PREMIÈRE PARTIE : LA JORDANIE, UN ALLIÉ INCONTOURNABLE AU MOYEN-ORIENT

I. UN PÔLE DE RELATIVE STABILITÉ DANS UNE RÉGION INSTABLE

La Jordanie est une monarchie parlementaire constitutionnelle, qui a acquis son indépendance en 1946, et dans laquelle le Roi, Abdallah II, dispose de pouvoirs importants.

Depuis 2011, dans le contexte des printemps arabes, le Gouvernement a entrepris des réformes démocratiques, afin notamment de renforcer les pouvoirs du parlement et de créer une cour constitutionnelle. D'autres réformes ont été adoptées, fin 2015 et début 2016, dans le domaine de la décentralisation, des partis politiques, de la loi électorale et du découpage des circonscriptions, sans parvenir toutefois à renverser la sous-représentation des partis politiques. Un nouveau gouvernement a été formé en juin 2016, puis reconduit après le scrutin législatif du 20 septembre 2016. Le Parlement, nouvellement élu, est majoritairement composé d'indépendants et les Frères musulmans, principale force d'opposition, n'ont que quinze députés.

Après une forte croissance économique entre 1999 et 2009, la Jordanie rencontre des difficultés liées aux effets combinés de la crise financière internationale, du printemps arabe et de la guerre en Syrie sur son commerce extérieur et les flux touristiques. Pour 2016, son taux de croissance est estimé à 2,3 % et son taux de chômage à 15,8 %.

La France a un faible volume d'exportations vers la Jordanie, de l'ordre de 300 millions d'euros représentant 2 % de part de marché, mais sa présence économique peut être qualifiée de forte, avec les investissements d'une trentaine de grands groupes (Orange, Lafarge, Suez, Vinci, Total et ADP), à hauteur de 1,5 milliard d'euros. La France serait le premier investisseur non arabe.

Sur le plan budgétaire, c'est un pays qui reste fortement endetté (94,4 % du PIB en 2016) mais qui bénéficie des soutiens de la part de ses principaux partenaires et alliés, en qualité d'élément central de stabilité au Proche et au Moyen-Orient. Le Fonds monétaire international (FMI) lui a ainsi octroyé une ligne de crédit de 2 milliards de dollars sur trois ans en août 2012, ce qui lui a permis de redresser ses comptes extérieurs et ses finances publiques et de réaliser des réformes importantes dans le secteur de l'énergie. En août 2016, le FMI lui a accordé un nouveau prêt de 723 millions de dollars, pour la période 2016-2021. La France, quant à elle, a signé, en octobre 2015, un accord d'aide budgétaire et de développement de 265 millions de dollars, tandis qu'en avril 2016, l'Agence française de développement (AFD) et le ministère du Plan sont parvenus à un mémorandum d'entente qui prévoit l'octroi de 900 millions d'euros de prêts supplémentaires dans les trois prochaines années.

Depuis le début de la crise en Syrie, la Jordanie accueille sur son territoire plus de 650 000 réfugiés syriens selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, sans compter 60 000 réfugiés irakiens, alors que sa population s'élève à 9,5 millions d'habitants. Cette situation pèse lourdement sur ses infrastructures, notamment dans les domaines de l'éducation et de la santé, sur les ressources en eau et en électricité, ainsi que sur l'immobilier. Sans surprise, la situation de ces réfugiés est de plus en plus difficile et la Jordanie réclame des aides financières. La France lui a déjà apporté 42 millions d'euros sous forme de dons et 64 millions d'euros sous forme de prêts pour des projets divers, tels que collecte des déchets, construction de routes, gestion de l'eau.

De par sa situation géographique - frontières communes avec l'Irak, la Syrie, Israël et l'Arabie Saoudite -, la Jordanie occupe une place stratégique dans un environnement régional marqué par les crises et les conflits. Sa politique étrangère se fonde sur une coopération militaire avec les États-Unis - renforcée depuis la crise syrienne - qui lui apportent, par ailleurs une aide économique importante, de l'ordre d'1,6 milliard de dollars par an en 2016. Elle s'appuie également sur des relations suivies avec les monarchies sunnites du Golfe qui contribuent à sa stabilité financière : un programme de dons de 5 milliards de dollars sur 2012-2016 lui a été octroyé par le Conseil de coopération des États arabes du Golfe.

On rappelle également que la Jordanie a signé, en 1994, un traité de paix avec Israël. Toutefois, si une coopération existe bien entre les deux pays, au moins sur le plan économique et sécuritaire, celle-ci se trouve bridée par la question de Jérusalem et des territoires palestiniens.

S'agissant du conflit syrien, la Jordanie, qui tente de sécuriser sa frontière nord, essaie de maintenir un équilibre entre l'Arabie Saoudite, l'Irak, la Syrie et la Russie, en essayant de maintenir le dialogue avec cette dernière en vue d'éviter le chaos. Sur la question de l'Irak, la Jordanie est engagée au côté du gouvernement irakien dans sa lutte contre Daech.

Sur le plan intérieur, la menace terroriste liée à la lutte contre Daech est très présente et les incidents sécuritaires se multiplient. On estime que la Jordanie fournit 2 000 combattants étrangers à Daech. Depuis 2014, les arrestations de sympathisants de Daech, de militants des Frères musulmans et d'activistes sont plus nombreuses.

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