Rapport n° 645 (2016-2017) de MM. Albéric de MONTGOLFIER , Philippe ADNOT , Mme Michèle ANDRÉ , M. François BAROIN , Mme Marie-France BEAUFILS , MM. Michel BERSON , Éric BOCQUET , Yannick BOTREL , Jean-Claude BOULARD , Michel CANEVET , Vincent CAPO-CANELLAS , Thierry CARCENAC , Jacques CHIRON , Yvon COLLIN , Philippe DALLIER , Serge DASSAULT , Vincent DELAHAYE , Francis DELATTRE , Bernard DELCROS , Mme Marie-Hélène DES ESGAULX , MM. Éric DOLIGÉ , Philippe DOMINATI , Vincent ÉBLÉ , Thierry FOUCAUD , André GATTOLIN , Jacques GENEST , Charles GUENÉ , Didier GUILLAUME , Alain HOUPERT , Jean-François HUSSON , Roger KAROUTCHI , Mme Fabienne KELLER , MM. Bernard LALANDE , Marc LAMÉNIE , Nuihau LAUREY , Antoine LEFÈVRE , Dominique de LEGGE , Gérard LONGUET , François MARC , Hervé MARSEILLE , Claude NOUGEIN , Georges PATIENT , François PATRIAT , Daniel RAOUL , Claude RAYNAL , Jean-Claude REQUIER , Maurice VINCENT , Jean Pierre VOGEL et Richard YUNG , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 juillet 2017

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N° 645

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2016-2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 juillet 2017

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE de règlement du budget et d' approbation des comptes de l'année 2016 ,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,
Rapporteur général,
Sénateur

Tome 2 : Contributions des rapporteurs spéciaux

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient, Richard Yung , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Bernard Delcros, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Éblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Didier Guillaume, Alain Houpert, Jean-François Husson, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Nuihau Laurey, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, Claude Nougein, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

5 , 97 et T.A. 3

Sénat :

643 (2016-2017)

MISSION « ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT » - MM. RICHARD YUNG ET ÉRIC DOLIGÉ, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La mission « Action extérieure de l'État » regroupe en 2016 les crédits des quatre programmes suivants :

- le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » qui regroupe les contributions de la France aux organisations internationales et les moyens dévolus au ministère des affaires étrangères et du développement international (MAEDI) 1 ( * ) , hormis ceux destinés aux affaires consulaires, à la coopération technique, scientifique et culturelle et à l'aide publique au développement ;

- le programme 151 « Français à l'étranger et affaires consulaires » qui contient notamment les crédits dédiés à la protection consulaire, à la délivrance de services administratifs aux Français de l'étranger, à l'accès des élèves français au réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) ou encore à la délivrance des visas ;

- le programme 185 dénommé « Diplomatie culturelle et d'influence » , qui finance l'ensemble des politiques de coopération culturelle et d'influence ainsi que le service d'enseignement public à l'étranger et le tourisme ;

- le programme 341 , créé de façon temporaire, afin de porter les crédits relatifs à la préparation et à l'organisation de la conférence mondiale sur le climat de Paris (COP 21), qui s'est tenue en décembre 2015.

Le périmètre de la mission n'a pas évolué entre 2015 et 2016.

Exécution des crédits de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros)

Programme

Crédits exécutés en 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exécution 2015

Exécution 2016
/ LFI 2016

105

AE

1 836,6

1 970,8

2 056,9

12,0%

4,4%

CP

1 846,9

1 962,0

2 053,9

11,2%

4,7%

185

AE

730,8

721,4

720,1

- 1,5%

- 0,2%

CP

730,4

721,4

715,3

- 2,1%

- 0,8%

151

AE

345,0

370,6

347,1

0,6%

- 6,3%

CP

345,0

370,6

345,9

0,3%

- 6,6%

341

AE

175,8

7,8

- 4,2

- 102,4%

- 154,5%

CP

27,9

139,3

143,6

414,8%

3,1%

Total

AE

3 088,2

3 070,5

3 119,8

1,0%

1,6%

CP

2 950,2

3 193,2

3 258,7

10,5%

2,1%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

À la fin de l'exercice 2016, le taux d'exécution atteint 101,6 % en autorisations d'engagement (AE) et 102,1 % en crédits de paiement (CP) par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2016. Entre 2015 et 2016, le montant des crédits consommés a également progressé de 1 % en AE et de 10,5 % en CP.

Cette sur-exécution est essentiellement imputable au programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » : elle résulte du report de 190 millions d'euros de crédits de 2015 sur l'exercice 2016 au titre des opérations de maintien de la paix (OMP) . Ces reports ont également entraîné le dépassement de 98,5 millions d'euros du plafond inscrit dans la loi de programmation pour les finances publiques 2014-2019.

Évolution du taux d'exécution des crédits de la mission « Action extérieure de l'État »

Note de lecture : le taux d'exécution est calculé par référence aux crédits ouverts en loi de finances initiale, y compris fonds de concours et attributions de produits, et non aux crédits disponibles (qui incluent également les reports de crédits et les mouvements réglementaires intervenus en cours d'exercice).

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

S'agissant des trois autres programmes de la mission, l'autorisation budgétaire pour 2016 a été globalement respectée.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Programme

LFI 2016

Reports

Décrets d'avance

Virements et transferts

Fonds de concours et attributions de produits

Crédits ouverts 2016

Crédits consommés 2016

Écart crédits consommés / ouverts

105

AE

1 970,8

210,4

- 110,7

3,5

8,3

2 082,3

2 056,9

- 1,2 %

CP

1 962,0

201,6

- 102,5

3,6

8,3

2 073,1

2 053,9

- 0,9 %

185

AE

721,4

3,8

- 9,6

5,3

2,9

720,9

720,1

- 0,1 %

CP

721,4

4,4

- 9,6

5,3

2,9

724,4

715,3

- 1,3 %

151

AE

370,6

1,2

- 23,7

- 4,5

6,5

350,0

347,1

- 0,8 %

CP

370,6

2,1

- 24,7

- 4,5

6,5

350,0

345,9

- 1,1 %

341

AE

7,8

3,4

- 19,4

0,0

5,6

- 2,6

- 4,2

61,6 %

CP

139,3

15,8

- 15,7

0,0

5,6

145,0

143,6

- 0,9 %

Total

AE

3 070,5

218,8

- 163,4

4,3

23,3

3 150,6

3 119,8

- 1,0 %

CP

3 193,2

224,0

- 152,5

4,4

23,3

3 292,4

3 258,7

- 1,0 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Par rapport aux crédits disponibles, incluant les reports et les mouvements réglementaires intervenus en cours d'exercice, le taux de consommation représente environ 99 % des crédits ouverts en AE = CP.

L'exercice 2016 a toutefois été marqué par des mouvements de crédits importants : les reports de crédits de 2015 sur 2016 représentent environ 7 % des crédits votés en loi de finances initiale, tandis que le solde net des ouvertures et annulations opérées par les trois décrets d'avance ont réduit les crédits disponibles de 5 % .

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Des dépenses de personnel quasiment stables qui contrastent avec des dépenses d'intervention difficilement maîtrisables

En 2016, la mission est composée à 40 % de dépenses d'intervention, à 31 % de dépenses de fonctionnement et à 28 % de dépenses de personnel.

Les dépenses d'intervention - qui comprennent notamment les contributions internationales et les opérations de maintien de la paix (CI-OMP) - ont progressé de 17 % en exécution entre 2015 et 2016 pour atteindre près de 1,3 milliard d'euros ; il s'agit du premier facteur de surconsommation des crédits de la mission.

En 2016, les dépenses de fonctionnement ont enregistré une hausse de 12 % et s'élèvent ainsi à 1 milliard d'euros en CP, et ce malgré la diminution des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs (voir infra ). L'organisation de plusieurs événements a pesé sur l'exercice 2016. À la suite de la COP 21 organisée, les crédits de paiement consommés par le programme 341 ont atteint 144 millions d'euros en 2016, soit 116 millions d'euros au-dessus de l'exécution 2015. La préparation des scrutins électoraux de 2017 à l'étranger (3 millions d'euros) ainsi que l'organisation du sommet de la Francophonie et du sommet France-Afrique (10,5 millions d'euros) se sont également traduites par des hausses de dépenses.

Dépenses de la mission par titre (en crédits de paiement)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

En neutralisant les effets de change , qui ont nécessité l'ouverture de crédits en fin d'année pour ajuster le montant des indemnités de résidence à l'étranger (IRE), l'exécution des dépenses de personnel est conforme à la prévision en loi de finances initiale pour 2016 et quasiment stable par rapport à 2015.

Le schéma et le plafond d'emplois prévus pour l'année 2016 ont été respectés , toutes catégories confondues : le nombre d'équivalents temps plein travaillé (ETPT) s'établit à 13 971 en 2016 , nettement en deçà du plafond d'emploi ministériel fixé à 14 020 ETPT et en diminution de 82 ETPT par rapport à la consommation enregistrée en 2015. Cette baisse des effectifs a principalement affecté les postes d'agents de droit local et de contractuels et volontaires internationaux employés dans le réseau à l'étranger.

2. En isolant les reports, une stabilisation du coût des contributions internationales et des opérations de maintien de la paix (CI-OMP) au niveau de 2015

En 2016, le montant des crédits consommés au titre des contributions internationales s'établit à 992 millions d'euros , soit une hausse de 10 % par rapport aux crédits votés et de 24 % par rapport à l'exécution 2016 . Cette sur-exécution ne reflète pas une augmentation des contributions dues au titre de l'année 2016 mais s'explique essentiellement par le report de 190 millions d'euros pour le paiement des opérations de maintien de la paix au titre de l'année 2015 . Ce retard de paiement d'un montant sans précédent 2 ( * ) - dont le Gouvernement français n'est pas responsable - nuit à la lisibilité de l'exécution 2016.

Dépenses au titre des contributions internationales (AE = CP)

(en millions d'euros)

Exécution 2015

LFI 2016

Exécution 2016

Exécution 2016
/ LFI 2016

Opérations de maintien de la paix

383,59

496,97

612,48

123,2%

Contributions internationales payables en euros

175,98

160,2

169,29

105,7%

Contributions internationales payables en devises

239,68

238,42

210,36

88,2%

Total

799,26

895,58

992,13

110,8%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Hors report de l'exercice 2015 à 2016 et en « lissant » les contributions dues au titre de chaque exercice, le montant des CI-OMP s'élève en effet à 857 millions d'euros en 2016 , contre 885 millions d'euros en 2015 et 858 millions d'euros en 2014 3 ( * ) .

Plus précisément, on constate que le coût des OMP est plus faible que la prévision initiale (- 7 millions d'euros). De même, les dépenses de contributions internationales payables en devises ont diminué grâce à une baisse de la contribution de la France au budget ordinaire des Nations Unies - sous l'effet de la modification du barème pour tenir compte de la baisse de la part relative de la France dans le PIB mondial - et à la diminution des contributions aux tribunaux pénaux internationaux. Le responsable de programme souligne ainsi que « l'exécution des CI-OMP n'a pas nécessité de ponction sur la réserve de précaution initiale, contrairement aux années précédentes » 4 ( * ) .

En revanche, le montant des crédits consommés au titre des contributions internationales payables en euros est supérieur de 5,7 % à la prévision, notamment en raison du soutien de 7,7 millions d'euros apporté à la mission d'observation spéciale de l'organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en Ukraine.

Enfin, d'après le rapport annuel de performances, le risque de change a pu être « contenu » en 2016 grâce à la révision du taux de budgétisation en loi de finances initiale et au mécanisme de couverture des CI-OMP en devises mis en place avec l'agence France Trésor (AFT). Ce mécanisme a permis de réaliser un gain de change de 6,9 millions d'euros . Selon le compte général de l'État 2016, la couverture des achats à terme de devises par l'AFT pour le compte du ministère représentait 971 millions d'euros fin 2016. Il n'en demeure pas moins qu'un système de couverture du risque de change plus réactif pourrait être mis en place afin de se prémunir d'une chute non anticipée de l'euro.

3. La participation des opérateurs aux efforts de maîtrise de la dépense

Si les dépenses de la mission « Action extérieure de l'État » sont pour une large part contraintes par des facteurs exogènes, la réduction des subventions pour charges de service publics aux opérateurs de la mission est l'un des principaux leviers d'économies.

Au total, les subventions versées aux opérateurs se sont élevées à 450 millions d'euros en 2016 5 ( * ) soit une baisse de 2,3 % par rapport aux crédits votés et de 2,9 % par rapport aux crédits consommés en 2015. À périmètre constant et hors transferts, cette diminution concerne tous les opérateurs : - 2 % pour Atout France, - 3,6 % pour l'AEFE, - 2,8 % pour l'Institut français et - 3,7 % pour Campus France, comparativement aux subventions versées en 2015. D'après le ministère, ceci a conduit les opérateurs à réaliser des efforts sur leurs dépenses de fonctionnement et de personnel, ce que tendent à confirmer les comptes financiers des opérateurs publiés dans le rapport annuel de performances.

Par ailleurs, l'exécution des plafonds d'emploi est inférieure à la réalisation constatée en 2015, avec 6 701 ETPT sous plafond rémunérés par les opérateurs contre 6 779 ETPT en 2015.

4. Le versement de 5 millions d'euros supplémentaires à Atout France dans le cadre du plan d'urgence pour le tourisme

Conformément à la recommandation formulée par vos rapporteurs spéciaux à la suite de leur mission de contrôle budgétaire sur la délivrance des visas dans les postes consulaires 6 ( * ) , l'opérateur Atout France s'est vu versé 4,5 millions d'euros issus de l'attribution de produits de recettes additionnelles des droits de visas , en complément d'une subvention pour charges de service public de 31,5 millions d'euros.

Dans un contexte de baisse de la fréquentation touristique, l'exercice 2016 a également été marqué par la création en octobre 2016 d'un fonds d'urgence pour le tourisme de 10 millions d'euros , dont 5 millions d'euros ont été versés en fin d'année à Atout France 7 ( * ) . Ces crédits, destinés à renforcer les actions de promotion de l'opérateur à l'étranger, ont été fléchés vers un volet « e-réputation » afin d'amplifier les actions menées sur internet et les réseaux sociaux, des campagnes de communication ciblées sur les destinations les plus touchées par les baisses de fréquentation et un renforcement de la présence française dans les salons professionnels et grand public.

5. Bourses scolaires : une baisse regrettable confirmée par l'exécution 2016

La loi de finances initiale pour 2016 prévoyait une dotation de 115,5 millions d'euros pour le financement des aides à la scolarité des élèves français 8 ( * ) , en baisse de 8 % par rapport au montant de la loi de finances initiale pour 2015. En définitive, la dotation effectivement versée à l'AEFE s'est élevée à 87,26 millions d'euros en 2016 , soit un montant inférieur de 24 % aux crédits votés et en deçà de l'exécution 2015, qui s'établissait à 89,5 millions d'euros.

Comme l'année passée, la baisse de la dotation de l'État a été en partie compensée par l'utilisation d'une « soulte » de l'AEFE de 15,7 millions d'euros 9 ( * ) . Ainsi, le montant de bourses distribué par l'AEFE s'élève en réalité à 103 millions d'euros , un niveau proche de celui constaté en 2015.

Toutefois, le nombre de bourses scolaires attribuées a bel et bien diminué pour s'établir à 25 495 en 2016 , contre 25 740 en 2015 et 25 830 en 2014, en raison du renchérissement du coût moyen par boursier consécutif à la dépréciation de l'euro. En outre, il convient de rappeler que la somme de 103 millions d'euros est inférieure de 22 millions d'euros au montant promis en 2013 dans le cadre de la réforme des aides à la scolarité.

Comme l'a souligné votre rapporteur spécial, Éric Doligé, dans un rapport d'information relatif à l'enseignement français à l'étranger, il convient de maintenir un niveau significatif de bourses scolaires 10 ( * ) .

6. Une contribution de 25,6 millions d'euros des partenaires privés au financement de la COP 21

Le montant de l'exécution 2016 des crédits du programme 341 « Conférence Paris Climat 2015 » s'élève à - 4,2 millions d'euros en AE et à 143,6 millions d'euros en CP. La consommation négative des AE s'explique par plusieurs rétablissements de crédits, correspondant notamment au versement des recettes liées à l'aménagement des espaces privatifs par certaines délégations étrangères.

Au total, sur les exercices 2015 et 2016, le montant net des dépenses de préparation et d'organisation de la conférence « Paris climat 2015 » s'élève à 171,6 millions d'euros 11 ( * ) , soit près de 10 millions d'euros de moins que le budget initial. Malgré les craintes exprimées lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2016 en raison de l'augmentation de certains frais d'organisation, le budget alloué a donc été respecté.

La contribution des partenaires privés et mécènes aux frais d'organisation atteindrait 25,6 millions d'euros au total, dont 5,6 millions d'euros d'apports en numéraire 12 ( * ) et environ 20 millions d'euros de dons en nature. Ce résultat est conforme à l'objectif de financement de 15 % des dépenses de la conférence par des mécènes privés, proposé par votre rapporteur spécial Eric Doligé , fin 2014.

Le responsable du programme indique que ces apports privés, ainsi que la vérification rigoureuse des factures, « ont en effet permis de réaliser de fortes économies dans le cadre de l'organisation de la COP 21 » 13 ( * ) , permettant l'annulation de la réserve de précaution initiale et d'une part des crédits ayant fait l'objet d'un « surgel » à hauteur de 19,4 millions d'euros en AE et de 15,7 millions d'euros en CP.

7. Des indicateurs de performance transversaux révélant des tensions dans la gestion du patrimoine immobilier

Selon les indicateurs de performance transversaux à la mission, le ratio de surface utile nette (SUN) par poste de travail est stable en 2016 par rapport à 2015 (14,7 m 2 ). En revanche, le ratio d'entretien courant s'élève à 9,85 euros par m 2 en 2016 , en forte hausse par rapport à 2015 (7,73 euros par m 2) et alors même que la cible est de 5,39 euros par m 2 . En raison du vieillissement du parc immobilier, les dépenses d'entretien des bâtiments ont en effet augmenté de 35 % à l'étranger et de 15 % en France et ont nécessité des redéploiements de crédits au cours de l'exercice 2016.

Par ailleurs, l'indicateur de respect des coûts et délais des grands projets d'investissement immobiliers montre un dépassement des coûts pour cinq projets et des délais pour quatre opérations en cours de réalisation sur un total de douze suivies par cet indicateur. « Les incertitudes liées au rythme des cessions et la mise en place fin 2015 d'un suivi renforcé de la dépense annuelle sur le CAS [« Gestion du patrimoine immobilier de l'État »] expliquent, en complément des difficultés locales et contextuelles, les décalages des calendriers et les augmentations des budgets des opérations [...]. Dans ce contexte, une procédure de priorisation des nouvelles opérations a été mise en place par le ministère » 14 ( * ) . Les résultats de cette procédure devront, en tout état de cause, être transmis à vos rapporteurs spéciaux afin de leur permettre d'apprécier pleinement les choix opérés en 2017 et prévus en 2018.

MISSION « ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE L'ÉTAT » - M. HERVÉ MARSEILLE, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La loi de finances initiale (LFI) pour 2016 avait ouvert 2,548 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 2,549 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) (hors fonds de concours - FdC - et attributions de produits - AdP -) pour financer les trois programmes de la mission.

Les programmes de la mission AGTE

Ceux-ci sont, on le rappelle, d'une inégale densité budgétaire, le programme 307 (« Administration territoriale ») regroupant environ 64,4 % des crédits de paiement (1 641,8 millions d'euros ouverts en 2016).

Les deux autres programmes, « Vie politique, cultuelle et associative » (232) pour 99,3 millions d'euros d'ouvertures en 2016 et « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » (216) avec 808 millions en loi de finances initiale pour 2016 , mobilisent, le premier, 3,9 % des moyens, le second 31,7 % des crédits.

Cette répartition n'est mentionnée que moyennant une certaine irrégularité de la structure de la mission en raison d'un cycle électoral dont les effets sur la programmation et l'exécution des crédits ouverts en loi de finances initiale sont particulièrement significatifs cette année.

Une fois pris en compte les mouvements de crédits opérés en gestion, les rattachements de fonds de concours et les attributions de produits, les dotations disponibles pour 2016 ont été portées à 2,75 milliards d'euros, soit un plafond supérieur de 7,8 % au niveau voté en loi de finances initiale .

La consommation des crédits a atteint 2,70 milliards d'euros , soit 98,2 % des autorisations finalement disponibles et un taux d'exécution de 105,9 % des seuls crédits votés en loi de finances initiale (hors reports de 2015 sur l'exercice 2016).

L'an dernier, le plafond des autorisations de dépenses avait été fixé à 3 milliards en crédits de paiement (CP) pour un taux d'exécution de 92,7 % ( 2 788,7 millions d'euros ) qui avait laissé des marges de reports de 2015 sur 2016 élevées.

On voit par là, et l'influence de la gestion 2015 sur l'exercice 2016 , et la réalité d'une inflexion des dépenses de la mission par rapport à l'année dernière derrière une stabilité des dépenses qui n'est qu'apparente.

A. LA GESTION DES CRÉDITS EN COURS D'EXERCICE : ENTRE NÉCESSITÉS ET CONSTATATIONS

Plutôt marginales pour les autres programmes, les mesures administratives de gestion des crédits de la mission ont été particulièrement significatives pour le programme 232 consacré principalement au financement de la vie politique .

Pour l'essentiel, elles ont pris la forme de reports .

Quant aux ajustements apportés par la loi de finances rectificative de fin d'année, ils n'ont eu une réelle ampleur que pour le programme 216, au titre, non des crédits de paiement, mais des autorisations d'engagement.

Mouvements et consommation de crédits de la mission en 2016

Source : Chorus-contrôle budgétaire et comptable ministériel, dans Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire pour 2016

Sur le programme 232 , une mise en réserve initiale de 31,9 millions d'euros avait été suivie, lors du précédent exercice budgétaire, d'un « surgel » de 101,5 millions afin de tirer les conséquences du report des élections régionales en fin d'année. La totalité de cette somme (plus de 30 % des crédits ouverts en loi de finances pour 2015 et un montant de crédits supérieur à celui ouvert en loi de finances initiale pour 2016) restait disponible avant les opérations de fin de gestion, laissant présager d'importants transferts de crédits de 2015 sur 2016.

De fait, les reports ont atteint 163,8 millions d'euros sur ce programme. Ils ont été partiellement compensés par une annulation de crédits de 21 millions d'euros pour financer les décrets d'avances pris en cours d'année. Mais, au total, les crédits consommés ont excédé de 133,52 millions d'euros les crédits initiaux portant le niveau des dépenses à plus de 2,3 fois les crédits de la loi de finances initiale, tout en laissant inemployés 11 millions d'euros sur le disponibles total.

Sur le programme 307 , les reports entrants ont atteint un niveau relatif nettement plus modeste (1,7 % des crédits de paiement ouverts en loi de finances) tandis que les rattachements de fonds de concours et autres attributions de produits (51,73 millions d'euros) ont complété les moyens du programme de façon plus significative, en les majorant de 3,1 %. Les annulations de crédits décidées dans le cadre des décrets d'avances de l'année ont réduit le disponible de 26,4 millions d'euros, sans peser sur les marges de gestion du responsable de programme qui a laissé inemployés 30,9 millions d'euros de crédits de paiement.

Parmi les crédits non consommés, une place à part doit être faite aux crédits ouverts par voie de rattachements de fonds de concours. Le montant des crédits de ce type inemployés à la fin de l'année a atteint un niveau très élevé : environ 20 millions d'euros en autorisations d'engagement. Il n'est pas dans l'esprit des fonds de concours de demeurer dans l'attente de leur consommation. Il est vrai que certains fonds de concours versés au bénéfice du programme 307 peuvent difficilement être considérés comme réunissant les conditions de ces ressources. En particulier, l'intention libérale associée aux fonds de concours dits « CNI 15 ( * ) » n'apparaît pas évidente. Il s'agit, en réalité, de remboursements de dépenses supportées par l'Agence nationale des titres sécurisés qui, selon le rapport annuel de performances, font l'objet d'avances à partir des crédits du programme. Le montant concerné est significatif (16,87 millions d'euros) de même que le montant des crédits correspondants non consommés (10,39 millions d'euros en autorisations d'engagement). Ce phénomène de non-consommation apparaît récurrent, les exercices budgétaires se concluant par des reports systématiques, ce qui conduit à s'interroger sur le niveau des fonds de concours versés par l'ANTS au titre de la CNI.

La sollicitation des autorisations d'engagement a été encore plus économe puisque 57,24 millions d'euros n'ont pas été consommés (3,3 % des ouvertures).

Tel n'a pas été le cas pour le programme 216 qui, pour avoir laissé 11,41 millions d'euros de ses crédits de paiement finalement disponibles après les ouvertures réalisées en cours de gestion sans emploi, a mobilisé un niveau d'autorisations d'engagement significativement supérieur aux ouvertures initiales (+ 40,35 millions d'euros). Cependant, force est de constater que la très massive ouverture autorisée en loi de finances rectificative de fin d'année (+ 228,64 millions d'euros , soit un supplément de près de 30 % par rapport à la programmation initiale) ne s'est pas révélée totalement justifiée puisque la consommation des autorisations d'engagement a finalement laissé un disponible de plus de 187 millions d'euros soit près de 19 % des dotations ouvertes au cours de l'exercice.

Si, à l'issue de l'exécution 2015 des reports de crédits exceptionnellement élevés avaient été mis en place sur l'exercice 2016 (203,7 millions d'euros dont 163,8 millions sur le programme 232), l'exécution du disponible en 2016 laisse inemployée une masse de crédits de paiement nettement plus réduite (53,3 millions d'euros) avec, toutefois, un niveau d'autorisations d'engagement très conséquent (256,8 millions d'euros) qui témoigne que les lois de finances rectificative de fin d'année, loin de n'abriter que des ajustements nécessaires à la dépense publique de l'exercice qu'elles concernent, sont le véhicule de corrections apportées à la loi de finances de l'année qui suit.

Votre rapporteur spécial n'ignore pas les contraintes qu'impose l'annualité budgétaire mais doit relever que l'objet d'une loi de finances rectificative n'est pas de rectifier la loi de finances de l'année postérieure à celle pour laquelle elle est votée.

B. MALGRÉ UN FORT DÉPASSEMENT APPARENT, UN QUASI- RESPECT DE LA LOI DE PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES

Le tableau ci-dessous présente les différents éléments d'appréciation de la conformité de l'exécution budgétaire des crédits de la mission aux plafonds de la loi de programmation des finances publiques à moyen terme. Il tient compte des changements de périmètre de la mission 16 ( * ) .

Source : Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire pour 2016

Les modifications de périmètre ont conduit à une adaptation de la norme de dépenses des programmes 2016 et 307 avec des effets de sens opposés : une réduction du plafond pour ce dernier programme (- 31,72 millions d'euros) et une augmentation pour le programme 216 (+ 31,54 millions d'euros).

Les dépenses constatées ont excédé de 164,9 millions d'euros la norme de la loi de programmation des finances publiques pour 2016, dont 154,65 millions d'euros sont attribuables au programme 232.

Ce dépassement s'explique par le report de charges de 2015 à 2016 dont on a expliqué qu'il résultait du décalage du calendrier électoral et pouvait, à ce titre, être considéré comme largement facial.

En revanche, le dépassement constaté sur le programme 216, certes de moindre ampleur (19,24 millions d'euros, soit 3 % du plafond), est nettement moins justifiable d'autant que la mission AGTE n'est pas une mission prioritaire.

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

A. UNE MAQUETTE DE PERFORMANCE LARGEMENT PERFECTIBLE

La mission comporte trois programmes assortis chacun d'objectifs suivis par des indicateurs (8 objectifs et 15 indicateurs au total).

Outre que, pour nombre d'indicateurs de performances, les résultats faisant l'objet d'un suivi échappent à la prise du responsable de programme, de nombreux indicateurs ressortent comme peu significatifs tandis que des objectifs primordiaux ne sont pas couverts par le suivi de performance.

On en expose ci-après quelques exemples parmi d'autres.

1. La maquette de performance du programme 307 devrait mieux rendre compte des priorités assignées au réseau préfectoral

Le programme 307 « Administration territoriale », qui, jusqu'en 2015 affichait cinq objectifs, n'en affiche plus que quatre depuis que l'objectif d'amélioration de la coordination des actions interministérielles ne fait plus l'objet d'un suivi en loi de finances. Les indicateurs de suivi sont au nombre de huit.

Certains d'entre eux laissent à désirer. En outre, on ne peut que regretter le défaut d'exhaustivité des données sur lesquelles se base la restitution des actions financées au titre du programme.

Sur ce dernier point, force est d'observer que les objectifs développés dans les directives nationales d'orientation des préfectures et sous-préfectures , en particulier dans la dernière en date qui couvre les années 2016-2018, sont loin d'être repris avec exhaustivité dans les documents budgétaires , alors même que ces objectifs, prioritaires, ne sont pas si nombreux que leur traduction dans l'information budgétaire soit de nature à les alourdir plus que de raison. On les rappelle pour mémoire : « quatre orientations principales se dégagent pour les services : conforter les préfectures au coeur de missions régaliennes de l'État ; moderniser les relations avec l'usager ; incarner la proximité sur le territoire ; déployer les outils d'accompagnement de ces évolutions ».

Votre rapporteur spécial recommande qu'un effort soit conduit pour que les objectifs opérationnels définis dans le cadre des orientations fixées au réseau préfectoral trouvent une traduction permettant d'enrichir une information budgétaire qui doit pouvoir saisir de façon réaliste les réformes entreprises et les orientations données aux moyens financés par le programme d'administration générale territoriale de l'État.

Par ailleurs, il serait utile que les indicateurs de gestion selon lesquels le responsable de programme apprécie les résultats obtenus, dont l'exhaustivité est nettement plus satisfaisante que celle qui caractérise l'information fournie au Parlement, soient indiqués dans les documents de restitution budgétaire.

Quant à des critères plus qualitatifs, on rappelle que certains indicateurs suivent des données dont la réalisation n'incombe qu'en partie au responsable du programme. Ainsi en va-t-il de l'élaboration des plans communaux de sauvegarde.

Surtout, d'autres fournissent des indications à la faible significativité et susceptibles d'induire des conclusions hâtives, voire erronées.

Dans ce sens, la détection des fraudes documentaires par les préfectures est certainement sensible à un « effet lampadaire ». S'il n'est pas sans signification, son interprétation comme témoin de l'efficacité administrative est soumise à trop d'incertitudes pour qu'il puisse être jugé comme représentatif de celle-ci. En toute hypothèse, il s'agit d'un indicateur pour le moins ambivalent. D'un côté, l'augmentation du taux de détection peut témoigner d'une meilleure efficacité des services de guichet, de l'autre, il peut signifier une détérioration des performances des mesures systémiques de sécurisation des titres, qui ont marqué l'historique récente des réorganisations administratives auxquelles ont été soumises leurs délivrances. Enfin, rien n'est dit sur les résultats des suites données aux constats de fraude si bien que l'orientation prioritaire donnée aux services d'améliorer la détection des fraudes ne fait l'objet que d'une évaluation sommaire dans les documents budgétaires.

Enfin, et sans préoccupation d'exhaustivité, force est d'observer que le suivi du contrôle de légalité par la mesure d'un taux de contrôle des actes prioritaires reçus en préfecture peut être affecté par des ruptures de champ. On sait que la dimension des actes prioritaires a fortement varié dans le temps (voir infra ). Le rapport annuel de performances en témoigne d'ailleurs puisqu'il évoque une diminution de 10 % des actes reçus au titre du contrôle de légalité. Dans ces conditions, la stabilité du taux de contrôle des actes reçus en préfectures ressort comme une contre-performance. Ajoutons qu'un indicateur purement quantitatif ne saurait saisir la qualité du contrôle, qui est évidemment essentielle En bref, cet indicateur est trop approximatif, et, au demeurant, incomplet puisqu'il ne renseigne pas sur le contrôle budgétaire.

2. La maquette de performance du programme 232 est réductrice

Le lien entre les indicateurs de performances (deux sont renseignés) et l'action du responsable du programme 232 « Vie politique, cultuelle et associative » n'est pas facile à établir.

Les résultats ne dépendent pas exclusivement, loin de là, du responsable de programme. En effet, les coûts des élections pas plus que le délai de traitement des comptes des partis politiques ne sont gouvernés par le secrétaire général du ministère de l'intérieur.

Par exemple, le coût des élections résulte soit de circonstances électorales singulières, qui conduisent à étendre plus ou moins les remboursements effectués au profit des candidats en fonction des résultats des scrutins, soit de décisions éminemment politiques sur lesquelles le responsable de programme est sans prise. Ainsi en va-t-il, par exemple, de la dématérialisation des documents de propagande électorale.

Au-delà de cette caractéristique, presque fatale, on peut regretter que le dispositif de performance ne soit pas mobilisé pour être le support d'une information régulière et développée des conditions du financement de la vie politique et des cultes.

3. La maquette de performance du programme 216 est incomplète

Quant aux indicateurs de performance du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », pour fournir quelques indications utiles pour le suivi des éléments de la « fonction de production » du ministère, ils sont marqués par leur insuffisance.

Certains indicateurs sélectionnent sans raison évidente des données qui ne sont que partiellement représentatives du problème administratif envisagé - c'est le cas pour les contentieux qui ne sont informés que pour celui des étrangers.

D'autres manquent dans le domaine de la gestion du personnel (restructuration des qualifications, mobilité géographique ou fonctionnelle). Ces lacunes sont particulièrement regrettables s'agissant d'une administration de réseau en phase de changement.

Au total, un effort d'exhaustivité et de représentativité des objectifs et indicateurs de suivi des performances des actions publiques financées par la mission s'impose.

B. DES RÉSULTATS MITIGÉS

Dans le contexte actuel du suivi de la performance, les résultats obtenus apparaissent mitigés.

S'il est bien vrai que l'utilité sociale des actions financées par la mission n'est pas toujours susceptible d'être restituée par des indicateurs ponctuels, à dimension exclusivement quantitative et dont les niveaux dépendent en partie de facteurs extérieurs à l'action publique, les indicateurs suivis ne témoignent pas de l'atteinte des objectifs fixés.

1. Les indicateurs de performances du programme 307 semblent traduire les difficultés certaines rencontrées dans l'accomplissement des missions de proximité

Des huit indicateurs du programme 307, cinq révèlent des résultats inférieurs aux attentes . Votre rapporteur souhaite tout particulièrement que les cibles des indicateurs relatifs à la sécurité publique, qui pourraient être enrichis pour tenir compte des nouvelles menaces, soient toutes atteintes sans pour autant détériorer la qualité des actions concernées. Par ailleurs, la stagnation des résultats obtenus dans le domaine de la délivrance des passeports biométriques, tels qu'ils sont mesurés par l'indicateur exposé dans le rapport annuel de performances, témoigne des difficultés rencontrés pour atteindre les cibles prescrites aux services. Encore faut-il regretter la significativité très insuffisante de cet indicateur. Il porte, en effet, non sur les délais de traitement des dossiers présentés par les demandeurs mais sur le nombre des préfectures parvenant à traiter ces demandes en moins de 15 jours. Compte tenu de la concentration des demandes de passeports en quelques lieux du territoire (Île-de-France notamment) et au vu des remontées des usagers il y a tout lieu de penser que le délai moyen de traitement des demandes de passeports biométriques se situe significativement au-dessus de 15 jours et dépasse trop souvent une attente raisonnable.

2. Le programme 232 a été confronté à des choix peu propices à l'optimisation de ses résultats

Le suivi de la performance du programme, on l'a indiqué, est structuré autour d'indicateurs globalement indépendants de toute influence du responsable de programme. Ainsi en va-t-il, en particulier, s'agissant du coût des élections, pour les conditions de diffusion de la propagande électorale dont la dématérialisation est régulièrement envisagée sans être jamais mise en oeuvre.

Peu de progrès ont été accomplis ces dernières années. Alors que la numérisation pénètre dans tous les domaines de la vie des Français, les économies qu'elle pourrait engendrer n'ont pas été mobilisées. Cette résistance engage une responsabilité collective mais qui incombe au premier chef aux Gouvernements qui n'ont pas su convaincre du bien-fondé des nombreuses initiatives développées en ce sens ces dernières années. Des projets non concertés sont apparus sans l'indispensable phase de consultations nécessaire à toute méthode de réforme qui se veut convaincante. Moyennant un processus débarrassé de son empreinte solitaire et technocratique, le nouveau cycle électoral qui s'ouvre devrait fournir l'occasion d'expérimentations limitées mais réalistes. Elles pourraient passer par l'ouverture d'une option de réception par voie numérique des documents de propagande électorale exercée au gré des électeurs.

Par ailleurs, quant à la mission attribuée à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, l'indicateur suivant les délais de publication des comptes des partis politiques signale une détérioration du délai nécessaire au traitement des comptes en 2016 avec l'ajout d'un mois supplémentaire au délai déjà important employé l'année précédente (6 mois et 20 jours au lieu de 5 mois et 7 jours en 2015).

C'est un mauvais résultat que le Gouvernement explique par un alourdissement de la charge de travail. Les comptes des partis politiques à traiter sont passés de 431 en 2015 à 451 en 2016. L'augmentation du nombre des partis, pour notable qu'elle soit, n'a pas empêché le responsable de programme de procéder à une opération de fongibilité asymétrique des crédits qui a conduit à employer 10,5 millions d'euros prévus pour rémunérer des personnels afin de régler des prestations liées à l'externalisation et à la mise sous pli de la propagande électorale. En bref, la contrainte budgétaire choisie par le Gouvernement a été reportée sur les formations politiques laissées un temps plus long dans l'incertitude.

3. Le programme 216, des inquiétudes sur l'informatique et l'immobilier

En ce qui concerne le programme 216, la durée d'indisponibilité de certaines applications informatiques ressort encore comme particulièrement élevée malgré les progrès d'ensemble extériorisés par le rapport annuel de performances. Il en va ainsi pour des programmes particulièrement sensibles correspondant à des opérations de police (passage rapide aux frontières, fichier des personnes recherchées et des véhicules volés), à des opérations de délivrance de titres sécurisés, l'application SIV (système d'immatriculation des véhicules) ayant connu près de 79 heures d'indisponibilité ou encore à aux opérations de statut constitutionnel en lien avec le contrôle de légalité (ACTES a été indisponible près de 47 heures). Les conditions d'indisponibilité ne sont pas exposées ni expliquées si bien qu'il est difficile d'apprécier son impact sur l'activité des services mais aussi sur les partenaires du ministère (collectivités territoriales, organismes agréés pour la délivrance des certificats d'immatriculation).

Étant donné la diffusion des réseaux numériques dans les procédures mises en oeuvre par le ministère de l'intérieur en lien avec les restrictions d'accès aux guichets programmée dans le cadre du PPNG, qui se fonde sur la constitution de plates-formes numériques pour améliorer l'efficience de certaines missions, dont, au premier rang, la délivrance des titres mais également au vu des enjeux de sécurité opérationnelle, il convient naturellement de rechercher tous les moyens permettant de prévenir ou, si nécessaire, de surmonter au plus vite les situations de crise.

De la même manière, la maîtrise des opérations immobilières, dont les indicateurs varient avec une forte ampleur d'une année sur l'autre, semble perfectible au vu des dépassements de délais et de budgets dont ces indicateurs témoignent. On ne saurait oublier, par ailleurs, les interrogations sur l'état des emprises immobilières des préfectures et des sous-préfectures et leur niveau d'utilisation.

C. UNE MISSION GÉNÉRALISTE ET HÉTÉROCLITE NÉCESSAIREMENT ÉLOIGNÉE DE L'ESPRIT DE LA NOMENCLATURE BUDGÉTAIRE DE LA LOI ORGANIQUE RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES

La loi organique relative aux lois de finances a entendu préserver le principe de spécialité budgétaire, son article 7 posant à ce titre plusieurs normes régulatrices. Ainsi du I de l'article qui énonce qu'une « mission comprend un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie » et encore qu'un « programme regroupe les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère et auquel sont associées des objectifs précis, définis en fonction de finalités d'intérêt général, ainsi que des résultats attendus et faisant l'objet d'une évaluation » .

Le moins qu'on puisse dire de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », dont l'intitulé porte en soi le témoignage d'un oxymore, est qu'elle est très éloignée de la lettre et de l'esprit de ces dispositions organiques.

Au-delà de ce constat de principe, il y a lieu d'en considérer les prolongements pratiques.

De ce point de vue, la mission AGTE apparaît à bien des égards une mission « réservoir ». Elle regroupe des crédits destinés à financer moins des politiques publiques bien identifiées que des structures administratives dotées de missions souvent très générales (comme l'intitulé de la mission l'indique assez) dont l'identification présente certaines difficultés malgré les efforts réalisés pour spécifier des blocs de compétence, comme c'est le cas pour le programme 307 qui finance principalement le réseau préfectoral et les structures qui, de plus en plus, s'en détachent. Par ailleurs, nombre des moyens rattachés à la mission sont en réalité redéployés vers d'autres missions tandis qu'au sein du programme 307 une action rassemble des dotations dites « d'animation et de soutien du réseau » qui ont vocation à être réparties entre d'autres actions du programme.

Ces caractéristiques de la mission AGTE sont encore illustrées par le niveau élevé des crédits déversés à partir de la mission vers d'autres missions (ou, au sein de la mission, entre programmes).

L'écart entre les dépenses directes de la mission AGTE et ses dépenses complètes, une fois ces déversements pris en compte, s'est élevé en 2016 à 452,1 millions d'euros, 16,7 % des dépenses directes de la mission se trouvant consacrés à des politiques publiques prises en charge en dehors du champ propre de la mission AGTE.

Cette situation ne facilite pas l'analyse budgétaire, non plus que l'efficacité des moyens affectés à la mission (comme en témoigne l'analyse par votre rapporteur spécial des indications fournies pour rendre compte des résultats des politiques publiques qu'elle est censée recouvrir) et les écarts entre le diagnostic sur la situation d'emploi de la mission AGTE associé aux données nominales et celui fondé sur des structures constantes montrent l'importance des changements de périmètre que subit fréquemment la mission du fait de sa vocation généraliste.

Réalisation du schéma d'emplois en 2016 (en ETPT)

(en ETPT)

Programme

Réalisation

2015

LFI+LFR+

Réalisation

2016

Écart

2016/2015

Écart 2016 réalisés/ 2016 prévus

Transferts en

gestion

Administration territoriale

26 562

26 267

25 797

- 765

- 470

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

6 243

6 714

6 437

194

- 277

Vie politique, cultuelle et associative

47

44

43

- 4

- 1

Total

32 582

33 025

32 277

- 575

- 748

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les données d'emplois récapitulées dans le tableau ci-dessus résument des évolutions largement apparentes. Elles résultent pour beaucoup de transferts d'emplois réalisés vers d'autres programmes budgétaires dont la fixation du plafond d'emplois en gestion a été largement dépendante. Ainsi du transfert de 684 ETPT du programme 307 vers le programme 333 au titre des services interministériels départementaux des systèmes d'information et de communication ou encore du transfert de 634 ETPT du programme 215 vers le ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer concernant les effectifs déconcentrés de la sécurité routière.

D. UNE MISSION PRINCIPALEMENT DÉDIÉE À DES DÉPENSES DE PERSONNEL AUX PERSPECTIVES INCERTAINES

1. La prépondérance des dépenses de personnel

Pour 70 %, les dépenses de la mission AGTE sont des dépenses de personnel. Le poids de ces dépenses serait encore plus élevé n'étaient les particularités du programme 232 qui porte presque exclusivement des dépenses de fonctionnement ou d'intervention.

Les dépenses effectuées en 2016 confirment cette caractéristique malgré une exécution apparemment économe en dépenses de personnel.

En effet, le poids relatif des dépenses de personnel sort encore légèrement renforcé de la consommation des crédits de la mission en 2016.

Structure des dépenses de la mission AGTE par nature

2015 (A)

2016 (B)

Variation B/ A

Dépenses de personnel

69,9 %

70,7 %

0,8 %

Autres dépenses

30,1 %

29,3 %

- 0,8 %

dont :

Fonctionnement

24,2 %

23,3 %

- 0,9 %

Investissement

1,8 %

2,0 %

0,2 %

Interventions

4,1 %

4,0 %

- 0,1 %

Opérations financières

0,0 %

0,0 %

0,0 %

Total

100 %

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du rapport annuel de performances de la mission pour 2016

Il gagne près de 1 point quand les dépenses de fonctionnement se replient du même ordre de grandeur malgré, pour ces dernières, une dépense nettement plus élevée que prévu dans la loi de finances initiale, quand, à l'inverse, les dépenses de personnel ont été contenues par rapport aux prévisions.

Données sur l'exécution des crédits de la loi de finances initiale
par nature de dépenses

Réalisation 2015 (A)

Prévision 2016 (B)

Réalisation 2016 (C)

C-A

C-B

Dépenses de personnel

1 949,80

1 972,60

1 908,50

- 41,30

- 64,10

Autres dépenses

838,9

637,7

791

- 47,90

153,30

dont :

Fonctionnement

675,9

464,8

628,9

- 47,00

164,10

Investissement

48,9

76

53,5

4,60

- 22,50

Interventions

114,1

96,9

108,4

- 5,70

11,50

Opérations financières

0

0

0,3

0,30

0,30

Total

2 788,70

2 610,30

2 699,50

- 89,20

89,20

2. Une gestion réelle des emplois marquée par des besoins apparus du fait des circonstances qui alourdissent les perspectives d'emplois de la mission et ainsi de dépenses de personnel
a) Au-delà d'évolutions apparentes, une cible du schéma d'emplois révisée sous le poids des événements

Le plafond d'emplois de la mission pour 2016 s'est trouvé tributaire de modifications de champ qu'il convient d'éliminer pour restituer la dynamique réelle des emplois de la mission.

À titre d'illustration, pour le programme 307, le plafond d'emplois de la loi de finances initiale tablait sur une réduction de 956 ETPT en raison des mesures de transfert exposées ci-dessus et d'un changement de périmètre lié au transfert de 211 ETPT aux régions dans le cadre de l'attribution à celles-ci de la compétence de gestion des interventions européennes au titre du fonds européen de développement régional (FEDER). En gestion, compte tenu de nouveaux transferts (80 ETPT en net), le plafond d'emplois a été porté à 26 267 ETPT.

Cette programmation apparaît ainsi largement « nominale », les évolutions d'emplois à périmètre constant traduisant une réalité différente.

Les objectifs des schémas d'emplois de la mission ont été révisés pour répondre aux évènements qui ont suscité des besoins en termes de sécurité et d'accueil des migrants.

Pour le programme 307, la programmation initiale du schéma d'emplois tablait sur une réduction de 200 ETP. La réalisation s'est soldée par une augmentation des emplois de 31 ETP décomposée comme suit :

- + 185 ETP dans le cadre du pacte de sécurité ;

- + 30 ETP dans le cadre du plan d'accueil des migrants ;

- + 16 ETP pour renforcer les guichets uniques de demande d'asile.

De la même manière, alors que le schéma d'emplois du programme 216 avait été fixé à - 94 ETP, les modifications apportées lors de la discussion du projet de loi de finances initiale ont procédé à un ajustement à la hausse via la création de :

- 67 emplois au titre du pacte de sécurité ;

- et 10 emplois pour la prise en charge des migrants.

Par ailleurs, en gestion :

- 18 ETP en plus des 27 ETP d'origine ont été créés pour les postes de cabinet du ministère de l'aménagement du territoire et de son secrétariat d'État ;

- 10 ETP ont renforcé le service de l'asile de la direction générale des étrangers en France ;

- 7 ETP ayant abondé le secrétariat général du comité de prévention de la délinquance et de la radicalisation.

Au total, tant le programme 216 (+ 8 ETP contre une prévision de - 94) que le programme 307 (+ 31 ETP contre - 200 en prévision) ont contribué à un dépassement important des cibles d'emplois de la mission, une fois éliminés les changements de périmètre.

b) Des impacts structurels sur la « politique d'emploi » financée par la mission ?

L'un des axes forts de la politique d'emploi financée par la mission est la réalisation d'un « schéma d'emplois » à moyen terme basé sur la réduction de 1 300 ETPT à l'horizon de 2018 en lien avec la mise en oeuvre du plan « préfectures nouvelle génération » (PPNG) qui doit s'accompagner de la suppression de 4 000 emplois selon le ministère.

Votre rapporteur spécial relève que le schéma d'emplois du programme 307 concerné au premier chef par les évolutions devant provenir de la mise en oeuvre du PPNG avait été calibré avec un recul de 200 ETP à un niveau modérément exigeant par rapport à la cible exposée ci-dessus.

Dans ces conditions, les recrutements finalement réalisés, qui se sont traduits par un solde de + 31 ETP, éloignent encore du but fixé pour 2016. Une observation semblable peut être faite s'agissant du programme 216.

S'il est bien vrai que les dépenses de personnel ont néanmoins été contenues en dessous des dotations ouvertes, marquant une économie de 64 millions d'euros, ce résultat est étroitement lié à une sous-consommation du plafond d'ETPT (470 ETPT sous le plafond du programme 307). Celle-ci, à son tour, est la résultante du profil temporel des recrutements relatés ci-dessus, qui, pour avoir conduit à un large dépassement de l'objectif d'emploi, sont intervenus tardivement dans l'année pesant pour 74 ETPT dans la consommation effective des crédits. Autrement dit, sauf à imaginer la non-reconduction de ces emplois, le plafond d'emplois du programme 307 se trouve d'emblée lesté de ce fait de 74 ETPT en 2017.

Plus généralement, il faut compter avec les vacances d'emplois qui, pour le seul programme 307, s'élèvent 485 ETPT afin de mieux apprécier les risques d'alourdissement de la masse salariale de la mission.

Ceux-ci paraissent d'autant plus élevés qu'un certain nombre de mesures de gestion des ressources humaines générales ou spécifiques pourraient accentuer les effets d'un volume d'emplois plus élevé que programmé.

Il s'agit, en premier lieu, de l'augmentation du point d'indice de la fonction publique, combiné avec la mise en oeuvre encore incomplète en 2016 du protocole sur les parcours professionnels (PPCR). En 2016, le premier, dont l'effet en année pleine n'a épuisé que le quart de son impact en régime de croisière, a provoqué une hausse de la masse salariale de 3,1 millions d'euros 17 ( * ) (programmes 307 et 216).

En second lieu doit être prise en compte la perspective d'un alourdissement du coût unitaire des emplois lié, d'une part, à la restructuration des emplois programmée dans le cadre du PPNG (le « repyramidage » des emplois) du fait de l'enrichissement des missions (qui nécessitera par ailleurs des charges de formation significatives) et, d'autre part, aux limites d'une politique d'emplois recourant à l'embauche de contractuels. Sur ce point, le dépassement de la limite de l'enveloppe fixée en 2016 pour rémunérer de tels emplois (14 millions d'euros pour une consommation de 17,6 millions d'euros) paraît peu soutenable de sorte que les économies procurées par le développement de l'emploi contractuel en termes de contribution à l'équilibre du CAS « Pensions » semblent en partie non récurrentes.

E. UNE FOIS ENCORE, LA PROGRAMMATION DES DÉPENSES DE CONTENTIEUX A ÉTÉ DÉBORDÉE EN GESTION

L'action 6 du programme 216 est consacrée aux dépenses de contentieux et de protection fonctionnelle en lien avec les activités du ministère de l'intérieur.

Votre rapporteur spécial appelle régulièrement l'attention sur les dérapages de ces dépenses qui, en exécution, sont toujours très supérieures aux prévisions de la loi de finances initiale. Tel est encore une fois le cas cette année.

Données relatives aux dépenses de contentieux et de protection fonctionnelle

Le taux de couverture des dépenses effectives de contentieux par les crédits initiaux s'est même dégradé en 2016, de près de 15 points. En revanche, une réduction de la charge des dépenses de contentieux de près de 14 millions d'euros doit être relevée.

Néanmoins, cette dernière évolution n'est pas totalement probante. Une partie des dépenses de protection fonctionnelle des fonctionnaires, qui constituent, avec 12,4 millions d'euros, une partie significative des emplois de l'action (près de 15 %) n'a pas pu être payée faute de crédits disponibles. Cette pénurie de moyens, malgré la levée intégrale de la réserve de précaution appliquée au programme 216, les reports de crédits de 2015 et les abondements intervenus en gestion (décret d'avance et loi de finances rectificative) pourrait avoir également touché les autres dépenses de contentieux. Les prévisions pour 2017 le suggèrent, qui font envisager une nouvelle très forte progression de ces charges (de l'ordre de 31 millions d'euros, soit + 37 %).

Sur ce point, il faut regretter que les informations du compte général de l'État n'apportent aucun éclaircissement. Les provisions pour litiges, qui atteignent 25,1 milliards d'euros, dont 1 milliard d'euros pour des litiges autres que ceux liés à l'impôt, n'y sont pas suffisamment développées pour en restituer précisément la nature.

La pratique suivie invite à une appréciation critique sur la sincérité de la programmation budgétaire initiale du programme 216. La récurrence des dépassements de crédits et la systématicité du sens de l'écart entre les prévisions et les réalisations, celles-ci excédant toujours celles-là, conduisent à se détourner d'accueillir avec une trop grande complaisance l'argument d'une difficulté intrinsèque frappant la prévision de dépenses réputées aléatoires.

L'inertie des dépenses de contentieux apparaît suffisamment forte pour que la programmation initiale soit plus fidèle aux réalisations. Au demeurant, une prévision plus largement calibrée, qui permettrait d'échapper au reproche d'insincérité, ne présenterait en soi aucun risque de dérapage des dépenses. Si la mise en réserve de crédits votés en loi de finances initiale, la réserve de précaution, peut avoir un sens c'est bien celui de geler l'emploi de dotations correspondant à des dépenses incertaines.

Votre rapporteur spécial renouvelle ainsi son souhait que les prévisions de la loi de finances initiale rendent mieux compte des enjeux structurels présentés par les dépenses de contentieux.

Il y ajoute le voeu que les mesures mises en oeuvre pour les réduire soient couronnées de succès, ces dépenses se traduisant par une charge budgétaire sans valeur ajoutée pour la collectivité, des dysfonctionnements de l'action publique ainsi que le suggère leur catégorisation telle qu'elle ressort du tableau ci-après.

Dépenses de contentieux en 2016 par catégorie

(CP en millions d'euros)

Domaines d'intervention de la dépense

Consommation 2016

Refus de concours de la force publique

25,84

Attroupements

3,40

Autres mises en cause de l'État

20,22

Accidents de la circulation

10,00

Litiges droit des étrangers

12,23

Total

71,69

Source : rapport annuel de performances de la mission pour 2016

F. UN BUDGET DE TRANSITION : QUEL AVENIR POUR L'ÉTAT DE PROXIMITÉ ?

Votre rapporteur spécial a consacré un rapport de contrôle budgétaire à l'échelon le plus local de l'administration générale de l'État, celui des sous-préfectures 18 ( * ) .

Celles-ci ont été prises dans un processus de progressive dégradation de leurs moyens dans un contexte où leurs missions ont tardé à trouver un socle de doctrine solide.

Dans le même temps, tant l'État que les collectivités territoriales ont suivi des réorganisations marquées par l'émergence de pôles de gestion publique plus puissants mais aux logiques géographiques plus vastes et ainsi exposées aux risques d'un éloignement par rapport au local.

De la même manière, les opportunités offertes par le numérique ont été exploitées dans certaines activités en lien direct avec la vie quotidienne des Français. Il en est allé ainsi tout particulièrement pour la délivrance des titres sécurisés qui, petit à petit, a marginalisé le rôle de la plupart des mairies de notre pays.

Ces dernières tendances devraient encore s'accentuer dans le cadre de la nouvelle directive nationale d'orientation des préfectures et des sous-préfectures et de l'idéal d'une « France sans guichets », autrement dit sans contact entre les usagers et l'État prestataire de services et sans visibilité de l'État pour nombre de nos concitoyens, porté par le plan « préfectures nouvelle génération ».

Si, en 2016, la traduction concrète de celui-ci demeure encore à l'état d'esquisse, quelques rappels s'imposent pour préserver l'existence d'un État stratège et régalien de proximité.

En ce sens, dans le rapport précité, votre rapporteur spécial a énoncé dix-huit principales recommandations afin de concilier ces exigences et ces ambitions avec les contraintes financières et celles provenant des nouvelles dynamiques territoriales.

Pour l'essentiel, il y renvoie, tout en souhaitant que le rapport annuel de performances de la mission AGTE mais aussi le projet annuel de performances de la mission comble au plus vite une lacune particulièrement significative : le lourd silence sur les moyens déployés dans le réseau des sous-préfectures.

Celui-ci, qui semble anticiper symboliquement la disparition d'un échelon auquel nos compatriotes, en particulier ceux qui mènent leur existence dans les espaces ruraux, sont attachés, ne saurait être justifié par l'attrition d'une partie importante de ce réseau.

De fait, depuis 2007, le bilan des emplois mobilisés dans les sous-préfectures s'est soldé par une diminution des moyens en personnels de l'ordre de 1 058 unités, soit une contraction de près de 18 % des effectifs au point que le nombre des unités souffrant d'un déficit manifeste de moyens humains se soit considérablement accru en peu de temps (plus de soixante sous-préfectures ont désormais moins de dix ETPT).

MISSION « AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES » ET CAS « DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL » - MM. ALAIN HOUPERT ET YANNICK BOTREL, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. LA MISSION « AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES »

A. UNE EXÉCUTION DES CRÉDITS CHAOTIQUE

En 2016, la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » comportait encore quatre programmes 18 ( * ) .

Le programme 154 (« Économie et développement rural de l'agriculture et des territoires ») regroupe les dépenses consacrées à la « Ferme France », le programme 149 , à sa forêt , tandis que le programme 206 est spécifiquement dédié aux actions destinées à assurer la sécurité et la qualité sanitaires de l'alimentation . Enfin, le programme 215 de « Conduite et de pilotage des politiques de l'agriculture » est un programme transversal de soutien aux actions des services .

Les poids budgétaires de ces programmes sont très inégaux. Structurellement, les moyens de la politique agricole (154) concentrent la majorité des crédits et le programme 215 environ le quart des dotations. Le poids des actions forestières est deux fois moins élevé que celui de la politique de sécurité sanitaire.

Il ne s'agit là que d'ordres de grandeur dans la mesure où le programme 154 connaît régulièrement des besoins supplémentaires en cours de gestion qui viennent perturber une structure d'interventions de plus en plus théorique d'autant que les autres programmes sont fréquemment conduits à subir les ajustements de moyens qu'impose la contrainte budgétaire.

La Cour des comptes a qualifié l'exécution en 2016 des crédits de la mission AAFAR de « chaotique et tendue » ajoutant que la programmation des crédits faisaient ressortir des « économies en trompe l'oeil » .

Ces appréciations sévères, annoncées par les observations critiques réitérées de votre rapporteur spécial Alain Houpert, invitent à aller au-delà et à prolonger et amplifier la réflexion sur la gestion du ministère de l'agriculture. Votre rapporteur spécial Yannick Botrel ne partage que partiellement cette critique et ne s'associe pas à la qualification d'insincérité de l'exécution budgétaire.

Les « difficultés de pilotage » des interventions du ministère stigmatisées par la Cour des comptes doivent être déplorées. L'incapacité de la France à se conformer aux critères d'attribution des aides de la politique agricole commune avec ses conséquences budgétaires est inacceptable. Elle fait peser sur la collectivité une charge considérable et obère lourdement les marges de manoeuvre budgétaire de notre pays.

Au-delà de la gestion administrative des crédits (au stade de la programmation comme à celui de la consommation), il convient de garder à l'esprit que le ministère de l'agriculture, dans sa prise en charge de la mission AAFAR mais aussi dans ses responsabilités d'exécution des crédits européens, porte la responsabilité éminente de contribuer à la santé économique de l'agriculture française et d'assurer la qualité sanitaire de ses productions auprès des consommateurs mais est aussi comptable de l'intégrité des enveloppes budgétaires promises à la France dans le budget européen.

Avec cette dernière responsabilité, compte tenu de l'ampleur des dotations européennes, le ministère engage des enjeux sectoriels mais aussi macroéconomiques de première importance.

1. Alors même que les dépenses de la mission ont été contenues par des déplacements de charges entre exercices budgétaires...

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du rapport annuel de performances pour 2016

a) En 2016, les dépenses de la mission ont reculé par rapport à l'exercice précédent...

Avec un niveau de dépenses de 3,2 milliards d'euros en crédits de paiement et une consommation des autorisations d'engagement de 3,3 milliards d'euros, les dépenses de la mission AAFAR ont connu une baisse importante par rapport à l'année précédente où les crédits de paiement consommés avaient atteint près de 4 milliards d'euros.

Le recul relatif s'élève à 21 % pour les crédits de paiement, soit une économie nominale de 838,6 millions d'euros , qui représente un niveau significatif puisque équivalent à près de 60 % du recul du déficit du budget de l'État entre 2015 et 2016 .

La diminution des dépenses a été variable selon les programmes concernés , le programme 154 en concentrant la majeure partie avec une baisse de 838 millions d'euros (- 33,3 % en crédits de paiement). Compte tenu de l'augmentation des dépenses du programme 206 (+ 44,8 millions d'euros soit + 8,9 %), les autres programmes ont totalisé une diminution de leurs dépenses de l'ordre de 44,8 millions d'euros, le programme support de la mission (le programme 215), dont les crédits sont pour 86,5 % des crédits de personnel, étant celui dont les dotations ont comparativement les moins reculé.

Du point de vue des évolutions des dépenses par nature , les dépenses de fonctionnement et les dépenses d'intervention qui regroupent près de 70 % des dépenses de la mission, contre 28,2 % pour les dépenses de personnel, ont connu les replis les plus importants.

De leur côté, les dépenses de personnel directement payées par les crédits de titre 2, c'est-à-dire hors les contributions versées par le budget pour rémunérer les personnels des opérateurs , ont diminué, mais plus modérément, de 3 %.

Évolution des dépenses de la mission par titre entre 2015 et 2016

2015

2016

Variation 2016/2015 (en %)

Variation 2016/2015 (en valeur)

Dépenses de personnel

919,6

891,7

- 3

- 27,9

Autres dépenses

3 076,40

2 265,80

- 23,3

- 810,6

Dont :

Dépenses de fonctionnement

1 562,20

1 087,80

- 30,4

- 474,4

Dépenses d'investissement

8,6

9,00

4,7

0,4

Dépenses d'intervention

1 466,20

1 065,60

- 27,3

- 400,6

Dépenses d'opérations financières

39,4

103,40

162,00

64

Total

3 996,00

3 157,50

- 21

- 838,5

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du rapport annuel de performances de la mission pour 2016

L'évolution des emplois a fait l'objet d'une gestion adaptée, mais globalement à la baisse.

Le programme 206 a connu une augmentation de sa consommation d'ETPT qui est passée de 4 520 en 2015 à 4 588 en 2016 (+ 1,5 %), principalement sous l'effet des créations d'emplois de surveillance sanitaire des abattoirs de volailles. A l'inverse, l'autre programme de la mission porteur d'emplois, le programme 215, a perdu 654 ETPT, passant de 9 102 à 8 448 unités (soit un repli de 7,1 %) entre 2015 et 2016.

Au total, les ETPT mobilisés par la mission ont diminué passant de 13 622 ETPT à 13 063 ETPT, soit une baisse de 4,3 %.

Cette diminution ne se retrouve pas à due proportion dans les évolutions salariales qui sont légèrement plus dynamiques du fait de divers facteurs : requalification des effectifs ; impact, encore modéré en 2016 du protocole PPCR et de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique. Néanmoins, la masse salariale a enregistré une baisse de 3 %.

b) ...sous l'effet de reports de charges entre exercices

L'évolution des dépenses de la mission AAFAR entre 2015 et 2016 ne peut être considérée sans tenir compte de l'inscription de crédits sur l'exercice 2015 qui a permis d'anticiper des dépenses que l'exercice 2016 aurait dû normalement supporter. Il faut encore tenir compte, inversement, de reports de charges sur l'exercice 2017 que la mission aurait dû acquitter dès 2016.

Dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire des crédits de la mission pour 2016, la Cour des comptes fait état d'une « diminution artificielle de la dépense » .

Cette appréciation est partagée par vos rapporteurs spéciaux moyennant quelques nuances.

S'il est vrai que le paiement anticipé en 2015 d'une partie de la tranche 2016 des refus d'apurement pour 300 millions d'euros (voir infra ) a permis d'alléger d'autant les dépenses en 2016, il n'en a pas moins permis d'acquitter une charge certaine représentant un « paiement par anticipation » dont on peut se féliciter autant qu'on déplore les reports de charges.

La critique des reports de charges de 2016 sur l'exercice postérieur pour de nombreuses dépenses d'intervention n'est, de son côté, pas contestable . Il en est allé ainsi, en particulier, pour la consommation des crédits relatifs à l'indemnité de compensation de handicap naturel (ICHN) pour un montant de 255,3 millions d'euros et plusieurs versements au titre des mesures agro-environnementales et climatiques (55,6 millions d'euros) ou des compensations liées aux exonérations de cotisations sociales.

L'État est débiteur de 74 millions d'euros envers la Caisse centrale de mutualité sociale agricole

Le budget du ministère de l'agriculture doit compenser les moins-values de recettes résultant des dispositifs d'allègements de cotisations sociales propres à la branche agricole. Parmi ceux-ci figurent aujourd'hui pour l'essentiel les allègements au titre des travailleurs occasionnels (le dispositif TO-DE, dont l'exécution conduit régulièrement à un dépassement des dotations initiales). En 2016, s'est ajoutée à ce phénomène la mise en réserve des crédits destinés à compenser à la mutualité sociale agricole les exonérations de cotisations afin de financer des impasses budgétaires sur plusieurs interventions du programme 154. La loi de finances rectificative - voir infra - a permis in extremis de dégager les dotations nécessaires à l'acquittement des compensations qui est intervenu le 1 er janvier 2017 pour 465,4 millions d'euros. Ce paiement n'a pas empêché de devoir constater une dette de l'État envers le régime de protection sociale agricole de 74 millions d'euros au titre du dispositif TO-DE à la clôture du compte général de l'État, qui reflète l'accumulation régulière de charges à payer.

En toute hypothèse, le retraitement de ces décalages temporels, conduit, selon l'ampleur qu'on lui donne, à mettre en évidence une dépense de l'exercice 2016 plus ou moins artificiellement sous-estimée de sorte que le projet de loi de règlement peut être considéré comme donnant une image trompeuse de la réalité budgétaire de la mission.

2. ...elles ont été marquées par un dépassement considérable des crédits ouverts en loi de finances initiale

Votre rapporteur spécial Alain Houpert a rappelé lors de l'audition du Premier président de la Cour des comptes par la commission des finances du Sénat consacrée à l'exécution du budget de l'État en 2016 tenue le mercredi 31 mai 2017 la récurrence de ses observations sur la sincérité des dispositions des lois de finances relatives aux dotations de la mission AAFAR. Il s'est interrogé sur la perspective d'une évolution de la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui, sortant du dilemme du « tout ou rien » auquel il se trouve confronté, pourrait prononcer des inconstitutionnalités partielles au motif de l'insincérité des crédits ouverts dans le cadre de telle ou telle mission budgétaire.

En réponse à son intervention, le Premier président de la Cour des comptes a déclaré :

« La Cour des comptes ne peut qu'observer des éléments d'insincérité, mais c'est le Conseil constitutionnel qui est le juge de la sincérité. Sa jurisprudence est de ne prendre en compte l'insincérité que lorsque les grandes lignes de la loi de finances initiales sont faussées. En l'espèce, les éléments d'insincérité se multiplient, et portent sur plusieurs milliards d'euros... Cela pose un problème ! »

C'est également le sentiment de votre rapporteur spécial Alain Houpert.

Selon lui, il faut certes convenir que la programmation budgétaire doive faire avec des aléas auxquels le recours aux procédures prévues pour ajuster les moyens en cours d'exercice, qui ont cette fonction, permet d'apporter une réponse budgétaire. Néanmoins, outre que ces procédures suscitent assez régulièrement la perplexité - ainsi de l'ouverture en fin d'exercice de crédits dont la consommation sur l'exercice est dès l'origine une vue de l'esprit -, voire la réprobation - ainsi du recours aux décrets d'avances en contravention avec les critères qui en conditionnent la validité -, il est manifeste que des engagements certains ne sont chroniquement pas couverts par des ouvertures de crédits dans le cadre de la mission AAFAR au point que l'autorisation parlementaire se trouve d'emblée régulièrement affectée d'une malfaçon qui vient ébranler les principes de notre droit budgétaire.

Votre rapporteur spécial Yannick Botrel souhaite, de son côté, rappeler les termes son intervention lors de l'audition du même Premier président de la Cour des comptes sur la situation des finances publiques le mercredi 5 juillet 2017 par lesquels il a pu mettre en évidence le poids des aléas tant climatiques que sanitaires sur les ouvertures de crédits au bénéfice de la mission AAFAR, l'ampleur des épizooties (fièvre catarrhale ovine, grippe aviaire) et leur impact budgétaire étant par exemple par nature imprévisible. De plus, il faut prendre en compte les incidences de contentieux passés relatifs aux conditions d'exécution des subventions de la politique agricole commune par la France.

a) Un dépassement considérable des autorisations votées en loi de finances initiale...

Les crédits ouverts en loi de finances initiale (2,72 milliards d'euros) ont été largement dépassés par les dépenses effectives.

Celles-ci avec 3,16 milliards d'euros ont excédé les crédits de la loi de finances initiale de pas moins de 16,2 %.

Ces dépassements avaient été anticipés par le contrôleur budgétaire et comptable du ministère qui avait émis un avis défavorable à la programmation des crédits des programmes 154 et 206 après avoir évalué l'impasse de financement dont elle témoignait à 749 millions d'euros pour le premier programme cité 19 ( * ) .

(1) Les emplois

Du côté des autorisations d'emplois, le constat se dégage d'un ample dépassement du plafond d'emplois en exécution .

En ce qui concerne les emplois de la mission, le plafond en avait été fixé à 4 553 ETPT pour le programme 206 et à 8 053 ETPT pour le programme 215.

Les ETPT finalement mobilisés ont excédé ces deux plafonds de, respectivement, 35 ETPT pour le premier et 395 ETPT pour le second, soit des surplus de 0,7 % et 4,9 %.

Pour le programme 206, l'essentiel des emplois mobilisés en sus des autorisations initiales est attribué aux nécessités de gestion de la crise de l'influenza aviaire (voir ci-dessous) tandis que, pour le programme 215, ce dernier facteur est également mentionné, ce qui illustre la pluralité, regrettable, des choix de rattachement d'emplois pourtant dédiés à la même catégorie d'intervention, en plus des emplois nécessaires à la mise à niveau des pratiques de paiement face au défi qu'offre leur conformité aux règlements européens (voir infra les développements sur les refus d'apurement).

(2) Les dépenses

Les crédits ouverts en loi de finances (2,72 milliards d'euros) ont été largement dépassés par les dépenses effectives qui ont atteint 3,16 milliards d'euros si bien que le taux de consommation des dotations initiales s'est élevé à près de 117 % .

De la loi de finances pour 2016 à l'exécution des crédits

Source : Cour des comptes. Note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016

Le dépassement des ouvertures de crédits initiales a principalement touché le programme 154 mais le programme 206 n'a pas été épargné par la sur-exécution des crédits initiaux, non plus que le programme 215, tandis que, comme c'est souvent le cas, les crédits destinés à la politique en faveur de la forêt ont subi des contraintes fortes.

En toute hypothèse, il est notable qu'en 2016 tous les programmes de la mission, excepté le programme forestier, aient dû faire face à des dépenses plus élevées que prévu.

Comparaison entre les crédits ouverts en loi de finances initiale
et les dépenses effectives

Programme

154

149

206

215

LFI (A)

1 279,61

289,38

485,85

662,36

Dépenses (B)

1 678,74

244,95

551,02

682,71

B- A

399,13

- 44,43

65,17

20,35

Source : commission des finances du Sénat

Dans ce contexte général, les dépassements enregistrés ont été plus ou moins forts.

En ce qui concerne le programme 154 , près de 400 millions d'euros de dépenses en excédent des crédits initialement votés de 1 279,6 millions d'euros ont été réalisées. Au total, le taux de consommation des ouvertures de la loi de finances a atteint 131 % .

Pour le programme 206 , il a dépassé 113 % (avec un excédent de dépenses de 65,2 millions d'euros pour une ouverture de 485,9 millions d'euros en loi de finances initiale).

Quant au programme 215 , ses dépenses ont été supérieures à la prévision de 20,4 millions d'euros (soit un taux de consommation des crédits de la loi de finances de l'année de 103 % ).

Finalement, seul le programme 149 a connu une sous-exécution (84,5 % des dotations) d'une forte ampleur (15,5 % des ouvertures de crédits de la loi de finances initiale).

b) ... qui a nécessité des ajustements massifs en gestion...

Afin de faire face aux impasses budgétaires apparues en cours de gestion, des mouvements de crédits massifs sont intervenus en cours d'année en plus des relèvements des plafonds d'autorisations d'emplois .

Comme le montrent les données exposées dans le tableau ci-dessous, hors fonds de concours et attributions de produits, les ouvertures effectuées en cours d'année ont atteint 716,5 millions d'euros (en crédits de paiement) soit 26,4 % des crédits de la loi de finances de l'année . Pour les autorisations d'engagement , l'importance des mouvements de crédits a été encore plus grande avec 920,7 millions d'euros d'ouvertures supplémentaires (soit plus de 33 % des ouvertures de la loi de finances initiale).

L'essentiel des ouvertures a été réalisé par voie législative , la loi de finances rectificative de fin d'année ayant autorisé plus de 96 % des crédits de paiement supplémentaires ouverts en cours d'année ( + 688,17 millions d'euros en crédits de paiement ).

Parmi les mouvements réglementaires de crédits , on relève, en ce qui concerne les crédits de paiement le bilan négatif des décrets d'avance qui ont prononcé l'annulation nette de 7,3 millions d'euros et ont effacé une partie des reports de crédits de l'exercice précédent (+ 27,7 millions d'euros).

Ces différentes évolutions, détaillées ci-après, suscitent, pour le moins, une certaine perplexité.

Chronique de l'exécution budgétaire de la mission par programme

Les opérations de gestion infra-annuelle des crédits intervenues sur le programme 154 ont dû faire face à un déficit d'ouvertures de plus de 30 % par rapport aux besoins tels que réévalués en cours d'année.

Dans ce cadre, les modalités d'ajustement des crédits ont témoigné de paradoxes difficilement justifiables sinon par des considérations d'opportunisme gestionnaire consistant à équilibrer des décrets d'avances généraux par des annulations de crédits factices.

C'est ainsi que, si le bilan des mouvements réglementaires de crédits a dégagé 16,8 millions d'euros d'économies , la loi de finances rectificative de fin d'année a dû ouvrir 688,24 millions d'euros de crédits supplémentaires pour couvrir les dépenses du programme telles qu'alors envisagées, montant qui représente, en crédits de paiement, plus de la moitié des crédits initiaux.

On relèvera encore que le bilan d'exécution des crédits disponibles fait finalement ressortir une marge très conséquente correspondant à des crédits disponibles mais finalement non consommés (272,3 millions d'euros en crédits de paiement), constat qui conduit à s'interroger sur la pertinence de la programmation budgétaire de fin d'année au regard des capacités réelles d'intervention du ministère des enveloppes dégagées en loi de finances rectificative. Le sort des autorisations d'engagement disponibles renforce cette interrogation puisque plus de 17 % des autorisations n'ont pas été mobilisées.

Rapportée aux ouvertures de la loi de finances rectificative de fin d'année, la non-consommation des crédits représente près de 40 % des crédits de paiement complémentaires votés en fin d'exercice .

Compte tenu de la motivation associée au projet de loi de finances rectificative, qui faisait, à juste titre, valoir, l'urgente nécessité d'apporter aux exploitations agricoles les soutiens nécessaires à leur équilibre économique, cette sous-exécution, qui se traduit par des retards apportés à ces nécessaires soutiens, appelle une ferme critique , au-delà des observations strictement techniques sur la qualité de la programmation budgétaire du programme 154.

En ce qui concerne le programme 206 , l'excès de dépenses sur les crédits initiaux a atteint 13,4 % de ceux-ci dans un contexte où la gestion réglementaire des crédits ressort comme plus cohérente que celle du programme 154, du moins dans le cadre temporel de l'exercice budgétaire.

Le programme 149 a supporté des ajustements réglementaires en cours de gestion et subi de ce fait une économie de dépenses de 15,3 % par rapport aux ouvertures initiales. Les crédits disponibles n'ont pas été exécutés en totalité, un reliquat de près de 10 millions d'euros soit près de 3,6 % des dotations du programme ajustées après les mouvements de gestion demeurant inemployés.

Quant au programme 215 , qui finance principalement la masse salariale du ministère, il a connu une exécution supérieure aux dotations initiales à hauteur de 3,1 %.

c) ...et la levée de la réserve de précaution

La gestion de la réserve de précaution n'a pas manqué d'être fortement affectée par les conditions « acrobatiques » de la dépense publique agricole.

La loi de programmation des finances publiques pour la période 2014 à 2019 a prescrit qu'une réserve de précaution au taux plancher de 6 % des crédits hors crédits de personnel soit appliquée afin de faire face en cours de gestion à des aléas tant en dépenses qu'en recettes.

Cette norme budgétaire, dans l'état de son énoncé, suscite certaines interrogations, dont celle de la portée de l'intervention du législateur, une fois le législateur organique ayant consacré la pratique très ancienne des gels de crédits, dans le champ de la gestion administrative de la dépense publique qu'il autorise.

Le statut juridique de la réserve de précaution étant très peu déterminé, sa mise en oeuvre offre un assez grand nombre de motifs de perplexité.

On peut notamment s'interroger sur le sens de la fixation par la loi d'un taux plancher de réserve régulièrement dépassé dans la pratique suivie par les gestionnaires de la dépense publique, qui, au surplus, peuvent à tout moment « vider » ladite réserve à leur seule initiative.

D'autres interrogations peuvent être illustrées par les opérations intervenues au titre de la réserve de précaution sur les crédits de la mission AAFAR.

Dans les faits, on retiendra que la réserve initiale appliquée aux crédits du programme 154 au taux de 7 % a été portée à 8 % par une opération qualifiée de « surgel » - au total, 102,7 millions d'euros se trouvaient disponibles avant les « opérations de fin de gestion » (décret d'avance de fin d'année et loi de finances rectificative) - et que cette réserve s'est révélée nettement inférieure aux besoins (la loi de finances rectificative a ouvert 668,2 millions de crédits de paiement).

Dans ces conditions, alors même que, d'emblée, la programmation budgétaire faisait ressortir l'existence d'une impasse de financement, on peut se demander quelle justification pouvaient avoir la mise en réserve initiale , et son resserrement en gestion , d'autant qu'ils portaient sur des crédits non susceptibles d'un pilotage discrétionnaire.

Dans un pareil cas, la gestion de la réserve de précaution se révèle pour ce qu'elle est : le symptôme d'une programmation budgétaire initiale défaillante et l'annonce d'une fin de gestion devant faire face aux vices de conception de la loi de finances initiale. Votre rapporteur spécial Yannick Botrel estime qu'un meilleur cadrage juridique et budgétaire de cette réserve de précaution permettrait d'atténuer, voire de supprimer ces critiques récurrentes.

C'est, pour le moins, un résultat paradoxal au vu des intentions de bonne gestion auxquelles répond la pratique de la mise en réserve des crédits.

L'exécution du programme 154 en 2016 illustre ces traits.

En premier lieu, la loi de finances rectificative de fin d'année a dû procéder à des ouvertures massives de crédits pour honorer des engagements inéluctables 20 ( * ) dont les dotations après avoir été gelées avaient été vidées pour financer d'autres interventions du programme sous-dotées en loi de finances initiale.

En second lieu, de façon paradoxale, des reports de charges ont été décidés au terme desquels les crédits finalement disponibles n'ont été consommés qu'en partie, un reliquat de l'ordre de 273 millions d'euros sur le programme 154 n'ayant pas été dépensé au cours de l'exercice.

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Une conjoncture agricole très dégradée en 2016 avec des stabilisateurs automatiques n'offrant que peu de soutien au revenu agricole
a) Une baisse considérable de la valeur ajoutée agricole

Les comptes provisoires de l'agriculture pour 2016, s'ils ne sauraient rendre compte avec exactitude des évolutions finalement constatées une fois les données de l'année plus exhaustivement recensées, illustrent les difficultés particulièrement aigües rencontrées par la branche agricole au cours de l'année 21 ( * ) .

La valeur de la production de la branche agricole hors subventions sur les produits a nettement fléchi en 2016 avec près de 7 % de recul selon le schéma ci-dessous qui décompose ces évolutions entre la variation des volumes et celle des prix.

Évolution de la production et des prix agricoles selon les grands types de production en 2016 par apport à 2015, en volume, en valeur

En valeur, la production animale a rétrogradé de 5,0 %, la production végétale reculant encore davantage, de 8,9 %, sous l'effet de très mauvaises récoltes en grandes cultures et d'un net repli en viticulture.

Le recul de la production agricole en volume a atteint 6,1 %, en raison tout particulièrement des productions végétales.

En effet, en volume, la production végétale a reculé en 2016 de 9,7 % avec un effondrement de la récolte de céréales (- 23,9 %) du fait de conditions météorologiques très défavorables. La récolte d'oléagineux a nettement baissé (9,0 %). La production de vin s'est repliée fortement (- 9,0 %).

Quant à la production animale son recul, toujours en volume, a atteint 1,1 %, la collecte laitière se réduisant comme les volumes de volailles et d'oeufs. À l'inverse, la production de bétail augmente pour les gros bovins et les porcins mais aussi pour les ovins et caprins.

Le graphique ci-après, qui rend compte de la contribution des différentes grandes productions au recul de la production agricole en volume, montre la responsabilité particulièrement forte des évolutions concernant les productions végétales.

Contributions à la variation de la production en volume entre 2015 et 2016

Source : INSEE, comptes prévisionnels de l'agriculture arrêtés en novembre 2016

Quant à elles, les évolutions de prix ont pesé défavorablement sur les revenus tirés de la céréaliculture et de grandes productions animales (gros bovins et lait tout particulièrement).

Le recul des prix des productions animales a particulièrement joué tandis que les prix des productions végétales ont été globalement stables mais avec des différences très marquées selon les différents produits.

Contributions à la variation des prix de production entre 2015 et 2016

Source : INSEE, comptes prévisionnels de l'agriculture arrêtés en novembre 2016

Les consommations intermédiaires de la branche agricole ont légèrement amorti la chute du chiffre d'affaires en diminuant en valeur de 2,3 % en 2016, principalement du fait d'un recul des prix .

On constate ainsi une nouvelle baisse, après celles de 2014 (- 3,3 %) et 2015 (- 1,3 %) qui avaient mis fin à une tendance à l'augmentation des charges. Les achats en aliments pour animaux se sont fortement repliés, de 7,5 %. La facture énergétique s'est réduite (les prix du gazole non routier se replient fortement, de 17,2 %). La baisse des volumes consommés ( -1,4 %) et des prix (- 4,1 %) suscitent une réduction de 5,5 % des dépenses en engrais. Les volumes diminuent surtout pour les engrais simples potassiques (- 14,4 %) et les engrais composés (- 6,2 %). Le prix moyen des engrais simples azotés, les plus utilisés, fléchit nettement (- 8 %). En revanche, les autres types d'engrais se renchérissent, avec une augmentation allant jusqu'à 6,6 % pour les engrais simples phosphatés.

Le repli de la valeur ajoutée de la branche agricole est considérable.

Évolution de la valeur ajoutée entre 2015 et 2016

Source : INSEE, comptes prévisionnels de l'agriculture arrêtés en novembre 2016

La valeur ajoutée brute de la branche agricole qui permet de financer les facteurs de production (le capital et le travail) s'élève en 2016 à 25,4 milliards d'euros et recule fortement, de 14,9 % en volume et de 13,7 % en valeur.

