et 6,6 millions d'euros feront plus que compenser la baisse du taux de la redevance pour services terminaux de circulation aérienne métropole (RSTCA-M) accordée aux plateformes de Paris-Charles-de-Gaulle et de Paris-Orly, qui a provoqué une chute de 26 millions d'euros de ses recettes en 2017.

Évolution des recettes d'exploitation du BACEA entre la LFI 2017 et le PLF 2018

Recettes (M€)

Exécution 2016

LFI 2017

PLF 2018

Écart

%

Redevances de navigation aériennes

1 605,1

1 583,3

1 570,0

- 13,3

- 0,8 %

Redevances de surveillance et de certification

29,6

28,2

28,5

+ 0,3

1 %

Taxe d'aviation civile

385,1

410,4

416,4

+ 6

1,5 %

Taxe Bâle-Mulhouse

-

-

6,6

+ 6,6

-

Taxe de solidarité

-

-

6,0

+ 6

-

Autres recettes

58,4

10,8

10,7

- 0,1

0,9 %

Total recettes exploitation

2 078,2

2 032,7

2 038,2

+ 5,5

0,2 %

Source : réponse au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial

1. Des recettes de redevances de navigation aérienne globalement stables grâce au dynamisme de la redevance de route

Les redevances de navigation aérienne regroupent la redevance de route (RR) , la redevance pour services terminaux de circulation aérienne métropole (RSTCA-M) et les redevances de navigation aérienne outre-mer , la redevance océanique (ROC) et la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne outre-mer (RSTCA-OM) .

L'évolution de leurs recettes est déterminée par l'évolution des tarifs des taux unitaires inscrits en RP2 et pris en application des règlements Ciel unique II , ainsi que des prévisions de trafic (voir supra ).

Le rendement global des redevances de navigation aérienne devrait être de 1 570 millions d'euros en 2018, soit une diminution de 13,3 millions d'euros par rapport aux 1 583,3 millions d'euros prévus en loi de finances initiale pour 2017 mais un niveau légèrement supérieur aux 1 569 millions d'euros de 2016 .

En deux ans, la hausse des recettes de la redevance de route (RR) , directement indexée sur le dynamisme du trafic aérien en survol , aura donc permis de compenser intégralement la baisse de 26 millions d'euros de redevance pour services terminaux de circulation aérienne métropole (RSTCA-M) accordée aux compagnies aériennes en 2017 (voir infra ) .

De fait, le présent projet de loi de finances prévoit que la redevance de route (RR) enregistrera en 2018 une nouvelle hausse de 8,1 millions d'euros de ses recettes par rapport à 2017 pour atteindre 1 318 millions d'euros . Cette augmentation des recettes de la RR fait suite à celle de 14,3 millions d'euros supplémentaires en 2017 par rapport à 2016.

La redevance pour services terminaux de circulation aérienne métropole (RSTCA-M) , en revanche, verra ses recettes diminuer en raison de la mise en oeuvre d'une mesure de dépéréquation entre les aéroports parisiens et les aéroports de province réclamée depuis deux ans par le législateur en contrepartie de l'attribution au BACEA de l'intégralité des recettes de la taxe de l'aviation civile (TAC) .

Ainsi, alors que la loi de finances initiale pour 2017 prévoyait des recettes de RSTCA-M de 232,4 millions d'euros en 2017, l'entrée en vigueur en cours d'année de la dépéréquation a ramené ses recettes à 206,4 millions d'euros en exécution, soit la baisse de 26 millions d'euros à laquelle le Gouvernement s'était engagée et qu'il aurait dû mettre en oeuvre dès l'année précédente.

Compte tenu de la dynamique de la RSTCA-M, ses recettes devraient représenter 211 millions d'euros en 2018.

L'affectation au BACEA de l'intégralité des recettes de la taxe de l'aviation civile

L'article 42 de la loi n° 2015-1786 de finances rectificative pour 2015 a supprimé la quotité de taxe de l'aviation civile (TAC) revenant au budget général de l'État (soit 6,33 %) à compter du 1 er janvier 2016 .

Depuis cette date, l'intégralité du produit de la TAC est donc affectée au BACEA , ce qui représente une enveloppe de 26 millions d'euros supplémentaires .

Cette mesure, à l'adoption de laquelle votre rapporteur spécial avait contribué, avait un objet très clair : augmenter les recettes du BACEA via la TAC en échange d'une baisse à due concurrence des redevances de navigation aérienne afin d'alléger les coûts des compagnies aériennes .

