II. LE STATUT DES FORCES

A. ENTRÉE, SÉJOUR ET SORTIE DU TERRITOIRE

L'article 4 précise les conditions d'entrée de la force en visite, ainsi que des personnes à charge, pour l'accomplissement des activités de coopération en matière de défense. Leur nombre et leur qualité font l'objet d'arrangements particuliers.

Sont requis pour autoriser l'entrée, un passeport et un visa en cours de validité , dont l'obtention en dispense de frais et dans les meilleurs délais est facilitée. Par ailleurs, l'État d'envoi doit communiquer, à l'avance, l'identité des personnes entrant sur le territoire de l'État d'accueil ainsi que leur date de départ.

Les membres d'une force en visite sont autorisés à porter l'uniforme et les insignes militaires dans l'exercice de leurs fonctions officielles, à l'article 5.

En outre, sous certaines conditions, l'État d'accueil autorise l'importation, en exonération de droits ou taxes pour la durée de leur séjour, des effets personnels et des meubles, dans les limites compatibles avec un usage familial .

Pendant leur séjour et afin d'éviter les doubles impositions, l'article 10 maintient la domiciliation fiscale des personnels dans l'État d'envoi, qui leur verse soldes, traitements et autres rémunérations analogues.

B. SOINS MÉDICAUX ET DÉCÈS

L'article 8 prévoit l'accès aux services médicaux de la Partie d'accueil et pose le principe selon lequel chaque Partie est responsable de ses services médicaux et de ses évacuations sanitaires . En cas d'urgence toutefois, les actes médicaux et les évacuations sont effectués à titre gratuit. En revanche, les prestations médicales non urgentes pratiquées en milieu hospitalier et les rapatriements sanitaires restent à la charge de la Partie d'envoi.

L'article 9 précise les formalités à suivre en cas de décès d'un membre de la force en visite, s'agissant de l'établissement du certificat de décès, l'autopsie éventuelle, la prise en charge et le transport du corps du défunt.

C. AFFAIRES DISCIPLINAIRES ET PÉNALES, RÈGLEMENT DES DOMMAGES : DES DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES COMPTE TENU DE L'EXISTENCE DE LA PEINE DE MORT EN JORDANIE

L'article 7 pose le principe d'une compétence exclusive de l'État d'envoi en matière de discipline de ses personnels.

L'article 11 traite des règles de partage de juridiction applicables en cas d'infractions commises par les membres d'une force en visit e ou des personnes à leur charge. Après avoir érigé le principe selon lequel ces personnes relèvent de la compétence des juridictions de la Partie d'accueil, l'accord précise les cas dans lesquels les autorités de la Partie d'envoi exercent par priorité leur droit de juridiction : infraction résultant de tout acte ou négligence d'un membre du personnel accompli dans l'exercice de ses fonctions officielles, infraction portant uniquement atteinte à la sécurité ou aux biens de la Partie d'envoi, à la personne ou aux bines d'un autre membre du personnel de la Partie d'envoi. Une Partie peut toutefois renoncer à exercer sa priorité de juridiction mais doit alors le notifier immédiatement à l'autre Partie.

La Partie d'envoi apporte son concours pour présenter l'intéressé devant les autorités judiciaires compétentes de la Partie d'accueil tandis que la Partie d'accueil prévient sans délai les autorités de la Partie d'envoi de toute arrestation.

Les autorités de l'État d'accueil et de l'État d'envoi se prêtent mutuellement assistance pour la conduite des enquêtes et s'informent mutuellement.

La personne poursuivie bénéficie des garanties relatives à un procès équitable.

En cas de condamnation, la Partie d'accueil examine avec bienveillance la demande de purger la peine sur le territoire de la Partie d'envoi.

Selon la règle « non bis in idem » , la personne jugée ne peut pas l'être une nouvelle fois pour la même infraction par les autorités de l'autre Partie.

Par ailleurs, dans le cas où la Partie d'envoi n'est pas compétente pour exercer sa juridiction , les stipulations des paragraphes 8 et 9 de l'article 11 prévoient que si les infractions commises sont punies de la peine de mort ou d'une peine contraire aux engagements internationaux - notamment contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales qui interdit la torture ainsi que les peines ou traitements inhumains ou dégradants - cette peine ne sera ni requise, ni prononcée et que dans l'hypothèse où elle serait prononcée, elle ne serait pas exécutée.

Ces stipulations validées par le Conseil d'État sont analogues à celles figurant dans d'autres accords de coopération en matière de défense ou de statut des forces conclus avec des États qui sanctionnent certaines infractions de la peine de mort. Identiques à celles figurant dans les accords de défense conclus avec le Liban en 2008, les Émirats arabes unis en 2009, la Guinée en 2014 et le Mali en 2016 , qui ont tous été ratifiés par la France, elles assurent un statut protecteur aux personnels des forces déployées en Jordanie.

Elles sont d'autant plus importantes et nécessaires que selon les services du ministère de l'Europe et des affaires étrangères 3 ( * ) , une certaine vigilance reste de mise, même si la Jordanie a ratifié les principaux traités relatifs aux droits de l'Homme (mais pas la plupart des protocoles additionnels à ces conventions) et que la situation des droits de l'Homme y est meilleure que dans la plupart des autres États de la région. Les autorités jordaniennes ont en effet opéré un tournant sécuritaire depuis fin 2014 contre l'opposition politique, représentée principalement par la branche locale des Frères musulmans. En outre, le moratoire sur la peine de mort en vigueur depuis 2006 a été rompu à trois reprises, avec l'exécution de onze hommes (suite à l'assassinat du pilote jordanien par Daech) en décembre 2014, puis de deux djihadistes en février 2015 et enfin de quinze personnes (10 condamnés pour terrorisme et 5 criminels de droit commun) en avril 2017. Une commission chargée d'étudier la question de la reprise des exécutions a été créée en 2016. Par ailleurs, la Jordanie continue de s'abstenir sur la résolution de l'Assemblée générale des États-Unis appelant à un moratoire sur l'application de la peine de mort.

À ce jour, aucun personnel militaire français n'a été condamné par des juridictions jordaniennes.

L'article 18 traite du règlement des dommages c ausés par les forces ou un membre du personnel entre les Parties, en posant le principe de la renonciation à l'indemnisation des dommages causés aux personnes ou aux biens de l'autre Partie, sauf en cas de faute lourde ou de faute intentionnelle. S'agissant des dommages causés aux tiers, ce même article pose le principe d'une prise en charge conjointe des indemnités, selon les règles de partage qu'elle fixe.


* 3 Source : réponses au questionnaire écrit de la commission

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page