Une fois comptabilisée l'obsolescence des immobilisations, la valeur ajoutée nette de la branche agricole atteint 14,6 milliards d'euros et subit une réduction considérable atteignant près d'un quart en volume (- 23,7 %) et plus d'un cinquième en valeur (- 21 %).

La valeur ajoutée brute de la branche agricole rétrograde au-dessous du niveau qui était la sienne en 2010.

Évolution de la valeur ajoutée brute de la branche agricole depuis 1980

Source : INSEE, comptes prévisionnels de l'agriculture arrêtés en novembre 2016

b) Un faible soutien des interventions publiques

Une partie importante de l'activité agricole est financée par des transferts publics en lien avec des subventions européennes ou nationales. Par ailleurs, il convient de prendre en compte les impacts de la fiscalité agricole aux fortes particularités.

Si, sur ce dernier point, les informations fournies par la documentation budgétaire demeurent trop fragmentaires pour fonder une appréciation tout à fait précise, il apparaît que, globalement, les transferts entre la branche agricole et les administrations publiques, bien que très substantiels, ne revêtent pas la propriété contra-cyclique qu'on pourrait souhaiter.

(1) Des subventions publiques acycliques

La valeur ajoutée une fois corrigée des subventions publiques rétrograderait un peu moins vite que la valeur ajoutée dans la mesure où les subventions versées aux exploitants diminuent plus faiblement 22 ( * ) .

Néanmoins, comme la baisse des dépenses du programme 154 en 2016 le laissait préfigurer, le total des subventions publiques accordées aux agriculteurs diminuerait.

Les subventions aux produits ont déjà été évoquées. À 1,2 milliard d'euros, elles seraient stabilisées par rapport à 2015.

Quant aux subventions d'exploitation, elles représentent désormais la plus grande partie des soutiens publics à l'agriculture, depuis les réformes apportées à la politique agricole commune.

Selon les comptes prévisionnels de l'agriculture, à 8,3 milliards d'euros, elles seraient en baisse de 3,1 %. Cette évolution n'est que le reflet de la programmation de la politique agricole commune qui a inscrit les crédits de la rubrique agricole sur une pente descendante.

Elle illustre l'insuffisante flexibilité de la programmation budgétaire européenne dont la rigidité devrait, idéalement, être corrigée dans la future programmation pluriannuelle des interventions agricoles.

Évolution de la valeur ajoutée au coût des facteurs entre 2015 et 2016

Au total 23 ( * ) , les subventions perçues par les exploitations s'inscriraient en retrait passant de 9,730 milliards d'euros à 9,480 milliards d'euros.

Il faudra attendre les comptes provisoires de l'agriculture pour disposer d'une vue plus précise des subventions versées aux agriculteurs 24 ( * ) . Il est possible que les opérations de fin de gestion viennent nuancer le diagnostic qui ressort de la médiocrité des effets stabilisateurs des subventions publiques accordées aux exploitants . Néanmoins, il est tout à fait improbable qu'il en soit modifié en profondeur.

(2) Des prélèvements obligatoires peu élastiques ?

Il est difficile d'établir un diagnostic précis de la vigueur des stabilisateurs automatiques liés à la fiscalité agricole à partir de la documentation budgétaire. Les comptes de l'agriculture apportent de leur côté quelques informations supplémentaires mais qui demeurent limitées au champ des seules opérations du compte de production et même à ce niveau n'atteignent pas la précision souhaitable 25 ( * ) .

On relève que les impôts à la production devraient subir un repli en ligne avec la baisse de la production mais nettement moins fort que la réduction de la valeur ajoutée. En revanche, aucune information n'est à ce stade disponible sur les évolutions de la fiscalité personnelle des revenus.

Des évolutions importantes sont intervenues sur ce point avec l'adoption du régime « micro-BA » par la loi de finances rectificative de fin d'année 2015. Elles tendent à simplifier et à clarifier le régime de l'imposition des revenus agricoles mais sans comporter d'élément particulier de gradation de la fiscalité personnelle en fonction de l'évolution des revenus. En 2016, une fois prises en compte les évolutions démographiques qui poursuivent une trajectoire de baisse - le repli de l'emploi agricole serait de 0,8 % -, la valeur ajoutée au coût des facteurs par tête, qui mesure la capacité de l'activité agricole à engendrer des revenus pour les actifs de la branche, reculerait de l'ordre de 11 % .

Évolution de la valeur ajoutée par actif agricole

Source : INSEE, comptes prévisionnels de l'agriculture arrêtés en novembre 2016

Il conviendra d'apprécier l'élasticité des charges supportées par les actifs pour honorer leurs dettes d'imposition du revenu.

Dans la mesure où celles-ci, plus que pour d'autres contribuables encore 26 ( * ) , sont dépendantes de revenus passés, il est à craindre que les actifs agricoles doivent supporter des charges fiscales dont le poids relatif dans leur revenu s'accroisse.

L'inscription des revenus de 2016 sous la moyenne mobile à trois ans figurée dans le graphique ci-dessous accrédite cette perspective.

Évolution à long terme de la valeur ajoutée par actif agricole

Source : INSEE, comptes prévisionnels de l'agriculture

Vos rapporteurs spéciaux ont suivi avec la plus grande attention les propositions souvent issues des travaux du Sénat pour moderniser la fiscalité des revenus agricoles. Ils constatent que ce dossier, auquel il conviendra d'apporter des prolongements réalistes, demeure ouvert à l'orée de la nouvelle législature.

Quant aux dépenses fiscales , le rapport annuel de performances de la mission en dresse un bilan 27 ( * ) en faisant valoir la quasi-stagnation pour le programme 154 .

Elles ne progresseraient que de 28 millions d'euros, passant de 2,630 à 2,648 milliards d'euros 28 ( * ) .

On relève qu'à l'inverse des dépenses sur crédits, qui sont en net recul, les dépenses fiscales rattachées au programme 154, qui représentent une masse nettement plus élevée de transferts (1,57 fois les dépenses sur crédits) connaissent une plus forte inertie.

Pour autant, s'il est pertinent de les compter au nombre des concours publics à l'agriculture dans la mesure où les avantages fiscaux auxquels elles correspondent sont réservés aux unités de la branche agricole et engendrent des moins-values de recettes que d'autres contribuables sont appelés à couvrir, leur progression d'une année sur l'autre n'alimente usuellement pas le revenu agricole.

Elle ne témoigne le plus souvent que du renforcement d'un avantage spécifique dans l'allocation de la charge fiscale en lien avec des évolutions d'assiette, n'ayant de contreparties en revenu que lorsque l'avantage fiscal est amélioré. Ce n'est que dans ce dernier cas que la variation des dépenses fiscales traduit une diminution du taux de prélèvement obligatoire effectif sur les agents.

2. Une partie importante des dépenses de la mission n'apporte pas de bénéfice à l'agriculture nationale, ne faisant que compenser des gaspillages de droits détenus sur le budget européen

De façon hélas récurrente, vos rapporteurs spéciaux doivent déplorer le poids budgétaire des refus d'apurement communautaire subis par la France, problème auquel votre commission des finances avait, dès 2008, consacré un rapport de contrôle budgétaire 29 ( * ) .

L'ampleur des enjeux financiers présentés par des « incidents », qui tendent à devenir structurels, ont conduit vos rapporteurs spéciaux à demander que la commission des finances saisisse la Cour des comptes d'une enquête sur les responsabilités des différents maillons de la chaîne de paiement des subventions européennes destinées à la France dans cette situation.

Les résultats de cette enquête devraient être remis à votre commission des finances dans les prochains mois. Ils devraient également permettre de mieux mesurer l'efficacité des dispositifs intermédiaires mis en place pour préserver la trésorerie des exploitations, d'envisager les risques que les corrections financières décidées par la Commission européenne suscitent pour l'économie des exploitations agricoles et d'apprécier la « jurisprudence » des autorités européennes dans une affaire qui engage très fortement les intérêts financiers des États membres.

Le tableau ci-dessous témoigne de l'ampleur de ces enjeux financiers. Le poids des refus d'apurement communautaire s'est considérablement aggravé ces dernières années.

Évolution du montant des refus d'apurement communautaire
entre 2009 et 2015

(en millions d'euros)

Source : Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016

On rappelle que les refus d'apurement viennent sanctionner, selon des conditions variables, la non-conformité des aides aux conditions énoncées dans les règlements de la politique agricole commune.

D'un point de vue calendaire, l'ampleur des corrections financières peut être sensible au rythme des enquêtes conduites par la Commission européenne pour vérifier la conformité des versements. Le mécanisme des paiements peut être sommairement résumé comme suit. Les organismes payeurs font l'avance des dépenses. Celles-ci sont ultérieurement remboursées aux États membres par la Commission, tous les mois dans le cas du FEAGA, tous les trimestres dans celui du FEADER. Les corrections financières auxquelles donnent lieu les enquêtes de la Commission sont imputées sur l'ensemble des dépenses remboursées à l'État qui y est astreint.

Chronique des refus d'apurement communautaire en 2016

Source : MAAF cité dans Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016

En cas de refus d'apurement, les crédits budgétaires nationaux doivent prendre le relais et se substituer aux paiements effectués par le budget européen.

Le tableau ci-dessous situe l'impact en 2016 des refus d'apurement sur la gestion des crédits du programme 154. Les dépenses correspondantes ont excédé 21 % des dépenses du programme au cours de l'année.

Ces dépenses nationales ne peuvent être considérées comme bénéficiant à l'agriculture française dans la mesure où elles se substituent à des subventions européennes dont celle-ci se trouve privée et que les crédits nationaux ne font que compenser. Au mieux 30 ( * ) , leur bilan est neutre pour les agriculteurs.

En revanche, elles grèvent très lourdement les finances publiques de la Nation. En réduisant le « taux de retour » de la France sur le budget européen, elles alourdissent les charges du budget national dans des proportions considérables.

À l'heure où la réduction du déficit public est la ligne d'horizon de la gestion de la sphère publique une charge supplémentaire de 357 millions d'euros correspondant à une dépense manifestement inutile constitue une faute grave de gestion.

Vos rapporteurs spéciaux ont attiré l'attention sur la perspective de nouvelles charges de cette nature avec un risque pendant de l'ordre de 700 millions d'euros.

Ils expriment la ferme recommandation que, de telles dérives se trouvant conjurées pour l'avenir, la France puisse trouver dans une meilleure gestion des aides européennes par le ministère de l'agriculture une source structurelle d'économies.

3. La sécurité sanitaire de l'alimentation, une politique publique à consolider

Le programme 206 de la mission AAFAR est consacré à la sécurité et à la qualité sanitaire de l'alimentation.

Vos rapporteurs spéciaux ont consacré à la politique publique destinées à garantir la sécurité sanitaire des aliments un rapport de contrôle et d'évaluation 31 ( * ) qui a pu souligner les besoins de consolidation d'une politique publique évidemment essentielle.

Y avait aussi été mise en exergue l'illisibilité budgétaire de cette politique et certaines ambiguïtés de l'information budgétaire apportée par le programme 206 de la mission.

Pour l'essentiel, vos rapporteurs spéciaux renvoient aux soixante-et-une recommandations exposées dans leur rapport auxquelles la considération de l'exécution des crédits en 2016 apporte une justification supplémentaire.

Données relatives à l'exécution du programme 206
« Sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation » en 2016

Exécution 2015

Crédits votés en LFI 2016

Crédits consommés en 2016

Crédits consommés 2016/2015
(en %)

Crédits consommés/crédits votés en LFI en 2016 (en %)

Prévention et gestion des risques inhérents à la production végétale

19,1

21,2

21,9

+ 14,7

3,3

Lutte contre les maladies animales

105,4

88,9

131,1

+ 24,4

47,5

Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires

17,9

15,2

17,5

- 2,2

15,1

Actions transversales

66

71,4

69,8

+ 5,8

- 2,2

Élimination des cadavres et des sous-produits animaux

1,6

4,2

4,4

x 2,75

4,8

Mise en oeuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l'alimentation

292,1

286,4

302,3

+ 3,5

5,6

Qualité de l'alimentation et offre alimentaire

4,1

4

4,1

+ 1

2,5

Total

506,2

491,3

551,1

+ 8,9

12,2

Note : les crédits votés en 2016 comprennent les fonds de concours et les attributions de produits prévus en loi de finances initiale.

Source : commission des finances du Sénat à partir des données du rapport annuel de performances de la mission pour 2016

a) Une programmation budgétaire globalement déconcertante prise à revers par des crises sanitaires prévisibles

Les crédits ouverts en loi de finances initiale dans le cadre du programme 206 avaient été fixés à un niveau inférieur de 3 % à celui de l'exécution de 2015, la programmation budgétaire témoignant ainsi d'un volontarisme déconcertant au vu des défis sanitaires de toutes sortes dont l'intensification ne pouvait manquer d'être anticipée par les autorités sanitaires.

C'est d'ailleurs sur ce dernier motif que la programmation budgétaire avait reçu un avis défavorable du contrôleur budgétaire et comptable ministériel qui avait estimé l'impasse budgétaire à 91,4 millions d'euros.

Au demeurant, la nécessité de procéder à des ajustements de crédits est vite apparue en cours d'année. Les mouvements réglementaires de crédits concentrés sur le premier semestre ont élevé les dotations disponibles de 67,1 millions d'euros, dont 52,7 millions d'euros d'ouvertures de crédits nettes par décrets d'avances si bien qu'en lieu et place d'une baisse des autorisations budgétaires de 3 % celles-ci ont connu une augmentation de 10,9 %.

Le taux de consommation des crédits de paiement a atteint 98,2 % marquant une progression des dépenses de 8,9 % par rapport à l'année précédente.

b) Une priorité accordée à des interventions très en amont de la chaîne alimentaire aux dépens des analyses aux stades plus proches de la consommation, qui suscite des inquiétudes quant au suivi des risques sanitaires de l'alimentation

L'augmentation ainsi décrite ne doit pas occulter les arbitrages très significatifs réalisés dans l'allocation des moyens au cours de l'exercice sous revue.

On relève, en particulier, la réduction des dépenses, considérées parfois comme finançant les opérations de contrôle et de surveillance les plus au coeur de la politique de sécurité sanitaire de l'alimentation elle-même , qui sont les seules à s'inscrire en repli par rapport à l'année précédente (- 2,2 %).

Ces dépenses regroupées dans l'action 3 du programme ne sont pas dénuées d'une certaine hétérogénéité. Elles financent les interventions réalisées pour analyser les risques sanitaires en abattoirs et dans le cadre des plans de surveillance et de contrôle prescrits par la réglementation européenne dont l'objet est double : contribuer à l'analyse générale de risques et résorber les situations ponctuelles de risques. Mais, elles concourent aussi à l'indemnisation des éleveurs frappés par certains risques sanitaires. Si cette dernière catégorie de dépenses a connu une augmentation, le gestionnaire du programme, le directeur général de l'alimentation, admet avoir été confronté à la nécessité de conduire moins d'inspections que prévu en 2016 du fait du « contexte de crise sanitaire ». Cette sous-réalisation du programme d'inspection trouve sa traduction dans la réduction des dépenses, en particulier des dépenses d'analyses qui sont pourtant un élément majeur de la politique de prévention des risques sanitaires de l'alimentation.

Ces arbitrages entre des interventions parfois très éloignées les unes des autres dans leur finalité témoignent des facilités regrettables offertes par une nomenclature budgétaire à la granularité trop large (voir infra ).

Par ailleurs, d'un point de vue très opérationnel la baisse des volumes d'analyses et de contrôle à laquelle ils conduisent, dont la compatibilité avec nos obligations européennes mériterait une évaluation systématique, ne laisse d'inquiéter au vu des impératifs de la veille sanitaire et de l'analyse de risques 32 ( * ) .

Vos rapporteurs spéciaux souhaitent qu'un audit soit réalisé afin de vérifier la compatibilité entre les activités effectives de surveillance des risques sanitaires et les standards de l'analyse de risque et de la veille sanitaire.

c) Les moyens de la politique de sécurité sanitaire de l'alimentation sont illisibles et la nomenclature budgétaire ne respecte pas la loi organique relative aux lois de finances

La nomenclature budgétaire n'assure en rien la lisibilité de la politique publique de sécurité sanitaire de l'alimentation, ce diagnostic pouvant s'appuyer sur la dissémination des données budgétaires tant au sein du programme 206 que dans la documentation budgétaire générale. En cela, elle manque au respect de la loi organique relative aux lois de finances.

Dans ces conditions, il est impossible d'appréhender la dynamique de la dépense du programme destinée spécifiquement à assurer la protection des consommateurs contre les risques sanitaires de l'alimentation, et, plus généralement, de l'effort public consacré à la sécurité sanitaire des aliments.

Vos rapporteurs spéciaux ont pu mettre en évidence les problèmes posés par la définition du périmètre de cette politique publique.

Schématiquement, on rappellera que le programme 206 comprend des interventions visant à assurer l'intégrité sanitaire des matières premières animales et végétales, interventions dont le poids dans les dépenses du programme est très largement majoritaire, mais aussi d'autres interventions plus proches du risque sanitaire lié à la consommation des aliments. Si les premières interventions ont une vocation marquée de préservation de l'intégrité des cheptels et des végétaux, elles ne sont cependant pas étrangères à la problématique générale de sécurité sanitaire de l'alimentation. Dans une conception où celle-ci va « du champ à l'assiette », la nomenclature budgétaire ne retient pas sans raison les différentes actions du programme 206 comme concourant à la sécurité et à la qualité sanitaires de l'alimentation. Pour autant, les crédits ouverts n'en financent pas moins des interventions hétéroclites dont certaines n'ont qu'un lien très ténu avec les objectifs affichés par l'intitulé du programme.

Ce constat conduit à juger que le programme 206 n'est pas conforme à la loi organique relative aux lois de finances qui a entendu préserver le principe de spécialité des crédits tout en en enrichissant la conception par une prise en compte plus systématique de leur destination fonctionnelle de moyens au service d'une politique publique donnée .

Dans ces conditions et au-delà même du contenu de la mission budgétaire, vos rapporteurs spéciaux ne peuvent qu'exprimer leur refus de décerner un certificat de qualité à la présentation budgétaire des interventions nécessitées par la politique de sécurité sanitaire des aliments, qui est sérieusement défectueuse.

Sur ce point, une série d'observations complémentaires s'imposent.

En premier lieu, doit être évoquée l'extrême fragmentation des moyens déployés, éparpillés dans plusieurs missions budgétaires . Celle-ci reflète l'interministérialité des interventions de l'État, qui témoigne d'une superposition des services opérationnels qui est loin d'être optimale. Du point de vue de l'information budgétaire, il serait, à tout le moins, justifié d'entreprendre l'élaboration d'un document de politique transversale unifiant les crédits de la politique publique de sécurité sanitaire des aliments.

Vos rapporteurs spéciaux relèvent, en outre, que les crédits de personnel du programme se trouvant agglomérés dans une action dédiée, il est impossible de disposer d'une vue satisfaisante de l'affectation des personnels (et des crédits correspondants) aux différentes catégories d'intervention financées par le programme.

En témoignent les données fournies à vos rapporteurs spéciaux pour rendre compte des personnels spécifiquement dédiés à la surveillance de la qualité sanitaire des aliments qui n'apparaissent pas comme tels dans la nomenclature budgétaire.

Ainsi, selon ces données, les effectifs affectés par la DGAL à la sécurité sanitaire des aliments stricto sensu, dans le cadre de l'action 3 du programme 206, se seraient élevés en 2015, à 1 844 ETPT (soit environ 2 820 agents) sur les 4 511 ETPT du programme 206, soit 40,9 % des ETPT du programme.

Il apparaît ainsi nécessaire de mieux imputer les emplois et les crédits de rémunération aux différentes interventions opérationnelles du programme , en particulier à celles concourant spécifiquement à la sécurité sanitaire de l'alimentation.

II. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La mission « Développement agricole et rural » correspond au compte d'affectation spéciale éponyme, dit « CAS-DAR » qui a été créé par la loi de finances pour 2006.

Elle a pour objet le financement d'opérations de développement agricole et rural orientées par les priorités du programme national de développement agricole et rural (PNDAR). Celui-ci, qui couvre actuellement les années 2014 à 2020, a pour priorité de « conforter le développement et la diffusion de systèmes de production innovants et performants à la fois du point de vue économique, environnemental et sanitaire » en s'inscrivant dans le cadre de « Projet agro-écologique pour la France » .

1. Le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural », deux programmes aux destinataires propres

La mission repose sur deux programmes : le programme 775 « Développement et transfert en agriculture » et le programme 776 « Recherche appliquée et innovation en agriculture ».

Les crédits du programme 775 (voir infra ) sont principalement destinés aux chambres d'agriculture et aux organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR). Il s'agit de diffuser des bonnes pratiques et des connaissances .

Quant au programme 776 , davantage orienté vers la recherche appliquée 33 ( * ) , il finance des recherches réalisées par une pluralité d'acteurs, au premier rang desquels les instituts techniques agricoles et FranceAgriMer. Par ailleurs, le pilotage de la recherche passe aussi pour une proportion de 18 % par la procédure d'appel à projets.

Le schéma ci-dessous illustre l'emploi des ressources du CAS en 2015. Compte tenu de l'inertie de la gestion des interventions financées par le compte, il donne un aperçu fiable des dépenses de 2016.

On y observe que chaque programme est dirigé vers des partenaires propres et prépondérants : les chambres d'agriculture pour le programme 775 (près des deux tiers des dépenses) et les instituts techniques agricoles pour le programme 776 (55,4 % des crédits).

Dans les deux cas, FranceAgrimer se voit déléguer une partie des disponibilités de chaque programme.

Source : rapport d'activité du CASDAR pour 2015 ; ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la forêt et des affaires rurales

2. Les ressources du compte, des déconvenues par rapport aux prévisions de recettes mais une charge non négligeable pour les exploitants

Le CAS-DAR, alimenté jusqu'en 2015 par une fraction (85 %) du produit de la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles, prévue à l'article 302 bis MB du code général des impôts en perçoit depuis la totalité.

De ce fait, en 2015, le CAS-DAR avait bénéficié de recettes en exécution (137,1 millions d'euros) supérieures à l'exécution 2014 (+ 20 millions d'euros).

Pour 2016, la prévision de recettes avait été établie à 147,5 millions d'euros. Finalement les recettes enregistrées au compte ont atteint le niveau de 130,8 millions d'euros, soit une moins-value de produits de 16,7 millions d'euros (- 11,4 %).

Par ailleurs, le CAS a pu bénéficier de reports de crédits de l'exercice 2015, pour 48,9 millions d'euros, soit près de 31 % des crédits ouverts en loi de finances initiale.

Exécution et prévision des recettes du CAS-DAR

(en millions d'euros)

Année

Recettes LFI

Recettes constatées

Exécution (CP)

Reports N-1

2006

134,46

145,96

99,70

-

2007

98,00

102,05

101,34

21,71

2008

102,50

106,30

98,47

22,41

2009

113,50

110,56

112,34

34,44

2010

114,50

104,89

111,21

41,44

2011

110,50

110,44

108,38

40,30

2012

110,50

116,76

114,35

42,37

2013

110,50

120,58

106,98

57,92

2014

125,50

117,10

132,40

43,20

2015

147,50

137,10

131,30

43,20

2016

147,5

130,8

129,2

48,9

Source : commission des finances du Sénat

Les moins-values de recettes en exécution sont expliquées par la dégradation du chiffre d'affaires des exploitants agricoles entre 2014 et 2015.

On rappelle que le paiement de la taxe intervient avec un an de décalage.

L'an dernier, vos rapporteurs spéciaux avaient alerté sur la perspective de « variations peu favorables à la bonne exécution du compte », compte tenu des « évolutions économiques très défavorables de 2015 » qui ne devaient pas manquer de se répercuter sur les recettes encaissées.

La programmation des recettes n'a pas tenu compte des observations de vos rapporteurs spéciaux qui, pourtant, se sont avérées en pratique.

Par ailleurs, l'interrogation sur les conditions de financement du CAS, la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles pouvant se révéler lourdement procyclique en raison de la volatilité des conditions économiques de l'activité agricole persiste.

Il en va de même pour les effets redistributifs des transferts abrités par le CAS qui ne sont pas clairement cernés, non plus d'ailleurs que ne le sont les conditions concrètes des recouvrements de la taxe.

3. Un taux de consommation des crédits peu satisfaisant

Dans ce contexte, la gestion des crédits de paiement peut être résumée comme suit pour 2016.

Dépense et gestion des crédits du CAS-DAR

Programme 775

Programme 776

Total

LFI

70,5

76,9

147,4

LFR

0

Reports

10,7

38,2

48,9

Crédits disponibles

81,2

115,1

196,3

Crédits consommés

62,4

66,8

129,2

Crédits non consommés

18,8

48,3

67,1

Source : ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Malgré la déconvenue sur l'évolution réelle des recettes, le compte confirme en 2016 le phénomène observé à plusieurs reprises par le passé de soldes positifs en exécution moyennant, cette année, une forte réduction du résultat.

L'an dernier l'excédent de recettes avait atteint 5,8 millions d'euros quand en 2016 il n'est plus que de 1,6 million d'euros.

Cette contraction intervient dans un contexte marqué pourtant une nouvelle fois par une faible exécution des crédits disponibles.

Hors crédits reportés, le taux de consommation des crédits n'a été que de 87,6 %. Une fois pris en compte les reports, le taux de consommation des crédits disponibles baisse considérablement. Il avoisine 65 %.

L'écart est particulièrement considérable pour le programme 776 pour lequel le taux de consommation des crédits se situe sous la barre des 60 %.

Il est vrai que la gestion des projets soutenus par le CAS implique, tout particulièrement pour ce programme, un dépassement de l'annualité budgétaire. Ils sont conduits sur une durée souvent supérieure à l'année et mobilisent une séquence de versements qui l'excèdent. Dans ce contexte, des reports et des restes à payer interviennent à chaque fin d'exercice.

C'est ainsi qu'à l'issue de l'exercice 2016, 30,8 millions d'euros d'engagements antérieurs à 2015 restaient à liquider. Combinés aux engagements de l'année 2016 non couverts par les paiements effectués en cours d'exercice les restes à liquider sur ce programme s'élevaient en fin d'année à 46,4 millions d'euros soit près de 66 % des dépenses effectuées.

4. Améliorer les informations sur les performances atteintes et recourir davantage aux appels à projets pour contrer la logique d'abonnement aux aides

La justification au premier euro des deux programmes du CASDAR présente, une fois de plus, un caractère lacunaire .

Pour le programme 775 , le rapport annuel de performances ne fournit pas d'information suffisamment détaillée sur l'utilisation des crédits destinés au réseau des chambres d'agriculture , à la fédération des coopératives agricoles et aux ONVAR .

L'indicateur utilisé consiste à suivre les effectifs desdits organismes consacrés par eux à atteindre les grands objectifs du programme national de développement agricole et rural. On se doute bien que là est leur pente naturelle et qu'il n'est pas très difficile de fournir au logiciel censé accueillir les déclarations des organismes les données permettant d'extérioriser des résultats probants.

Il résulte de ce manque d'information une impossibilité de savoir si les crédits du programme servent aux projets de développement plus qu'aux structures qui sont censées les porter .

Le ministère de l'agriculture indique procéder à des évaluations des actions financées par le truchement du compte mais, outre que cette évaluation paraît orientée plutôt vers un contrôle de conformité que vers une évaluation des impacts seule à même de fonder une appréciation de la valeur ajoutée des financements publics, le programme ne comporte aucun indicateur permettant d'en rendre compte .

Cette lacune doit être corrigée , objectif fixé par vos rapporteurs spéciaux d'autant plus aisément atteignable que le ministère de l'agriculture publie un compte rendu d'activité du CASDAR riche en informations sur les programmes soutenus mais qu'il conviendrait de compléter par l'adoption d'une démarche évaluative.

Vos rapporteurs spéciaux relèvent avec satisfaction l'orientation consistant à développer des « projets pilotes régionaux » faisant intervenir les partenaires de terrain et pouvant favoriser, de ce fait, un effet de levier susceptible de démultiplier les moyens consacrés à chaque projet. Cette évolution correspond par ailleurs à l'esprit même des interventions financées par le programme qui porte notamment sur la diffusion de bonnes pratiques à partir de pilotes.

Il restera à vérifier que l'émergence d'une matrice régionale débouchera effectivement sur un renforcement des ressources et qu'elle aboutira à la préservation des équilibres locaux d'intervention du CASDAR .

Quant au développement des conventions avec les ONVAR 34 ( * ) , présenté par le ministère de l'agriculture comme correspondant à l'émergence d'un « CASDAR-ONVAR », si l'on peut y voir une diversification bienvenue des partenariats mobilisés par le dispositif, il est regrettable que la communication du ministère aille jusqu'à suggérer qu'une sorte de droit de tirage automatique puisse lui être associé .

Enfin, vos rapporteurs spéciaux s'interrogent sur la portée des objectifs économiques affichés comme l'une des composantes du cadre d'intervention du CAS. Cet objectif est certainement stratégique d'autant qu'il s'agit de l'inscrire dans un processus de conciliation entre les contraintes économiques et écologiques. C'est la raison pour laquelle il convient de le prendre au sérieux, ce qui suppose mieux que de financer des interventions ponctuelles.

L'élaboration d'un véritable projet national d'optimisation agro-économique des exploitations agricoles doté des moyens et d'une gouvernance adaptée s'impose. Il faut aujourd'hui dissiper l'éclatement des actions entreprises en ce domaine dont témoigne l'agencement des ressources du ministère de l'agriculture avec une dispersion budgétaire trop forte des moyens et de leur gestion (voir, à ce propos, la superposition des crédits dans les différents programmes de la mission AAFAR et dans le CASDAR).

S'agissant du programme 776 , l'information est, là aussi, insuffisante.

Le RAP décrit insuffisamment les projets sélectionnés dans le cadre des procédures d'appel à projets et les actions d'accompagnement thématiques innovantes .

Pour le programme 776 , l'indicateur unique 35 ( * ) se décline en deux sous-indicateurs de moyen : le premier repose sur la « part des financements portant principalement sur des problématiques de développement durable pour la compétitivité de l'agriculture » et le second sur la « part de financements impliquant une unité mixte technologique (UMT) ou un réseau mixte thématique (RMT) » rapportés à l'ensemble des financements du programme.

Au regard des cibles, les résultats visés sont mieux qu'atteints en 2016 .

Néanmoins, la significativité du premier sous-indicateur n'est guère satisfaisante. Il n'est pas difficile de « verdir » des projets de recherche appliquée quand les objectifs du PNDAR sont énoncés en des termes tellement généraux que leur référentiel comporte une élasticité si forte qu'il est sans lisibilité autre que conjecturale.

Vos rapporteurs spéciaux attendent davantage de précisions dans l'énoncé et le suivi des objectifs poursuivis.

À l'heure où la thématique de l'agro-écologie oriente fortement les choix publics dans le domaine de l'agriculture, il est nécessaire de renforcer la programmation de la recherche, ce qui passe par une information plus satisfaisante du Parlement 36 ( * ) .

Dans le cadre du programme 776, la préconisation d'accroître la part des dépenses résultant de procédures d'appels à projets, déjà formulée par vos rapporteurs spéciaux et qui fait écho à celle de la Cour des comptes, est progressivement mise en oeuvre année après année. Les appels à projets ont mobilisé près de 20 % des crédits finalement disponibles. Ils permettent de mobiliser des partenaires diversifiés, en particulier les établissements universitaires ou de l'enseignement technique agricole, mais sans exclusive. Les entités institutionnelles du développement agricole n'en sont pas exclues comme en témoigne la part importante des appels à projets sollicitant FranceAgrimer (plus de la moitié de l'enveloppe de 2016).

Enfin, compte tenu de l'accompagnement par un riche dispositif de sélection et, dit-on, d'évaluation desdits projets, qui contraste avec une gouvernance nettement plus routinière des subventions accordées aux organismes soutenus par le CASDAR, ce n'est pas trop demander que le ministère de l'agriculture s'attache à restituer les résultats des recherches appliquées financées par les exploitations agricoles, qui, de leur côté, ont droit à cette information.

MISSION « AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT » ET COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS » - MME FABIENNE KELLER ET M. YVON COLLIN, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. MISSION « AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT »

La mission « Aide publique au développement » regroupe les crédits des principaux programmes concourant à la politique française d'aide publique au développement :

- le programme 110 « Aide économique et financière au développement », mis en oeuvre par le ministère de l'économie et des finances ;

- le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement », mis en oeuvre par le ministère des affaires étrangères et du développement international.

Ces crédits ne représentent cependant qu'un quart environ de l'aide publique au développement française , au sens du Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE.

De façon exceptionnelle, la mission comporte en 2016 un troisième programme. Créé par le collectif de fin d'année, il porte les dépenses liées au renforcement des fonds propres de l'Agence française de développement (cf. infra ).

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

Les mouvements de crédits intervenus au cours de la gestion 2016, retracés dans le tableau ci-dessous, ont été relativement contenus, si l'on excepte la création du programme 346 en fin d'année . Le principal mouvement (95 millions d'euros) tient à des reports entrants. Ce chiffre tranche avec les années antérieures à 2015, où l'on constatait des mouvements de crédits de plusieurs centaines de millions d'euros, notamment du fait d'annulations importantes.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Programme

LFI 2016

Reports
entrants

Décrets
d'avance

Virement
ou
transfert

LFR de fin de gestion

Fonds de concours et attributions de produits

Crédits disponi-bles

Exécution 2016

Écart
consommé/
prévu

Prog. 110

938,0

79,5

- 33,3

0,0

984,2

891,0

- 47,0

Prog. 209

1 572,4

15,3

7,9

0,4

7,7

1 603,6

1 555,0

- 17,4

Prog. 346

2 408,0

2 408,0

2 408,0

2 408,0

Mission

2 510,4

94,8

- 25,4

0,4

2 408,0

7,7

4 995,8

4 854,0

2 343,6

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Si l'on exclut le programme 346, le taux d'exécution de la mission en AE, en 2016, s'élève à 95 % : un niveau correct , supérieur à celui des années antérieures à 2015 où il oscillait autour de 90 %, mais inférieur au taux de 99 % de l'an dernier . Le taux d'exécution des CP - plus de 97 % - est le plus élevé depuis 2011.

Taux d'exécution (CP) des crédits de la mission « Aide publique au développement »

Source : commission des finances du Sénat

S'agissant du programme 110 , le taux d'exécution des CP est correct (95 %) tandis que l'on observe une sous-exécution importante en AE (78 %), qui s'explique par le remplacement de crédits budgétaires par des crédits issus des taxes affectées (cf. infra ). Le décalage entre l'exécution 2016 et l'exécution 2015, en AE, s'explique pour sa part par le rythme de reconstitution des fonds multilatéraux, très variables d'une année à l'autre.

Concernant le programme 209, le taux d'exécution en AE comme en CP est très bon et se situe à 99 %.

Exécution des crédits de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros et en %)

Programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 /

exécution 2015

Exécution 2016 /

LFI 2016

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 110

789,5

989,0

389,2

938,0

303,8

891,0

38,5 %

90,1 %

78,1 %

95,0 %

Programme 209

1 663,0

1 666,2

1 597,1

1 572,4

1 581,3

1 555,0

95,1 %

93,3 %

99,0 %

98,9 %

Prog. 110 + prog. 209

2 452,4

2 655,2

1 986,2

2 510,4

1 885,0

2 446,0

76,9%

92,1%

94,9%

97,4%

Programme 346

-

-

-

-

2 408,0

2 408,0

-

-

-

-

Total mission

2 452,4

2 655,2

1 986,2

2 510,4

4 293,0

4 854,0

175,1 %

182,8 %

216,1 %

193,4 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Les crédits alloués par le Parlement à l'AFD ont été reversés au FSD

Lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2016, le Parlement avait souhaité augmenter les ressources de l'Agence française de développement (AFD) en versant directement à son budget 270 millions d'euros provenant du produit de la taxe sur les transactions financières (TTF), avec l'objectif d'accroître l'aide bilatérale de la France, notamment en termes de dons.

Cependant, l'AFD a dû reverser ce montant au Fonds de solidarité pour le développement (FSD) , qui finançait exclusivement des dispositifs d'aide multilatéraux. En toute fin d'année 2016, les conditions d'utilisation des crédits du FSD ont été modifiées afin qu'ils puissent également financer des dispositifs bilatéraux 37 ( * ) . Au total, sur les 270 millions d'euros fléchés par les parlementaires sur l'aide bilatérale, seule une centaine de millions d'euros auront été affectés à cet objectif 38 ( * ) . Le souhait du Parlement n'a donc pas été respecté.

2. Des interactions illisibles avec le FSD qui nécessiteraient une clarification

Les crédits de l'action « Bonifications de prêts dans les États étrangers » du programme 110 s'élevaient à 285 millions d'euros en AE dans le projet de loi de finances pour 2016 . Ces AE correspondent aux nouveaux prêts accordés par l'AFD, qui nécessiteront de recourir à la bonification dans les années suivantes, tandis que les CP de cette action correspondent aux bonifications des prêts des années précédentes. Au cours du débat parlementaire, nos collègues députés ont souhaité transférer 50 millions d'euros (AE=CP) de ces crédits vers le programme 209 (les subventions de l'AFD). Dès lors, le montant des AE en loi de finances initiale sur l'action précitée s'élevait à 235 millions d'euros .

L'intégralité de ces 235 millions d'euros budgétés en loi de finances initiale - et même plus, cf. infra - a été engagée. Les crédits exécutés présentés dans le rapport annuel de performance s'élèvent pourtant à 197 millions d'euros, ce qui s'explique par le fait que l'exécution du programme 110 a donné lieu à plusieurs opérations « atypiques » qui la rendent difficilement lisible.

La première opération « atypique » concerne le financement de l'Iffim ( International Finance Facility for Immunisation ). La France devait verser une tranche de 38 millions d'euros de CP à partir du Fonds de solidarité pour le développement (FSD) 39 ( * ) . Le fonds n'a pas pu effectuer ce versement (prévu en mars) car le décret régissant son utilisation n'a été modifié qu'en décembre. Dès lors, c'est le programme 110 qui a exceptionnellement porté ces 38 millions d'euros de CP. En « contrepartie », le FSD a financé 38 millions d'euros de CP de bonifications qui auraient dû être financées par le programme 110. Dès lors, des AE engagées à partir du programme 110 au cours des années antérieures n'étaient plus utiles et ont été apurées. Ces apurements correspondent à des « AE négatives », qui s'imputent comptablement sur l'exécution en cours et diminuent donc le montant apparent d'AE engagées sur l'exercice.

Au total, les CP du programme 110 ne sont pas modifiés (+38 millions d'euros pour l'Iffim et -38 millions d'euros sur les bonifications), tandis que les AE antérieures apurées sur les bonifications minorent « artificiellement » l'exécution 2016 en AE de 38 millions d'euros. C'est ainsi que l'on obtient le chiffre de l'exécution présenté dans le rapport annuel de performance pour l'action relative aux « bonifications de prêts dans les États étrangers » (235 millions d'euros de la LFI - 38 millions d'euros d'apurement = 197 millions d'euros).

Par ailleurs, comme indiqué précédemment, l'amendement adopté par nos collègues députés a eu pour conséquence qu'il manque 50 millions d'euros de CP de bonifications correspondant à des prêts accordés par l'AFD au cours des années précédentes. Pour respecter les engagements passés, les gestionnaires ont choisi de financer cette charge à partir du FSD. Celui-ci a ainsi versé 50 millions d'euros de CP à l'AFD (qui s'ajoutent aux 38 millions d'euros précédents, soit un total de 88 millions d'euros). Dès lors, les AE correspondantes engagées au cours des années antérieures n'étaient plus utiles et ont été apurées. À nouveau, ces apurements s'apparentent à des « AE négatives », qui s'imputent comptablement sur l'exécution en cours. Au total, l'exécution aurait donc été égale à 147 millions d'euros (235 - 38 - 50 = 147).

Cependant, l'amendement évoqué précédemment a également eu pour conséquence qu'il manque 50 millions d'euros en AE à l'AFD pour accorder de nouveaux prêts. Les marges de manoeuvre « artificielles » données par les apurements ont permis de « sur-exécuter » la mission de 50 millions d'euros , sans pour autant dépasser « comptablement » le plafond d'AE alloué en loi de finances initiale. C'est ainsi que l'on obtient le chiffre définitif d'exécution de l'action relative aux bonifications (235 - 38 - 50 + 50 = 197 millions d'euros) et que l'on retrouve l'exécution « corrigée des apurements », telle qu'elle est également présentée dans le rapport annuel de performance (235 + 50 = 285 millions d'euros).

En tout état de cause, la pratique des apurements a permis de respecter artificiellement l'autorisation parlementaire - et même de sous-exécuter cette action -, alors que l'exécution « corrigée » montre une sur-exécution. Ceci a été rendu possible en puisant dans le FSD, qui n'était pourtant pas destiné à financer de l'aide bilatérale .

Cette exécution illisible rend nécessaire une rebudgétisation au moins partielle du FSD. A minima , les montants versés à l'AFD à partir des ressources de la taxe sur les transactions financières doivent être rebudgétisés au sein des programmes 110 (bonifications des prêts) et 209 (subventions pour l'essentiel).

3. Une dépense exceptionnelle de 2,4 milliards d'euros, neutre budgétairement, destinée à renforcer les fonds propres de l'AFD

Comme vos rapporteurs spéciaux l'ont évoqué à de nombreuses reprises, le renforcement des fonds propres de l'AFD était nécessaire pour lui permettre de surmonter les limites à son activité qu'implique dès aujourd'hui le respect des ratios prudentiels, mais aussi pour faire face à l'augmentation de 50 % de ses engagements à l'horizon 2020 . À défaut, ce plafond aurait été dépassé dès 2019 au Nigeria, au Brésil, au Maroc et en Colombie, et l'objectif de hausse de ses engagements aurait difficilement été atteint.

Pour cela, il avait été décidé en 2014 de convertir des prêts de long terme accordés par l'État à l'AFD - la « ressource à condition spéciale » (RCS) - en obligations perpétuelles, comptabilisées en fonds propres de « meilleure qualité ». C'est ainsi qu'en 2015, 2016 et 2017, au lieu de verser chacune de ces années 280 millions d'euros de RCS à l'AFD, l'État a acquis un montant égal d'obligations perpétuelles à partir du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».

Par ailleurs, au-delà de ces opérations sur le « flux » de RCS, c'est-à-dire les montants attribués chaque année, il a été décidé de convertir 2,4 milliards d'euros du « stock » de RCS en dotation au capital social de l'AFD, c'est-à-dire en fonds propres de première catégorie ( Common equity tier 1 ). C'est cette dépense exceptionnelle qui a donné lieu à la création du programme 346 « Renforcement des fonds propres de l'AFD » sur la présente mission, pour le seul exercice 2016.

Cette opération est cependant neutre sur le solde de l'État, en comptabilités budgétaire et maastrichtienne . En effet, dans un premier temps, l'AFD a remboursé de façon anticipée à l'État 2,4 milliards d'euros de RCS qui ont alimenté le programme correspondant du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ». Dans un second temps, l'État a dépensé le même montant à partir de la présente mission pour alimenter le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », à partir duquel il a doté en capital l'AFD.

II. COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS EN 2016

Le compte de concours financier « Prêts à des États étrangers » a été sous-exécuté par rapport aux montants inscrits en loi de finances, dans des proportions significatives, comme les années précédentes . Le taux de consommation des crédits est ainsi de 67 % en autorisations d'engagement (AE) et de 68 % en crédits de paiement (CP), soit une sous-exécution respective de 500 millions d'euros et de 350 millions d'euros. Cette sous-exécution s'améliore cependant par rapport à l'an dernier (moins de 50 % 40 ( * ) ).

Exécution comparée des crédits du compte de concours financier « Prêts à des États étrangers » en 2015 et 2016

(en millions d'euros)

Programmes

Crédits exécutés en 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits ouverts 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / LFI 2016

Exécution 2016 / exécution 2015

851 - Prêts à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France

AE

115,8

372,0

330,0

258,8

69,6 %

223,5 %

CP

182,9

300,0

236,3

191,1

63,7 %

104,4 %

852 - Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France

AE

129,2

734,7

555,2

553,7

75,4 %

428,5 %

CP

129,2

734,7

555,2

553,7

75,4 %

428,5 %

853 - Prêts à l'AFD en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers

AE

480,0

400,0

475,0

195,0

48,8 %

40,6 %

CP

380,0

58,5

-

-

0,0 %

0,0 %

854 - Prêts aux États membres de l'Union européenne dont la monnaie est l'euro

AE

-

-

-

-

-

-

CP

-

-

-

-

-

-

Total

AE

725,0

1 506,7

1 360,2

1 007,5

66,9 %

139,0 %

CP

692,2

1 093,2

791,5

744,8

68,1 %

107,6 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

- Le programme 851 concerne la « Réserve pays émergents » (RPE), l'un des principaux outils d'aide liée de la France. Son exécution en AE s'améliore par rapport à l'an dernier (70 % contre 35 %) mais reste bien inférieure à celle de 2013 (99 %). La consommation des CP, fortement dépendante de l'avancement des projets, s'améliore également (64 %).

- Le programme 852 , relatif aux prêts de refinancement accordés dans le cadre de restructuration de dettes, est exécuté à hauteur de 75 % , soit une amélioration très significative par rapport aux dernières années (20 % en 2015, après une absence totale de consommation des crédits en 2014 et un taux d'exécution anecdotique de 5 % en 2013).

- Le programme 853 porte un prêt très concessionnel (taux de 0,25 % sur trente ans dont dix de différé), la « ressource à condition spéciale », accordé par l'État à l'AFD, qu'elle utilise pour octroyer à son tour des prêts concessionnels. Il n'a été que partiellement exécuté en AE (49 %) et absolument pas exécuté en CP (0 %) ; ces chiffres s'expliquent par le renforcement des fonds propres de l'AFD, qui s'est traduit par l'annulation d'une tranche de 280 millions d'euros de RCS 41 ( * ) .

- Le programme 854 était destiné à porter la contribution de la France au plan de soutien en faveur de la Grèce, finalement confié au Fonds européen de stabilité financière (FESF).

Équilibre du compte « Prêts à des États étrangers » en 2016

(en millions d'euros)

Sections

Recettes

Dépenses (CP)

Solde

Section n° 1 (programme 851)

Prêts de la Réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d'infrastructure

312,4

191,1

+ 121,3

Section n° 2 (programme 852)

Prêts pour consolidation de dettes envers la France

170,0

553,7

- 383,7

Section n° 3 (programme 853)

Prêts à l'Agence française de développement

2 575,1

-

+ 2 575,1

Section n° 4 (programme 854)

Prêts aux États membres de l'Union européenne dont la monnaie est l'euro

-

-

-

Total

3 057,5

744,8

+ 2 312,7

Le compte « Prêts à des États étrangers » a enregistré un solde excédentaire de 2,3 milliards d'euros, qui s'explique par le remboursement anticipé de 2,4 milliards d'euros de RCS par l'AFD , dans le cadre du renforcement de ses fonds propres.

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Malgré un faible taux d'exécution, vos rapporteurs spéciaux se réjouissent de constater une certaine amélioration . Si l'on exclut le programme 853 - affecté par les opérations exceptionnelles liées au renforcement des fonds propres de l'AFD - et le programme 854 - sans activité -, l'on constate une progression importante.

Cette amélioration est notamment due au traitement de la dette de Cuba . Plus de trente ans après l'interruption des relations économiques et financières, Cuba remboursera sur dix-huit ans 241 millions d'euros d'arriérés, tandis que parallèlement, seraient annulés les intérêts de retard (4,27 milliards d'euros pour la France), sous réserve que ce pays respecte l'échéancier de remboursement.

Taux d'exécution des crédits des programmes 851 et 852

2012

2013

2014

2015

2016

851 - Prêts à des États étrangers, de la réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d'infrastructures

AE

71,4 %

99,9 %

73,2 %

35,1 %

69,6 %

CP

40,4 %

61,1 %

54,6 %

41,6 %

63,7 %

852 - Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France

AE

39,3 %

5,4 %

0,0 %

19,8 %

75,4 %

CP

39,3 %

5,5 %

0,0 %

19,8 %

75,4 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Taux d'exécution (en CP) des crédits des programmes 851 et 852

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

MISSION « ANCIENS COMBATTANTS, MÉMOIRE ET LIENS AVEC LA NATION » - M. MARC LAMÉNIE, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. UNE EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION CONFORME EN 2016 AUX DIFFÉRENTES NORMES DE PROGRAMMATION BUDGÉTAIRE

La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » dotée en 2016, en loi de finances initiale, de 2,612 milliards d'euros (hors rattachements de fonds de concours et attributions de produits), soit 0,8 % du budget général hors recherche et développement, comporte trois programmes à l'ampleur inégale :

- le programme 158 « Indemnisations des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale » ;

- le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée » ;

- le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ».

Les crédits ouverts en loi de finances initiale à ces programmes sont d'ampleur inégale.

Ouvertures initiales de crédits de paiement par la loi de finances initiale
pour 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Le tableau ci-dessous détaille la diversité des dotations des différents programmes de la mission. S'en détache la prédominance du programme 169 (95 % des dotations) qui regroupe les différents transferts en dépenses en faveur du monde combattant.

Intitulé du programme

AE

CP

%

167

Liens entre la nation et son armée

37,718

37,918

1 %

169

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

2 473,991

2 473,991

95 %

158

Indemnisations des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

100,754

101,053

4 %

Total

2 612,465

2 612,963

Source : Cour des comptes ; note d'analyse budgétaire pour 2016

A. LES OUVERTURES DE CRÉDITS DE LA LOI DE FINANCES INITIALE ONT ÉTÉ RESPECTÉES ET PRESQUE INTÉGRALEMENT CONSOMMÉES

Les crédits ouverts par la loi de finances initiale ont été consommés en quasi-totalité, des annulations brutes modérées ayant été décidées en cours d'année.

Compte tenu de ces dernières, le taux de consommation des crédits finalement disponibles s'est révélé globalement très élevé tutoyant les 100 %.

Les dépenses ont atteint 2 590 millions d'euros pour un total de crédits de paiement ouverts en début d'exercice de 2 612,9 millions d'euros, (pour un taux de consommation moyen des crédits initiaux de 99,1 %) ramenés en gestion à 2 597,6 millions d'euros.

Les crédits finalement disponibles ont été consommés à 99,7 %.

Exécution des crédits de la mission en 2016

Programme

Crédits exécutés en 2015

Crédits votés en LFI 2016

Crédits ouverts en 2016

Crédits exécutés en 2016

Exécution 2016/Exécution 2015 (en %)

Exécution 2016/LFI 2016 (en %)

167

AE

40,3

37,7

37

36,1

89,6 %

95,8 %

CP

41,6

37,9

39,2

37,8

90,9 %

99,7 %

169

AE

2 523,30

2 474,00

2 461,20

2 456,80

97,4 %

99,3 %

CP

2 523,30

2 474,00

2 461,20

2 456,80

97,4 %

99,3 %

158

AE

154,9 42 ( * )

100,8

97,2

95,4

61,6 %

94,6 %

CP

154,9 43 ( * )

101,1

97,2

95,4

61,6 %

94,4 %

Total

AE

2 718,50

2 612,50

2 595,40

2 588,30

95,2 %

99,1 %

CP

2 719,70

2 613,00

2 597,60

2 590,00

95,2 %

99,1 %

Note : les crédits ouverts en 2016 cumulent les crédits de la loi de finances initiale, les attributions de produits et rattachements de fonds de concours et les mouvements de crédits en gestion.

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les modifications de crédits intervenues en cours d'année n'ont apporté que peu d'évolutions à la programmation initiale.

Mouvements infra annuels de crédits

(en millions d'euros)

Source : Cour des comptes ; note d'analyse budgétaire pour 2016

Compte tenu des rattachements de fonds de concours et des attributions de produits, les crédits finalement disponibles ont assez largement respecté les ouvertures de la loi de finances initiale (99,1 % des crédits initiaux ont été préservés) malgré un bilan consolidé négatif des mouvements nets de crédits mis en oeuvre en cours d'année (- 15,3 millions d'euros dont - 12,8 millions d'euros sur le programme 169).

Dans ce contexte, où, globalement, les conditions d'exécution des dotations ont dégagé des taux de consommation élevés , on ne peut mentionner que quelques nuances.

Ainsi, le programme 158 , qui ne concentre que 3,9 % des moyens de la mission, a connu un taux d'exécution des crédits initiaux plus faible, à 94,4 % , que les autres programmes (programmes 167 et 169) pour lesquels la consommation des crédits a presque saturé les crédits finalement ouverts.

Par ailleurs, on peut observer une forme de paradoxe dans la gestion des crédits du programme 167 puisque celui-ci a été doté de 1,3 million d'euros supplémentaires en gestion, dotation qui n'a pas été dépensée.

Enfin, l'exécution tendue des crédits du programme 169 témoigne d'un calibrage très serré des mouvements de crédits opérés sur ce programme , une annulation brute de 23 millions d'euros (cumul de deux annulations successives dans le cadre des décrets d'avances d'automne et de décembre) ayant réduit à très peu les marges de manoeuvre mobilisables en fin de gestion alors que le programme avait bénéficié quelques jours auparavant d'un virement de 2,8 millions d'euros. Il convient toutefois de noter que les annulations arrêtées pouvaient se recommander d'économies de constatation, en particulier celle découlant de l'estimation opérée en début d'année du coût pour l'État de la majoration des rentes mutualistes finalement inférieur de 11,2 millions d'euros aux provisions inscrites en loi de finances initiale.

Du fait des besoins constatés, la réserve de précaution, qui avait d'abord été fixée à 7,8 % des dotations ouvertes en loi de finances initiale (pour être majorée de 16,4 millions d'euros en crédits de paiement), a été presque intégralement débloquée en gestion. En particulier, les 193,5 millions d'euros mis en réserve sur le programme 169 ont été dégelés pour leur quasi-totalité.

Votre rapporteur spécial s'interroge sur l'application à des dépenses de guichet, correspondant à des créances légales, de la procédure de mise en réserve des crédits, du moins au taux élevé mis en oeuvre qui, d'ailleurs, excède systématiquement le taux plancher ( de 6 % pour les dépenses hors celles de personnels) déterminé par la loi de programmation des finances publiques .

Il est plus qu'improbable que les erreurs de programmation puissent atteindre le taux de mise en réserve pratiqué sur de telles dotations. Dans ces conditions, la tentation est forte d'interpréter la pratique suivie comme une façon d'exempter les crédits a priori « pilotables » de taux de mise en réserve dont le niveau, qui devrait être extrêmement élevé, se révèlerait largement virtuel sauf à envisager une réformation drastique des autorisations budgétaires votées par le Parlement, au point que celles-ci seraient d'emblée largement privées de la portée qui doit être la leur. 44 ( * )

Votre rapporteur spécial souhaite, par cette observation, que la formulation d'une règle concernant la réserve de précaution, en sus de celle, de principe, de la loi organique relative aux lois de finances, dans une future loi de programmation pluriannuelle des finances publiques soit adaptée aux conditions de fait qui s'imposent à la dépense publique de sorte que les modalités d'application de ladite règle n'en révèlent pas l'irréalisme.

Il ajoute qu'au plan symbolique le gel des droits conférés aux anciens combattants et victimes de guerre, pour virtuel qu'il doive être, représente pour le moins une maladresse par laquelle l'État jette le doute sur des engagements solennels au nom d'une norme technique à la portée pratique moins qu'évidente.

B. LES DÉPENSES DE LA MISSION SE SONT INSCRITES TRÈS EN DESSOUS DU PLAFOND FIXÉ PAR LA PROGRAMMATION TRIENNALE DES FINANCES PUBLIQUES

Malgré un niveau élevé de consommation des crédits, la mission a respecté la norme de dépense de la loi de programmation des finances publiques.

Celle-ci avait dessiné une trajectoire franchement baissière du plafond de crédit de la mission devant passer de 2,89 milliards d'euros en 2014 à 2,63 milliards d'euros en 2016 (2,51 milliards d'euros en 2017) soit une réduction du plafond de 9 % entre 2014 et 2016.

Comparaison entre le plafond de la loi de programmation pluriannuelle et l'exécution des crédits en 2016

Plafond de la loi de programmation des finances publiques

2 631,30

Changements de périmètres

6,04

Plafond au format 2016

2637,34

Crédits ouverts en 2016

2 597,60

Contribution au CAS « Pensions »

0,33

Exécution hors fonds de concours et CAS « Pensions »

2 589,50

Marges sous le plafond 2016

47,84

Source : commission des finances du Sénat d'après le programme annuel de performances pour 2016 et la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques (2014-2019)

Source : Cour des comptes ; note d'analyse budgétaire pour 2016

Les dépenses effectuées au cours de l'exercice ont respecté cette trajectoire. Au surplus, elles sont inférieures au plafond des crédits pour 2016 de 47,8 millions d'euros.

Comme la majorité des dépenses de la mission correspond à des charges de guichet, cette situation traduit un léger surdimensionnement des besoins par la loi de programmation 2014-2019. Si la plupart des hypothèses de budgétisation sont relativement inertes, en particulier en ce qui concerne les volumes, il n'en va pas nécessairement de même pour les valeurs qui commandent l'indexation des charges.

De fait, une partie substantielle des économies constatées par rapport aux prévisions est attribuable à une inflation moins dynamique qu'escompté qui a limité les effets de l'indexation des prestations mises à la charge de la mission, illustrant le phénomène d'élasticité de certaines dépenses publiques aux variations des prix.

Le ralentissement des prix aura ainsi amplifié la baisse programmée des dépenses de la mission dans un contexte de faible renforcement des statuts ménagés aux anciens combattants avec lequel la loi de finances pour 2017 a apporté une inflexion significative 45 ( * ) mais dont les effets ne seront sensibles qu'au-delà de l'exercice sous revue.

II. UNE DIMINUTION DES DÉPENSES QUI SE POURSUIT MAIS SUR UN RYTHME RALENTI

Les dépenses de la mission sont en baisse régulière et dégagent chaque année des économies qu'on peut qualifier « d'économies de constatation » même si les choix de revalorisation modérée des prestations qui en constituent l'essentiel des charges doivent également être pris en compte.

L'exécution 2016 confirme, mais selon des proportions nettement atténuées, cette tendance.

A. LA POURSUITE D'ÉCONOMIES MAIS SUR UN RYTHME EFFECTIF MOINS SOUTENU QUE L'AN DERNIER

En 2015 , la mission avait dégagé des économies de 152,5 millions d'euros (soit une baisse de l'ordre de 5 % par rapport aux dépenses de 2014) principalement concentrées sur les crédits prévus au programme 169 dont les dépenses avaient accusé un repli de 210 millions .

La baisse des dépenses de la mission aurait été sensiblement plus forte (elle aurait même dépassé 7 %) en dehors d'un événement exceptionnel : l'accord conclu entre la France et les États-Unis pour solder la dette de réparation envers certaines victimes de la déportation reconnue par la France. Cet accord avait, en effet, conduit à inscrire une dotation exceptionnelle de 54,5 millions d'euros au titre de 2015 .

En 2016, les dépenses de la mission ont poursuivi leur diminution mais dans des proportions plus mesurées.

Les économies constatées s'élèvent à 129,7 millions d'euros, soit un niveau proche de l'an dernier. Toutefois, cette évolution peut être qualifiée de partiellement « faciale » du fait de l'accord mentionné. Il faut, en effet, tenir compte de la non-récurrence de la dépense rappelée plus haut si bien que les économies structurelles dégagées en 2016 peuvent être estimées à 74,1 millions d'euros, soit un niveau beaucoup plus faible qu'en 2015 .

En bref, le rythme de réduction des charges de la mission a nettement décéléré en 2016 .

B. DES ÉCONOMIES CONCENTRÉES SUR LE PROGRAMME 169 PRINCIPALEMENT DE CONSTATATION MALGRÉ L'AMORÇAGE D'UN PROCESSUS DE REVALORISATION ET UNE CERTAINE INERTIE DES MAJORATIONS DES RENTES MUTUALISTES

Ainsi que l'a illustré le tableau récapitulant les données d'exécution des crédits par programme en 2016 (voir supra), confirmées par les données d'exécution des crédits par nature de dépenses ci-dessous, comme l'an dernier, les économies réalisées sur les dépenses de la mission se sont concentrées sur les dépenses d'intervention, et, plus particulièrement, sur les dépenses du programme 169.

Évolution des consommations de crédits par titre

Crédits exécutés en 2015

Crédits votés en LFI 2016

Crédits exécutés en 2016

Exécution 2016 / Exécution 2015

Exécution 2016 / Crédits ouverts en LFI 2016

Titre 6
(dépenses d'intervention)

2 621,10 46 ( * )

2 513,20

2 489,10

- 132,00

- 24,10

Autres titres

98,70

100,10

101,00

2,30

0,90

dont :

Titre 3
(dépenses de fonctionnement)

96,7

98,3

94

- 2,70

- 4,30

Total

2 719,80

2 613,30

2 590,10

- 129,70

- 23,20

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

De fait, les dépenses du programme 169, qui se sont inscrites en baisse de 66,60 millions d'euros par rapport à 2015 (elles se situent en deçà des ouvertures de crédits de la loi de finances initiale à hauteur de 17,2 millions d'euros), diminuent de 2,6 %.

Ce rythme de diminution des dépenses du programme est toutefois nettement plus faible que l'an dernier où il avait été de l'ordre de 7 %.

La structure des dépenses du programme peut être déclinée à partir des quatre grandes actions suivantes correspondant à des regroupements de prestations de nature homogène :

- l'administration de la dette viagère qui compte les pensions militaires d'invalidité des victimes de guerre et les prestations rattachées ainsi que la retraite du combattant ;

- la gestion des droits liés aux pensions militaires d'invalidité : soins médicaux gratuits et appareillage des mutilés, remboursement des réductions de transport accordées aux invalides, remboursement des prestations de sécurité sociale accordées aux invalides... ;

- les interventions au titre de la solidarité : majoration des rentes mutualistes des anciens combattants et des victimes de guerre , subventions aux associations, action sociale de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) et subventions versées à cet organisme, Institution nationale des Invalides ;

- les actions en faveur des rapatriés .

Le tableau ci-dessous qui présente les principales évolutions des dépenses du programme entre 2015 et 2016 montre l'influence prédominante de la dette viagère sur les tendances de la dépense.

Évolution des dépenses du programme 169 entre 2015 et 2016

Exécution en 2015

Exécution en 2016

Évolution 2016/2015
(en millions d'euros)

Évolution 2016/2015
(en %)

Administration de la dette viagère

2 011,40

1 942,70

- 68,70

- 3,4

Pensions militaires d'invalidité de victimes de guerre

1 243,20

1 200,70

- 42,50

- 3,4

Retraite du combattant

768,2

742

- 26,20

- 3,4

Gestion des droits liés aux pensions militaires d'invalidité

148

146,7

- 1,30

- 0,9

Soins médicaux gratuits

47,5

56,9

9,40

+ 19,8

Remboursement des réductions de transport

3,2

2,8

- 0,40

- 12,5

Remboursements des prestations de sécurité sociale aux invalides

97,3

87

- 10,30

- 10,6

Solidarité

346,8

350,8

4,00

+ 1,2

Majoration des rentes mutualistes des anciens combattants et victimes de guerre

253,8

250,5

- 3,30

- 1,3

Pécules

0,1

ND

Subventions aux associations

0,4

0,7

0,30

+ 75,0

Action sociale de l'ONACVG

23,4

25,4

2,00

+ 8,5

Subventions versées à l'ONACVG

57

62,1

5,10

+ 8,9

Institution nationale des Invalides

12,1

12,1

0,00

0

Actions en faveur des rapatriés

17,2

16,6

- 0,60

- 3,5

Total

2 523,40

2 456,80

- 66,60

- 2,6

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

En effet, les poids en crédits de chacune de ces grandes têtes de chapitre diffèrent nettement.

Source : rapport annuel de performances de la mission pour 2016

La dette viagère mobilise plus de 80 % des dotations suivie des actions dites de solidarité (11 %) tandis que les interventions au titre des droits complémentaires ne représentent que 6 % des crédits, contre 1 % pour les interventions en faveur des rapatriés.

Dans ce contexte, si la baisse des dépenses a atteint 66,6 millions d'euros entre 2015 et 2016, le repli des dépenses liées à la rente viagère (- 68,7 millions d'euros) en a été le principal facteur ne se trouvant qu'atténué par une légère augmentation des autres dépenses due aux interventions de solidarité.

1. La baisse du nombre des bénéficiaires de la dette viagère a été partiellement compensée par une revalorisation mesurée du point de la pension militaire d'invalidité

Les dépenses de la dette viagère se sont repliées dans des proportions identiques (- 3,4 %) pour chacun des deux postes concernant, l'un, les pensions militaires d'invalidité des victimes de guerre, l'autre, la retraite du combattant.

L'un des déterminants des variations des charges budgétaires de ces dépenses d'intervention en est le nombre des bénéficiaires.

Celui-ci suit une tendance baissière comme indiqué dans le tableau ci-dessous.

Entre 2006 et 2016, le nombre des allocataires des pensions militaires d'invalidité de victimes de guerre s'est replié de 149 749 unités, soit près de 40 %, ce repli atteignant 440 105 personnes pour les bénéficiaires de la retraite du combattant (environ - 30 %).

Afin d'élargir la perspective temporelle, on peut rappeler que, sur le long terme, la réduction du nombre des bénéficiaires des deux prestations n'a pas été concomitante.

Jusqu'à la moitié des années 2000, le contingent des titulaires de la retraite du combattant s'est accru, dans des proportions importantes d'ailleurs.

Ce n'est qu'au-delà que leur nombre a rejoint la tendance à la baisse du nombre des bénéficiaires de pensions militaires d'invalidité.

Source : rapport annuel de performances de la mission pour 2010

Quoi qu'il en soit, désormais, la pente de la décrue des titulaires de la retraite du combattant tend à s'accentuer tandis que celle des pensionnés invalides suit une tendance au repli plus régulière .

Par rapport à 2015, les évolutions des populations bénéficiant de ces deux prestations témoignent de cette convergence puisque chacune d'entre elles a reculé de 4,5 %.

La baisse des dépenses a été un peu moins forte, le différentiel (1,1 %) pouvant s'expliquer, d'une part, par des effets de composition dans la mesure où il existe un lien entre le niveau de la pension servi, plus faible, et l'ancienneté de l'entrée en pension et, d'autre part, par le jeu des revalorisations du point des pensions militaires d'invalidité.

Modalités de revalorisation des pensions correspondant
aux pensions militaires d'invalidité et à la retraite du combattant

Depuis 2005, la valeur du point de pension militaire d'invalidité (PMI) est révisée proportionnellement à l'évolution de l'indice INSEE des traitements bruts de la fonction publique de l'État, à la date de cette évolution, et non plus de manière rétroactive comme dans le dispositif en vigueur auparavant, suivant ainsi les règles du rapport constant. Quant au montant de la retraite du combattant, il est fixé par référence à un nombre de points d'indice de PMI , déterminé à l'article L. 256 du CPMIV G. Il peut donc varier sous l'effet de deux facteurs : le nombre de points d'indice de PMI et la valeur de celui-ci.

S'agissant de la revalorisation du point d'indice des PMI , l'arrêté du 25 août 2016, prenant acte de la variation de l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique d'État, qui a été revalorisé en cours d'année de 0,6 % (soit, compte tenu du calendrier de la revalorisation, un effet en année pleine de l'ordre de 0,3 %), a porté la valeur du point de 14,0 euros à 14,04 euros à compter du 1 er janvier de l'année, soit une augmentation de 0,4 %.

Quant à la retraite du combattant , l'année 2016 n'a pas dérogé à la rupture intervenue à partir de 2012. On rappelle qu'à la faveur d'attributions régulières de points, la retraite du combattant était passée de 37 points à 48 points de PMI entre 2007 et 2012, le nombre de points PMI de la retraite du combattant ayant augmenté de 30 %, son montant progressant de 34,3 %.

Séquence des augmentations de la retraite du combattant entre 2007 et 2012

Alors qu'il s'élevait à 37 points au 1 er juillet 2007, soit 495,06 euros à la valeur du point à cette date, il a été revalorisé chaque année entre 2008 et 2012 :

- deux points supplémentaires au 1 er juillet 2008 :

39 points , soit 526,89 euros ;

- deux points supplémentaires au 1 er juillet 2009 :

41 points , soit 526,89 euros ;

- deux points supplémentaires au 1 er juillet 2010 :

43 points , soit 592,97 euros ;

- un point supplémentaire au 1 er juillet 2011 :

44 points , soit 595,55 euros ;

- quatre points supplémentaires au 1 er juillet 2012 :

48 points , soit 665,28 euros.

Depuis cette date, la retraite du combattant n'a connu pour seule revalorisation que celle liée à l'évolution de la valeur du point de PMI, particulièrement modérée du fait du gel de la valeur du point d'indice de la fonction publique pendant six ans. C'est sous l'effet de la revalorisation du point d'indice des PMI que la retraite du combattant a pu connaître une légère augmentation de son montant en 2016.

2. Les économies sur les majorations des rentes mutualistes ont été nettement plus contenues si bien que leur poids dans les dépenses du programme 169 continue de s'alourdir...

Un regard rétrospectif sur les trois plus importantes catégories de dépenses du programme 169 (les PMI, la retraite du combattant et les majorations des rentes mutualistes versées par l'État), qui concentrent 88,7 % du total des dépenses, fait ressortir des évolutions notables.

Entre 2010 et 2016, le nombre des bénéficiaires de ces dépenses a diminué de 414 673 (cette grandeur est le résultat de l'addition de la baisse des bénéficiaires de chaque intervention, sachant qu'une même personne peut bénéficier de plusieurs d'entre elles).

Les reculs relatifs les plus significatifs ont concerné les titulaires de pensions militaires d'invalidité (- 25 % en 2016 par rapport à 2010) et des retraites du combattant (- 20 %).

En revanche, les bénéficiaires des majorations des rentes mutualistes versées par l'État, s'ils sont moins nombreux en 2016 qu'en 2010, n'ont diminué que de 12,2 %.

La rente mutualiste du combattant

La rente (ou retraite) mutualiste du combattant est un système de rente par capitalisation créée par la loi du 4 août 1923, qui a posé pour la première fois le principe du versement d'une majoration financée par l'État , en plus de la rente constituée par les anciens combattants et leurs ayants cause du conflit 1914-1918. Après la Seconde Guerre mondiale, plusieurs dispositions législatives et réglementaires ont permis, successivement, d'en étendre le bénéfice à tous les titulaires de la carte d'ancien combattant, aux victimes de guerre (veuves, veufs, orphelins ou ascendants des civils ou militaires décédés en opération) et aux titulaires du titre de reconnaissance de la nation (TRN) . Ce dispositif a été maintenu par l'article L. 222-2 du code de la mutualité.

L'adhésion doit avoir lieu dans un délai de dix ans à compter de l'attribution de la carte du combattant ou du titre de reconnaissance de la Nation. Au-delà, la majoration spécifique est réduite de moitié.

Les majorations s'appliquent au montant de la rente résultant des versements personnels et sont versées par les mutuelles et les sociétés mutualistes aux souscripteurs et remboursées par l'État l'année suivante . Le total formé par la rente et la majoration spéciale de l'État est limité à un plafond, dit « plafond majorable ». Le plafond annuel majorable des rentes mutualistes du combattant a été fixé par l'article 101 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 (loi de finances pour 2007) à 125 points de pension militaire d'invalidité, soit 1 741 euros au 1 er janvier 2013 .

La rente mutualiste se cumule avec toutes les autres pensions et retraites. Elle est exonérée d'impôt pour sa part inférieure au plafond majorable. Les versements effectués pour constituer la rente sont déductibles du revenu imposable, dans la limite de la constitution d'une rente majorée égale à ce même plafond. En cas de décès, ils peuvent être transmis à un bénéficiaire hors droits de succession. Au-delà du plafond majorable, le régime fiscal est celui de l'assurance-vie.

Onze organismes gèrent la rente mutualiste du combattant, dont la Caisse autonome de retraite des anciens combattants (CARAC) avec 181 191 adhérents, la France Mutualiste avec 104 846 adhérents, CNP Assurances, avec 49 870 adhérents et MUTEX, avec 26 673 adhérents.

La baisse tendancielle du nombre des bénéficiaires de chacune des interventions n'a pas eu de prolongements identiques sur leurs coûts si bien que l'élasticité des charges budgétaires aux évolutions concernant les bénéficiaires de ces trois interventions ressort fortement dispersée.

Les dépenses des pensions militaires d'invalidité ont davantage régressé (- 32,5 % contre - 25,5 % pour la population des bénéficiaires) extériorisant une élasticité de 1,27, tandis que l'effet en dépenses de la réduction des populations bénéficiant de la retraite du combattant et de la majoration des rentes mutualistes a été amorti.

Dans les deux cas, la baisse des dépenses est inférieure à celle des bénéficiaires mais cet écart est plus fort pour les rentes mutualistes au point que les dépenses associées à ce dernier mécanisme ne sont inférieures en 2016 à leur niveau de 2010 que de 1,9 %, pour une élasticité de 0,15 contre 0,35 pour la retraite du combattant.

Évolution des effectifs et des dépenses des trois principales interventions du programme 169 entre 2010 et 2016

2010

2016

2016/2010
(en %)

2016/2010
(en valeur)

Pensions militaires d'invalidité

Effectifs

308 940

230 285

- 25,5

- 78 655

Dépenses

1 766 641

1 191 863

- 32,5

- 574 778

Retraite du combattant

Effectifs

1 339 730

1 059 106

- 20,9

- 280 624

Dépenses

796 393

737 259

- 7,4

- 59 134

Majoration des rentes mutualistes

Effectifs

418 164

362 770

- 12,2

- 55 394

Dépenses

255 428

250 533

- 1,9

- 4 895

Total

Effectifs

2 066 834

1 652 161

- 20

- 414 673

Dépenses

2 818 462

2 179 655

- 22,6

- 638 807

Source : Commission des finances du Sénat d'après les données des rapports annuels de performances de la mission pour 2010 et 2016

Ces évolutions différenciées proviennent du sort très contrasté connu par les valeurs unitaires de chacune des interventions envisagées. En particulier, la valeur de la pension militaire d'invalidité moyenne s'est fortement repliée (- 7,7 %) tandis que, pour les deux autres chefs de dépenses, une revalorisation est intervenue.

L'exercice 2016 confirme l'inertie relative des charges budgétaires liées aux revalorisations des rentes mutualistes.

Dans ces conditions, leur poids dans le total des dépenses du programme ne cesse de s'alourdir . Il s'élevait à 8 % en 2010 et représente en 2016 10,2 % des dépenses du programme.

3. ...non sans susciter quelques interrogations

La contribution de l'État aux rentes mutualistes aboutit, pour les bénéficiaires, à doubler la valeur de la retraite du combattant qu'ils perçoivent. Néanmoins, le nombre des bénéficiaires de ces deux catégories de dépenses est très inégal puisque les prestataires de la retraite du combattant excèdent de près de 700 000 ceux qui bénéficient de la majoration des rentes mutualistes par l'État.

La structure des charges du programme tend à se déformer au profit d'une intervention moins « universelle » que les autres interventions qu'il finance.

Cette situation tient à la sous-utilisation de la faculté ouverte aux ayants droit de se constituer un complément de retraite disposant d'un soutien élevé de l'État qui appelle une élucidation.

A ce stade, votre rapporteur spécial se limitera à relever que cette sous-utilisation conduit à des économies significatives qu'on peut estimer moyennant quelque simplification - il faudrait, en particulier, également tenir compte de la non saturation du plafond de la majoration par les épargnants - à 480 millions d'euros .

Évolution de la valeur unitaire des trois principales interventions
du programme 169 entre 2010 et 2016

(en euros)

2010

2016

2016/2010 (en %)

2016/2010 (en valeur)

Pensions militaires d'invalidité

5 476

5 054

- 7,7

- 422

Retraite du combattant

584

680

16,4

96

Majoration des rentes mutualistes

582

679

16,7

97

Source : Commission des finances du Sénat d'après les données des rapports annuels de performances de la mission pour 2010 et 2016

III. LES CRÉDITS DE LA MISSION SONT LOIN DE RENDRE COMPTE DE L'EFFORT PUBLIC CONSACRÉ À LA RECONNAISSANCE DE LA NATION ENVERS SES ANCIENS COMBATTANTS

Il convient de compléter le paysage suggéré par les crédits de la mission par la mention de deux circuits de financement complémentaires, constitués, l'un, par des dépenses rattachables aux actions financées par la mission mais prises en charge par d'autres missions budgétaires, l'autre, par des transferts effectués au profit des anciens combattants et victimes de guerre à travers les dépenses fiscales correspondant aux divers avantages fiscaux qui leur sont réservés.

A. DES DÉPENSES EFFECTIVES SUPÉRIEURES AUX DÉPENSES DIRECTES ET INSUFFISAMMENT RECENSÉES

En ce qui concerne les crédits « déversés » par d'autres missions budgétaires, ils correspondent principalement aux dépenses de personnel acquittées par le ministère de la défense pour organiser la journée défense et citoyenneté.

Au total, les crédits engagés à partir d'autres missions se sont élevés à 103,2 millions d'euros en 2016 comme récapitulés ci-dessous.

Source : rapport annuel de performances de la mission pour 2016

Dans ces conditions, les dépenses complètes de la mission se sont élevées, en réalité, à 2 693,2 millions d'euros, soit 104 % des dépenses imputées sur les seuls crédits ouverts à elle par la loi de finances initiale sans que cette correction n'apporte de modifications à l'évolution des dépenses entre 2015 et 2016.

Votre rapporteur spécial s'interroge toutefois sur l'exhaustivité des dépenses extérieures prises en compte pour donner une vision plus complète des dépenses publiques liées à l'accomplissement des objectifs assignés aux crédits de la mission.

En plus des concours apportés à l'Institution nationale des invalides par le ministère de la santé, qui ne sont pas récapitulés dans le document budgétaire au titre des dépenses indirectes présentées ci-dessus, il convient de considérer les contributions des collectivités territoriales dont un recensement mériterait de figurer dans l'information budgétaire afin de mieux rendre compte de l'effort public consacré aux différentes politiques publiques financées par la mission.

B. LES TRANSFERTS PUBLICS AU PROFIT DES ANCIENS COMBATTANTS DÉPASSENT DE BEAUCOUP LES DÉPENSES PUBLIQUES DU FAIT DE RÉGIMES FISCAUX AVANTAGEUX

Quant aux transferts réalisés au bénéfice des anciens combattants à travers les régimes fiscaux dérogatoires qui leur reconnaissent des avantages particuliers, ils sont évalués par le rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement à 747 millions d'euros, soit 28,8 % des dépenses budgétaires de la mission .

Dans ces conditions, l'effort public consolidé consacré aux différents objectifs poursuivis par la mission doit a minima être relevé d'à peu près un tiers par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale une fois les dépenses fiscales additionnées aux dépenses publiques qu'ils permettent d'engager.

Votre rapporteur spécial observe toutefois que les prescriptions détaillées de dépenses de la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques ne s'appliquent pas aux dépenses fiscales 47 ( * ) si bien que leur niveau, quoiqu'élevé, ne conduit pas à réviser l'appréciation portée plus haut sur le respect du triennal par les consommations de crédits.

En revanche, la dynamique des dépenses fiscales tranche avec celle des crédits. Pour 2016, ces derniers se replient tandis que les dépenses fiscales s'accroissent. Les six dépenses fiscales inventoriées dans le rapport annuel de performances passent de 743 millions d'euros en 2015 à 747 millions d'euros en 2016. Leur progression est mesurée (+ 0,6 %) mais depuis 2010 elle a été particulièrement forte. Alors, les cinq dépenses fiscales recensées s'élevaient à 430 millions d'euros. Du fait de l'homogénéité entre le champ de l'évaluation de ces transferts entre 2010 et 2016, on relève ainsi une augmentation de 73,7 % du poids des dépenses fiscales en six ans. Avec 317 millions d'euros en plus, elles ont considérablement atténué la baisse de 585 millions d'euros constatée sur les dépenses de la mission.

Encore faut-il observer que seules trois des six dépenses fiscales recensées dans le rapport annuel de performances sont évaluées tandis que l'inventaire des transferts alloués aux anciens combattants et à leurs ayants droits par la Cour des comptes conduit à constater que le recensement proposé par la documentation budgétaire continue d'être incomplet.

Recensement par la Cour des comptes des dépenses fiscales et sociales non mentionnées par les documents budgétaires

L'impôt sur le revenu (IR)

Le projet annuel de performances (PAP) ne fait pas figurer :

- la part des dépenses fiscales découlant des dispositifs prévus par le programme 158 qui correspondrait à 3,5 % de la dépense n° 120126 ; le ministère de la défense, la direction du budget et le Secrétariat général du Gouvernement ont indiqué qu'ils étaient disposés à répartir la dépense fiscale qui figure aujourd'hui au titre du programme 169 entre les deux programmes 158 et 169 et à rattacher les montants correspondants dans le PAP. Des travaux seront entrepris à ce sujet ;

- l'exonération d'impôt sur le revenu des PMI reversées aux ayants droit des militaires et anciens combattants décédés, en vertu des dispositions du CPMIVG ;

- pour le programme 158, les indemnités versées aux ayants droit des victimes de spoliation qui sont exonérées d'IR.

Les droits de mutation

Le PAP ne mentionne pas l'exonération dont bénéficie le capital versé aux victimes de spoliations qui serait soumis au droit d'enregistrement (programme 158).

Les droits de succession

Le PAP ne mentionne pas que :

- la transmission du capital de la rente mutualiste, lorsqu'il a été opté pour le régime réservé viagèrement, se fait hors droit de succession dans la limite de la fiscalité actuelle ;

- pour les ayants droit des victimes de spoliations, les indemnités versées postérieurement au décès du bénéficiaire ne constituent pas un patrimoine taxable.

Les prélèvements sociaux

Certaines aides bénéficient d'exonérations de prélèvements sociaux :

- les PMI, la retraite du combattant, la retraite mutualiste des anciens combattants (dans la mesure où elle bénéficie de la majoration de l'État) et les allocations de reconnaissance servies aux anciens membres des formations supplétives de l'armée française en Algérie et leurs veuves sont exonérées de CSG et de CRDS. Cette exonération est d'ailleurs codifiée par l'article L. 136-2-III-3° du code de la sécurité sociale ; sur ce sujet, lors de différents échanges, le coût de l'exonération pour les retraites mutualistes a été estimé, en 2013, à 80 millions d'euros ; quant à la retraite du combattant, l'exonération est estimée à 67 millions d'euros ;

- les sommes perçues par les orphelins des victimes de la barbarie, les orphelins des victimes d'actes d'antisémitisme pendant la Seconde guerre mondiale et par les victimes de spoliations ne sont pas soumis à prélèvements sociaux.

Bien que ces deux exonérations ne relèvent pas de la loi de finances initiale stricto sensu, et ne doivent pas figurer dans le PAP à ce titre, mais du projet de loi de financement de la sécurité sociale, les montants correspondants viennent augmenter le coût global de cette politique. Ils pourraient donc être mentionnés dans les documents budgétaires pour porter à la connaissance de la représentation nationale le coût de cette politique.

L'impôt sur la fortune (ISF)

Le PAP ne fait pas figurer les dispositifs suivant qui sont exonérés d'ISF :

- l'exonération des sommes allouées aux ayants droit des victimes de persécutions antisémites en vertu de l'article 885 K du code général des impôts ;

- la rente mutualiste, sa valeur de capitalisation n'est pas imposable ;

- l'ensemble des aides financières versées aux orphelins et aux victimes de spoliations n'entrent pas dans le champ de l'ISF. Lorsque ces indemnités sont versées aux ayants droit des victimes elles sont également exonérées d'ISF.

Source : note d'analyse budgétaire 2015. Cour des comptes

La montée en puissance des transferts fiscaux dans le total des expressions de la reconnaissance de la Nation aux anciens combattants conjointe avec celle des majorations accordées aux rentes mutualistes conduit à une concentration des manifestations de soutien de la Nation à ses anciens combattants dans un contexte où les allocations les plus « universelles » n'ont bénéficié ces dernières années d'aucune revalorisation significative.