Après avoir été tenté dans un premier temps d'affecter les 26 millions d'euros en jeu au désendettement du budget annexe , mesure de saine gestion mais qui n'aurait eu aucun effet sur la compétitivité des compagnies, le Gouvernement s'est engagé à procéder à une diminution (« dé-péréquation ») de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne (RSTCA) à Roissy-Charles-de-Gaulle et à Orly .

Cette mesure a permis de baisser la tarification pour les aéroports parisiens de près de 20 % et, dans le même temps, de maintenir le tarif des autres aéroports . Selon la DGAC, interrogée sur ce point par votre rapporteur spécial, une telle mesure représenterait un bénéfice annuel de 14 millions d'euros pour les compagnies françaises .

Source : commission des finances du Sénat

Les prévisions de recettes pour 2018 des redevances de navigation aérienne outre-mer , pour leur part, s'établissent à 41 millions d'euros , soit un niveau identique à celui de 2017.

2. Des redevances de surveillance et de certification dont le niveau sera quasiment identique à celui de 2017

Les redevances de surveillance et de certification 18 ( * ) viennent financer en partie la surveillance des acteurs de l'aviation civile , la délivrance d'agréments et d'autorisations , de licences ou de certificats nécessaires aux opérateurs (constructeurs, ateliers d'entretien, compagnies aériennes, aéroports, personnels, organismes de sûreté, opérateurs de navigation aérienne). Ces différentes activités sont principalement prises en charge par la direction de la sécurité de l'aviation civile (DSAC) au sein de la DGAC.

Leurs recettes s'élèveraient à 28,5 millions d'euros en 2018, soit un montant voisin des 28,2 millions d'euros attendus pour 2017.

3. Le montant de la taxe de l'aviation civile, perçue intégralement par le budget annexe depuis le 1er janvier 2016, connaîtra une augmentation de 1,5 % en 2018

Le présent projet de loi de finances prévoit que le produit de la taxe de l'aviation civile s'élèvera à 416,4 millions d'euros en 2018, soit une hausse de 6 millions d'euros par rapport aux recettes attendues pour 2017.

Cette augmentation serait la conséquence directe de la légère reprise du trafic aérien au départ et à destination de la France , fragilisé en 2015 et en 2016 par les attentats successifs qui ont frappé notre pays : en 2018, la DGAC prévoit que 79 millions de passager (fret compris) seront assujettis à la TAC, soit une hausse de 3 millions de passagers par rapport à 2017.

Aux recettes de la TAC viendront s'ajouter en 2018 celles de la « taxe Bâle-Mulhouse » dont devront désormais s'acquitter les passagers et le fret à l'arrivée et au départ de l'aéroport franco-suisse de Bâle-Mulhouse et destinées à couvrir le coût des missions d'intérêt général assurées sur la plateforme par la DGAC . Le montant de ces recettes est estimé à 6 millions d'euros .

Les évolutions récentes du régime de la taxe de l'aviation civile (TAC)

À la suite des préconisations du rapport du groupe de travail présidé par notre ancien collègue député Bruno Le Roux sur « La compétitivité du transport aérien français », le régime de la TAC a été profondément modifié par l'article 92 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014, dans le but d'améliorer l'attractivité des plateformes aéroportuaires parisiennes .

En vertu de cet article, les compagnies aériennes ont été exonérées du paiement de la TAC à 50 % pour les passagers en correspondance depuis le 1 er avril 2015 et cette exonération a été portée à 100 % à compter du 1 er janvier 2016 . Elle concernera en 2016 12,6 millions de passagers et entraînera une diminution de recettes de 63,5 millions d'euros .

Afin de compenser la perte de recettes subie par le BACEA en raison de cette mesure, la quotité de TAC qui lui est affectée est passée de 80,91 % à 85,92 % au 1 er avril 2015 puis à 93,67 % au 1 er janvier 2016 .

Le régime de la TAC a de nouveau été modifié par l'article 42 de la loi n° 2015-1786 de finances rectificative pour 2015, qui a supprimé la quotité de TAC revenant au budget général de l'État à compter du 1 er janvier 2016 . Depuis cette date, l'intégralité du produit de la TAC est donc affectée au BACEA .