IV. L'EXÉCUTION 2016 À TRAVERS LES RÉCENTS TRAVAUX DE CONTRÔLE DE LA COMMISSION DES FINANCES

La loi de finances pour 2016 a apporté quelques modifications au code des pensions militaires et des invalides de guerre :

- l'article 131 a abaissé la durée de mariage ou de pacte civil de solidarité ouvrant aux conjoints survivants ayant apporté des soins constants à un grand invalide le bénéfice d'une majoration de ses droits de 10 à 5 ans (avec un impact de 1,9 million d'euros en 2016) ;

- l'article 132 a levé la forclusion frappant les demandeurs du bénéfice du droit à campagne double pour les combattants ayant participé à la guerre d'Algérie et aux combats en Tunisie et au Maroc ;

- l'article 133 a accordé une allocation viagère aux conjoints et ex-conjoints survivants de harkis, moghaznis et personnels des autres formations supplétives.

L'effet de ces mesures reste très modéré en 2016.

Par ailleurs, un certain nombre d'interventions financées par la mission ont fait l'objet de travaux, achevés en 2016 quand d'autres problématiques, évoquées par votre commission des finances, sont en cours d'instruction.

A. LA JOURNÉE DÉFENSE ET CITOYENNETÉ, UNE DÉCEPTION (TRANSITOIRE ?) EN 2016

Le programme 167 qui finance trois actions principales a connu un repli relatif de ses dépenses de près de 9 %. Dans la mesure où ce programme ne regroupe que 1,4 % des dotations de la mission, l'économie en valeur demeure modérée (- 3,7 millions d'euros). Par ailleurs, la mission ne regroupe qu'une faible partie des crédits consacrés à ce rendez-vous (celle relative à ses frais de fonctionnement notamment au titre de l'alimentation et du transport) qui se révèlent plus flexibles que les dépenses de personnel. Celles-ci font l'objet d'un déversement en provenance de la mission « Défense » pour un montant de 102,4 millions d'euros en 2016 en retrait (- 1,3 %) nettement plus modéré que les coûts variables de la JDC.

Ceux-ci ont rétrogradé à hauteur de 5 millions d'euros (- 30,8 %). Les dépenses réalisées sur ce point ont été inférieures de 1,44 million d'euros par rapport aux prévisions, qui les envisageaient en augmentation.

Les économies réalisées sont expliquées par une fréquentation de la JDC moindre que prévu (774 000 contre 800 000 en prévision).

Cette évolution nécessite une élucidation dans la mesure où l'on ne peut que réaffirmer l'objectif d'une vaste fréquentation d'un rendez-vous qui constitue au demeurant une obligation légale.

Votre rapporteur spécial rappelle sur ce point les analyses qu'il avait présentées à la commission des finances à l'occasion de son récent rapport sur la Journée défense et citoyenneté 48 ( * ) :

« Un nombre encore trop important de jeunes n'accomplissent pas leur JDC , avec des taux de non-participation très préoccupants dans certains départements . 1,8 % des jeunes d'une classe d'âge ne se font pas recenser et 4,1 % n'effectuent pas leur JDC, ce qui représente respectivement 14 400 et 32 800 jeunes 49 ( * ) .

Ces taux sont beaucoup plus élevés dans certains départements. Ainsi à Paris, 9,1 % des jeunes ne se font pas recenser, tandis que 12,8 % ne sont pas en règle avec la JDC . Les taux de participation à la JDC sont également significativement plus bas que la moyenne dans les Hauts-de-Seine, en Seine-Saint-Denis, dans les Alpes-Maritimes, ainsi qu'en Guadeloupe, en Guyane, à Wallis-et-Futuna et à Mayotte».

Quant aux indicateurs de performances du programme portant sur la JDC, pour satisfaisants qu'ils apparaissent - ils sont basés sur une enquête de satisfaction sommaire réalisée à la fin de la journée -, ils ne suffisent pas à convaincre tout à fait d'une utilité sociale de la JDC qui doit être améliorée en tenant compte des recommandations de votre rapporteur spécial formulées dans le cadre du rapport précité et auquel il renvoie.

Qu'il lui soit permis d'insister particulièrement sur l'inscription de la JDC dans le « parcours citoyen » dont l'école de la République est chargée et qui mérite toute son attention mais aussi sur l'opportunité qu'offre la JDC pour détecter les difficultés éprouvées par certains jeunes et amorcer des solutions que leur cursus n'a pas permis d'apporter.

B. LES SOUTIENS APPORTÉS À L'INSTITUTION NATIONALE DES INVALIDES, UNE STABILITÉ AVANT UN PLUS FORT ENGAGEMENT ?

La loi de règlement témoigne de la stabilité de la subvention versée par la mission à l'Institution nationale des Invalides (INI). Celle-ci s'est établie à 12,09 millions d'euros, comme en 2015.

Cette subvention représente un peu plus d'un tiers des ressources de l'INI qui est par ailleurs attributaire d'une dotation annuelle de financement versée par le ministère de la santé (11,8 millions d'euros) et s'efforce de développer des ressources propres.

L'exécution 2016 prolonge ainsi une dynamique de financement de l'INI qui s'est révélée insoutenable comme l'a exposé votre rapporteur spécial dans son rapport de contrôle sur l'établissement 50 ( * ) .

Le « jeu de rôles » entre le ministère de la défense et le ministère de la santé, qui s'est affranchi des règles d'indexation de sa dotation pourtant prévues par des dispositions légales et réglementaires a abouti à un effet de ciseaux entre des subventions publiques déclinant en euros constants et des charges de fonctionnement progressant en valeur, au point que le bouclage financier de l'INI a reposé sur une ponction du fonds de roulement et sur un décalage des investissements programmés mais non exécutés.

Cette gestion « au fil de l'eau » présente à l'évidence des dangers pour les usagers de l'INI et pour la pérennité même d'un établissement consacré par la loi et par l'histoire.

Votre rapporteur spécial a pu rendre compte des progrès réalisés en 2016 pour redonner un horizon à l'INI : l'adoption du schéma d'investissement, l'adoption d'un nouveau projet d'établissement, le maintien de la spécificité de l'institution dans un contexte de plus fort engagement dans l'offre globale de soins.

Ces évolutions favorables demandent encore à être traduites dans les faits. Elles requerront une attitude positive des partenaires mais aussi des moyens financiers et une politique du personnel à la hauteur des enjeux.

Le programme d'investissement comporte des enjeux importants puisqu'il représente au minimum 50 millions d'euros. En l'état des informations de votre rapporteur spécial, il serait financé à hauteur de 10 millions à 15 millions d'euros par le fonds de roulement, le reste étant pris en charge par une dotation du ministère de la défense.

Votre rapporteur spécial, qui s'interroge sur le principe apparemment adopté d'une exclusivité de la participation des budgets militaires au financement du projet dès lors que la patientèle de l'INI est principalement civile, restera attentif aux prolongements donnés aux impulsions données pour rénover l'INI.

C. DE QUELQUES POINTS D'ATTENTION

Votre rapporteur spécial a eu l'occasion d'évoquer le statut réservé aux victimes des attentats terroristes qui frappent la France. Une réflexion est en cours sur ce point afin de vérifier si le statut de victimes civils d'actes de guerre constitue une solution adéquate pour celles-ci et leurs familles. Votre rapporteur spécial restera attentif aux évolutions qui pourraient devoir intervenir. Il entend à ce stade saluer ces victimes et se féliciter des efforts dont il a été le témoin lors de son déplacement à l'Institution nationale des invalides pour leur apporter tous les soins nécessaires.

1. Certains indicateurs de performances semblent en voie d'amélioration

L'an dernier, votre rapporteur spécial s'était inquiété de la longueur des délais nécessaires au traitement des pensions militaires d'invalidité.

Pour un objectif à 300 jours, ce sont 353 qui avaient été nécessaires en moyenne pour traiter les dossiers notifiés .

Cette année, une centaine de jours ont été gagnés, un délai moyen de 259 jours séparant la notification d'une demande de son traitement. Le délai correspondant atteint même 180 jours pour les blessés les plus graves du fait de leur participation à des opérations extérieures.

Il faut se réjouir de ces progrès comme de ceux réalisés sur le front du traitement des soins médicaux gratuits ou de la délivrance des titres et cartes par les agents.

Il faut néanmoins garder à l'esprit que la durée de traitement des demandes de pension militaire d'invalidité est une durée moyenne toujours susceptible d'abriter des situations dispersées.

Par ailleurs, tout en faisant ressortir l'amélioration de la gestion des demandes, votre rapporteur spécial ne peut qu'observer que les délais de traitement restent substantiels.

Par ailleurs, il semble que la réorganisation des commissions de réforme des pensions militaires d'invalidité, dont les conditions de fonctionnement appellent une analyse systématique, connaissent quelques difficultés. En témoigne le retrait de l'arrêté du 12 février 2016 qui portait réforme de ces commissions par un arrêté pris un peu plus d'un mois après, le 25 mars 2016.

2. Le programme 158, quelles réparations pour les victimes de spoliations ?

Le programme 158 regroupe plusieurs catégories d'interventions publiques en faveur des victimes, et de leurs ayants droits, de crimes perpétrés pendant la seconde guerre mondiale (victimes de spoliations, de déportation et d'actes de barbarie).

Ses crédits prévus à 101 millions d'euros par la loi de finances initiale ont été amputés de 3,8 millions d'euros par le décret d'avances du 2 décembre 2016. La consommation des crédits disponibles après annulation a été de 95,4 millions d'euros (94,4 % des crédits de la loi de finances initiale et 98,1 % des crédits demeurant ouverts après les mouvements règlementaires).

L'indemnisation des victimes d'actes de barbarie a totalisé 54,3 % des dépenses (soit un taux d'exécution de la loi de finances initiale de 95,4 %). Les autres dépenses ont extériorisé un taux d'exécution légèrement inférieur (94,1 %).

La programmation des indemnisations réservées aux victimes de spoliations avait tablé sur un nombre de dossiers de 325 pour un coût moyen par dossier de 20 000 euros. Finalement, d'après le rapport annuel de performances, 231 recommandations ont été formulées avec un coût moyen par bénéficiaire de 20 741,89 euros. La dépense mise en paiement a été de 4,8 millions d'euros.

Votre rapporteur spécial ne peut que relever la relative modicité du poids budgétaire de ces indemnisations au vu des enjeux financiers de la mission mais aussi du montant cumulé des recommandations d'indemnisation formulées par la commission d'indemnisation des victimes de spoliation (CIVS) depuis sa création au détour des années 2000 (553,9 millions d'euros).

Néanmoins, s'agissant des indemnisations des spoliations, les questions de principe l'emportent sur le poids financier apparent du régime de réparation. Or, sous cet angle, il est apparu, dans l'actualité comme dans les travaux réalisés par la Cour des comptes sur certaines dettes de l'État non soldées, que des contrôles de l'efficacité du dispositif méritaient d'être entrepris.

L'un des éléments importants du dossier concerne les objets d'art. Votre rapporteur spécial est sensible aux questions humaines qu'il pose et a été conduit à s'interroger sur les prolongements éventuels que le défaut de restitution d'objets spoliés pourrait comporter en termes de responsabilité financière pour la France.

Dans ces conditions, il conduit un contrôle relatif aux conditions de la réparation des spoliations de toutes sortes commises pendant la seconde guerre mondiale telles que le programme 158 en a supporté et en supporte encore la juste charge.

MISSION « CONSEIL ET CONTRÔLE DE L'ÉTAT » - M. ALBÉRIC DE MONTGOLFIER, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

1. Une exécution conforme à la programmation pluriannuelle

La loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 a défini le plafond de crédits de paiements (CP) de la présente mission, hors contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », à 0,51 milliard d'euros .

En 2016, les crédits prévus et exécutés, hors contribution de la mission au CAS « Pensions » (qui s'élèvent à 138,1 millions d'euros) ont respecté l'enveloppe pluriannuelle . En effet, les dépenses exécutées ont représenté 0,49 milliard d'euros.

2. La norme de dépenses respectée grâce notamment à des mesures de réorganisation

La mission - qui bénéficie de règles d'exécution budgétaire dérogatoires - a néanmoins participé au respect de la norme de dépense de l'État , par la mise en oeuvre, notamment, de mesures de réorganisation.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère du budget

Elle a effectivement fait l'objet d'annulations en cours d'année , à hauteur de 13,1 millions d'euros en crédits de paiement , grâce notamment à la mise en oeuvre de mesures de maîtrise et réduction des dépenses. Ces économies résultent ainsi, pour partie, de la réforme territoriale (fermeture de sept sièges de chambres régionales des comptes) et du gel temporaire des recrutements dans les juridictions financières ainsi que de la rationalisation des dépenses de fonctionnement (renégociation des baux, optimisation des politiques d'achat public etc. ) dans les juridictions administratives, financières et au Conseil économique, social et environnemental. On observe, notamment, pour le programme 165 (Conseil d'État et autres juridictions administratives), une diminution importante de la dotation « frais de justice » (dépenses d'affranchissement) grâce à l'utilisation accrue de l'application Télérecours. Par ailleurs, une sous-consommation du schéma d'emploi à - 9 EPTP de ce même programme - due à des départs non anticipés en fin d'année et des recrutements retardés - explique également les économies réalisées sur la mission.

Il est également intéressant de souligner l'annulation de près de 25 % des crédits dont a fait l'objet le programme 340 (« Haut Conseil des finances publiques »). Il faudra que le projet de loi de finances pour 2018 tire les conséquences de cette sous-consommation récurrente en ajustant les crédits de ce programme à la baisse.

Par ailleurs, s'agissant du programme 126 (Conseil économique, social et environnemental), les mouvements de crédits portent principalement sur les attributions de produits (3 millions d'euros) issues de la valorisation du Palais d'Iéna.

3. Un taux d'exécution élevé et stable en raison de la forte rigidité des crédits

L'écart entre les crédits prévus en loi de finances initiale et l'exécution est de 15,25 millions d'euros . Cela représente un taux d'exécution de 97,6 % , soit un résultat comparable à 2015 (97,9%) et 2014 (98,6 %). Ce taux d'exécution s'explique notamment par la forte rigidité des crédits de la mission. La masse salariale représente, en effet, près de 85 % des dépenses totales de la mission.

Exécution des crédits de la mission en 2016

(en millions d'euros et en %)

Exécution des crédits de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros et en %)

* Crédits votés en LFI 2016 hors fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Cet écart entre crédits prévus et consommés tient essentiellement aux programme 164 (« Cour des comptes et autres juridictions financières ») et programme 165 (« Conseil d'État et autres juridictions administratives ») qui ont respectivement sous-consommé 7,99 millions d'euros et 9,52 millions d'euros. S'agissant des autorisations d'engagement, près de 30 % des crédits du programme 165 votés en loi de finances pour 2016 (hors titre 2) - destinés principalement à des opérations de travaux liées à des projets d'investissement - n'ont pas été affectés.

S'agissant de l'évolution des crédits exécutés entre 2015 et 2016 , on peut noter également une relative stabilité sur l'ensemble de la mission : les autorisations d'engagement ont diminué de 2,6 % et les crédits de paiement ont augmenté de 0,2 %. Il est néanmoins intéressant de noter l'augmentation de 69 %, entre 2015 et 2016, des crédits exécutés du programme 340 (« Haut Conseil des finances publiques »). Cette hausse s'explique par l'occupation des postes de rapporteurs généraux adjoints, vacants en 2015.

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

A. LE PROGRAMME 165 « CONSEIL D'ÉTAT ET AUTRES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES »

1. Une maîtrise des délais de jugement dans un contexte de progression continue du contentieux

Le délai moyen constaté de jugement des affaires en stock -indicateur principal de performance du programme 165, qui a remplacé le délai prévisible moyen de jugement 51 ( * ) - est relativement stable par rapport à 2015 , sauf pour les cours administratives d'appel dont le délai de jugement augmente, passant de 10 mois et 25 jours à 11 mois et 6 jours.

Cette maîtrise des délais de jugement - facilitée par une politique de création d'emplois (+ 35 ETPT en 2016, comme en 2015, auxquels s'ajoutent 29 reports d'ETPT résultant de l'extension en année pleine du schéma d'emploi 2015) - est à souligner dans un contexte de progression continue du contentieux de masse . Ainsi, le contentieux de la fonction publique et le contentieux fiscal, qui représentent respectivement 11 % et 15 % des entrées des cours administratives d'appel, ont progressé de plus de 10 %.

2. La CNDA, une juridiction renforcée mais qui doit encore relever des défis importants

La Cour nationale du droit d'asile (CNDA) a bénéficié prioritairement des créations de postes du programme 165 pour 2016, en obtenant 10 rapporteurs supplémentaires - auxquels s'ajoutent les 15 rapporteurs recrutés en fin d'année 2015. Ce renforcement des moyens humains a ainsi contribué à la diminution du délai prévisible moyen de jugement , qui passe de 7 mois et 17 jours en 2015 à 5 mois et 15 jours en 2016. De même, le stock d'affaires en instance a été significativement réduit.

Ces résultats apparaissent satisfaisants dans un contexte de progression des entrées de 3,4 % en 2016 . Il convient néanmoins de rester attentif à la situation des juridictions administratives, et de la CNDA en particulier, car ces résultats sont fragiles . La CNDA restera confrontée, dans les années à venir, au double défi que constituent la réforme du droit d'asile et le processus de déstockage des dossiers à l'OFPRA.

B. LE PROGRAMME 126 « CONSEIL ÉCONOMIQUE SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL »

1. La nécessité d'une normalisation du régime budgétaire et comptable

Un projet de refonte du décret du 5 mai 1959 relatif à l'organisation budgétaire et financière du CESE - validé par le ministère des finances et transmis au Secrétariat général du Gouvernement - a été décidé par le CESE 52 ( * ) , afin de « normaliser » son régime budgétaire et comptable . Il prend ainsi en compte les principales dispositions du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique de l'État et prévoit notamment la mise en place de la certification des comptes et d'un contrôle interne.

La mise en oeuvre de cette réforme est d'autant plus souhaitable, que subsistent des fragilités dans l'exécution des crédits du CESE . Ainsi l'existence d'un compte bancaire séparé de l'État suscite des interrogations quant à sa validité et sa régularité au regard des principes d'unité et d'universalité du budget de l'État. La Cour des comptes, dans sa note d'analyse d'exécution budgétaire pour 2016, indique « mettre en doute » la validité de l'autorisation ministérielle accordée, pour trois années, au CESE sur le fondement des dispositions du décret du 7 novembre 2012 précité. Selon elle, le seul fondement juridique - correspondant à l'article 197 du décret - est applicable aux personnes morales de droit public distinctes de l'État et ne peut donc concerner le CESE. Le CESE ne partage pas, en revanche, cette analyse et considère que le projet de refonte du décret précité conférera une « assise juridique » à cette autorisation ministérielle.

Compte tenu de ces observations, votre rapporteur souhaite que le régime budgétaire et comptable du CESE soit, au terme d'une procédure impliquant pleinement le CESE, rapidement clarifié.

2. Un taux de présence et des dépenses de fonctionnement en hausse, de nouvelles orientations stratégiques pesant sur le nombre de rapports en début de mandature

Les débuts de la nouvelle mandature - dont les orientations stratégiques n'ont été votées qu'en février 2016 - ont influé sur le nombre d'avis rendus et d'études produites. La « production intellectuelle », indicateur principal de l'activité du CESE recensant les avis et études produits, est en baisse. Seuls 15 avis ont été rendus en 2016 contre 32 en 2015, aucune étude réalisée en 2016 contre 2 en 2015. En revanche, le taux de présence des conseillers a augmenté, notamment en sections (77 % en 2016 contre 60 % en 2016).

Les dépenses de fonctionnement ont augmenté , avec une hausse des dépenses par membre (18 211 euros en 2016 contre 17 606 euros en 2015). Afin de pallier cette augmentation sur le titre 3, le CESE s'est efforcé de dégager des recettes supplémentaires liées à la valorisation du Palais d'Iéna , qui représentent, en 2016, 7,7 % du budget du CESE en 2016 (soit 3 millions d'euros) contre 4,6 % en 2015 (soit 1,75 million d'euros).

C. LE PROGRAMME 164 « COUR DES COMPTES ET AUTRES JURIDICTIONS FINANCIÈRES »

1. Une exécution marquée par la réorganisation territoriale des juridictions financières

La réduction du nombre de chambres régionales des comptes (CRC) de 15 à 13 - deuxième volet 53 ( * ) de la réorganisation territoriale des juridictions financières - a eu un impact budgétaire sur l'année 2016, alors qu'aucun crédit supplémentaire n'avait été prévu en loi de finances initiale pour cette réforme.

Ces dépenses s'élèvent à 3,68 millions d'euros en 2016 . Elles concernent les dispositifs indemnitaires d'accompagnement à la mobilité des agents pour un montant de 2,22 millions d'euros ainsi que les travaux d'aménagement des sièges de regroupement (Metz et Montpellier) et les frais liés à la fermeture des autres chambres régionales des comptes (Strasbourg, Épinal et Toulouse) pour 1,46 million d'euros. Les dépenses restantes à réaliser sont estimées à 1,5 million d'euros sur 2017 et 0,43 million d'euros sur la période 2018-2023.

Toutefois, compte tenu des économies réalisées (cession de la chambre de Strasbourg à hauteur de 3,9 millions d'euros et économies de loyers de l'ordre de 1 million d'euros par an), la Cour des comptes estime que le coût de réforme sera amorti en moins de trois ans , pour le volet immobilier, et sur une durée légèrement supérieure à cinq ans , en intégrant les coûts liés à la mobilité.

2. Des tensions sur les dépenses de personnel alors que le champ de compétences des juridictions financières s'élargit

L'exécution des crédits, sur l'année 2016, fait poindre des tensions s'agissant des dépenses de personnel, alors que l'expérimentation de la certification des comptes de certaines collectivités territoriales 54 ( * ) et du contrôle des établissements sociaux, médico-sociaux et de santé privés 55 ( * ) constituent de nouvelles compétences pour les juridictions financières depuis 2016.

On observe, en effet, que 97,2 % des crédits ont été consommés malgré une sous-consommation importante du plafond d'emploi (plus de 6 %). Ces tensions risquent de s'amplifier ; 2016 ne constituant que les prémices de l'extension du champ de compétences des juridictions financières.

D. LE PROGRAMME 340 « HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES »

1. Le seul indicateur du programme satisfait à 100 %

Les quatre avis rendus par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) 56 ( * ) ont été transmis au Secrétariat général du Gouvernement, comme chaque année, dans les délais prévus par la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

2. La pertinence du programme toujours en question

Le faible montant de ce programme, la sous-consommation récurrente des crédits prévus et l'absence de mesure réelle de la performance conduisent toujours à s'interroger sur la pertinence de son existence.

La Cour des comptes, interrogée à ce sujet dans le questionnaire budgétaire pour le projet de loi de finances 2017, avait admis qu'elle « ne serait pas opposée pour des raisons de simplification de la gestion à ce que les crédits soient ouverts sur le programme 164 - « Cour des comptes et autres juridictions financières » et soient inscrits sur une action dédiée dudit programme », tout en précisant que la pleine autonomie budgétaire faisait partie des garanties d'indépendance reconnues par les institutions internationales.

MISSION « CULTURE » - MM. VINCENT ÉBLÉ ET ANDRÉ GATTOLIN, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La mission, dont les dépenses se sont élevées en 2016 à 2,7 milliards d'euros en AE et en CP (0,9 % des dépenses nettes 57 ( * ) du budget général), respecte la budgétisation fixée en loi de finances initiale avec un taux d'exécution de 95,5 % en AE et de 99,2 % en CP.

Évolution du taux d'exécution des crédits de la mission « Culture »

(en %)

Note de lecture : le taux d'exécution est calculé par référence aux crédits ouverts en loi de finances initiale, y compris fonds de concours et attributions de produits, et non aux crédits disponibles (qui incluent également les reports de crédits et les mouvements réglementaires intervenus en cours d'exercice).

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui porte les crédits destinés au ministère et les politiques transversales (enseignement supérieur culturel et démocratisation culturelle) représente 42 % des crédits de la mission. Les programmes 175 « Patrimoines » et 131 « Création » ont un poids à peu près équivalent (respectivement 31 % et 27 % des crédits de la mission).

Répartition des crédits de paiement de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Aucun des programmes de la mission ne dépasse le plafond fixé en loi de finances initiale . Le taux d'exécution du programme 131 « Création », qui atteint 99,9 % en CP (99,2 % en AE) est le plus important tandis que celui du programme « Patrimoines » est le plus faible, même s'il reste élevé (91,2 % en AE et 98,2 % en CP).

L'analyse par action fait ressortir des contrastes importants au sein de chaque programme .

Ainsi, concernant le programme 175, l'action 09 « Patrimoine archéologique » a connu un dérapage significatif de l'ordre de 15 millions d'euros, soit 11 % des crédits votés en AE et 12 % en CP. En effet, la subvention allouée à l'Inrap s'est avérée insuffisante pour couvrir les dépenses de l'opérateur ce qui a nécessité des ouvertures supplémentaires en cours d'année par voie de décret d'avance. Au contraire, les actions 01 « Patrimoine monumental » et 04 « Patrimoine archivistique et célébrations nationales » ont été nettement inférieures aux prévisions de la loi de finances initiale, respectivement à hauteur de 30 millions d'euros et 17 millions d'euros (en crédits de paiement). Les crédits annulés portent principalement sur les crédits d'entretien et de restauration des monuments historiques (- 60 millions d'euros en AE, - 50 millions d'euros en CP) et les dépenses d'investissement en matière d'archives (- 23 millions d'euros en AE et 11 millions d'euros en CP).

S'agissant du programme « Création », bien que celui-ci présente un taux d'exécution quasiment égal à 100 %, l'action 02 « Arts plastiques » connaît une nette sous-exécution en crédits de paiement (- 5 % soit -3,4 millions d'euros), là encore liée à des dépenses beaucoup plus faibles que prévu en matière d'investissement, concernant en particulier l'entretien des bâtiments dont le financement est porté par cette action (Mobilier national, Cité de la céramique, Manufacture des Gobelins...). Ces annulations sont compensées par le dépassement des crédits prévus en loi de finances initiale sur l'action 01 « Spectacle vivant » (+ 5 millions d'euros en AE et + 4 millions d'euros en CP) qui trouve principalement sa source dans l'abondement, décidé en cours d'exercice, du fonds d'intervention pour le spectacle vivant mis en place pour soutenir le secteur à la suite des attentats de novembre 2015.

Enfin, au sujet du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », l'action 02 « Soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle » connaît une sur-exécution significative en AE (+ 6 millions d'euros, soit 6 %), portant principalement sur les crédits d'intervention déconcentrés « en direction des jeunes en territoires prioritaires » 58 ( * ) , dans le cadre de la priorité gouvernementale accordée à la jeunesse. Au contraire, est constatée sur le périmètre de l'action 01 « Soutien aux établissements d'enseignement supérieur et formation professionnelle » une consommation des autorisations d'engagement inférieure à l'autorisation votée en loi de finances initiale, qui provient en majeure partie du report de plusieurs opérations immobilières en raison du retard pris par certaines collectivités territoriales, co-financeuses, dans l'adoption des délibérations sur les projets.

Au total, il apparaît que l'engagement de sanctuarisation des moyens d'intervention 59 ( * ) en faveur de la création est bien respecté .

Au regard de l'exécution 2015, l'ensemble des programmes voit les dépenses progresser avec une hausse apparente particulièrement marquée pour le programme 175 « Patrimoines », à hauteur de 14,6 % en AE et 11,7 % en CP.

La comparaison avec l'exécution 2015 doit cependant neutraliser l'effet d'une mesure de périmètre : l'année 2016 a vu la rebudgétisation de la redevance d'archéologie préventive (RAP) qui était jusqu'alors affectée à l'Institut national d'archéologie préventive (Inrap). L'intégralité du budget de l'Inrap est désormais financée par des crédits du budget général et la subvention budgétée à ce titre en 2016 correspondait au produit attendu de la redevance, soit 118 millions d'euros. Une partie de l'augmentation des crédits portés par le programme 175 « Patrimoines » - et partant, de la mission - par rapport à 2015 provient donc d'une modification du financement de cet opérateur.

Hors rebudgétisation de la RAP, les crédits du programme « Patrimoines » diminuent entre 2015 et 2016 , quoique dans des proportions modérées (- 6,7 millions d'euros en AE et 28,1 millions d'euros en CP, soit respectivement - 0,9 % et - 3,7 %).

L'action 01 « Patrimoine monumental » diminue ainsi de 5 millions d'euros en AE et de 10 millions d'euros en CP et l'action 09 « Patrimoine archéologique » accuse également, à périmètre constant, une diminution marquée de l'ordre de 30 millions d'euros (en AE=CP). En revanche, l'action 03 « Patrimoine des musées de France » connaît par rapport à l'exécution 2015 une augmentation marquée tant en AE (+ 28 millions d'euros) qu'en CP (+ 14 millions d'euros) en raison de la compensation par le budget général des pertes de recettes subies par les grands musées parisiens à la suite des attentats de novembre 2015 en raison de l'attrition de la fréquentation.

Exécution des crédits de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données transmises par le ministère du budget)

Les crédits alloués au programme 131 « Création » par rapport à 2015 augmentent de 2,8 % en AE et de 1,0 % en CP . Si les dépenses de l'action 02 « Arts plastiques » sont inférieures aux prévisions de la loi de finances initiale, comme cela a été montré précédemment, elles sont en revanche supérieures à l'exécution 2015 avec une hausse particulièrement significative en AE (+ 9 millions d'euros, soit + 16 % par rapport à 2015) qui témoigne du renforcement de l'action du ministère dans le champ des arts plastiques.

Concernant le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » , l'évolution la plus marquée touche l'action 02 « Soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle » qui augmente de 21 millions d'euros en AE et de 17 millions d'euros en CP (soit une hausse de 25 % en AE et de près de 20 % en CP par rapport à 2015), reflétant la priorité accordée par le ministère et plus largement par le Gouvernement aux actions en faveur de la jeunesse.

Il faut noter que le programme 224 est le seul de la mission « Culture » qui porte des crédits de titre 2 60 ( * ) . Ceux-ci respectent les plafonds votés en loi de finances initiale, soit une hausse par rapport à 2015 de 1,1 %.

Au total, l'exécution 2016 confirme la priorité accordée, depuis le début du quinquennat, à la création (soit au programme 131) et, au sein du programme 131, au spectacle vivant sur les arts plastiques malgré de récentes tentatives de rééquilibrage. Elle traduit également un effort budgétaire plus soutenu en matière de démocratisation culturelle et d'éducation artistique et culturelle (EAC) , prolongé par la loi de finances initiale pour 2017.

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Une exécution 2016 qui, conformément à la budgétisation, marque une hausse bienvenue des crédits

L'exécution de la mission « Culture » en 2016 s'inscrit dans la tendance amorcée en 2015 de rééquilibrage des crédits après la forte baisse intervenue de 2010 à 2014 .

Évolution des dépenses de la mission « Culture » de 2007 à 2016

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents budgétaires)

En effet, le budget de la culture depuis 2007 a connu trois grandes phases : de 2007 à 2010, une hausse régulière des crédits (+ 7,6 % en crédits de paiement au total sur la période) puis, à partir de 2010 et jusqu'en 2014, une réduction très marquée (- 14,4 % en cinq ans) et enfin, sur les dernières années, une légère remontée du budget.

La hausse constatée demeure cependant très modérée puisque l'exécution 2016 est inférieure de 5,5 % aux dépenses de 2007.

Elle n'en est pas moins bienvenue : les coupes budgétaires intervenues à partir de 2010 avaient fragilisé la mission et ses opérateurs , mais aussi l'ensemble des structures qu'elle concourt à financer sur tout le territoire français. En effet, les dépenses d'intervention de la mission, qui représentent près d'un tiers du budget de la culture (840,5 millions d'euros en CP en 2016), irriguent à travers les services déconcentrés des territoires qui, sans cela, seraient éloignés de l'offre culturelle. Or, ces dépenses d'intervention sont plus faciles à réduire que d'autres en raison de leur caractère majoritairement discrétionnaire : moins de 5 % des crédits d'intervention de la mission sont des dépenses « de guichet » (comme des bourses) qui doivent obligatoirement être versées dès lors que les bénéficiaires potentielles correspondent à certains critères. Diminuer le budget de la mission « Culture », ce n'est pas seulement mettre en péril nos grands musées nationaux ou les principales scènes du spectacle vivant, c'est aussi et surtout menacer la vie culturelle de nos territoires.

Il est donc heureux que l'inflexion donnée en 2015 se prolonge en 2016 et, si la budgétisation initiale est respectée par le Gouvernement nommé à la suite des élections présidentielles, en 2017.

2. Un renforcement opportun des actions en matière d'éducation artistique et culturelle

L'augmentation des crédits est inégale selon les programmes et les actions considérés.

Elle est particulièrement sensible en matière de démocratisation de la culture et d'éducation artistique et culturelle : les crédits alloués à l'action 02 « Soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle », qui avaient déjà connu une hausse en 2015, croissent de niveau pour atteindre plus de 105 millions d'euros en 2016 - soit une hausse de plus de 30 % par rapport à 2012 !

Ces actions sont bien ciblées sur les publics qui en ont le plus besoin, comme en témoigne l'indicateur 2.2 du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » qui mesure la part des crédits d'éducation artistique et culturelle dirigés vers les territoires prioritaires par rapport à la proportion d'élèves scolarisés dans ces territoires. La cible de cet indicateur, qui était fixée à 2 en loi de finances initiale pour 2016, a été dépassée et l'exécution fait apparaître un coefficient de 2,7 : en d'autres termes, en 2016, pour chaque euro investi pour un élève sur l'ensemble des territoires non prioritaires, 2,7 euros environ ont été investis pour un élève situé en territoire prioritaire 61 ( * ) .

Évolution du budget alloué aux dépenses en faveur de la démocratisation culturelle et de l'éducation artistique et culturelle entre 2012 et 2016

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents budgétaires)

Évolution de l'effort de développement de l'éducation artistique et culturelle dans les territoires prioritaires

Note de lecture : les chiffres présentés correspondent à l'indicateur 2.2 du programme 224 de la mission « Culture », qui mesure l'effort relatif de développement de l'éducation artistique et culturelle en direction des territoires prioritaires en fonction du nombre d'élèves qui y sont scolarisés.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents budgétaires)

Ce très bon résultat - le meilleur obtenu depuis dix ans - est encourageant et montre que l'augmentation des crédits ne se traduit par un simple « saupoudrage » sur l'ensemble des structures, mais fait l'objet d'une réflexion stratégique afin de toucher les publics les plus éloignés de la culture.

3. Un accompagnement nécessaire du secteur culturel à la suite des attentats de novembre 2015

Plus de trente-cinq millions d'euros de crédits ont été mobilisés en cours d'exercice pour accompagner le secteur culturel, tant privé que public, à la suite des attentats de novembre 2015.

Les structures privées sont ciblées par le fonds de soutien au spectacle vivant 62 ( * ) créé par la loi de finances rectificative pour 2015 63 ( * ) . Géré par le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV), le fonds d'urgence était doté initialement de 6,065 millions d'euros dont environ 4 millions d'euros de crédits du budget de l'État. Il peut intervenir pour la quasi-totalité des structures de spectacle vivant du secteur privé : il s'agit de théâtres, mais aussi de salles de concert, de cabarets, de cirques... Le fonds d'urgence intervient selon deux axes : la compensation partielle de pertes de recettes, liées à la chute de la fréquentation, et l'aide à la mise en sécurité des salles. Il attribue à la fois des aides financières directes, c'est-à-dire des subventions, qui représentent 88 % de l'enveloppe globale, et des avances remboursables sur une période maximale de deux ans. Il a fait l'objet d'un abondement de 7 millions d'euros au cours de l'exercice 2016, soit un engagement total des crédits du ministère de 11 millions d'euros en 2016 au profit du spectacle vivant privé.

Sur le programme 175, le dégel de la réserve de précaution en fin d'exercice a permis de répartir 25 millions d'euros de dotations complémentaires entre les opérateurs, à la fois pour les aider à financer leurs dépenses de sécurisation (installation de portiques, recrutement de vigiles...) mais aussi pour compenser partiellement la baisse des recettes liée à l'attrition de la fréquentation. En effet, la diminution du nombre de touristes internationaux fragilise les grands musées nationaux à plusieurs titres : elle contribue bien sûr à réduire les recettes de billetterie, mais elle a aussi un impact significatif sur les recettes des boutiques installées au sein des musées, dont les principaux clients n'étaient pas français.

Au total, ce sont donc 36 millions d'euros - soit, à titre de comparaison, 5 % du budget annuel du programme « Patrimoines » - que le ministère de la culture a redéployés afin d'aider les opérateurs culturels à traverser cette période difficile qui voit les coûts de fonctionnement des structures augmenter, en lien avec les dispositifs de sécurisation, mais aussi les recettes diminuer, en raison de la baisse de la fréquentation.

Cet accompagnement était nécessaire et la capacité du ministère à mobiliser des crédits pour des dépenses supplémentaires, sans pour autant que l'un ou l'autre des programmes budgétaires ne connaisse un dérapage, doit être soulignée.

La question qui se pose désormais est celle de la pérennisation de ces dotations : afin d'anticiper d'éventuels besoins budgétaires, il serait utile de mener une enquête approfondie, avant la fin de l'année, sur l'impact direct et indirect des attentats sur les opérateurs culturels publics et privés pour mieux comprendre si un « retour à la normale » peut être attendu dans un futur proche ou si le secteur est durablement fragilisé.

4. Un lourd programme immobilier qui fait peser des risques sérieux sur la soutenabilité du budget à horizon 2020

Plusieurs programmes de travaux sur le périmètre de la mission « Culture » ont été lancés ou annoncés en 2016 et sont susceptibles de déséquilibrer le budget culturel.

Doivent être cités les schémas directeurs de Versailles, du Louvre, la rénovation de deux théâtres nationaux (Chaillot et Opéra-Comique) mais aussi la restructuration du quadrilatère Richelieu, la réorganisation des archives nationales avec la fermeture du site de Fontainebleau et le transfert des archives qui y étaient conservées, ainsi qu'un projet de très grande ampleur (466 millions d'euros) concernant le Grand Palais.

Des travaux sont en cours à la Cité de la céramique Sèvres-Limoges et sur les sites du Mobilier national. Le relogement du Centre national des arts plastiques a également été annoncé en 2016 et devrait être lancé en 2017.

Sont prévus de nombreux travaux de réhabilitation et d'extension des écoles d'enseignement supérieur rattachées à la mission, ainsi que l'ouverture au public de l'Hôtel de la Marine, ou encore le schéma directeur du Centre Pompidou et celui du château de Fontainebleau.

Le nouveau schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) du ministère de la culture et de la communication, validé par le secrétaire d'État chargé du budget en mars 2016, prévoit la non-reconduction du bail du site de la rue Beaubourg et la cession de deux bâtiments. Si ce regroupement des sites de l'administration centrale du ministère devrait permettre, à terme, de réaliser des économies, il est probable qu'il crée dans un premier temps des coûts supplémentaires liés au déménagement des services.

Le Président de la République a également annoncé le 24 octobre 2016 la construction d'une Cité du théâtre sur le site des ateliers Berthier, pour un montant prévu à 150 millions d'euros.

Au total, le coût des travaux annoncés dépasse 1,5 milliard d'euros, dont au moins 500 millions d'euros pèseraient directement sur l'État. Si les crédits déjà engagés restent limités (à titre d'exemple, 150 millions d'euros en crédits de paiement ont été budgétés pour 2017 à ce titre), ils augmenteront nécessairement dans les années à venir.

Dans un contexte budgétaire contraint, ce lourd programme immobilier exige donc des redéploiements importants, qui doivent être anticipés au plus vite afin de permettre aux acteurs culturels de se préparer.

Or, comme cela avait déjà été souligné lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2017, il est pour l'instant difficile d'affirmer que le coût de l'ensemble des travaux est correctement anticipé et qu'une réflexion stratégique sur la priorisation des différents chantiers à l'échelle de la mission est lancée .

Le programme immobilier de la mission doit donc faire l'objet d'un suivi particulièrement attentif dans les années à venir et les hypothèses initiales d'estimation des coûts doivent être très prudentes au regard du dépassement quasi systématique des enveloppes prévisionnelles afin de garantir la soutenabilité budgétaire de la mission pour les années à venir.

Le risque immobilier est d'autant plus important que le ministère a procédé en 2016 à des annulations importantes sur les crédits d'entretien des monuments historiques (programme 175 « Patrimoines ») et de certains bâtiments liés au programme 131 « Création ». Les crédits d'entretien devraient être sanctuarisés : le maintien en condition opérationnelle des bâtiments - qui pour nombre d'entre eux présentent des qualités patrimoniales remarquables - est nécessaire afin d'éviter, dans le futur, des travaux extrêmement coûteux réalisés dans l'urgence.

5. Une absence d'outils en matière de suivi et d'évaluation des dépenses fiscales culturelles à laquelle il faut remédier au plus vite

En 2016, 22 dispositifs fiscaux sont rattachés à titre principal à la mission « Culture » (14 sur le programme 175 « Patrimoines » et huit sur le programme 131 « Création »), contre 26 en 2015 64 ( * ) , et représentent un montant total de 362 millions d'euros - soit près de 14 % des crédits budgétaires de la mission. Elles ont crû, à périmètre constant, de 68 millions d'euros par rapport à 2015 (+ 23 %).

L a quasi-totalité de la hausse est liée aux dépenses portées par le programme 175 « Patrimoines », en particulier à la réduction d'impôt sur les sociétés pour les entreprises ayant effectué des versements en faveur de l'achat de trésors nationaux et autres biens culturels spécifiques 65 ( * ) . Il est très probable que ce surcroît de dépense fiscale provienne du mécénat accordé par la Banque de France pour aider le Louvre à procéder à l'achat d'un des deux tableaux de Rembrandt mis en vente par la famille Rothschild pour un montant de 80 millions d'euros.

Dépenses fiscales de la mission « Culture » en 2015 et 2016

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents budgétaires)

Le poids et le dynamisme des dépenses fiscales culturelles, renforcé par la création fréquente de nouveaux dispositifs, appellent des évaluations rigoureuses des dispositifs les plus coûteux afin d'en cerner l'efficacité et l'efficience.

Or non seulement de telles évaluations ne sont pas conduites, mais le « dialogue de sourd » entre le ministère du budget et celui de la culture sur le sujet des dépenses fiscales, déjà relevé par Vincent Éblé dans son rapport sur les niches fiscales relatives au patrimoine historique de 2015 66 ( * ) , demeure d'actualité . Ainsi, le ministère de la culture indique ne pas disposer, dans la plupart des cas, des données chiffrées nécessaires au suivi des dépenses fiscales - qui sont centralisées par la direction générale des finances publiques (DGFiP) du ministère des finances. Le ministère des finances semble, quant à lui, considérer que les dépenses fiscales culturelles sont d'abord du ressort du ministère de la culture et que c'est à ce dernier de procéder aux travaux d'analyse de leur impact.

Il semble indispensable qu'une évaluation des dépenses fiscales culturelles les plus coûteuses soit conduite rapidement, de manière concertée, par le ministère de la culture et le ministère des finances . Un suivi détaillé des questions fiscales apparaît d'autant plus nécessaire que l'actuel contexte budgétaire tendu ne permet ni de se passer d'outils fiscaux incitatifs efficaces, ni de diminuer sans réelles contreparties les recettes du budget de l'État.

6. Un pilotage difficile des emplois des opérateurs malgré une intégration accrue à la démarche de performance

La mission « Culture » compte 73 opérateurs, soit près de 15 % du total des opérateurs de l'État. Ceux-ci bénéficient de près de 40 % des crédits budgétaires de la mission. Comme le relève la Cour des comptes dans sa note d'exécution budgétaire (NEB) relative à l'année 2016, « ils constituent donc un enjeu important de maîtrise des dépenses ».

Or le suivi des emplois des opérateurs paraît pouvoir être amélioré .

Ainsi, la Cour des comptes indique que « le ministère de la culture n'a obtenu que très tardivement des établissements l'intégralité des exécutions en emploi de titre 3 » et que, concernant les emplois financés par des dépenses de titre 2, « le ministère ne peut communiquer cette année que des données partielles sur les emplois État affectés dans les opérateurs ». En 2016, le ministère n'avait pas pu fournir d'éléments précis concernant le nombre d'emplois hors plafond exécutés en 2015, ce qui empêche toute comparaison, alors même que les emplois hors plafond appellent une vigilance renforcée.

Cette situation ne saurait perdurer et il est impératif que le ministère se dote des outils nécessaires pour connaître et piloter les emplois des opérateurs .

Cependant, l'année 2016 a aussi vu un renforcement de l'intégration des opérateurs à la démarche de performance .

Évolution des principaux indicateurs de participation des opérateurs à la démarche de performance entre 2012 et 2016

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de la Cour des comptes)

Ainsi, 9 nouveaux contrats d'objectifs et de performance (COP) ont été signés en 2016 , permettant de couvrir 53 % du montant total des subventions pour charge de service public (SCSP) versées au titre de la mission « Culture », ce qui représente une amélioration significative par rapport à l'exécution 2015 qui voyait seulement 35 % des SCSP couvertes par un tel dispositif. En outre, le nombre élevé de contrats de performance en cours de préparation laisse penser que cette tendance se poursuivra en 2017.

MISSION « DÉFENSE » - M. DOMINIQUE DE LEGGE, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

En 2016, contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions » (CAS « Pensions ») comprise, les dépenses de la mission « Défense » se sont élevées à 42,2 milliards d'euros en AE et 41,1 milliards d'euros en CP , soit une progression de 216 millions d'euros en AE et de 165 millions d'euros en CP par rapport à l'exécution 2015 .

L'augmentation des dépenses par rapport à 2015 est essentiellement imputable à une hausse des dépenses des programmes 212 « Soutien de la politique de défense » et 178 « Préparation et emploi des forces », à hauteur de respectivement 466 millions d'euros et 193 millions d'euros en AE et de respectivement 290 millions d'euros et 271 millions d'euros en CP. En revanche, les dépenses du programme 146 « Équipement des forces » diminuent à hauteur de 400 millions d'euros en AE et de 376 millions d'euros en CP .

Si une sous-exécution importante peut être en constatée en AE (-4 milliards d'euros, correspondant à un taux de consommation de 91,3 %), les crédits ont fait l'objet d' une surconsommation en CP (+ 766 millions d'euros, correspondant à un taux de consommation de près de 102 %).

En particulier, l'exécution du programme 146 a été très inférieure aux prévisions tant en AE (- 4,2 milliards d'euros, expliquant l'essentiel de la sous-consommation des AE de la mission) qu'en CP (- 183 millions d'euros).

Évolution des dépenses de la mission « Défense » en autorisations d'engagement

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Évolution des dépenses de la mission « Défense » en crédits de paiement

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

L'augmentation des AE entre 2015 et 2016 résulte pour l'essentiel d'une hausse des dépenses de titre 2 (personnel), à hauteur de 184 millions d'euros, et de titre 5 (investissement), à hauteur de 692 millions d'euros. Les dépenses de fonctionnement diminuent de près de 800 millions d'euros par rapport à l'exécution 2015.

La sous-consommation des AE constatée en 2016 résulte quant à elle d'une très forte sous-exécution des crédits d'investissement (- 6,5 milliards d'euros) malgré une forte sur-consommation des crédits de personnel (+ 2,3 milliards d'euros).

Évolution des dépenses en autorisations d'engagement par titre

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

En CP, la hausse constatée en 2015 et 2016 est imputable à une augmentation des dépenses de personnel (+ 184 millions d'euros) et d'investissement (+ 211 millions d'euros), malgré une diminution significative des dépenses de fonctionnement (- 317 millions d'euros).

L'écart aux prévisions résulte notamment de dépenses de fonctionnement très supérieures aux prévisions (+ 1,5 milliard d'euros) plus que compensant la sous-exécution constatée s'agissant des dépenses d'investissement (- 884 millions d'euros).

Évolution des dépenses en crédits de paiement par titre

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Au total, si la consommation de crédits de paiement a été supérieure de 766 millions d'euros aux prévisions, elle est inférieure de 752 millions d'euros aux crédits ouverts. Cette sous-consommation résulte à hauteur de 672 millions d'euros de crédits ouverts en loi de finances rectificative et ayant fait l'objet d'un gel immédiat (cf. infra ).

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Prog.

LFI 2016 (y.c FDC et ADP)

Virement ou transfert

Décrets d'avance

Reports entrants

Fonds de concours et attributions de produits

LFR de fin de gestion

Crédits ouverts*

Exécution 2016

Écart consommé/ prévu

Écart consommé/ ouverts

144

1 291,4

32,4

0,0

0,0

0,4

0,0

1 324,0

1 324,0

32,7

0,0

178

7 590,0

70,0

636,8

4,6

374,0

0,0

8 362,6

8 323,5

733,5

- 39,1

212

21 483,8

40,2

194,1

1,8

300,1

0,0

21 704,2

21 666,0

182,3

- 38,1

146

10 016,4

- 124,2

- 671,9

592,0

88,1

671,9

10 508,8

9 833,9

- 182,5

- 674,8

Total

40 381,6

18,5

159,0

598,3

762,5

671,9

41 899,6

41 147,5

765,9

- 752,1

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le montant des restes à payer de la mission « Défense » au 31 décembre 2016 s'élevait, selon le compte général de l'État, à 50,4 milliards d'euros . Ils sont principalement « liés à des programmes d'armement à effet majeur (pour lesquels les livraisons et les paiements s'étalent sur plusieurs années) et à des opérations d'entretien programmé du matériel (pour lesquelles des marchés pluriannuels sont conclus notamment au profit des aéronefs, des navires ou des véhicules blindés) ».

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Un exercice 2016 traduisant les conséquences de l'actualisation de la loi de programmation militaire et des décisions du conseil de défense d'avril 2016

À la suite des attentats de janvier 2015, il a été décidé lors du conseil de défense du 29 avril 2015 de redéfinir le contrat opérationnel des forces terrestres .

La loi actualisant la programmation militaire avait ainsi prévu une montée en puissance de la force opérationnelle terrestre (FOT), dont les effectifs devaient passer de 66 000 hommes à 77 000 hommes d'ici la fin de l'année 2017. Afin d'atteindre cet objectif, une décélération du nombre de postes supprimés dans la défense était prévue . À la fin de la programmation, 14 925 ETP auraient dû être supprimés, contre 33 675 ETP dans le cadre de la loi de programmation militaire initiale, soit un nombre de suppressions de postes inférieur de 18 750 aux objectifs fixés dans la loi de programmation militaire initiale .

Les postes ainsi préservés étaient prioritairement destinés au soutien humain et logistique de l'opération Sentinelle ainsi qu'au renforcement des moyens humains consacrés au renseignement et à la cyberdéfense .

À la suite des attentats de novembre 2015, une nouvelle trajectoire des déflations d'effectifs a été définie , conformément aux orientations fixées par le Président de la République François Hollande devant le Parlement réuni en Congrès le 13 novembre 2015 et entérinées lors du conseil de défense du 6 avril 2016. Celle-ci n'a cependant pas fait l'objet d'une nouvelle actualisation de la loi de programmation militaire.

Évolution prévisionnelle du schéma d'emplois de la mission « Défense »

(en ETP)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Total

LPM

- 7 881

- 7 500

- 7 397

- 7 397

- 3 500

0

- 33 675

LPM actualisée

- 8 007

0

2 300

- 2 600

- 2 800

- 3 818

- 14 925

Annonces du Président de la République

- 8 007

0

2 300

400

200

182

- 4 925

Source : ministère de la défense

Fin 2019, le nombre total de suppressions de postes devrait atteindre 4 925 ETP, soit une diminution du nombre de postes inférieure de 10 000 ETP à la trajectoire actualisée et de 28 750 ETP à la trajectoire initiale .

Trajectoire des déflations d'effectifs à la suite des annonces du Président de la République

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat

2. Une consommation du schéma d'emplois proche des prévisions initiales mais ne permettant pas de réduire la sous-exécution constatée en 2015

Schéma d'emplois 2016

(en ETP)

Catégorie d'emplois

Sorties

dont départs en retraite

Mois moyen des sorties

Entrées

dont primo recrutements

Mois moyen des entrées

Schéma d'emplois

Schéma d'emplois

Réalisation

Prévision PAP

Catégorie A (personnels civils titulaires et non titulaires)

1 029

221

6,5

1 541

936

8,2

512

410

Catégorie B (personnels civils titulaires et non titulaires)

1 013

298

6,2

1 202

423

7

189

115

Catégorie C (personnels civils titulaires et non titulaires)

2 111

388

5,6

1 868

919

7,2

- 243

- 134

Ouvriers de l'État

1 542

760

6,7

590

337

7,1

- 952

- 1 172

Officiers

2 377

844

6,5

2 248

1 105

7,6

- 129

- 50

Sous- officiers

8 181

3 363

6,4

8 797

3 230

7,6

616

1 079

Militaires du rang

16 796

1 174

6,9

19 246

17 324

7,1

2 450

2 072

Volontaires

1 999

7,4

1 845

1 634

7

- 154

- 20

Total

35 048

7 048

37 337

25 908

2 289

2 300

Source : rapport annuel de performances pour 2016

Le schéma d'emplois pour 2016 s'élève à 2 289 ETP, soit un taux de consommation de plus de 99,5 %.

S'agissant des départs, le volume des flux de sorties (35 048 ETP) est en diminution par rapport à celui observé en 2015 (36 033 ETP) , ce qui semble cohérent avec l'objectif de fidélisation des personnels que se sont fixé les armées.

S'agissant des entrées, si l'accélération des recrutements (37 337 ETP en 2016 contre 35 388 ETP en 2015) a compensé un nombre de départs de personnel civil plus nombreux que prévu, les flux d'entrée n'ont en revanche pas permis d'atteindre la cible de 2 300 créations de postes. Cet objectif avait en outre été majoré à hauteur de 644 ETP afin de combler le déficit constaté en 2015. Au total, la cible du schéma d'emplois pour 2016 s'élevait donc à 2 944 ETP .

L'écart à la cible s'élève donc à - 655 ETP, soit un taux de consommation du schéma d'emplois s'établissant à 77,8 % . Il résulte pour l'essentiel d'un déficit d'emplois militaires s'élevant à 649 ETP.

Selon le rapport annuel de performances pour 2016, celui-ci affecte en particulier « la catégorie des sous-officiers en raison d'un volume de sorties supérieur aux prévisions pour l'armée de terre et l'armée de l'air, cumulé à des difficultés de recrutement apparues en fin d'année 2016 au sein de l'armée de l'air ».

Cet écart, qui devra être pris en compte « dans la programmation de la gestion 2017 à titre de rattrapage », fera l'objet d'une attention particulière de votre rapporteur spécial lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2018.

3. Une augmentation des dépenses de personnel de près de 150 millions d'euros liée au schéma d'emplois et aux mesures générales et catégorielles

Hors contribution au CAS « Pensions », les dépenses de personnel se sont élevées à 11,7 milliards d'euros, soit une hausse de 146 millions d'euros par rapport à l'exécution 2015 (+ 1,27 %).

Cette augmentation résulte à hauteur de 33 millions d'euros du schéma d'emplois (extension en année pleine du schéma d'emplois 2015 et schéma d'emplois 2016).

L'impact des mesures générales s'est quant à lui élevé à 33,2 millions d'euros, dont 25 millions d'euros au titre de la seule revalorisation du point d'indice de la fonction publique intervenue en juillet 2016 (+ 0,6 %).

Enfin, les mesures catégorielles se sont traduites par un coût de 90 millions d'euros en 2016 .

Deux mesures décidées lors des conseils de défense des 6 avril et 3 août 2016 et faisant partie du plan d'amélioration de la condition du personnel (PACP) méritent d'être plus spécifiquement évoquées.

En premier lieu, afin de prendre en compte les difficultés rencontrées par les personnels pour prendre l'ensemble des sept jours de permissions complémentaires planifiées (PCP), il leur a été versé une indemnité correspondant à la monétisation de deux jours de PCP sous la forme d'une indemnité pour temps d'activité d'obligations professionnelles complémentaires (ITAOPC). Le coût de cette mesure s'est élevé à 36 millions d'euros en 2016 .

Par ailleurs, le taux journalier de l'indemnité d'alerte opérationnelle (AOPER), attribuée en 2015 aux militaires mobilisés dans le cadre de l'opération Sentinelle, a été doublé, passant de 5 euros à 10 euros . Cette mesure, rétroactive au 1 er juin 2016, a représenté une dépense de 10,3 millions d'euros en 2016 .

4. Des surcoûts liés aux OPEX et aux OPINT supérieurs à 1,3 milliard d'euros en 2016

La loi de programmation militaire fixe une prévision de dépense au titre du surcoût liée aux opérations extérieures (OPEX) s'élevant à 450 millions d'euros par an.

Bien qu'irréaliste dès l'adoption de la LPM, celle-ci n'a pas été modifiée lors de l'actualisation de 2015, ni remise en cause par les lois de finances qui se sont succédé depuis.

Dans le cadre de la loi de finances pour 2016, 450 millions d'euros avaient ainsi été inscrits au titre du surcoût OPEX, dont 280 millions d'euros (hors titre 2) sur l'action 06 « Surcoûts liés aux opérations extérieures » du programme 178 « Préparation et emploi des forces » et de 170 millions d'euros (titre 2) sur l'action 59 « Surcoûts liés aux opérations - Personnels travaillant pour le programme " Préparation et emploi des forces " » du programme 212 « Soutien de la politique de défense ».

S'agissant des opérations intérieures (OPINT), seuls 26 millions d'euros (titre 2) avaient été inscrits en loi de finances pour 2016 sur l'action 59 du programme 212.

Au total, le montant des surcoûts liés aux OPEX et aux OPINT s'est élevé à plus de 1,3 milliard d'euros en 2016 , dont 1 , 17 milliard d'euros au titre du surcoût OPEX et 189 millions d'euros au titre du surcoût OPINT .

La loi de programmation militaire prévoit que le montant du surcoût lié aux OPEX excédant la dotation inscrite en loi de finances initiale doit faire l'objet d'un financement interministériel . Le décret n° 2016-1652 du 2 décembre 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance a ainsi procédé à une ouverture de 831 millions d'euros en AE comme en CP pour le financement des opérations extérieures et intérieures, dont 636,9 millions d'euros sur le programme 178 « Préparation et emploi des forces », 7,1 millions d'euros pour les dépenses hors masse salariale et 187 millions d'euros pour les dépenses de personnel sur le programme 212 « Soutien de la politique de la défense ». Sur ce montant 145,2 millions d'euros étaient destinés au financement du surcoût des OPINT et 685,8 millions d'euros à celui des OPEX.

Cette modalité de financement des surcoûts liés aux OPEX et aux OPINT n'est pas neutre pour le ministère de la défense . Comme le notait votre rapporteur spécial dans un rapport consacré au financement des OPEX 67 ( * ) , du fait de l'indisponibilité des crédits voire de la « ponction » opérée dans le cadre de la solidarité interministérielle, « il pourrait s'avérer nécessaire de reporter ou d'étaler des programmes . [...] Le report ou l'étalement de programmes - en contradiction avec les dispositions de la loi de programmation militaire - dans un contexte où les taux de réalisation des équipements sont déjà inférieurs à 100 % [...] , s'avérerait donc catastrophique pour le ministère de la défense qui ne disposerait plus de moyens matériels suffisants pour la poursuite des opérations en cours ou l'engagement de nouvelles opérations ».

Par ailleurs, comme le note la Cour des compte dans son analyse de l'exécution 2016 des crédits de la mission « Défense », le financement interministériel des surcoûts liés aux OPEX et aux OPINT apparaît dans une large mesure artificiel dans la mesure où « in fine, ce sont seulement 6 % des dépenses en 2015 et 8 % en 2016 qui ont été supportées par les crédits des autres ministères ».

C'est pourquoi, ainsi que votre rapporteur spécial l'appelait de ses voeux dans son rapport précité, il apparaît indispensable d'inscrire en loi de finances un montant sincère du « surcoût OPEX » , par exemple fondé sur les montants constatés au cours des cinq dernières années et de prévoir que l'éventuel surcoût non prévu soit pris en charge via un financement interministériel . Cette solution permettrait aux ministères d'identifier des sources d'économie en amont, au moment de la construction du budget de l'État et non en fin de gestion. Le projet de décret d'avance notifié par le Gouvernement au Parlement le 12 juillet dernier, qui prévoit l'annulation de 850 millions d'euros en CP sur le programme 146 « Équipement des forces », c'est-à-dire le financement quasi intégral du surcoût des OPEX et des OPINT par le ministère de la défense seul, et qui se traduira par des reports ou des annulations de programmes d'équipement, souligne la nécessité d'inscrire une provision juste dès la loi de finances initiale.

Un mécanisme comparable devrait en outre être mis en place s'agissant du surcoût des opérations intérieures .

5. Une consommation des crédits de titre 5 ne reflétant qu'imparfaitement la dépense réelle en matière d'investissements

L'exécution 2016 en matière de dépenses d'investissement apparaît contrastée.

En effet, si une progression importante peut être constatée par rapport à l'exercice 2015, tant en AE (+ 692 millions d'euros) qu'en CP (+ 211 millions d'euros), les crédits de titre 5 ont été très fortement sous-consommés en AE (- 6,5 milliards d'euros) et en CP (- 884,5 millions d'euros) .

S'agissant des AE, cette sous-consommation des crédits de titre 5 est principalement portée par le programme 146 « Équipement des forces » (-6 milliards d'euros par rapport aux prévisions). Celle-ci résulte de plusieurs facteurs.

En premier lieu, elle peut être liée à des modifications de calendrier de réalisation d'une opération. Cela est par exemple le cas s'agissant de la deuxième étape de l'opération « Contact » 68 ( * ) , qui sera lancée en 2018 et non en 2016.

Par ailleurs, pour la réalisation de ses opérations d'équipement, le ministère de la défense a recours au mécanisme d'affectation sur tranche fonctionnelle. Dans une réponse à notre collègue député François Cornut-Gentile 69 ( * ) , le ministère de la défense rappelle ainsi que « l'article 8 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, les AE affectées sur des tranches fonctionnelles couvrent un ensemble cohérent (opération d'investissement) de nature à être mis en service ou exécuté sans adjonction. L'affectation d'AE sur tranche fonctionnelle constitue la limite supérieure du montant de l'opération d'investissement à couvrir et est accompagnée d'un échéancier pluriannuel d'engagements et de paiements . Ces affectations donnent donc au législateur et au Gouvernement une visibilité sur les engagements à venir ». Les AE affectées mais non consommées font l'objet d'un report en année N+1 et sur les années suivantes.

Des AE peuvent par conséquent être affectées sur tranche fonctionnelle mais ne pas être consommées en totalité l'année considérée . Cela a par exemple été le cas en 2016 s'agissant de l'opération « Scorpion » 70 ( * ) : 1,2 milliard d'euros d'AE ont été affectés sur tranche fonctionnelle mais 51,8 millions d'euros seulement ont été engagés.

Par ailleurs , à coût global d'une opération inchangé, le niveau de chargement des tranches fonctionnelles peut être modifié afin, notamment, de tenir compte du montant d'AE disponibles. Cela a par exemple été le cas s'agissant des opérations « MRTT » 71 ( * ) et « Barracuda » 72 ( * ) .

S'agissant des CP, l'écart à la prévision peut également résulter de plusieurs facteurs.

Il s'explique tout d'abord par une évolution de l'échéancier de paiements, cela est par exemple le cas pour l'opération « Barracuda » , afin de prendre en compte le retard de livraison du premier sous-marin Barracuda « Le Suffren », qui interviendra en 2019 et non en 2017 comme prévu initialement.

Il peut également être lié à l'insuffisance des ressources disponibles en 2016 (résultant notamment du gel de crédits sur le programme 146, et à l'« application du principe de gestion mutualisée des ressources au niveau du programme P. 146. Ainsi, [...] une partie des paiements prévus en 2016 en PLF a basculé dans le solde sortant de la gestion 2016 et a été payé début 2017 »), comme cela a été le cas pour l'opération « Scorpion ».

Dans sa réponse au questionnaire de votre rapporteur spécial, le ministère de la défense indique donc de manière surprenante qu'il n'y a pas de « comparaison possible entre les crédits consommés (engagements hors tranche fonctionnelle et sur tranche fonctionnelle) et les crédits LFI » .

Au total, comme le note la Cour des comptes dans son analyse de l'exécution budgétaire 2016, « les dépenses de titre 5 ne reflètent pas la totalité des investissements effectivement réalisés car une partie d'entre eux est portée par des crédits de titre 3 ». Au total, selon la Cour des comptes, « l'agrégat " équipement " qui permet d'analyser les dépenses d'investissement avait connu une nette croissance en 2015 (17,3 Md€ contre 15,8 Md€ en 2014) et se stabilise à ce niveau en 2016 (17,3 Md€), au-delà du montant programmé en LFI de 16,7 Md€ ».

6. Un exercice marqué une nouvelle fois par d'importantes tensions en gestion

En 2016, la mission « Défense » a été soumise à de très fortes tensions en gestion en raison d' une régulation budgétaire erratique .

Ainsi, une partie des crédits issus de la rebudgétisation des recettes issues de cessions de fréquences qui n'avaient pas pu être consommées en 2015 ont été reportés en 2016 à hauteur de 597 millions d'euros, dont 590 millions d'euros sur le programme 146. Ces crédits ont cependant été gelés dès le 1 er avril 2016 .

Par ailleurs, le montant de la réserve initiale s'est élevé à plus de 2 milliards d'euros en AE et 1,7 milliard d'euros en CP . Un surgel a en outre été opéré sur le programme 146 à hauteur de 470 millions d'euros en AE comme en CP le 13 mai 2016 .

Au total, ce sont donc près de 2,8 milliards d'euros de crédits de paiement qui ont été gelés jusqu'au mois d'octobre 2016 .

Afin d'éviter « la rupture de paiement et d'engagement », la réserve de précaution a cependant été progressivement levée entre octobre et décembre 2016. Comme le relève la Cour des comptes dans son analyse de l'exécution budgétaire 2016, « l'année 2015 avait donné lieu à des tensions de trésorerie du fait de la budgétisation tardive des ressources exceptionnelles issues du CAS Fréquences (2,2 Md€ de CP ouverts en LFR le 29 décembre 2015). Durant l'année 2016 la régulation budgétaire, particulièrement rigoureuse, a conduit à reproduire ces difficultés ».

Par ailleurs, l'exécution 2016 a donné lieu à des pratiques budgétaires contestables . 672 millions d'euros ont ainsi été annulés par décret d'avance sur le programme 146 avant d'être rouverts en loi de finances rectificative, gelés et reportés en 2017 avant d'être à nouveau gelés au titre de 2017 . Comme le notait notre collègue Albéric de Montgolfier, rapporteur général, dans son rapport sur le décret d'avance relatif à la fin de gestion 2016 73 ( * ) , « l'analyse des crédits annulés montre que l'équilibre entre ouvertures et annulations est artificiel : 290 millions d'euros en AE et 672 millions d'euros en CP sont annulés sur le programme 146 de la mission " Défense ", mais des crédits de même montant devraient être ouverts sur le même programme par le projet de loi de finances rectificative. En d'autres termes, l'annulation de ces crédits n'est qu'une astuce comptable, qui ne correspond aucunement à de réelles économies . Certes, la préservation des moyens de la défense est nécessaire et il ne semble pas qu'une annulation de près de 700 millions d'euros sur la mission " Défense " soit soutenable au regard des tensions budgétaires qu'elle connaît et des nombreuses opérations dans lesquelles est engagée l'armée française . Cependant, ce jeu d'écriture témoigne de l'incapacité du Gouvernement à réaliser de réelles économies pour faire jouer la solidarité interministérielle ».

Les 590 millions d'euros reportés de 2015 vers 2016 n'ont donc pas pu être consommés en 2016 .

7. Des niveaux d'entraînement et de disponibilité des matériels qui demeurent insatisfaisants

S'agissant de l'armée de terre, le nombre de journées de préparation opérationnelle s'est élevé à 72 pour une norme fixée dans la loi de programmation militaire à 90 jours et une prévision inscrite dans le projet annuel de performances s'établissant à 83 jours. Cet écart s'explique par le niveau d'engagement, en particulier sur le territoire national, dans le cadre de l'opération Sentinelle, qui n'a pas permis aux militaires de participer à l'ensemble des activités de préparation opérationnelle programmées.

S'agissant de la marine, l'activité des bâtiments de surface correspond à 92 % de la norme fixée dans la loi de programmation militaire (100 jours de mer). L'activité aéronautique apparaît en revanche supérieure aux prévisions et aux normes fixées dans la LPM (263 heures de vol pour les pilotes qualifiés appontage de nuit, soit un écart de + 20 % par rapport à la prévision 2016, 230 heures de vol pour les pilotes non qualifiés appontage de nuit, soit un écart de + 28 % par rapport à la prévision 2016). Or, comme le note le rapport annuel de performances pour 2016, « ce rythme élevé des vols opérationnels a pour conséquence une réduction des heures de formation des pilotes non opérationnels, situation pénalisante à court et moyen termes ».

Enfin, s'agissant de l'armée de l'air, le bilan apparaît contrasté. Si l'activité des pilotes de chasse est supérieure aux prévisions (+ 3 %), cela n'est pas le cas pour les équipages d'hélicoptères (- 8 %), en raison de « difficultés logistiques et de maintien en condition opérationnelle », ni pour les équipages de transport (- 30 %), du fait de « la faible disponibilité des flottes vieillissantes » qui n'est « toujours pas compensée par la montée en puissance des nouveau appareils (A400M) qui souffrent d'un manque de maturité technique ».

Par ailleurs, comme le souligne le rapport annuel de performances pour 2016, « une grande partie des heures de vol étant réalisée en opérations (40 % pour les Mirage 2000D, 27 % pour le transport, 46 % pour la flotte Caracal), les équipages les plus expérimentés réalisent une activité aérienne bien supérieure à la moyenne alors que celle des équipages en formation leur permet juste d'acquérir les fondamentaux. La progression de ces jeunes pilotes est allongée et leur préparation opérationnelle freinée entraînant un déficit de pilotes opérationnels ».

Niveau de réalisation des activités et de l'entraînement

Unité

2014

2015

2016

2016

2016

2017

2017

Réalisation

Réalisation

Prévision PAP 2016

Prévision actualisée PAP 2017

Réalisation

Cible PAP 2016

Cible PAP 2017

Jours d'activités par homme Terre « JPO »

jours

84

64

83

75

72

83

83

Heures de vol par pilote d'hélicoptère Terre

heures

156

146

159

159

154

164

164

Heures de vol par pilote de chasse Air

heures

153

154

159

168

163

163

163

Heures de vol par pilote de transport Air

heures

235

239

268

235

220

278

278

Heures de vol par pilote d'hélicoptère Air

heures

174

159

177

172

164

191

191

Jours de mer par bâtiment Marine

jours

83 (92)

91 (104)

90 (99)

92 (100)

92 (107)

96 (105)

96 (105)

Heures de vol par pilote de chasse Marine

heures

136 (194)

193 (236)

180 (220)

187 (226)

230 (263)

180 (220)

180 (220)

Heures de vol par pilote d'hélicoptère Marine

heures

218

218

195

216

224

220

220

Heures de vol par pilote de patrouille maritime Marine

heures

360

336

330

324

348

340

340

Source : rapport annuel de performances pour 2016

En matière de disponibilité des matériels, s'agissant de l'armée de terre, comme le rappelle le rapport annuel de performances pour 2016, « les conditions d'emploi et la forte utilisation des équipements engagés, notamment dans le cadre de l'opération Barkhane continuent d'éroder fortement les équipements de l'armée de terre, nécessitant une relève annuelle de 25 % des matériels pour garantir une bonne disponibilité sur les théâtres et un temps de régénération en métropole ». Certains parcs sont particulièrement sous tension , en particulier les hélicoptères de manoeuvre , dont le taux de disponibilité n'atteint que 42 % pour une prévision s'élevant à 57 %, les hélicoptères d'attaques ou de reconnaissance , dont le taux de disponibilité n'est que de 59 % (pour une prévision fixée à 75 %), ou encore les AMX 10 RCR (engin blindé de reconnaissance-feu), dont le taux de disponibilité n'est que de 66 % pour une prévision s'élevant à 71 %.

S'agissant de la marine, la disponibilité des matériels tant navals qu'aéronautiques apparaît satisfaisante . Seules les frégates affichent ainsi un taux de disponibilité inférieur aux prévisions (51 % pour une prévision s'établissant à 64 %). Néanmoins, le taux de disponibilité des hélicoptères, bien que supérieur aux prévisions (55 %), apparaît insuffisant (59 %) .

Enfin, s'agissant de l'armée de l'air, les taux de disponibilité des flottes de transport tactique, d'appui opérationnel et d'hélicoptères sont en-deçà des prévisions, à hauteur de respectivement dix, trois et cinq points. Selon le rapport annuel de performances pour 2016, « elles continuent de pâtir des difficultés techniques liées au vieillissement des aéronefs anciens (C160, C130, Puma et C135) ou aux aléas de maturité des matériels récents (A400M et Caracal) ». Néanmoins, « pour ces flottes, plusieurs plans d'actions (contractuels, techniques et organisationnels) ont été engagés, notamment au niveau industriel, afin d'améliorer la disponibilité en 2017 ».

En revanche, les flottes Rafale et Mirage 2000 D affichent des taux de disponibilité supérieurs aux prévisions (92 % pour une prévision s'établissant à 88 %).

Disponibilité des matériels par rapport aux exigences des contrats opérationnels

(en pourcentage)

2014

2015

2016

2016

2016

2017

2017

Réalisation

Réalisation

Prévision PAP 2016

Prévision actualisée PAP 2017

Réalisation

Cible PAP 2016

Cible PAP 2017

Armée de terre Char Leclerc

82

93

100

90

83

100

100

Armée de terre AMX 10 RCR

46

70

71

65

66

74

74

Armée de terre VAB

57

74

75

75

77

82

82

Armée de terre VBCI

74

86

96

75

83

96

96

Armée de terre Pièces de 155 mm

53

78

77

85

82

77

77

Armée de terre Hélicoptères de manoeuvre

45

42

57

49

42

57

57

Armée de terre Hélicoptères d'attaque ou de reconnaissance

59

59

75

58

59

75

75

Marine nationale Porte avions

92

90

93

93

95

11

11

Marine nationale SNA

69

73

83

85

89

59

59

Synthèse autres bâtiments de la marine

79

72

74

77

76

69

69

Marine nationale Composante frégates

61

58

64

62

51

69

69

Marine nationale Chasse

60

77

66

66

73

67

67

Marine nationale Hélicoptères

53

55

55

55

59

56

56

Marine nationale Guet aérien, Patrouille et surveillance maritime

50

54

54

54

57

56

56

Armée de l'air Avions de combat

88,5

86

88

88

92

90

90

Armée de l'air Avions de transport tactique

69

68

71

70

61

74

74

Armée de l'air Avions d'appui opérationnel

86

93

89

89

86

88

88

Armée de l'air Avions à usage gouvernemental

100

100

100

100

104

100

100

Armée de l'air Hélicoptères de manoeuvre et de combat

81

76

79

79

74

80

80

Armée de l'air Système sol-air moyenne portée

-

86

90

90

83

90

90

Source : rapport annuel de performances pour 2016

8. Un budget dont l'équilibre continue de reposer sur des recettes exceptionnelles

La loi du 28 juillet 2015 d'actualisation de la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 74 ( * ) a procédé à une rebudgétisation d'une partie des recettes exceptionnelles destinées à compléter les ressources du ministère de la défense. Cette rebudgétisation n'a cependant concerné que les recettes issues de cessions de fréquences hertziennes. Celles liées aux cessions immobilières ont à l'inverse été revues à la hausse, leur montant sur la période passant de passant de 400 millions d'euros sur la période 2015-2019 à 730 millions d'euros .

Pour 2016, la LPM actualisée fixait un objectif de cessions s'élevant à 200 millions d'euros. Celles-ci se sont in fine élevées à 189,5 millions d'euros .

Néanmoins, sur ce montant, seuls 123,8 millions d'euros ont été consommés .

C'est pourquoi, afin de sécuriser les crédits consacrés à l'immobilier, votre rapporteur spécial appelle à une rebudgétisation des recettes exceptionnelles issues de cessions immobilières sur le programme 212 « Soutien de la politique de défense » ou, à défaut, à une modification des règles de fonctionnement du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », afin d'introduire davantage de souplesse en gestion et permettre au ministère de la défense de consommer l'intégralité des recettes liées aux cessions de ses emprises, dans la limite du plafond prévu par la loi de programmation militaire.

9. Des documents budgétaires exhaustifs mais illisibles

Si votre rapporteur spécial est conscient de l'effort fourni par les services du ministère de la défense pour produire des documents budgétaires les plus exhaustifs possibles, il considère que ces derniers souffrent d'un manque de lisibilité.

D'une manière générale, il conviendrait que les documents budgétaires soient plus synthétiques et expliquent davantage au niveau de l'action (et non de l'opération stratégique ou budgétaire de la sous-action) les priorités poursuivies (entretien programmé des matériels, acquisition de nouveaux équipements, sécurisation des emprises, montée en puissance de la force opérationnelle terrestre, etc.) , les moyens engagés pour y parvenir, les principales évolutions envisagées (pour le projet de loi de finances) ou constatées (pour le projet de loi de règlement) et les écarts aux prévisions (pour le projet de loi de règlement).

Des indicateurs de performance synthétiques pourraient être mis en place permettant, par exemple, de mesurer selon quelques critères (durée prévisionnelle, durée actualisée, coût prévisionnel, coût actualisé, niveau de réalisation) et opération par opération, et non de manière agrégée comme cela est le cas actuellement, l'avancée des principales opérations d'équipement et d'infrastructure .

MISSION « DIRECTION DE L'ACTION DU GOUVERNEMENT » ET BUDGET ANNEXE « PUBLICATIONS OFFICIELLES ET INFORMATIONS ADMINISTRATIVES » - M. MICHEL CANEVET, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. MISSION « DIRECTION DE L'ACTION DU GOUVERNEMENT »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La loi de finances initiale pour 2016 prévoyait 1,35 milliard d'euros de crédits de paiement (CP) et 1,49 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE) au titre de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » (hors fonds de concours et attributions de produits).

Au total, 93 % des crédits prévus par la loi de finances initiale et 97 % des crédits de paiement ouverts ont été consommés.

Exécution 2016 des dépenses de la mission (hors fonds de concours et attributions de produits)

(en euros)

Prévision LFI

Crédits ouverts

Exécution

Taux d'exécution (par rapport à la prévision LFI)

Taux d'exécution (par rapport aux crédits ouverts)

Mission

AE

1 488 622 599

1 370 133 507

1 321 272 353

89%

96%

CP

1 346 147 965

1 294 164 334

1 255 331 952

93%

97%

Coordination du travail gouvernemental

AE

660 923 977

622 612 417

590 233 573

89%

95%

CP

652 093 373

610 681 716

578 726 709

89%

95%

Protection des droits et libertés

AE

97 173 145

94 947 906

90 445 293

93%

95%

CP

102 846 436

100 167 334

96 347 126

94%

96%

Moyens mutualisés des administrations déconcentrées

AE

730 525 477

652 573 184

640 593 487

88%

98%

CP

591 208 156

583 315 284

580 258 117

98%

99%

Source : commission des finances du Sénat à partir du rapport annuel de performances (RAP) 2016

Les importants transferts (81 millions d'euros en crédits de paiement et 88 euros en autorisations d'engagement) et les annulations en cours d'exercice (55 millions d'euros en crédits de paiement et 115 millions d'euros en autorisations d'engagement) expliquent l'écart significatif entre les crédits prévus et les crédits effectivement disponibles.

Synthèse des ouvertures et annulations de crédits (hors fonds de concours et attributions de produits)

(en millions d'euros)

Programme 129

Programme 308

Programme 333

Mission

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Décrets pour dépenses accidentelles et imprévisibles

8,00

8,00

8,00

8,00

Décrets de transfert

-95,90

-88,60

7,78

7,78

-88,12

-80,82

Décrets de virement

10,50

0,10

-10,47

0,03

0,10

Décrets d'avance

-33,00

-31,70

-4,20

-4,29

-77,27

-18,83

-114,47

-54,82

Arrêtés de report de crédits

47,50

46,10

1,95

1,58

2,87

2,74

52,32

50,42

Loi de finances rectificative de décembre

24,60

24,60

-0,05

-0,05

24,55

24,55

Total

-38,30

-41,50

-2,25

-2,71

-77,14

-8,36

-117,69

-52,57

Source : commission des finances du Sénat à partir du RAP 2015

Huit décrets de transfert ont affecté le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » au cours de l'exercice - correspondant à 7 millions d'euros d'ouvertures de crédits et à 103 millions d'euros d'annulations. Outre l'habituel transfert sortant au profit du ministère de la défense (82,1 millions d'euros en CP et 76,6 millions d'euros en AE), un transfert significatif a affecté, en novembre, le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » au profit de trois missions du budget général ne relevant pas du Premier ministre.

Aux termes de l'article 12 de la loi organique relative aux lois de finances, « des transferts peuvent modifier la répartition des crédits entre programmes de ministères distincts, dans la mesure où l'emploi des crédits ainsi transférés, pour un objet déterminé, correspond à des actions du programme d'origine ».

En l'occurrence, il s'agissait de transférer :

- 18,2 millions d'euros (en AE) à la mission « Administration générale et territoriale de l'État » destinés « au financement d'un data center de haute sécurité en partenariat avec le ministère de l'intérieur » ;

- 1 million d'euros au profit de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour financer des « projets de recherche et développement des pôles de compétitivité qui présentent un intérêt pour la sécurité nationale en liaison avec la filière industrielle de sécurité » ;

- 3,1 million d'euros à la mission « Défense » pour le remboursement de dépenses de rémunération et de charges sociales jusqu'à présent prises en charges par le ministère de la Défense.

Comme l'atteste la variété des missions bénéficiant de transferts de crédits, en provenance du programme 129 « Coordination du travail gouvernemental », la mission « Direction de l'action du Gouvernement » retrace les crédits d'organismes interministériels. Pour autant, on peut s'interroger sur l'architecture de la mission qui, contrairement à l'article 7 de la loi organique, ne comprends pas « un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie ».

Évolution des crédits de paiement de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » depuis 2012

(en milliard d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

L'importante augmentation enregistrée en 2015 par rapport à l'année précédente résulte d'une importante mesure de transfert de personnels.

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Malgré un ralentissement des créations de postes, une masse salariale en hausse de 10 millions d'euros

Par rapport à l'année précédente, les dépenses de personnel de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » ont beaucoup augmenté, en raison de l'intégration, au sein de la mission, des agents des services interministériels départementaux des systèmes d'information et de communication (SIDSIC). Par conséquent et malgré des créations de postes plus faibles que les trois années précédentes, les dépenses de personnel de la mission sont dynamiques.

Comparaison des dépenses de personnel et de la réalisation du schéma d'emploi de la mission « Direction de l'action du Gouvernement »

(en millions d'euros) (en ETP)

Source : commission des finances du Sénat à partir des RAP

Toutefois, à périmètre constant, le coût des postes créés en 2016 et 2015 s'élève à près de 10 millions d'euros, dont 2,3 millions d'euros imputables au programme 108 « Protection des droits et libertés » qui retrace les crédits des autorités administratives indépendantes (AAI).

Coût et nombre de création de postes depuis 2013 pour la mission « Direction de l'action du Gouvernement » (à périmètre constant)

(en ETP) (en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des RAP

Malgré un ralentissement des créations de postes, correspondant aux moindres besoins en matière de cyber-défense, celles-ci constituent le principal déterminant de l'augmentation des dépenses de personnel de la mission (à périmètre constant). En 2016, les dépenses de personnel représentent ainsi un tiers de l'ensemble des crédits.

2. Autorités administratives indépendantes (AAI) : une maîtrise des dépenses à renforcer

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2016, la commission des finances du Sénat soulignait que « les missions confiées aux autorités administratives indépendantes continuent de croître, ce qui entraine, chaque année, des dépenses supplémentaires » 75 ( * ) .

Entre 2015 et 2016, les dépenses des AAI retracées dans le programme 308 « Protection des droits et libertés » ont augmenté de 3,6 millions d'euros, soit + 4,1 %, principalement en raison de recrutements de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), dont les missions ont été renforcées par la loi relative au renseignement 76 ( * ) .

Évolution des dépenses du programme 308 « Protection des droits et des libertés » (à périmètre courant)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Toutefois, depuis 2012, l'écart entre les crédits ouverts et les crédits consommés augmente : l'augmentation de leurs moyens n'exonère donc pas les AAI de mesures de régulation budgétaire .

À ce titre, il convient de remarquer que si la réserve de précaution est bien mobilisée selon les règles de droit commun (0,5 % des dépenses de personnel et 8 % des autres dépenses), le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) bénéficie d'un dégel intégral de sa réserve de précaution (de l'ordre de 3 millions d'euros), en raison du statut d'autorité publique indépendante (API) 77 ( * ) qui lui a été octroyé par la loi du 15 novembre 2013.

3. Des indicateurs de performance à alimenter

Il est difficile de mesurer l'amélioration réelle de la sécurité des systèmes d'information car « certains ministères n'ont pas fourni d'indicateur actualisé » concernant la maturité en sécurité de leur système d'information. Il convient pourtant d'être particulièrement attentif aux enjeux relatifs à la cybersécurité.

II. BUDGET ANNEXE « PUBLICATIONS OFFICIELLES ET INFORMATIONS ADMINISTRATIVES »

1. Exécution des crédits de la mission en 2016

Les recettes du budget annexe s'élèvent à 192,1 millions d'euros en 2016, soit une diminution de 3,65 millions d'euros par rapport à l'année 2015, (- 1,9%).

Les dépenses totales sont de 166,9 millions d'euros, en baisse de 3,4% par rapport à 2015, soit 5,97 millions d'euros.

Ainsi, en 2016, pour la deuxième année consécutive depuis 2010, les dépenses ont diminué davantage que les recettes. L'excédent dégagé par le budget annexe s'élève à plus de 25 millions d'euros, en hausse de 9 % par rapport à 2015.

Évolution des recettes et des dépenses du budget annexe depuis 2010

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

Par ailleurs, les prévisions de recettes du budget annexe paraissent de plus en plus réalistes et sincères : l'écart entre prévision et exécution est de moins de 5 millions d'euros en 2016 .

Évolution des recettes et des prévisions de recettes du budget annexe

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

S'agissant des dépenses, l'exécution s'élève à 92 % en crédits de paiement et 83 % en autorisations d'engagement .

Exécution des dépenses du budget annexe en 2016

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Prévision LFI (y compris fonds de concours et attributions de produits)

192,8

181,8

Consommation

161,0

166,9

Taux d'exécution (par rapport à la prévision LFI)

83 %

92 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

Cette sous-consommation résulte d'une réduction de la masse salariale plus importante que prévue et, s'agissant des autorisations d'engagement, d'économies résultant de la transformation du service interministériel de renseignements « 39-39 Allô service public ». Selon le rapport annuel 2016 de la DILA, ce service a reçu, en 2016, 853 979 appels.

2. Des dépenses maîtrisées grâce à une réduction importante des effectifs

Les effectifs de la direction de l'information légale et administrative (DILA) ont diminué de 20 équivalents temps plein (ETP) en 2016 , contre 2 prévus par la loi de finances initiale.

En effet, selon les informations figurant dans le rapport annuel de performances, « un volume important de départs enregistrés à la DILA en 2016 (retraites, fins de contrats, détachements, démissions et début de la mise en oeuvre du nouveau dispositif de cessation anticipée d'activité (CAVA) prévu pour 2016-2020) associé à une accentuation de la politique de recrutement externe sélective plus particulièrement centrée sur les métiers numériques génère un taux de remplacement inférieur à 1 sur 2 ».

Les dépenses de personnel ont ainsi diminué de plus de 2 millions d'euros (- 2,8 %).

Évolution des charges de personnel et du nombre d'ETPT depuis 2012

(en ETPT) (en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

Votre rapporteur spécial encourage la DILA à poursuivre sa transformation numérique et le redéploiement de ses effectifs .

III. LE GROUPEMENT INTERMINISTÉRIEL DE CONTRÔLE

1. Des missions renforcées depuis la loi relative au renseignement de juillet 2015

En 1991, la loi 78 ( * ) a prévu que « le Premier ministre organise la centralisation de l'exécution des interceptions autorisées ». Ainsi, le groupement interministériel de contrôle (GIC) est un « service du Premier ministre chargé des interceptions de sécurité » 79 ( * ) . Distinctes des interceptions judiciaires, demandées par un magistrat, les interceptions de sécurité sont autorisées par le Premier ministre, sur demande d'un ministre responsable d'un service de renseignement.

Les missions 80 ( * ) du GIC consistent à :

- soumettre les demandes d'interception au Premier ministre ;

- établir un relevé d'opération et la destruction des enregistrements dans les conditions prévues par la loi ;

- assurer la centralisation de l'exécution des interceptions autorisées.

Les interceptions de sécurité sont toujours mises en oeuvre par le GIC, qui dispose du monopole des relations avec les opérateurs de communications électroniques : il est le seul service habilité à leur adresser des réquisitions. À l'instar des interceptions téléphoniques ou des flux Internet, le recueil des données de connexion et de géolocalisation a notamment été encadré et exécuté par le GIC 81 ( * ) , à partir du 1 er janvier 2015.

En outre, le GIC centralise les demandes d'interceptions de sécurité et de recueil des données de connexion émises par les services autorisés 82 ( * ) , les présente au Premier ministre pour autorisation et les soumet à l'avis d'une commission indépendante - la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS).

Le GIC se situe donc au coeur du dispositif d'autorisation et de mise en oeuvre des interceptions de sécurité et du recueil des données de connexion autorisés par la loi .

L'organisation des interceptions de sécurité

« Cette centralisation des moyens d'écoute, placés sous l'autorité du Premier ministre et confiés à un service technique neutre, puisqu'il n'est pas en charge de l'exploitation du renseignement et des enquêtes, a été considérée par le législateur comme une garantie fondamentale pour la protection des libertés publiques. Elle offre une séparation claire et solide entre « l'autorité qui demande » issue d'un des trois ministères habilités, « l'autorité de contrôle indépendante » qu'est la CNCIS, « l'autorité de décision » qu'est le Premier ministre, et le service qui met en oeuvre les moyens d'interception : le GIC. »

Source : 22 e rapport de la CNCIS, 2013-2014

Dans le cadre de la réforme globale du renseignement menée en 2015 83 ( * ) , le nouveau livre VIII du code de la sécurité intérieure encadre les techniques de renseignement et consacre une place essentielle au GIC, sorte de « chef d'orchestre » de la mise oeuvre de la loi . Dans le cadre de cette réforme, la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS) est remplacée par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR).

Comme le soulignait Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'intérieur, « le GIC conserve toutes ses prérogatives actuelles en matière d'interceptions de sécurité et de données de connexion. Il aura de nouvelles missions destinées à faciliter le contrôle effectué par la CNCTR » 84 ( * ) . En effet, le GIC doit désormais assurer la traçabilité et la centralisation des renseignements en application de l'article L. 822-1 du Code de la sécurité intérieure 85 ( * ) , issue de la loi de juillet 2015.

Concrètement, le GIC centralise l'exploitation des données recueillies en son sein, au bénéfice des services demandeurs mais aussi les renseignements recueillis par les services autorisés à utiliser des techniques de proximité afin d'en assurer un contrôle effectif. Autrement dit, le GIC met à disposition des services de renseignement les données recueillies et contribue au contrôle de l'exploitation des renseignements.

Les missions du GIC

« Le groupement interministériel de contrôle est un service du Premier ministre chargé de :

« 1° Enregistrer les demandes de mise en oeuvre des techniques de recueil de renseignement mentionnées à l'article L. 821-2 et aux II et III de l'article L. 854-2 ;

« 2° Enregistrer les autorisations de mise en oeuvre des techniques de recueil de renseignement mentionnées à l'article L. 821-4 et aux I, II et III de l'article L. 854-2 ;

« 3° Recueillir et conserver les informations ou documents mentionnés à l'article L. 851-1 dans les conditions fixées au chapitre Ier du titre V du présent livre ;

« 4° Centraliser l'exécution des interceptions de sécurité autorisées en application du I de l'article L. 852-1 et de l'article L. 854-8 ainsi que les opérations de transcription et d'extraction des communications interceptées ;

« 5° Contribuer à la centralisation des renseignements collectés lors de la mise en oeuvre des techniques de recueil de renseignement autres que celles mentionnées aux 3° et 4° ;

« 6° Concourir à la traçabilité de l'exécution des techniques de recueil de renseignement.

Source : article R. 823-1 du code de la sécurité intérieure

En particulier, dorénavant, certaines des techniques utilisées directement par les services de renseignement verront leur traçabilité assurée par le GIC. Selon le rapport de Jean-Pierre Raffarin, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi relatif au renseignement, « l'accroissement des renseignements collectés et la mise en oeuvre d'une traçabilité rigoureuse de l'exécution des techniques de renseignement autorisées entraineront un besoin en emplois et en moyens budgétaires pour le GIC au sein des services du Premier ministre que l'on peut évaluer à 50 % de ses ressources actuelles. Il s'agit de moyens humains pour concevoir les nouveaux systèmes de bases de données et en assurer le fonctionnement, mais aussi équiper certains appareils déployés sur le terrain de capteurs permettant de contrôler leur utilisation conformément aux règles définies » 86 ( * ) par la loi.

Par ailleurs, lorsque le Conseil d'État est saisi par une personne souhaitant vérifier qu'aucune technique de renseignement n'est irrégulièrement mise en oeuvre à son égard, le GIC représente et assure la défense du Premier ministre. En 2016, une dizaine de recours ont ainsi été examinés.

Désormais s ervice à compétence nationale (SCN) rattaché au Premier ministre 87 ( * ) et ainsi « désencastré » des services de renseignement, le GIC a « normalisé » son fonctionnement en 2016 : « il s'est détaché d'une tutelle administrative jusqu'alors exercée par la direction générale de la sécurité extérieure et ses agents relèvent des services du Premier ministre » 88 ( * ) .

C'est dans ce contexte de normalisation administrative et budgétaire et d'accroissement des missions que votre rapporteur spécial a souhaité s'intéresser au GIC dont le budget figure, en tant que service rattaché au Premier ministre, au sein de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».

2. D'un financement opaque à une transparence accrue

La normalisation du GIC a conduit à ce qu'une partie significative de ses activités soit désormais financée sur fonds « normaux » - et non plus sur fonds spéciaux. L'augmentation, récente, des crédits du GIC dans les documents budgétaires doit donc se lire à cette aune.

Cette normalisation du GIC permet donc au Parlement, et singulièrement aux commissions des finances, de mesurer le niveau et l'évolution du budget dont dispose ce service. Une transparence accrue de ses moyens est en effet indispensable dans le contexte actuel de menaces mais aussi d'exigences du respect des libertés individuelles, qui pourrait justifier leur augmentation .

Il convient à ce titre de souligner que ce contrôle est complété, par celui mené par la commission de vérification des fonds spéciaux de la délégation parlementaire au renseignement (DPR).

En 2015 89 ( * ) , les seules dépenses du GIC correspondaient à ses dépenses de fonctionnement : les dépenses de fluides et de collecte de déchets ainsi que la rénovation de nouveaux locaux et les dépenses de réseaux, d'achats de fournitures de bureau et de produits d'entretien, les frais de réception et de transport. En particulier, aucune dépense de personnel n'était retracée : celles-ci étaient prises en charge par la mission « Défense » pour les personnels contractuels de la direction générale de la sécurité extérieure ou par les fonds spéciaux.

À la suite des attentats du 13 novembre 2015, le Gouvernement a présenté, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2016, un amendement majorant les crédits affectés au groupement interministériel de contrôle « pour renforcer [ses] moyens d'action 90 ( * ) ». Au total, le GIC disposait de 18,15 millions d'euros de crédits ouverts au titre de la loi de finances initiale pour 2016, dont 4,15 millions d'euros au titre des dépenses de personnel.

Toutefois, à la suite de mesures de gel et d'annulation, les crédits effectivement disponibles en 2016 s'élèvent à 15,23 millions d'euros (en autorisations d'engagement et en crédits de paiement) et le taux de consommation des crédits initialement prévus est de 70 % - et de 83 % des crédits disponibles. Selon les informations transmises par le GIC, ces crédits susceptibles de financer des projets d'investissement, notamment informatiques, ont été rendus disponibles alors même que les projets n'étaient pas encore aboutis et alors que le GIC devait opérer sa transformation.

L'année 2017 devrait être marquée par une importante montée en puissance du GIC, nécessitant le financement de lourds projets informatiques (7,8 millions d'euros sont ainsi prévus au titre des dépenses d'investissement), portant le budget total du GIC (hors fonds spéciaux) à 28,1 millions d'euros.

Évolution (2015-2017) du budget du GIC (hors fonds spéciaux)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données transmises par le GIC

L'augmentation des dépenses de personnel traduit non seulement des recrutements, mais aussi l'intégration de contractuels, jusqu'à présent employés par la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) ou, mais plus marginalement, par le GIC directement.

S'agissant des recrutements, il convient de souligner que la modification des missions du GIC correspond à un changement de métier : essentiellement constitué de catégorie B et C, le GIC, désormais maître d'ouvrage au service des services, doit recruter des personnels de catégories A ou A+.

Fin 2016, les effectifs s'élevaient à 170 personnes, en-deçà des prévisions, pour deux raisons principales. D'une part, le bureau des ressources humaines a dû gérer en priorité les transferts des personnels de la DGSE. D'autre part, les enquêtes d'habilitation des agents au secret de la défense nationale, formulées désormais par le biais du SGDSN, sont obtenues après huit à neuf mois, ce qui n'était pas le cas auparavant lorsque les enquêtes étaient directement effectuées par la DGSE. Selon le GIC, l'objectif serait d'atteindre 230 personnes environ d'ici la fin de l'année 2018, sous réserve de ne pas confier au GIC de nouvelles missions.

3. Un lien ambigu avec le SGDSN

Le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) est notamment chargé de la passation des marchés, de la gestion budgétaire et financière et du recrutement des agents du service , en application de l'article D. 823-3 du code de la sécurité intérieure 91 ( * ) . En outre, en application de l'article D. 823-6 du code précité, « les modalités de gestion du budget, des moyens, des personnels et des achats sont fixées entre le groupement interministériel de contrôle et le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale ».

Si le GIC dispose d'une gestion financière et des ressources humaines qui lui est propre, le SGDSN lui apporte son soutien et fait notamment l'interface avec la direction des services administratifs et financiers (DSAF) des services du Premier ministre, en matière budgétaire et financière ou de marchés publics. Concrètement, le SGDSN gère le budget opérationnel de programme (BOP) « support » du GIC.

Le SGDSN est en réalité conduit à gérer les ressources humaines du GIC : si le choix de la personne à recruter revient au directeur du GIC, l'autorisation de recruter et le niveau de rémunération (des contractuels) relève d'un dialogue entre le SGDSN et le GIC, alors même que le SGDSN n'a aucun lien hiérarchique vis-à-vis du GIC - dont l'autorité de tutelle est le Premier ministre.

Cette situation pose une question de principe même si elle n'entraine pas, à ce stade, de difficultés pratiques majeures - si ce n'est une perte de temps. En effet, rien n'empêcherait le SGDSN de ne pas donner suite à une demande de recrutement ou de conclusion d'un marché public émanant du GIC. Vu la sensibilité du sujet, un cadre juridique moins contraignant pourrait être envisagé . Il devrait toutefois être concilié avec la nécessité de ne pas dupliquer inutilement les fonctions « support » du SGDSN.

Au total, si les moyens budgétaires et juridiques dont dispose le GIC paraissent suffisants, des contraintes exogènes pourraient obérer ses moyens d'action.

Ainsi, l'opacification d'internet constitue une difficulté notable : la protection de la vie privée, des données et, plus généralement, de la navigation sur internet, est en effet devenue un argument publicitaire et commercial pour les entreprises du numérique, ce qui rend beaucoup plus complexe l'action des services.

Surtout, les conséquences d'un arrêt rendu en décembre 2016 par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) constituent un sujet majeur de préoccupation pour le GIC : il pourrait remettre en cause l'obligation faite aux opérateurs de communications électroniques de stocker, pendant un an 92 ( * ) , les données de connexion de l'ensemble des usagers. La portée de cet arrêt et ses conséquences sur les enquêtes en cours, tant dans le domaine du renseignement qu'en matière judiciaire, devra rapidement être éclaircie. Pour la délégation parlementaire au renseignement, cet arrêt « empiète sur la compétence des États, telle qu'elle résulte de l'application du principe de subsidiarité, et ne tient manifestement aucun compte des impératifs et des finalités qui s'attachent à l'action des services de renseignement.

« Sauf inversion de jurisprudence, le Gouvernement doit exiger au plus vite auprès du Conseil la révision de la directive européenne 2002/58/CE » 93 ( * ) .

L'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne Tele2 Sverige AB/ Post-och telestyrelsen

« La Cour est invitée à indiquer si des régimes nationaux qui imposent aux fournisseurs une obligation générale de conservation des données et qui prévoient l'accès des autorités nationales compétentes aux données conservées, sans notamment limiter cet accès aux seules fins de lutte contre la criminalité grave et soumettre l'accès à un contrôle préalable par une juridiction ou une autorité administrative indépendante, sont compatible avec le droit de l'Union (en l'occurrence la directive « vie privée et communications électroniques » lue à la lumière de la Charte des droits fondamentaux de l'UE).

« Dans son arrêt de ce jour, la Cour répond que le droit de l'Union s'oppose à une réglementation nationale prévoyant une conservation généralisée et indifférenciée des données. (...)

« La Cour constate, s'agissant de la conservation, que les données conservées prises dans leur ensemble sont susceptibles de permettre de tirer des conclusions très précises sur la vie privée des personnes dont les données ont été conservées.

« L'ingérence résultant d'une réglementation nationale prévoyant la conservation des données relatives au trafic et des données de localisation doit donc être considérée comme particulièrement grave. Le fait que la conservation des données est effectuée sans que les utilisateurs des services de communications électroniques n'en soient informés est susceptible de générer, dans l'esprit des personnes concernées, le sentiment que leur vie privée fait l'objet d'une surveillance constante. Par conséquent, seule la lutte contre la criminalité grave est susceptible de justifier une telle ingérence .

« La Cour relève qu' une réglementation prévoyant une conservation généralisée et indifférenciée des données ne requiert pas de relation entre les données dont la conservation est prévue et une menace pour la sécurité publique et ne se limite notamment pas à prévoir une conservation des données afférentes à une période temporelle et/ou une zone géographique et/ou un cercle de personnes susceptible d'être mêlées à une infraction grave. Une telle réglementation nationale excède donc les limites du strict nécessaire et ne saurait être considérée comme étant justifiée dans une société démocratique, ainsi que l'exige la directive lue à la lumière de la Charte .

« La Cour explique en revanche que la directive ne s'oppose pas une réglementation nationale imposant une conservation ciblée des données à des fins de lutte contre la criminalité grave, à condition qu'une telle conservation soit, en ce qui concerne les catégories de données à conserver, les moyens de communication visés, les personnes concernées ainsi que la durée de conservation retenue, limitée au strict nécessaire. Selon la Cour, toute réglementation nationale allant dans ce sens doit être claire et précise et prévoir des garanties suffisantes afin de protéger les données contre les risques d'abus.

Elle doit indiquer les circonstances et les conditions dans lesquelles une mesure de conservation des données peut, à titre préventif, être prise de manière à garantir que l'ampleur de cette sure soit, en pratique, effectivement limitée au strict nécessaire. Notamment, une telle réglementation doit être fondée sur des éléments objectifs permettant de viser les personnes dont les données sont susceptibles de présenter un lien avec des actes de criminalité grave, de contribuer à la lutte contre la criminalité grave ou de prévenir un risque grave pour la sécurité publique. (...)

« Compte tenu de la quantité de données conservées, du caractère sensible de ces données ainsi que du risque d'accès illicite à celles-ci, la réglementation nationale doit prévoir que les données soient conservées sur le territoire de l'Union et qu'elles soient irrémédiablement détruites au terme de la durée de leur conservation. »

Communiqué de presse n° 145/16 de la Cour de justice de l'Union européenne du 21 décembre 2016, concernant l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (grande chambre) dans les affaires jointes C-203/15 Tele2 Sverige AB/ Post-och telestyrelsen et C-698/15 Secretary of State for the Home Department/Tom Watson e.a.

MISSION « ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES » ET CAS « AIDE À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES » ET « TRANSITION ÉNERGÉTIQUE - M. JEAN-FRANÇOIS HUSSON, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

1. Une mission de nouveau fortement mise à contribution

Exécution des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » par programme en 2016, y compris fonds de concours

(en millions d'euros et en %)

Programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exéc. 2015

(en %)

Exécution 2016 / LFI 2016

(en %)

203 «Infrastructures et services de transport »

AE

4 337,65

4 664,88

4 459,27

2,80 %

- 4,41 %

CP

4 810,61

4 617,34

4 406,48

- 8,40 %

- 4,57 %

205 «Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture »

AE

159,91

198,29

100,10

- 37,40%

- 49,52 %

CP

174,62

195,74

158,19

- 9,41 %

- 19,18 %

170 «Météorologie»

AE

195,55

198,24

190,24

- 2,72 %

- 4,04 %

CP

195,55

198,24

190,24

- 2,72 %

- 4,04 %

113 «Paysages, eau et biodiversité»

AE

241,25

285,58

259,02

7,37 %

- 9,30 %

CP

256,55

296,28

242,74

- 5,38 %

- 18,07 %

159 «Information géographique et cartographique»

AE

93,35

95,11

92,41

- 1,01 %

- 2,84 %

CP

93,28

95,11

92,33

- 1,02 %

- 2,92 %

181 «Prévention des risques»

AE

52,23

283,58

-16,17

- 130,96 %

- 105,70 %

CP

66,10

222,73

-32,43

- 149,06 %

- 114,56 %

174 «Énergie, climat et après-mines»

AE

738,75

507,23

965,00

30,63 %

90,25 %

CP

747,71

509,56

464,21

- 37,92 %

- 8,90 %

345 « Service public de l'énergie »

AE

-

2 049,60

1 955,47

-

- 4,59 %

CP

-

2 049,60

1 955,47

-

- 4,59 %

217 «Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables»

AE

3 281,05

2 485,50

3 211,99

- 2,10 %

29,23 %

CP

3 327,83

2 529,16

3 259,11

- 2,07 %

28,86 %

Total

AE

9 099,74

10 768,01

11 217,33

23,27 %

4,17 %

CP

9 672,25

10 713,76

10 736,34

11 % 94 ( * )

0,21 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

À titre liminaire, il convient de rappeler que la loi de finances rectificative pour 2015 a enrichi la mission du nouveau programme 345 « Service public de l'énergie », retraçant les charges de service public de l'énergie auparavant assurées par des dispositifs extrabudgétaires, mais non intégrées au CAS « Transition énergétique » car ne relevant pas directement de la politique de transition énergétique 95 ( * ) .

En loi de finances initiale pour 2016, la mission « Écologie, développement et mobilité durables » bénéficiait de 10,8 milliards d'euros d'AE et de 10,7 milliards d'euros de CP. L'exercice 2016 est marqué par un taux d'exécution des autorisations d'engagement de 104 % et par une légère surconsommation des crédits de paiement (CP) - le taux d'exécution des crédits votés en loi de finances initiale s'élève à 100,2 %.

Le montant des CP consommés, proche du montant des CP votés en loi de finances initiale, dissimule une sous-exécution des crédits de la mission . Ainsi, une mesure de gestion récurrente, qui complexifie la lecture de l'exécution budgétaire, consiste à transférer en gestion les crédits du titre 2 du programme 337 « Conduite et pilotage des politiques du logement et de l'égalité des territoires » de la mission « Égalité des territoires, logement et ville » vers le programme 217 96 ( * ) , pour un montant de 765,6 millions d'euros - contre 777,2 millions d'euros en 2015.

Cette mesure de gestion fragilise la lisibilité de la présentation budgétaire de l'exécution 2016 en donnant l'impression que le programme 217 a bénéficié de crédits supplémentaires en cours de gestion. La suppression du programme 337 et l'intégration des crédits au programme 217, envisagée pour le projet de loi de finances pour 2018 97 ( * ) , résout toutefois ce problème .

La neutralisation de ce transfert fait apparaître une sous-consommation de 7 % des CP prévus en loi de finances initiale.

Celle-ci découle de l'annulation en cours de gestion de la quasi-totalité de la réserve de précaution hors titre 2 des programmes de la mission . Or, l'annulation de la majeure partie des crédits mis en réserve en cours d'exécution fragilise la sincérité de la budgétisation initiale autant qu'elle est amenée à poser de sérieuses difficultés pour l'accomplissement des missions du ministère et des opérateurs.

Seul le programme 345 a bénéfice d'une levée totale de sa réserve initiale. Les programmes 203 et 217 n'ont quant à eux bénéficié que d'une levée partielle de la réserve de précaution afin, respectivement, de permettre la compensation de la réforme des péages pour les entreprises du fret ferroviaire et d'assurer les dépenses relatives aux COP 21 et 22.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Prog.

Crédits prévus LFI 2016 (hors FDC/ADP)

FDC/ADP prévus LFI 2016

Reports entrants hors FDC

Reports entrants sur crédits FDC

Transferts et virement

Décrets d'avance

Autres mouve-ments

LFR 2016

Reports sortants (y compris FDC) et crédits non consommés

FDC/ADP exécutés

Exécution 2016

113

275,90

20,39

0,49

5,42

-

- 18,56

-

- 10,00

- 41,86

31,48

263,25

159

95,11

-

0,07

0,11

-

- 3,49

-

-

- 0,08

0,64

92,35

170

198,24

-

-

0,02

0,13

- 8,28

-

-

-

0,13

190,24

174

509,59

-

0,60

-

- 44,61

-

152,50

- 153,90

0,03

464,21

181

221,18

1,55

4,00

24,22

- 5,68

- 171,33

-

- 82,60

- 22,22

1,68

- 29,19

203

3 182,00

1 435,34

6,44

238,09

- 13,42

- 214,90

-

-

- 317,17

1 541,13

5 857,50

205

183,46

12,28

4,16

2,80

- 1,91

- 21,46

-

-

- 13,42

4,62

170,53

217

2 448,89

80,24

0,20

0,22

802,09

- 18,50

0,83

- 1,09

- 2,65

51,11

3 361,34

345

2 049,60

-

-

-

-93,00

-

-

-

- 1,13

-

1 955,47

Note de lecture : les chiffres présentés n'intègrent pas les ajustements techniques prévus par le présent projet de loi de règlement ; ils peuvent donc légèrement différer des données présentées dans le rapport annuel de performances de la mission.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère du budget

Les arbitrages de fin de gestion entraînent deux conséquences :

- d'une part, ils traduisent l'utilisation de la mission comme variable d'ajustement pour réaliser des économies, voire financer d'autres priorités : l'ouverture par la loi de finances rectificative pour 2016 de 500 millions d'euros d'AE, qui explique la surconsommation des AE, et de 150 millions d'euros en CP, abondant l'enveloppe spéciale transition énergétique (ESTE), illustre ce phénomène. Les AE ont été consommées, mais les CP ont été immédiatement gelés et reportés en 2017. Comme le relève la Cour des comptes, cette mesure « contribue à améliorer le solde budgétaire 2016 de 150 millions d'euros » ;

- d'autre part, ils provoquent une augmentation des restes à payer , qui représentent 5,9 milliards d'euros pour l'exercice 2016, soit une hausse de 520 millions d'euros par rapport à 2015. Ceux-ci mettent en péril la soutenabilité de la mission, et en dehors des crédits exécutés sur fonds de concours de l'AFITF et des paiements de loyers des contrats de partenariat public-privé, ôtent toute visibilité quant au calendrier de paiement, faute de réalisation d'échéanciers.

Ainsi, votre rapporteur spécial a le regret de constater, comme il l'avait pourtant annoncé lors des débats relatifs à la loi de finances initiale pour 2016, que la politique en faveur de l'environnement et de la transition énergétique ne comptait pas parmi les priorités du Gouvernement précédent.

Évolution des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » depuis 2011

(en milliards d'euros, hors programmes d'investissements d'avenir)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les crédits consommés de la mission ont diminué de près de 14 % entre 2011 et 2016, passant de 12,43 milliards d'euros à 10,74 milliards d'euros (hors programmes d'investissements d'avenir), alors même qu'un nouveau programme complète la mission.

2. Une gestion des emplois perfectible

Les dépenses de personnel (titre 2), qui représentent 26 % des CP et des AE exécutés de la mission sont réparties entre le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement durable et de la mer » et le programme 181 « Prévention des risques », auquel sont rattachées les dépenses de personnel de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). La quasi-totalité des crédits et des emplois sont imputés sur le programme 217 (2,77 milliards d'euros sur 2,8 milliards d'euros) .

Le plafond d'autorisations d'emplois (PAE) fait l'objet d'une sous-exécution en 2016. La loi de finances initiale prévoyait un PAE de 29 911 ETPT. Si l'on intègre le transfert en cours de gestion des effectifs du programme 337, ce PAE atteint 43 041 ETPT. Or, en exécution, il s'est élevé à 42 257 ETPT .

À l'inverse, à périmètre constant, le schéma d'emplois connaît une sur-exécution , « le nombre de mobilités interministérielles et d'autres départs non définitifs semblant avoir été plus difficile à estimer avec précision » d'après la Cour des Comptes 98 ( * ) . L'exécution atteint donc - 890 équivalents temps plein (ETP) contre une prévision de - 872 ETP.

Des marges de manoeuvre existent donc encore pour améliorer la qualité de la prévision budgétaire initiale sur les mouvements et les dépenses de personnel.

Évolution des écarts entre les prévisions de la loi de finances initiale et la réalisation : dépenses de personnel et équivalents temps plein travaillé (ETPT)

(en millions d'euros et en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Une évaluation insuffisante des dépenses fiscales, une prévision peu fiable de leur coût

Tout d'abord, les dépenses fiscales rattachées à titre principal à la mission représentent plus de 31 % crédits de paiement votés de la mission, soit près de 3,3 milliards d'euros. Dans l'ensemble total composé des dépenses fiscales rattachées à la mission et des crédits budgétaires exécutés sur la mission, les dépenses fiscales représentent une part de plus en plus importante .

Répartition des crédits budgétaires exécutés de la mission et des dépenses fiscales rattachées à la mission

(en %)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'évolution des principales dépenses fiscales apparaît clairement haussière par rapport à l'année précédente, en particulier le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), dont le coût a doublé, passant de 874 millions d'euros à 1,67 milliard d'euros en raison des aménagements intervenus en loi de finances pour 2015 99 ( * ) .

Part du CITE dans le coût des dépenses fiscales de la mission « Écologie, développement et mobilité durables »

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Force est de constater que les mesures prises en loi de finances pour 2016 afin d'améliorer l'efficience du crédit d'impôt n'ont pas permis d'en contenir l'évolution (exclusion du périmètre du CITE de dispositifs bénéficiant déjà de soutien public, comme les systèmes de fourniture d'électricité à partir de l'énergie éolienne ; limitation des contournements qui permettaient d'inclure dans le périmètre des équipements pourtant exclus).

L'augmentation des dépenses fiscales applicables à la TICPE résulte quant à elle de la montée en puissance de la composante carbone de ces taxes, liées à l'évolution du prix de la tonne de CO 2 .

Pourtant, comme rappelé par le rapporteur général dans son rapport sur l'efficience des dépenses fiscales en faveur du développement durable, « si certaines dépenses fiscales ont été explicitement créées dans un objectif de protection de l'environnement, à l'instar de celles visant à une amélioration de la performance énergétique des logements, d'autres dispositifs créés pour soutenir certaines activités économiques peuvent avoir des effets environnementaux défavorables parfois peu connus, ou mal évalués » 100 ( * ) .

Ainsi, certaines dépenses fiscales relatives aux transports sont majoritairement défavorables à l'environnement. Si elle estime qu'il n'est pas souhaitable de revenir sur les taux réduits dont ils bénéficient 101 ( * ) , la Cour des comptes estime que les dépenses fiscales en faveur du GPL et du GNV ne sont pas justifiées : « les véhicules les plus économes émettent autant de CO 2 par kilomètre parcouru que ceux fonctionnant au diesel et ces détaxes bénéficient essentiellement à des flottes privées existantes sans effet incitatif ». Ainsi, la Cour des comptes estime que 14 des dépenses fiscales relevant de la mission génèrent des effets défavorables au développement durable, quand 23 lui sont favorables.

De plus, si le CITE a permis d'accompagner une montée en gamme de la performance énergétique des équipements de rénovation énergétique, il est peu incitatif s'agissant des gros travaux de rénovation, en raison du plafonnement du montant des travaux éligibles. Par ailleurs, il produit des effets d'aubaine difficiles à évaluer.

Évolution des principales dépenses fiscales rattachées à la mission depuis 2013

(en millions d'euros)

Dépenses fiscales

2013

2014

2015

2016

Évolution 2016/2015

800403

Remboursement d'une fraction de taxe intérieure de consommation sur le gazole utilisé par certains véhicules routiers

380

357

375

500

+ 125

800404

Remboursement d'une fraction de taxe intérieure de consommation sur le gazole utilisé par les exploitants de transport public routier en commun des voyageurs

40

39

51

93

+ 42

110222

CITE

660

619

874

1 670

+ 796

800207

Réduction de taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel

68

125

158

170

+ 12

800203

Taux réduit de taxe intérieur de consommation pour les butanes et propanes utilisés comme carburant

108

105

102

103

+ 1

800210

Taux réduit de taxe intérieure de consommation au profit des installations intensives en énergie et soumises au régime des quotas d'émission de gaz à effet de serre

-

13

110

200

+ 90

800211

Taux réduit de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, le gaz naturel et les charbons au profit des installations intensives en énergie et exerçant une activité considérée comme exposée à un risque important de fuite de carbone

70

140

+ 70

800208

Taux réduit de taxe intérieure de consommation sur le GPL

110

91

81

74

- 7

Total des dépenses fiscales
rattachées à la mission

1 900

1 600

2 100

3 300

+ 1 200

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Enfin, le Parlement ne dispose que d'une information restreinte sur l'efficacité et l'évolution de certaines de ces dépenses, qu'il est amené à créer ou à prolonger, alors même que leurs montants sont très importants. Il ne dispose d'aucune explication, ni dans le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances ni dans le rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement, sur l'évolution du montant des dépenses fiscales par rapport à la prévision : or, par exemple, pour 2016, le coût des dépenses fiscales rattachées au programme 174 augmente de 11 % (près de 250 millions d'euros) entre la prévision et l'exécution.

En tout état de cause, au regard de l'évaluation de l'efficience des dépenses fiscales, qui apparaît clairement insuffisante, votre rapporteur spécial estime, comme le rapporteur général qu'« il conviendrait que le ministère de l'environnement soit davantage associé, à travers les conférences fiscales, à l'examen des dépenses fiscales qui lui sont rattachées » 102 ( * ) .

2. Des ressources extrabudgétaires toujours importantes

37 opérateurs dépendent de la mission « Écologie », dont 26 ont perçu des ressources en provenance du budget général pour un montant de 1,4 milliard d'euros en 2016 .

Ressources des opérateurs de la mission en 2016

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Ils ont bénéficié de ressources affectées à hauteur de 5,9 milliards d'euros. Ces ressources ont augmenté de 20 % par rapport à 2015, sous l'effet de la hausse du montant des impôts et taxes affectées à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).

D'après la Cour des comptes , les dépenses des opérateurs rattachés à la mission se sont élevées à 8,3 milliards d'euros en 2016 .

Répartition des dépenses concourant à la politique publique par la mission

(en %)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Au total, plus de la moitié (52 %) des dépenses concourant à la politique publique portée par la mission relève de dépenses extra-budgétaires.

3. La sous-exécution récurrente des crédits du programme 181 pose la question de la sincérité budgétaire

L'analyse de l'exécution des CP du programme 181 « Prévention des risques » fait apparaître une consommation négative des crédits prévus en loi de finances initiale. Celle-ci s'explique, comme l'année dernière, par un redéploiement de 232,6 millions d'euros de crédits du PIA gérés par l'ADEME, qui se traduit par un rétablissement de crédits d'un montant équivalent sur le programme 181, apparaissant comme une « dépense négative ».

D'une part, le choix du recours au décret d'avance, pour le premier redéploiement opéré en juin 2016, est contestable, le critère de l'urgence fixé par l'article 13 de la loi organique relative aux lois de finances 103 ( * ) n'étant pas rempli. En effet, 150 millions d'euros ont été transférés de l'ADEME vers l'ANAH, afin de doter le Fonds d'aide à la rénovation thermique, sans que les crédits de ce dernier n'aient été épuisés à ce moment 104 ( * ) . D'autre part, le rétablissement des crédits liés aux redéploiements de PIA sur le programme 181 a eu pour conséquence de rendre les crédits ouverts et consommés sur ce programme négatifs (de 32 millions de CP en exécution), en contradiction avec l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances 105 ( * ) .

La correction de ce rétablissement de crédits révèle qu'en réalité, 200 millions d'euros de crédits ont été consommés , sur les 222,7 millions d'euros de CP prévus en loi de finances initiale - soit un taux de consommation de 90 %.

Cette sous-exécution découle de la sous-consommation des crédits prévus pour les plans de prévention des risques technologiques (PPRT).

Les PPRT visent à réduire les risques associés à la présence de sites industriels Seveso pour les riverains. 356 PPRT ont été approuvés à la fin de l'année 2016, sur les 393 plans prévus, soit un taux d'approbation de 90,5 %, inférieur à l'objectif de 97 % fixé dans le projet annuel de performance annexé à la loi de finances pour 2016. Le ministère justifie ce retard par la nécessité d'une concertation approfondie autour des PPRT restant à approuver, qui sont les plus délicats et requièrent des mesures foncières d'expropriation ou de délaissement difficiles à adopter.

Ainsi, les crédits de délaissement et d'expropriation n'ont en particulier pas pu être engagés dans leur totalité : alors que la loi de finances initiale prévoyait, au titre des dépenses d'intervention (transferts aux collectivités territoriales) de l'action 01 « Prévention des risques technologiques et des pollutions » du programme, 74,7 millions d'euros d'AE et 7,3 millions d'euros CP pour le financement des mesures foncières liées aux PPRT, seuls 6,8 millions d'euros et 2,6 millions d'euros ont respectivement été engagés et consommés en exécution.

4. La budgétisation glissante du nouveau programme 345 fait encourir le risque d'accumulation de « charges à payer »

La budgétisation des charges de service public de l'énergie (principalement gaz et électricité), désormais retracées dans le CAS « Transition énergétique » et dans le nouveau programme 345, constitue un progrès indéniable . Alors que le CAS retrace les charges liées au soutien aux énergies renouvelables, à l'effacement de consommation, au remboursement aux opérateurs des déficits de compensation des charges de service public de l'énergie accumulées au 31 décembre 2015, le programme 345 regroupe les charges liées à la péréquation tarifaire dans les zones non interconnectées, les charges découlant de dispositifs sociaux, du soutien à la cogénération, ainsi que les intérêts de la dette accumulée auprès des opérateurs au titre du déficit de compensation et le budget du médiateur de l'énergie.

La budgétisation « glissante » d'une partie des charges du programme fait toutefois encourir le risque d'apparition de charges à payer, qui résulteraient d'un écart entre les évaluations prévisionnelles et les charges effectives constatées ex post l'année suivante. En effet, les charges de service public de l'énergie résultent d'évaluations réalisées par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) en N-1, définies notamment en fonction du prix de l'électricité et des combustibles. Si l'évaluation définitive des charges réalisée l'année N fait apparaître un décalage avec les estimations prévisionnelles réalisée en N-1, une compensation budgétaire aux opérateurs a lieu soit au titre du dernier versement aux acomptes de l'année N, en janvier N+1, soit dans le cadre du calcul des charges prévisionnelles pour l'année N+2.

Comme le souligne la Cour des comptes dans sa note d'exécution budgétaire, « le décalage ainsi généré peut poser des problèmes de visibilité sur les charges à payer en N+1 et N+2, alors même qu'elles se rattachent comptablement à l'exercice de l'année N ».

Ce risque s'est concrétisé dès le premier exercice du programme -toutefois, il s'agissait d'un exercice particulier, dès lors que les crédits budgétés ont été inférieurs pour 2016 aux charges dues au titre de 2016, comme pour le CAS « Transition énergétique » (cf. infra ). Alors que la CRE 106 ( * ) évaluait les charges retracées par le programme à 2 487 millions d'euros pour 2016, 2 049,6 millions d'euros ont in fine été budgétisés en loi de de finances initiale pour 2016.

Ainsi, 77 % des charges prévisionnelles pour 2016 ont été payés sur le budget 2016, tandis que « le solde des charges prévisionnelles 2016 (23 %) a été versé aux opérateurs en janvier 2017 sur le budget 2017 » 107 ( * ) : 557,6 millions d'euros ont ainsi été versés à EDF en janvier. Votre rapporteur spécial accordera une attention particulière au niveau de charges à payer résultant de la prochaine exécution budgétaire. La budgétisation de dépenses auparavant financées de façon extrabudgétaires ne saurait en effet avoir pour conséquence l'accumulation de charges à payer vis-à-vis des opérateurs du service public de l'énergie.

L'information du Parlement sur les montants effectifs dus au cours d'une année est par ailleurs perfectible et il conviendrait d'enrichir les projets annuels de performance d'échéanciers de paiement offrant une vision globale des paiements réalisés sur une année budgétaire.

5. La baisse des moyens financiers alloués à la lutte contre le réchauffement climatique et contre la pollution atmosphérique

Alors que la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte fixe un objectif national de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % en 2030 par rapport à 2005, les moyens affectés à la lutte contre le changement climatique ainsi qu'à la lutte contre la pollution atmosphérique ne sont pas de nature à permettre l'atteinte de ces objectifs.

D'abord, l'enveloppe spéciale « Transition énergétique » 108 ( * ) , dont les crédits sont budgétés sur l'action 05 « Lutte contre le changement climatique » du programme 174, constitue un outil à la fois insuffisant et redondant avec d'autres dispositifs.

L'enveloppe, qui constitue un volet du fonds de transition énergétique lui-même doté de 1,5 milliard d'euros sur trois ans, géré par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), devait être dotée de 750 millions d'euros sur trois ans (en 2015, 2016 et 2017) par tranches annuelles de 250 millions d'euros. Dans un premier temps, la loi de finances rectificative pour 2015 a ouvert 250 millions d'euros de CP et d'AE sur le programme 174 « Énergie, climat et après-mines ». Dans un second temps, 500 millions d'euros d'AE et 150 millions d'euros de CP ont été ouverts par la loi de finances rectificative pour 2016 sur ce même programme 174, portant les capacités d'engagement à 750 millions d'euros et les capacités de paiement à 400 millions d'euros.

D'une part, le montant de l'enveloppe ne répond pas aux attentes. Par exemple, sur 10 millions d'euros « affectés » au 31 décembre 2016 au titre de l'appel à projet « villes respirables », seuls 540 000 euros ont été engagés à cette date, soit 5 % des affectations décidées en comité de pilotage 109 ( * ) - ces engagements consolidant les montants d'engagements pris par la ministre chargée de l'écologie dans chaque convention de financement. L'ouverture d'AE et de CP en loi de finances rectificative n'a eu d'autre intérêt que de tenir un engagement gouvernemental : les fonds disponibles sur le compte de tiers tenu par la CDC paraissaient en effet suffisants, au regard des faibles montants de crédits engagés à la fin de l'année 2016. En outre, les CP ont été immédiatement gelés et reportés en 2017.

D'autre part, l'enveloppe finance des actions déjà soutenues par d'autres dispositifs d'intervention de l'État ou des opérateurs relevant du ministère , éclatant et complexifiant les financements de la politique de lutte contre le réchauffement climatique et la pollution atmosphérique - il en va ainsi des aides aux méthaniseurs, déjà attribuées par l'ADEME et les agences de l'eau, des aides à l'épandage, versées par FranceAgriMer et les agences de l'eau, des aides des fonds chaleurs et déchets, déjà portées par l'ADEME.

Ensuite, en neutralisant les crédits dédiés à l'ESTE, les crédits de l'action 05 « Lutte contre le changement climatique » diminuent de 13 % entre 2015 et 2016, envoyant un mauvais signal, y compris à l'égard des autorités européennes, dans un contexte de contentieux européens visant la France en matière de qualité de l'air, comme l'anticipait votre rapporteur spécial dans son rapport sur les crédits de la mission dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017 110 ( * ) .

Évolution des crédits de paiement de l'action 05 - « Lutte contre le changement climatique » entre 2015 et 2016 111 ( * )

(en euros)

Types de dépenses

Exécution 2015

Exécution 2016*

Évolution 2016/2015

Dépenses de fonctionnement

4 666 019

3 593 669

- 23 %

Dont dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel

2 610 033

1 427 565

- 45 %

Dont subventions pour charges de service public

2 055 986

2 166 104

5 %

Dépenses d'intervention

23 906 234

21 275 668

- 11 %

Dont transferts aux entreprises

4 667 432

4 201 672

- 10 %

Dont transferts aux collectivités territoriales

45 511

73 578

62 %

Dont transferts aux autres collectivités

19 193 291

17 000 418

- 11 %

Dépenses d'opérations financières

259 860

334 400

29 %

Total action 05

28 832 113

25 203 737

- 13 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les rapports annuels de performances de la mission

Ainsi, par exemple, les crédits d'intervention concourant à la politique de surveillance de la qualité de l'air (au sein des transferts aux autres collectivités) ont diminué de 11 % entre 2015 et 2016, passant de 18,5 millions d'euros à 16,5 millions d'euros.

6. Une mise à contribution récurrente du programme 113 « Paysage, eau et biodiversité » incohérente aves les objectifs gouvernementaux

Alors que le programme paraissait préservé dans le budget initial de la mission grâce à une hausse des crédits de paiement, l'exécution budgétaire révèle qu'il a contribué à la maîtrise des dépenses de l'État.

Ce constat apparaît paradoxal, voire incohérent, alors que la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages 112 ( * ) , présentée comme un texte phare par le précédent Gouvernement, devant permettre à notre pays de faire un grand pas dans la protection de la biodiversité, a été promulguée en août 2016 .

D'abord, la mise à contribution du programme se traduit par l'annulation de la réserve de précaution. Alors qu'une mise en réserve complémentaire effectuée en cours de gestion a porté le montant de la réserve de précaution à 15,3 millions d'euros, l'intégralité de la réserve de précaution a été annulée par décrets d'avance . Les annulations de crédit récurrentes sur le programme depuis plusieurs exercices 113 ( * ) font encourir le risque de ne pas atteindre les objectifs fixés par les directives dans le domaine de l'eau et de la biodiversité et se traduisent par une augmentation des restes à payer , comme l'illustre le graphique ci-dessous .

Évolution des crédits de paiement exécutés et des restes à payer du programme 113 « Paysage, eau et biodiversité »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les rapports annuels de performances de la mission

Ainsi, 97 millions d'euros d'engagements ne sont pas couverts par des paiements au 31 décembre 2016, soit 40 % des crédits de paiement exécutés du programme en 2016 , découlant principalement de l'engagement par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) de Normandie d'une opération d'arasement du barrage sur la Sélune.

Ensuite, des efforts soutenus de maîtrise des dépenses sont attendus des opérateurs, en dépit de l'extension de leur périmètre d'intervention .

Ainsi, l'article 32 de la loi de finances pour 2015 a prévu un prélèvement sur le fonds de roulement des agences de l'eau de 175 millions d'euros par an de 2015 à 2017 (soit 525 millions d'euros sur trois ans) 114 ( * ) , dans le cadre de l'effort collectif demandé à tous les opérateurs de l'État pour atteindre les objectifs de redressement des finances publiques.

Or cette ponction intervient alors même que les missions des agences de l'eau ont été élargies dans le cadre de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages 115 ( * ) , qui prévoit notamment que les agences de l'eau peuvent apporter une aide financière aux personnes publiques et privées pour leurs actions d'intérêt commun visant une gestion équilibrée et durable non seulement de la ressource en eau, mais également du milieu marin et de la biodiversité.

Les dépenses d'intervention des agences de l'eau sont ainsi inférieures de près de 150 millions d'euros aux dépenses prévues pour 2016 , et atteignent à 1,7 milliard d'euros. Votre rapporteur spécial ne peut que rappeler qu'une telle démarche place les agences dans une situation difficile, et qu'on ne peut exclure que de telles ponctions récurrentes sur leur fonds de roulement risquent d' obérer leur capacité à conduire des interventions.

III. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : « AIDE À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES »

1. Un exercice 2016 une nouvelle fois fortement excédentaire

Instauré en 2007, le dispositif du bonus-malus se traduit par l'octroi d'un « bonus » en cas d'acquisition d'un véhicule neuf émettant peu de CO 2 ou par l'application d'un « malus » , qui prend la forme d'une taxe additionnelle à la carte grise pour l'achat d'un véhicule émettant beaucoup de CO 2 .

En outre, une prime à la conversion , qui a remplacé au 1 er avril 2015 le « super-bonus », est attribuée lorsque l'achat d'un véhicule neuf s'accompagne du retrait de la circulation d'un véhicule diesel de plus de quinze ans (immatriculé avant le 1 er janvier 2000).

Les bonus et primes à la conversion sont versés par l'Agence de services et de paiement (ASP). Le compte d'affectation spéciale retrace en dépenses les contributions versées à l'ASP et en recettes le produit du malus.

L'exercice 2016 est marqué par un écart important entre prévision et exécution, plus important encore que celui constaté en 2015.

Évolution du taux d'exécution des crédits du compte d'affectation spéciale par programme

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Exécution des crédits du CAS « Aide à l'acquisition de véhicules propres » par programme en 2016

(en euros et en %)

Programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Taux de consommation (en %)

791 « Contribution au financement de l'attribution d'aides à l'acquisition de véhicules propres »

204 451 946

236 001 000

207 448 198

88 %

792 « Contribution au financement de l'attribution d'aides au retrait de véhicules polluants »

21 389 032

60 000 000

28 003 669

47 %

Total

225 840 978

296 001 000

235 451 867

80 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Ainsi :

- les recettes issues du malus ont été conformes au montant prévu en loi de finances initiale, soit 265,6 millions d'euros ; elles sont toutefois en baisse par rapport à 2015 (- 12 %) ;

- les dépenses ont été surévaluées : 235,45 millions d'euros ont été versés à l'ASP afin de financer les aides et primes à la conversion au lieu des 296 millions d'euros initialement prévus.

En conséquence, un excédent de 30,1 millions d'euros a été dégagé . En tenant compte du report de 7 millions d'euros de crédits de l'année 2015 sur l'année 2016, le solde s'est élevé l'année dernière à + 37,1 millions d'euros.

Solde du CAS « Aide à l'acquisition de véhicules propres »

(en millions d'euros)

2013

2014

2015

2016

Solde du CAS

- 4,9

+ 141

+ 75,7

+ 30,1

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

2. Le nouvel échec de la prime à la conversion modifiée en 2016

Plusieurs modifications des aides versées à l'acquisition de véhicules propres sont intervenues en 2016.

Le bonus - qui varie en fonction du taux d'émission de CO 2 et du type de véhicule concerné - a été une nouvelle fois resserré en 2016 : si le bonus pour les véhicules électriques demeure inchangé (6 300 euros), le montant du bonus accordé aux véhicules hybrides rechargeables s'établit à 1 000 euros au lieu de 4 000 euros en 2015 ; le montant du bonus accordé aux véhicules hybrides non rechargeables a également été abaissé (le montant maximal de l'aide a été porté de 2 000 à 750 euros), tandis que les véhicules hybrides utilisant le diesel ont été exclus du périmètre du « bonus ».

Ce recentrage sur les véhicules les moins émetteurs, associé à un niveau plus faible qu'attendu des ventes de véhicules électriques et hybrides rechargeables 116 ( * ) , a conduit à une sous-consommation importante des aides prévues.

Tirant les conséquences de l'échec de la première année de la prime à la conversion 117 ( * ) , le Gouvernement a modifié les conditions d'attribution de la prime à la conversion au 1 er janvier 2016 :

- la prime à la conversion est désormais accessible pour les véhicules diesel de plus de dix ans (contre quinze ans auparavant) ;

- la prime, sous condition de ressources, pour l'achat d'un véhicule thermique de norme Euro 6 est passée de 500 euros à 1 000 euros ;

- une nouvelle prime de 500 euros a été créée pour l'achat d'un véhicule thermique (hors diesel) de norme Euro 5, sous condition de ressources.

En dépit de ces évolutions, la prime à la conversion pour l'achat de véhicule thermique sous condition de ressources connaît un nouvel échec en 2016. Les crédits du programme 792 « Contribution au financement de l'attribution d'aides au retrait de véhicules polluants » avaient été augmentés de 30 millions d'euros à la suite d'un amendement gouvernemental en première lecture à l'Assemblée nationale du projet de loi de finances pour 2016, afin de faire face au surplus de dépenses attendues de l'extension du périmètre des bénéficiaires de la prime à la conversion. Or, la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 a donné lieu à l'annulation de près de 80 % de ces crédits supplémentaires.

Alors qu'un nombre important de véhicules éligibles à la prime à la conversion lors de l'achat de véhicules neufs ou d'occasion Euro 5 ou 6 avait été estimé par le ministère, le ministère explique que « peu de véhicules ont finalement bénéficié de cette prime ».

Les crédits de paiement prévus en loi de finances pour 2017 sur le programme 792 tiennent compte de cet échec répété en 2016, s'élevant à 27 millions d'euros, soit 1 million d'euros inférieur au montant des crédits exécutés en 2016 . En revanche, en prévision d'une forte progression des achats de véhicules électriques, le champ du bonus a été restreint par le décret du 30 septembre 2016 118 ( * ) et les crédits de paiement prévus sur le programme 791 ont augmentés de 47 %, s'élevant à 347 millions d'euros.

IV. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : « TRANSITION ÉNERGÉTIQUE »

1. Un premier exercice ne donnant qu'une vision partielle des charges annuelles effectives

L'article 5 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015 a créé le compte d'affectation spéciale (CAS) « Transition énergétique » . Cette évolution s'est accompagnée d'une vaste réforme de la contribution au service public de l'électricité (CSPE) .

La création du CAS a permis de prendre en charge une partie des dépenses auparavant financées de manière « extrabudgétaire » par la CSPE - principalement les dépenses de soutien à la production d'électricité à partir de sources renouvelables et à l'injection de bio-méthane dans les réseaux de transport et de distribution du gaz naturel.

Les autres charges financées par la CSPE ne relevant pas directement de la politique de transition énergétique ont été inscrites dans un nouveau programme budgétaire 345 « Service public de l'énergie » au sein de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » 119 ( * ) .

La loi de finances rectificative prévoit un financement des charges de service public de l'électricité et du gaz , ou charges de service public de l'énergie, par les taxes intérieures sur la consommation finale d'énergie : en 2016, par la totalité du montant perçu de CSPE, diminuée d'un montant de 2 043 millions d'euros attribuée au budget général et par une fraction de taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN).

Le CAS, dont les dépenses relèvent exclusivement du titre 6 « Dépenses d'intervention », comporte deux programmes. L e programme 764 « Soutien à la transition énergétique » , d'une part, finance :

- le soutien aux énergies renouvelables électriques , c'est-à-dire la compensation aux opérateurs du service public de l'électricité des charges imputables à leurs missions de service public, liées aux contrats d'obligation d'achat ou de complément de rémunération conclus avec des installations de production électrique à partir d'une source renouvelable ;

- le soutien à l'effacement de consommation électrique , c'est-à-dire les primes d'effacement versées aux entreprises lauréates d'appels d'offres incitant au développement des effacements de consommation ;

- le soutien à l'injection de bio-méthane , soit la compensation des charges imputables aux obligations de service public assignées aux fournisseurs de gaz naturel au titre de l'obligation d'achat de biogaz.

Le programme 765 « Engagements financiers liés à la transition énergétique » , d'autre part, finance :

- le remboursement du déficit de compensation des charges de service public de l'électricité accumulé auprès d'EDF au 31 décembre 2015 ;

- les versements au profit du budget général correspondant aux montants des remboursements et dégrèvements au titre de la TICFE 120 ( * ) ;

- les versements au profit de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) correspondant à des demandes de remboursement partiel au profit des entreprises qui bénéficiaient du plafonnement de l'« ancienne » CSPE 121 ( * ) au titre de leurs consommations pour les années 2013 à 2015.

Pour 2016, les montants budgétisés étaient inférieurs aux charges dues pour 2016, dans la mesure où la CSPE au titre d'une année n'est pas collectée intégralement au cours de l'année. Une annexe explicative jointe au projet de loi de finances rectificative pour 2015 présentait ainsi les modalités du financement du CAS : « pour 2016, et dans le cadre de la réforme de la CSPE, les modalités de recouvrement et la nouvelle TICFE impliquent que seules les consommations de l'année 2016 qui donneront lieu à facturation ou acompte entre le 1 er janvier et le 30 novembre 2016 pourront effectivement donner lieu à versement de TICFE au budget de l'État au cours de l'année 2016 ». Partant, « les charges de service public de l'électricité supportées en 2016 donneront lieu à compensation versée par l'État aux opérateurs au cours de l'année 2016 à hauteur de la recette perçue, c'est-à-dire 79,7 % ».

Les crédits ouverts pour 2016 (3,6 milliards d'euros) correspondaient ainsi à 77 % de la prévision de dépenses de soutien aux énergies renouvelables pour 2016 (4,7 milliards d'euros) faite par la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Il en va de même pour les dépenses prévues au titre de l'achat de biogaz, dont la prévision s'élevait à 17 millions d'euros pour 2016, alors que la CRE les estimait à 23 millions d'euros.

Autrement dit, les crédits ont été inscrits au CAS à partir du montant de recettes attendu pour 2016 et non à partir des charges effectivement dues pour l'année 2016.

2. Après un premier exercice excédentaire, des prévisions de recettes et de dépenses à fiabiliser

Ce premier exercice 2016 est marqué par une sous-consommation des crédits prévus en loi de finances initiale :

- le montant des recettes encaissées a été relativement conforme aux prévisions. Les recettes issues de la TICGN ont toutefois été supérieures de près de 41 % au montant prévu en loi de finances initiale ;

Exécution des recettes du CAS « Transition énergétique » en 2016

Fraction affectée au CAS en 2016

Prévision 2016

Exécution 2016

Écart à la prévision

CSPE

100 % diminuée de 2 043 millions d'euros

4 357

4 209

- 3 %

TICGN

2,16 %

17

24

41 %

Total

4 374

4 233

- 3 %

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

- les dépenses , qui se sont élevées à 3,9 milliards d'euros (AE=CP) ont été moins importantes que ne le prévoyait la budgétisation initiale, avec un taux d'exécution de 90 %. Les dépenses du programme 764 enregistrent toutefois un taux d'exécution de près de 98 %.

Exécution des crédits votés du compte d'affectation spéciale « Transition énergétique » par programme en 2016 (AE = CP)

(en millions d'euros et en %)

Prévision 2016

Exécution 2016

Taux d'exécution

Soutien aux énergies renouvelables électriques

3 633

3 558

98 %

Soutien à l'effacement de consommation électrique 122 ( * )

0

0

-

Soutien au bio-méthane

17

21,1

124 %

Total programme 764

3 650

3 579,1

98 %

Désendettement vis-à-vis des opérateurs supportant des charges de service public de l'électricité

194

199,6

103 %

Versement au profit du budget général correspondant aux montants des remboursements et dégrèvements au titre de la TICFE

0

0

-

Versements au profit de la CDC correspondant à des remboursements partiels de CSPE

530

157,6

30 %

Total programme 765

724

357,2

49 %

TOTAL CAS

4 374

3 936,3

90 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

En cours d'année, le montant des dépenses du programme 765 a été réévalué à la baisse, tandis que la baisse des prix du marché de l'électricité et un développement plus important qu'anticipé des énergies renouvelables ont entraîné une réévaluation à la hausse des charges de service public de l'électricité par la CRE 123 ( * ) . Deux mouvements sont ainsi intervenus en cours de gestion :

- 361,6 millions d'euros ont été annulés sur le programme 765 en raison d'une sous-exécution des remboursements partiels de l'ancienne CSPE ;

- 193,4 millions d'euros ont été ouverts sur le programme 764.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Prog.

LFI 2016

Lois de finances rectificatives

Total des ouvertures et annulations

Exécution 2016

Écart consommé/ crédits alloués en LFI

P764

AE

3 650

193,4

193,4

3 579

- 2 %

CP

3 650

193,4

193,4

3 579

- 2 %

P765

AE

724

- 361,6

- 361,6

357,2

- 51 %

CP

724

- 361,6

- 361,6

357,2

- 51 %

Total CAS

AE

4 374

- 168,2

- 168,2

3 936

- 10 %

CP

4 374

- 168,2

- 168,2

3 936

- 10 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le rapport annuel de performances annexé au CAS indique que les recettes ont été supérieures aux prévisions actualisées en fin de gestion, conduisant à un excédent de recettes par rapport aux crédits disponibles de 27,9 millions d'euros. De surcroît, « en raison d'un décalage conjoncturel exceptionnel d'un dernier paiement sur le CAS, le solde de crédits restant à fin d'année d'un montant de 269,5 millions d'euros n'a pas pu être utilisé ». Au total, le solde du CAS s'élève à 297 millions d'euros .

Équilibre du CAS « Transition énergétique » en 2016

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Le solde de crédits, d'un montant de 269,5 millions d'euros, a fait l'objet d'un gel en fin de gestion et d'un report pour 2017 - 264 millions d'euros sur le programme 764 et 5 millions d'euros sur le programme 765.

3. La particularité du CAS « Transition énergétique » réside dans la trajectoire divergente des deux programmes qui le compose

Tout d'abord, il importe de rappeler que la budgétisation du financement des dépenses de service public de l'énergie représente une avancée certaine, dès lors qu'elle permet au Parlement de suivre les recettes et les dépenses liées à la politique de l'énergie et de se prononcer chaque année sur leur évolution.

Comme le rappelait le rapporteur général 124 ( * ) , cette évolution permet de « clarifier le cadre juridique et de sécuriser les dépenses financées par la CSPE, à savoir principalement la politique de soutien au développement des énergies renouvelables ». En outre, le choix d'isoler les dépenses les plus dynamiques sur un compte d'affection spéciale permet d'en adopter les vertus, dès lors que les dépenses engagées à partir d'un CAS ne peuvent, en cours d'année, excéder le total des recettes constatées.

Toutefois, les deux programmes que comprend le CAS « Transition énergétique » connaissent deux trajectoires opposées : les dépenses de soutien aux énergies renouvelables connaissent une tendance haussière, tandis que les actions du programme 765 devraient avoir une durée de vie limitée.

D'une part, le développement croissant des filières renouvelables appellera des compensations de charges toujours plus importantes .

À ce titre, le programme 764 est doté de presque 5,7 milliards d'euros pour 2017 , ce qui représente une augmentation de 55 % par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2016. Cette augmentation résulte :

- en premier lieu du dynamisme des charges, lui-même issu du développement des filières renouvelables, notamment éolien, photovoltaïque, associé à la baisse des prix de marché de gros de l'électricité qui augmente le montant à compenser pour atteindre le prix garanti ;

- en deuxième lieu, de la budgétisation « en année pleine » du CAS en 2017.

La direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) estime ainsi qu'en 2020, le montant des charges de soutien aux énergies renouvelables se situerait entre 7,5 et 7,6 milliards d'euros.

Comme le rappelait votre rapporteur spécial dans son rapport sur les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017 125 ( * ) , face au dynamisme des dépenses de soutien aux EnR, le niveau des recettes affectées est appelé à augmenter à un rythme aussi soutenu. Ainsi, en 2017, 2,6 milliards d'euros de recettes supplémentaires se sont avérées nécessaires, financement assuré par la montée en puissance de la contribution-climat énergie (CCE) 126 ( * ) . La loi de finances pour 2017 a en outre supprimé l'affectation d'une partie du produit de la TICFE et de la TICGN au CAS et a compensé cette perte de recettes par une augmentation de la fraction de TICPE affectée 127 ( * ) .

Ainsi, le financement du compte repose désormais exclusivement sur les énergies les plus carbonées . La trajectoire de hausse de la contribution climat-énergie devrait permettre d'assurer cette compensation, mais cette évolution ne sera pas neutre pour les consommateurs finals d'énergie , c'est-à-dire les ménages et les entreprises qui auront à supporter chaque année une hausse de la fiscalité sur les produits énergétiques. Les objectifs d'évolution de la CCE fixés pour 2020 induiront un nouvel alourdissement de la pression fiscale de 5,1 milliards d'euros entre 2018 et 2020. D'ailleurs, le « Plan climat », présenté par le ministre d'État de la transition écologique et solidaire le 6 juillet dernier, prévoit la révision à la hausse de l'objectif d'un prix de la tonne de carbone de 100 euros d'ici 2030.

D'autre part, la durée de vie des actions du programme 765 sera limitée. La sous-exécution des crédits destinés aux remboursements partiels de CSPE en fournit d'ores-et-déjà l'exemple. Comme l'indique la Cour des comptes, « la CRE instruit les demandes de plafonnement au titre de l'année N jusqu'au 31 décembre N+3, soit 2018. L'essentiel du flux de demandes est néanmoins concentré sur l'année N+1. Ainsi, en 2016, la CRE a traité les demandes de plafonnement au titre de 2015, et marginalement celles au titre de 2014 et 2013 ». Le montant retenu dans le cadre du PLF pour 2017 a ainsi été d'un montant nettement inférieur - 75 millions d'euros.

En outre, l'action portant le remboursement de la dette constituée auprès d'EDF en raison des défauts de compensation accumulés les années précédentes revêt par nature un caractère éphémère. En 2015, l'État s'est engagé à remboursement une dette d'un montant de 5 772 millions d'euros contractée auprès d'EDF. Comme l'indique le compte général de l'État annexé au présent projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes, « la dette de l'État vis-à-vis d'EDF s'élève au 31 décembre 2016 à 5 578 millions d'euros . Par ailleurs, une charge à payer a été comptabilisée à hauteur de 801 millions d'euros, ce qui porte le passif à 6 379 millions d'euros à la clôture de l'exercice 2016. De plus, une provision pour transfert à hauteur de 317 millions d'euros a été comptabilisée », charge intégralement portée sur l'exercice 2015.

4. L'augmentation des charges de service public de l'énergie pose la question de son contrôle par le Parlement

Le Parlement n'est pas en mesure d'exercer un contrôle du montant des charges de service public devant être compensées chaque année .

En effet, les tarifs d'achat, qui conditionnent le soutien au développement des énergies renouvelables, sont fixés par voie réglementaire, et les appels d'offre lancés par l'État permettant de fixer la quantité d'énergie bénéficiant du soutien public et les tarifs d'achat ne sont pas encadrés par des règles fixées par le Parlement.

À ce titre, l'amendement proposé par le rapporteur général de la commission des finances du Sénat lors de la discussion de la loi de finances rectificative pour 2015 visait à ce que le Parlement puisse encadrer la politique de soutien au développement des énergies renouvelables en fixant, chaque année, en loi de finances, le plafond par filière des nouvelles capacités de production d'électricité issue de sources d'énergies renouvelables , ainsi que le plafond des surcoûts compensés aux opérateurs au titre de l'achat d'électricité issue de sources d'énergies renouvelables 128 ( * ) .

De surcroît, il y a lieu de s'interroger sur le juste montant de subventions à apporter aux énergies renouvelables . La mise en place du complément de rémunération 129 ( * ) par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui constitue une prime versée aux producteurs d'électricité en complément de la vente sur le marché de l'électricité produite a posteriori , permet aux installations de se confronter au prix du marché et devrait accompagner l'arrivée à maturité des filières. Le cadre européen impose dorénavant de recourir à des procédures de mise en concurrence, pour les installations de plus de 1 MW, qui permettent d'adapter les volumes installées en fonction du budget disponible chaque année.

Le soutien public doit ainsi être proportionné aux besoins de soutien des énergies renouvelables, sans engendrer de sur-rémunérations . C'est aussi pour répondre à cette problématique que votre commission des finances a sollicité la réalisation d'une enquête de la Cour des comptes au titre de l'article 58-2°de la loi organique relative aux lois de finances relative aux dispositifs de soutien aux énergies renouvelables, qui sera rendu public au début de l'année 2018.

MISSION « ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES » PROGRAMMES « INFRASTRUCTURES ET SERVICES DE TRANSPORTS » ET « SÉCURITÉ ET AFFAIRES MARITIMES, PÊCHE ET AQUACULTURE » ET CAS « SERVICES NATIONAUX DE TRANSPORT CONVENTIONNÉ DE VOYAGEURS » - MME MARIE-HÉLÈNE DES ESGAULX, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DES PROGRAMMES 203 « INFRASTRUCTURES ET SERVICES DE TRANSPORT » ET 205 « SÉCURITÉ ET AFFAIRES MARITIMES » EN 2016

1. Le programme « Infrastructures et services de transport » présente des spécificités très fortes, en particulier un niveau exceptionnel de fonds de concours, ce qui complique le suivi de son exécution

La loi de finances initiale pour 2016 prévoyait 3 182,4 millions d'euros d'autorisation d'engagement (AE) et 3 182 millions d'euros de crédits de paiement (CP) pour le programme 203 « Infrastructures et services de transport ».

Toutefois, ce programme présente la particularité de recevoir d'importants fonds de concours de la part de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et des collectivités territoriales (dans une proportion moindre). Si ces fonds de concours sont présentés de manière évaluative dans les documents annexés au projet de loi de finances et ne font donc pas partie des crédits adoptés par le Parlement, ils viennent s'imputer, en cours de gestion, sur le programme et sont compris dans les crédits ouverts et consommés.

Au total, en ajoutant ces fonds de concours ainsi que les attributions de produits, la loi de finances initiale prévoyait 5 431,9 millions d'euros en AE et 4 739,3 millions d'euros en CP pour le programme 203.

La consommation des AE du programme 203 s'est élevée à 4 459,3 millions d'euros tandis que celui des CP atteignait 4 406,5 millions d'euros , soit des niveaux inférieurs aux prévisions.

Exécution des crédits du programme « Infrastructures et services de transport » en 2016 (y compris fonds de concours et attributions de produits)

(en millions d'euros)

Exécution
2015

LFI
2016

Exécution
2016

Autorisations d'engagement

4 337,65

5 431,95

4 459,27

Crédits de paiement

4 810,61

4 739,34

4 406,48

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

En gestion, les décrets d'annulation et les décrets d'avance de l'année ont annulé (hors titre 2) 211,1 millions d'euros en AE et 214,9 millions d'euros en CP, soit un taux d'annulation de 6,6 % en AE et de 6,7 % en CP par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale et de 3,9 % en AE et de 4,5 % en CP par rapport aux crédits ouverts .

Au total, les annulations de crédits du programme 203 auront représenté plus de 55 % en AE et de 59 % en CP des annulations de crédit hors titre 2 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » , même si son taux d'annulation est inférieur à celui d'autres programmes de la mission en termes de crédits ouverts.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Infrastructures et services de transports

LFI 2015

Reports entrants

Mouvements en cours de gestion

(LFR et DA)

Virement ou transfert

Reports sortants

FDC / ADP

Total crédits consommés

Autorisations d'engagement

3 182,4

96,1

- 107,0

- 13,4

32,1

1 446,3

4 459,3

Crédits de paiement

3 182,0

244,5

- 228,3

- 13,4

- 317,2

1541,1

4 406,5

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

En 2016, le programme 203 a présenté, selon la Cour des comptes, un taux effectif de gel et de surgel hors titre 2 de 12 % en AE et de 14,6 % en CP .

En revanche, le programme a bénéficié d'une levée partielle de la réserve de précaution en gestion , à hauteur de 95,4 millions d'euros en AE et de 90 millions d'euros en CP.

Sur cette somme, 90 millions d'euros (AE=CP) sont venus compenser la réforme des péages pour les entreprises de fret ferroviaires .

Si les aides de l'État au fret ferroviaire ont une nouvelle fois joué un rôle de variable d'ajustement en supportant 71 % des annulations de crédits du programme 203 (le projet de loi de finances initiale prévoyait un montant d'aides de 254,7 millions d'euros ), les opérateurs ont pu bénéficier en 2016, conformément aux engagements pris par le Gouvernement, d'un volume d'aide nettement plus conséquent qu'en 2015 , année où celui-ci avait seulement atteint 37,3 millions d'euros .

En outre, 5,4 millions d'euros ont servi à verser une subvention au repreneur de la concession d'exploitation et de maintenance de la section internationale Perpignan Figueras , à la suite de la faillite du précédent concessionnaire TP Ferro.

À noter également que le Gouvernement a procédé à plusieurs redéploiements de crédits au sein du programme en cours de gestion, avec en particulier le financement pour 5 millions d'euros en AE d'un projet de route solaire compensé par une baisse des crédits consacrés à l'entretien routier et la compensation à hauteur de 2,3 millions d'euros de l'impact de la mise en service de la seconde phase de la LGV Est sur les circulations de TER , due au titre de l'article 127 de la loi SRU 130 ( * ) .

Votre rapporteur spécial relève également que le programme 203 porte 40 % des provisions de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » pour risques contentieux à hauteur de :

- 270 millions d'euros dans le litige opposant l'État aux sociétés habilités de télépéage dans le cadre de l'abandon de l'écotaxe poids lourds ;

- 180 à 200 millions d'euros dans le contentieux relatif au contrat de partenariat public privé pour la construction et l'exploitation de centres d'exploitation et d'intervention routiers (CEI).

2. Le programme 205 « Sécurité et affaires maritimes »

Alors que le programme 205 « Sécurité et affaires maritimes » bénéficiait de 186 millions d'euros en AE et de 183,5 millions d'euros en CP en loi de finances initiale, seuls 100,1 millions d'euros en AE et 158,2 millions d'euros en CP ont été effectivement consommés en 2016.

La diminution très forte de - 46 % des dépenses en crédits d'engagement s'explique principalement par l a suppression de 63,1 millions d'euros d'engagements juridiques relatifs à l'ancien fonds européen pour la pêche (FEP) .

Exécution des crédits du programme « Sécurité et affaires maritimes,
pêche et aquaculture » en 2016

(en millions d'euros)

Exécution 2015

LFI 2016

Exécution 2016

Autorisations d'engagement

159,91

186,0

100,1

Crédits de paiement

174,62

183,5

158,2

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La réserve de précaution initiale représentait 13,9 millions d'euros en AE et 13,7 millions d'euros en CP, auxquels se sont ajoutés le gel des reports de 2015 et la mise en réserve de crédits par décret d'avance, pour un total supplémentaire de 17,7 millions d'euros en AE et de 7,7 millions d'euros en CP. En fin d'année, les crédits de la réserve de précaution ont été annulés à hauteur de 23,6 millions d'euros en AE et de 21,5 millions d'euros en CP, le programme bénéficiant seulement d'une libération partielle de 8 millions d'euros en AE .

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture

LFI 2016

Reports entrants

Mouvements en cours de gestion

(LFR et DA)

Virement ou transfert

Reports sortants

FDC / ADP

Total crédits consommés

Écart crédits consommés / crédits alloués en LFI

Autorisations d'engagement

186,0

16,9

- 21,7

- 1,6

- 0,2

-8,9

100,1

- 46,2 %

Crédits de paiement

183,5

7,0

- 21,5

- 1,9

- 13,4

4,6

158,2

- 13,8 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les principales dépenses d'investissement du programme ont porté sur la poursuite des travaux de modernisation des CROSS et de la signalisation maritime , à hauteur de 6,7 millions d'euros en AE et de 3,8 millions d'euros en CP. En revanche, le renouvellement du patrouilleur Osiris dans l'océan Indien, pour un montant de 3,5 millions d'euros en AE , a été reporté à 2017.

À noter également que les crédits d'intervention de l'action 6 « gestion durable de la pêche » exécutés se sont limités à 16,3 millions d'euros , alors que 44,8 millions d'euros de crédits avaient été votés en loi de finances initiale, en raison de l'absence de crise du secteur de la pêche en 2016 et de la mise en place des premiers engagements du fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) en fin d'année.

II. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. La situation financière de l'AFITF, qui a vu ses « restes à payer » augmenter de nouveau en 2016, demeure très fragile

En 2016, l'AFITF a perçu 2 058,1 millions d'euros de recettes affectées : 330,6 millions d'euros au titre de la redevance domaniale autoroutière, 512,4 millions d'euros de taxe d'aménagement du territoire, 351,6 millions d'euros de produit des amendes radars, 763,5 millions d'euros de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et 100 millions d'euros au titre de la contribution des sociétés concessionnaires d'autoroutes prévue dans le cadre du premier plan de relance autoroutier.

Les ressources de l'AFITF sur la période 2014-2016

Source : Cour des comptes et AFITF

Toujours en 2016, l'AFITF a dépensé 2 474,4 millions d'euros de crédits d'engagement , soit une forte hausse de 74,8 % par rapport aux engagements de 2015, qui s'élevaient à 1 415,7 millions d'euros .

Cette augmentation très importante s'explique notamment par un engagement complémentaire de 290 millions d'euros en faveur de la nouvelle route du littoral à La Réunion et par le triplement des engagements en faveur du mode ferroviaire , en particulier avec l'engagement de 720 millions d'euros pour l'achat de matériel roulant en faveur des lignes Paris-Cherbourg et Paris-Le Havre , en vertu de l'accord conclu entre la région Normandie et l'État dans le cadre du transfert à cette région de ces deux lignes de trains d'équilibre du territoire-TET (voir infra ). À noter également l'engagement de 160 millions d'euros au profit des projets d'infrastructures de transport en commun d'Île-de-France .

Les engagements en faveur des modes de transport fluvial et des ports , en revanche, ont connu une diminution , passant respectivement de 88 millions d'euros à 76,9 millions d'euros , et de 59 millions d'euros à 47,6 millions d'euros .

Au total, les engagements routiers ont représenté 44 % du total des engagements pris par l'AFITF, soit une forte hausse par rapport à la moyenne de 34 % constatée depuis 2005 , date de création de l'agence. Les transports ferroviaires ont pour leur part représenté 41 % des engagements , les transports collectifs en agglomération 9 % des engagements et les transports maritimes et fluviaux 5 % des engagements .

À noter par ailleurs que 31 % du total des engagements consentis par l'AFITF en 2016 l'ont été dans le cadre des contrats de plan État-Régions (CPER) et que 63 % des engagements hors CPER ont été consacrés à la régénération des réseaux existants .

Dépenses d'intervention de l'AFITF en 2016

Ventilation par mode

Source : rapport d'activité de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France pour l'exercice 2016

Répartition des engagements de l'AFITF par mode de transport en 2016

Source : commission des finances, à partir du rapport d'activité de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France pour l'exercice 2016

Répartition des paiements de l'AFITF par mode de transport en 2016

Source : commission des finances, à partir du rapport d'activité de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France pour l'exercice 2016

En ce qui concerne les crédits de paiement, l'AFITF a consommé 2 019,5 millions d'euros en 2016 . Si en apparence, ce montant est inférieur de 262,9 millions d'euros par rapport à celui de 2015, le niveau atteint l'an passé s'expliquait uniquement par le poids du financement de l'indemnisation de l'écotaxe poids lourds , qui avait représenté 528 millions d'euros et n'a représenté que 47 millions d'euros en 2016.

Ainsi, en excluant ce poste de dépenses exceptionnel, le niveau des crédits de paiement dépensés par l'AFITF a en réalité dépassé de 219,6 millions d'euros celui de 2015. 289 millions d'euros ont été consacrés à la régénération du réseau routier national (soit une hausse de 103 millions d'euros par rapport à 2015) et 70 millions d'euros à celle du réseau fluvial (soit une hausse de 20 millions d'euros), conformément aux engagements du Gouvernement, qui en avait fait une priorité (voir infra ). Les paiements routiers ont représenté 38 % des crédits de paiement dépensés par l'AFITF et les paiements ferroviaires 40 % .

L'AFITF a également accéléré en 2016 son désendettement vis-à-vis de SNCF Réseau , puisque le montant de la dette dont elle doit s'acquitter auprès de l'opérateur du réseau ferré national, née du besoin de financement de la seconde phase de la LGV Est et de la LGV Sud Europe Atlantique, a diminué de 285 millions d'euros , passant de 745,7 millions d'euros fin 2015 à 460,9 millions d'euros fin 2016, la dette totale de l'AFITF atteignant 818 millions d'euros (dont 394 millions d'euros de dette Dailly 131 ( * ) au titre de la convention Ecomouv visant à solder l'échec de l'écotaxe poids lourds).

En dépit de ce progrès, la situation financière de l'AFITF demeure très précaire car elle va être confrontée à une véritable « bosse de financement » dès 2017 .

De fait, les « restes à payer » de l'agence ont encore augmenté de 478,4 millions d'euros en 2016 , pour atteindre 12,3 milliards d'euros , soit le différentiel entre le cumul des engagements contractés par l'AFITF depuis sa création ( 33,56 milliards d'euros ) et le cumul des paiements effectués depuis cette date ( 23,27 milliards d'euros ).

Évolution des restes à payer de l'AFITF, corrigés de l'écotaxe poids lourds (2005-2017)

Source : AFITF

A ces montants déjà connus vont s'ajouter les financements des loyers des nouvelles lignes LGV dont la mise en service est intervenue le 1 er juillet 2017, la poursuite de la prise en charge du renouvellement du matériel roulant des trains d'équilibre du territoire (TET) transférés aux régions (voir infra ) ou bien encore le financement du projet ferroviaire Lyon-Turin et du Canal Seine-Nord Europe , sauf si le nouveau Gouvernement décide de remettre en question ces projets.

2. L'entretien du réseau routier non concédé, qui s'était dégradé ces dernières années, fait enfin l'objet d'un rattrapage, grâce à un niveau d'investissements en nette hausse

Alors que le réseau routier non concédé subissait un vieillissement de plus en plus préoccupant , les pouvoirs publics ont pris progressivement conscience ces dernières années de la nécessité de faire de l'entretien et de la régénération des chaussées une véritable priorité .

Ainsi, les dépenses de l'État en faveur du mode de transport routier ont atteint 1 322,2 millions d'euros en AE et 1 362,2 millions d'euros en CP en 2016, en hausse par rapport à 2015, grâce à des fonds de concours supplémentaires versés par l'AFITF au programme 203 dans le cadre du plan d'investissement exceptionnel de 150 millions d'euros pour l'entretien du réseau routier national et des voies navigables annoncé par le Gouvernement le 8 février 2016.

Surtout, les dépenses d'investissement en entretien routier ont connu une augmentation très significative puisque le montant des crédits exécutés s'est élevé à 486,9 millions d'euros en 2016, contre 401,5 millions d'euros en 2015 et 337,7 millions d'euros en 2014. Seul bémol : la baisse de 11,5 millions d'euros des crédits dévolus à l'entretien préventif ne va pas dans le bon sens.

Les efforts de régénération routière méritent également d'être salués puisqu'ils ont atteint 298,2 millions d'euros en crédits de paiement en 2016, soit une hausse de 71 millions d'euros par rapport à 2015. Selon la Cour des comptes, les moyens consacrés à la régénération auront été multipliés par 2,6 entre 2012 et 2016 : cet effort devra être maintenu dans le temps pour permettre à notre réseau routier de retrouver un haut niveau de performance.