Source : commission des finances du Sénat

4. Les excédents de la taxe de solidarité sur les billets d'avion font désormais partie des autres recettes du budget annexe

En 2018, le BACEA devrait recevoir 6,5 millions d'euros au titre des frais de gestion des sommes recouvrées au titre de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TS) , de la taxe d'aéroport (TA) et de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) , soit un niveau analogue à celui qui est prévu pour 2017. Le prélèvement pour frais de gestion de la TS, de la TA et de la TNSA correspond à 0,5 % des produits de ces trois taxes depuis le 1 er janvier 2013.

Les taxes perçues par la DGAC pour le compte de tiers

La DGAC est chargée de l'établissement de l'assiette, du recouvrement et du contrôle de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TS), de la taxe d'aéroport (TA) et de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA), dont le produit est reversé à des tiers.

Celui de la TA est transféré aux aéroports au titre du financement des services de sécurité-incendie-sauvetage, de lutte contre le péril animal, de sûreté et des mesures effectuées dans le cadre des contrôles environnementaux. Pour 2018, son produit est estimé à 1 031 millions d'euros, y compris majoration (115 millions d'euros) ;

Le produit de la TS participe au financement de l'aide au développement dans le domaine de la santé dans le cadre du programme UNITAID confié pour la France à l'Agence française pour le développement (AFD). Pour 2018, son produit est estimé à 216,6 millions d'euros ;

Le produit de la TNSA est reversé aux exploitants d'aéroports en vue du financement des aides accordées aux riverains pour l'atténuation des nuisances sonores ou au remboursement à des personnes publiques des avances consenties pour financer des travaux de réduction des nuisances sonores. Pour 2018, son produit est estimé à 46 millions d'euros.

Source : projet annuel de performances pour 2018

Par ailleurs, le BACEA percevra 10,75 millions d'euros d'autres recettes courantes , dont 6,6 millions d'euros correspondant au reversement au budget annexe des recettes de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TS) excédant son plafond annuel de 210 millions d'euros , jusque-là reversé au budget général.

Cette mesure résulte de l'article 65 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 , adopté à l'initiative de nos collègues députés.

À l'appui de leurs démarche, ceux-ci avaient notamment fait valoir que la Cour des comptes, dans son rapport remis à votre commission des finances sur le fondement de l'article 58-2 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) le 16 octobre 2016, avait écrit à propos de la taxe de solidarité  que « force est de constater que ce mécanisme de solidarité, sans lien avec le domaine aérien , a perdu de son idéal , que l'exemple de la France n'est pas suivi et conduit à pénaliser le trafic aérien français » et en conclut « qu'il conviendrait dès lors de se réinterroger sur ses objectifs et sa pertinence ».

Dans la mesure où la taxe de solidarité se voyait qualifiée par la Cour de « prélèvement défavorable à la compétitivité du transport aérien », les députés avaient considéré que ses excédents devraient à tous le moins être utiles au secteur aérien en étant confiés à la DGAC et avaient émis le voeu que ces crédits supplémentaires puissent être affectés aux dépenses de sûreté . Plus classiquement, la DGAC a décidé de les utiliser en 2018 pour accélérer son désendettement .

S'il aurait été préférable d'ajuster les recettes de la taxe de solidarité aux besoins du fonds de solidarité pour le développement en diminuant ses taux , ainsi que l'avait proposé le rapporteur général de la commission des finances pendant la discussion de cet article au Sénat, la solution retenue par les députés a tout au moins permis que le surplus d'une taxe très contestée par les compagnies aériennes puisse désormais bénéficier au secteur aérien au lieu d'être reversé au budget général.

Les critiques relatives à la taxe de solidarité devraient de nouveau faire l'objet d'un débat à l'occasion des Assises du transport aérien que la ministre chargée des transports compte organiser au premier semestre 2018.

Pour sa part, votre rapporteur spécial estime que la question de l'élargissement de l'assiette de cette taxe , qui pèse pour l'heure uniquement sur les compagnies aériennes, mériterait d'être enfin étudiée sérieusement , en envisageant soit de taxer d'autres modes de transports internationaux comme les TGV empruntant des lignes européennes (Thalys, Eurostar, etc.), qui transportent environ 20 millions de passagers par an , soit d'autres secteurs d'activité.


* 18 Ces redevances ont été instaurées par l'article 120 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004 codifié à l'article L. 611-5 du code de l'aviation civile.

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