3. L'augmentation très significative en 2016 des dépenses d'investissement de la Société du Grand Paris marque le début du chantier du Grand Paris Express

Les dépenses de la Société du Grand Paris, qui étaient de 292 millions d'euros en 2014 et de 563 millions d'euros en 2015, se sont élevées à 970 millions d'euros en 2016, soit une hausse considérable de 72,3 % . Elle n'a toutefois dépensé que 87 % des sommes inscrites à son budget , en raison du report au début de l'année 2017 de certaines sommes qui devaient être exécutées au dernier semestre 2016.

Ses recettes se sont élevées à 532 millions d'euros , en croissance de 2,5 % par rapport aux 519 millions d'euros de 2015. Elles se sont néanmoins avérées moins importantes que les 543 millions d'euros attendus, en raison d'un niveau de recettes de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux inférieur de 24 millions d'euros à la prévision initiale.

Au total, la SGP a perçu 326,3 millions d'euros au titre de la taxe annuelle sur les surfaces à usage de bureaux (soit 4,2 millions d'euros de moins qu'en 2015), 117 millions d'euros au titre de la taxe spéciale d'équipement (même niveau qu'en 2015) et 65 millions d'euros au titre de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau-IFER (soit 5 millions d'euros de plus qu'en 2015), recettes fiscales auxquelles se sont ajoutées plusieurs recettes non fiscales, en particulier une subvention européenne de 19 millions d'euros accordée au titre de l'amélioration des liaisons entre le centre de Paris et les aéroports et les gares (la subvention accordée à ce titre en 2015 était de 7,3 millions d'euros).

Les dépenses d'investissement de la SGP, qui étaient passées de 180,1 millions d'euros en 2014 à 261,1 millions d'euros en 2015, soit une hausse de 45 % , ont augmenté de 85 % en 2016, pour atteindre 483 millions d'euros , un niveau qui demeure toutefois inférieur de 92 millions d'euros à celui qui était prévu par le budget initial de l'opérateur.

Ces dépenses d'investissement, qui à ce stade concernent essentiellement la ligne 15 sud , le tronçon 14 nord , la ligne 16 et la ligne 17 sud , ont surtout financé des acquisitions foncières (elles sont passées de 96,3 millions d'euros en 2015 à 157 millions d'euros en 2016), mais également des dépenses d'études et d'assistance à maîtrise d'ouvrage , ainsi que les premiers travaux préparatoires , de dévoiement des réseaux et de génie civil de la ligne 15 sud, en particulier à la gare de Fort d'Issy-Vanves-Clamart , marquant ainsi le coup d'envoi du grand chantier du Grand Paris Express .

4. Le plan de relance de l'investissement pour l'entretien du réseau routier et fluvial de février 2016 a permis à Voies navigables de France d'augmenter son niveau d'investissement en dépit d'une nouvelle diminution de sa subvention pour charges de service public

Voies navigables de France (VNF) , établissement public placé sous la tutelle du ministère chargé des transports, a pour mission la gestion des voies navigables au nom de l'État . Il bénéficie à ce titre d'une subvention pour charges de service public portée par le programme 203.

Alors que la loi de finances initiale avait prévu que cette somme s'élèverait à 251 millions d'euros en 2016, elle s'est finalement limitée à 244,1 millions d'euros , soit un niveau inférieur de 1,7 million d'euro à celui de 2015 et de 11,7 millions d'euros à celui de 2014. Cette diminution de la subvention pour charges de service public s'explique par l'absence de versement de la réserve de précaution de 6,9 millions d'euros constituée sur cette subvention.

Si VNF a perçu 140,7 millions d'euros au titre de la taxe hydraulique, 7,9 millions d'euros ont été rétrocédés au budget général en raison du plafonnement de la taxe fixé à 132,8 millions d'euros .

VNF a en revanche bénéficié de 94,5 millions d'euros de subventions de l'AFITF au titre de la restauration et de la modernisation du réseau fluvial , dont 30 millions d'euros résultant d'un abondement décidé dans le cadre du plan de relance de l'investissement pour l'entretien du réseau routier et fluvial annoncé par le Gouvernement le 8 février 2016.

Grâce à ce complément, les dépenses d'investissement de VNF ont pu atteindre 178,3 millions d'euros , soit un niveau supérieur de 16,8 millions d'euros à celui de 2015 et d e 26,6 millions d'euros au budget initial de l'opérateur .

Ces investissements ont porté sur la remise en état du réseau à grand gabarit , qui demeure insuffisante, la modernisation des méthodes d'exploitation , la protection de l'environnement , la sécurité ainsi que sur des opérations de développement des voies navigables (projet Seine-Escaut, canal du Rhône à Sète).

Enfin, les dépenses de fonctionnement ont atteint 107,5 millions d'euros , soit 36,6 millions d'euros de moins que prévu dans le budget initial de l'opérateur, en raison du transfert de la maîtrise d'ouvrage du Canal Seine-Nord Europe à la nouvelle Société du Canal Seine-Nord Europe.

III. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « SERVICES NATIONAUX DE TRANSPORT CONVENTIONNÉ DE VOYAGEURS »

1. L'exécution des crédits du compte d'affectation spéciale en 2016 a été suspendue en raison du délai de signature de la nouvelle convention d'exploitation des TET entre l'État et SNCF Mobilités

Le compte d'affectation spéciale « Services de transport nationaux conventionnés de voyageurs » porte les crédits relatifs aux « trains d'équilibre du territoire » (TET) , c'est-à-dire aux trains Intercités , dont l'État est depuis 2011 l'autorité organisatrice 132 ( * ) .

Le CAS perçoit diverses taxes affectées (contribution de solidarité territoriale, fraction de la taxe d'aménagement du territoire, taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires) qui lui permettent de reverser une dotation à SNCF Mobilités afin de financer le déficit qu'elle constate au titre de l'exploitation des lignes TET et de renouveler leur matériel roulant 133 ( * ) .

Au titre de l'exercice 2016, il était prévu en loi de finances initiale que les dépenses du compte s'élèveraient à 400 millions d'euros en AE et à 419,4 millions d'euros en CP, à raison de 282 millions d'euros en AE et de 301,4 millions d'euros en CP au titre de l'exploitation et de 118 millions d'euros pour la contribution de l'État aux investissements relatifs à la maintenance et à la régénération du matériel roulant .

À l'issue de la gestion, le compte fait apparaître des dépenses très réduites de 505 995 euros en AE et de 19,4 millions d'euros en CP au titre de l'exploitation et une absence de crédits exécutés au titre du matériel roulant .

De fait, l'État n'a pas versé en 2016 de contribution à l'exploitation des TET à SNCF Mobilités . En contrepartie, il n'a pas non plus prélevé sur l'entreprise la contribution de solidarité territoriale (CST) ni la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF).

Cette situation exceptionnelle s'explique par le délai nécessaire pour la signature par l'État et SNCF Mobilités de la nouvelle convention d'exploitation des lignes de trains d'équilibre du territoire , qui n'a été paraphée que le 27 février 2017.

Cette convention d'exploitation , qui prend en compte les nombreux effets de la réforme des TET mise en oeuvre depuis deux ans (voir infra ), couvrira la période 2016-2020 et pourra être prolongée jusqu'en 2023 . Elle est rétroactive, dans la mesure où elle est réputée en vigueur depuis le 1 er janvier 2016.

Ces conditions très particulières ont conduit à une quasi inactivité du CAS en 2016 , puisque l'État a seulement versé à SNCF Mobilités le solde de 19 millions d'euros de contribution à l'exploitation des TET pour 2015.

Ce n'est qu'après la signature de la convention au premier semestre 2017 que l'État a versé à SNCF Mobilités un total de 400 millions d'euros issus des recettes de la CST et de la TREF , dont le prélèvement avait été autorisé par des arrêtés publiés au Journal Officiel le 31 décembre 2016, ainsi que des recettes de la taxe d'aménagement du territoire , dont le montant avait été porté à 84 millions d'euros par la loi de finances rectificative pour 2016 (contre 19 millions d'euros en 2015).

2. La nouvelle convention d'exploitation des TET tire les conséquences de la réforme profonde de ces lignes ferroviaires

Dans un contexte d'aggravation du déficit d'exploitation des TET , le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche avait mis en place en novembre 2014 une commission « TET d'avenir » et lui avait confié la mission d'étudier les dysfonctionnements de l'offre TET afin de proposer des axes d'amélioration . Sur la base du diagnostic de cette commission, il avait établi le 7 juillet 2015 une feuille de route « pour un nouvel avenir des trains d'équilibre du territoire » visant à réformer profondément les lignes Intercités .

À la suite d'un important travail de concertation, le Gouvernement a décidé de cesser progressivement de financer six lignes de nuit 134 ( * ) entre le 1 er octobre 2016 et le 1 er octobre 2017 135 ( * ) , seules les lignes Paris-Briançon et Paris-Rodez-Latour-de-Carol restant en activité, à raison d'un aller-retour quotidien , en tant que lignes d'aménagement du territoire .

D'autre part, il a signé des accords de reprise de lignes Intercités avec de nombreuses régions . Ainsi, la région Normandie , par un accord signé le 25 avril 2016, a accepté de devenir l'autorité organisatrice des cinq lignes TET qui la desservent 136 ( * ) et d'en supporter les déficits , à compter du 1 er janvier 2020 au plus tard, en contrepartie d'un financement de l'État de 720 millions d'euros pour renouveler le matériel roulant , largement vétuste, des lignes Paris-Caen-Cherbourg et Paris-Rouen-Le Havre.

A la Normandie sont ensuite venues depuis s'ajouter les régions Grand Est, Nouvelle-Aquitaine, Hauts-de-France, Occitanie et Centre-Val de Loire. Au total, 18 lignes ont été transmises aux régions , selon des modalités spécifiques pour chacune d'entre elles.

En revanche, l'État est resté l'autorité organisatrice des lignes de longue distance structurantes au niveau national, à savoir les trois lignes Paris-Orléans-Limoges-Toulouse , Paris-Clermont-Ferrand et Bordeaux-Toulouse-Marseille . Il s'est engagé à acquérir d'ici 2025 des rames neuves adaptées aux besoins des voyageurs sur ces lignes, pour un montant d'environ 1,2 milliard d'euros .

Dans ce cadre, il est d'ores-et-déjà acté que la ligne Bordeaux-Toulouse-Marseille , dont le tronçon Bordeaux-Toulouse a vocation à devenir une ligne à grande vitesse (LGV) dans le cadre du Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) bénéficiera de 15 rames TGV Euroduplex fabriquées par Alstom , comme le Gouvernement l'a annoncé le 4 octobre dans le cadre de la sauvegarde du site de Belfort.

Le compte général de l'État pour 2016 précise l e montage financier qui a été retenu pour l'achat de ces 15 rames. Alors qu'il avait été envisagé dans un premier temps qu'elles soient acquises par l'AFITF, il a finalement été décidé que c'est SNCF Mobilités qui les acquerrait directement , en échange d'une diminution de la contribution de solidarité territoriale (CST) qu'elle verse au présent CAS « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ». Il paraissait en effet peu cohérent que l'État acquière pour son compte , via l'AFITF, des rames de TGV .

Par ailleurs, ont également été maintenues sous l'autorité de l'État , au titre de l'aménagement du territoire les trois lignes Nantes-Bordeaux , Toulouse-Hendaye et Nantes-Lyon .

La convention signée le 27 février 2017 entre l'État et SNCF Mobilités relative aux lignes d'équilibre du territoire (TET) pour la période 2016-2020 (voir supra ) a tiré les conséquences de ces évolutions profondes .

Elle prévoit que la contribution financière de l'État à SNCF Mobilités portée par le CAS « Service nationaux conventionnés de voyageurs » pour couvrir le déficit de ces trains s'élèvera à 1 668 millions d'euros entre 2016 et 2020 et diminuera de 400 millions d'euros pour 2016 à 250 millions d'euros pour 2020 grâce aux reprises de lignes par les régions (contre 550 millions d'euros en l'absence de réforme).

BUDGET ANNEXE « CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS » ET PROGRAMME « MÉTÉOROLOGIE » DE LA MISSION « ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES » - M. VINCENT CAPO-CANELLAS, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La mission « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) retrace dans le cadre d'un budget annexe les activités de production de biens et de prestation de services de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) .

Elle est l'un deux seuls budgets annexes qui subsistent depuis la loi de finances pour 2007, avec le budget annexe « Publications officielles et information administrative ». Elle rassemble trois programmes : le programme 613 « Soutiens aux prestations de l'aviation civile » (consacré aux fonctions supports de la DGAC), le programme 612 « Navigation aérienne » et le programme 614 « Transports aériens, surveillance et certification ».

Le BACEA est présenté en équilibre . Ses dépenses sont financées principalement par des taxes et redevances , par le produit des recettes tirées de l'activité de ses services et, le cas échéant, par la variation de son endettement .

Le projet annuel de performances pour 2016 prévoyait un équilibre global du BACEA en dépenses et en recettes à 2 115,4 millions d'euros . En exécution, ces dépenses et ces recettes se sont élevées à 2 156,7 millions d'euros . Le BACEA a enregistré un excédent d'exploitation de 189 millions d'euros , en hausse de 65 millions d'euros par rapport à celui de 2015 (124 millions d'euros). Le fonds de roulement , pour sa part, a atteint 34,3 millions d'euros , soit 8,4 millions d'euros de plus que ne le prévoyait la loi de finances initiale pour 2016.

Exécution des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » en 2016

(en millions d'euros)

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Écart exécution 2016 / exécution 2015

Écart exécution 2016 / LFI 2016

Autorisations d'engagement

2 198

2 110,4

2 150,6

- 2,2 %

2,0 %

Crédits de paiement

2 146,3

2 115,4

2 156,7

0,5 %

2,0 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les recettes de redevances se sont élevées à 1 634,7 millions d'euros , dont 1 605,1 millions d'euros au titre des redevances de navigation aérienne (redevance de route, RSTCA 137 ( * ) métropole et redevances de navigation aérienne outre-mer, redevance océanique) et 29,6 millions d'euros au titre des redevances de surveillance et certification, soit une hausse de 37,2 millions d'euros par rapport à la prévision initiale : comme en 2015, la croissance du trafic aérien survolant la France, supérieure de 2,5 % à la prévision, a permis au BACEA de bénéficier de recettes de redevance de route très dynamiques (cette redevance représente à elle seule 63,6 % des recettes d'exploitation de la DGAC et 81 % de ses recettes commerciales ).

De fait, 2016 a été une année record pour les services de la navigation aérienne , avec plus de 3 millions de vols contrôlés (soit une hausse de 4,4 % par rapport à 2015) et 49 jours de pointe dépassant les 10 000 vols contrôlés , contre 5 jours de pointe dépassant ce seuil en 2015.

Comme le relève le Compte général de l'État pour 2016 , les prestations de service de la navigation aérienne sont sa principale source de revenus au titre de ses ventes de produits et de prestations de service (elles représentent 48,6 % des 3 377 millions d'euros de ventes de produits et prestations de services de l'État).

En revanche, les recettes de la taxe d'aviation civile , intégralement perçue par le BACEA depuis le 1 er janvier 2016, ont été nettement moins favorables qu'espéré , puisque son produit a atteint 385,1 millions d'euros , soit 35,4 millions d'euros de moins que les 420,6 millions d'euros prévus par la loi de finances initiale : alors que 89 millions de passagers étaient attendus en France en 2016, seuls 86,4 millions ont été effectivement enregistrés en raison d'une conjoncture difficile (attentats terroristes, grèves et manifestations, inondations).

À noter également que le BACEA a bénéficié en 2016 à titre exceptionnel par voie de fonds de concours de 40,5 millions d'euros de subventions d'exploitation destinées à ses projets de modernisation de la navigation aérienne (4-Flight, Coflight, Erato) financées essentiellement (à hauteur de 37,7 millions d'euros) par l' Innovation and networks executive agency (Inea) de la Commission européenne.

II. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Le désendettement du budget annexe s'est accéléré en 2016 : sa dette représente désormais 52,8 % de ses recettes d'exploitation, contre 67,4 % en 2014

En 2016, le budget annexe a emprunté 106,6 millions d'euros , soit 6 millions d'euros de moins que le montant autorisé par la loi de finances initiale (112,6 millions d'euros). Surtout, ce montant a diminué de 61,3 millions d'euros par rapport à 2015 ( 167,9 millions d'euros ) et de 160,6 millions d'euros par rapport à 2014 ( 267,2 millions d'euros ).

Alors que la dette du BACEA avait connu une augmentation très forte dans les années qui avaient suivi la crise du transport aérien de 2009 pour atteindre un pic à 1,28 milliard d'euros au 31 décembre 2014 , son encours a diminué de 123,4 millions d'euros en 2016, soit une baisse de -10,1 % , pour s'établir à 1 100,9 millions d'euros au 31 décembre 2016 . La dynamique de résorption de la dette du BACEA s'amplifie donc , après celle déjà observée en 2015 (diminution de - 4,5 % de l'encours).

Évolution de l'endettement du budget annexe

(en millions d'euros)

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

PLF 2017

Emprunt contracté

103,0

104,0

282,0

250,7

194,4

250,3

247,9

267,2

167,9

106,6

102,6

Remboursement des emprunts (capital)

104,0

104,0

108,0

154,0

181,5

196,9

222,9

225,3

225,1

219,7

217,1

Endettement net
au 31/12

877,7

877,7

1 051,6

1 148,3

1 161,2

1 214,4

1 239,4

1 281,5

1 224,3

1 100,9

993,7

Évolution en valeur absolue

- 0,7

0,0

173,9

96,7

12,9

53,2

25,0

42,1

- 57,2

-123,4

-107,2

Évolution en pourcentage

- 0,08 %

0 %

19,8 %

9,2 %

1,1 %

4,6 %

2,01 %

3,40 %

- 4,46 %

-10,1 %

-9,7 %

Source : commission des finances du Sénat

Endettement du budget annexe au 31 décembre de 2007 à 2017

(en millions d'euros)

Source : commission des finances

Ainsi, alors que le ratio de l'endettement sur les recettes d'exploitation du BACEA , qui constitue l'un des principaux indicateurs de performance de la mission, s'élevait à 67,4 % en 2014 et à 60,4 % en 2015, il a significativement reculé en 2016 pour atteindre le chiffre de 52,8 % , soit un résultat plus favorable que celui qui avait été prévu par la DGAC, qui s'était fixé pour objectif un ratio de 55,8 % . Outre les efforts de réduction de l'encours de dette, ce bon résultat s'explique avant tout par le dynamisme des recettes de la DGAC , et en particulier celles de la redevance de route.

La poursuite du recul de la dette du BACEA , dont l'augmentation continue avait pu paraître un temps menacer la soutenabilité financière de la DGAC, constitue une bonne nouvelle dans la perspective d'un redressement de nos finances publiques .

Elle devra impérativement se poursuivre dans les années à venir et ce, d'autant plus que la DGAC va devoir veiller tout à la fois à maîtriser ses dépenses en matière de masse salariale et à maintenir ses dépenses d'investissement , qui constituent deux sujets de vigilance pour votre rapporteur spécial.

2. La masse salariale de la DGAC, qui représente près de la moitié des dépenses du BACEA, poursuit sa hausse en dépit du respect du schéma d'emploi, en raison du caractère très favorable des protocoles sociaux

Les dépenses de personnel de la DGAC , qui représentent 49,2 % du BACEA , se sont élevées à 1 141 millions d'euros en 2016, soit seulement 2 millions d'euros de moins que la prévision de la loi de finances initiale.

Hors CAS « Pensions », ces dépenses sont passées de 875,1 millions d'euros en 2015 à 879,3 millions d'euros en 2016, soit une légère augmentation de 0,5 % sur un an. Selon la Cour des comptes, le coût moyen par ETPT de la DGAC a connu une hausse significative de 1,0 % en 2016 après une hausse de 2,1 % en 2015.

Si le respect du schéma d'emploi (- 100 ETP par an) a permis de réaliser une économie de 4,8 millions d'euros , la masse salariale du BACEA a continué à augmenter à hauteur :

- de 10,1 millions d'euros en raison de deux dispositifs spécifiques en faveur des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA) , à savoir le financement du complément individuel temporaire destiné à compenser les effets de l'allongement de la durée de cotisation prévu par la loi de réforme des retraites de 2014 et la contribution à l'équilibre du fonds de gestion de leur allocation temporaire complémentaire ;

- de 7,3 millions d'euros en raison de mesures catégorielles prévues par les protocoles sociaux avantageux des personnels de la DGAC.

De fait, le caractère onéreux de ces protocoles est régulièrement mis en avant par la Cour des comptes, qui a calculé que les dépenses au titre des mesures prévues par les protocoles sociaux successifs s'élevaient à 33 millions d'euros depuis 2013 , à comparer avec les économies de 16,7 millions d'euros réalisées grâce au schéma d'emploi.

Or, la situation ne paraît pas prête de changer, puisque le coût pour les finances publiques du nouveau protocole social 2016-2019 signé le 19 juillet 2016 dans un contexte social tendu est évalué à 45 millions d'euros sur la période, comprenant des mesures catégorielles et l'application du protocole interministériel « parcours professionnel, carrières et rémunérations » (PPCR) . Si son coût s'est limité à 2,1 millions d'euros en 2016, celui-ci est estimé à 25 millions d'euros pour 2017.

Aussi votre rapporteur spécial sera-t-il très attentif au respect des contreparties demandées aux personnels de la DGAC , et en particulier aux ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne (ICNA), en matière de productivité et d'adaptation du temps de travail , qui doivent leur permettre de faire face à la hausse continue du trafic et à sa saisonnalité de plus en plus marquée .

3. L'effort de rattrapage du retard d'investissements en faveur de la modernisation du contrôle de la navigation aérienne a été amplifié en 2016

Les dépenses d'investissement revêtent une grande importance pour la DGAC, car elles sont indispensables pour assurer le passage au « Ciel unique européen » , initiative de la Commission européenne qui vise à moderniser la gestion de l'espace aérien européen , en particulier grâce au coûteux programme technologique SESAR .

Or la DGAC a pris du retard dans son programme de modernisation du contrôle de la navigation aérienne , ainsi que l'avait relevé la Cour des comptes dans un référé portant sur les investissements réalisés entre 2009 et 2013 138 ( * ) .

Afin de tenter de combler ce retard, la DGAC n'a cessé d'augmenter ses dépenses d'investissement ces dernières années : celles-ci sont passées de 138,3 millions d'euros en 2013 à 179,7 millions d'euros en 2014 puis 181 millions d'euros en 2015.

Ce montant a connu une nouvelle augmentation très significative et bienvenue de 12,8 % en 2016 pour atteindre 204,2 millions d'euros , soit un niveau qui n'avait plus été atteint depuis 2010.

La hausse des crédits d'investissement de la DGAC de 2013 à 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Sur ce total, 189,5 millions d'euros (soit 92,8 % du total) sont dévolus aux grands programmes de modernisation du contrôle de la navigation aérienne (4-Flight, Coflight, Erato, Sysat, etc.) qui doivent permettre à la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) de faire face à la hausse à venir du trafic dans de bonnes conditions de capacité, de sécurité et de respect des normes environnementales.

Toutefois, comme les années précédentes, il convient de constater que les crédits d'investissement souffrent toujours d'une forte sous-exécution de 55,4 millions d'euros , puisque 259,6 millions d'euros de crédits avaient été ouverts sur ce poste de dépenses en loi de finances initiale.

Au total, la DGAC devra renforcer la maîtrise de l'ensemble de ses dépenses hors investissements - en particulier les dépenses de personnel - afin de dégager les marges de manoeuvre nécessaires pour faire face aux importants efforts d'investissements qu'elle devra consentir dans les années à venir.

4. Des indicateurs de performance qui témoignent d'un excellent niveau de sécurité aérienne mais d'une hausse des retards dus à la navigation aérienne

A l'instar des exercices précédents, l'indicateur de performance relatif à la sécurité aérienne reste très satisfaisant, avec 0,07 croisement hors norme pour 100 000 vols contrôlés (contre 0 croisement hors norme en 2015 et 0 croisement hors norme en 2014).

En revanche, le pourcentage de retards dus aux services de la navigation aérienne a connu une augmentation significative , puisqu'il est passé de 8,3 % en 2015 à 11 % en 2016, avec un retard moyen de 84 secondes par vol .

Selon la DGAC, ce retard est imputable à une pluralité de causes : grèves des contrôleurs aériens, mise en place du système « stripless » Erato dans le centre de contrôle en route de Brest, conditions météorologiques défavorables, championnat d'Europe de football, travaux sur les pistes d'Orly, forte activité militaire dans le Sud-Est de la France, etc. Il n'en demeure pas moins indispensable de le résorber rapidement .

5. Météo France, un opérateur qui a continué à consentir d'importants efforts budgétaires en 2016

Le programme 170 « Météorologie » de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » porte la subvention pour charges de service public versée par l'État à l'établissement public Météo France .

En exécution, cette subvention s'est élevée en 2016 à 190,2 millions d'euros (AE=CP), en recul de 2,7 % par rapport aux 195,6 millions d'euros de l'exécution 2015. La réserve de précaution n'a pas été levée .

Le montant de cette subvention apparaît également une nouvelle fois en retrait de - 4,0 % par rapport à la somme prévue en loi de finances initiale, qui s'élevait à 198,2 millions d'euros .

Mouvements de crédits intervenus en gestion*

pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Programme 170

LFI 2016

Reports entrant

Décrets d'avance

Décrets d'annulation

Fonds de concours et attributions de produits

Exécution 2016

Écart crédits consommés / crédits alloués en LFI

AE=CP

198,2

-

- 8,2

-

0,13

190,2

- 4,0 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Sur les 190,2 millions d'euros de subvention perçue par l'opérateur, 21 millions d'euros ont été consacrés à la recherche dans le domaine météorologique , dont la qualité est attestée par la bonne tenue de l'indicateur de performance relatif au nombre de publications scientifiques réalisées par Météo France dans les domaines du changement climatique et de ses impacts ( 30 publications en 2016, soit 1,5 publication par chercheur).

Les 169 millions d'euros restant ont pour leur part financé les missions de service public de Météo France en matière d'observation et de prévision météorologique.

Les indicateurs relatifs à la qualité des prévisions météorologiques présentent des résultats positifs , grâce au modèle global Arpège et au modèle à maille fine Arome : 88,3 % en 2016 pour le taux de fiabilité des prévisions sur la France à trois jours contre 86,8 % en 2015 et 83,8 % pour le taux de fiabilité des bulletins marine en 2016 contre 83,4 % en 2015.

Force est de constater en revanche que l'indicateur relatif aux recettes commerciales de l'établissement sur le marché des prestations météorologiques est une nouvelle fois décevant : ses recettes ont atteint 19,1 millions d'euros en 2016, soit un niveau stable par rapport à 2015 et à 2014, alors que la cible fixée à l'établissement était de 20,8 millions d'euros en loi de finances initiale.

Le recul de l'opérateur dans les secteurs des routes et des médias , constaté depuis plusieurs années, n'a pas été suffisamment compensé par la progression constatée dans les secteurs du sport, de l'énergie, de l'industrie, du BTP ou bien encore de l'agriculture.

S'ajoutant à la baisse de la subvention pour charges de service public , cette baisse des recettes s'est traduite par un déficit comptable de - 4,2 millions d'euros pour l'établissement et par un important prélèvement sur le fonds de roulement de 4,8 millions d'euros , même si celui-ci a pu maintenir un niveau convenable de 32,6 millions d'euros au 31 décembre 2016.

En 2016, l'opérateur Météo France a poursuivi la réduction de ses effectifs , supprimant 87 ETPT pour atteindre 3 062 ETPT en fin d'année, soit un niveau inférieur à celui prévu en loi de finances initiale ( 3 080 ETPT ).

MISSION « ÉCONOMIE » ET COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « PRÊTS ET AVANCES À DES PARTICULIERS OU À DES ORGANISMES PRIVÉS » - MM. JACQUES CHIRON ET BERNARD LALANDE, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. MISSION « ÉCONOMIE »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La mission « Économie », qui représente 0,6 % du budget de l'État, rassemble les crédits de politiques publiques visant à favoriser l'emploi, la croissance, la compétitivité des entreprises, le développement des exportations, la concurrence et la protection des consommateurs. Elle est composée de trois programmes permanents :

- le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » regroupe les instruments de soutien aux entreprises, notamment sous forme de dépenses d'intervention au profit des petites et moyennes entreprises (PME), de l'industrie, de commerce, de l'artisanat et - en partie - du tourisme . Il porte également les crédits des administrations en charge de ces politiques publiques, de deux autorités administratives indépendantes (AAI) et de trois opérateurs ;

- le programme 220 « Statistiques et études économiques » porte principalement les crédits de l'Institut national des statistiques et des études économiques (Insee) ;

- le programme 305 « Stratégie économique et fiscale » porte essentiellement les crédits de la direction générale du Trésor et de son réseau international, les crédits de la direction de la législation fiscale (DLF), ainsi que les crédits de plusieurs opérateurs et la subvention versée à la Banque de France au titre des prestations qu'elle effectue pour le compte de l'État.

Le programme 134 représente environ la moitié des crédits de la mission « Économie » à périmètre constant , le reste étant partagé à peu près à égalité entre le programme 220 et le programme 305.

Le programme 343 « Plan France très haut débit », créé en 2015, porte les financements de l'État en vue d'assurer la couverture intégrale du territoire par le réseau de fibre optique d'ici 2022.

Exécution par titre des crédits de la mission « Économie »

(en millions d'euros)

Action

Exécution 2015

LFI
2016

Exécution 2016

Exé 2016/ exé 2015

Exé 2016/ LFI 2016

Titre 2 - Personnel

AE

916,4

932,8

913,3

- 0,3 %

- 2,1 %

CP

916,4

932,8

913,3

- 0,3 %

- 2,1 %

Total hors Titre 2

AE

919,5

803,0

898,2

- 2,3 %

11,9 %

CP

935,7

789,4

809,7

- 13,5 %

2,6 %

Titre 3 - Fonctionnement

AE

542,8

525,5

573,4

5,6 %

9,1 %

CP

540,5

512,0

549,6

1,7 %

7,3 %

Titre 5 - Investissement

AE

2,7

2,1

4,3

59,6 %

104,2 %

CP

2,5

2,0

3,9

59,3 %

97,1 %

Titre 6 - Intervention

AE

274,0

275,4

380,5

38,9 %

38,2 %

CP

292,8

275,3

316,1

8,0 %

14,8 %

Titre 7 - Ops. financières

AE

100,0

-

- 60,0

- 160,0 %

CP

100,0

-

- 60,0

- 160,0 %

TOTAL P. 134 + 220 + 305

AE

1 835,9

1 735,8

1 811,5

- 1,3 %

4,4 %

CP

1 852,1

1 722,1

1 723,0

- 7,0 %

0,0 %

Hors programme 343 « Plan France Très haut débit ».

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Un effort budgétaire réel, mais qui continue à contourner les difficultés structurelles

Hors programme 343 « Plan France Très haut débit », dont la logique budgétaire est particulière (cf. infra ), les crédits de la mission « Économie » exécutés en 2016 sont inférieurs de 7 % en CP aux crédits exécutés en 2015 , soit 1,72 milliard d'euros en 2016 contre 1,85 milliard d'euros en 2015.

La mission « Économie » fournit donc une nouvelle fois un effort important à l'effort de maîtrise de la dépense publique , plus encore qu'en 2015 (- 5 %), mais toutefois moindre qu'en 2014 (- 11,3 %). Si la mission ne représente qu'environ 0,6 % du budget de l'État, elle apporte une contribution nette à l'effort réalisé en 2016, là où le budget général, qui s'élève à 310 milliards d'euros, est en 2016 supérieur de 1,5 % en exécution à l'exercice 2015.

Cet effort est, de surcroît, conforme à la prévision initiale , puisque les crédits exécutés en 2016 en CP sont égaux (+ 0,1 %) aux crédits votés en loi de finances initiale.

Encore faut-il nuancer cette bonne exécution, qui s'explique en partie par d'importants restes à payer , principalement en raison de la faible montée en charge de la « compensation carbone » : principal mouvement constaté en gestion, le transfert pour 93 millions d'euros en AE et en CP de cette aide aux entreprises électro-intensives 139 ( * ) n'a donné lieu qu'à une consommation de 64,5 millions d'euros en AE, et aucune consommation en CP 140 ( * ) .

Surtout, si cet effort pris dans son ensemble doit être salué, il est plus critiquable dans sa répartition entre les différentes composantes de la dépense. Ainsi :

- l'essentiel des économies pèse en réalité sur les dispositifs d'intervention en faveur des entreprises , selon une logique de rabot plus que de remise à plat de l'action publique dans ce domaine ;

- les dépenses de personnel et de fonctionnement, où se trouvent des gisements d'économies structurelles, sont bien moins maîtrisées , du fait non seulement des rigidités inhérentes à ces catégories, mais aussi et surtout de la faiblesse du pilotage budgétaire face à des acteurs fragmentés.

Ceci étant dit, cette rigidité met a priori la mission « Économie » à l'abri de tout risque d'insoutenabilité à moyen terme : l'enjeu du pilotage de la dépense n'est pas tant d'assurer sa soutenabilité que de lutter contre son inertie .

2. Une architecture illisible, un pilotage impossible

La mission « Économie » se caractérise par une multiplicité de dispositifs d'aide , très éclatés, ayant chacun des objectifs différents et des modalités d'intervention variées (subventions directes et indirectes, prêts, actions de communication etc.). Il résulte de cette sédimentation historique une gestion « en silo », des objectifs mal évalués , des interventions parfois concurrentes, parfois insuffisantes, mais toujours mal coordonnées.

Ces politiques publiques sont de surcroît mises en oeuvre par des acteurs eux-mêmes très éclatés , qu'il s'agisse d'administrations d'État, d'opérateurs ou d'autorités administratives indépendantes (AAI).

Il en résulte une faiblesse structurelle du pilotage budgétaire , les responsables « nominaux » devant bien souvent se contenter d'interventions ponctuelles sur tel ou tel élément, mais n'étant pas en mesure de fixer - et a fortiori de mettre en oeuvre - de réelles priorités. Dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016, la Cour des comptes rejoint cette critique formulée maintes fois par vos rapporteurs spéciaux : « le caractère fragmenté des actions engagées limite la capacité des gestionnaires à formaliser des indicateurs précis, fiables et spécifiques, directement liés à l'efficacité des politiques poursuivies. Le positionnement des responsables de programmes, notamment celui du programme 134, vis-à-vis des directions métiers annihile leur capacité à avoir une visibilité et une marge de manoeuvre effective en programmation et en gestion . C'est tout particulièrement le cas pour les cinq opérateurs de la mission , pour lesquels les responsables de programmes et la mission ne jouent au mieux qu'un rôle de synthèse des actions engagées ».

À cela viennent s'ajouter d'incessantes modifications du périmètre de la mission , quoique celles de l'exercice 2016 apparaissent relativement modestes au regard des précédentes : création d'une nouvelle action 22 « Économie sociale et solidaire » pour 4 millions d'euros en CP, rattachement à la direction générale des entreprises (DGE) du nouveau service de l'information stratégie et sécurité économiques (SISSé), et, en cours de gestion, des transfert concernant la compensation carbone (93 millions d'euros) et la reprise par le fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC) des aides aux stations-service de proximité (cf. infra ).

Il est d'ailleurs permis de poser la question de la pertinence du rattachement à la mission « Économie » de certains crédits, tels que les subventions en faveur du tourisme, dont le montant est aujourd'hui anecdotique (1,4 million d'euros) et qui gagneraient à être rattachées, par cohérence, au ministère de l'Europe et des affaires étrangères qui est désormais en charge à titre principal de la politique en faveur du tourisme - ce qu'avaient suggéré vos rapporteurs spéciaux lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2017.

Le caractère illisible de la maquette de la mission « Économie » -dont l'intitulé même, choisi faute de mieux, est révélateur - n'a pas pour seule conséquence de priver les gestionnaires de marge de manoeuvre. Il est aussi une entrave au contrôle du budget par le législateur, et ceci d'autant plus que les données ne sont jamais fournies à périmètre constant 141 ( * ) , ce qui rend presque impossible toute comparaison sur la durée.

En conclusion, les grands défis de la mission « Économie » , tant sur le plan budgétaire que de l'efficacité des multiples actions qu'elle porte, ne pourront être relevés qu'à condition de fixer une stratégie cohérente, assumant ses choix et ses priorités, et de rendre aux gestionnaires une autorité permettant de la mettre en oeuvre .

3. Les dispositifs d'intervention en faveur des entreprises : une réduction plutôt qu'une réflexion

Compte tenu des rigidités inhérentes aux dépenses de personnel et de fonctionnement, accentuées par l'éclatement des structures, les efforts de la mission « Économie » reposent principalement, cette année encore, sur les dispositifs d'intervention en faveur des entreprises , regroupés au sein du programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme ».

Entre 2014 et 2016, ces aides affichent une baisse de 29 %, passant de 194,4 millions d'euros à 138 millions d'euros .

Certes, l'ensemble affiche une quasi-stabilité entre 2015 et 2016, mais cela s'explique principalement par la création de l'Agence France Entrepreneur (AFE) et le rattachement des dispositifs d'accompagnement aux acteurs de l'économie sociale et solidaire (ESS), ainsi que par le déblocage de 12,5 millions d'euros 142 ( * ) pour permettre la reprise, par le fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC), des quelques 2 200 dossiers d'aide aux stations-service de proximité auparavant distribuées par le comité professionnel de la distribution des carburants (CPDC). Il s'agit là d'une demande de vos rapporteurs spéciaux, qui avaient déposé en ce sens un amendement au projet de loi de finances pour 2016. Sans prise en compte de ces mesures ponctuelles, les dispositifs d'intervention du programme 134 s'établissent à 123 millions d'euros en 2016, soit une baisse de 11 %, dans la continuité des exercices précédents.

Reste que l'effort fourni par le programme 134 répond cette année encore à une logique de « rabot » plutôt qu'à une politique volontariste de rationalisation et de sélection de ces multiples dispositifs . L'architecture fragmentée du programme complique le pilotage budgétaire, et ceci d'autant que ces aides sont souvent versées à de multiples intermédiaires, qui s'en font en retour les défenseurs auprès du législateur (réseaux consulaires, organismes professionnels, établissements publics, etc.).

Certes, des possibilités d'économies existent encore sur certains dispositifs, par exemple :

- le FISAC , dont la réforme de 2015 visant à passer d'une logique de guichet à une logique d'appel à projets n'a pas encore porté tous ses fruits, et dont la gestion est encore perfectible (en témoignent notamment les 8,2 millions d'euros de restes à payer en fin d'exercice) ;

- les subventions aux centres techniques industriels (CTI) , alors même que le législateur a engagé, depuis 2015, un passage au financement par taxe affectée ;

Les dispositifs d'intervention en faveur des entreprises relevant du programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme »

(crédits de Titre 6 exécutés, en CP, en millions d'euros)

Action

Dispositif d'intervention

2014

2015

2016

Évolution
2014-2016

2

Aide au départ des commerçants

6,2

8,2

3,1

- 50 %

2

Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC)

34

12,3

21,5

- 37 %

2

Développement des PME (commerce, artisanat et services)

8,5

7,25

8,2

- 3 %

2

Comité professionnel de distribution de carburant (CPDC)

2,9

0

0

- 100 %

2

Mission des services à la personne

2,6

0,99

1

- 62 %

3

Subventions aux centres techniques industriels (CTI)

19,1

17,4

15,9

- 17 %

3

Subventions à l'agence française de normalisation (AFNOR)

9,8

8,9

8,2

- 16 %

3

Subventions à l'agence pour la création des entreprises (APCE)

2,9

2,6

0,8

- 72 %

3

Subventions diverses à la politique industrielle

35,2

30

22,2

- 37 %

3

Mutations industrielles (versement à STX France)

2,2

0,6

3

Subvention au Comité français d'accréditation (Cofrac)

0,3

0,19

2

- 43 %

3

Agence France Entrepreneur

1,8

4

Remboursements à la Poste (courrier au Président de la République)

1,4

1,4

1,3

- 7 %

4

Subventions aux organismes internationaux

11,4

9,8

13,7

- 21 %

17

Subventions aux mouvements de consommateurs

9,9

8,6

9,5

- 4 %

20

Activité « Garantie » de Bpifrance

40

26

23

- 43 %

21

Subventions diverses au développement de l'activité touristique

3,1

2,62

1,4

- 56 %

22

Économie sociale et solidaire

3,6

Divers

7,1

2,7

- 62 %

Total (après retraitements) :

194,4

139,26

138

- 29 %

Note : ne sont pas pris en compte les crédits d'intervention relavant du PIA (133 millions d'euros en 2014, 100 millions d'euros en 2015, 36 millions d'euros en 2016), ni les aides au transport de presse (100 millions d'euros en 2014, 130 millions d'euros en 2015, 119 millions d'euros en 2016). La colonne de gauche indique l'action principale du programme 134 portant les crédits correspondants.

Source : commission des finances du Sénat, d'après la note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016 de la Cour des comptes et les documents budgétaires

les subventions aux associations (mouvements consuméristes) et aux pôles de compétitivité , très nombreuses et peu évaluées.

Plus fondamentalement, toutefois, la logique du « rabot » a maintenant atteint ses limites . Certains dispositifs sont devenus tellement modestes que la question même de leur existence est posée. À la multiplicité des dispositifs, plus ou moins bien évalués, plus ou moins concentrés ou saupoudrés, mais de toute façon sans grande cohérence d'ensemble et sans véritable portée systémique, vos rapporteurs spéciaux prônent la mise en place d'un « État stratège », adapté aux enjeux du XXI e siècle, et porté par quelques grands acteurs afin d'assurer une forte cohérence .

Business France et Bpifrance pourraient compter parmi ces acteurs , comme vos rapporteurs spéciaux l'avaient suggéré lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2017.

4. Les dépenses de personnel sont tout juste maîtrisées, mais leur poids relatif dans la mission est en augmentation

Les dépenses de personnel représentent à elles seules 53 % des crédits de la mission « Économie » , soit 913,3 millions d'euros en exécution. Plus précisément, elles représentent 59 % des crédits des programmes 220 et 305, qui portent les moyens humains de grandes structures administratives (l'Insee et la DG Trésor), mais aussi 46,5 % des crédits du programme 134, qui est pourtant un programme d'intervention.

Certes, l'exécution 2016 des crédits de titre 2 est inférieure de 2,1 % à la prévision en loi de finances initiale, et les plafonds d'emplois sont respectés : 12 299 ETPT en prévision et 12 022 ETPT en exécution pour l'État, et 2 628 ETPT en prévision et 2 580 ETPT en exécution pour les opérateurs.

Plafond d'emplois de la mission « Économie »

(en ETPT)

Programme

Exécution
2015

LFI
2016

Exécution 2016

[134] Développement des entreprises et du tourisme

5 108

5 214

5 071

[220] Statistiques et études économiques

5 409

5 441

5 335

[305] Stratégie économique et fiscale

1 612

1 644

1 616

TOTAL MISSION

12 129

12 299

12 022

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Le respect des objectifs doit d'autant plus être salué que l'exécution a dû se faire en tentant compte de la hausse du point d'indice (+ 1,5 million d'euros sur la mission), d'un repyramidage en faveur des catégories A et A+ pour tenir compte des nouvelles compétences 143 ( * ) confiées à l'Autorité de la concurrence et à l'Arcep, et d'un facteur exogène, l'évolution du taux de change, dont l'impact sur la masse salariale des agents de la DG Trésor en poste à l'étranger (programme 305) est substantiel.

Ces remarques étant faites, la comparaison entre la prévision initiale et l'exécution ne doit pas masquer une quasi-stabilité des dépenses de personnel constatées d'une année sur l'autre : ainsi, les crédits de titre 2 exécutés en 2016 ne diminuent que de 0,3 % par rapport à 2015 , une baisse à peine plus forte que celle de 0,1 % constatée entre 2014 et 2015.

Répartition par titre des dépenses de la mission « Économie » en exécution 2015 et 2016

Hors programme 343. Les dépenses d'investissement (titre 7) sont négligeables au regard de l'ensemble des crédits de la mission.

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Plus encore, on constate une hausse tendancielle de la part relative des dépenses de titre 2 au sein de la mission , alors que la réduction du format des interventions (s'agissant au moins du programme 134) devrait, en toute logique, s'accompagner d'une réduction des effectifs qui en ont la charge, et de la masse salariale correspondante. La situation est inverse : les dépenses de titre 2 sont passées de 49 % des crédits de la mission en 2015 à 53 % en 2016 . Ces chiffres sont néanmoins difficiles à comparer - et même impossibles à comparer sur longue période - compte tenu des incessantes modifications de périmètre. Dans sa note sur l'exécution budgétaire, la Cour des comptes aboutit aux chiffres suivants : 50,4 % en 2014, puis 52,5 % en 2015 et enfin 54,5 % en loi de finances initiale pour 2016. Reste que, pour simplifier, il semble que l'État accorde de moins en moins d'aides, mais que celles-ci coûtent de plus en plus cher à gérer .

Cette rigidité inhérente aux dépenses de personnel laisse peu de marge aux gestionnaires de programme , et conduit ceux-ci à rechercher des économies sur les autres catégories de dépenses, et notamment les dépenses d'intervention (cf. supra ). On ne saurait toutefois se satisfaire de ce simple constat, qui reviendrait à ignorer deux pistes d'amélioration importantes :

- tout d'abord, il serait souhaitable que la surévaluation des crédits de titre 2 en loi de finances initiale cesse . L'exécution supérieure de 2,1 % à la prévision mais quasi-stable à l'exécution de l'année précédente suggère que le pilotage pourrait être resserré. De même, il semble que les plafonds d'emplois, constamment respectés ces trois dernières années, ne soient pas une contrainte très forte, dans la mesure où le nombre d'agents n'est pas un déterminant majeur de la masse salariale de la mission (par rapport, notamment, aux repyramidages et au taux de change) ;

- ensuite , de véritables marges de manoeuvre sur le titre 2 pourraient être dégagées à condition qu' une politique volontariste de rationalisation des dispositifs et de mutualisation des moyens soit mise en place, en particulier pour les opérateurs et les AAI.

5. Des économies structurelles qui resteront hors d'atteinte sans un pilotage renforcé des opérateurs et des AAI

Les dépenses de fonctionnement représentent au total 31,9 % des crédits de la mission « Économie » en 2016, soit 549,6 millions d'euros en CP, hors plan France Très haut débit. Elles affichent une hausse de 1,7 % en exécution par rapport à l'année 2015 .

Là encore, l'éclatement des structures et des responsabilités qui caractérise la mission rend très complexe la réalisation d'économies transversales sur les dépenses de fonctionnement. De fait, si les crédits des structures relevant de l'État affichent un effort réel 144 ( * ) , grâce notamment à la dématérialisation des procédures, à l'amélioration de la politique d'achats ou encore de la politique immobilière, les gestionnaires de programme n'ont en pratique que peu de prise sur les crédits de titre 3, car ceux-ci sont en réalité principalement composés :

- des subventions pour charges de service public (SCSP) versés aux opérateurs ;

- des crédits des autorités administratives indépendantes (AAI) , toutes deux rattachées au programme 134 : l'Autorité de la concurrence et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) ;

- de la subvention à la Banque de France pour les prestations réalisées pour le compte de l'État , dont la baisse de 10,6 % est le principal facteur d'explication de la baisse des dépenses du programme 305, mais ne semble pas garantie à moyen terme (cf. infra ).

S'agissant tout d'abord des subventions versées aux opérateurs, celles-ci, d'un montant de 133,1 millions d'euros en exécution en 2016, affichent certes une baisse honorable de 6,3 % par rapport à 2015, mais cette diminution est presque intégralement portée par Business France (cf. infra ), qui voit sa subvention pour charges de services public (SCSP) baisser de 8,7 % et passer de 105,4 millions d'euros en 2015 à 96,2 millions d'euros en 2016.

Évolution des subventions aux opérateurs du programme 134

(crédits de titre 3) (en CP) (en millions d'euros)

Exécution 2015

LFI
2016

Exécution 2016

Exé 2016 / LFI 2016

Exé 2016/
exé 2015

ANFr - Agence nationale des fréquences

30,7

31,8

31,1

- 2,2 %

1,4 %

Business France (fusion AFII et Ubifrance)

105,4

101,3

96,2

- 5,0 %

- 8,7 %

EPARECA - Établissement public national pour l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux

6,1

6,3

5,9

- 6,6 %

- 3,6 %

FNPCA - Fonds national de promotion du commerce et de l'artisanat

financement par une ressource affectée (9,91 M€ en 2016)

INPI - Institut national de la propriété industrielle

financement par une ressource affectée (166,7 M€ en 2015)

Total SCSP :

142,1

139,4

133,1

- 4,5 %

- 6,3 %

Seules sont mentionnées les subventions pour charges de service public (SCSP) du programme 134.

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Pour les autres opérateurs bénéficiaires de subventions, des marges d'amélioration existent, mais l'autorité des responsables de programmes demeure faible, lorsqu'elle n'est pas tout juste théorique - la Cour des comptes souligne ainsi que ceux-ci ne peuvent même pas assister aux conseils d'administration des opérateurs, où l'État est représenté par les directions sectorielles. Le pilotage de la dépense des opérateurs est donc malaisé .

Dans ce contexte, l'utilité de disposer de structures autonomes n'apparaît pas toujours évidente , et la question de leur « reprise » au niveau central ou déconcentré, ou de leur regroupement avec d'autres entités mérite à tout le moins d'être posée. Ainsi, l' Établissement public national pour l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (Epareca) , qui finance la restructuration de centres commerciaux de proximité dégradés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, pourrait être rattaché au FISAC, comme le fût le Comité professionnel de distribution de carburant (CPDC) il y a deux ans. Les missions du Fonds national de promotion du commerce et de l'artisanat (FNPCA) , consistant principalement à financer des campagnes publicitaires, ne semblent pas a priori devoir être absolument accomplie par un opérateur autonome, de surcroît financé par une taxe affectée.

S'agissant ensuite des autorités administratives indépendantes , notre collègue Jacques Mézard a montré dans son rapport de 2015 145 ( * ) qu'il demeurait là aussi d'importantes marges de manoeuvre, notamment en matière de dépenses immobilières . Il apparaît ainsi qu'en 2015, la cible de 400 euros par mètre carré (hors taxes et hors charges) fixée par France Domaine pour les prises à bail à Paris était dépassé par l'Arcep (477 euros) - et au total par 12 des 42 AAI. La cible de 12 mètres carrés par agent est par ailleurs peu respectée. Dans sa note d'analyse sur l'exécution budgétaire 2016, la Cour des comptes ne dit pas autre chose : « Compte tenu de la structure de leurs dépenses (le loyer représente plus de 50 % et les rémunérations le second poste), les marges de manoeuvre sont réduites en l'absence d'une politique volontariste (rationalisation des AAI ou, au moins, co-localisation) ».

6. La réussite de Business France : un exemple pour la mission ?

Une exception, notable, mérite toutefois d'être signalée : il s'agit de Business France , dont la subvention affiche en exécution une baisse de 8,7 % par rapport à l'exercice précédent. Celle-ci résulte non seulement des gains de productivité permis par la fusion en 2015 de l'Agence française pour le développement international des entreprises (Ubifrance) et de l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII), mais aussi et surtout de la volonté de diversification des recettes de cet opérateur - qui pourrait même à terme contribuer à l'effort de maîtrise des dépenses de la mission « Économie ».

Dans ce cadre, le contrat d'objectifs et de performance (COP) 2015-2017 de Business France, signé le 6 octobre 2015, prévoit la hausse graduelle des recettes commerciales issues des services d'accompagnement à l'international des entreprises. En 2016, celles-ci ont atteint 99,2 millions d'euros, soit 47,6 % des ressources, contre 50,3 % pour les subventions de l'État . Ces ressources propres dépassent d'ailleurs la prévision initiale, qui était de 97,4 millions d'euros.

La diminution de la contribution du budget de l'État n'entrave en rien la mission de Business France, qui présente d'excellents résultats . S'agissant par exemple de l'objectif de 10 000 PME et ETI accompagnées à l'export, a été atteint avec 14 mois d'avance sur le COP, fin 2016 146 ( * ) .

7. La subvention à la Banque de France : une diminution continue, mais qui pourrait devenir artificielle

Imputée sur le programme 305, la subvention à la Banque de France pour les prestations réalisées pour le compte de l'État (secrétariat des commissions de désendettement, tenue du compte du Trésor, mise en circulation des monnaies métalliques etc.) s'élève à 258,4 millions d'euros en exécution en 2016, en diminution tendancielle depuis plusieurs années . Compte tenu de son montant, cette subvention tient une place importante dans l'équilibre général de la mission « Économie ».

Évolution de la subvention versée à la Banque de France

(en millions d'euros) (titre 3) (en AE = CP)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

PLF 2017

316,64

316,73

304,62

290

279,5

250

250

Source : documents budgétaires et questionnaire budgétaire

Ceci dit, et en dépit de la dématérialisation et de l'allègement des procédures de surendettement permis par une série de mesures adoptées ces dernières années 147 ( * ) , il apparaît que le coût moyen du traitement d'un dossier est en augmentation : mesuré par l'indicateur 4.3 du programme, il atteint 996 euros en 2016 , soit bien plus que l'objectif initial de 860 euros, et même que l'objectif révisé de 897 euros. La baisse du montant de la subvention est donc avant tout imputable à la baisse du nombre de dossiers (- 10 % par rapport à 2015), ce qui pourrait n'être que conjoncturel.

Or, si l'avenant au contrat de performance de 2011 signé en octobre 2016 prévoit que la subvention versée chaque année par l'État corresponde à l'objectif pluriannuel fixé par le contrat de performance, éventuellement ajusté en fonction de la volumétrie constatée, le ministre de l'Économie a par ailleurs, dans un courrier du 20 octobre 2016 au gouverneur de la Banque de France, que celle-ci pourrait compenser le différentiel entre les coûts complets et les crédits budgétaires dans la répartition de son résultat, c'est-à-dire, en pratique, en minorant d'autant le dividende versé à l'État .

Il apparaît donc que la baisse de la subvention à la Banque de France, si elle permet d'afficher un effort sur la mission « Économie », est au mieux neutre pour le budget général de l'État, et au pire une hausse déguisée compte tenu de la hausse tendancielle du coût de traitement des dossiers.

8. Le plan « France Très haut débit » : maintenir l'ambition tout en préservant la soutenabilité

Le programme 343 porte une partie de la participation de l'État au financement du plan « France très haut débit » , qui s'élève à 3,3 milliards d'euros d'ici 2022 au total, soit la moitié du financement public engagé 148 ( * ) .

Le plan « France très haut débit »

Annoncé par le Premier ministre le 28 février 2013 dans le cadre de la feuille de route numérique du Gouvernement, le plan « France très haut débit » vise à déployer un réseau de fibre optique à très haut débit sur l'intégralité du territoire d'ici 2022, avec un objectif intermédiaire de 50 % des foyers couverts en 2017 .

Sont considérés comme des réseaux « très haut débit » les réseaux offrant un débit supérieur à 30 Mbits/seconde, y compris avec des technologies « cuivre » ou « câble coaxial » traditionnelles. Seuls les réseaux entièrement en fibre optique ( Fiber to the Home - FttH ) offrent un débit supérieur à 100 mégaoctets.

Le plan représente plus de 20 milliards d'euros d'investissements sur la période 2014-2022, ainsi répartis :

- 6 à 7 milliards d'euros dans les « zones d'initiative privée » , financés par les opérateurs. Ces zones dites « conventionnées » couvrent environ 10 % du territoire mais 57 % de la population dans les 3 600 communes les plus denses, et donc les plus rentables. Les opérateurs s'engagent à y déployer sur fonds propres des réseaux privés mutualisés entre tous les opérateurs ;

- 13 à 14 milliards d'euros dans les « zones d'initiative publique » . Ces zones moyennement ou peu denses, dites « non conventionnées », couvrent 43 % de la population. Y seront déployés des réseaux publics ouverts à tous les opérateurs, en FttH ou avec des technologies intermédiaires. Les réseaux d'initiative publique (RIP) seront financés à moitié par les opérateurs eux-mêmes (dans le cadre de co-financements), et à moitié par des subventions publiques (État, collectivités territoriales, Union européenne).

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire et le rapport annuel de la mission France très haut débit

La loi de finances initiale prévoyait 188 millions d'euros en AE et aucun CP au titre de l'exercice 2016 . Il est toutefois rapidement apparu que ce montant était très insuffisant, compte tenu de l'engagement rapide des dépenses. De fait, l'objectif d'une couverture intermédiaire de 50 % du territoire a été atteint dès la fin de l'année 2016 , avec une année d'avance.

Le montant exécuté s'élève finalement à 721,9 millions d'euros en AE, soit une sur-exécution de 284 % . La sous-budgétisation initiale a été couverte par d'importants mouvements en gestion 149 ( * ) , notamment le report de 308 millions d'euros non utilisés en 201515, le dégel des crédits mis en réserve et une ouverture complémentaire de 296 millions d'euros en loi de finances rectificative.

Cet engagement plus rapide que prévu des AE n'est toutefois pas le signe d'une progression satisfaisante du plan France Très haut débit -bien que les documents budgétaires restent muets sur ce point. Dans son rapport du 31 janvier 2017 sur le sujet 150 ( * ) , la Cour des Comptes estiment plutôt que ces surcoûts sont le signe d'un dépassement important du coût total du Plan, évalué à 34,9 milliards d'euros au lieu de 20 milliards d'euros sur la période . Le rapport estime également que « si l'objectif de couverture intermédiaire (50 % en 2017) sera bien atteint, l'insuffisance du co-investissement privé compromet l'atteinte de l'objectif de 100 % en 2022 . Les juridictions financières appellent donc à actualiser les objectifs, à mieux prendre en compte les technologies alternatives à la fibre optique jusqu'à l'abonné, afin de construire un « mix technologique » moins coûteux, et à intégrer un objectif de haut débit minimal pour tous ».

En outre, les chiffres nationaux dissimulent des réalités locales extrêmement hétérogènes. Vos rapporteurs spéciaux, constatant les difficultés et retards opérationnels dans les territoires , ne peuvent que partager l'analyse de la Cour des Comptes, et appeler à la mise en place d'une politique plus ambitieuse en la matière - c'est-à-dire plus incitative, et le cas échéant plus contraignante.

9. Propositions pour des indicateurs de performance reflétant les défis de la mission

Les indicateurs de performance de la mission « Économie » ne semblent pas, à ce jour, entièrement pertinents au regard des objectifs de cette mission , c'est-à-dire essentiellement l'intervention en faveur des entreprises et la régulation économique de certains secteurs.

Ainsi, l'indicateur MDB.2.1, retenu comme l'un des deux indicateurs les plus indicatifs de la mission, mesure le rang de classement de la France dans l'étude « Doing Business » de la Banque mondiale : il donne ainsi une idée générale de l'environnement juridique et administratif offert par la France - qui figure au 20 e rang mondial, sans objectif d'aller au-delà -, mais ne rend compte ni de la qualité, ni de l'efficience, ni de l'efficacité des dispositifs de la mission ou de la gestion des responsables de programme .

Par ailleurs, de nombreux indicateurs fixent des objectifs trop complaisants, de sorte qu'ils ne constituent pas une véritable contrainte . Ainsi par exemple de l'indicateur 1.1 du programme 220, qui mesure le « nombre de jours de retard cumulés entre les dates de diffusion et les dates prévues » pour les statistiques transmises à Eurostat, qui reste stable à 0 jours d'année en année, ou encore de l'indicateur 2.1 du même programme, qui retrace le « pourcentage de communes pour lesquels l'enquête de recensement a été traitée dans les délais prescrits », qui atteint chaque année 100 %.

Cette critique, déjà formulée par vos rapporteurs spéciaux l'année dernière, semble toutefois avoir été entendue . Dans la maquette du projet de loi de finances pour 2018 151 ( * ) , si l'indicateur 1.1 précité est conservé, le second est supprimé et remplacé par les nouveaux objectifs et indicateurs suivants, bien plus pertinents au regard des défis de l'Insee (cf. supra ) :

- l'objectif 2 « Développer la dématérialisation des enquêtes, dans le but d'alléger la charge de réponse des enquêtés, de gagner en qualité et de réduire les coûts », composé de l'indicateur 2.1 « Dématérialisation des enquêtes » ;

- l'objectif 3 « Faire parler les chiffres de l'Insee et aller au-devant de tous les publics », composé de l'indicateur 3.1 « Pertinence de l'Insee du point de vue des utilisateurs du site Insee.fr ».

Plus fondamentalement, il est impératif de mettre en place des indicateurs reflétant réellement les objectifs assignés à la mission « Économie » , et plus précisément au programme 134. Vos rapporteurs spéciaux formulent à cet égard deux propositions, qui pourraient trouver leur place parmi les indicateurs représentatifs de la mission :

- un indicateur synthétique portant sur l'ensemble des dispositifs d'intervention du programme 134 , faisant apparaître sur plusieurs années non seulement leur montant, mais aussi leur nombre et l'évolution de leur périmètre 152 ( * ) , ainsi que le ratio aides distribués/effectifs et moyens affectés à leur gestion 153 ( * ) ;

- un indicateur synthétique des contrats d'objectifs et de performance (COP) des opérateurs et AAI relevant de la mission , faisant apparaître sous un format comparable la réalisation de ces objectifs, le respect du calendrier, et le cas échéant la signature (ou non) de ces COP. Cet indicateur devrait porter non seulement sur les aspects budgétaires et financiers des COP (crédits prévus/exécutés, évolution de la part des ressources propres et/ou des taxes affectées etc.), mais aussi les différents objectifs relevant de la mission de chacun de ces organismes.

II. COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « PRÊTS ET AVANCES À DES PARTICULIERS OU À DES ORGANISMES PRIVÉS »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

L'article 24 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) dispose que « les comptes de concours financiers retracent les prêts et avances consentis par l'État. Un compte distinct doit être ouvert pour chaque débiteur ou catégorie de débiteurs. (...) Le montant de l'amortissement en capital des prêts et avances est pris en recettes au compte intéressé ».

Au titre de l'année 2016, le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » est composé de quatre programmes d'ampleur très inégale , dont l'exécution est retracée dans le tableau ci-dessous.

Équilibre 2015 et 2016 du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés »

(dépenses d'opérations financières - titre 7) (en millions d'euros) (en AE = CP)

Programme

Exercice 2015

Exercice 2016

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

P. 861 Prêts et avances pour le logement des agents de l'État

Prévision LFI

0,50

0,49

Exécution

0,16

0,03

P. 862 Prêts pour le développement économique et social

Prévision LFI

200,00

150,00

Exécution

114,50

71,00

P. 863 Prêts à la filière automobile

Prévision LFI

-

5,00

Exécution

3,00

-

P. 867 Soutien à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie

Prévision LFI

-

-

Exécution

-

200,00

TOTAL

Prévision LFI

32,24

200,50

- 164,26

31,24

155,49

- 124,24

Exécution

82,18

114,28

- 32,10

41,78

271,03

- 229,25

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Le déficit d'exécution s'explique par deux facteurs :

- d'une part, la création du programme 867 « Soutien à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie » , qui porte à lui seul un prêt de 200 millions d'euros. À périmètre constant, le compte afficherait un déficit seulement de 71 millions d'euros ;

- d'autre part, l'horizon pluriannuel du compte, qui a par construction vocation à retracer des prêts octroyés dont le remboursement est étalé sur plusieurs années.

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Le logement des agents de l'État : un poste de dépenses imprévisible mais de toute façon marginal

Le programme 861 « Prêts et avances pour le logement des agents de l'État » permet d'octroyer des prêts à 1 % aux agents de l'État servant à l'étranger, afin de faciliter les démarches relatives à la location d'un logement dans les environs de leur poste d'affectation. Les crédits demandés en loi de finances initiale sont de 485 000 euros, un montant légèrement en baisse par rapport aux exercices 2014 et 2015 (500 000 euros), qui correspond à environ 17 dossiers. En pratique, seuls deux prêts ont été accordés, pour un montant moyen de 17 000 euros. Le reste des crédits disponibles, soit 80 % (385 000 euros), a fait l'objet d'une annulation : cette sous-exécution s'explique par le caractère difficilement prévisible de la dépense, qui dépend des marchés locaux et du rythme de départ des agents à l'étranger.

2. Les prêts à la filière automobile : un outil conservé, un objet renouvelé

Le programme 863 « Prêts à la filière automobile » constituait initialement le vecteur budgétaire du plan automobile lancé en 2009, dont les derniers prêts ont été accordés en 2011. En 2013, il a été décidé d'allouer 15 millions d'euros à ce programme pour des prêts aux conditions de marché, non bonifiés, visant à accompagner les investissements productifs et écologiques des PME et des ETI de la filière. L'exercice 2016 est toutefois le premier où le fonds de soutien à la filière automobile est alimenté par une dotation budgétaire annuelle (d'un montant de 5 millions d'euros) , alors qu'il était auparavant alimenté par des reports de crédits non consommés, une pratique peu lisible et répétée sans l'autorisation du législateur.

Si les dépenses retracées sur le programme 863 sont modestes, celui-ci continue toutefois à retracer le remboursement des prêts accordés depuis 2009. Le surplus de recettes observé sur le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » en 2016, soit 41,8 millions d'euros contre 31,2 millions d'euros en prévision, tient notamment au remboursement anticipé de deux prêts significatifs, qui témoignent de la bonne situation économique de la filière .

Compte tenu de la modestie des montants en jeu, vos rapporteurs spéciaux estiment qu' une réflexion pourrait être engagée sur le maintien à terme de ce programme . Ses interventions pourraient en effet relever plus directement de la mission « Économie », ou de Bpifrance (cf. point suivant).

3. Le Fonds de développement économique et social (FDES) : un outil subsidiaire dont l'utilité est de plus en plus contestable

Le programme 862 « Prêts pour le développement économique et social » permet à l'État d'octroyer des prêts ponctuels aux entreprises en restructuration et rencontrant des difficultés à accéder au marché du crédit, via le fonds pour le développement économique et social (FDES) , créé en 1955 et « réactivé » en loi de finances pour 2014 dans le cadre du « plan de résistance économique » annoncé par le ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, le 12 novembre 2013.

La doctrine d'emploi a été précisée par la circulaire du 9 juin 2015 relative aux modalités d'accueil et de traitement des dossiers des entreprises confrontées à des problèmes de financement, qui précise que le recours à ces prêts est « exceptionnel, subsidiaire et suppose un effet de levier sur d'autres sources de financement », l'objectif cible de cet effet de levier étant la mobilisation de cinq euros privés pour un euro public investi. En outre, le taux des prêts ne peut pas être inférieur au taux de référence publié par la Commission européenne , correspondant au taux de marché 154 ( * ) .

En pratique, l'exécution 2016 s'est élevée à seulement 71 millions d'euros, soit bien en-deçà des 150 millions d'euros ouverts en loi de finances initiale . La dotation initiale, bien que réduite par rapport à l'année dernière (200 millions d'euros), apparaît donc toujours surdimensionnée par rapport aux besoins effectifs, la stabilisation de la situation économique ayant fait diminuer les besoins d'intervention .

Le montant de 71 millions d'euros correspond à cinq prêts accordés en 2016 . Le rapport annuel de performances précise que ceux-ci ont été accordés « à des entreprises spécialisées notamment dans les domaines de l'agroalimentaire, de l'équipement, de la construction et de la production de biens de consommation ». Toutefois, ces éléments sont largement faussés dans la mesure où un seul prêt, accordé en décembre 2016, représente à lui seul 70 millions d'euros . Cette opération soulève plusieurs questions :

- tout d'abord, le prêt a initialement été accordé sans financement privé , ce qui apparaît contraire à la doctrine d'intervention, et explique que l'effet de levier soit de seulement 0,1 euro privé pour un euro public investi en 2016 ;

- suite à un accord de janvier 2017, l'apport public a été réduit et un apport privé a été trouvé , ce qui a pour conséquence de réduire substantiellement le taux d'utilisation réel des crédits du FDES ;

Le montant de l'apport privé n'est pas précisé . Toutefois, il est précisé que l'effet de levier corrigé par cet apport passerait de 0,1 à 4 euros privés pour un euro public investi. À montant global inchangé (70 millions d'euros), cela résultat suggère une réduction de l'apport public à 14 millions d'euros, pour un apport privé de 56 millions d'euros .

Taux de consommation des prêts du FDES

(en millions d'euros)

2015

2016*

PLF 2017

Dotation en LFI

200

200

100

Montant des prêts accordés

114,1

71

Taux de consommation

57 %

35,5 %

Taux de consommation (corrigé)

19,7 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les questionnaires budgétaires successifs

La diminution continue du taux de consommation des prêts accordés par le FDES - 19,7 % (après correction) en 2016, et 57 % en 2015 - confirme les réserves déjà émises par vos rapporteurs spéciaux à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2017, non pas sur le bien-fondé de ses interventions, mais sur leurs modalités. Ainsi :

« - soit les aides sont effectivement octroyées à des entreprises structurellement viables , dans une perspective de sauvegarde à long terme du potentiel industriel et technologique de la France et des emplois liés , et alors il existe aujourd'hui d'autres institutions plus adaptées pour assumer l'intervention publique en cas de défaillance temporaire du marché, au premier rang desquelles Bpifrance , qui a fait ses preuves et à laquelle ce rôle pourrait être confié ;

« - soit les aides relèvent davantage de « l'État pompier » que de « l'État stratège » , c'est-à-dire qu'elles sont accordées sur le fondement de considérations politiques quand bien même les sites industriels ne seraient pas viables à terme, et alors l'existence même du FDES peut être remise en question ».

4. Un soutien ponctuel mais important à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie

Créé en 2016, le programme 867 « Soutien à la filière nickel en Nouvelle-Calédonie » porte le prêt de 200 millions d'euros, d'une maturité de 10 ans, accordé à la société Vale Canada Limited (VCL), afin de soutenir les activités de celle-ci en Nouvelle-Calédonie .

Le rapport annuel de performances précise que, « dans un contexte où les conditions d'activité des opérateurs industriels en Nouvelle-Calédonie ont été particulièrement affectées par la chute du prix du nickel depuis 2014, l'État a décidé d'accompagner financièrement le complexe industriel du Grand Sud de Vale Nouvelle-Calédonie S.A.S. (VNC), exploité par le groupe Vale, à travers deux mesures ». Ces deux mesures sont :

- d'une part, un prêt de 200 millions d'euros d'une maturité de 10 ans et à un taux d'intérêt de marché , en faveur de Vale Canada Limited (VCL), porté par le présent programme 867 ;

- d'autre part, une contre-garantie de l'État à hauteur de 220 millions d'euros , autorisée par l'article 123 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016. Celle-ci est plus particulièrement destinée à « accompagner le financement du projet de remplacement du barrage actuel par la construction du site de stockage à sec des résidus miniers associés aux activités d'extraction minière et de transformation de VNC, visant à fournir une solution sûre et protectrice de l'environnement pour le stockage de longue durée des résidus ». Cette contre-garantie, rémunérée à des conditions de marché, ne s'exercera qu'en cas de défaut de Vale S.A . qui fournit une garantie de premier rang sur l'intégralité du financement accordé à ce projet. Sa mise en oeuvre en dernier ressort ne couvrira qu'une partie des emprunts contractés par la société portant le projet du site de stockage à sec (au maximum 80 %).

Vale Nouvelle-Calédonie S.A.S.

Vale Nouvelle-Calédonie S.A.S. (VNC), dont le capital est détenu à 95 % par Vale Canada Limited (VCL), elle-même filiale à 100 % du groupe Vale S.A., et à 5 % par la Société de participation minière du Sud calédonien (SPMSC), est une entreprise d'extraction de minerai (latérites et saprolites) et de production de nickel et de cobalt, située dans le sud de la Nouvelle-Calédonie.

Le complexe industriel, dénommé Usine du Grand Sud, comprend une mine de 1 900 hectares, une usine hydro-métallurgique, un port disposant d'un quai vraquier de 179 mètres de long et d'un quai pour les cargos d'une longueur de 87 mètres (4 500 conteneurs de nickel et de cobalt sont exportés annuellement), une centrale électrique opérée par Prony Energies, filiale d'Enercal, une pépinière, et une base vie de 4 000 lits ;

VNC emploie 3 000 salariés dont 350 emplois directs (90 % de calédoniens) et 600 entreprises locales en sous-traitance. Le coût total de cet investissement pour le Groupe Vale a représenté environ 8,5 milliards de dollars. Prenant acte du contexte de marché qui rend difficile économiquement pour le groupe Vale la poursuite de ses activités en Nouvelle-Calédonie et obère la soutenabilité de ses besoins généraux de trésorerie, l'État a mis en oeuvre en 2016 un prêt de 200 millions d'euros Vale Canada, filiale à 100 % du groupe Vale S.A, qui a pour objet le financement indirect de VNC nécessaire pour soutenir le redressement de ses activités et ses besoins généraux de trésorerie.

Ce prêt a été réalisé à un taux d'intérêt de marché et bénéficie d'une garantie autonome à première demande consentie par Vale S.A., la société mère brésilienne du groupe Vale.

Source : projet annuel de performances 2016

L'extraction et la transformation du nickel sont indispensables à l'économie de la Nouvelle-Calédonie, eu regard des retombées associées à ces activités. Si vos rapporteurs spéciaux ne remettent pas en cause l'objet de la mesure, ils soulignent néanmoins que celle-ci contribue à dégrader -peut-être excessivement - le solde du compte de concours financiers, dans la mesure où aucune recette de court ou moyen terme d'un montant équivalent n'est prévue .

Peut-être est-ce d'ailleurs la raison qui a conduit le Gouvernement a imputer ce prêt sur le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés », alors qu'il était initialement envisagé de le rattacher au compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » . À l'occasion de l'examen du projet de loi de règlement des comptes de l'année 2015, notre collègue Maurice Vincent, rapporteur spécial, faisait une observation similaire : « Pour autant, ce montant n'apparaît pas suffisant pour assurer l'ensemble des dépenses auxquelles le compte pourrait devoir faire face à court ou moyen terme , dans un contexte marqué par la nécessité de recapitaliser le secteur énergétique français ».

MISSION « ÉGALITÉ DES TERRITOIRES ET LOGEMENT » - M. PHILIPPE DALLIER, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

À la suite de la « rebudgétisation » du financement du Fonds national d'aide au logement (FNAL) opérée dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2015 et conduisant à une augmentation de 5,7 milliards d'euros de l'enveloppe budgétaire consacrée aux aides personnelles au logement, la mission « Égalité des territoires et logement » a connu en 2016 le transfert à l'État du financement de l'allocation de logement familiale (ALF) . Cette dernière, qui constitue une des trois aides personnelles au logement, était jusqu'alors financièrement supportée par la branche famille de la sécurité sociale (par le biais du Fonds national des prestations familiales).

Cette budgétisation de l'ALF, réalisée, comme la première opération de 2015, en compensation de la mise en oeuvre du pacte de responsabilité et de solidarité, équivalait à une enveloppe supplémentaire de 4,7 milliards d'euros pour l'État qui assure la subvention d'équilibre du FNAL. Le financement des aides personnelles au logement est désormais simplifié puisqu'intégralement assuré par le FNAL dont les différentes sources de financement ont elles-mêmes été réduites.

Ainsi, compte tenu des autres évolutions budgétaires de cette mission, les crédits inscrits en loi de finances initiale passaient entre 2015 et 2016, de 13,73 à 18,37 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 13,63 à 18,43 millions d'euros en crédits de paiement.

Par ailleurs, les crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » ont également été assez substantiellement augmentés (+ 10,7 %, soit près de 150 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2015), afin de tenir compte des besoins toujours plus importants au cours des dernières années.

En cours de navette, des abondements de crédits avaient notamment été adoptés , pour :

- couvrir les dépenses induites par les besoins en termes de relocalisation de demandeurs d'asile, conformément aux engagements de la France au niveau européen, correspondant à 69,85 millions d'euros sur le programme 177 et 26,17 millions d'euros sur le programme 109 ;

- renforcer le financement des aides à la pierre, dont la gestion est désormais assurée par le Fonds national des aides à la pierre (FNAP), avec 100 millions d'euros en autorisations d'engagement et 150 millions d'euros en crédits de paiement supplémentaires.

Les dépenses de la mission se sont finalement élevées à 17,96 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 17,94 milliards d'euros en crédits de paiement. Ces chiffres correspondent ainsi à une exécution plus élevée que la prévision initiale, avec un taux de 102 % en autorisations d'engagement et 101,5 % en crédits de paiement , soit un dépassement de respectivement 350 millions et 270 millions d'euros .

Pour mémoire, l'exécution de la mission est analysée sans tenir compte des crédits du programme 337 « Conduite et pilotage des politiques du logement et de l'égalité des territoires », dans la mesure où ils sont, en gestion, automatiquement transférés vers le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Votre rapporteur spécial a fréquemment critiqué cette pratique qui ne permettait pas de suivre aisément les crédits. Le rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques pour 2018 prévoit d'ailleurs d'y mettre un terme en regroupant l'ensemble des crédits, en prévision comme en exécution, au sein du programme 217.

Exécution des crédits de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros et en %)

Programmes

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016*

Crédits exécutés 2016

Évolution exécution 2016 / exécution 2015
(en %)

Évolution exécution 2016 / LFI 2016

(en %)

Programme 177

AE

1 590,26

1 513,01

1 752,05

+ 10,2 %

+ 15,8 %

CP

1 591,27

1 513,01

1 751,2

+ 10,1 %

+ 15,7 %

Programme 109

AE

10 754,32

15 438,29

15 356,99

+ 42,8 %

- 0,5 %

CP

10 754,32

15 438,29

15 356,99

+ 42,8 %

- 0,5 %

Programme 135

AE

465,46

654,42

848,38

+ 82,3 %

+ 29,6 %

CP

457,83

714,42

828,23

+ 80,9 %

+ 15,9 %

Programme 337

**

AE

-

-

-

-

-

CP

-

-

-

-

-

Total mission

AE

12 810,04

17 605,72

17 957,42

+ 40,2 %

+ 2,0 %

CP

12 803,42

17 665,72

17 936,42

+ 40,1 %

+ 1,5 %

* Y compris fonds de concours et attributions de produits.

** Le programme « Conduite et pilotage des politiques du logement et de l'égalité des territoires » regroupe les effectifs et l'essentiel des crédits de masse salariale du ministère chargé du logement et de l'habitat durable et qui sont intégralement transférés, en gestion, dans le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » relevant du ministère de l'écologie, de l'énergie et de la mer. Prévisions en loi de finances initiale pour 2016 : 765,55 millions d'euros en AE et CP.

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

L'analyse des dépenses par programme met toutefois en évidence des situations contrastées, comme le montre d'ailleurs les mouvements de crédits enregistrés sur la mission au cours de l'année.

Ainsi, le programme 177 poursuit sa tendance haussière en connaissant une nouvelle année de sur-exécution budgétaire , avec un taux d'exécution de 115,8 %, loin de respecter le plafond initialement fixé. Cette situation était attendue compte tenu de l'insincérité du budget initial , tant au regard de l'exécution constatée au cours des dernières années que de la demande toujours plus importante notamment enregistrée s'agissant de l'hébergement d'urgence, comme cela sera développé infra .

Les décrets d'avance du 3 octobre 2016 et du 2 décembre 2016 ont ainsi permis l'ouverture de respectivement 84 millions d'euros et 100 millions d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement . En outre, la loi de finances rectificative pour 2016 du 29 décembre 2016 a ouvert 244,11 millions d'euros en autorisations d'engagement et 95,12 millions d'euros en crédits de paiement, pour couvrir les besoins supplémentaires et tenir compte, en termes d'autorisations d'engagement, du marché public lancé par l'État et portant création de 5 000 places d'hébergement d'urgence 155 ( * ) avec accompagnement social 156 ( * ) . Toutefois, tous les crédits n'ont pu être engagés à temps sur le programme 177 pour l'année 2016 et ont donc fait l'objet d'un report sur 2017.

Pour la deuxième année consécutive, le programme 109 « Aide à l'accès au logement » enregistre une dépense conforme à la prévision initiale et qui s'avère même inférieure de 0,5 %. Ce constat mérite d'être souligné dans la mesure où, au cours des exercices précédents, les besoins en cours d'année s'avéraient systématiquement supérieurs aux crédits prévus. Si les mesures d'économie adoptées depuis 2014 et peut-être la situation macroéconomique peuvent expliquer pour partie cette situation, c'est surtout le montant alloué pour compenser la budgétisation de l'ALF qui aurait été calculé de façon assez large selon l'analyse de la Cour des comptes ( cf. infra ).

Plus de 85 % des crédits de la mission sont consacrés aux aides personnelles au logement portés par le programme 109 « Aide à l'accès au logement » (action 01).

Répartition des crédits de paiement consommés par programme

Source : commission des finances d'après le rapport annuel de performances

Le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » connaît quant à lui une exécution de ses crédits anormalement élevée (+ 29,6 % en AE et 15,9 % en CP par rapport à la prévision initiale), avec une consommation de 848,38 millions d'euros en autorisations d'engagement et 828,23 millions d'euros en crédits de paiement.

Cette situation s'explique tout d'abord par la création en cours d'année du Fonds national des aides à la pierre (FNAP) et le nouveau circuit budgétaire qu'il implique désormais au sein de l'action 01 « Construction locative et amélioration du parc », objet de développements plus précis infra .

Ensuite, 150 millions d'euros ont été rétablis à l'action 04 « Réglementation, politique technique et qualité de la construction » sur le programme (en autorisations d'engagement et en crédits de paiement) pour abonder le Fonds d'aide à la rénovation thermique (FART) dans le cadre du programme d'investissement d'avenir (PIA) au sein de l'action « Aide à la rénovation thermique des logements privés ». L'ouverture de crédits réalisée à ce titre par le décret du 2 juin 2016 a toutefois été intégralement compensée par l'annulation à due concurrence de crédits d'aide à la pierre ( cf . infra ) sur le même programme.

Enfin, les autres actions, qui correspondent à des montants plus modestes, connaissent, pour l'essentiel d'entre elles, une forte exécution voire une sur-exécution, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement. Il s'agit notamment des dépenses engagées dans le cadre de la lutte contre l'habitation indigne (action 03 « Lutte contre l'habitat indigne »), de celles consacrées au fonctionnement des commissions DALO (action 05 « Soutien ») ou encore des crédits consacrés à l'aide aux maires bâtisseurs (action 07 « Urbanisme et aménagement ») qui enregistre notamment plus que le doublement de ses autorisations d'engagement, après intégration de reports de 2015.

Mouvements de crédits de la mission « Égalité des territoires et logement » en 2016

(en milliers d'euros)

* Y compris fonds de concours.

Source : ministère du budget

S'agissant des dépenses fiscales , leur montant reste très élevé , avec 12,8 milliards d'euros en 2016 (12,5 milliards d'euros prévus initialement), soit une baisse de près de 3 % par rapport à 2015. La dépense liée aux prêts à taux zéro (PTZ et PTZ renforcé) baisse notamment à 875 millions d'euros (contre 1,065 million d'euros en 2015). Par ailleurs, plusieurs dépenses fiscales dont le fait générateur est désormais éteint restent couteuses mais commencent néanmoins à voir leurs montants se réduire, en particulier s'agissant de la déduction des intérêts d'emprunts (420 millions d'euros en 2016 contre 763 millions d'euros en 2015 et 1,2 milliard d'euros en 2014).

Parallèlement, le dispositif « Duflot » puis « Pinel » commence à produire ses effets, avec une dépense fiscale qui s'établit à 195 millions d'euros en 2016, soit une hausse de 150 % par rapport à 2015.

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Malgré l'inscription de crédits supplémentaires, l'insincérité confirmée de la prévision budgétaire relative aux dispositifs d'hébergement d'urgence et à la veille sociale

Conformément à la tendance constatée depuis de nombreuses années et à ce qui avait été annoncé par votre rapporteur spécial, le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » a connu en 2016 une consommation très supérieure à la prévision initiale , avec près de 240 millions d'euros supplémentaires correspondant à un écart de 15,7 % .

Évolution des crédits de paiement du programme 177 de la loi de finances initiale à l'exécution

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après le rapport annuel de performances)

Ainsi, outre un report de crédits d'un million d'euros en autorisations d'engagement et de 2 millions d'euros en crédits de paiement, le programme a connu trois ouvertures de crédits majeurs destinés à couvrir les besoins réellement constatés, pour un total de 279 millions d'euros.

L e Gouvernement a maintenu , au cours de la navette parlementaire, une prévision initiale qu'il ne pouvait ignorer être d'ores et déjà insuffisante pour 2016, même si les crédits ont été augmentés de près de 75 millions d'euros dans le projet de loi de finances par rapport à la loi de finances initiale pour 2015 et indépendamment des 69,85 millions d'euros ajoutés ensuite par voie d'amendement pour l'accueil des demandeurs d'asile. En effet, cette prévision était inférieure à l'exécution attendue de 2015 (au regard des crédits ouverts et de la tendance constatée) et rien ne pouvait présager d'une exécution plus favorable l'année suivante. C'est la raison pour laquelle l'insincérité du budget prévu était caractérisée .

Pour autant, la pression toujours plus forte qui s'exerce en termes de demande, ne peut non plus être ignorée et explique que, chaque année, les crédits consommés soient toujours plus élevés, en particulier s'agissant de l'hébergement d'urgence et de la veille sociale.

Ainsi, la consommation des crédits aurait quand même été supérieure de près de 10 %, soit près de 160 millions d'euros, si la prévision budgétaire avait au moins été à hauteur de l'exécution de l'année précédente.

Écart entre la prévision et l'exécution sur la période 2010-2017

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les crédits consacrés à l'hébergement d'urgence continuent de progresser considérablement (671,4 millions d'euros en AE et 670,5 millions d'euros en CP), avec 188 millions d'euros supplémentaires en crédits de paiement par rapport à la prévision initiale et 123 millions d'euros par rapport à l'exécution 2015.

Parallèlement, la dépense exécutée (137 millions d'euros) au titre de la veille sociale est supérieure de plus de 50 % à la prévision et correspond à une hausse de 14 % par rapport à 2015.

Malgré d'importants efforts de remise à niveau du budget initial en 2017, un écart de 10 millions d'écart est déjà constaté avec l'exécution 2016.

Prévision et exécution pour l'hébergement d'urgence et la veille sociale

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

2. Le développement de l'offre d'hébergement d'urgence qui ne parvient pour autant pas à couvrir une demande sans cesse croissante

Avec 133 874 places dans le parc généraliste d'hébergement et de pensions de famille au 30 juin 2016, l'offre continue d'augmenter de façon importante (127 395 places au 31 décembre 2015).

Alors qu'a été mis en place un plan triennal relatif à la substitution de dispositifs alternatifs aux nuitées hôtelières pour 2015-2017, les crédits consacrés aux nuitées d'hôtel progressent toujours mais dans une moindre mesure par rapport aux dernières années .

Ainsi, selon le rapport annuel de performances, le montant consacré aux nuitées d'hôtel augmente de « seulement » 3 % entre 2015 et 2016 (contre 12 % entre 2014 et 2015 et 33 % entre 2013 et 2014) tandis que celui relatif aux dispositifs d'hébergement d'urgence hors CHRS progresse sur la même période de 46 %.

En termes de nombre de places, les nuitées d'hôtel connaissent encore une hausse de 10 % en six mois (41 697 places au 30 juin 2016 contre 37 962 places au 31 décembre 2015), correspondant à 35 % du parc d'hébergement généraliste. Elles enregistrent encore la plus forte progression par rapport aux autres dispositifs.

Les efforts pour développer des dispositifs alternatifs à l'hébergement à l'hôtel doivent donc se poursuivre , compte tenu de la faible qualité de ce type d'accueil pourtant souvent destiné aux familles.

À ce titre, les dispositifs de logement adapté , qui offrent des solutions plus satisfaisantes que les dispositifs d'hébergement d'urgence, connaissent un essor qui mérite d'être souligné , avec des crédits consommés en hausse de 9,6 % par rapport à 2015 (223,9 millions d'euros en exécution 2016).

Avec 14 974 places au 30 juin 2016, les pensions de famille et maisons relais voient leurs capacités progresser de 3,6 % en un an. Sur la même période, l'intermédiation locative passe également de 21 755 places à 26 212 places, soit une hausse de plus de 20 % (4 457 places).

Votre rapporteur spécial a préconisé que se poursuive le développement de l'intermédiation locative dans le cadre de son contrôle sur les dispositifs d'hébergement d'urgence dont les conclusions ont fait l'objet d'un rapport d'information publié en décembre 2016 157 ( * ) .

À cette occasion, il a pu mettre en évidence le fait que, malgré la hausse des capacités d'accueil, la demande est telle que le système semble actuellement au bord de l'asphyxie .

L'indicateur de performance de la mission relatif au taux de réponse positive des services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO) confirme d'ailleurs ce constat, avec une réalisation 2016 à la fois bien moins élevée que l'objectif initialement fixé et en nette baisse par rapport à 2014 et 2015.

Indicateur 1.2 « Taux de réponse positive du SIAO aux demandes d'hébergement et de logement (indicateur de mission)

Source : rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement 2016

Ainsi, d'après le rapport annuel de performances, entre juin 2015 et juin 2016, alors que le nombre de réponses positives a progressé de 10 %, parallèlement la demande a connu une hausse de 68 %.

Votre rapporteur spécial considère qu'au-delà de la création de places nouvelles, une plus grande rationalisation des coûts doit être recherchée ainsi que des solutions de « sortie » des dispositifs d'hébergement afin de permettre une plus grande rotation sur les places existantes.

Le rapport d'information a également été l'occasion de mettre en évidence l'impact négatif qu'une mauvaise budgétisation initiale pouvait avoir sur l'activité des services déconcentrés et les associations gestionnaires du fait des difficultés rencontrées . C'est particulièrement le cas en Île-de-France où la dotation prévue en début d'année est très en-deçà de l'exécution réellement constatée. Pourtant, comme l'indique le rapport annuel de performances, cette région concentre à elle seule 425,7 millions d'euros en crédits de paiement au titre de l'hébergement d'urgence, dont 202,2 millions d'euros pour les seules nuitées hôtelières, soit 85 % du montant total.

12 recommandations ont été formulées à l'occasion de ce contrôle.

3. Une subvention d'équilibre versée au FNAL légèrement moins élevée que prévue, sans pour autant garantir une réduction substantielle et durable de la dépense liées aux aides personnelles au logement

La contribution de l'État au Fonds national d'aide au logement (FNAL), qui finance désormais l'intégralité des aides personnelles au logement après la budgétisation de l'ALF, représente la quasi-totalité du programme 109 « Aide à l'accès au logement ».

Destinée à équilibrer les comptes du FNAL, cette subvention s'est élevée à 15,338 milliards d'euros en 2016 , pour une prévision à 15,422 milliards d'euros.

Votre rapporteur spécial constate que les aides personnelles au logement font l'objet d'une meilleure budgétisation que par le passé puisqu'en 2015, les charges du FNAL étaient quasi identiques à ce qui avait été prévu initialement et qu'en 2016, elles sont même légèrement inférieures, avec 17,933 milliards d'euros contre 18,188 milliards d'euros prévus dans le projets annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016 (hors amendements issus des travaux des assemblées).

Les trois aides personnelles au logement (hors frais de gestion) représentent une dépense plus élevée que prévu, avec 18,109 milliards d'euros exécutés en 2016 alors que la prévision s'établissait à 17,831 milliards d'euros pour le FNAL. Toutefois, la dépense globale diminue du fait que 528 millions d'euros de droits relevant de 2015 au titre de l'ALF et versés en 2016 ont dû être retirées des charges du FNAL pour être supportées par le Fonds national de prestations familiales (FNPF) qui assurait auparavant le financement de cette aide.

Surtout, le montant des prestations dues au titre de l'ALF a également été surévalué de 157 millions d'euros (environ 3,5 %) par rapport à la dépense réellement constatée. La Cour des comptes considère que la prévision a pu reposer sur une « hypothèse de périmètre » (progression de 1,3 % du montant des aides versées) « trop importante au regard des indicateurs macroéconomiques qui sous-tendent la dépense d'ALF » 158 ( * ) .

L'examen du projet de loi de finances initiale pour 2016 avait également été marqué par différentes mesures d'économies proposées par le Gouvernement et conduisant à la réduction des dépenses aux montants suivants 159 ( * ) :

- dégressivité de l'aide au-delà d'un certain montant de loyer : 44 millions d'euros en 2016 ;

- troncature à l'euro inférieur des prestations : 37 millions d'euros en 2016 ;

- prise en compte du patrimoine : quasi nulle pour 2016 du fait de son entrée en vigueur en octobre 2016 et de son application, à l'heure actuelle, pour les seuls nouveaux entrants. Cette mesure devrait toutefois être pleinement appliquée à tous les allocataires.

Les sommes en jeu restent, en tout état de cause, relativement modestes comparé à la dépense totale relative aux aides personnelles au logement.

Il convient de noter que la révision opérée en 2015 des paramètres d'indexation de l'abattement forfaitaire permettant le calcul des aides servies dans le secteur locatif hors foyers a également engendré en 2016 une économie qui était estimée à 298 millions d'euros lors de sa mise en place.

Du côté des recettes du FNAL, celles issues des cotisations des employeurs ont été légèrement en-deçà de ce qui avait été prévu. Votre rapporteur spécial s'était d'ailleurs étonné du montant inscrit dans le projet annuel de performances lors de l'examen de la loi de finances initiale, en anticipant une augmentation de 100 millions d'euros par rapport à l'année précédente.

Par ailleurs, conformément à ce qu'avait prévu la loi de finances initiale, une contribution exceptionnelle d'Action logement a été maintenue en 2016, à hauteur de 100 millions d'euros. Heureusement, il a été mis un terme à cette pratique en 2017.

Compte tenu des besoins constatés, la subvention d'équilibre versée a donc été légèrement inférieure à la prévision (- 0,5 %). La réserve de précaution a été en grande partie levée (1,15 milliard d'euros sur 1,24 milliard d'euros initialement gelés) mais 81,3 millions d'euros ont pu être annulés par le décret d'avance précitée du 2 décembre 2016.

La subvention d'équilibre a même permis de réduire la dette du FNAL vis-à-vis des organismes sociaux . Celle-ci serait ainsi passée d'environ 400 millions d'euros en 2015 à 258 millions d'euros à fin 2016.

Avec plus de 18 milliards d'euros de dépenses réalisées chaque année, les aides personnelles au logement demeurent particulièrement couteuses . Selon le Compte général de l'État pour 2016, l'aide à l'accès au logement représente plus de 40 % des transferts aux ménages .

Sans remettre en cause leur indéniable intérêt pour sécuriser les ménages les plus modestes et soutenir l'accès au logement, des mesures restent à prendre pour rationnaliser ces aides , en particulier au regard de la faiblesse du taux d'effort réel de certains allocataires. Leur effet inflationniste sur les loyers pratiqués est également avancé, notamment par la Cour des comptes dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques d'avril 2017 160 ( * ) .

4. Contrairement aux engagements du gouvernement, des aides à la pierre davantage financées par la contribution des bailleurs sociaux que par des crédits budgétaires « frais » de l'État

L'année 2016 a été marquée par la mise en place du Fonds national des aides à la pierre (FNAP) instauré par l'article 144 de la loi de finances initiale pour 2016 (nouvel article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation) et ayant vocation à assurer le financement et la gestion des aides à la pierre . Le décret n° 2016-901 du 1 er juillet 2016 portant création de l'établissement public a déterminé ses règles d'organisation et de fonctionnement.

Compte tenu du fait qu'une part majoritaire du financement des aides à la pierre est désormais portée par les bailleurs sociaux (par le biais de leur contribution à la Caisse de garantie du logement locatif social), il paraît bienvenu qu'une nouvelle gouvernance soit proposée , avec une représentation équilibrée au conseil d'administration entre les représentants de l'État, des organismes intervenant dans le domaine du logement social ainsi que du Parlement et des collectivités territoriales et leurs groupements (cinq pour chacun des trois « collèges »).

En outre, elle tend à répondre aux critiques auparavant formulées par la Cour des comptes sur le rattachement par la voie du fonds de concours des crédits issus du fonds de péréquation auquel se substitue le FNAP et qui était jusqu'alors géré par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) et essentiellement alimenté par les contributions des bailleurs sociaux 161 ( * ) .

Ainsi, le FNAP est appelé à fixer le montant annuel des financements versés au titre des aides à la pierre pour couvrir les opérations déjà engagées ainsi que celui consacré aux nouvelles opérations et autres actions annexes devant être engagées sur le programme 135. En outre, au regard du montant des nouvelles opérations et actions, il détermine la programmation annuelle devant être engagée par l'État, sa répartition territoriale et les objectifs associés.

Parallèlement à la création de cette nouvelle structure, le Gouvernement s'était engagé à maintenir pour leur financement un montant au moins identique à la contribution des bailleurs sociaux pour 2016. Ainsi, en cours de navette, le Gouvernement avait ajouté 100 millions d'euros en autorisations d'engagement et 150 millions d'euros en crédits de paiement, portant ainsi le montant de l'enveloppe consacrée aux aides à la pierre, et plus globalement à l'ensemble des crédits destinés « au développement et à l'amélioration du parc locatif social et du parc d'hébergement » 162 ( * ) (au sein de l'action 01 « Construction locative et amélioration du parc » du programme) à 500 millions d'euros en autorisations d'engagement et 250 millions d'euros en crédits de paiement. Cette augmentation intervenant après plusieurs années de baisse constante des crédits budgétaires affectés aux aides à la pierre. La contribution des bailleurs sociaux a, quant à elle, été fixée à 270 millions d'euros.

À l'occasion de l'examen du projet de loi de finances initiale, votre rapporteur spécial avait estimé qu'il était « permis de douter que les aides à la pierre bénéficier[aie]nt d'un financement soutenu par des crédits budgétaires après 2016 » et que « rien ne garanti[ssai]t non plus que les crédits de paiement inscrits ser[aie]nt réellement exécutés au cours de l'année » . Il s'était également interrogé sur la nécessité d'inscrire des montants aussi importants en 2016.

Cette analyse s'est confirmée six mois plus tard , le décret d'avance du 2 juin 2016 163 ( * ) prévoyant l'annulation de 150 millions d'euros sur le programme 135 (AE=CP), compte tenu des « perspectives d'exécution du dispositif des aides à la pierre » et afin de compenser l'ouverture de la même somme au bénéfice de l'action « Aide à la rénovation thermique des logements privés » (fonds d'aide à la rénovation thermique - FART). Comme l'indiquait la commission des finances dans son avis sur le projet de décret d'avance, cette annulation « entre en contradiction avec l'engagement du Président de la République de renforcer les moyens consacrés à ces dispositifs ».

Cette annulation a ainsi réduit la contribution de l'État au financement des aides à la pierre pour 2016 à seulement 100 millions d'euros de crédits de paiement, contre 250 millions d'euros initialement prévus . En outre, 8,91 millions d'euros (AE=CP) et 25,67 millions d'euros en AE et 5,97 millions d'euros en CP ont été annulés sur le programme.

Il convient de noter que le financement des aides à la pierre a tout de même été assuré sans ces 150 millions d'euros, dans la mesure où, parallèlement, 148 millions d'euros ont fait l'objet de reports de 2015 depuis le fonds de péréquation ayant été remplacé par le FNAP . Il ne s'agit, toutefois, pas de crédits budgétaires « frais » de l'État ( cf. supra ).

Enfin, la loi de finances initiale pour 2017 a confirmé cette tendance à un engagement financier majoritairement porté par les bailleurs sociaux puisque cette année, seuls 200 millions d'euros ont été inscrits, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, en faveur des aides à la pierre.

5. Avec la création du FNAP, la mise en place d'un circuit budgétaire complexe, en particulier en 2016

Si la création du FNAP a pu avoir le mérite de mettre en cohérence la gouvernance des aides à la pierre avec les sources de financement de cette politique du logement, elle a également engendré la mise en place d'un circuit budgétaire complexe et impliquant une vigilance accrue en termes de contrôle .

En premier lieu, les aides à la pierre font l'objet d'une programmation par le FNAP mais doivent ensuite transiter au sein du budget de l'État , par la voie de fonds de concours, pour que les enveloppes régionales puissent être distribuées et parviennent aux délégataires. Cela implique donc un « double compte » de la contribution de l'État , d'abord lorsqu'elle est versée au FNAP et ensuite lorsque le fonds de concours est rattaché au programme. Il convient de neutraliser cette double opération pour identifier la dépense véritablement enregistrée.

En deuxième lieu, les autorisations d'engagement permettant de couvrir des opérations nouvelles sont désormais sollicitées par le FNAP, par la voie de fonds de concours . Ce dernier s'engage, par le biais d'une convention avec l'État, à couvrir les sommes engagées pour l'avenir selon la procédure prévue par le décret n° 2007-44 du 11 janvier 2007 relatif aux fonds de concours pour les opérations d'investissement. L'État ouvre donc des autorisations d'engagement sur le seul engagement qu'ils seront couverts, en crédits de paiement, par la contribution du FNAP.

Un fonds de concours a ainsi permis l'ouverture de 232,8 millions d'euros en octobre 2016 uniquement en autorisations d'engagement, auquel se sont ajoutés 14,5 millions d'euros (AE=CP) pour la réalisation de logements locatifs très sociaux (LLTS) et de la mise en oeuvre de dispositifs d'intermédiation locative en communes carencées (IML).

Ensuite, des fonds de concours sont également rattachés sur le programme afin de permettre au FNAP de financer les restes à payer , correspondant à 370,5 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement pour 2016. Toutefois, les autorisations d'engagement sont automatiquement bloquées en exécution (puisqu'elles ont déjà été ouvertes) et annulées en loi de règlement n+2 164 ( * ) .

A ces règles particulières, s'ajoute enfin le fait que, pour l'année 2016, le FNAP n'a été véritablement créé qu'en juillet. En conséquence, le financement des aides à la pierre a été pris en charge directement par l'État , sur les crédits du programme 135, au cours du premier semestre , à hauteur de 203 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 130 millions d'euros en crédits de paiement.

Crédits consommés directement sur le programme 135 au cours du premier semestre au titre des crédits d'aides à la pierre

(en millions d'euros)

Nature des dépenses

AE

CP

A

Loi de finance initiale

495,0

245,0

B

Mise en réserve

- 39,6

- 19,6

C=A+B

Crédits disponibles après gel

455,4

225,4

D

Suppression de 150 millions d'euros en décret d'avance

- 150,0

- 150,0

E

Reports (principalement un transfert de la trésorerie du fonds de péréquation)

251,2

*

154,9

F

Contribution de l'État au FNAP

- 100,0

- 100,0

G=C+D+E+F

Total des crédits disponibles**

205,4

130,3

H

Crédits décaissés directement à partir du programme 135

203,2

130,5

dont crédits "frais"

203,2

0,0

* Ces AE sont bloquées, elles ne peuvent pas être engagées.

** Indépendamment des éventuels dégels.

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires et les données du ministère du logement

En conséquence, aucun crédit de paiement « frais » n'a été consommé au cours de cette période.

Ensuite, le FNAP a bénéficié de 401,5 millions d'euros de recettes.

Ressources du FNAP en 2016

(en millions d'euros)

Nature des ressources

Montant

contribution de l'État

100

contribution des bailleurs sociaux et solde du fonds de péréquation

270,5

produit de la majoration du prélèvement « SRU » opéré sur les communes carencées et solde transféré de l'ancien Fonds national de développement d'une offre de logements locatifs très sociaux (FNDOLLTS)

31

Total

401,5

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires et les données du ministère du logement

Ces ressources ont servi à couvrir les restes à payer des années précédentes . Au 31 décembre 2016, les restes à payer représentaient encore 2,021 milliards d'euros sur le programme 135 et concernaient dans leur très grande majorité des crédits d'aide à la pierre.

Au cours du second semestre 2016, 234,4 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 261,3 millions d'euros de crédits de paiement ont été décaissés , correspondant à respectivement 95 % et 68 % des crédits ouverts.

Versements du FNAP sur le programme 135 et décaissements opérés au cours du second semestre au titre des crédits d'aides à la pierre

(en millions d'euros)

Nature des versements

AE

CP

A

Fonds de concours du 26/10/2016

232,8

0,0

B

Fonds de concours du 10/11/2016

14,5

14,5

C

Fonds de concours du 10/11/2016

261,3

*

261,3

D

Fonds de concours du 23/11/2016

39,2

*

39,2

E

Fonds de concours du 21/12/2016

70,0

*

70,0

F=A+B+C+D+E

Total versements du FNAP au P135 (hors AE bloquées)

247,3

385,0

dont restes à payer sur aides à la pierre

0,0

370,5

dont PLAI et IML

14,5

14,5

dont opérations nouvelles

232,8

0,0

G

Crédits décaissés par le programme 135 sur versements du FNAP

234,4

261,3

H=F-G

Crédits non consommés et reportés

12,9

123,7

* Ces AE sont bloquées, elles ne peuvent pas être engagées.

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires et les données du ministère du logement

Au total, 437,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 392 millions d'euros de crédits de paiement ont été dépensés au titre des aides à la pierre 165 ( * ) au cours de ces deux périodes. L' exécution 2016 est donc plutôt satisfaisante mais repose essentiellement sur les financements des bailleurs sociaux et des reports principalement issus du fonds de péréquation .

À titre accessoire, il paraît étonnant que le FNAP n'apparaisse pas expressément parmi les opérateurs de l'État au sein du rapport annuel de performances de la mission, alors qu'il a été constitué au cours de l'année 2016.

6. Des résultats plus satisfaisants en termes de construction de logements locatifs sociaux

En termes de résultats, le nombre de constructions financées sur le programme 135 a nettement progressé (+ 12,3 % par rapport à 2015), avec 124 226 logements financés pour un objectif de 135 000, en particulier 57 909 logements financés en prêt locatif à usage social (PLUS) et 34 351 logements bénéficiant d'un prêt locatif aidé d'intégration (PLAI).

En tenant compte des 6 090 logements sociaux financés en outre-mer, 130 316 logements ont été financés en 2016 par l'État, contre 125 103 logements en 2015 et pour un objectif de 150 000 initialement affiché. Cette bonne année mérite d'être soulignée .

Réalisations physiques réalisées en 2016 au regard des objectifs initiaux

Source : rapport annuel de performances de la mission annexé au projet de loi de règlement pour 2016

Il demeure également important que les opérations soient réalisées en tenant compte des besoins réels, à la fois en termes de localisation et de surface . Sur ce dernier point, le rapport d'information de votre rapporteur spécial consacré aux dispositifs d'hébergement d'urgence a mis en évidence la nécessité de répondre au manque de petits logements sociaux (studios, une pièce) pour faciliter la sortie des dispositifs d'hébergement d'urgence et l'accès à un logement pérenne à ceux qui seraient en mesure d'en bénéficier.

D'après le rapport annuel de performances, la part des aides à la pierre affectée aux zones les plus tendues progresse, puisque le montant alloué dans la zone A représente 43 % du total en 2016, contre 39 % en 2015. En cumulant zones A et B1, on atteint ainsi 75 % (contre 70 % en 2015).

7. Les difficultés de l'ANAH pour atteindre les objectifs qui lui sont fixés

En 2016, l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) disposait initialement d'une capacité d'engagement fixée à 536 millions d'euros pour intervenir, au titre des différentes politiques dont elle a la charge, sur un total de 78 050 logements. En cours d'année, ce plafond a toutefois été porté à 700 millions d'euros afin d'augmenter le nombre de logements rénovés dans le cadre du programme « Habiter mieux » (rénovation thermique des logements privés) de 50 000 à 70 000 comme souhaité par le Gouvernement.

Finalement, 69 769 logements ont pu bénéficier de l'intervention de l'ANAH, correspondant à 89 % de l'objectif initial et à seulement 72 % en tenant compte des 20 000 logements rénovés supplémentaires attendus dans le cadre du programme « Habiter mieux ». Ce résultat est par ailleurs en baisse d'environ 10 % par rapport à 2015.

En termes budgétaires, 501,9 millions d'euros ont effectivement été engagés, en recul de 6 % comparé à 2015.

Distribution de la capacité d'engagement disponible par l'ANAH

*PREH : plan de rénovation énergétique de l'habitat.

**RHI : résorption de l'habitat insalubre irrémédiable.

Source : rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement 2016

Surtout, dans le cadre du programme « Habiter mieux », 40 726 logements ont finalement été subventionnés , soit 81 % de l'objectif initial et seulement 58 % de l'objectif révisé en cours d'année.

Ces résultats sont donc nettement inférieurs à ceux attendus, y compris par rapport aux estimations de l'agence elle-même à l'automne 2016 (environ 60 000 dossiers traités annoncés).

Pour mémoire, le Gouvernement précédent a fixé à 100 000 le nombre de logements devant bénéficier du programme « Habiter mieux » en 2017. Pour y parvenir, l'ANAH devrait alors plus que doubler les dossiers traités en un an.

En termes de financement, le produit de cessions des quotas carbone demeure une ressource incertaine ayant conduit le Gouvernement à prévoir des moyens supplémentaires pour pallier le manque attendu en 2016.

Ainsi, alors que le budget était construit sur un cours moyen à 7,60 euros la tonne (soit la moyenne constatée au cours de l'année 2015), il n'a finalement atteint que 5,26 euros la tonne en 2016. Tandis que 343 millions d'euros étaient attendus, seuls 234,7 millions d'euros ont finalement été perçus.

Afin de combler ce manque, la contribution d'Action logement à l'ANAH a été relevée de 50 à 100 millions d'euros pour 2016 et 2017 , par l'avenant du 21 juillet 2016 à la convention quinquennale du 2 décembre 2014 entre l'État et Action logement. En outre, 50 millions d'euros ont été versés en octobre 2016 par anticipation de la contribution pour 2017. 100 millions d'euros supplémentaires ont donc été versés par Action logement.

Votre rapporteur spécial ne peut que réitérer ses interrogations sur la pertinence de faire dépendre l'essentiel des recettes d'un opérateur de l'État dont les actions sont considérées comme prioritaires , notamment dans le cadre de la lutte contre la précarité énergétique, d'une ressource aussi incertaine que la cession des quotas carbone .

Enfin, comme annoncé lors de l'examen du projet de loi de finances initial, un abondement de 150 millions d'euros a été opéré au bénéfice du Fonds national d'aide à la rénovation thermique (FART) relevant du PIA et qui complète les subventions versées par l'ANAH.

Alors que l'enveloppe initiale s'élevait à 500 millions d'euros pour la période 2010-2017, le fonds a depuis bénéficié de crédits supplémentaires pour atteindre 687 millions d'euros. Pour la période 2010-2016, 552 millions d'euros ont été engagés, dont 80,2 millions d'euros en 2016.

MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT » ET DIVERS COMPTES SPÉCIAUX - M. SERGE DASSAULT, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La consommation des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » s'est élevée à 41,7 milliards d'euros en AE et 41,9 milliards d'euros en CP , soit une sous-exécution marquée de 7,5 % en AE et 7,2 % en CP. La mission était dotée de 45,1 milliards d'euros en AE et 45,2 milliards d'euros en CP en loi de finances initiale pour 2016.

L'exécution 2016 est inférieure à l'exécution 2015 de près de 9 % en AE et 2 % en CP.

Exécution des crédits de la mission par programme en 2015

(en millions d'euros et en %)

Programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 par rapport à l'exéc. 2015

Exécution 2016 par rapport à la LFI 2016

Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs)

AE

42 136,40

44 452,00

41 447,02

- 1,64 %

- 6,76 %

CP

42 136,40

44 452,00

41 447,02

- 1,64 %

- 6,76 %

Appels en garantie de l'État
(crédits évaluatifs)

AE

145,50

125,00

121,58

- 16,44 %

- 2,74 %

CP

145,50

125,00

121,58

- 16,44 %

- 2,74 %

Épargne

AE

253,50

330,99

123,27

- 51,37 %

- 62,76 %

CP

253,50

330,99

123,27

- 51,37 %

- 62,76 %

Majoration de rentes

AE

159,90

151,00

32,10

- 79,92 %

- 78,74 %

CP

159,90

151,00

32,10

- 79,92 %

- 78,74 %

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

AE

2 999,30

0,00

-43,47

- 101,45 %

CP

29,90

111,50

197,72

561,27 %

77,33 %

Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité

AE

0,00

0,00

0,00

CP

0,00

0,00

0,00

Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement

AE

0,00

0,00

0,00

CP

0,00

0,00

0,00

Total de la mission

AE

45 694,60

45 058,99

41 680,49

- 8,78 %

- 7,50 %

CP

42 725,20

45 170,49

41 921,69

- 1,88 %

- 7,19 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » , qui représente près de 99 % des crédits de la mission, explique la majeure partie des évolutions constatées tant entre la loi de finances initiale et l'exécution qu'entre 2015 et 2016. Les crédits liés à la charge de la dette et à la trésorerie de l'État ont en effet été sous-exécutés à hauteur de 3 milliards d'euros (- 7 %) par rapport aux plafonds de la loi de finances initiale et de 690 millions d'euros par rapport à 2015, en lien avec le maintien de faibles taux d'intérêt en 2016.

Il faut noter que les crédits portés par le programme 117 ne sont pas directement versés aux acteurs financiers depuis la mission « Engagements financiers de l'État » : ils transitent, conformément à la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 166 ( * ) , par un compte de commerce 167 ( * ) .

Répartition des crédits de paiement de la mission par programme en 2016

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les autres programmes ont tous respecté les plafonds fixés en loi de finances initiale à l'exception du programme 334 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque » dont les crédits de paiement ont dépassé de 77,3 % l'autorisation votée par le Parlement en raison d'importants reports de 2015 sur 2016.

Le programme 145 « Épargne » a de nouveau connu une sous-exécution de 223 millions d'euros , soit près de 63 % des crédits budgétés en loi de finances initiale. Comme l'an passé, cette baisse provient de l'action 1 « Épargne logement » qui regroupe les crédits destinés au paiement des primes d'épargne logement (dispositifs compte épargne logement, ou CEL, et plan d'épargne logement, ou PEL). En 2015, les primes PEL ont baissé de 41 % en montant par rapport à 2015 et les primes CEL de 62 %. En effet, les épargnants ont préféré conserver leur épargne sur leur PEL ou CEL dans la mesure où la rémunération des PEL (entre 1,5 % et 2,5 %) est attractive par rapport à d'autres produits de ce type tandis que le taux des prêts PEL est actuellement plus élevé que ceux du marché.

De même, le programme « Majoration de rentes » a porté des dépenses finalement inférieures de près de 80 % à l'autorisation parlementaire 168 ( * ) .

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Un endettement non maîtrisé : la France, premier émetteur souverain de la zone euro en termes d'appel net au marché

En 2016, le besoin de financement de l'État s'est élevé à 194,1 milliards d'euros, soit une hausse de 5 milliards d'euros (+ 2,6 %) par rapport à 2015. Il continue donc de progresser, quoique de façon modérée, depuis 2014.

Évolution du besoin de financement de l'État depuis 2012

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents budgétaires)

Comme le souligne la Cour des comptes dans la note d'exécution budgétaire relative au compte de commerce « Gestion de la dette et de la trésorerie de l'État » pour l'année 2016, le besoin de financement « reste à un niveau comparable depuis 2011 (188 milliards d'euros en moyenne sur la période 2011-2016), nettement supérieur à celui observé avant la crise de 2008 (110 milliards d'euros en moyenne sur la période 2001-2007 ». L'intégralité de la hausse constatée par rapport à 2015 est portée par l'amortissement de dette à moyen et long terme , qui est passé de 116,4 milliards d'euros à 124,6 milliards d'euros. En effet, l'État émet de nouveaux titres de dette pour refinancer ceux qui arrivent à échéance - on dit qu'il fait « rouler » sa dette.

Si le besoin de financement pour 2016 augmente par comparaison à 2015, il est en revanche inférieur de 4,4 milliards d'euros aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2016 .

Évolution des composantes du besoin de financement de l'État entre la loi de finances initiale pour 2016 et l'exécution

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents budgétaires)

Cette diminution s'explique pour 3,2 milliards d'euros (environ 75 % de la baisse) par un solde budgétaire à financer moindre que cela n'était prévu en loi de finances initiale, ainsi que par la baisse des autres besoins de trésorerie (à hauteur de 1 milliard d'euros).

Cependant, la diminution du déficit à financer par rapport aux estimations initiales doit être fortement relativisée par comparaison aux autres pays de la zone euro : la France était en 2016 le premier émetteur en termes d'appel net au marché dans la zone euro, c'est-à-dire hors rachats anticipés de dette et amortissement de titres arrivés à échéance.

2. Des rachats qui demeurent importants : 214 milliards d'euros d'émissions brutes en 2016

Les rachats anticipés de dette visent à lisser les échéances pour éviter que l'État n'ait à « faire rouler » un part trop importante de sa dette certaines années - ce qui pourrait avoir un impact négatif sur le coût de l'endettement de l'État dans la mesure où le marché financier ne pourrait pas nécessairement absorber soudainement des volumes encore plus importants de titres français.

Ces rachats, qui ne correspondent pas à un désendettement, constituent aussi un élément de souplesse pour la politique d'émission , à la fois vis-à-vis du Parlement et des marchés financiers : les montants qui figurent au tableau de financement voté par le Parlement sont indiqués nets des rachats et l'Agence France Trésor ne communique pas aux marchés financiers une cible de rachats.

Montant des rachats et part dans les émissions (brutes)
de 2007 à 2016

(en milliards d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'AFT)

Les rachats constituent le principal instrument de gestion active de la dette : ils ont significativement augmenté ces dernières années pour atteindre 33 milliards d'euros en 2015 et ont légèrement diminué pour s'établir à 27,3 milliards d'euros en 2016 .

Ainsi, avec 214 milliards d'euros d'émissions brutes, la France a été, en 2016, le deuxième émetteur brut de la zone euro derrière l'Italie et devant l'Allemagne.

Cette hausse s'explique par le pic d'émissions réalisées au cours de la crise économique et financière . Le profil de remboursement de la dette souveraine va rester élevé jusqu'en 2021 et il est donc probable que les rachats se stabilisent à ce niveau pendant quelques années.

3. Un contexte financier anesthésiant qui conduit à une nouvelle diminution de la charge de la dette, mais plus pour longtemps

La charge de la dette de l'État a diminué d'environ 700 millions d'euros par rapport à 2015 et de 3 milliards d'euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale, essentiellement en raison de la baisse des taux d'intérêt malgré une remontée amorcée en fin d'année.

La hausse du stock de dette (l'effet « volume »), qui alourdit la charge de la dette, toutes choses égales par ailleurs, de 1,2 milliard d'euros par rapport à 2015, a été plus que compensée par la baisse des taux d'intérêt (l'effet « taux ») qui a diminué la charge de 1,4 milliard d'euros et la réduction de l'inflation, ou plus exactement de l'indice de glissement des prix (- 0,5 milliard d'euros).

Décomposition des facteurs d'évolution de la charge de la dette de l'État en 2016 par rapport à 2015

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'AFT présentées par la Cour des comptes)

Ainsi, la faiblesse des taux d'intérêt conduit à l'encaissement de primes à l'émission significatives : celles-ci se sont élevées à 20,8 milliards d'euros malgré une part plus faible (19,1 %, contre 33,9 % en 2015) des émissions sur souches anciennes (dites émissions « off-the-run » par opposition aux émissions de titres nouveaux, dites « benchmark »). Ces primes ont notamment permis de réduire de 18,7 milliards d'euros l'encours de titres de court terme, les bons du Trésor à taux fixe (BTF), ce qui contribue à ralentir la hausse de la charge de la dette qui serait consécutive à un choc de taux .

Part des émissions sur souches anciennes et primes (nettes des décotes) à l'émission perçues par l'État depuis 2008

(en % et en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'AFT et des données présentées dans les projets annuels de performances de la mission « Engagements financiers de l'État »)

Le maintien du niveau des primes à l'émission malgré la diminution des titres émis sur souches anciennes s'explique par le fait que l'Agence France Trésor n'émet pas de titres dont le coupon (le taux « facial ») est négatif : ainsi, même des titres nouveaux peuvent porter un coupon supérieur au taux du marché.

Au total, pour une année encore, le contexte financier s'est avéré « anesthésiant » et a donné au Gouvernement des marges de manoeuvre malgré le dérapage de la dette de l'État , qui a continué de progresser : son encours est passé de 1 576 milliards d'euros en 2015 à 1 621 milliards d'euros en 2016, soit une hausse de 45 milliards d'euros .

Cependant, il est probable que l'exercice 2017 ne voie pas une baisse de la charge de la dette dans les mêmes proportions . Outre le risque - réel - d'une remontée des taux d'intérêt plus rapide que prévu, il faut noter que les hypothèses de budgétisation pour 2017 paraissent plus proches de la réalité que ce n'était le cas les années précédentes : pour la première fois depuis le début du quinquennat, la charge de la dette prévue en 2017 est proche de la charge constatée en exécution en 2016 .

Cela ne permettra donc sans doute pas au nouveau Gouvernement d'utiliser la baisse de la charge de la dette pour augmenter les autres dépenses, comme cela a été le cas de 2012 à 2016. Il est d'ailleurs intéressant de noter que l'alignement des hypothèses de budgétisation avec l'exécution de l'année précédente n'est intervenu que la dernière année du quinquennat, sans qu'il soit possible de déterminer si ce calendrier trouve sa source dans la levée d'incertitudes techniques sur l'évolution des taux d'intérêt, ou bien provient de considérations d'un autre ordre.

4. Une mission dont la performance est extrêmement difficile à mesurer : l'exemple du taux de couverture des adjudications

L'évaluation de la performance de la mission « Engagements financiers de l'État », dont 99 % des crédits visent à assurer le paiement de la charge de la dette et des coûts de trésorerie de l'État, est malaisée : une analyse ad hoc est nécessaire pour faire le déport entre les évolutions qui relèvent de la gestion mise en oeuvre par l'Agence France Trésor et celles qui sont liées aux mouvements sur les marchés financiers.

La frontière est d'autant plus difficile à tracer que la stratégie mise en oeuvre par l'AFT dépend elle-même des tendances observées sur les marchés et qu'un indicateur pertinent dans un certain contexte financier peut s'avérer inutile voire contre-productif dans un autre contexte. L'indicateur 2.1 relatif à la gestion de la maturité de la dette à travers des swaps de taux d'intérêt a d'ailleurs été supprimé dans la maquette de performance pour 2017 en raison de son absence de pertinence, le programme de swaps ayant été suspendu depuis plusieurs années.

A contrario , l'indicateur 1.2 du programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État », qui est aussi un indicateur de mission, paraît pertinent : il permet de suivre l'évolution du taux de couverture des adjudications , c'est-à-dire le rapport (en pourcent) entre les ordres passés par les banques acheteuses de titres sur le marché primaire (les banques « spécialistes en valeur du Trésor » 169 ( * ) ) et les volumes finalement émis par l'Agence France Trésor. Un taux inférieur à 100 signifie que l'adjudication n'a pas été totalement couverte. Si le taux s'élève à 200, cela signifie que les ordres passés étaient deux fois plus importants que le volume émis.

Depuis la création de l'indicateur en 2006, la cible est fixée au même niveau : 150 pour les titres de moyen et long terme et 200 pour les titres de court terme.

Une analyse de l'exécution démontre clairement que cette cible ne constitue pas - et n'a jamais constitué - un objectif mobilisateur : comme le montre le graphique ci-après, le taux constaté en exécution a toujours été supérieur d'au moins 50 points de pourcentage à l'objectif.

La « cible » correspond en fait plutôt à un seuil en-dessous duquel l'attractivité de la dette française prêterait à interrogation . Le rapport annuel de performances le confirme d'ailleurs : « les seuils fixés pour les taux de couverture des adjudications correspondent à ceux au-dessus desquels une adjudication est considérée aujourd'hui par le marché comme bien couverte ».

Cible et exécution de l'indicateur 1.2 du programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » - taux de couverture moyen des adjudications

(en %)

Source : commission des finances (à partir des documents budgétaires)

Il pourrait donc paraître opportun de recommander que la cible de cet indicateur soit revue à la hausse .

Cependant, une telle modification induirait nécessairement le risque que l'objectif ne soit pas atteint - ce qui ne constitue pas, en soi, un problème au regard d'une démarche de performance « classique » qui ne suppose pas une réussite parfaite et totale au regard de tous les indicateurs.

Mais les jugements portés sur la qualité de la gestion de l'Agence France Trésor et plus largement sur la signature française ont eux-mêmes un effet rétroactif sur les conditions auxquelles se finance l'État : le fait que l'AFT n'atteigne pas l'objectif fixé en loi de finances initiale pourrait être interprété comme un signal de dégradation de l'attractivité des titres français.

Dans ces conditions, la fixation d'une « cible » à un niveau bas et facilement atteignable paraît préférable.

La mesure de la performance de la gestion de la dette de l'État paraît donc extrêmement délicate et elle exige une analyse qualitative détaillée , que les indicateurs mis en place peuvent enrichir mais qui ne sauraient s'y substituer.

5. Un risque de cavalerie budgétaire sur le programme 168 « Majoration de rentes »

Le programme « Majoration de rentes » a porté des dépenses finalement inférieures de près de 80 % à l'autorisation parlementaire.

Pour mémoire, ce programme porte les dépenses dues par l'État au titre des majorations légales de rentes dans le cadre de contrats de rente viagère ayant été conclus avant 1987. Les majorations légales sont remboursées aux organismes débirentiers l'année suivant le versement de la rente. De façon récurrente, ces remboursements ont eu lieu en décembre alors que les dispositions réglementaires relatives au dispositif 170 ( * ) prévoient que le versement doit être opéré avant le 30 juin de l'année.

L'année 2016 ne fait pas exception à la règle : non seulement les crédits décaissés l'ont été en décembre mais la majeure partie des dépenses qui auraient dû être effectuées en 2016 a été reportée en 2017.

La sous-exécution s'explique en effet par un report d'une ampleur considérable (117 millions d'euros) sur l'exercice 2017, dans le cadre du pilotage de la fin de gestion, pour respecter les cibles d'exécution. En d'autres termes, pour respecter la norme de dépenses, le Gouvernement a choisi de retarder artificiellement le décaissement des quatre cinquièmes des crédits du programme 168 .

Cette pratique est condamnable à la fois parce qu'elle constitue un contournement de la norme et parce qu'elle crée des tensions sur la trésorerie des cinq assureurs chargés de la gestion du dispositif.

Au surplus, comme le souligne la Cour des comptes dans la note sur l'exécution budgétaire (NEB) de la mission « Engagements financiers de l'État » relative à l'exercice 2016, un tel choix fait peser un risque sur l'exécution 2017 : afin de rattraper les retards de paiement, les dépenses devraient en toute logique s'élever à plus de 260 millions d'euros en 2017 - contre une budgétisation de 145,6 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2017. Dans la mesure où il serait surprenant que le schéma de fin de gestion offre une marge de manoeuvre d'une telle ampleur, il est extrêmement probable qu'une partie des dépenses soit, de nouveau, déportée sur l'exercice 2018. La sous-exécution constatée en 2016 pourrait donc avoir des conséquences durables .

II. COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PARTICIPATION DE LA FRANCE AU DÉSENDETTEMENT DE LA GRÈCE »

A. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE EN 2016

Créé par la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 171 ( * ) , le compte d'affectation spéciale (CAS) « Participation de la France au désendettement de la Grèce » traduit dans le droit national les engagements pris par la France dans le cadre des réunions des ministres des finances de la zone euro (Eurogroupe) :

- lors de la réunion du 20 février 2012, la France s'est engagée, aux côtés des autres États membres de la zone euro, à reverser à la Grèce les revenus perçus et à percevoir par la Banque de France entre 2012 et 2020 sur les obligations grecques que celle-ci détient en compte propre ;

- l'accord du 26 novembre 2012 prévoit que les banques centrales nationales de la zone euro doivent reverser aux États membres les revenus qu'elles reçoivent des obligations grecques détenues au titre du Programme pour les marchés de titres (PMT), ou Security Market Programme (SMP), qui sont ensuite restitués à la Grèce .

Ces deux initiatives s'inscrivent parmi les différentes mesures tendant à réduire la dette publique grecque et à rétablir la soutenabilité de celle-ci ; le taux d'endettement de la Grèce a, en effet, crû continument, approchant 180 % du PIB en 2016, selon les dernières données publiées par la Commission européenne 172 ( * ) .

Aussi, les transferts financiers opérés au profit de la Grèce dans ce cadre sont inscrits au sein du programme 795 du présent compte d'affectation spéciale, dont le responsable est le directeur général du Trésor.

Le choix de recourir à un compte d'affectation spéciale (CAS) pour faire transiter ces flux connaît deux justifications 173 ( * ) . En premier lieu, il convient de rappeler l'interdiction du financement monétaire des États membres de la zone euro par les banques centrales nationales prévue par l'article 123 du traité relatif au fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). En second lieu, il était nécessaire d' isoler ces opérations spécifiques au sein du budget de l'État .

Ainsi, le compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » retrace :

- en recettes , le produit de la contribution spéciale versée par la Banque de France au titre de la restitution des revenus qu'elle a perçus sur les titres grecs. Celui-ci s'est élevé à 309 millions d'euros en 2015 ;

- en dépenses , d'une part, le versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus précités (programme 795) et, d'autre part, les rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France (programme 796).

En 2016, les dépenses du compte ont de nouveau été nulles ce qui s'explique par le fait que le dispositif des restitutions à la République hellénique a été suspendu par l'Eurogroupe lors de sa réunion du 27 juin 2015 , au cours de laquelle il a mis fin au deuxième programme d'assistance financière en raison des difficultés apparues dans le cadre des négociations avec la Grèce.

Exécution des crédits du compte d'affectation spéciale

(en millions d'euros et en %)

Exéc. 2015

LFI 2016

Exéc. 2016

Exéc. 2016 / exéc. 2015

Exéc. 2016 / LFI 2016

Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus sur les titres grecs

AE

0,0

233,0

- 304,8

- 230,82 %

CP

0,0

325,6

0,0

- 100,00 %

Rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France

AE

0,0

0,0

0,0

CP

0,0

0,0

0,0

Total des dépenses

AE

0,0

233,0

- 304,8

- 230,82 %

CP

0,0

325,6

0,0

- 100,00 %

Recettes

309,0

233,0

233,0

- 24,60 %

0,00 %

Solde annuel

CP

309,0

- 92,6

233,0

- 24,60 %

- 351,62 %

Solde cumulé

CP

613,8

521,2

846,8

37,96 %

62,47 %

Source : commission des finances (à partir des documents budgétaires)

La budgétisation initiale pour 2016 avait été construite sur l'hypothèse d'un versement en 2016 des sommes dues au titre de 2015 et 2016, soit 233 millions d'euros en AE et 325,6 millions d'euros en CP.

L'Eurogroupe n'a finalement pas retenu, dans sa déclaration du 25 mai 2016, une telle éventualité et les autorisations d'engagement et crédits de paiement non consommés ont donc fait l'objet d'annulations. D'après le rapport annuel de performances du compte, « le montant de - 304,8 millions d'euros correspond à un retrait d'engagements antérieurs à 2014 ».

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

L'exécution du compte n'appelle pas d'observation.

III. COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

En application de l'article 24 de la loi organique relative aux lois de finances, le compte « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » retrace les avances accordées par le Trésor aux organismes susceptibles d'en recevoir.

Le programme 821 « Avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune » regroupe près de 99 % des crédits consommés en 2016 sur la mission en AE et CP (13,5 milliards d'euros sur un total de 13,6 milliards d'euros). En effet, les aides de la politique agricole commune sont d'abord avancées par l'État avant d'être remboursées par l'Union européenne après vérification de la conformité des subventions attribuées - le refus d'apurement conduisant ainsi au constat d'une charge budgétaire importante pour l'État, comme ce fut le cas en 2015.

Répartition des crédits de la mission « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics »

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents budgétaires)

L'exécution des crédits de la mission, à hauteur de 14,5 milliards d'euros en AE et 13,6 milliards d'euros en CP, représente 90 % du plafond autorisé en loi de finances initiale en AE et 85 % en CP.

Comme le prévoyait la budgétisation initiale, l'exécution du programme est en très forte augmentation par rapport à 2015 : les crédits engagés et décaissés connaissent quasiment un doublement par rapport à l'année antérieure.

Cette hausse très marquée provient principalement du programme « Avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune » : en effet, les crédits prévus au titre de la politique agricole commune (PAC) ont dû être doublés en loi de finances initiale afin de tenir compte du retard pris dans la campagne 2015 : était donc prévue en 2016 une avance couvrant à la fois la campagne 2015 et celle de 2016 .

Exécution des dépenses et des recettes du compte de concours financiers

(en millions d'euros et en %)

Exécution 2015

LFI 2016

Exécution 2016

Exécution 2016 / exéc. 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics

AE

9,9

56,0

52,9

432,77 %

- 5,51 %

CP

9,9

56,0

27,9

181,06 %

- 50,15 %

Avances à des services de l'État

AE

167,9

112,6

112,6

- 32,91 %

0,00 %

CP

167,9

112,6

106,6

- 36,49 %

- 5,33 %

Avances à l'ASP, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune

AE

6 864,3

16 000,0

14 330,0

108,76 %

- 10,44 %

CP

6 864,3

16 000,0

13 488,5

96,50 %

- 15,70 %

Avances à l'ONIAM

AE

15,0

- 100,00 %

CP

15,0

- 100,00 %

Total des dépenses

AE

7 042,1

16 183,6

14 495,5

105,84 %

- 10,43 %

CP

7 042,1

16 183,6

13 623,0

93,45 %

- 15,82 %

Recettes

n.s.

7 128,5

16 300,0

13 740,5

92,75 %

- 15,70 %

Solde annuel

CP

86,4

116,4

117,5

35,88 %

0,89 %

Solde cumulé

CP

- 2 169,9

- 2 053,5

- 2 052,5

- 5,41 %

- 0,05 %

N.B. : l'Oniam est l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales. L'ASP est l'Agence de services et de paiement.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents budgétaires)

Le solde annuel est de nouveau positif (+ 117 millions d'euros).

En dehors des avances à l'agence de services et de paiement, intégrées au financement annuel des aides agricoles, les avances octroyées en 2015 ont concerné le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) pour 112,6 millions d'euros, l'agence pour l'enseignement du français à l'étranger (AEFE) pour 2,9 millions d'euros, France Agrimer pour 40 millions d'euros (dont 15 millions d'euros étaient consommés fin 2016) et l'agence de l'Outre-mer pour la mobilité (LADOM) pour 10 millions d'euros.

Pas plus qu'en 2015, aucune avance n'a été octroyée à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM).

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Une information insuffisante pour apprécier la soutenabilité des avances accordées par l'État

Les informations présentées dans le rapport annuel de performances de la mission sont très insuffisantes et ne permettent pas d'apprécier la soutenabilité de la mission.

En effet, elles ne comportent aucune donnée sur le stock d'avances déjà octroyées, ni sur les intérêts restant à rembourser. Aucun échéancier de remboursement n'est communiqué. Ni le montant total de l'endettement, ni les ratios dette/dépenses et dette/recettes (hors emprunts et avances) de chacun des organismes bénéficiant d'avances ne sont précisés.

Concernant les avances octroyées en cours d'année, leur durée n'est pas connue - ce qui dans certains cas est impossible car elle n'est pas définie ex ante , en violation des règles fixées par la loi organique. Les taux d'intérêt appliqués ne sont pas non plus communiqués.

Alors que la mission représente des dépenses d'une ampleur considérable - celles-ci sont supérieures au budget annuel de la justice -, l'absence d'information au Parlement sur le motif, l'emploi, les conditions d'octroi et le rythme de remboursement des avances accordées dans le passé et au cours de l'exercice est très problématique.

Les documents budgétaires devraient par conséquent être enrichis dès le projet de loi de finances pour 2017 .

2. Des pratiques contraires à la loi organique relative aux lois de finances

Comme le souligne la Cour des comptes, le financement du BACEA par avances récurrentes est contraire à la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) dans la mesure où un tel financement ne constitue pas une avance mais bien un prêt, à rebours des prescriptions de à l'article 24 de la LOLF. En effet, les avances consenties le sont sans objet précis et elles couvrent des besoins structurels, constituant ainsi une facilité financière sans durée réellement déterminée.

Or l'article 46 de la loi de finances pour 2005 qui institue ce compte prévoit des « avances », sans mention de la possibilité d'octroyer de « prêts » sur ce compte.

Le Gouvernement doit donc cesser de recourir au compte d'avances pour réaliser des prêts .

En outre, la convention d'avance établie en 2016 propose au BACEA une durée d'amortissement des avances flexible, assortie d'un plafond de douze ans. D'après le rapport annuel de performances de la mission, « lors de chaque tirage, le BACEA peut déterminer librement la durée de l'emprunt dans la limite de ce plafond, y compris pour une durée infra-annuelle ». En d'autres termes, le BACEA peut décider de recourir à des avances d'une durée comprise entre quelques mois et douze ans.

Une telle convention d'avance est très clairement contraire à la loi organique qui dispose sans ambiguïté que « les prêts et avances sont accordés pour une durée déterminée ».

La convention doit être modifiée au plus vite sur ce point .

MISSION « ENSEIGNEMENT SCOLAIRE » - MM. GÉRARD LONGUET ET THIERRY FOUCAUD, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

Contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » incluse, les dépenses de la mission « Enseignement scolaire » se sont élevées en 2016 à 67,7 milliards d'euros en AE comme en CP, en progression de 1,3 milliard d'euros par rapport à 2015 (+ 2 %) .

Les dépenses constatées au titre de l'année 2016 s'élèvent par conséquent à un niveau record, le plus important depuis 2012 .

À périmètre courant, entre 2009 et 2016, les dépenses de la mission « Enseignement scolaire » auront progressé de près de 13 % en AE comme en CP.

Évolution du niveau de consommation des crédits de la mission « Enseignement scolaire »

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

AE

Prévision

62 231,47

64 082,23

65 155,83

66 345,55

67 151,41

Exécution

62 018,92

63 483,87

65 277,43

66 374,20

67 714,83

Taux de consommation (en pourcentage)

99,66 %

99,07 %

100,19 %

100,04 %

100,84 %

CP

Prévision

62 219,97

64 011,32

64 983,25

66 425,55

67 210,69

Exécution

62 344,95

63 436,25

65 111,41

66 395,30

67 728,54

Taux de consommation (en pourcentage)

100,20 %

99,10 %

100,20 %

99,95 %

100,77 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Évolution de la dépense en autorisations d'engagement entre 2015 et 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Évolution de la dépense en crédits de paiement entre 2015 et 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le taux d'exécution des crédits s'élève à 100,8 % en AE comme en CP, soit un écart aux prévisions de 563 millions d'euros en AE et de 518 millions d'euros en CP .

L'ensemble des programmes de la mission sont concernés par cette surconsommation, à l'exception du programme 143 « Enseignement technique agricole » en AE et des programmes 143 et 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale » en CP.

Évolution de la dépense par titre entre 2015 et 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La mission se caractérise par la très forte prépondérance des dépenses de personnel (titre 2), ces dernières représentant plus de 92 % du total des crédits de la mission (62,5 milliards d'euros) .

L'augmentation des dépenses de la mission « Enseignement scolaire » est essentiellement imputable à une augmentation de la masse salariale (1,2 milliard d'euros sur 1,3 milliard d'euros d'augmentation, soit 88 % de la hausse) .

L'insuffisante budgétisation des crédits en loi de finances initiale a nécessité l'ouverture de crédits par décret d'avance (575,7 millions d'euros) et en loi de finances rectificative 174 ( * ) (56,5 millions d'euros) . Le bilan des ouvertures et des annulations de crédits s'est élevé à 517,9 millions d'euros .

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Prog.

LFI 2016 (y.c FDC et ADP)

Virement ou transfert

Décrets d'avance

Reports entrants

Fonds de concours et attributions de produits

LFR de fin de gestion

Crédits ouverts*

Exécution 2016

Écart consommé/ prévu

Écart consommé/ ouverts

140

20 193,7

- 23,5

276,4

0,7

0,1

0,0

20 447,1

20 443,4

249,8

- 3,6

141

31 285,6

7,4

181,5

1,3

8,0

0,0

31 471,2

31 466,2

180,7

- 5,0

230

4 832,6

32,2

55,3

1,5

1,6

0,0

4 920,2

4 905,6

73,0

- 14,6

139

7 205,9

0,0

64,1

0,2

0,5

0,0

7 268,1

7 255,4

49,5

- 12,7

214

2 308,4

7,3

2,2

24,6

83,9

56,5

2 360,2

2 287,7

- 20,8

- 72,5

143

1 384,5

- 6,1

- 3,9

0,1

0,0

0,0

1 374,6

1 370,3

- 14,3

- 4,4

Total

67 210,7

17,2

575,7

28,4

94,1

56,5

67 841,4

67 728,5

517,9

- 112,8

* Hors fonds de concours et attributions de produits inscrits en loi de finances.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL GÉRARD LONGUET

1. La création de 7 885 postes en 2016

Schéma d'emplois de la mission « Enseignement scolaire »

(en ETP)

Programme

Sorties

dont départs en retraite

Entrées

dont primo recrutements

Schéma d'emplois

Schéma d'emplois

Écart réalisation/prévision

Réalisation

Prévision PAP

140

23 219

6 145

27 326

13 132

4 107

4 411

- 304

141

23 102

9 444

25 484

10 493

2 382

3 200

- 818

230

1 001

471

1 683

1 135

682

450

232

139

5 944

2 818

6 493

2 190

549

500

49

214

696

604

723

27

0

27

143

989

294

1 127

53

138

140

- 2

Total mission

54 951

19 776

62 836

27 003

7 885

8 701

- 816

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

7 885 postes budgétaires ont été créés en 2016, pour un objectif de 8 701 ETP, soit un écart de - 816 postes par rapport aux prévisions .

Cet écart est principalement dû à un nombre de créations de postes significativement inférieur aux prévisions dans le premier et le second degrés publics, à hauteur de respectivement - 304 postes et - 818 postes.

S'agissant du premier degré, il résulte, d'une part, d'un nombre de sorties d'enseignants stagiaires plus important que prévu et lié au recrutement non anticipé de 1 400 stagiaires issus des listes complémentaires à la rentrée 2015 et, d'autre part, d'un nombre de sorties d'enseignants titulaires supérieur de 956 ETP aux prévisions. Or les explications de ce dernier phénomène présentées dans les documents budgétaires apparaissent très lacunaires , le rapport annuel de performances pour 2016 se contentant de noter que « le nombre de départs à la retraite étant légèrement inférieur à la prévision, le dépassement s'explique par une augmentation des autres départs (démissions, radiations, réintégrations, congés parentaux, disponibilités, congés longue durée, flux de temps partiel...) ». Il conviendrait par conséquent qu'un bilan plus précis soit réalisé afin de quantifier et d'analyser chaque type de sortie .

S'agissant du second degré, l'écart aux prévisions s'explique par un niveau d'entrée très inférieur à l'objectif fixé en loi de finances initiale . En particulier, les effectifs de stagiaires ont été inférieurs de 2 762 ETP aux hypothèses, en raison des très faibles rendements des concours de recrutement .

À l'inverse, le nombre de créations de postes a été supérieur aux prévisions, à hauteur de 232 ETP, sur le programmes 230 « Vie de l'élève » (en lien avec un nombre de départs moins important que prévu et un nombre d'entrées, en particulier de conseillers principaux d'éducation stagiaires, supérieur aux hypothèses), de 49 ETP sur le programme 139 « Enseignement privé du premier et du second degrés » (résultant d'un nombre de sorties inférieur aux prévisions) et de 27 ETP sur le programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale » (résultant également d'un nombre de sorties inférieur aux prévisions).

Cette surexécution des schémas d'emplois de ces trois programmes n'a cependant pas été suffisante pour permettre d'atteindre les prévisions fixées en loi de finances initiale.

En incluant les 1 325 créations de postes d'assistants d'éducation 175 ( * ) -qui ne sont pourtant pas soumis au plafond d'emplois ministériel, malgré les demandes répétées tant de vos rapporteurs spéciaux que de la Cour des comptes - le total des créations de postes pour la mission « Enseignement scolaire » s'est élevé à 9 210 ETP, soit un écart de 1 641 ETP par rapport aux prévisions (10 851 ETP) .

Comme le montre le tableau ci-dessous, au total, 40 828 postes ont été créés entre 2012 et 2016 . Si le nouveau Gouvernement faisait sienne la politique du chiffre menée par la précédente majorité, l'atteinte de l'objectif de 55 000 créations de postes en 2012 et 2017 supposerait la création de 14 172 postes sur la seule année 2017, ce qui constituerait un niveau record depuis 2012 .

Bilan des créations de postes depuis 2012

(en ETP)

2012

2013

2014

2015

2016 (prévision)

2016 (exécution)

Total des postes créés fin 2016

2017 (prévision)

Postes devant être créés en 2017

4 326

9 076

8 804

9 421

10 851

9 201

40 828

11 802

14 172

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

S'agissant du plafond d'emplois, la sous-consommation récurrente du plafond d'emplois constatée depuis 2011 et qui s'est aggravée depuis 2012 n'a pas été résorbée en 2016, l'écart aux prévisions s'élevant à - 12 702 ETPT, contre - 12 468 en 2015. Néanmoins, le plafond d'emplois de la mission « Enseignement scolaire » a été consommé à hauteur de 98 % .

Comme le note la Cour des comptes dans son analyse de l'exécution budgétaire 2016 de la mission « Enseignement scolaire », « ce phénomène récurrent résulterait d'après le ministère de facteurs techniques (notamment le sur-calibrage des corrections techniques effectuées au moment du passage à Chorus pour le décompte des emplois à partir des fichiers de paye, qui ne permet pas la conversion des acomptes en ETPT), et des effets frictionnels dans la gestion des emplois liés au rythme particulier imposé par l'année scolaire (décrue des ETPT l'été liée à la diminution du volume de contractuels) ».

Le plafond d'emplois ministériel, contrairement à sa vocation initiale, ne peut donc pas servir de véritable outil de pilotage des effectifs et de la masse salariale .

Un ajustement technique du niveau du plafond d'emplois devrait par conséquent être envisagé par le ministère afin de mieux rendre compte de la corrélation entre évolution de la masse salariale et du plafond d'emplois .

Évolution du plafond d'emplois de la missions « Enseignement scolaire »

(en ETPT)

Programme

Prévision 2015

Réalisation 2015

Écart à la prévision

Prévision 2016

Réalisation 2016

Écart à la prévision

140

327 085

324 797

- 2 288

331 924

329 498

- 2 426

141

453 543

445 025

- 8 518

457 042

448 523

- 8 519

230

37 781

37 163

- 618

38 544

39 203

659

139

132 390

131 380

- 1 010

133 227

132 035

- 1 192

214

23 760

23 623

- 137

26 561

25 228

- 1 333

143

14 987

15 090

103

15 123

15 232

109

Total mission

989 546

977 078

- 12 468

1 002 421

989 719

- 12 702

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Logiquement, les créations de postes intervenues en 2016 se retrouvent dans l'évolution du plafond d'emplois de la mission, qui a crû de 12 641 ETPT par rapport à 2015.

2. Des créations de postes budgétaires qui ne sont cependant pas pourvues en intégralité

Il convient tout d'abord de rappeler que la création de postes budgétaires constitue une autorisation à recruter mais ne signifie pas que ces postes sont effectivement pourvus .

S'agissant du seul concours externe du CAPES, sur 7 416 postes ouverts, seuls 6 312 ont été pourvus.

Le déficit constaté dans certaines matières ne peut qu'inquiéter . Ainsi, en lettres classiques, malgré un taux d'admis/présents supérieur à 55 %, 170 postes sont restés vacants. Il en va de même pour les mathématiques, où seuls 1 134 postes ont été pourvus sur 1 440 postes ouverts et ce malgré un taux d'admission de plus de 50 %.

Statistiques du concours externe du CAPES 2016

Sections et options

Postes

Inscrits

Présents

Admissibles

Admis

Admis/présents

Postes non pourvus

Arts plastiques

242

1 758

1 052

517

242

23,00 %

0

Documentation

252

1 657

745

483

253

33,96 %

1

Éducation musicale et chant choral

165

357

243

177

132

54,32 %

- 33

Histoire et géographie

700

5 333

3 094

1 512

700

22,62 %

0

Langues vivantes étrangères : allemand

345

618

358

254

149

41,62 %

- 196

Langues vivantes étrangères : anglais

1 225

4 292

2 641

1 603

1 055

39,95 %

- 170

Langues vivantes étrangères : espagnol

462

2 978

1 882

1 006

462

24,55 %

0

Langues vivantes étrangères : italien

35

854

432

90

35

8,10 %

0

Lettres option lettres classiques

230

233

123

101

68

55,28 %

- 162

Lettres option lettres modernes

1 316

3 515

1 937

1 469

1 079

55,70 %

- 237

Mathématiques

1 440

5 365

2 251

1 868

1 134

50,38 %

- 306

Philosophie

110

1 676

972

271

110

11,32 %

0

Physique- chimie

302

2 248

1 117

669

302

27,04 %

0

Sciences de la vie et de la Terre

420

2 860

1 587

806

420

26,47 %

0

Sciences économiques et sociales

120

2 039

741

233

120

16,19 %

0

Autres

52

830

388

104

51

13,14 %

- 1

Total

7 416

36 613

19 563

11 163

6 312

32,26 %

- 1 104

Source : ministère de l'éducation nationale

Selon le ministère, entre 2012 et 2016, seuls 36 624 postes ont été effectivement pourvus. Au total, ce sont donc 17 376 postes supplémentaires qui devront être créés et pourvus d'ici la fin de l'année 2017 .

Certes, si le ministère considère que « la perte en moyens d'enseignement devrait être couverte par le recours à des heures supplémentaires et des recrutements complémentaires de contractuels dans le courant de l'année scolaire pour faire face aux besoins de remplacement plus importants lors de la période hivernale », votre rapporteur spécial ne peut que s'inquiéter de la poursuite d'une telle politique, qui, outre son coût pour les finances publiques, se traduirait nécessairement par une baisse du niveau d'exigence aux concours de recrutement, alors que les taux d'admission dans certaines matières apparaissent déjà élevés .

3. Une évolution des dépenses de personnel dont la soutenabilité peut être questionnée
a) Une augmentation des dépenses de personnel de plus d'un milliard d'euros en 2016

Les dépenses de personnel (titre 2), contribution au CAS « Pensions » comprise, se sont élevées à 62,5 milliards d'euros, en augmentation de 1,7 milliard d'euros par rapport à 2015.

Évolution des dépenses de personnel et du plafond d'emplois

(en milliards d'euros et en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Hors contribution au CAS « Pensions », les dépenses de titre 2 se sont élevées à 43,4 milliards d'euros, contre 42,6 milliards d'euros en 2015, soit une augmentation de 827 millions d'euros (+ 2 %) .

Les principaux facteurs d'évolution de la masse salariale sont :

- les schémas d'emplois 2015 et 2016, à hauteur de 251,3 millions d'euros ;

- le glissement-vieillesse-technicité (GVT), à hauteur de 291,5 millions d'euros ;

- les mesures catégorielles, à hauteur de 162 millions d'euros ;

- les mesures générales, à hauteur de 178,5 millions d'euros.

L'augmentation du coût des mesures catégorielles résulte essentiellement de :

- l'extension en année pleine de la revalorisation des indemnités versées en éducation prioritaire intervenue en 2015, ces dernières atteignant 1 734 euros bruts par an en REP et à 2 312 euros bruts par an en REP + ( 36,4 millions d'euros sur le programme 140 et 28,2 millions d'euros sur le programme 141 ) ;

- la revalorisation de l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves (ISAE) intervenue en 2016 pour un coût de 11,6 millions d'euros au titre du programme 139 et 65,6 millions d'euros au titre du programme 140 (soit respectivement 46,4 millions d'euros et 262,6 millions d'euros en année pleine).

Parmi les mesures générales, la progression constatée entre 2015 et 2016 est essentiellement imputable à la revalorisation du point d'indice de la fonction publique intervenue en juillet 2016 (+ 0,6 %), à hauteur de 124 millions d'euros .

Facteurs d'évolution de la masse salariale hors contribution au CAS « Pensions »

(en millions d'euros)

Source : commissions des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

b) Une surconsommation des dépenses de titre 2 de plus de 530 millions d'euros

L'exécution 2016 laisse apparaître une surconsommation des crédits de titre 2, contribution au CAS « Pensions » incluse, de plus de 535 millions d'euros .

Hors contribution au CAS « Pensions », l'écart aux prévisions inscrites en projet de loi de finances s'élève à 570 millions d'euros.

Cette surconsommation est notamment imputable à :

- un coût des mesures générales supérieur aux prévisions de près de 128 millions d'euros, dont 124 millions d'euros au titre de la revalorisation du point de la fonction publique ;

- une dépense consacrée aux mesures catégorielles supérieure de 45,3 millions d'euros aux hypothèses ;

- un GVT sous-budgété à hauteur de 48 millions d'euros.

Il convient cependant de noter qu' un effort en matière de budgétisation du GVT a été consenti en 2016, l'écart à la prévision n'étant que d'une cinquantaine de millions d'euros, contre 120 millions d'euros en 2015 et 185 millions d'euros en 2014 .

L'inscription d'un GVT solde s'élevant à 269,10 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2017 semble aller dans le sens d'une budgétisation plus sincère des dépenses de personnel. Cet effort devra être poursuivi dans les années à venir.

Au total, l'augmentation de 1,7 milliard d'euros des dépenses de personnel se conjuguant avec une surexécution dépassant les 500 millions d'euros pose la question de la soutenabilité de la trajectoire des dépenses de la mission « Enseignement scolaire ». Cette question devra nécessairement être abordée par le nouveau Gouvernement.

4. Une diminution des dépenses consacrées au fonds de soutien au développement des activités périscolaires de près de 37 millions d'euros

Les dépenses du fonds de soutien au développement des activités périscolaires se sont élevées à 350 millions d'euros en 2016, soit une diminution de 37 millions d'euros par rapport à 2015 .

Cette baisse résulte principalement de l'obligation d'établir un projet éducatif territorial (PEDT) posée à compter de la rentrée 2015 pour bénéficier des aides du fonds .

Le taux de couverture des communes est ainsi passé de 100 % à 92 % environ à la fin de l'année 2016 .

5. Des modalités de financement du plan numérique à l'école opaques

À la suite d'une concertation nationale sur le numérique pour l'éducation qui s'est déroulée entre le 20 janvier et le 9 mars 2015, un appel à projets a été lancé le 10 mars 2015. La rentrée 2016 devait voir la généralisation progressive de ce plan.

L'objectif du plan numérique est triple : mettre en place au sein des programmes des enseignements dédiés au digital (initiation au codage et à la culture digitale, etc.), développer des ressources pédagogiques numériques et doter l'ensemble des collégiens d'un outil numérique d'ici 2018.

En 2016, à l'exception des dépenses de formation (24 millions d'euros), les crédits destinés au financement de ce plan n'ont pas été inscrits dans la mission « Enseignement scolaire » mais ont été ouverts dans le cadre du deuxième plan d'investissement d'avenir.

Plus de 82 millions d'euros ont ainsi été rattachés par voie de fonds de concours en 2016 et 56,5 millions d'euros ont été ouverts en loi de finances rectificative 176 ( * ) , ces crédits ayant ensuite été reversés à la Caisse des dépôts et consignations, qui est chargée d'assurer la gestion administrative et financière de l'action « Innovation numérique pour l'excellence éducative » inscrite au programme d'investissement d'avenir.

Au total, selon la Cour des comptes, « la dépense s'est élevée à 116,8 M€ en AE et 90,8 M€ en CP (dont une atténuation de dépense de 82 M€) ».

Dans son rapport sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » pour 2016, votre rapporteur spécial regrettait une telle situation qui lui semblait contraire au droit budgétaire. Son analyse est en cela rejointe par celle de la Cour des comptes qui estime, dans son analyse de l'exécution budgétaire 2016, qu'« une telle utilisation des fonds de concours [...] s'apparente à une opération de débudgétisation ».

L'information contenue dans les documents budgétaires est en outre morcelée rendant malaisée une vue exhaustive de l'ensemble des dépenses consacrées à la mise en oeuvre du plan numérique .

Par ailleurs, votre rapporteur spécial ne peut, une nouvelle fois, que s'interroger sur la pertinence de cette dépense, les études menées par l'OCDE sur cette question montrant le faible impact de telles mesures sur les apprentissages. Ainsi, dans une note de 2015 177 ( * ) , l'OCDE rappelait qu'« au cours des dix dernières années, les pays qui ont consenti d'importants investissements dans les TIC dans le domaine de l'éducation n'ont, en moyenne, enregistré aucune amélioration notable des résultats de leurs élèves en compréhension de l'écrit, en mathématiques et en sciences ».

6. SIRHEN, chronique d'un échec annoncé

Votre rapporteur spécial a alerté à plusieurs reprises le ministère de l'éducation nationale sur les risques de dérapage du programme SIRHEN (système d'information des ressources humaines de l'éducation nationale).

Principaux projets informatiques du ministère de l'éducation nationale

Année d'initialisation du projet

Durée initiale du projet

Durée révisée du projet

Coût initial du projet (en millions d'euros)

Coût révisé du projet (en millions d'euros)

Écart entre coût révisé et coût initial

(en millions d'euros)

Nombre d'années

Nombre d'années

a

b

c=b-a

SIRHEN

2009

7

12

80

323,3

243,3

OCEAN (CYCLADES)

2009

7

12

12,5

27,1

14,6

OP@LE (ex REFONTE GFC)

2011

7

9

8,9

8,9

0

OPER@ (ex SI Paie en EPLE)

2015

4

6

12

10,5

- 1,5

Source : rapport annuel de performances pour 2016

Malgré un coût multiplié par trois et une durée prévisionnelle de mise en oeuvre qui est passée de sept ans à douze ans, le ministère a décidé de poursuivre le développement de ce système d'information .

Or les déboires de ce projet semblent se poursuivre , le rapport annuel de performances pour 2016 notant ainsi que « la trajectoire fonctionnelle prévoyait, au cours de l'année 2016, le lancement des travaux relatifs aux enseignants du 1 er degré. Compte tenu des orientations issues de la phase de refondation, le début de ces travaux a été repositionné fin 2016 / début 2017 ».

Même si les montants en jeu apparaissent plus faibles, le projet OCEAN (CYCLADES), système d'information des examens et concours, dont la durée prévisionnelle est passée de sept à douze ans et le coût a été multiplié par plus de deux, devra également faire l'objet d'une vigilance pour éviter tout dérapage plus important .

7. Un dispositif de mesure de la performance inadapté

Au niveau de la mission, l'évaluation de la performance s'effectue via deux objectifs (« Conduire tous les élèves à la maîtrise des connaissances et compétences du socle commun exigibles au terme de la scolarité primaire » et « Conduire le maximum de jeunes aux niveaux de compétences attendues en fin de formation initiale et à l'obtention des diplômes correspondants ») déclinés en cinq indicateurs , dont trois indicateurs spécifiques et deux indicateurs de programme, et 31 sous-indicateurs .

Le taux de renseignement atteint 68 % (21 sous-indicateurs renseignés sur 31), mais 27 sous-indicateurs sont inexploitables faute de prévision renseignée .

Le choix des indicateurs considérés comme les plus « représentatifs de la mission » ne semble pas pertinent dans la mesure où ils se contentent de présenter - lorsque les résultats sont renseignés - des taux de réussite à des évaluations ou à des examens, sans se pencher sur les moyens déployés .

Il conviendrait par conséquent de repenser la maquette de performance au niveau de la mission , celle-ci devant par exemple permettre de mesurer l'atteinte des principaux objectifs fixés par l'exécutif : priorité donnée au primaire, nombre de créations de postes, postes effectivement pourvus, plan numérique à l'école, moyens consacrés à l'éducation prioritaire, etc. Certains indicateurs de programme pourraient par exemple être étendus à l'ensemble des programmes pertinents et synthétisés au sein d'un indicateur de mission spécifique (taux d'heures d'enseignement devant des groupes de dix élèves ou moins, écarts de taux d'encadrement entre éducation prioritaire et hors éducation prioritaire, scolarisation des élèves en situation de handicap, pourcentage d'heures d'enseignement non assurées, etc.).

Les indicateurs de programme semblent mieux rendre compte des résultats enregistrés par chacun d'entre eux . La poursuite d'un effort de rationalisation apparaît néanmoins indispensable, la mission comportant 16 objectifs déclinés en 55 indicateurs .

III. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL THIERRY FOUCAUD

1. Une poursuite des créations de postes en trompe-l'oeil

La poursuite de la reconstitution des moyens humains de l'éducation, avec 7 747 ETP supplémentaires dans l'éducation nationale et 138 dans l'enseignement technique agricole , constitue une absolue nécessité après les « coupes franches » intervenues entre 2008 et 2012 .

Cependant, le nombre de créations de postes est malheureusement significativement inférieur aux prévisions, à hauteur de 816 ETP hors assistants d'éducation et de 1 641 ETP, une fois pris en compte les recrutements de ces personnels.

Ces postes budgétaires ne sont en outre pas tous pourvus , alors même que l'atteinte de l'objectif de 55 000 postes supplémentaires serait à peine suffisante pour répondre aux besoins.

En effet, cet objectif inclus les créations de postes de stagiaires, qui n'effectuent, dans le meilleur des cas, qu'un demi-service .

Par ailleurs, une part importante des postes créés (7 000 ETP) est affectée au dispositif « plus de maîtres que de classes » et à la reconstitution des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED). Sans contester le bien-fondé de ces dispositifs, compte tenu de l'évolution de la démographie scolaire, les créations de postes consenties s'avèrent à peine suffisante pour permettre un renouvellement ou un maintien des enseignants en place .

À cet égard, il conviendrait que les documents budgétaires détaillent davantage les évolutions des moyens, notamment humains, consacrés à l'enseignement scolaire et en analysent plus précisément les causes .

2. Des dépenses consacrées à la formation des enseignants en augmentation mais qui demeurent très inférieures aux prévisions et aux besoins

En 2016, les dépenses consacrées à la formation des enseignants, hors dépenses de titre 2 se sont élevés à 68,7 millions d'euros en AE et à 68,2 millions d'euros en CP, en augmentation d'un peu plus de 5 millions d'euros en AE comme en CP par rapport à 2015 .

Évolution des dépenses consacrées à la formation des enseignants (hors dépenses de personnel)

(en millions d'euros)

AE

CP

Programme

Exécution 2015

Prévision 2016

Exécution 2016

Évolution 2016/2015

Écart à la prévision

Exécution 2015

Prévision 2016

Exécution 2016

Évolution 2016/2015

Écart à la prévision

140

10,9

17,9

10,8

- 0,1

- 7,1

10,7

17,9

10,6

- 0,1

- 7,3

141

17,0

49,5

20,7

3,7

- 28,8

16,8

49,5

20,4

3,6

- 29,1

139

35,5

38,4

37,2

1,7

- 1,2

35,5

38,4

37,2

1,7

- 1,2

Total

63,4

105,8

68,7

5,3

- 37,1

63,0

105,8

68,2

5,2

- 37,5

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Cette tendance à la hausse ne doit cependant pas masquer une très forte sous-consommation des crédits consacrés à la formation, l'écart atteignant un peu plus de 37 millions d'euros en AE comme en CP .

Au total, l'effort consenti en matière de form ation continue des enseignants est décevant alors que, d'une part, celle-ci constitue le parent pauvre de l'éducation nationale , l'ensemble des enseignants et des organisations syndicales rencontrés soulignant son caractère très insuffisant et, d'autre part, les besoins n'ont jamais été aussi importants compte tenu des réformes et des transformations en cours (réforme du collège, mise en oeuvre du plan numérique à l'école, etc.).

Aussi, au-delà des voeux pieux, il apparaît indispensable qu'un véritable effort en matière de formation continue des enseignants soit poursuivi, tant en termes de contenus que de moyens .

3. Des mesures de revalorisation salariale bienvenues

Les différentes mesures de revalorisation rappelées précédemment (revalorisation des indemnités versées en éducation prioritaire, augmentation de l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves et revalorisation du point d'indice de la fonction publique) vont dans le bon sens .

Ces mesures sont opportunément poursuivies en 2017 avec la mise en oeuvre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » , qui devrait se traduire par une amélioration de la situation matérielle de l'ensemble des personnels.

En effet, ces revalorisations salariales, bien qu'insuffisantes, étaient attendues par les enseignants, dont l'attractivité, notamment financière, de leur métier apparaît significativement dégradée .

CAS « FINANCEMENT DES AIDES AUX COLLECTIVITÉS POUR L'ÉLECTRIFICATION RURALE » (FACÉ) - M. JACQUES GENEST, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE EN 2016

Créé en 2011, le compte d'affectation spéciale (CAS) « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (FACÉ) retrace, en dépenses, les aides versées aux autorités organisatrices de la distribution publique d'électricité (AODÉ), en l'occurrence les collectivités ou syndicats d'électrification ayant la maîtrise d'ouvrage des travaux sur les réseaux de distribution.

Ces dépenses sont financées par une contribution versée par les gestionnaires des réseaux de distribution publique d'électricité, et assise sur le nombre de kilowattheures (kwh) distribués à partir d'ouvrages exploités en basse tension l'année précédente. Fixé par arrêté, le taux de cette contribution est plus élevé en zone urbaine - 0,15 à 0,25 centime par kwh - qu'en zone rurale - 0,03 à 0,05 centime par kwh - permettant ainsi une péréquation dans le financement des aides.

Le CAS comprend deux programmes :

- le programme 793, qui concentre 98 % des autorisations d'engagement (AE) et des crédits de paiement (CP) du CAS, vise à financer le renforcement, la sécurisation et l'extension des réseaux d'électrification rurale ;

- le programme 794 finance des actions de production décentralisée d'électricité dans les zones non interconnectées (ZNI), en particulier dans les collectivités ultramarines, ainsi que dans les sites isolés.

1. L'exécution des dépenses en 2016

La consommation des crédits en 2016 a diminué de 20 % en AE et de 13 % en CP par rapport à l'année 2015. Cet exercice avait été marqué par une consommation des crédits exceptionnellement élevée, à un point tel que le solde du CAS était négatif. Ce déficit avait néanmoins été compensé par les reports de crédits en cours de gestion, de 104 millions d'euros en AE et de 278 millions d'euros en CP.

L'exécution des dépenses en 2016 a par ailleurs été obérée par un gel des crédits de paiement de 13 millions d'euros , intervenu en fin d'année.

Les crédits du programme 793 sont en légère sous-consommation (-3 % en AE et - 6 % en CP par rapport aux prévisions), tandis que le programme 794 demeure sous-exécuté, 10 % à peine des crédits en AE comme en CP étant consommés.

Exécution des crédits du CAS par programme en 2016

(en euros et en %)

Programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exéc. 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

(en %)

(en %)

793 « Électrification rurale »

AE

446 210 624

369 600 000

357 151 687

- 20 %

- 3 %

CP

395 369 940

369 600 000

348 959 849

- 12 %

- 6 %

764 « Opérations de maîtrise de la demande d'électricité, de production d'électricité par les énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d'utilité publique et intempéries »

AE

3 020 071

7 400 000

791 958

- 74 %

- 89 %

CP

8 707 234

7 400 000

631 787

- 93 %

- 91%

Total

AE

449 230 695

377 000 000

357 943 645

- 20 %

- 5 %

CP

404 077 174

377 000 000

349 591 636

- 13 %

- 7 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après le rapport annuel de performance pour 2016)

2. L'exécution des recettes en 2016

Comme votre rapporteur spécial l'avait constaté pour les exercices précédents, les recettes perçues par le CAS sont à nouveau légèrement inférieures au montant prévu (377 millions). L'écart s'est cependant nettement amoindri, atteignant 213 777 euros en 2016 contre 1 832 906 euros en 2015.

Également critique sur ce point, la Cour des comptes relève que l'accumulation de ces écarts depuis 2012 s'élève à 3 798 098 euros 178 ( * ) . Au cours de son contrôle budgétaire, votre rapporteur spécial n'a pas manqué d'interroger le ministère de la transition écologique, qui a répondu que des travaux d'analyse étaient en cours et devraient permettre d'identifier les raisons de ce décalage.

Le solde en 2016 est cependant nettement positif , atteignant 27 520 579 euros, du fait notamment de la très faible consommation des crédits du programme 784.

Équilibre du CAS « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » en 2016

(en euros)

Programme

Recettes

Crédits exécutés

Solde

793 « Électrification rurale »

348 959 849

764 « Opérations de maîtrise de la demande d'électricité, de production d'électricité par les énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d'utilité publique et intempéries »

631 787

Total

376 786 223

349 591 636

27 520 579

Source : commission des finances du Sénat (d'après le rapport annuel de performance pour 2016)

Évolution du solde du CAS

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les rapports annuels de performance pour 2012, 2013, 2014, 2015 et 2016)

3. Des reports de crédits qui représentent 40 % des crédits ouverts

Comme chaque année, d'importants reports sont intervenus en cours d'exécution, permettant d'abonder les crédits du CAS en 2016. Les montants des reports en AE (29 millions d'euros) et en CP (247 millions d'euros) sont cependant en baisse par rapport à l'exercice précédent (104 millions d'euros en AE et 278 millions d'euros en CP).

Les reports abondant le programme 794, bien qu'en diminution par rapport à 2015, demeurent très élevés, atteignant près de la moitié des crédits votés en loi de finances initiale.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en euros)

Programme

LFI 2016

Reports entrants

Crédits ouverts en 2016

Exécution 2016

793 « Électrification rurale »

AE

369 600 000

26 041 337

395 641 337

357 151 687

CP

369 600 000

246 554 424

616 154 424

348 959 849

794 « Opérations de maîtrise de la demande d'électricité, de production d'électricité par les énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d'utilité publique et intempéries »

AE

7 400 000

3 016 628

10 416 628

791 958

CP

7 400 000

2 688 777

10 088 777

631 787

Total

AE

377 000 000

29 057 965

406 057 965

357 943 645

CP

377 000 000

246 823 301

626 243 201

349 591 636

Source : commission des finances du Sénat (d'après le rapport annuel de performance pour 2016)

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Vers une normalisation de la consommation des crédits

Lors de l'examen de la loi de règlement pour 2015, votre rapporteur spécial avait salué le rattrapage des retards dans l'engagement et le paiement des aides du CAS, dû au niveau élevé de la consommation des crédits en AE et en CP.

Ce constat peut être renouvelé cette année, les crédits ayant été consommés à hauteur de 95 % en AE et 93 % en CP. Ces chiffres viennent appuyer ce que votre rapporteur spécial relevait dans son rapport de contrôle sur la gestion et l'utilisation des aides aux collectivités pour l'électrification rurale : cinq ans après sa création, « le FACÉ semble aujourd'hui avoir trouvé un certain rythme de croisière » dans l'instruction des dossiers et le paiement des aides 179 ( * ) .

2. La sous-utilisation chronique des aides en faveur des zones non interconnectées

Si la consommation des crédits du programme 793 a atteint ce « rythme de croisière », il n'en est pas de même pour le programme 794, qui est souvent marqué par une très forte sous-consommation de ses crédits.

Comme l'illustre le graphique ci-dessous, le montant des crédits exécutés du programme 794 est systématiquement inférieur au montant des crédits votés, hormis deux exceptions en 2012 (AE) et en 2015 (CP). L'exécution de 2016 atteint par ailleurs un niveau historiquement bas, tant en AE qu'en CP.

Votre rapporteur spécial avait déjà souligné que cette sous-utilisation des aides du programme 794 correspondait à un faible nombre de demandes de subvention déposées par les AODÉ, celles-ci ayant des difficultés dans le montage des dossiers 180 ( * ) .

Si l'on peut souscrire convenir avec la Cour des comptes de la nécessité de mieux adapter les aides de ce programme aux collectivités concernées 181 ( * ) - Corse et outre-mer en particulier - votre rapporteur spécial s'interroge cependant sur le maintien des crédits du programme 794 au même niveau depuis la création du FACÉ .

Évolution de l'exécution du programme 794

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les rapports annuels de performance pour 2012, 2013, 2014, 2015 et 2016)

C'est dans cette logique qu' un amendement proposé par votre rapporteur spécial avait été adopté par la commission des finances , dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2017, afin de majorer les crédits du programme 793 de 4 millions d'euros tout en minorant ceux du programme 794 du même montant, sur la base du montant des crédits non consommés en 2015.

3. Une consommation à la hauteur des crédits disponibles des aides au renforcement, à l'extension et à la sécurisation des réseaux

Tel que cela apparaît dans le tableau ci-dessous, les actions du programme principal sont exécutées à des taux relativement variables, toutefois proches du montant initialement prévu en loi de finances.

Exécution du programme 793 par action en 2016

(en euros et en %)

Numéro et intitulé de l'action

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits votés

Crédits exécutés

Taux de consommation

Crédits votés

Crédits exécutés

Taux de consommation

3 Renforcement des réseaux

184 000 000

163 115 079

89 %

184 000 000

181 513 121

99 %

4 Extension des réseaux

46 700 000

43 735 082

94 %

46 700 000

34 575 913

74 %

5 Enfouissement et pose en façade

55 500 000

42 835 867

77 %

55 500 000

50 480 061

91 %

6 Sécurisation des fils nus (hors faible section)

39 000 000

50 248 144

129 %

39 000 000

39 054 113

100 %

7 Sécurisation des fils nus de faible section

42 000 000

53 628 049

128 %

42 000 000

41 117 486

98 %

8 Fonctionnement

1 400 000

326 539

23 %

1 400 000

191 359

14 %

9 Déclaration d'utilité publique (Très haute tension)

500 000

500 000

100 %

500 000

450 000

90 %

10 Intempéries

500 000

2 762 927

553 %

500 000

1 577 796

316 %

Total

369 600 000

357 151 687

97 %

369 600 000

348 959 849

94 %

Total des crédits ouverts

395 641 337

616 154 424

Source : commission des finances du Sénat (d'après le rapport annuel de performance pour 2016)

Le cas de l'exécution des crédits en AE des actions 6 « Sécurisation des fils nus (hors faible section) » et 7 « Sécurisation des fils nus de faible section » mérite d'être signalé, dans la mesure où ces crédits sont à nouveau surconsommés, tel qu'en 2015 .

Dès lors, l'abondement de 25 millions d'euros vers ces actions 6 et 7, mis en oeuvre à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2017, paraît cohérent au regard de ces surconsommations en 2015 et 2016.

Votre rapporteur spécial tient cependant à rappeler que cet abondement s'est réalisé au détriment des actions 4 « Extension des réseaux » et 5 « Enfouissement et pose en façade ». Or, les AE pour l'action 4 et les CP pour l'action 5, donc diminués pour l'année 2017, sont loin d'être sous-consommés. Un risque de surconsommation de ces deux actions pour l'exercice 2017 est donc à craindre. L'amendement de crédit précité visait justement à pallier ce risque en abondant l'action 4 de 3 millions d'euros et l'action 5 d'un million d'euros.

Des reports de crédits viendront sans doute utilement s'ajouter à ces enveloppes, mais il convient de rester vigilant sur ce point en vue de l'examen du prochain projet de loi finances pour 2018.

4. Une amélioration dans le suivi de la performance

Dans sa contribution au rapport sur la loi de règlement pour 2015, votre rapporteur spécial avait constaté une « évaluation imparfaite de la performance », due notamment à des méthodes de calcul discutables.

Ainsi, les indicateurs 1.2 « Nombre de départs mal alimentés » et 2.1 « Nombre de kilomètres de fil nu » sont toujours tributaires d'un calcul reposant sur un inventaire réalisé tous les deux ans. Il est donc impossible d'avoir des données actualisées pour 2017 sur le nombre de départs mal alimentés et sur le nombre de kilomètres de fil nu.

En revanche, un progrès a été réalisé dans le suivi de l'objectif n°1 du programme 793, « Renforcement des réseaux basse tension », et déjà mis en oeuvre dans le projet annuel de performance du CAS pour 2017. Le nouveau calcul de l'indicateur 1.1 présentant le coût moyen du kilomètre de fil posé aboutit à des données plus fidèles à la réalité et plus cohérentes : le coût moyen du kilomètre de câble souterrain apparaît désormais bien supérieur à celui du coût du kilomètre de fil aérien torsadé, alors que l'inverse était constaté jusqu'à présent.

De même, pour le suivi de l'objectif n°2 « Sécurisation des réseaux basse tension en fils nus », l'indicateur 2.2 présentant le coût moyen de kilomètres de fil nu pris en charge par les aides du CAS est assis sur ce nouveau mode de calcul. Pour autant qu'ils soient les bienvenus, ces deux changements altèrent la comparaison avec les années précédentes .

5. Une modification de la comptabilisation des engagements du FACÉ dans les comptes de l'État

Les aides du FACÉ figuraient autrefois dans le bilan de l'État en provisions pour charges. Or, le compte général de l'État de 2016 signale un retraitement dans la comptabilisation de ces aides et les fait apparaître en engagements hors bilan.

Cette correction trouve son fondement dans un constat formulé par la Cour des comptes à l'occasion de ses travaux sur la certification des comptes de l'État , mettant en exergue une anomalie dans la comptabilisation des aides du FACÉ dans les comptes de l'État de 2015.

Ces aides étaient assimilées de façon erronée à un versement exigible au titre des exercices ultérieurs , une qualification comptable qui justifiait leur inscription initiale en provisions pour charge.

Or, les engagements de l'État au titre du FACÉ sont effectués à partir de la réalisation de travaux ou de projet par les AODÉ, donnant lieu à une présentation et un contrôle des justificatifs du versement des aides. Dès lors, la nature de ces aides doit être considérée comme une obligation potentielle relative à des versements futurs . À ce titre, elles sont désormais inscrites en engagement hors bilan, au sein de la catégorie « engagements découlant de la mission de régulateur économique et social de l'État ».

Ce retraitement engendre :

- au passif du bilan de 2015 , une diminution de 592 millions d'euros sur les provisions pour charges ;

- au compte de résultat de 2015 , une diminution pour - 448 millions d'euros des dotations et une diminution pour - 386 millions d'euros des reprises de provisions pour transferts aux collectivités, soit une amélioration nette du résultat de 2015 de 62 millions d'euros ;

- au tableau des engagements hors bilans de 2016 , l'inscription de + 629 millions d'euros dans les engagements découlant de la mission de régulateur économique et social de l'État, la correction portant sur l'ensemble du stock d'engagements pris au 31 décembre 2015.

MISSION « GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES », MISSION « CRÉDITS NON RÉPARTIS » ET CAS « GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT » - MM. CLAUDE NOUGEIN ET THIERRY CARCENAC, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. MISSION « GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

Composée de cinq programmes, la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » est la principale mission budgétaire des ministères économiques et financiers .

Le programme 156 « Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local » et le programme 302 « Facilitation et sécurisation des échanges » correspondent aux deux grandes directions à réseau du périmètre ministériel , la direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI). Celles-ci rassemblent à elles seules 87,5 % des crédits de la mission et concentrent les grands enjeux de modernisation.

Les trois autres programmes correspondant à des politiques de pilotage ou de coordination à dimension interministérielle :

- le programme 218 « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières » porte les crédits de divers services à vocation transversale, voire interministérielle : cabinets des ministères économiques et financiers, secrétariat général, direction du budget (DB), direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), inspection générale des finances (IGF), Tracfin, agence du patrimoine immatériel de l'État (APIE), la direction des achats de l'État (DAE), autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL), l'agence pour l'informatique financière de l'État (AIFE), ou encore le centre interministériel de services informatiques relatifs aux ressources humaines (CISIRH) ;

- le programme 148 « Fonction publique » finance diverses mesures relatives à la fonction publique, notamment l'action sociale interministérielle (chèques-vacances, chèque emploi service universel, aides au logement etc.), et porte la subvention des cinq instituts régionaux d'administration (IRA) et à l'école nationale d'administration (ENA). Depuis 2016, il porte également des crédits consacrés à l'apprentissage dans la fonction publique ;

- le programme 309 « Entretien des bâtiments de l'État » , enfin, a vocation à retracer les dépenses d'entretien lourd des bâtiments appartenant à l'État et occupés par ses services. Supprimé à partir du 1 er janvier 2017 , il affiche pour sa dernière année d'existence diminution de 11 % de ses crédits par rapport à l'exécution 2015 et par rapport à la prévision initiale. De plus amples développements sont consacrés à cette question par vos rapporteurs spéciaux dans leur rapport sur le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

Exécution par programme des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines »

(en millions d'euros)

Programme

Exécution 2015

Crédits votés
LFI 2016

Exécution 2016

Exé 2016/
exé 2015

Exé 2016/
LFI 2016

[156] Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

AE

8 137,7

8 098,1

8 038,1

- 1,2 %

- 0,7 %

CP

8 149,6

8 012,7

7 996,0

- 1,9 %

- 0,2 %

[302] Facilitation et sécurisation des échanges

AE

1 571,8

1 588,5

1 603,1

2,0 %

0,9 %

CP

1 573,5

1 546,4

1 545,7

- 1,8 %

0,0 %

[218] Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

AE

987,6

1 028,8

1 097,1

11,1 %

6,6 %

CP

1 051,3

993,3

987,8

- 6,0 %

- 0,6 %

[148] Fonction publique

AE

202,5

231,5

190,4

- 6,0 %

- 17,7 %

CP

193,4

234,4

190,7

- 1,4 %

- 18,7 %

[309] Entretien des bâtiments de l'État

AE

133,5

134,0

125,7

- 5,9 %

- 6,2 %

CP

143,9

143,7

128,1

- 11,0 %

- 10,8 %

TOTAL MISSION

AE

11 033,1

11 080,8

11 054,5

0,2 %

- 0,2 %

CP

11 111,8

10 930,5

10 848,3

- 2,4 %

- 0,8 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Exécution par titre des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines »

(en millions d'euros)

Programme

Exécution 2015

LFI
2016

Exécution 2016

Exé 2016/
exé 2015

Exé 2016 /
LFI 2016

Titre 2 - Personnel

AE

8 703,3

8 627,4

8 577,3

- 1,4 %

- 0,6 %

CP

8 703,3

8 627,4

8 577,3

- 1,4 %

- 0,6 %

Titre 3 - Fonctionnement

AE

1 924,0

2 131,2

2 096,4

9,0 %

- 1,6 %

CP

1 976,5

1 967,1

1 905,0

- 3,6 %

- 3,2 %

Titre 5 - Investissement

AE

164,8

187,6

175,7

6,6 %

- 6,3 %

CP

187,4

201,4

161,1

- 14,1 %

- 20,0 %

Titre 6 - Intervention

AE

240,6

184,1

204,7

- 14,9 %

11,2 %

CP

244,3

184,0

204,6

- 16,3 %

11,1 %

Titre 7 - Opérations financières

AE

0,37

0,31

0,36

- 2,6 %

15,0 %

CP

0,37

0,31

0,36

- 2,7 %

15,0 %

TOTAL MISSION

AE

11 033,1

11 130,6

11 054,5

0,2 %

- 0,7 %

CP

11 111,8

10 980,2

10 848,3

- 2,4 %

- 1,2 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Une contribution importante et constante à la réduction des dépenses publiques, permise par un pilotage rigoureux

La mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » apporte, depuis plusieurs années, une contribution importante à l'effort de maîtrise de la dépense publique .

Cette contribution se vérifie cette année encore : les crédits exécutés en 2016 s'élèvent à 10,85 millions d'euros en CP, soit une baisse de 2,4 % (263,5 millions d'euros) par rapport à l'exercice 2015. La tendance est donc encore plus marquée qu'en 2015, où l'exécution était en baisse de 1,3 % (151,5 millions d'euros) par rapport à l'exercice précédent.

L'exécution est de surcroît conforme à la prévision initiale, signe d'un pilotage rigoureux et constant de la dépense . Les crédits exécutés sont ainsi inférieurs de 0,8 % aux crédits votés en loi de finances initiale.

Ce résultat doit beaucoup, comme les années précédentes, aux importantes annulations intervenues en cours de gestion, pour un total de quelque 162,2 millions d'euros , dont 149,1 millions d'euros par décret d'avance.

Sans qu'il faille en exagérer la portée, deux mesures de périmètre ont également contribué à minorer les dépenses de l'exercice 2016 :

- une mesure de périmètre minorant de 55 millions d'euros les crédits du programme 302 « Facilitation et sécurisation des échanges » en loi de finances initiale, traduisant la nouvelle architecture budgétaire du régime d'allocations viagères des débitants de tabacs (RAVGDT) : désormais, le programme 302 retrace exclusivement la part du financement de ce régime supportée par l'État lui-même 181 ( * ) . À ce sujet, vos rapporteurs spéciaux rappellent, comme cela avait été le cas à l'occasion du projet de loi de finances pour 2017, que ces aides n'ont que peu de rapport avec les missions de la DGDDI , et qu'elles auraient vocation à être rattachées à la mission « Économie » ;

- la création d'une nouvelle action 03 « Apprentissage » au sein du programme 148 « Fonction publique », dotée de 30 millions d'euros en loi de finances initiale, mais dont seuls 23 millions d'euros ont été effectivement consommés.

À l'inverse, des créations de postes viennent majorer les dépenses de titre 2 , et donc les dépenses de la mission, sans pour autant remettre en cause l'effort constaté.

2. Les dépenses de personnel : un effort d'autant plus significatif qu'il s'accompagne de créations de postes exceptionnelles

Le pilotage de la masse salariale constitue de loin le principal enjeu de la mission , compte tenu du poids des crédits de personnel, qui représentent 79,1 % du total des crédits exécutés. Cet enjeu tend d'ailleurs à se renforcer, compte tenu de la hausse tendancielle de la part des crédits de personnel dans les crédits de la mission puisque les marges de manoeuvre y sont, par nature, plus réduites que sur les autres titres.

Part des crédits de titre 2 dans la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines »

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Sur l'ensemble de la mission, les crédits de titre 2 affichent une baisse de 1,9 % (153,6 millions d'euros) en exécution : c'est la deuxième fois que l'exécution est inférieure à l'exécution constatée l'année précédente, et dans des proportions nettement plus importantes qu'en 2015 (- 0,2 % par rapport à 2014, soit 17,5 millions d'euros).

Les plafonds d'emplois de la mission sont également tenus - et même très largement, ce qui suggère qu'ils ne sont pas aussi contraignants que la programmation des crédits budgétaires, et qu'ils pourraient donc être adaptés en conséquence.

Plafond d'emplois de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines »

(en ETPT)

Exécution
2015

LFI+LFR
2016

Transferts en gestion

Exécution 2016

Écart exécution/prévision

P.156 - Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

107 202

107 294

1

105 121

- 2 174

P.302 - Facilitation et sécurisation des échanges

16 216

16 473

- 1

16 258

- 214

P.218 - Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

5 457

5 529

- 30

5 320

- 179

Total pour la mission

128 875

129 296

126 699

- 2 597

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Ces bons résultats sont d'autant plus significatifs qu'ils ont été réalisés dans le contexte de la revalorisation du point d'indice (+ 23,4 millions d'euros pour la mission), et surtout de la révision à la hausse du schéma d'emplois de la mission en cours de gestion , correspondant à :

- la création de 500 ETP supplémentaires pour la branche surveillance de la DGDDI , au titre du plan de lutte contre le terrorisme (PLAT), qui se traduit, compte tenu du schéma d'emplois initial (- 215 ETP), par un schéma d'emplois positif de + 285 ETP en exécution . Pour cette raison, le programme 302 est le seul de la mission à afficher des crédits de titre 2 en hausse (+ 1,1 %) par rapport à l'exécution 2015, le surcoût du PLAT représentant 18,5 millions d'euros ;

- l'allègement en cours de gestion de 80 ETP sur le schéma d'emploi de la DGFiP , par une décision ministérielle du 10 mai 2016, afin de tenir compte de la création de la direction de l'immobilier de l'État (DIE), du renforcement du service de traitement des déclarations fiscales rectificatives (STDR) et enfin de l'accueil d'agents des chambres régionales des comptes (CRC).

Schéma d'emplois de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines »

(en ETP)

Prévision
LFI 2016

Sorties

dont départs
en retraite

Entrées

Exécution
2016

Écart exé/LFI

P.156 - Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

- 2 130

5 690

1 352

3 640

- 2 050

80

P.302 - Facilitation et sécurisation des échanges

- 215

697

488

982

285

494

P.218 - Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

- 108

826

216

703

- 123

487

Total pour la mission

- 2 453

7 213

2 056

5 325

- 1 888

3 269

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

A contrario , plusieurs éléments ont contribué à la forte réduction des dépenses de personnel, et notamment :

- une meilleure évaluation des départs en retraite par la DGDDI , alors que les exercices précédents étaient systématiquement marqués par une sous-évaluation, ce qui constitue une amélioration notable du pilotage ;

- la suppression de deux cabinets ministériels (remaniements de février et août 2016), facteur exogène permettant la réduction de 123 ETP sur le programme 218 au lieu des 108 ETP prévus initialement.

3. Un effort à poursuivre sur le fonctionnement courant

En 2016, dépenses de fonctionnement affichent une diminution de 6 % en exécution par rapport à l'exécution 2015 - la hausse de 11,1 % constatée en AE étant liée aux dépenses immobilières de l'Insee et aux dépenses informatiques de la DGFiP évoquées ci-dessous.

Toutefois, cette diminution en CP tient pour beaucoup à la sous-exécution des crédits consacrés à l'action sociale interministérielle (restauration, vacances, garde d'enfants, logement, associations socio-culturelles etc.) sur le titre du programme 218 (132,7 millions d'euros en exécution en CP contre 156,6 millions d'euros en prévision) et sur le programme 148 (113,1 millions d'euros contre 123,9 millions d'euros en prévision). Le pilotage de ces dépenses est en réalité malaisé, dans la mesure où celles-ci sont pour la majorité gérées au niveau déconcentré et confiées à des associations .

Au-delà de cela, les efforts réalisés sur le fonctionnement courant, s'ils sont réels, notamment en matière de dépenses immobilières et de frais d'affranchissement, apparaissent encore insuffisants . Or, avec 83,9 % des crédits hors titre 2 de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », très concernée par les enjeux liés à la dématérialisation et à la révolution numérique.

4. Les modalités du déménagement de l'Insee à Montrouge : un exemple de pilotage à courte vue ?

En juillet 2016 182 ( * ) , l'Insee a bénéficié d'une ouverture de 80 millions d'euros en AE hors titre 2 , financés par des annulations sur le programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles », pour permettre la prise à bail (9 ans) avec option d'achat de l'immeuble White à Montrouge , destiné à reloger les services de la direction générale. Il s'agit là d'une opération nécessaire, compte tenu de la vétusté du site actuel de Malakoff. Le bail a été signé en juillet juste après la mise à disposition des crédits.

Toutefois, le décret d'avance de juillet 2017 vient ouvrir 164,8 millions d'euros en AE et en CP sur le programme 2018, afin, cette fois de financer l'achat - et non plus la location - de l'immeuble White .

Dans le rapport de motivation du décret d'avance, le Gouvernement explique que « L'État s'est d'ores-et-déjà juridiquement engagé à occuper ce nouvel immeuble, par la signature en juillet 2016 d'un bail avec option d'achat, l'option devant être levée avant le 30 septembre 2017. La loi de finances initiale pour 2017 ne prévoyait pas de crédits pour concrétiser cet achat, qui présente une option financièrement plus avantageuse pour l'État que la location, compte tenu du caractère pérenne de l'implantation de ces services dans ce bâtiment . L'option d'un crédit-bail immobilier, envisagée par le précédent gouvernement, a été écartée au motif du surcoût financier pour l'État, évalué à près de 20 millions d'euros d'intérêts cumulés. Compte tenu des conditions de levée de l'option d'achat, il est nécessaire pour l'État de signer l'acte de vente avant le 30 septembre 2017. En effet, au-delà de cette échéance et jusqu'au 31 décembre 2017, un paiement différé aura pour conséquence le versement de pénalités de retard et le paiement de loyers financiers au bailleur dès le milieu du mois d'octobre. Les franchises de loyer négociées au moment du bail expirent en effet au 30 septembre ».

Ces explications posent question quant à la sincérité des dépenses affichées en 2016 . Ainsi :

- soit les gestionnaires ont, en l'espace de quelques mois, changé d'avis quant à la pertinence de la location par rapport à l'achat , ce qui, compte tenu de l'importance de l'opération et des conséquences de long terme qu'elle emporte, est problématique ;

- soit l'arbitrage en faveur de l'achat était déjà envisagé - si ce n'est tranché - à l'époque , ce que suggère la présence de l'option d'achat dans le contrat initial, mais le choix a été fait de ne pas débloquer les crédits correspondants sur l'exercice 2016, puis de ne pas les prévoir en loi de finances initiale pour 2017, afin de ne pas dégrader à ce moment-là le solde du budget général .

Ce pilotage approximatif est d'autant plus regrettable que l'Insee a déjà rencontré d'importantes difficultés dans le cadre du déménagement d'une partie de ses services à Metz , l'objectif initial de 625 agents présents à la mi-2017 n'étant qu'à moitié tenu.

À cet égard, il convient de souligner que la quasi-totalité des crédits de l'Insee, dont l'opération de Metz, relèvent du programme 220 « Statistiques et études économiques » de la mission « Économie » . À cet égard, l'imputation sur l'action 05 « Prestations d'appui et de support » du programme 218 « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières » de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » ne semble pas justifiée, et vos rapporteurs spéciaux recommandent donc de rassembler l'ensemble des crédits de l'Insee au sein de la mission « Économie » .

5. Les chantiers informations : l'incertitude des dépenses liées au prélèvement à la source

Au cours de l'année 2016, la DGFiP a engagé une série de dépenses dans la perspective de la mise en oeuvre du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu au 1 er janvier 2018 . Ces dépenses se traduisent notamment sur les crédits d'investissement du programme 156, qui s'élèvent à 38,9 millions d'euros en AE, soit une exécution supérieure de 87 % à la loi de finances initiale. La sur-exécution est de 38,4 % en CP.

Concrètement, la DGFiP a bénéficié de libérations de la réserve de précaution à hauteur de 88,4 millions d'euros en AE et 74,1 millions d'euros en CP. Ces dégels ont notamment concerné le financement de projets informatiques. Le rapport annuel de performances ajoute aussi que « dans le domaine informatique, au 31 décembre 2016, le niveau des engagements non couverts par des paiements est supérieur d'environ 15 M€ au montant enregistre au titre de l'exercice précèdent et ce compte tenu notamment de l'engagement, en gestion, des premières dépenses relatives à la réforme du prélèvement à la source ». Des dépenses ont également été engagées en matière de fonctionnement, et des personnels ont été affectés à ce chantier .

Le report de la mise en oeuvre du prélèvement à la source, décidé en mai 2017, pourrait remettre en cause l'utilité de ces dépenses, dans une proportion toutefois difficile à évaluer à ce stade . Les explications fournies par le Gouvernement à l'occasion de la préparation du débat d'orientation des finances publiques (DOFP) suggèrent toutefois que certaines dépenses informatiques pourraient avoir été engagées en vain, si le prélèvement à la source venait à ne pas voir le jour : « les réformes fiscales qui seront mises en oeuvre au cours du quinquennat, devront être soigneusement préparées afin de sécuriser les contribuables. Pour cette raison, la mise en oeuvre du prélèvement à la source a été décalée d'un an, le temps d'examiner la robustesse technique et opérationnelle du dispositif et d'évaluer la réalité de la charge induite pour les collecteurs, en particulier les entreprises, au moyen d'un audit et d'une expérimentation 183 ( * ) ».

Le risque de dépenses « non récupérables » , c'est-à-dire effectuées à perte par l'administration fiscale en matière de conception de systèmes informatiques ne doit pas être ignoré, compte tenu des précédents fâcheux en la matière, à commencer par celui de l'Opérateur national de paye (ONP) , dont le volet « SI Paye » a été interrompu en mars 2014, après six années de développement en pure perte, évaluée à 286 millions d'euros sur la seule période comprise entre 2009 et 2013 184 ( * ) .

Les enjeux budgétaires liés à l'adaptation des systèmes informatiques au prélèvement à la source apparaissent toutefois de bien moindre ampleur . Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi de finances pour 2017, « l'essentiel de ces travaux reposera sur les équipes et équipements existants » , ce qu'avait confirmé Bruno Parent, directeur général des finances publiques, lors de son audition par la commission des finances du Sénat 185 ( * ) : « nos équipes informatiques sont assez puissantes : nous assumons une grande diversité de tâches, et notre métier consiste à traiter des informations. Ce sont essentiellement les fonctionnaires des services informatiques de la DGFiP qui feront face, même si nous solliciterons aussi une aide externe. Cela représentera peut-être quelques dizaines de millions d'euros ; ce n'est pas considérable . Mais l'essentiel du travail sera effectué par les fonctionnaires déjà à l'oeuvre sur les systèmes informatiques, pas seulement pour des raisons d'économie budgétaire, mais tout simplement parce qu'il est plus facile de modifier dans un délai contraint un système d'information si on le connaît déjà ».

La qualité et l'utilité des systèmes informatiques des ministères économiques et financiers se traduisent directement dans leur valeur au sein bilan de l'État. Au sein du compte général de l'État, les logiciels produits en interne sont évalués à 2 061 millions d'euros e n valeur brute au 31 décembre 2016 , en hausse de 150 millions d'euros sur un an. Il constituant le poste principal de la catégorie « Concessions et droits similaires, brevets, licences, marques, procédés, logiciels, droits et valeurs similaires », rattachée aux immobilisations incorporelles. Dans cet ensemble, les logiciels des ministères économiques et financiers occupent une place prépondérante : « le progiciel Chorus est le logiciel produit en interne par un ministère civil présentant la valeur brute la plus importante (238 millions d'euros en valeur brute) devant les logiciels SIRHEN (Éducation nationale), Adonis et Portails (Ministère de l'économie et des finances) ». S'y ajoutent 39 millions d'euros au titre de l'application RSP (refonte des outils de recouvrement), comptabilisée dans la catégorie « immobilisations incorporelles en cours ». On voir par-là que de nouveaux problèmes dans le développement de logiciels informatiques par la DGFiP pourraient avoir un impact non négligeable sur le bilan de l'État .

En tout état de cause, le report du prélèvement à la source devrait conduire à d'importants ajustements en cours de gestion en 2017 , dans la mesure où ce chantier, au-delà de son aspect informatique, emporte des conséquences sur le schéma d'emplois de la DGFiP , la programmation initiale étant construite sur une « moindre baisse » de 500 ETP pour préparer le prélèvement à la source, mais aussi sur le financement de la formation des agents et des campagnes de communication internes et externes .

6. La nécessité d'indicateurs de performance plus significatifs

Certains indicateurs de performance de la mission ne rendent pas suffisamment compte des enjeux qui sont les siens.

Ainsi par exemple de l'indicateur 1.1 du programme 156, par ailleurs retenu comme l'un des deux indicateurs les plus représentatifs de la mission. Celui-ci qui mesure le taux de déclaration et de recouvrement spontanés, c'est-à-dire le civisme fiscal, et est très stable depuis plusieurs années . En 2016, le taux de recouvrement spontané est une fois de plus supérieur à 98 % pour les particuliers comme pour les professionnels.

À l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2017, vos rapporteurs spéciaux Thierry Carcenac et Michel Bouvard avaient suggéré de remplacer cet indicateur de la mission par l'indicateur 1.2 du programme 156 , bien plus significatif des défis que doit relever l'administration fiscale. Celui-ci mesure en effet non pas le recouvrement spontané, mais recouvrement effectif des créances fiscales à N+2, qui reste bien moins élevé, quoiqu'en progression notable : 60 % en 2016 , pour une cible de 63 %, et une réalisation de 59 % en 2015. Cela tient non seulement aux faillites et procédures contentieuses, mais aussi aux difficultés à recouvrer les sommes redressées dès lors que le contribuable - du particulier à l'entreprise multinationale - est établi à l'étranger , et que l'assistance administrative internationale, avec ses lenteurs et ses dysfonctionnements, doit être activée.

Sur le même sujet du contrôle et de la collecte de l'impôt, la Cour des comptes recommande, dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire, d' unifier les indicateurs de performance de la DGFiP et de la DGDDI afin de rendre compte de l'activité fiscale commune à ces deux administrations . Vos rapporteurs spéciaux souscrivent pleinement à cette recommandation, qui semble devoir être satisfaite par la nouvelle maquette du projet de loi de finances pour 2018 186 ( * ) , laquelle prévoit, au niveau de la mission, un nouvel indicateur synthétique MGA.1.1 « Coût de collecte des recettes douanières et fiscales » , associé au nouvel objectif « Améliorer l'efficience des réseaux du recouvrement fiscal ».

II. MISSION « CRÉDITS NON RÉPARTIS »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

1. Une programmation pluriannuelle respectée

La loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 a défini le plafond de crédits de paiements (CP) de la présente mission, hors réserve parlementaire, à 0,02 milliard d'euros . En 2016, les crédits exécutés - qui s'élèvent à 11,1 millions d'euros - sont inférieurs à l'enveloppe pluriannuelle .

2. Une mission qui a fait l'objet d'annulations importantes à hauteur de 244 millions d'euros en AE et 11 millions d'euros en CP

Ces annulations concernent les deux dotations du programme , la dotation 551 « Provision relative aux rémunérations publiques » faisant l'objet d'une ouverture de crédits en 2016, une première depuis 2009.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Prog.

LFI 2016

Décrets d'avance et LFR 187 ( * )

Crédits répartis en exécution

551 - Provision relative aux rémunérations publiques

AE

11,4

- 8,7

3,1

CP

11,4

- 8,7

3,1

552 - Dépenses accidentelles et imprévisibles

AE

324

- 236

88

CP

24

- 16

8

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données transmises par le ministère du budget et la note d'analyse sur l'exécution budgétaire de la Cour des comptes) - Montants « hors réserve parlementaire »

11,4 millions d'euros de crédits de paiement ont ainsi été inscrits, en loi de finances initiale, pour la dotation 551 , au titre de l'accompagnement indemnitaire de la réforme territoriale prévu par le décret n° 2015-1120 du 4 septembre 2015 relatif aux mesures d'accompagnement indemnitaire des réorganisations de service liées à la nouvelle organisation territoriale de l'État.

Ces crédits ont ainsi été répartis en gestion , à hauteur de 3,1 millions d'euros , par arrêtés des 21 et 25 novembre 2016, entre 11 programmes concernés par cette réforme, au profit des agents dont le poste fut supprimé ou déplacé. Les crédits non consommés - qui se sont élevés à 8,3 millions d'euros - ont ainsi été annulés par le décret n° 2016-1652 du 2 décembre 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance. L'estimation réalisée des effectifs concernés par une mobilité géographique dans le cadre de la réforme avait, en effet, été surévaluée , comme précisé infra.

S'agissant du programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles », on observe une annulation de 236 millions d'euros en autorisation d'engagement 188 ( * ) . Il s'agit de la provision - récurrente, depuis 2012, date à laquelle les prises à bail sont gérées dans cette mission - permettant de faire face à des besoins d'engagements imprévisibles, tels que d'éventuelles prises à bail privées des administrations centrales et déconcentrées dans le cadre de décisions urgentes de relocalisation. Cette annulation est justifiée par des perspectives d'utilisation des autorisations d'engagement, inférieures au niveau prévu en loi de finances initiale.

Les crédits consommés l'ont été au profit :

- du programme 218 « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières », rattaché à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » , à hauteur de 80 millions d'euros 189 ( * ) , pour la signature d'un nouveau bail à Montrouge afin de reloger les services de la direction générale de l'INSEE ;

- la sous-action « Fonds spéciaux », issue du programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » à hauteur de 8 millions d'euros 190 ( * ) .

3. Une exécution plus satisfaisante qu'en 2015 mais néanmoins caractérisée par une sous-consommation récurrente des crédits

Exécution des crédits de la mission « Crédits non répartis » en 2016

(en millions d'euros et en %)

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés

2016

EXÉCUTION 2016 / EXÉC. 2015

(EN %)

EXÉCUTION 2016 / LFI 2016

(EN %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

551 - Provision relative aux rémunérations publiques

0

0

11,4

11,4

3,1

3,1

-

-

- 73 %

- 73 %

552 - Dépenses accidentelles et imprévisibles

12,2

12,2

324

24

88

8

+ 62 %

- 0,3 %

- 73 %

- 66 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données transmises par le ministère du budget et la note d'analyse sur l'exécution budgétaire de la Cour des comptes) - Montants « hors réserve parlementaire »

S'agissant de l'évolution des crédits exécutés entre 2015 et 2016 , on peut noter, d'abord, la budgétisation de la dotation 551 « Provision relative aux rémunérations publiques », en 2016, et donc l'exécution de ses crédits à hauteur de 3,1 millions d'euros , alors qu'aucun crédit n'avait été prévu en 2015.

Concernant la dotation 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles » , le taux de consommation des autorisations d'engagement a été significativement amélioré en 2016 (+ 63 % par rapport à 2015). Toutefois, le niveau d'autorisations d'engagement reste largement sous-consommé - 73 % des crédits ouverts en loi de finances initiale ont été annulés -, un constat récurrent depuis 2012.

Il en est de même, cette année, pour les crédits de paiement de la dotation 552 et pour les crédits - en autorisation d'engagement et crédits de paiement - de la dotation 551 qui ont été annulés à hauteur de 73 %. En effet, comme indiqué supra , l'estimation des effectifs concernés par une mobilité géographique - à sur laquelle reposait la budgétisation - avait été surévaluée . L'évaluation - basée sur les organigrammes publiés en août 2015 par les ministères concernés et les barèmes de prime d'accompagnement de la réorganisation régionale de l'État - avait conclu à une mobilité de 800 agents. Or, dans les faits, la montée en puissance des réorganisations territoriales s'est faite plus lentement , et environ seulement 400 agents ont été concernés.

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEUR SPÉCIAUX

1. Une exécution encore marquée par une « sur-dotation »191 ( * ) en autorisations d'engagement qui rend nécessaire une budgétisation plus sincère en loi de finances initiale

Le taux de consommation des crédits de la dotation 552 pour 2016 est encore très faible : près de 73 % des autorisations d'engagement ont été annulés.

Ainsi, depuis 2012 , le montant d'autorisations d'engagement réellement consommé n'a jamais dépassé 150 millions d'euros, soit la moitié du montant prévu chaque année .

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données transmises par le ministère du budget et la note d'analyse sur l'exécution budgétaire de la Cour des comptes) - Montants « hors réserve parlementaire »

Au vu du caractère exceptionnel des opérations de prise à bail, pour lesquelles cette provision est réalisée, et de la sous-consommation récurrente des AE, vos rapporteurs spéciaux réitèrent leur recommandation de réduire en loi de finances initiale le montant d'autorisations d'engagement qui permettrait une budgétisation plus sincère de la mission.

Par ailleurs, dans un souci de lisibilité et un objectif de meilleure planification des opérations immobilières de l'État, vos rapporteurs spéciaux continuent de s'interroger sur la possibilité d'inscrire ces engagements de dépenses, qui font nécessairement l'objet de projections financières au regard de leurs montants, sur les différents budgets ministériels ou, le cas échéant, sur le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». Vos rapporteurs spéciaux considèrent, en effet, que ce type de provisions aura vocation à disparaitre , à échéance, compte tenu de l'évolution de la politique immobilière de l'État.

2. Le recours aux crédits de la mission au titre des « fonds spéciaux » a été réduit, répondant ainsi à une recommandation de vos rapporteurs spéciaux

Cette diminution du recours aux crédits de la mission au profit des fonds spéciaux répond ainsi à une recommandation de vos rapporteurs spéciaux formulée dans le projet de loi de règlement pour 2015.

Les crédits de paiement du programme 552 ont ainsi été ouverts, en 2016, sur la sous-action « Fonds spéciaux » du programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » , à hauteur de 8 millions d'euros (contre 12 millions d'euros en 2015), soit le montant le plus faible depuis 2011 .

Par ailleurs, comme vos rapporteurs spéciaux l'avaient souligné, dans le projet de loi de finances pour 2017, l'augmentation des crédits prévus , au titre des fonds spéciaux, de près de 20 millions par rapport à 2016, devrait contribuer à réduire, encore, le recours à la présente mission.

III. COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE EN 2016

Le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » est le principal instrument de la politique immobilière de l'État . Il vise à financer la modernisation du parc immobilier par le produit des cessions d'actifs, tout en contribuant au désendettement de l'État .

Les recettes du CAS sont constituées par le produit des cessions d'actifs immobiliers de l'État, ainsi que, de manière accessoire, par des fonds de concours et des virements du budget général.

Les dépenses du CAS sont réparties en deux programmes :

- le programme 721 , qui retrace la contribution au désendettement de l'État, selon un taux de rétrocession fixé à 30 % à partir de l'année 2014 192 ( * ) , qui connaît toutefois de nombreuses dérogations ;

- le programme 723 , qui retrace les dépenses d'investissement et de fonctionnement contribuant à la restructuration du parc immobilier de l'État.

Il s'agit du dernier exercice sous cette architecture budgétaire . La loi du 30 décembre 2016 de finances pour 2017 en a modifié la structure : la contribution générale au désendettement de l'État est supprimée et les dépenses de l'ex-programme 309 « Entretien des bâtiments de l'État » sont intégrées au CAS.

Alors qu'il était initialement prévu un CAS à l'équilibre 193 ( * ) , l'exécution enregistre un excédent du CAS s'élevant à près de 77 millions d'euros , soit plus de 13 % des crédits de paiements prévus.

Ce résultat s'explique à la fois par des recettes plus importantes que prévues et par une sous-exécution du programme 723 « Contribution aux dépenses immobilières ».

Équilibre du compte en 2016

(en millions d'euros)

Programme

Recettes

AE

CP

Solde

P. 721 Contribution au désendettement de l'État

Prévision LFI

155,0

155,0

Exécution

180,9

180,9

P. 723 Contribution aux dépenses immobilières

Prévision LFI

433,8

420,0

Exécution

242,0

316,0

TOTAL

Prévision LFI

502,0

588,8

575,0

- 73,0

Exécution

573,7

422,9

496,9

76,9

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Cet écart de résultat entre la prévision et l'exécution est récurrent et reflète la complexité du pilotage du CAS, principalement dépendant des produits de cession enregistrés (cf. graphique infra ).

Évolution du solde entre la prévision et l'exécution

(en millions d'euros)

Source : rapports annuels de performances successifs

L'exécution du CAS traduit deux dynamiques contraires des deux programmes qui le composent :

- la contribution au désendettement de l'État, retracée par le programme 721, est très légèrement supérieure ;

- les dépenses immobilières , retracées par le programme 723, sont inférieures de 25 % aux crédits prévus .

Exécution des crédits du compte par programme en 2016

(en millions d'euros)

Programme

Crédits exécutés en 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits ouverts 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exécution 2015
(en %)

Exécution 2016 /
LFI 2016
(en %)

P. 721 Contribution au désendettement de l'État

AE

86,2

155,0

182,6

180,9

+ 109,9 %

+ 16,7 %

CP

86,2

155,0

182,6

180,9

+ 109,9 %

+ 16,7 %

P. 723 Contribution aux dépenses immobilières

AE

409,3

433,8

705,1

242,0

- 40,9 %

- 44,2 %

CP

411,4

420,0

976,9

316,0

- 23,2 %

- 24,8 %

TOTAL

AE

495,5

588,8

887,7

422,9

- 14,7 %

- 28,2 %

CP

497,7

575,0

1 159,5

496,9

- 0,2 %

- 13,6 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La loi du 29 décembre 2016 de finances rectificative a procédé à deux ajustements de crédits en sens contraire :

- l'ouverture de 10 millions d'euros de crédits sur le programme 721 ;

- l'annulation de 85 millions d'euros de crédits sur le programme 723.

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Un taux de contribution au désendettement de l'État respecté pour la première fois

La contribution au désendettement de l'État est multipliée par deux entre 2015 et 2016 . Ce résultat s'explique principalement par le versement exceptionnel du ministère des affaires étrangères de 100 millions d'euros, dont le principe résulte de la loi de finances pour 2015.

Pour la première fois, le taux de contribution au désendettement de l'État, fixé à 30 %, est respecté.

Contribution au désendettement de l'État

(en millions d'euros)

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Prévisions

139,0

75,0

90,0

60,0

30,0

60,0

65,0

82,5

80,0

108,0

155

Réalisations

68,4

175,1

51,2

32,2

44,9

56,5

61,4

76,1

76,6

86,2

180,9

Taux de contribution

8,6 %

21,3 %

13 %

6,8 %

8,9 %

9,4 %

11,9 %

19,5 %

15,1 %

13,9 %

31,5 %

Source : Cour des comptes et projets annuels de performances et rapports annuels de performances successifs.
Les réalisations portent sur les montants effectivement encaissés à la fin de l'exercice

Ce résultat est toutefois paradoxal à deux égards :

- d'une part, compte tenu de la suppression du caractère obligatoire de cette contribution à compter de 2017. Cette suppression prend acte du décalage entre l'aspect essentiellement symbolique, compte tenu de son montant, et ses conséquences pour les dépenses immobilières financées par le CAS ;

- d'autre part, en raison du choix concomitant d'assurer un suivi renforcé de la dépense sur le CAS. Alors que le CAS a pour objectif de financer la modernisation du parc immobilier de l'État, il est doublement mis à contribution au titre de la maîtrise des dépenses publiques .

2. Le choix dangereux d'atrophier les dépenses immobilières

La sous-exécution des crédits du programme 723 « Contribution aux dépenses immobilières » s'élève à 25 % en crédits de paiement. Elle atteint 44 % en autorisations d'engagement.

Cette situation résulte d'une priorisation des dépenses et d'un retardement des opérations immobilières des principaux ministères, principalement le ministère de la défense et le ministère des affaires étrangères.

De fait, le montant des autorisations d'engagement est réduit de 40 % par rapport à 2015.

De surcroît, la composition de la dépense immobilière s'est modifiée entre les deux exercices. La part des dépenses de fonctionnement atteint 29 % des crédits du programme, contre 17,5 % en 2015. Parallèlement, la part des dépenses d'investissement est passée de 76,5 % en 2015 à 67 % en 2016.

Le choix de réduire les montants engagés pour des opérations structurantes reflète un opportunisme budgétaire. Il s'agit d'une solution de facilité préjudiciable à moyen terme.

3. La contribution au désendettement de l'État conjuguée au pilotage des dépenses remettent en question la capacité du compte d'affectation spéciale de financer les dépenses immobilières

Le CAS s'inscrit dans un double objectif :

- moderniser le parc immobilier de l'État grâce au produit des cessions d'actifs, en incarnant la centralisation de la politique immobilière de l'État ;

- prendre symboliquement en compte la diminution du patrimoine de l'État qui résulte des cessions en appliquant une contribution au désendettement de l'État.

L'exécution 2016 remet en cause cet équilibre . Le pilotage des dépenses immobilières financées par le CAS conduit à utiliser prioritairement les recettes tirées des produits de cession à des fins budgétaires , ce que l'excédent constaté en fin d'exécution illustre.

Elle confirme la nécessité d'une réforme de la politique immobilière de l'État et de ses vecteurs budgétaires pour laquelle la commission des finances a présenté ses propositions 194 ( * ) .

MISSION « IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION » - M. ROGER KAROUTCHI, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La mission « Immigration, asile et intégration » n'a pas vu, en 2016, son architecture connaître de modification. Elle reste ainsi composée de deux programmes :

- le programme 303 « Immigration et asile » , qui regroupe essentiellement les dépenses liées à la garantie du droit d'asile et à la lutte contre l'immigration irrégulière. Il s'agit principalement de dépenses contraintes dont la dynamique est, du fait du niveau historiquement élevé de la demande d'asile, plutôt à la hausse ;

- le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » , qui rassemble les crédits en faveur de l'intégration des étrangers en situation régulière, à travers la subvention de l'État à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ou les dotations aux associations. Il représente 87 millions d'euros de crédits consommés en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) en 2016.

Exécution des crédits de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros)

Programme

Crédits exécutés 2015

LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exécution 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

303

AE

610,8

744,8

920,8

50,75 %

23,63 %

CP

617,9

744,2

912,9

47,74 %

22,67 %

104

AE

59,6

117,7

87,4

46,72 %

- 25,70 %

CP

59,6

117,5

87,5

46,77 %

- 25,56 %

Mission

AE

670,4

862,5

1 008,2

50,39 %

16,89 %

CP

677,5

861,7

1 000,4

47,66 %

16,09 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Comme lors des années précédentes, l'exercice 2016 est caractérisé par une sur-exécution du programme 303, de 23,63 % en AE et 22,67 % en CP. Ce dépassement s'explique notamment par la sous-budgétisation chronique des dépenses relatives à l'allocation pour les demandeurs d'asile.

La sous-exécution du programme 104 s'explique essentiellement par des annulations de crédits lors de mesures de régulation au cours de la gestion 2016.

Évolution du taux d'exécution des crédits des programmes de la mission « Immigration, asile et intégration »

(en crédits de paiement)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Programmation pluriannuelle de la mission

(en millions d'euros)

2015

2016

Budget triennal 2015-2017

650

665

Loi de finances initiale

652

658

Exécution

677

968

Écart exécution / LPFP

+ 25

+ 310

Note de lecture : les crédits considérés sont des crédits de paiement, hors fonds de concours et hors contribution du budget général au compte d'affectation spéciale « Pensions ».

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et la Cour des comptes

Le principal mouvement observé sur l'exercice est une ouverture de crédits par décret d'avance de 158 millions d'euros en AE/CP en date du 2 juin 2016 visant à couvrir les besoins de l'allocation pour demandeurs d'asile (ADA), fortement sous-budgétisées en loi de finances initiale (cf. infra ).

De même, la mise en réserve initiale a été complètement levée en septembre 2016 pour un montant de 53,91 millions d'euros en AE et 53,86 millions d'euros en CP afin de permettre le paiement de l'allocation pour demandeurs d'asile.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

P

LFI

FDC/ADP

Reports entrants hors FDC

Reports entrants sur FDC

Transferts et virements

Décrets d'avance

LFR 2016

Reports sortants (yc FDC et crédits non consommés)

FDC/ADP exécutés

Exécution 2016

103

708,66

35,54

6,61

4,28

0,50

158,00

30,00

- 25,55

30,40

912,90

104

95,46

22,07

0,17

1,53

0,00

- 21,51

- 5,00

- 6,26

23,14

87,53

Total

804,12

57,62

6,78

5,81

0,50

136,49

25,00

- 31,81

53,54

1 000,43

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère du budget

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Un renforcement des moyens de l'OFPRA face à l'augmentation continue de la demande d'asile

L'année 2016 a connu une diminution des flux migratoires comparativement à 2015. L'agence Frontex estime ainsi à 511 371 environ le nombre d'entrées illégales sur le territoire de l'Union européenne en 2016, contre 1 822 177 en 2014 195 ( * ) .

Bien que n'étant pas confrontée à un phénomène aussi massif que certains de ses voisins, la France connaît toutefois, cette année encore, un nombre record de demandes d'asile, avec 85 726 demandes déposées en 2016 contre 80 075 en 2015 (dont mineurs et réexamens), soit une augmentation de 7,1 % par rapport à l'année précédente. Cette augmentation est principalement due à des mouvements secondaires des personnes placées sous procédure Dublin III, qui concernent les demandeurs ayant déjà sollicité l'asile dans un autre pays de l'Union européenne, particulièrement importants en 2016.

Demandes d'asile enregistrées à l'OFPRA

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Nombre de demandes d'asile

42 599

47 686

52 762

57 337

61 468

66 251

64 811

80 075

85 726

Variation

19,9 %

11,9 %

10,6 %

8,7 %

7,2 %

7,8 %

-2,2 %

22 %

7,1 %

Source : rapport d'activité 2016 de l'OFPRA

En conséquence, le délai moyen de traitement d'un dossier s'élève à 183 jours à la fin de 2016, contre un objectif de réduction initialement fixé à 140 jours.

Délai de l'examen d'une demande d'asile par l'OFPRA

(en nombre de jours)

* : prévision.

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Crédits de l'action « Garantie de l'exercice du droit d'asile » du programme 303

(en millions d'euros)

Le stock des dossiers de plus d'un an représentait 8,8 % du stock au 31 décembre 2016, après avoir connu un pic de 24,5 % en février 2015 témoignant de l'amélioration du délai d'examen de la demande d'asile. L'objectif de réduire le délai moyen d'examen des dossiers à 90 jours à la fin 2017 a été maintenu dans le cadre du nouveau contrat d'objectifs et de performance (COP) 2016-2018.

Pour l'OFPRA, l'exécution 2016 s'élève à 56,18 millions d'euros en AE et en CP, soit 2,55 millions d'euros de plus que ce qui était prévu en loi de finances initiale. L'établissement a exécuté ce plafond d'emploi à hauteur de 620 ETPT, soit + 102 ETPT par rapport au 31 décembre 2015.

Subvention et ETPT de l'OFPRA depuis 2012

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

PLF 2016

2016

Montant de la subvention

38,9

37,1

39,3

46,9

53,6

56,18

ETPT

455

458

462

518

632

620

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Si ces efforts doivent être relevés, le niveau global des dépenses de la présente mission est conditionné par la rapidité de gestion des dossiers. Le renforcement des moyens de l'OFPRA et l'amélioration de son efficience en vue de réduire les délais de traitement doit donc être poursuivi dans les années à venir.

2. Des dispositifs d'hébergement sous tension

L'hébergement des demandeurs d'asile repose sur deux principaux dispositifs : les centres d'accueil des demandeurs d'asile (Cada) et l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile (HUDA) .

Dépenses d'hébergement des demandeurs d'asile

(en millions d'euros)

Hébergement d'urgence

Centre d'accueil de demandeurs d'asile

Année

LFI

Exécution

Taux d'exécution

LFI

Exécution

Taux d'exécution

2009

30

72,8

242,7%

195,6

195,7

100 %

2010

30

110,2

367,3%

202,6

202,3

99,8%

2011

40

134,3

335,7%

199

198,5

99,7%

2012

90,9

135,3

148,8%

194

194,4

100,2%

2013

125

149,9

119,9%

198,8

197,4

99,3%

2014

115,4

141,8

122,9%

213,8

213,6

99,9%

2015

136

139

102,2%

220,7

222,7

100,9%

2016

111,5

139,2

124,8%

265

237,7

89,7%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Le dispositif d'accueil relevant de l'asile comptait, fin 2016, 53 635 places (+ 4 106 par rapport à fin 2015) dont 36 785 en Cada et 10 836 en HUDA (- 8 032 par rapport à fin 2015).

La sous-exécution sur la ligne Cada masque toutefois une situation de saturation des dispositifs d'hébergement des dispositifs d'hébergement des demandeurs d'asile. L'écart entre la loi de finances initiale et l'exécution résulte de l'allongement des délais d'ouverture des places en 2016 par rapport aux prévisions initiales. Compte tenu du volume sans précédent des places autorisées en 2016 (8 703 places) par rapport aux années précédentes, les opérateurs locaux ont mené des efforts importants pour parvenir à ouvrir l'ensemble de ces places, dans des délais qui demeurent toutefois trop longs.

Par ailleurs, la situation des camps de Calais et de Grande Synthe a imposé de mettre en place un dispositif de réorientation des demandeurs d'asile installés sur place vers des structures d'hébergement stables (Cada) mais également vers des « centres d'accueil et d'orientation » (CAO), financé par le programme 177. Il est à cet égard bienvenu qu'à partir du 1 er janvier 2017, ces places soient financées par le programme 303 « Immigration et asile » de mission « Immigration, asile et intégration », ce qui devrait contribuer à améliorer le pilotage statistique du dispositif d'hébergement des demandeurs d'asile.

Les efforts entrepris pour ouvrir les places en Cada ainsi que l'utilisation de places de CAO ont permis de diminuer le nombre de demandeurs hébergés dans le dispositif d'hébergement d'urgence, HUDA (- 8 000 places par rapport à 2015). Les dépenses liées à l'hébergement d'urgence étaient toutefois encore sous-budgétées, l'impact de l'augmentation du nombre des demandeurs d'asile, notamment ceux placés sous la procédure de Dublin ayant été sous-estimé, comme votre rapporteur spécial l'avait estimé dans son rapport budgétaire sur la loi de finances pour 2016 , relevant que « compte tenu de la situation de la demande d'asile en France et du programme de relocalisation européen, [la programmation] n'est pas réaliste et devra probablement faire l'objet d'un abondement de l'ordre de 30 millions à 40 millions d'euros en cours d'année . »

3. Des dépenses liées à l'ADA plus de deux fois supérieures à la dotation initiale mettant en cause la sincérité de la programmation budgétaire

L'allocation temporaire d'attente (ATA) servie aux demandeurs d'asile non hébergés en Cada a été remplacée, au 1 er novembre 2015, par l'allocation aux demandeurs d'asile (ADA), servie à l'ensemble des demandeurs d'asile, quel que soit leur mode d'hébergement et dont la gestion a été confiée à l'Ofii.

Dépenses de prise en charge financière des demandeurs d'asile

(en millions d'euros)

ATA

ADA

LFI

Exécution

LFI

Exécution

30

68,4

-

-

53

105

-

-

54

157,8

-

-

89,7

149,8

-

-

140

149,2

-

-

129,8

169,5

-

-

93,3

81

-

-

0

30

148,8

316,1

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les crédits exécutés en 2016 au titre de l'ADA s'élèvent à 316,1 millions d'euros, alors que la dotation pour cette allocation s'était établie, en loi de finances initiale, à 148,8 millions d'euros .

Ainsi, s'il convient de reconnaître que la prévision de dépense 2016 s'était inscrite en rupture avec celle de 2015, en consacrant une hausse des crédits nécessaire à la prise en charge financière des demandeurs d'asile, la programmation est demeurée fortement inférieure aux besoins réels.

Tout en reconnaissant la difficulté attachée à la prévision budgétaire d'une allocation dont le champ et le montant ont été redéfinis, votre rapporteur spécial avait considéré dans son rapport budgétaire sur la loi de finances pour 2016 que cette dotation serait insuffisante en gestion .

Il est regrettable que la mise en oeuvre de la réforme de l'asile ne se soit pas accompagnée d'un effort de sincérité budgétaire qui permette, enfin, de mettre un terme à ce que l'opinion publique perçoit, depuis plusieurs années, comme une volonté politique de masquer la réalité du coût des dépenses liées aux demandeurs d'asile .

4. Une dette de 166,9 millions d'euros à Pôle emploi à apurer

À la sur-exécution importante de l'ADA s'ajoute une dette persistante de l'État envers Pôle Emploi, au titre du versement de l'ATA. Cette dette, qui s'élevait à 182,1 millions d'euros fin 2015, n'a toujours pas été apurée. Au 31 décembre 2016, la dette restant due à Pôle Emploi au titre de l'ATA s'élevait à 166,9 millions d'euros, 30 millions d'euros ayant été ouverts dans le cadre de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2016, qui ont permis un remboursement très partiel.

Au total, cette année encore, l'insincérité des crédits programmés s'accompagne de correction des sous-budgétisations en fin d'année . L'apurement réalisé en loi de finances rectificative n'a concerné que 16 % de la dette à Pôle emploi.

5. Une légère hausse des ressources affectées à l'Ofii toujours insuffisantes pour lui permettre de remplir ses nouvelles missions

Subventions pour charge de service public et charges affectées à l'Ofii

(en millions d'euros)

Exécution 2012

Exécution 2013

Exécution 2014

Exécution 2015

LFI 2016

Exécution 2016

SCSP de l'OFII

10,4

7,77

0

4,4

18,1

17,6

Taxes affectées de l'OFII

148,5

144,5

143,3

145,9

140,7

149,7

Total

158,9

152,2

143,3

150,3

158,8

167,3

Source : commission des finances du Sénat (d'après la Cour des comptes)

L'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) est principalement financé par deux canaux : le produit de taxes affectées (plafonné à 140,68 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2016) et une subvention de l'État pour charges de service public , dont l'essentiel est porté par le programme 104 mais dont une partie provient du programme 303 au titre de la gestion de l'ADA et du programme 301 « Développement solidaire et migrations ».

La subvention de l'État pour charges de service public s'est élevée à 17,6 millions d'euros, contre 18,1 millions d'euros prévus en loi de finances initiale.

L'attribution des nouvelles missions à l'Ofii dans le domaine de l'asile par la loi du 29 juillet 2015 donné lieu à une hausse de son plafond d'emplois à 936 ETPT en loi de finances initiale pour 2016 (+ 135 ETPT par rapport à la loi de finances initiale pour 2015). Une hausse des effectifs a eu lieu en gestion 2016 ; l'Ofii a ainsi bénéficié d'un schéma d'emplois de + 68 ETP pour faire face à la crise migratoire (soit 34 ETPT).

Si ces recrutements et cette modeste augmentation des financements au titre du plan « migrants » et des nouvelles missions de l'opérateur dans le domaine de l'asile étaient nécessaires, le renforcement de l'accueil et de l'accompagnement des primo-arrivants, à la suite de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers, ne connait aucune traduction sur le plan budgétaire.

Ainsi, les crédits consommés au titre de l'action 12 « Actions d'accompagnement des étrangers en situation régulière » du programme 104 ne s'élèvent qu'à 18,2 millions d'euros, contre 45,7 prévus en loi de finances initiale, qui inclut notamment les crédits destinés à financer la formation linguistique et civique. Cette sous-exécution, liée à des annulations de crédits du fonds de concours « Fonds européen d'intégration » traduit l'absence de volonté de mettre en oeuvre une intégration réussie des étrangers primo-arrivants et des réfugiés dans le cadre d'un nouveau parcours d'intégration pourtant présenté comme plus exigeant .

MISSION « JUSTICE » - M. ANTOINE LEFÈVRE, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La loi de finances pour 2016 prévoyait 8,04 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) et 7,76 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) pour la mission « Justice ». Le taux d'exécution s'élève à 98,2 % des crédits de paiement et 90,6 % des autorisations d'engagement prévus par la loi de finances initiale - contre respectivement 99,3 % et 89,9 % en 2015.

À l'échelle de la mission, l'exécution demeure donc conforme à la prévision.

Par rapport à 2015, les moyens consacrés à la justice ont augmenté de 2,5 % en crédits de paiement, soit près de 200 millions d'euros, notamment en raison du second plan de lutte antiterroriste (PLAT 2), proposé par le Gouvernement au cours de la discussion budgétaire à la suite des attentats du 13 novembre 2015. Les autorisations d'engagement ont diminué de 6,2 % par rapport à l'année précédente en raison de l'engagement d'un programme immobilier pénitentiaire exceptionnel en 2015.

Exécution et évolution de la mission « Justice » en 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

Les crédits disponibles s'élèvent à 8,168 milliards d'euros en crédits de paiement et 9,003 milliards d'euros en autorisations d'engagement ; par rapport aux crédits disponibles, le taux d'exécution est respectivement de 98,5 % et 86,2 %.

À l'échelle de la mission, les crédits disponibles sont supérieurs aux crédits ouverts par la loi de finances initiale. C'est le cas en particulier du programme 107 « Administration pénitentiaire », qui a enregistré un report de crédits de plus de 300 millions d'euros en mars 2016. Les importants projets immobiliers en cours, qu'il s'agisse de tribunaux ou surtout d'établissements pénitentiaires, expliquent ces reports de crédits qui correspondent à des opérations immobilières pluriannuelles.

Exécution de la mission « Justice » par rapport aux crédits ouverts

(en millions d'euros)

Crédits votés LFI

Crédits ouverts y. c. FDC et ADP

Exécution 2015

Écart entre les crédits ouverts et la prévision LFI

Exécution par rapport aux crédits ouverts

Accès au droit et à la justice

AE

365,9

340,8

338,8

- 25,1

99,4 %

CP

366,6

339,0

339,0

- 27,6

100,0 %

Administration pénitentiaire

AE

3 727,3

3 887,4

3 041,8

160,1

78,2 %

CP

3 463,7

3 414,8

3 340,9

- 48,9

97,8 %

Conduite et pilotage de la politique de la justice

AE

412,1

453,5

345,2

41,4

76,1 %

CP

344,4

358,4

334,9

14,0

93,4 %

Conseil supérieur de la magistrature

AE

3,5

4,2

3,5

0,7

83,3 %

CP

4,4

5,1

4,4

0,7

86,3 %

Justice judiciaire

AE

3 247,6

3 497,0

3 227,1

249,4

92,3 %

CP

3 210,1

3 241,6

3 225,1

31,5

99,5 %

Protection judiciaire de la jeunesse

AE

809,2

820,0

803,0

10,8

97,9 %

CP

803,9

809,1

798,2

5,2

98,7 %

Mission Justice

AE

8 565,6

9 002,9

7 759,4

437,3

86,2 %

CP

8 193,1

8 168,0

8 042,5

- 25,1

98,5 %

Source : commission des finances du Sénat

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Des effectifs en hausse, conformément à la prévision
a) La création de 751 postes pour la justice judiciaire

Entre 2015 et 2016, le programme 166 « Justice judiciaire » enregistre une augmentation de 3 %, soit 57 millions d'euros, des dépenses de personnel, qui s'explique notamment par l'impact du schéma d'emplois. Initialement, le projet annuel de performances (PAP) prévoyait la création de 157 emplois en 2016, mais le second plan de lutte antiterroriste (PLAT 2) a autorisé la création de 587 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires, portant à 744 les créations nettes d'emplois.

Les créations nettes d'emplois ont été supérieures à la prévision (751 ETP contre 744 ETP prévus), tout en respectant le plafond d'emplois, fixé à 32 082 équivalents temps plein travaillé (ETPT). À ce titre, contrairement à 2015, on peut observer un rétablissement du lien entre l'exécution et le plafond d'emplois voté par le Parlement.

Évolution comparée du plafond d'emplois et de la réalisation pour le programme 166 « Justice judiciaire »

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat à partir des RAP

Malgré leur dynamisme lié au renforcement des effectifs, les dépenses de personnel demeurent en-deçà du montant prévu par la loi de finances initiale.

Évolution de la prévision et de la consommation des dépenses de personnel du programme 166 « Justice judiciaire »

(en millions d'euros) (en ETP)

Source : commission des finances du Sénat à partir des RAP

Selon le rapport annuel de performances, la sous-exécution des dépenses de personnel, alors même que les emplois créés correspondent à la prévision, s'explique notamment par des recrutements tardifs.

b) Sur les 1 300 postes créés dans l'administration pénitentiaire, seuls 500 correspondent à des surveillants pénitentiaires

Les dépenses de personnel du programme 107 « Administration pénitentiaire » ont augmenté de près de 5 % entre 2015 et 2016, soit 100 millions d'euros. En effet, alors que le projet de loi de finances initiale prévoyait la création nette de 725 ETP, le second plan de lutte antiterroriste a proposé d'y ajouter 500 postes supplémentaires, soit au total, la création nette de 1 225 postes.

Finalement, 1 309 postes ont ainsi été créés, soit une sur-exécution du schéma d'emplois de 84 ETP qui seraient, selon le rapport annuel de performances, des contractuels.

Sur les 882 surveillants pénitentiaires qu'il était prévu de recruter, seuls 507 l'ont été effectivement. Autrement dit, les crédits supplémentaires mobilisés dans le cadre du second plan de lutte antiterroriste ont permis de recruter seulement 50 surveillants pénitentiaires - au lieu des 425 prévus . Selon le RAP, « des recrutements d'agents non titulaires ont été réalisés en compensation en catégorie B pour les filières greffe et insertion afin de renforcer les services les plus en difficultés, en catégorie B administratifs et techniques, ainsi qu'en catégorie C pour les filières administrative et technique afin de répondre aux besoins des établissements et services structurellement sous-dotés dans ces filières d'emplois. Des contractuels ont également été recrutés en qualité de moniteurs de sport dans les établissements pénitentiaires ».

Pourtant, l'objet de l'amendement du Gouvernement sur le second plan de lutte antiterroriste précisait que « les effectifs supplémentaires prévus par cet amendement seront plus particulièrement concentrés sur les moyens de lutte contre la radicalisation en prison et la sécurisation des extractions judiciaires » 196 ( * ) . On peut légitimement douter que les recrutements effectués dans le cadre de ce plan, dont l'utilité est sans doute réelle, aient été affectés à ces missions.

Évolution de la prévision et de la consommation des dépenses de personnel du programme 107 « Administration pénitentiaire »

(en millions d'euros) (en ETP)

Source : commission des finances du Sénat à partir des RAP

2. La protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) : des tensions sur la masse salariale

Les dépenses de personnel de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ont dépassé les prévisions de 7,8 millions d'euros : les crédits ouverts par la loi de finances initiale s'élevaient à 477,8 millions d'euros contre 485,6 millions d'euros de dépenses effectives. Cette tension a nécessité un virement de crédits de 1 million d'euros en provenance du programme 109 « Administration pénitentiaire » mais également l'ouverture de 5,9 millions d'euros par le décret d'avance du 2 juin 2016 197 ( * ) .

En outre, la mise en réserve initiale (de 2,4 millions d'euros, correspondant à 0,5 % des dépenses de personnel) a été partiellement dégelée en fin de gestion, à hauteur de 1,6 million d'euros.

Alors que la loi de finances prévoyait la création de 135 équivalents temps plein (ETP), dont 75 dans le cadre du second plan de lutte antiterroriste, 138 emplois ont été créés. Ce dépassement du schéma d'emplois s'explique notamment par un nombre de départs en retraite surévalués (154 au lieu de 183 prévus). Le plafond d'emplois voté par le Parlement est toutefois respecté.

Selon le rapport annuel de performances, l'écart à la prévision s'explique également par l'absence de budgétisation de plusieurs dépenses (les effets de la réforme statutaire des éducateurs intégrée au dispositif dit « PPCR », à la revalorisation du point d'indice) et par « des rappels importants en début d'année (élévations d'échelon payées tardivement) et une légère sous-estimation du GVT positif dans le budget 2016 ».

3. Un nouveau dérapage des frais de justice

En 2016, les frais de justice représentent au total 550 millions d'euros (en crédits de paiement), soit une augmentation de 75 millions d'euros (+ 15 %) par rapport à 2015.

La majoration des crédits relatifs aux frais de justice de 59 millions euros par rapport à la prévision initiale, prévue par le second plan de lutte antiterroriste 198 ( * ) n'a pas suffi à couvrir les frais de justice : l'exécution dépasse la prévision en 34 millions d'euros .

Évolution des frais de justice

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Aussi les crédits ont-ils été augmentés en cours d'année : le décret d'avance du 3 octobre 2016 a ouverts 25 millions d'euros en AE et 40 millions d'euros en CP au titre des frais de justice.

Selon le rapport de motivation du décret d'avance, « cette ouverture vise à permettre au ministère de la justice d'honorer le paiement de prestations en matière de frais de justice dans un contexte de forte croissance des enquêtes et des réquisitions techniques à la suite des attentats ». Toutefois, on constate que la moitié du dérapage (en CP) est imputable aux frais de justice civile et notamment commerciale (15 millions d'euros). Ce dérapage s'explique donc davantage par une sous-budgétisation que par les conséquences judiciaires des attentats .

En outre, ces crédits supplémentaires, destinés, selon le rapport annuel de performances, « à réduire les dettes et charges à payer de frais de justice des Cours d'appel » ont effectivement permis une diminution importante des charges à payer en matière de frais de justice, passant de 80,9 millions d'euros en 2015 à 41,7 millions d'euros en 2016. Si l'on peut se féliciter de cette réduction des charges à payer en matière de frais de justice, les économies promises chaque année tardent à se réaliser .

4. Administration pénitentiaire : seule la moitié des crédits du second plan de lutte antiterroriste a été mobilisée

Les crédits supplémentaires mobilisés à la suite des attentats du 13 novembre 2015 visaient notamment à accélérer la construction de nouvelles places de prisons. Toutefois, il apparait qu'une part significative de ces crédits n'a pas pu être mobilisée :

Exécution des crédits du second plan de lutte antiterroriste (PLAT 2) hors dépenses de personnel

(en millions d'euros)

AE

CP

PLAT 2

140,8

76,8

Exécution

69,9

50,4

Taux d'exécution

49,6%

65,6%

Source : commission des finances du Sénat à partir du RAP

Le retard pris dans la construction de ces nouvelles places conduit à une sous-exécution des autorisations d'engagement.

Par ailleurs, cette sous-consommation résulterait, selon le rapport annuel de performances, des « difficultés rencontrées par l'administration pénitentiaire à mettre en place les différents programmes d'actions et d'activités prévus au titre de la gestion publique, notamment du fait de la capacité limitée de mobilisation du secteur associatif, qui en est un acteur essentiel, et des contraintes d'organisation en milieu pénitentiaire (disponibilité des lieux adaptés et du personnel de surveillance nécessaire) ».

Plus généralement, il est particulièrement difficile d'identifier et de tracer, dans les documents budgétaires, la consommation des crédits des plans de lutte antiterroriste - en particulier pour les crédits hors dépenses de personnel. Cette situation est particulièrement préoccupante pour le programme 166 « Justice judiciaire » .

MISSION « MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES » ET COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À L'AUDIOVISUEL PUBLIC » - M. FRANÇOIS BAROIN, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

L'organisation de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » a évolué lors de l'exercice 2016.

En effet, depuis cet exercice, l'ensemble des crédits de l'audiovisuel public est inscrit au sein du compte de concours financiers : les crédits budgétaires inscrits au programme 313 « Contribution à l'audiovisuel et à la diversité radiophonique » de la mission ont ainsi disparu.

A. LA MISSION « MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES » : UNE STABILITÉ DES CRÉDITS À PÉRIMÈTRE CONSTANT

1. Une baisse des crédits de la mission, en partie expliquée par un changement des modalités de financement de l'audiovisuel public
a) Des crédits stables à périmètre constant

Lors de l'exécution 2016, 510,86 millions d'euros ont ainsi été engagés en AE, et 525,64 millions d'euros en CP . Ces crédits sont en baisse de près d'un quart par rapport à l'exercice 2015, en raison du changement de périmètre de la mission.

En effet, en 2016, la mission « Médias, livre et industries culturelles » n'a porté aucun crédit budgétaire dédié à l'audiovisuel public : le financement de l'audiovisuel public se fait désormais pleinement via le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » .

L'action « France Télévisions » du programme 313 « Contribution à l'audiovisuel et à la diversité radiophonique », qui représentait ainsi 189,5 millions d'euros en 2015, contre seulement 0,24 million d'euros en 2016, explique donc la majeure partie de la baisse des crédits.

À périmètre constant, les crédits apparaissent en très légère baisse.

Exécution comparée des crédits de la mission par programme en 2015 et 2016

(en millions d'euros et pourcentages)

Programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Évolution Exécution 2016 / exécution 2015

Évolution / Exécution 2016 / LFI 2016

(en %)

(en %)

180 - Presse

AE

238,9

255,3

225,8

- 5,5 %

- 11,6 %

CP

249,3

255,3

231,0

- 7,3 %

- 9,5 %

334 - Livre et industries culturelles

AE

261,7

266,1

255,8

- 2,2 %

- 3,9 %

CP

258,6

266,1

265,5

2,7 %

- 0,2 %

313 - Contribution à l'audiovisuel et à la diversité radiophonique

AE

189,5

29,2

29,2

- 84,6 %

- 0,2 %

CP

189,5

29,2

29,1

- 84,6 %

- 0,4 %

Total

AE

690,1

550,7

510,9

- 26,0 %

- 7,2 %

CP

697,5

561,1

525,6

- 24,6 %

- 6,3 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

b) Une consommation en baisse

La consommation 2016 des autorisations d'engagement (AE) et des crédits de paiement (CP) de la mission « Médias, livre et industries culturelles » est sensiblement en deçà des crédits ouverts en loi de finances initiale, avec des taux de consommation de 92,8 % en AE 199 ( * ) et 93,7 % en CP 200 ( * ) . Ces taux sont inférieurs de plus de trois points par rapport à 2015 et représentent la plus faible consommation depuis l'exercice 2011, comme le montre le graphique ci-après.

Cette évolution de la consommation s'explique en 2016 notamment par la disparition des crédits de l'audiovisuel public de la mission -assumés par le compte de concours financiers-, crédits qui étaient préservés d'annulations.

Évolution du taux d'exécution des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles »

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Cependant, l'écart entre l'exécution 2016 et les crédits ouverts en loi de finances initiale est essentiellement le fait du programme 180 « Presse » , et, dans une moindre mesure, du programme 334 « Livre et industries culturelles ».

2. Des mouvements plus importants en cours d'exécution

Différents mouvements de crédits ont modifié les ouvertures pour 2016.

La mise en réserve initiale gelait 6,1 % des crédits de la mission. Différents surgels ont porté celle-ci, sur l'année, à 8,5 % des crédits, soit 47,6 millions d'euros.

Les trois décrets d'avance de l'exercice 2016 sont venus minorer les crédits de la mission à hauteur de 27,2 millions d'euros en AE et 25,2 millions d'euros en CP, alors que ces annulations ne dépassaient pas 7,5 millions d'euros en 2015. Les crédits ouverts ont ainsi été diminués de 4,5 % des AE et 4,9 % des CP, soit un taux bien plus élevé que lors de l'exercice 2015 (1,6 %).

Les reports, s'élevant respectivement à 18,9 millions d'euros en AE et 8,9 millions d'euros en CP, sont en augmentation par rapport à 2015 (5,3 millions d'euros en AE et 7,3 millions d'euros en CP).

Ces mouvements ont principalement porté sur le programme 180 « Presse » , qui représente par exemple deux tiers des annulations, le reste étant assumé par le programme 334 « Livres et industries culturelles » . De moindres dépenses expliquent notamment ces annulations.

Mouvements de crédits en cours d'exécution

Prog.

Nature des crédits engagés

LFI 2016

Reports entrants

Décrets d'avance

Virement, transfert ou annulation

LFR de fin de gestion

Crédits ouverts

Reports sortants

Exécution 2016

Écart consommé/ prévu

Ecart consommé/ ouvert

Programme 180

AE

255 315 446

18 049 473

- 19 350 000

245 927 793

- 19 804 726

225 817 768

-11,55%

-8,18%

Programme 334

AE

266 102 044

578 411

4 500

270 049 147

255 847 687

-7,47%

-5,26%

Programme 313

AE

29 248 639

221 766

- 7 887 610

684 750

15 000

29 485 405

- 3 633 989

29 197 225

-0,18%

-0,98%

Total mission

AE

561 066 129

8 928 277

- 25 236 311

684 750

19 500

545 462 345

- 23 438 715

510 862 679,84

-8,95%

-6,34%

Programme 180

CP

255 315 446

7 962 347

- 17 350 000

254 014 919

- 13 261 172

231 032 801

-9,51%

-9,05%

Programme 334

CP

276 502 044

744 164

- 7 886 311

684 750

4 500

266 684 955

265 487 085

-0,23%

-0,45%

Programme 313

CP

29 248 639

221 766

15 000

22 282 545

- 4 562 061

29 119 225

-0,44%

30,68%

Total mission

CP

550 666 129

18 849 650

- 27 237 610

684 750

19 500

542 982 419

- 17 823 233,00

525 639 111

-4,54%

-3,19%

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère du budget

3. Des dépenses d'intervention en baisse

Les dépenses d'intervention connaissent une baisse importante, en 2016. Cette baisse est notamment due à la baisse des aides à la presse.

Elles sont aussi le fait, pour partie, du changement de périmètre de la mission et de la fin des crédits de France Télévisions et montrent ainsi un changement dans la structure de répartition des dépenses par titre au sein de la mission.

Évolution des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » par catégorie (CP consommés)

(en millions d'euros)

4. Un dynamisme des dépenses fiscales et taxes affectées en faveur du cinéma

La mission « Médias, livre et industries culturelles » compte douze dépenses fiscales qui lui sont rattachées, pour un montant évalué en 2016 à 340 millions d'euros.

Le soutien au cinéma passe par trois crédits d'impôts :

- le crédit d'impôt pour dépenses de production d'oeuvres audiovisuelles, représentant 64 millions d'euros en 2016;

- le crédit d'impôt pour dépenses de production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles engagées par des entreprises de production exécutives, qui a atteint 9 millions d'euros en 2016 ;

- le crédit d'impôt pour dépenses de production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, dont la dépense a été de 70 millions d'euros en 2016.

La Cour des comptes souligne que leur coût est passé de 112 millions d'euros en 2013 à 160 millions d'euros en 2016. Surtout, les modifications apportées aux conditions d'accès aux deux derniers dispositifs pourraient accroître le coût de près de 100 millions d'euros en 2017.

En termes de fiscalité affectée , le Centre national du cinéma et de l'image animée et la cinémathèque française ont perçu en 2016 678,7 millions d'euros, en augmentation de 1,75 % par rapport à 2015.

B. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À L'AUDIOVISUEL PUBLIC » : L'ABOUTISSEMENT DE LA RÉFORME DU FINANCEMENT DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC

1. Des crédits en hausse du fait notamment de la modification des modalités de financement de France Télévisions

Les crédits du compte de concours financiers ont augmenté de 5,5 % en 2016. Cette augmentation est due à l'évolution des crédits de France Télévisions (+ 8 %) avec le transfert des crédits auparavant inscrits au sein de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».

Les crédits d'Arte France, Radio France, France Médias Monde, TV5 Monde montrent une légère augmentation, quand les ressources de l'Institut national de l'audiovisuel sont stables.

Récapitulation des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », par programme, en exécution 2015 et 2016

Programme

Crédits exécutés LFI 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exécution 2015

(en %)

841 - France Télévisions

AE = CP

2 369 360 683

2 559 611 113

2 559 611 113

8,0 %

842 - ARTE France

AE = CP

267 249 469

269 801 969

269 801 969

1,0 %

843 - Radio France

AE = CP

614 392 236

619 497 236

619 497 236

0,8 %

844 - France Médias Monde

AE = CP

247 082 000

249 124 000

249 124 000

0,8 %

845 - Institut national de l'audiovisuel

AE = CP

90 869 000

90 869 000

90 869 000

0,0 %

847 - TV5 Monde

AE = CP

77 834 205

78 548 905

78 548 905

0,9 %

Total

AE = CP

3 666 787 593

3 867 452 223

3 867 452 223

5,5 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires) - les montants sont TTC

Au titre des recettes, il convient de signaler que le produit de la contribution à l'audiovisuel public s'est révélé inférieur de 103 millions d'euros à la prévision pour 2016.

Nouvelles modalités de financement de France Télévisions en 2016

France Télévisions voit en 2016 son financement évoluer. Depuis cette année, les crédits dédiés à France Télévisions sont portés exclusivement par le compte de concours financiers « A vances à l'audiovisuel public », et non plus partiellement par le programme « Contribution à l'audiovisuel et à la diversité radiophonique » de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».

La dotation de France Télévisions est ainsi, depuis 2016, assurée par :

- les deux ressources communes avec les autres sociétés de l'audiovisuel public, déjà existantes, que sont la contribution à l'audiovisuel public et le remboursement par l'État des dégrèvements à cette imposition ;

- une part de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques (TOCE) affectée, dont le montant est prévu en loi de finances.

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

2. Des dépenses fiscales en forte progression

Le compte de concours financiers porte trois dépenses fiscales , rattachées au programme « France Télévisions ». Leur montant est estimé en 2016 à 788,6 millions d'euros, soit une augmentation de 14 % par rapport à 2015.

Le dégrèvement en faveur des personnes de condition modeste connaît une forte augmentation (28 %) et atteint 563 millions d'euros en 2016. Cette évolution est la conséquence des modifications en loi de finances des conditions de dégrèvement de la taxe d'habitation.

II. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

A. LA MISSION « MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES » :

1. Les politiques publiques en faveur de la presse et du livre présentent des performances encore dégradées en 2015

Les indicateurs les plus représentatifs de la mission , qui permettent de mesurer la réalisation des deux objectifs fondamentaux que sont « Veiller au maintien du pluralisme de la presse » et « Favoriser l'accès du public aux bibliothèques et le développement de la lecture », présentent des résultats encore dégradés cette année , que ce soit par rapport à l'exécution 2015 ou par rapport à la prévision qui avait été faite dans le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016.

Les résultats mesurés par ces indicateurs baissent sensiblement depuis deux exercices et appellent à une attention particulière sur les exercices à venir.

Évolution des indicateurs les plus représentatifs de la mission
« Médias, livre et industries culturelles »

Indicateur

Sous-indicateur

Réalisation 2014

Réalisation 2015

Cible 2016 (PAP 2016)

Réalisation 2016

Écart

Cible 2016/ Réalisation 2016

Écart Réalisation 2015/ Réalisation 2016

Diffusion de la presse (P. 180.2.1)

Diffusion de l'ensemble de la presse "Editeurs" B ase 100 en 2007

80,6

76,8

73,7

68,9

- 6,51 %

- 10,29 %

Diffusion de l'ensemble de la presse écrite d'IPG nationale et locale (quotidiens payants et gratuits et magazines hebdomadaires) Base 100 en 2007

89,2

83,5

86,2

77,9

- 9,63 %

- 6,71 %

Nombre de visites totales des sites d'actualité / information généraliste En Mds

11,75

11,86

15,94

16,28

2,13 %

37,27 %

Fréquentation des bibliothèques (P. 334.1.1)

BnF (salles de lecture)

810 367

813 354

970 000

807 259

- 16,78 %

- 0,75 %

Bpi

1 410 520

1 289 211

1 500 000

1 260 889

- 15,94 %

- 2,20 %

Bibliothèques municipales

10 436 545

10 319 889

10 400 000

10 929 054

5,09 %

5,90 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Diffusion de l'ensemble de la presse « Éditeurs »

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Diffusion de l'ensemble de la presse écrite d'IPG nationale et locale
(quotidiens payants et gratuits et magazines hebdomadaires)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

2. Un soutien renforcé de l'État à l'AFP

L'État et l'Agence France-Presse ont signé en juin 2015 un nouveau contrat d'objectifs et de moyens (COM) pour 2014-2018 et en septembre de la même année une nouvelle convention d'abonnement pour 2015-2018. Ces deux supports distinguent ainsi les missions d'intérêt général confiées par l'État à l'AFP et les abonnements des administrations publiques.

La dotation totale accordée par l'État s'est élevée en 2016 à 127,4 millions d'euros , en augmentation par rapport à 2015.

Face aux difficultés conjoncturelles que connaît l'Agence France-Presse, en raison des difficultés de ses principaux clients, l'État est intervenu en 2016. Une dotation complémentaire de 1,6 million d'euros de la compensation des missions d'intérêt général par rapport au COM et à la loi de finances initiale a ainsi été versée.

La dotation totale versée à l'AFP, comprenant la compensation des missions d'intérêt général et les abonnements, croît de manière continue. Elle a ainsi augmenté de 8,4 % depuis 2012.

La loi de finances initiale pour 2017 prévoit une dotation de 132,4 millions d'euros, soit une hausse de près de 4 % par rapport à 2016, et un dépassement de 4,6 millions d'euros de la prévision du COM.

3. Des dépenses d'investissement portées par la poursuite des travaux de la BPI et BNF

L'essentiel des dépenses d'investissement de la mission porte sur deux opérations : la réhabilitation du quadrilatère Richelieu d'une part, la modernisation de la bibliothèque publique d'information d'autre part.

Pour le premier, la deuxième phase du chantier a débuté en 2016, après l'inauguration de la première phase. Un neuvième avenant a été conclu. Celui-ci indique que la première phase a représenté pour le ministère de la culture un coût estimé à 82,5 millions d'euros. La quasi totalité du coût de la deuxième phase devrait être supporté par ce même ministère , à hauteur de 107,2 millions d'euros. Le coût total de ce projet a été actualisé et est estimé désormais à 232,4 millions d'euros.

Pour le second, un million d'euros a été versé en 2016. Le coût du projet devrait être porté à 12 millions d'euros.

B. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À L'AUDIOVISUEL PUBLIC »

1. Des dotations préservées

De manière consolidée, les dotations de l'audiovisuel public sont passées entre 2015 et 2016 de 3751,8 millions d'euros à 3790,8 millions d'euros.

Les dotations sont ainsi en progression de 39 millions d'euros sur l'année 2016.

Les dépenses consacrées à France Télévisions comme à Radio France se montrent dynamiques. Elles s'inscrivent dans le cadre d'un effort financier de la part de l'État au cours des premières annuités des contrats d'objectifs et de moyens (COM) portant respectivement sur les périodes 2016-2019 et 2015-2019.

Évolution des crédits versés à France Télévision entre 2010 et 2015

(en millions d'euros - AE = CP)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Évolution des crédits du CCF « Avances à l'audiovisuel public »
versés à Radio France entre 2010 et 2015

(en millions d'euros - AE = CP)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

2. Des efforts réalisés en termes de maîtrise des charges et effectifs

Les différents bilans réalisés sur les différentes sociétés de l'audiovisuel public font état d'efforts en termes de maîtrise des charges et des effectifs.

Pour France Télévisions, la maîtrise de la masse salariale est soulignée comme une hypothèse centrale du contrat d'objectifs et de moyens 2016-2019. Après une baisse de 5 % entre 2012 et 2015, une baisse de 10 % est prévue d'ici à 2020 par rapport à 2012. Aussi, malgré le lancement de la nouvelle offre franceinfo en septembre 2016, France Télévisions a réduit ses effectifs de 92 ETP sur l'année. Les dépenses de fonctionnement hors programmes et hors personnel diminuent elles de 0,9 %, dans un contexte de forte rigidité de certaines dépenses.

Pour Radio France , si les charges de personnel sont en hausse de 2,9 % en 2016, notamment du fait d'indemnités de départs, celles-ci présentent une économie de 0,6 million d'euros par rapport au budget 2016 en raison notamment des personnels permanents.

La masse salariale des personnels permanents de l'Institut national de l'audiovisuel a également baissé de 448 000 euros en 2016, respectant ainsi les objectifs du contrat d'objectifs et de moyens (COM) n° 4.

3. Un développement important et continu des offres numériques

L'année 2016 marque la poursuite d'une tendance au développement de contenus et supports numériques, au coeur des offres des sociétés de l'audiovisuel public.

Ainsi, si le coût de la grille numérique de France Télévisions est stable entre 2015 et 2016, il convient de noter l'évolution de l'utilisation de ces dépenses. Ainsi, certains crédits ont été réorientés, priorité étant donnée, conformément au COM, à la refonte de la plateforme video de France Télévisions.

Pour Arte France , il est souligné que le numérique a participé à la progression dynamique des audiences au-delà de l'antenne classique. En cinq ans, Arte France a doublé le nombre de visites mensuelles de son offre numérique, considérée comme un relai de croissance important avec notamment son offre de télévision de rattrapage.

En ce qui concerne Radio France , l'indicateur relatif au nombre de podcasts téléchargés , avec 34 millions de podcasts téléchargés en France et à l'étranger en 2016, contre 22,5 en 2015 est identifié comme un signe de la stratégie menée en faveur des nouveaux usages de la radio. Une refonte des sites internet a également été menée, comme un développement des offres sur les plateformes tierces.

Le même constat est également fait pour RFI au sein de France Médias Monde : si la radio voit une progression de 14 % des visites sur les sites par rapport à 2015, et un doublement du trafic sur son application mobile, elle voit une croissance de 41 % des démarrages enregistrés, notamment sur des plateformes comme YouTube.

Pour TV5 Monde , alors que la consommation de vidéos sur les sites de la chaine reste stable, la consommation de programmes sur les sites de la chaine et les réseaux sociaux a également doublé, pour atteindre 75,8 millions de vidéos démarrées en 2016, portée notamment par des vidéos de rattrapage ou le développement de directs événementiels.

MISSION « OUTRE-MER » - MM. NUIHAU LAUREY ET GEORGES PATIENT, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La mission « Outre-mer » regroupe une partie des moyens budgétaires alloués aux territoires ultramarins :

- le programme 138 « Emploi outre-mer » porte les crédits relatifs au soutien aux économies ultramarines, à travers notamment des exonérations spécifiques de charges sociales et des actions en faveur de l'insertion et de la qualification professionnelle des jeunes ultramarins ;

- le programme 123 « Conditions de vie outre-mer » porte principalement les crédits en faveur du logement social et du soutien aux collectivités dans leur politique d'investissements structurants.

Elle ne permet toutefois pas d'appréhender globalement la politique de l'État en faveur des outre-mer.

Selon le document de politique transversale « Outre-mer » annexé au projet de loi de finances pour 2016, l'effort financier consacré par l'État aux territoires ultramarins s'établissait à 14,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 14,6 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) dans le projet de loi de finances pour 2016, dont 2,1 milliards d'euros en AE et CP pour la mission « Outre-mer ». Les dépenses fiscales étant estimées à 3,9 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2016, l'effort total de l'État devait s'élever à 18,4 milliards d'euros en AE et 18,6 milliards d'euros en CP en 2016.

Au sein du programme 123, le surplus de consommation de CP par rapport à 2015 a bénéficié à quatre actions : la ligne budgétaire unique qui finance les logements sociaux, le fonds d'investissement exceptionnel, les dotations aux collectivités territoriales avec notamment la participation de l'État au régime de solidarité territoriale de la Polynésie française et enfin la bonification d'intérêt des prêts accordés par l'Agence française de développement (AFD).

Exécutions des crédits de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros, en %)

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exéc. 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

Total

Dont T2

Total

Dont T2

Total

Dont T2

Total

Dont T2

Total

Dont T2

Conditions de vie

AE

579,7

717,8

636,7

9,83%

88,70%

outre-mer

CP

619,6

701,3

653,4

5,46%

93,17%

Emploi

AE

1 360,70

143,8

1 374,00

144,5

1 257,00

143,5

-7,62%

-0,21%

91,48%

1,40%

outre-mer

CP

1 372,80

143,8

1 374,40

144,5

1 247,70

143,5

-9,11%

-0,21%

90,78%

1,40%

Total

AE

1 940,40

143,80

2 091,80

144,50

1 893,70

143,50

-2,41%

90,53%

CP

1 992,40

143,80

2 075,70

144,50

1 901,10

143,50

-4,58%

91,59%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Évolution du taux d'exécution des crédits des programmes de la mission « Outre-mer »

(en crédits de paiement)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

L'exécution 2016 est marquée par une sous-consommation concentrée en AE sur le programme 123 « Conditions de vie outre-mer », dont le taux d'exécution s'élève à 88,70 %. Cet écart s'accroît d'année en année.

Ces annulations de crédits concernent principalement le programme 123 « Conditions de vie outre-mer », constitué en majorité de dépenses d'intervention (titre 6).

Mouvements de crédit intervenus en gestion pendant l'exercice 2015

(en millions d'euros)

Programme

LFI

Transfert

Avances

Ouvertures de Fonds de concours

Reports N-1 > N

Reports N > N+1

Reports N-1 > N (FDC)

Reports N > N+1 (FDC)

Ouvertures attributions de produits

123

701,11

- 0,10

- 53,58

0,18

20,33

- 13,65

0,40

- 0,32

138

1 215,89

- 127,59

18,25

0,43

-0,74

7,46

- 9,96

0,89

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Des dépenses d'exonérations de charges historiquement basses, dans un contexte de chômage accru

Le dispositif d'exonérations de charges sociales spécifique à l'outre-mer a été créé par la loi n° 94-638 du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l'emploi, l'insertion et les activités économiques dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte. Il vise à réduire le coût du travail afin de favoriser le développement de l'emploi dans ces territoires.

Ce dispositif (action 01 « Soutien aux entreprises » du programme 138), constitue un outil essentiel de la politique de l'État en faveur des outre-mer. Il représente 989 millions d'euros, contre plus d'un milliard d'euros en 2015. Les exonérations de charges sociales rassemblent plus de la moitié des crédits consommés au sein de la mission « Outre-mer » en 2016 et 78 % des crédits du programme 138 « Emploi outre-mer ».

Il repose sur un mécanisme prenant en compte plusieurs facteurs : la taille de l'entreprise, son secteur d'activité et son éligibilité ou non au crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et la rémunération du salarié.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, a recentré le dispositif prioritairement sur les bas salaires en abaissant les seuils tout en conservant les mêmes cibles, c'est-à-dire les très petites entreprises (moins de onze salariés) et les entreprises des secteurs suivants : la recherche et le développement, les technologies de l'information et de la communication, le tourisme y compris les activités s'y rapportant, l'environnement, l'agronutrition, les énergies renouvelables.

Montant des exonérations de cotisations de charges patronales

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après la Cour des comptes)

L'écart constaté, tant en AE qu'en CP, entre les crédits inscrits en loi de finances pour 2016 et les consommations effectives correspond essentiellement à une minoration des besoins des organismes de sécurité sociale, consécutive aux réformes entreprises sur ce dispositif en 2014 et 2016.

Impact des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale sur l'évolution des effectifs salariés dans les départements d'outre-mer

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les entreprises exonérées bénéficient d'un taux de croissance de l'emploi inférieur de 0,3 point à celui de l'ensemble des entreprises ultramarines, ceci s'expliquant par un contexte économique globalement plus favorable aux secteurs des entreprises non exonérées .

L'augmentation de l'écart entre le taux de croissance de l'emploi salarié dans les entreprises d'outre-mer exonérées de cotisations sociales et le taux de croissance de l'emploi salarié dans les entreprises analogues de l'hexagone a augmenté en 2016. Les entreprises ultramarines bénéficiant d'exonérations de charges connaissent donc une situation de l'emploi moins défavorable que les entreprises des secteurs comparables de l'hexagone.

Eu égard à la situation de l'emploi dans les outre-mer, vos rapporteurs spéciaux renouvellent leurs interrogations sur le choix du gouvernement de réformer ce dispositif d'exonérations de charges sociales. Ce dernier a en effet été modifié à de nombreuses reprises entre 2007 et 2013 et a encore été recentré en loi de finances initiale pour 2017, alors qu'il conviendrait de le stabiliser afin de permettre aux entreprises de bénéficier d'une visibilité sur l'évolution de leur masse salariale et de ne pas décourager les décisions de recrutement.

2. Une montée en puissance progressive du SMA conforme aux prévisions

Les crédits consommés pour l'action 2 « Aide à l'insertion et à la qualification professionnelle » du programme 138 « Emploi outre-mer », qui couvrent les deux dispositifs d'insertion professionnelle (le service militaire adapté et l'activité de l'opérateur LADOM), s'élèvent en 2015 à 265 millions d'euros en AE et 269 millions d'euros en CP, soit une légère hausse par rapport à l'exercice 2014.

La gestion 2016 marque un palier dans la montée en puissance du Service militaire adapté (SMA) avec une stabilisation du plafond d'emplois fixé en loi de finances initiale à 5 309 ETPT, à l'instar de l'exercice précédent, dont 4 206 volontaires. Le plafond d'emplois a été consommé à 99,9 %, soit un taux équivalent à un volume de 5 301 ETPT annuels.

Effectifs du Service militaire adapté (réalisation)

(en ETPT)

2013

2014

2015

2016

PLF 2017

Effectif total du SMA

5 086

5 296

5 296

5 301

5 505

Volontaires

4 007

4 205

4 204

4 206

4 400

Personnel civil et militaire

1 079

1 091

1 092

1 095

1 105

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Le nombre de volontaires engagés a, quant à lui, été dépassé et l'objectif en emplois réalisé. En 2016, le nombre de bénéficiaires a augmenté de 196 ETPT (soit 5 847 personnels) en comparaison avec l'année passée. Ce résultat est cohérent avec la trajectoire fixée : 6 000 bénéficiaires pour 2017.

Objectifs annuels du SMA

(en nombre de volontaires engagés)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Places de stages ouvertes dans l'année

2 900

3 000

4 100

4 850

5 300

5 500

5 700

5 800

6000

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents annexés au PLF 2017)

La performance du SMA demeure satisfaisante. Depuis 2013, l'insertion des volontaires stagiaires se maintient au-dessus de la cible des 76 %, et passe à 77 % en 2016. Le taux de sorties anticipées du dispositif sans insertion professionnelle, en 2016, est de 12,8 % soit - 1,7 point par rapport à la moyenne des années précédentes (2010-2014). Vos rapporteurs spéciaux craignent toutefois que la baisse régulière du taux d'encadrement du SMA, dans un contexte d'augmentation du nombre de volontaires (+ 83 volontaires par rapport à 2015) issus de publics plus fragiles et nécessitant plus d'attention nuise à sa performance à terme.

Ce dispositif vise une population particulièrement fragile, puisque la moitié des ultramarins âgés de 18 à 25 ans sont au chômage. À ce titre, l'exercice 2016 s'avère conforme aux objectifs fixés et permettra l'atteinte de l'objectif « SMA 6000 » en 2017. Ce succès ne devra pas masquer la nécessaire poursuite efforts budgétaires dans le domaine de l'insertion des jeunes ultramarins sur le marché de l'emploi.

3. Une poursuite de la baisse des crédits de l'aide à la continuité territoriale regrettable

Aux termes de l'article L. 1803-1 du code des transports, la politique nationale de continuité territoriale doit tendre « à rapprocher les conditions d'accès de la population aux services publics de transport, de formation, de santé et de communication de celles de la métropole, en tenant compte de la situation géographique, économique et sociale particulière de chaque collectivité territoriale d'outre-mer ».

Les crédits de l'action 03 « Continuité territoriale » du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » sont principalement destinés à abonder le fonds de continuité territoriale (FCT), qui est notamment chargé de financer :

- l'aide à la continuité territoriale (ACT) pour tous publics ;

- le passeport-mobilité études (PME) pour les étudiants et les lycéens ;

- le passeport-mobilité formation professionnelle (PMFP) pour les personnes ayant un projet d'insertion professionnelle.

Les critères d'éligibilité de l'aide à la continuité territoriale ont fait l'objet d'une importante réforme entrée en vigueur en février 2015, avec la mise en place d'un délai d'au moins trois années entre le versement de deux aides et la division de leurs montants par deux pour les foyers dont le quotient familial annuel est supérieur à 6 000 euros.

Ces changements avaient entraîné une réduction de 80 % du nombre de bénéficiaires et du coût du dispositif entre 2014 et 2015. Cette tendance se confirme en 2016 puisque les dépenses du dispositif ont atteint 29,6 millions d'euros en AE/CP soit une diminution de 17,3 % par rapport à l'enveloppe consommée en 2015. Le nombre de bénéficiaires (hors volet transport dans le cadre de la formation professionnelle) s'élève à 19 516 en 2016 soit - 5,2 % par rapport à 2015.

Parallèlement à cette réforme, le conseil régional de la Réunion a renforcé son propre dispositif (initié en 2010, fortement renforcé en 2016). Plus favorable que l'aide de l'État (l'aide régionale est attribuée une fois par an sous conditions de ressources) et non cumulable avec celle-ci, qui a donc capté les Réunionnais qui étaient les principaux bénéficiaires de l'aide de l'État.

Vos rapporteurs spéciaux expriment leurs doutes quant à l'impact de cette réforme, qui traduit le retrait de l'État dans l'effort de désenclavement des collectivités ultramarines.

4. Une exécution des crédits de la LBU en hausse, conformément à la priorité affichée d'aide au logement

La majeure partie des crédits du programme 123 sont constitués de la ligne budgétaire unique (LBU), dont les crédits consommés s'élèvent à 197,8 millions d'euros en AE et 216,4 millions d'euros en CP, soit une augmentation 6,4 % en AE et 9,2 % en CP par rapport à 2015.

Alors que leur consommation avait baissé entre l'exercice 2015 et 2014, cette augmentation est cohérente avec la priorité affichée à la politique d'aide au logement dans le cadre du « Plan logement outre-mer 2015-2020 » qui fixe pour objectif de produire et réhabiliter au minimum 10 000 logements sociaux par an (locatifs ou en accession).

Vos rapporteurs regrettent néanmoins qu'aucun dispositif de suivi de l'exécution de ce plan n'existe dans les documents budgétaires, rendant impossible une réelle évaluation des actions menée en vue de le mettre en oeuvre.

CAS « PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L'ÉTAT » - M. MAURICE VINCENT, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

1. L'impossibilité de comparer l'exécution à la prévision

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Participations financières de l'État » constitue le support budgétaire des opérations conduites par l'État en tant qu'actionnaire , via l'Agence des participations de l'État (APE).

Ses caractéristiques sont les suivantes :

- en recettes, il retrace à titre principal les produits des cessions de participations conduites par l'État actionnaire ;

- en dépenses, il a pour objet de financer de nouvelles prises de participation 201 ( * ) et de contribuer au désendettement de l'État 202 ( * ) .

Pour des raisons de confidentialité et d'opportunité parfaitement compréhensibles, le Gouvernement refuse toutefois de s'engager sur un montant de cessions pour l'année à venir. Comme chaque année, le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016 indiquait ainsi que « pour des raisons de confidentialité, inhérentes notamment à la réalisation de cessions de titres de sociétés cotées, il n'est pas possible au stade de l'élaboration du projet de loi de finances de détailler la nature des cessions envisagées. La stratégie de cession dépend en effet très largement de la situation des marchés, très difficile à anticiper, des projets stratégiques des entreprises intéressées, de l'évolution de leurs alliances ainsi que des orientations industrielles retenues par le Gouvernement. Dans ce contexte, le responsable du programme évalue les opportunités, en ligne avec les lignes directrices de l'État actionnaire, et peut proposer au ministre de réaliser une opération ».

De ce fait, le compte spécial présente une particularité : la prévision de la loi de finances initiale, tant pour les recettes que pour les dépenses, est fixée conventionnellement à cinq milliards d'euros.

En raison du caractère purement formel de cette programmation, l'exécution ne saurait donc, comme pour les autres missions, être comparée à la prévision.

2. Un montant de cessions stable, mais des recettes tirées à la hausse par les versements du budget général

Pour l'exercice 2016, le total des recettes s'élève à 5,3 milliards d'euros , contre 3,45 milliards d'euros en 2015.

Évolution des recettes du compte spécial entre 2015 et 2016

(en millions d'euros)

2015

2016

Cessions

2 349,6

2 268,5

Reversement de produits

0,0

0,0

Reversement de dotations en capital

168,9

442,2

Remboursement de créances rattachées à des participations financières

8,5

23,8

Autres remboursements de créances

118,5

7,4

Versements du budget de l'État

804,3

2 538,7

Total

3 449,8

5 280,6

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Cette augmentation s'explique par la multiplication par trois des versements du budget général par rapport à 2015 . Il s'agit principalement de la dotation en fonds propres de l'Agence française de développement (AFD) à hauteur de 2,4 milliards d'euros.

Les recettes tirées des cessions restent stables par rapport à 2015 et s'élèvent à 2,27 milliards d'euros.

Évolution des recettes tirées des cessions depuis 2012

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

Recettes tirées des cessions

0,298

2 735,96

1 613,39

2 349,61

2 268,55

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les trois principales opérations réalisées correspondent à :

- la cession de l'aéroport de Nice , pour un montant total de 1,22 milliard d'euros ;

- la cession de l'aéroport de Lyon , pour un montant de 535 millions d'euros ;

- la cession de 5,8 millions de titres Safran , pour un total de 365 millions d'euros.

Par ailleurs, le rééquilibrage de la composition des dividendes versés doit être relevé 203 ( * ) . En 2016, pour la première année depuis la création du compte, l'État a perçu presque autant de dividendes en actions qu'en numéraire.

Si le montant total des dividendes versés ne diminue que légèrement par rapport à 2015 (- 10 %), la baisse est plus forte pour les dividendes en numéraires (- 40 %) 204 ( * ) . Cette évolution traduit notamment le choix de l'État d'exercer son option pour le versement en actions du dividende d'EDF pour les exercices 2015 à 2017 dans le cadre du plan d'action de consolidation de l'entreprise.

Si ce versement n'a pas d'impact sur le solde budgétaire, il entraîne la constatation d'un produit financier de 1,7 milliard d'euros dans le résultat patrimonial de l'État. Il explique ainsi plus du quart de l'amélioration du résultat patrimonial de l'État entre 2015 et 2016, s'établissant à -75,6 milliards d'euros en 2016.

Évolution des dividendes versés depuis 2010

(en milliards d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Dividendes en numéraire

4,3

4,4

3,2

4,2

4,1

3

1,8

Dividendes en actions

0,1

-

1,4

0,2

-

0,9

1,7

Total

4,4

4,4

4,6

4,4

4,1

3,9

3,5

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

3. Des dépenses en hausse du fait des augmentations de capital, mais une contribution au désendettement nulle

S'agissant des dépenses, le montant total s'élève à 4 milliards d'euros au titre de l'année 2016 , en hausse de 18 % par rapport à 2015.

Dépenses du compte spécial en 2016

(en millions d'euros)

Dépenses

Augmentations de capital

3 607

dont...

Agence française de développement

2 688

Programme d'investissements d'avenir

265

Banques multilatérales de développement

263,5

FSI Équation

63

Laboratoire français du fractionnement et de biotechnologies

40

Achats ou souscriptions de titres

246

dont...

FSI Équation

245,6

Autres

150

Prestations de services

2,5

Désendettement de l'État

0

Total

4 005

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires et la note d'exécution budgétaire de la Cour des comptes)

Toutefois, les dépenses du CAS sont, pour l'essentiel, des opérations en capital qui ne sont pas liées à l'État actionnaire.

La composition des dépenses du CAS reflète la contribution exceptionnelle aux fonds propres de l'AFD . Les augmentations de capital représentent ainsi 90 % des dépenses en 2016, contre 37 % en 2015.

Par conséquent, les achats ou souscriptions de titres ont été particulièrement faibles en 2016 : ils ont diminué de 81 % par rapport à 2015.

Par ailleurs, après une reprise de la politique de désendettement financée par des cessions de participations en 2014 et 2015, aucune contribution au désendettement n'est enregistrée pour l'exercice 2016 . Cette pause est conforme à l'intérêt patrimonial de l'État, compte tenu du faible coût de refinancement actuel.

4. Un excédent inédit depuis 2010

Au total, la différence entre les dépenses et les recettes fait apparaître un solde positif (+ 1,28 milliard d'euros), soit le niveau le plus élevé depuis 2010.

Solde des exercices 2015 et 2016

(en millions d'euros)

2015

2016

Recettes

3 449,8

5 280,6

Dépenses

3 419,8

4 004,9

Solde de l'exercice

30

1 275,7

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Ainsi, le solde cumulé du compte spécial faisant l'objet d'un report en fin d'exercice s'élève à 3,7 milliards d'euros.

Évolution du solde cumulé du compte depuis 2012

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

Solde de l'exercice

- 494

1 220

- 418

30

1 275,7

Solde cumulé

1 567

2 787

2 369

2 399

3 675

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Le choix de fixer les crédits du compte à un niveau conventionnel en prévision rend possible une augmentation des dépenses du budget général artificiellement gagée

Le caractère formel de la programmation du compte d'affectation spéciale se traduit par deux conséquences :

- d'une part, la présentation du compte à l'équilibre, indépendamment du montant des dépenses et des recettes réellement prévues 205 ( * ) , est susceptible de fausser la prévision du solde d'exécution de la loi de finances ;

- d'autre part, en cours d'exécution budgétaire, le Gouvernement peut gager des dépenses nouvelles par des annulations sur le compte , sans que celles-ci constituent des économies réelles pour le budget de l'État. Ce risque est d'autant plus marqué que le niveau conventionnellement inscrit en loi de finances depuis 2007 (5 milliards d'euros) est plus élevé que les montants moyens exécutés.

De fait, en 2016, deux décrets d'avance ont été gagés par des annulations d'autorisations d'engagement sur le compte , pour des montants respectifs de 468 millions d'euros et de 894 millions d'euros 206 ( * ) .

Ces annulations ont ensuite été compensées en fin de gestion par la loi de finances rectificative du 29 décembre 2016, qui a procédé à une ouverture de crédits de 2 milliards d'euros sur le programme 731, gagée par une annulation de crédit à due concurrence sur le programme 732.

Ainsi que le relève la note d'analyse de l'exécution budgétaire de la Cour des comptes, « ce choix [...] pose un problème de principe dans la mesure où les opérations concernées sont de nature différente » 207 ( * ) .

Dans son avis sur le projet de décret d'avance notifié le 23 septembre 2016, votre commission des finances relevait ainsi « que les annulations en autorisations d'engagement sur le compte d'affectation spéciale `Participations financières de l'État' ne constituent pas des économies réelles sur le budget de l'État dans la mesure où les crédits inscrits à cette mission sont fixés à un niveau conventionnel, identique d'année en année et indépendant du montant des dépenses réellement prévues ; que les ouvertures qu'elles permettent se traduiront en revanche par une charge supplémentaire certaine sur le budget de l'État en 2016 et en 2017 » 208 ( * ) .

Votre rapporteur spécial observe que ces annulations visaient à financer des dépenses prioritaires traduisant l'effort consenti par le précédent Gouvernement en faveur de l'emploi et des demandeurs d'asile. La Cour des comptes souligne d'ailleurs que cette opération n'est pas irrégulière .

Toutefois, afin de renforcer la crédibilité de la prévision du compte, il serait préférable de déterminer les recettes en fonction de la moyenne du montant des recettes constatées au cours des trois exercices précédents hors versements du budget général. L'écart entre la prévision et l'exécution serait ainsi fortement réduit (cf. graphique ci-après).

Comparaison de la programmation conventionnelle actuelle des cessions annuelles et de la programmation proposée reposant sur la moyenne

des trois exercices précédents

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

2. Malgré son niveau inédit, le solde excédentaire du compte ne suffira pas à faire face aux besoins de financement

Le montant du solde cumulé du compte (3,68 milliards d'euros) ne suffira pas pour répondre aux besoins de financement prévus . C'est d'ailleurs ce que reflète, dans un effort de transparence inédit, la programmation d'un compte en déficit à hauteur de 1,5 milliard d'euros par la loi de finances pour 2017.

Les dépenses concernent en premier lieu la recapitalisation du secteur énergétique français. Conclue le 28 mars dernier pour un montant de 4 milliards d'euros 209 ( * ) , l'augmentation de capital d'EDF a été souscrite par l'État à hauteur de 3 milliards d'euros 210 ( * ) . L'État actionnaire a également annoncé qu'il souscrirait via l'APE à l'augmentation de capital d'Areva pour un montant estimé à 4 milliards d'euros.

Par ailleurs, il reviendra au Gouvernement de décider avant octobre 2017 de l'opportunité de lever l'option d'achat sur les titres Alstom prêtés par Bouygues en vertu de l'accord entré en vigueur le 4 février 2016. Au cours actuel, il en coûterait près de 1,35 milliard d'euros.

Évaluation du besoin de financement potentiel du compte

(en millions d'euros)

Dépenses

Montant

Horizon

Dépenses enregistrées ou prévues

Recapitalisation EDF

3 000

-

Agence française de développement

280

2017

Banques multilatérales de développement

145

2017

Augmentation de capital du Laboratoire du fractionnement et des biotechnologies

90

2017

Recapitalisation Areva

4 000

2017

Radio France

27,5

2017

Dépenses supplémentaires potentielles

Levée options d'achat Alstom

1 345

D'ici fin 2017

Libération capital Bpifrance

1 150

D'ici juillet 2018

Total

10 037,5

Solde cumulé à l'issue de l'exercice 2016

3 675

Besoin de financement potentiel

6 362,5

Note de lecture : le solde du capital de Bpifrance doit être libéré par l'État dans le délai légal de cinq ans conformément à l'article L. 225-144 du code de commerce.

Source : commission des finances du Sénat

Les titres Peugeot détenus par l'APE, représentant 12,23 % du capital, ont été cédés à Bpifrance le 19 juin dernier, abondant le compte de 1,87 milliard d'euros.

Pour autant, un besoin de financement de plus de 4,5 milliards d'euros demeure .

Dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, la Cour des comptes insiste sur les conséquences de la recapitalisation d'Areva pour le solde budgétaire, ainsi que pour le compte d'affectation spéciale : « le solde disponible à la fin juin du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » ne couvre qu'une partie des montants nécessaires à cette recapitalisation. Ce défaut de financement devra être comblé, soit par de nouvelles cessions d'actifs, soit par des ouvertures de crédits supplémentaires sur le budget général destinés à être versés au [compte] pour que ce dernier dispose d'une trésorerie suffisante. Si ce défaut de financement n'est pas comblé par de nouvelles cessions d'actifs, des ouvertures de crédits en décret d'avance ou en loi de finances rectificative devront être prévues à l'été 2017 » 211 ( * ) .

L'État actionnaire pourrait être contraint de dégager des recettes de cessions dans un contexte de marché défavorable.

Certes, la cession des 14 millions de titres Renault supplémentaires acquis par l'État en avril 2015 pour un coût de 1,2 milliard d'euros afin de préserver ses droits de vote doubles n'a pas encore été réalisée.

Pour autant, votre rapporteur spécial formule deux observations :

- même avec un compte déficitaire à -1,5 milliard d'euros comme prévu en loi de finances pour 2017, le montant de cession devra atteindre 4,9 milliards d'euros 212 ( * ) , soit le double des cessions enregistrées lors des trois derniers exercices ;

- or les entreprises du portefeuille de l'APE font face à une situation financière dégradée : pour la première fois depuis la création de l'APE, leur résultat d'exploitation et leur résultat net combinés sont fortement négatifs en 2015 (- 10,1 milliards d'euros de résultat net).

Une contribution du budget général pourrait donc être envisagée , comme ce fut le cas pour la recapitalisation de France Télécom en 2002, réalisée dans un contexte de marché très défavorable.

3. Un dispositif de performance à la portée limitée

Un des indicateurs du programme 731 « Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État » s'attache au taux de rendement du portefeuille d'actions de l'État . Pour 2016, ce taux s'élève à - 9,92 %, pour une cible initialement fixée à 6 % ; il est toutefois stable par rapport à 2015 . Le taux de rendement des valeurs du CAC 40 était de 8,36 % sur l'exercice.

Une part de cette mauvaise performance s'explique par le poids du secteur énergétique , qui représentait 46,3 % du portefeuille de participations cotées de l'État au 6 juin 2017 213 ( * ) .

Une différence doit être relevée par rapport à 2015 : même pour le portefeuille hors énergie, la performance est inférieure de plus de 6 points par rapport au CAC 40 , alors qu'elle était supérieure de 16 points en 2015. Elle reflète à la fois le recul des valeurs automobiles et le résultat net négatif des entités du portefeuille de l'APE en 2015 214 ( * ) , à hauteur de -10,1 milliards d'euros.

Conformément à son engagement, l'APE a intégré les opérations conduites par les holdings détenues intégralement par l'État dans le dispositif de performance. À ce titre, le taux des commissions versées par l'État à ses conseils, réduit de 0,03 % en 2015 à 0,008 % en 2016, comprend désormais les frais de conseils et les commissions versées dans ce cadre.

De façon générale, votre rapporteur spécial appelle à une réflexion sur l'évolution des indicateurs de performance . Plus de la moitié d'entre eux ne sont pas renseignés pour le programme 731, en raison de la date d'arrêt des comptes.

Il serait particulièrement souhaitable de disposer d'une comparaison de l'évolution de la valeur en fonction des principaux secteurs du portefeuille de l'État actionnaire. Cette analyse permettrait de déterminer la part respective du biais sectoriel et inhérente aux sociétés du portefeuille de l'État dans l'évolution du taux de rendement.

MISSION « POLITIQUE DES TERRITOIRES » - MM. BERNARD DELCROS ET DANIEL RAOUL, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016 (RAPPORTEUR SPÉCIAL : BERNARD DELCROS)

Consacrée à la politique d'aménagement du territoire de l'État, la mission « Politique des territoires » regroupe, depuis 2015, trois programmes :

- le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » qui comprend le Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), la prime d'aménagement du territoire (PAT) et les dépenses de fonctionnement et de personnel du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) ;

- le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE) , dont les crédits proviennent de différents ministères et finance des plans gouvernementaux interministériels répondant à certains enjeux territoriaux particuliers comme la qualité de l'eau en Bretagne, le programme exceptionnel d'investissements en faveur de la Corse, le plan gouvernemental pour le Marais poitevin et le plan chlordécone en Martinique et en Guadeloupe ;

- et le programme 147 « Politique de la ville » 215 ( * ) qui finance notamment les contrats de ville, les programmes de réussite éducative et le dispositif adultes-relais.

En 2016, le périmètre de la mission a été affecté par deux mesures concernant le programme 147 « Politique de la ville » : d'une part, l'extinction progressive du dispositif d'exonération de charges sociales dans les zones franches urbaines et, d'autre part, la dissolution de l'agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé) au 1 er janvier 2016, conduisant à la suppression de la subvention pour charges de service public qui lui était versée (2,5 millions d'euros en 2015).

La loi de finances initiale pour 2016 prévoyait , pour l'ensemble de la mission, 660,8 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 704,6 millions d'euros en crédits de paiement (CP) hors fonds de concours, soit une baisse respective de 4,7 % et de 5,5 % par rapport à l'autorisation budgétaire de 2015.

À la fin de l'exercice 2016, le niveau d'exécution des crédits de la mission se situe nettement en-deçà des crédits ouverts en loi de finances : 598,2 millions d'euros ont été consommés en AE et 650 millions d'euros en CP (- 9,5 % et - 7,7 % par rapport aux crédits initialement prévus). Tous les programmes sont concernés par cette sous-exécution, à l'exception du programme 162 « interventions territoriales de l'État », qui s'est notamment vu attribué des fonds de concours pour financer le PEI en Corse.

Exécution des crédits de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros)

Programmes

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016*

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016/ exéc. 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

(en %)

(en %)

Programme 112

AE

161,2

210,0

169,9

5,4 %

- 19,1 %

CP

249,4

249,1

223,0

- 10,6 %

- 10,5 %

Programme 162

AE

13,3

22,1

38,6

191,3 %

75,0 %

CP

40,0

25,9

36,3

- 9,2 %

40,3 %

Programme 147

AE

409,0

428,7

389,6

- 4,7 %

- 9,1 %

CP

409,3

429,6

390,7

- 4,6 %

- 9,1 %

Total Mission

AE

583,5

660,8

598,2

2,5 %

- 9,5 %

CP

698,8

704,6

650,0

- 7,0 %

- 7,7 %

* Hors fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances du Sénat (d'après le rapport annuel de performances de la mission « Politique des territoires » annexé au projet de loi de règlement et d'approbation des comptes pour 2016)

Par rapport à la consommation observée en 2015, les AE sont légèrement supérieures (+ 2,5 %), tandis que les CP sont inférieurs de 7 %.

Exécution des crédits de la mission depuis 2014

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Ainsi, le plafond de crédits fixé à 700 millions d'euros par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2020 216 ( * ) est respecté : celui-ci est inférieur de près de 78 millions d'euros à l'exécution constatée (si l'on retranche les fonds de concours rattachés en cours d'exercice qui s'élèvent à 25 millions d'euros).

Programmation pluriannuelle de la mission

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

Budget triennal 2015-2017

737,0

700,0

660,0

Loi de finances initiale

756,9

704,6

Exécution

698,8

650,0

Exécution hors fonds de concours et

677,8

622,2

Écart exécution / LPFP

- 59,2

- 77,8

Note de lecture : les crédits considérés sont des crédits de paiement, hors contribution du budget général au compte d'affectation spéciale « Pensions » et hors fonds de concours.

Source : commission des finances du Sénat

S'agissant des mouvements de crédit intervenus en cours d'exercice, les ouvertures de crédits opérées par voie de fonds de concours et les reports de crédits concernant le PEI en Corse n'ont pas compensé les annulations intervenues dans les trois décrets d'avance successifs 217 ( * ) : au total, 8 % des AE et 9 % des CP de la mission autorisés en loi de finances initiale ont été annulés par décrets d'avance en 2016 .

Ces annulations de crédits ont principalement porté, pour le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », sur les crédits mis en réserve et, pour le programme 147 « Politique de la ville », sur le dispositif des adultes-relais.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Programme

LFI 2016

Reports entrants

Décrets d'avance

Virement ou transfert

LFR de fin de gestion

Fonds de concours et attributions de produits

Crédits ouverts 2016

Crédits consommés 2016

Écart consommé/ prévu

112

AE

210,0

7,2

- 25,3

0,3

- 0,4

5,1

196,9

169,9

- 40,1

CP

249,1

2,0

- 29,6

0,3

- 0,4

5,1

226,5

223,0

- 26,2

162

AE

22,1

14,0

- 1,8

1,5

0,0

25,0

60,8

38,6

16,6

CP

25,9

24,5

- 10,0

1,5

0,0

20,0

61,9

36,3

10,4

147

AE

428,7

0,7

- 23,1

- 16,3

5,0

0,4

395,2

389,6

- 39,1

CP

429,6

1,5

- 24,0

- 16,3

5,0

0,4

396,1

390,7

- 38,9

Total mission

AE

660,8

21,9

- 50,2

- 14,3

4,6

30,4

652,9

598,2

- 62,6

CP

704,6

27,9

- 63,6

- 14,3

4,6

25,4

684,4

650,0

- 54,6

Source : commission des finances du Sénat (d'après le rapport annuel de performances de la mission « Politique des territoires » annexé au projet de loi de règlement et d'approbation des comptes pour 2016)

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS SUR LES PROGRAMMES 112 « IMPULSION ET COORDINATION DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE » ET 162 « INTERVENTIONS TERRITORIALES DE L'ÉTAT » (RAPPORTEUR SPÉCIAL : BERNARD DELCROS)

1. Des restes-à-payer en diminution de près de 8 % en moyenne, par rapport à 2015

Le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » (PICPAT) comprend majoritairement des dépenses d'intervention contractualisées ou versées sur plusieurs années : contrats de plan État-région (CPER), prime d'aménagement du territoire (PAT), pôles d'excellence rurale ou autres projets d'investissement financés par le Fonds national d'aménagement. Dès lors, 78 % des crédits de paiement du programme consommés en 2016 (157,7 millions d'euros) ont porté sur des engagements antérieurs à 2016, dont 22 % (45 millions d'euros) sur des engagements de l'année 2015.

Ainsi que le confirme le compte général de l'État 2016, les restes à payer continuent de se résorber régulièrement , à l'exception de ceux concernant le PEI en Corse sur le programme 162 « Interventions territoriales de l'État ». S'agissant du programme 112, les engagements non couverts par des paiements s'élevaient à 409 millions d'euros fin 2016, en diminution de 11 % par rapport à 2015 .

Évolution des restes à payer des programmes 112 et 162

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

Écart 2016/2015

Programme 112

589,6

591,6

549,8

461,5

408,8

- 11,4 %

Programme 162

261,1

259,0

235,9

209,1

211,5

0,3 %

Total

850,7

850,6

785,7

670,6

618,5

- 7,8 %

Source : commission des finances du Sénat (à partir des rapports annuels de performances pour 2013 à 2015)

S'agissant du programme 112, les principaux dispositifs concernés par des restes à payer fin 2016 sont les CPER (216,5 millions d'euros) et la PAT (99 millions d'euros) dont l'échéancier de paiement s'étend en moyenne sur une période de six ans. Il convient également de noter l'existence de 34,7 millions d'euros d'engagements non couverts par des paiements au titre des pôles d'excellence rurale alors même que les projets, sélectionnés en 2010 et 2011, sont pour la plupart achevés.

2. Une gestion perturbée par les « surgels » et les annulations de crédit par décrets d'avance

Comme en 2015, les programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » (PICPAT) et 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE) ont fait l'objet de « surgels » importants, venus s'ajouter à la réserve de précaution initiale , limitant ainsi fortement les ressources disponibles :

- s'agissant du PICPAT, la mise en réserve initiale (14,7 millions d'euros en AE et 17,8 millions d'euros en CP hors crédits de titre 2) a été complétée par des surgels - notamment sur les reports de crédits - de 11,6 millions d'euros en AE et de 6,5 millions d'euros en CP ;

- la réserve de précaution initiale du PITE (1,8 million d'euros en AE et 2 millions d'euros en CP) a quant à elle été abondée par des surgels à hauteur de 8,3 millions d'euros en AE et 13,6 millions d'euros en CP.

Seulement 40 % de la réserve de précaution a fait l'objet d'un « dégel » pour le PICPAT, tandis que la totalité de la mise en réserve initiale du PITE a été annulée, portant ainsi la proportion de crédits annulés par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale à un niveau très élevé : 12 % pour le PICPAT en AE comme en CP et 38 % des CP ouverts pour le PITE. Ainsi que le révèle l'analyse des mesures mises en place par le responsable de programmes, ces annulations n'ont été possibles qu'au prix d'ajustements de l'échéancier des CPER ou d'autres mesures conduisant à différer des paiements, par exemple pour les pôles d'excellence rurale 218 ( * ) .

Comme l'a souligné le rapporteur général, Albéric de Montgolfier, à l'occasion de l'examen des décrets d'avance de l'année 2016, ces gels et surgels importants conduisent à « fausser » l'autorisation budgétaire initiale, tandis que les annulations ne correspondent généralement pas à de véritables mesures d'économie . En outre, cette politique de régulation budgétaire risque d'avoir un effet dommageable sur l'efficacité des dispositifs, en ralentissant le rythme de mise en oeuvre des projets.

3. Deux ans après la création du CGET : des dépenses de fonctionnement stables et de personnel en légère baisse

L'année 2016 est la deuxième année pleine d'existence du CGET, dont les dépenses de personnel et de fonctionnement sont portées par le programme 112.

Comme en 2015, on observe une sous-exécution du plafond d'emplois et des dépenses de personnel prévues en loi de finances initiale pour 2016. Fin 2016, le CGET comptait 276 équivalents temps plein travaillé (ETPT) , dont 175 contractuels, soit une baisse de 3 ETPT par rapport au plafond fixé en loi de finances initiale et de 13 ETPT par rapport à l'exécution 2015. Les dépenses de personnel (titre 2) s'établissent à 19,5 millions d'euros , ce qui correspond à une sous-exécution de près de 15 % par rapport à la prévision initiale et à une diminution de 6 % par rapport à l'exécution 2015. Cet écart s'explique, d'une part, par la sous-exécution du schéma d'emploi - le solde des entrées et des sorties étant de - 11 ETP au lieu de - 9 ETP - et, d'autre part, par une surestimation initiale des dépenses d'indemnités de départ ou de licenciement ou de remboursement de mises à disposition.

Les dépenses de fonctionnement courant (environ 3 millions d'euros en AE et CP) et les dépenses immobilières du CGET (0,9 million d'euros en AE et 4,1 million d'euros en CP) sont demeurées stables par rapport à 2015. Des économies sont attendues sur ces postes de dépense dans les années à venir grâce au déménagement du CGET en 2017 de Saint-Denis vers le site de Ségur-Fontenoy, sur lequel les services du Premier ministre seront regroupés.

4. Zones de revitalisation rurale : des dépenses fiscale dynamiques

Sur les vingt dépenses fiscales rattachées au programme 112, représentant un montant total de 422 millions d'euros, les dispositifs d'exonération d'impôt sur les bénéfices pour les entreprises implantées dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) et dans les zones d'aide à finalité régionale (AFR) sont parmi les plus dynamiques.

En particulier, la mesure d'exonération d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés pour les entreprises créées ou reprises dans les ZRR 219 ( * ) , prolongée fin 2015, progresse de 5 millions d'euros entre 2015 et 2016 . Son coût total est estimé à 33 millions d'euros. D'après le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2017, une nouvelle hausse de 5 millions d'euros est attendue en 2017, en raison de l'entrée d'une nouvelle génération d'entreprises dans le dispositif.

La réforme du dispositif des ZRR et des critères de zonage, entrée en vigueur le 1 er juillet 2017 220 ( * ) , devrait également entraîner une légère hausse de la dépense fiscale.

5. Le plan exceptionnel d'investissements (PEI) en faveur de la Corse : l'accumulation des retards sur le volet « transport »

Contrairement aux autres actions du PITE, pour lesquelles le niveau de consommation des crédits est très proche de la prévision initiale, voire supérieur pour l'action 2 « Eau et agriculture en Bretagne » en raison de la recrudescence du phénomène des algues vertes, le taux de consommation des crédits au titre du PEI en Corse est de seulement 60 % des crédits initialement prévus .

Les annulations de crédits reportés, à hauteur de 5,6 millions d'euros, ainsi que le surgel des reports en fin de gestion ont particulièrement freiné la consommation des crédits de paiement. De plus, le rattachement tardif des fonds de concours en provenance de l'Agence de financement des infrastructures de transport (AFITF) ainsi que les « difficultés rencontrées avec les maîtres d'ouvrages » 221 ( * ) ont empêché l'engagement de nombreux projets en matière d'infrastructures de transport , conduisant ainsi au report de 19,2 millions d'euros sur le volet « transport » du plan d'investissement.

Alors que le plan d'investissement a déjà été prolongé par la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRE) 222 ( * ) , l'accumulation des retards est inquiétant. Ainsi, les engagements non couverts par des paiements du PITE ont légèrement progressé en 2016, pour s'établir à 211 millions d'euros.

III. PRINCIPALES OBSERVATIONS SUR LE PROGRAMME 147 « POLITIQUE DE LA VILLE » (RAPPORTEUR SPECIAL : DANIEL RAOUL)

1. Une dépense stable concernant les actions mise en place dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville malgré une exécution globale du programme en apparent recul

L'année 2016 du programme 147 « Politique de la ville » enregistre un taux d'exécution de 91 % en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, correspondant à des dépenses en baisse de respectivement 4,7 % et 4,6 % par rapport à 2015.

L' action 01 « Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville » maintient toutefois une consommation proche de l'année précédente (- 0,65 % en autorisations d'engagement et - 0,5 % en crédits de paiement). Correspondant à 80 % de l'enveloppe du programme, elle regroupe ainsi les crédits spécifiques destinés aux quartiers prioritaires de la politique de la ville et mobilisés dans le cadre des nouveaux contrats de ville, en complément des crédits de droit commun des autres ministères.

Comme cela sera développé infra , la mobilisation disponible de la trésorerie de l'Agence de services et de paiement (ASP) pour le financement du dispositif « adultes-relais » a également permis de limiter l'exécution budgétaire sur cette action 223 ( * ) .

Exécution des crédits du programme 147 « Politique de la ville » en 2016

(en euros)

Exécution
2015

Exécution
2016

Évolution
2015-2016

Loi de finances initiale
2016*

Taux de consommation
par rapport
à la prévision

Action 01
Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville

AE

303 210 136

301 249 019

- 0,65 %

338 672 750

88,95 %

CP

303 046 756

301 543 906

- 0,50 %

338 672 750

89,04 %

Action 02
Revitalisation économique et emploi

AE

92 802 754

64 771 306

- 30,21 %

57 638 123

112,38 %

CP

92 802 754

67 061 306

- 27,74 %

57 638 123

116,35 %

Action 03
Stratégie, ressources et évaluation

AE

13 002 401

23 188 765

78,34 %

32 359 910

71,66 %

CP

12 580 254

20 645 344

64,11 %

32 359 910

63,80 %

Action 04
Rénovation urbaine et amélioration du cadre de la vie

AE

0

399 889

ns

36 000

ns

CP

907 571

1 445 853

59,31 %

916 000

157,84 %

Total programme 147

AE

409 015 291

389 608 979

- 4,74 %

428 706 783

90,88 %

CP

409 337 335

390 696 409

- 4,55 %

429 586 783

90,95 %

* Y compris fonds de concours et attribution de produits.

ns = non significatif.

Source : commission des finances du Sénat d'après le rapport annuel de performances pour 2016

La différence d'exécution d'une année à l'autre sur l'ensemble du programme s'explique principalement, comme entre 2014 et 2015, par l'extinction progressive du dispositif d'exonération de charges sociales dans les zones franches urbaines (ZFU) , votée en loi de finances initiale pour 2015. Ces exonérations étant compensées par l'État aux caisses de sécurité sociale, le fait qu'elles ne bénéficient plus qu'aux entreprises déjà entrées dans le dispositif diminue mécaniquement la consommation des crédits budgétaires prévus à cet effet au sein de l'action 02 « Revitalisation économique et emploi ».

Toutefois, la baisse engendrée par l'extinction de ce dispositif n'a pas été aussi importante que prévu, avec un remboursement des exonérations ayant finalement atteint 42,1 millions d'euros, pour une enveloppe initiale de 31,6 millions d'euros (et avec une dépense totale pour 2016 établie à 58,4 millions d'euros). En effet, les dépenses ont finalement été revues à la hausse par les caisses de sécurité sociale au cours de l'année 2016, conduisant même à ouvrir 5 millions d'euros (AE=CP) en loi de finances rectificative de fin d'année.

L' action 04 « Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie » connaît une exécution importante au regard de la prévision initiale et de l'exécution 2015 en raison de plusieurs opérations :

- le dernier versement de l'État à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) des crédits de paiement consacrés à l'opération « collèges dégradés » (697 000 euros) et, parallèlement, le retrait d'engagement à hauteur de 249 000 euros pour un ajustement aux besoins réels ;

- la compensation par le CGET de 9 emplois de l'ANRU mobilisés au titre du programme d'investissements d'avenir (PIA), pour 649 000 euros (financé par un décret de transfert de 2015 trop tardif pour être pris en compte la bonne année) ;

- le versement de 99 600 euros permettant l'apurement de dettes pour des opérations réalisées dans le cadre de l'ancien Fonds d'intervention pour la ville (FIV) et des grands projets de ville (GPV).

La sous-consommation apparente des dépenses de personnel (6,8 %) par rapport à la prévision initiale s'explique, comme chaque année, par le fait qu'elles sont principalement destinées à rembourser d'autres programmes (par transfert, virement voire mouvement de fongibilité asymétrique technique). En effet, le titre 2 du programme 147 concerne uniquement les dispositifs des délégués du préfet, lesquels sont mis à disposition par d'autres ministères, et, depuis 2016, des délégués du gouvernement 224 ( * ) . Seul 1,5 million d'euros a donc été consommé en 2016 en dépenses de personnel à proprement parler, correspondant aux primes spécifiques qui sont versées aux délégués du préfet ainsi qu'à un emploi de délégué du gouvernement directement pris en charge par le présent programme.

Écart entre prévision et exécution des crédits de paiement par titre du programme

Source : commission des finances du Sénat d'après le rapport annuel de performances de la mission « Politique des territoires », annexé au projet de loi de règlement et d'approbation des comptes pour 2016

En mai 2016, un dégel de crédits à hauteur de 31,5 millions d'euros (AE=CP) a été opéré pour le financement de mesures décidées dans le cadre des comités interministériels à l'égalité et à la citoyenneté (CIEC) organisés en 2015 et en 2016, pour une mise en réserve initiale de 31,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 31,8 millions d'euros en crédits de paiement.

Ensuite, les décrets d'avance du 2 juin 2016, du 3 octobre 2016 et du 2 décembre 2015 ont annulé des crédits pour un montant total de 23,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 24,7 millions d'euros en crédits de paiement 225 ( * ) .

Mouvements de crédits opérés au cours de l'année 2016 sur le programme 147

(en milliers d'euros)

Crédits en LFI

Reports entrants

Décrets d'avance

Virements ou transferts

Fonds de concours

LFR

Crédits ouverts

Crédits consommés

Écart consommé/ prévu en LFI

AE

428 707

649

- 23 124

- 16 338

350

5 000

395 244

389 609

39 098

CP

429 587

1 449

- 23 994

- 16 338

350

5 000

396 054

390 696

38 890

Source : commission des finances du Sénat d'après le rapport annuel de performances de la mission « Politique des territoires », annexé au projet de loi de règlement et d'approbation des comptes pour 2016

L'année 2016 a également été marquée par la dissolution de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé) , compte tenu de la mise en place du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) et après que les circuits de paiement et de comptabilité ont été sécurisés au cours de l'année 2015. Il existe désormais un budget opérationnel de programme (BOP) national complété d'unités opérationnelles dans chacun des départements.

2. La mobilisation de l'importante trésorerie dont disposait l'ASP pour la gestion du dispositif « adultes-relais »

Dans le cadre des mouvements réglementaires, le Gouvernement a pu annuler des crédits inscrits sur le présent programme à l'occasion de deux décrets d'avance du 2 juin et du 3 octobre 2016, compte tenu des perspectives d'exécution du programme mais aussi de la mobilisation prioritaire de la trésorerie de l'agence de services et de paiement (ASP) pour la mise en oeuvre du dispositif « adulte-relais ».

En effet, comme votre rapporteur spécial avait eu l'occasion de le mettre en évidence à l'occasion de son contrôle budgétaire relatif à ce dispositif 226 ( * ) , des « réserves de financement » s'étaient constituées, au fur et à mesure des ans, au niveau à la fois de l'ACSé et de la trésorerie de l'ASP , en raison notamment du taux de vacance constaté sur les postes d'adultes-relais au cours des derniers exercices.

Évolution du solde de trésorerie de l'ASP en fin d'année au titre du dispositif « adultes-relais »

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du CGET et le rapport annuel de performances pour 2016

Tout en comprenant la souplesse de gestion permise par ces mécanismes, notamment en début d'exercice, votre rapporteur spécial avait relevé le manque de lisibilité financière du dispositif et constaté que les crédits budgétaires votés chaque année avaient pu être surestimés compte tenu des « poches » existant par ailleurs à l'ACSé et à l'ASP.

Il avait ainsi notamment recommandé un suivi plus fin de l'exécution financière du dispositif ainsi que des emplois ouverts , afin notamment d'ajuster au mieux les crédits budgétaires nécessaires.

En tout état de cause, la suppression de l'ACSé et la reprise de la gestion du dispositif par le CGET via le logiciel Chorus devaient conduire à l'assèchement du solde de trésorerie de l'ASP et du fonds de roulement de l'ACSé. Cela a effectivement été réalisé par l'État au cours de l'année 2016 puisque la trésorerie de l'ASP est passée de près de 20 millions d'euros en 2015 à 1,4 million d'euros à fin 2016 .

Avec la réduction de ces réserves de financement, il appartiendra à l'État de suivre avec attention l'enveloppe nécessaire pour la bonne mise en oeuvre du dispositif « adultes-relais », le rapport d'information de votre rapporteur spécial ayant, par ailleurs, mis en évidence tout l'intérêt de le préserver.

Les cinq recommandations formulées par le rapporteur spécial dans le cadre de son rapport d'information relatif au dispositif « adultes-relais »

Recommandation n° 1 : Maintenir un montant significatif d'aide pour préserver l'attractivité du dispositif pour les employeurs.

Recommandation n° 2 : Afin d'encourager les recrutements de postes d'adultes-relais, développer les dérogations au cas par cas concernant le respect du critère géographique de résidence dans un quartier prioritaire de la ville (QPV) , d'autant que le resserrement de la géographie prioritaire a pu réduire le périmètre potentiel des recrutements.

Recommandation n° 3 : Suivre plus finement l'exécution du dispositif et des emplois , ce qui permettrait d'ajuster au mieux les crédits budgétaires du programme en loi de finances initiale.

Recommandation n° 4 : Afin de favoriser le recrutement et de prévenir toute forme de précarisation de ces postes d'adultes-relais, encourager des co-financements pérennes, de partenaires privés ou publics, notamment de l'éducation nationale s'agissant de la médiation scolaire, en veillant à ne pas démultiplier les financeurs pour un même poste.

Recommandation n° 5 : Garantir aux adultes-relais un vrai parcours de formation, afin que les adultes-relais soient efficaces dans leur poste et s'insèrent au mieux professionnellement. Plusieurs pistes méritent d'être étudiées :

- l'augmentation du montant des crédits budgétaires alloués à la formation qui pourrait passer par un rééquilibrage entre l'enveloppe dédiée aux postes d'adultes-relais et celle prévue pour le plan de professionnalisation ;

- le renforcement de l'obligation de formation et de son suivi par l'État, afin de responsabiliser les employeurs et veiller à une meilleure information des adultes-relais quant à leurs droits en matière de formation. Le respect de cette obligation devrait être attentivement étudié et pris en compte dans la décision de renouvellement de la convention ;

- le recensement de formations de médiation sociale à l'Inventaire des certifications et des habilitations de la Commission nationale de la certification professionnelle, permettant une reconnaissance officielle des compétences et une prise en charge facilitée par les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA).

Source : rapport d'information n° 128 (2016-2017) du 17 novembre 2016 de Daniel Raoul, « Le contrat adultes-relais, un dispositif de la politique de la ville à préserver »

3. Le rattachement à la mission de dépenses fiscales plus élevées que les crédits budgétaires

Quatorze dépenses fiscales sont rattachées au programme 147 et représentent plus de 450 millions d'euros en 2016, correspondant désormais à un montant supérieur à celui des crédits budgétaires alloués à la politique de la ville.

Évolution des crédits de paiement et des dépenses fiscales

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Cinq dépenses fiscales sont supérieures à 10 millions d'euros en 2016 et représentent la quasi-totalité du coût constaté.

Les exonérations d'impôt et de cotisation applicables aux entreprises implantées en ZFU enregistrent une dépense légèrement en-deçà de la prévision, y compris pour celles qui ne sont pas en cours d'extinction.

En revanche, les dépenses fiscales en faveur de la construction de logements paraissent particulièrement dynamiques, avec notamment 137 millions d'euros pour la TVA à 5,5 % pour les logements en accession sociale à la propriété construits dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (+ 30 % par rapport à la prévision initiale).

Évolution des cinq dépenses fiscales supérieures à 10 millions d'euros

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

4. Le financement sécurisé de l'ANRU après le vote d'un budget rectificatif et un abondement supplémentaire d'Action logement

Le budget de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) avait initialement été fixé à 951,1 millions d'euros de dépenses en crédits de paiement, avec 887,9 millions d'euros de recettes principalement issues de la contribution d'Action logement (850 millions d'euros) et, en complément, un prélèvement sur la trésorerie estimé à 63,2 millions d'euros.

Toutefois, en cours d'année, des besoins supplémentaires ont été constatés en termes de décaissements au titre du programme national de rénovation urbaine (PNRU) et le conseil d'administration de l'ANRU a voté, le 10 juin 2016, un budget rectificatif prévoyant en particulier de porter la contribution d'Action logement à 910 millions d'euros, les 60 millions d'euros mobilisés étant issus de la réserve de 100 millions d'euros qui avait été prévue dans la convention conclue entre l'État, l'ANRU et l'UESL-Action logement le 2 octobre 2015 227 ( * ) . Par ailleurs, la trésorerie de l'agence devait être mise à contribution pour les 132 millions d'euros restant non couverts.

Finalement, avec 1 037,5 millions d'euros, les dépenses constatées à la fin de l'année 2016 ont été moins élevées que prévues dans le budget rectificatif (- 40 millions d'euros). Aucune dépense n'est ainsi enregistrée au titre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) alors que 20 millions d'euros étaient initialement prévus. Ce nouveau programme n'avait, en effet, pas commencé à être exécuté, les protocoles de préfiguration étant en cours d'élaboration.

Par ailleurs, le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD) n'a consommé que 7,6 millions d'euros sur les 25 millions d'euros initialement prévus (et 9 millions d'euros sur les 25 millions d'euros d'autorisations d'engagement). Le rapport annuel de performances indique d'ailleurs qu'un bilan est actuellement réalisé par l'ANRU afin d'identifier les difficultés opérationnelles auxquelles elle doit faire face.

D'après les informations recueillies auprès de l'ANRU, 25 projets ont été lancés, correspondant à un engagement de 55 % de la dotation initialement prévue et à 21 % de décaissements, sept ans après la création du programme. Seuls 8 projets auraient ainsi un avancement opérationnel satisfaisant tandis que 8 autres rencontreraient des difficultés opérationnelles créant d'importants retards et conduisant jusqu'à des blocages qui font douter de leur faisabilité. Deux projets seraient par ailleurs en cours de réorientation.

Le PNRU enregistre en cumulé des dépenses d'intervention représentant 9,737 milliards d'euros, correspondant à 83 % des engagements à fin 2016 (contre 74 % à fin 2015).

Au regard du niveau des ressources finalement établi à 948 millions d'euros, le prélèvement sur la trésorerie de l'ANRU s'est élevé à 109 millions d'euros . Même s'il est moins élevé qu'attendu, il poursuit toutefois la tendance constatée chaque année à la réduction des marges de manoeuvre financière de l'agence, le niveau de trésorerie atteignant 81,5 millions d'euros .

Le fonds de roulement de l'agence connaît pour sa part une variation positive de 120 millions d'euros.

Évolution du niveau de trésorerie de l'ANRU

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires et les données de l'ANRU

Le précédent gouvernement a augmenté d'un milliard d'euros l'enveloppe du NPNRU, la passant ainsi de 5 à 6 milliards d'euros dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2017. En principe financé par des crédits budgétaires, seuls 100 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 15 millions d'euros de crédits de paiement ont été inscrits.

Depuis, le nouveau gouvernement constitué en juin 2017 a annoncé vouloir porter ce même programme à 10 milliards d'euros. Il conviendra, en conséquence, de trouver les financements nécessaires.

MISSION « POUVOIRS PUBLICS » - MME MICHÈLE ANDRÉ, RAPPORTEURE SPÉCIALE

En application de l'article 7 de la loi organique relative aux lois de finances 228 ( * ) , « une mission spécifique regroupe les crédits des pouvoirs publics ». Il s'agit des crédits relevant du 1° du I de l'article 5 de la même loi, dits crédits de titre 1, actuellement destinés au financement de la Présidence de la République, de l'Assemblée nationale et du Sénat - ainsi que des chaînes parlementaires -, du Conseil constitutionnel, de même que de la Cour de justice de la République. La spécificité de ces crédits se justifie au regard des principes de séparation des pouvoirs et d'autonomie des pouvoirs publics constitutionnels. À cet égard, dans sa décision du 25 juillet 2001, le juge constitutionnel avait souligné que ce dispositif devait assurer « la sauvegarde du principe d'autonomie financière des pouvoirs publics concernés, lequel relève du respect de la séparation des pouvoirs » 229 ( * ) .

Récapitulation des crédits par dotation

(en euros)

Source : annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de règlement pour 2015, calculs de la commission des finances du Sénat

Les dépenses des pouvoirs publics s'illustrent à nouveau en 2016 par la grande stabilité, puisque - comme en 2015 - elles s'établissent à un niveau inférieur de 0,03 % à celui de l'année précédente. Le montant alloué aux chaînes parlementaire n'a pas progressé entre 2015 et 2016.

I. LA PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE

La dotation à la présidence de la République a été stabilisée à hauteur de 100 millions d'euros en 2016. Elle a été intégralement consommée, les charges totales de la présidence s'élevant à 101,6 millions d'euros (soit, du fait de l'augmentation des frais de transport liée aux déplacements du Président de la République, un retour au niveau de 2013, après deux exercices durant lesquels les dépenses avaient été inférieures à 100 millions d'euros).

La différence entre le montant total des dépenses et celui de la dotation de l'État a été financée par des ressources propres.

Le rapport annuel de performances de la mission précise que, au terme de la mandature, le précédent président de la République a décidé de reverser au budget de l'État une part significative des réserves qui ont été constituées au cours des cinq années de son mandat, soit 10 millions d'euros.

II. LES ASSEMBLÉES PARLEMENTAIRES

Le projet de loi de finances pour 2016 prévoyait à nouveau, pour 2016, la stabilité en valeur des dotations de l'État, qui ont été reconduites à leur niveau des années antérieures (517,9 millions d'euros pour l'Assemblée nationale ; 323,6 millions d'euros pour le Sénat).

À l'Assemblée nationale, le montant total des dépenses de 2016 s'établit à 524,27 millions d'euros, soit 12,45 millions d'euros de moins que la prévision initiale, en diminution de 0,17 % par rapport à 2015.

Extrait du rapport du collège des Questeurs à la commission spéciale chargée de vérifier et d'apurer les comptes de l'Assemblée nationale

En 2016, l'exécution du budget de l'Assemblée s'est traduite par un déficit limité à 1,14 million d'euros (contre 2,50 millions d'euros en 2015), dans un contexte d'activité parlementaire modérée (943 heures et 40 minutes de séance en 2016, contre 1 133 heures et 20 minutes en 2015).

Ce résultat s'inscrit dans un environnement caractérisé par une stabilité globale des ressources disponibles au cours de l'exercice : le montant de la dotation reçue de l'État n'a pas évolué et les recettes diverses résultant de la vente de marchandises, des produits de gestion courante ou des produits exceptionnels ne représentent que 1 % de ces ressources.

Le léger déficit constaté en 2016 résulte ainsi de la progression des dépenses d'investissement, alors que les dépenses de fonctionnement ont été contenues.

Les dépenses d'investissement (+ 4,91 %) ont permis notamment de restructurer en profondeur le réseau de transmission des images télévisées de l'Assemblée, d'achever la rénovation et l'agrandissement de l'accueil du 128 rue de l'Université ou encore de moderniser l'éclairage de l'Hémicycle. Parallèlement, de nombreux projets menés dans le cadre du schéma directeur informatique 2013-2015 se sont achevés et des projets nouveaux ont été lancés.

Les dépenses de fonctionnement ont été réduites (- 0,35 %) : compte tenu d'un taux d'inflation annuel moyen de 0,2 % en 2016, la diminution en volume est même de 0,55 %.

Les actions entreprises en faveur d'une meilleure maîtrise de ces dépenses, poursuivies au fil des ans (développement des transmissions numérisées, diminution des effectifs des fonctionnaires, etc.), portent ainsi leurs fruits, de sorte qu'elles sont aujourd'hui, au terme de la présente législature, inférieures de près de 1 % à ce qu'elles étaient au terme de la législature précédente.

Les dépenses totales du Sénat se sont établies en 2016 à 324,9 millions d'euros, contre 333,4 millions d'euros en 2015. Hors dépenses liées au Jardin du Luxembourg et au Musée, les dépenses se sont établies à 312,9 millions d'euros contre 321 millions d'euros en 2015.

Extrait du rapport de la commission spéciale chargée d'apurer les comptes du Sénat, sur les comptes du Sénat de l'exercice 2016

DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT CONTENUES EN DÉPIT DE L'AUGMENTATION DU POINT DE LA FONCTION PUBLIQUE

L'exercice budgétaire pour 2016 se caractérise en premier lieu par une stabilité des dépenses de fonctionnement engagées par le Sénat, qui s'établissent à 317 millions d'euros contre 316,4 millions d'euros en 2015.

Ce montant, quasi identique à celui constaté en 2015, doit être analysé au regard des effets conjugués de la hausse de l'inflation et de l'annonce par le Gouvernement de la revalorisation de 0,6 %, au 1 er juillet 2016, du point d'indice de la fonction publique.

Cette stabilité des dépenses de fonctionnement traduit donc, dans les faits, la poursuite des efforts de gestion entrepris au cours des cinq dernières années par les autorités du Sénat dans un environnement caractérisé par la stabilité des ressources disponibles.

UN RALENTISSEMENT TEMPORAIRE DES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT

L'exercice 2016 a par ailleurs été marqué par un ralentissement temporaire des dépenses d'investissement au regard des montants engagés les années précédentes, qui s'établissent à 7,9 millions d'euros sur l'exercice, contre 17 millions d'euros en 2015.

Il convient toutefois d'indiquer que cette pause prélude au lancement d'un programme de travaux sans précédent au printemps 2017, comprenant la rénovation des bâtiments situés au 26 et 36 rue de Vaugirard, la construction d'un restaurant en libre-service, l'extension de l'Orangerie Auguste Comte et l'achèvement de la transformation de l'ancienne Chapelle de la Chambre des Pairs en salle de réunion.

Dans cette attente, les investissements réalisés au cours de l'exercice 2016 ont permis de financer la poursuite de la mise aux normes des installations électriques vieillissantes du Palais du Luxembourg et de certaines de ses dépendances, l'achèvement des travaux de rénovation du chauffage des serres du Jardin du Luxembourg ainsi que les travaux d'installation d'une grille de protection autour des façades Sud, Est et Ouest du Palais, destinés à sécuriser la partie du Palais donnant sur le Jardin.

UNE DOTATION INTÉGRALEMENT CONSOMMÉE

Au total, investissement et fonctionnement cumulés, les dépenses du Sénat au cours de l'exercice 2016 se sont élevées à 324,89 millions d'euros, conduisant à consommer l'intégralité de la dotation attribuée par l'État (323,58 millions d'euros), gelée en euros courants pour la quatrième année consécutive après sa baisse de 1,2 % en 2012.

Les 1,3 million d'euros de dépenses non couverts par cette dotation ont été intégralement financés par les produits budgétaires. Ces derniers, qui s'établissent à 6,9 millions d'euros, permettent de dégager un solde positif et d'améliorer le fonds de roulement de l'institution après deux années de dégradation consécutive.

Au cours de la période 2011 - 2016, l'évolution du solde budgétaire, c'est-à-dire le prélèvement opéré sur les disponibilités, s'explique ainsi par la maîtrise continue des dépenses de fonctionnement et le caractère cyclique des investissements.

III. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET LA COUR DE JUSTICE DE LA RÉPUBLIQUE

La dotation de l'État au Conseil constitutionnel a été inférieure de 2,65 % à celle versée en 2015 (9,9 millions d'euros contre 10,2 millions d'euros).

Les dépenses du Conseil constitutionnel ont cependant excédé le montant de la dotation versée par l'État, en raison de recrutements anticipés et du financement de travaux à partir du fonds de roulement, conduisant à un résultat déficitaire de 0,7 million d'euros.

La Cour de Justice de la République a reçu une dotation de 861 500 euros et a dépensé 741 384 euros. Elle a donc reversé au budget de l'État 120 115 euros en avril 2017.

MISSION « RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR »

MM. PHILIPPE ADNOT ET MICHEL BERSON, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

Globalement, les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » ont fait l'objet d'une consommation relativement proche de la prévision initiale , avec un taux d'exécution de 99,5 % en autorisations d'engagement et de 98 % en crédits de paiement , pour atteindre respectivement 26,3 milliards d'euros et 26,1 milliards d'euros .

Entre 2015 et 2016, les dépenses constatées sur la mission sont, en apparence, en hausse de respectivement 2 % en autorisations d'engagement et 0,3 % en crédits de paiement.

Toutefois, une mesure de périmètre votée par amendement en loi de finances initiale pour 2016 a augmenté les crédits inscrits au titre du programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables » de 321 millions d'euros , en y incluant désormais l'intégralité des financements permettant de couvrir les charges nucléaires de long terme du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) pour les installations de démantèlement et d'assainissement 230 ( * ) .

En neutralisant l'effet de cette mesure de périmètre , les crédits consommés entre 2015 et 2016 sur la mission connaissent une très légère hausse de 0,7 % en autorisations d'engagement et une baisse de près de 1 % en crédits de paiement .

Il convient par ailleurs de noter que, selon la Cour des comptes dans son rapport Le budget de l'État en 2016 , « la mission "Recherche et enseignement supérieur » enregistre un accroissement des charges à payer et factures non payées de 293 millions d'euros, correspondant pour 141 millions d'euros à des opérations immobilières des universités et pour 105 millions d'euros à la constitution de dettes vis-à-vis de l'ANR et des organismes de recherche ».

Exécution des crédits de la mission par programme en 2016 (y compris fonds de concours)

(en millions d'euros)

Intitulé du programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Écart exécution 2016 / exécution 2015

Écart exécution 2016 / LFI 2016

150

Formations supérieures et recherche universitaire

AE

12 636,8

13 022,1

12 945,5

2,44 %

- 0,59 %

CP

12 743,7

12 932,3

12 807,5

0,50 %

- 0,97 %

231

Vie étudiante

AE

2 548,3

2 544,4

2 577,0

1,13 %

1,28 %

CP

2 556,0

2 489,5

2 546,9

- 0,36 %

2,31 %

Total « Enseignement supérieur »

AE

15 185,1

15 566,5

15 522,5

2,22 %

- 0,28 %

CP

15 299,7

15 421,8

15 354,4

0,36 %

- 0,44 %

172

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

AE

6 198,2

6 244,3

6 274,1

1,22 %

0,48 %

CP

6 222,8

6 248,9

6 176,0

- 0,75 %

- 1,17 %

193

Recherche spatiale

AE

1 344,5

1 371,7

1 363,0

1,38 %

- 0,63 %

CP

1 354,3

1 371,7

1 363,0

0,64 %

- 0,63 %

190

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

AE

1 559,0

1 748,1

1 689,4

8,36 %

- 3,36 %

CP

1 589,1

1 994,1

1 665,3

4,80 %

- 16,49 %

192

Recherche et enseigne ment supérieur en matière économique et industrielle

AE

898,7

874,7

848,8

- 5,55 %

- 2,96 %

CP

923,3

929,8

909,4

- 1,51 %

- 2,19 %

191

Recherche duale

AE

183,7

180,1

172,3

- 6,21 %

- 4,33 %

CP

183,7

180,1

166,7

- 9,25 %

- 7,44 %

186

Recherche culturelle et culture scientifique

AE

112,0

122,8

117,7

5,09 %

- 4,15 %

CP

112,4

122,8

118,0

4,98 %

- 3,91 %

142

Enseignement supérieur et recherche agricole

AE

323,9

331,8

324,7

0,25 %

- 2,14 %

CP

320,7

330,9

324,0

1,03 %

- 2,09 %

Total « Recherche »

AE

10 619,9

10 873,5

10 790,1

1,60 %

- 0,77 %

CP

10 706,2

11 178,3

10 722,3

0,15 %

- 4,08 %

Total général

AE

25 805,2

26 440,0

26 312,6

1,97 %

- 0,48 %

CP

26 006,1

26 600,1

26 076,7

0,27 %

- 1,97 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Dans un contexte budgétaire particulièrement contraint, la mission « Recherche et enseignement supérieur » apparaît plutôt préservée .

Évolution des crédits de la mission entre 2012 et 2016

(en millions d'euros)

Nb : les montants en 2014 sont retraités pour ne pas tenir compte du deuxième programme d'investissements d'avenir (PIA 2).

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

Toutefois, ce constat concerne surtout les crédits des programmes « Enseignement supérieur » , avec des dépenses en hausse de 2,2 % en autorisations d'engagement et de 0,4 % en crédits de paiement par rapport à 2015 et une exécution quasi conforme à la prévision initiale.

Les programmes « Recherche » connaissent quant à eux une consommation davantage en retrait, notamment en termes de crédits de paiement, avec un taux d'exécution de 96 % et une dépense en baisse de près de 3 % par rapport à 2015 (après neutralisation de la mesure de périmètre mentionnée supra et concernant le financement de certaines charges du CEA). Les autorisations d'engagement sont proches de la prévision (99,2 %) mais en baisse de 1,4 % par rapport à 2015 (toujours à périmètre constant).

Reposant principalement sur l'activité des opérateurs de l'État, la mission « Recherche et enseignement supérieur » absorbe 75 % des subventions versées aux établissements publics nationaux (EPN) selon le Compte général de l'État, avec le versement de 19,8 milliards d'euros de subventions pour charges de service public.

Sur l'ensemble de la mission, les restes à payer s'établissent à 3,167 milliards d'euros, en hausse de 236 millions d'euros par rapport à 2015.

Au-delà des crédits budgétaires, 23 dépenses fiscales sont rattachées à la mission « Recherche et enseignement supérieur », dont 15 à titre principal, pour un coût de 10 milliards d'euros , correspondant à une hausse de 470 millions d'euros (soit près de 5 %) .

Cette évolution est essentiellement imputable au crédit d'impôt en faveur de la recherche (CIR) , qui représente plus de la moitié du montant total de la dépense fiscale enregistrée sur la mission et 86 % en tenant uniquement compte de celles rattachées à titre principal. En outre, le CIR progresse de 6,4 % entre 2015 et 2016 (326 millions d'euros).

Part du CIR parmi les dépenses fiscales rattachées à la mission à titre principal

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

En outre, d'autres crédits extrabudgétaires, issus des programmes d'investissements d'avenir (PIA), permettent de financer l'enseignement supérieur et la recherche.

Au 31 mars 2017, l'enseignement supérieur, la recherche et la formation bénéficiaient ainsi d'une enveloppe de 23,8 milliards d'euros au titre des PIA 1 et 2, dont 22,7 milliards d'euros engagés , 17,8 milliards d'euros contractualisés et 5,3 milliards d'euros décaissés .

Pour mémoire, un troisième programme d'investissement d'avenir (PIA 3) a été adopté dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2017. Faisant l'objet d'une nouvelle mission budgétaire « Investissements d'avenir », il est doté de 10 milliards d'euros d'autorisations d'engagement, dont 5,9 milliards d'euros en faveur de l'enseignement supérieur, de la recherche et de la valorisation de la recherche 231 ( * ) . Toutefois, aucun crédit de paiement n'a été inscrit en loi de finances.

Dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire 232 ( * ) , la Cour des comptes « renouvelle [son] constat d'une insuffisante consolidation de l'information financière en ce qui concerne les crédits extrabudgétaires du PIA attribués aux opérateurs de la MIRES » et appelle à une « vision plus précise des montants attribués et dépensés par les opérateurs ».

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL PHILIPPE ADNOT SUR LES PROGRAMMES « ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR »

1. Un soutien budgétaire confirmé pour l'enseignement supérieur

Avec 15,6 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 15,4 milliards d'euros en crédits de paiement , l'enveloppe budgétaire prévue pour l'enseignement supérieur en loi de finances initiale pour 2016 était en hausse de respectivement 2,1 % et 0,5 % par rapport à 2015.

En particulier, un amendement du Gouvernement intervenu en cours de navette avait prévu un abondement de 100 millions d'euros (AE=CP) sur le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », correspondant aux prélèvements sur fonds de roulement opérés l'année précédente sur certains établissements.

En exécution , les programmes consacrés à l'enseignement supérieur enregistrent un fort taux de consommation, avec 99,7 % en autorisations d'engagement et 99,6 % en crédits de paiement .

Les dépenses du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » progressent de 2,4 % entre 2015 et 2016 en autorisations d'engagement et de 0,5 % en crédits de paiement, mais restent dans l'enveloppe initiale (taux de consommation de respectivement 99,4 % et 99 %).

En revanche, comme cela sera développé dans la suite de la présente analyse, le programme 231 « Vie étudiante » enregistre une nouvelle année de sur-exécution (101,3 % en autorisations d'engagement et 102,3 % en crédits de paiement), correspondant à une dépense supérieure de 32 millions d'euros en autorisation d'engagement et 57 millions d'euros en crédits de paiement.

La dépense enregistrée sur le programme est également en hausse par rapport à 2015 en autorisations d'engagement (+ 1,1 %), tandis que les crédits de paiement sont en très légère baisse (- 0,4 %).

Consommation et évolution des crédits consacrés à l'enseignement supérieur au sein de la mission

(en millions d'euros)

Autorisations
d'engagement

Évolution 2015/2016

Crédits de paiement

Évolution 2015/2016

2015

2016

2015

2016

programme 150 - Formations supérieures et recherche universitaire

Prévision LFI*

12 732,0

13 022,1

2,3 %

12 829,8

12 932,3

0,8 %

Consommation

12 636,8

12 945,5

2,4 %

12 743,7

12 807,5

0,5 %

Taux de consommation

99,3 %

99,4 %

-

99,3 %

99,0 %

-

programme 231 -
Vie étudiante

Prévision LFI*

2 510,2

2 544,4

1,4 %

2 507,6

2 489,5

- 0,7 %

Consommation

2 548,3

2 577,0

1,1 %

2 556,0

2 546,9

- 0,4 %

Taux de consommation

101,5 %

101,3 %

-

101,9 %

102,3 %

-

TOTAL « ENSEIGNEMENT SUPERIEUR »

Prévision LFI*

15 242,20

15 566,55

2,1 %

15 337,40

15 421,75

0,5 %

Consommation

15 185,10

15 522,50

2,2 %

15 299,70

15 354,35

0,4 %

Taux de consommation

99,6 %

99,7 %

-

99,8 %

99,6 %

-

*Y compris fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP).

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Pour la période 2012-2016, les dépenses consacrées à l'enseignement supérieur ont progressé de 2,8 % en autorisations d'engagement et de 3,3 % en crédits de paiement .

Évolution des autorisations d'engagement consacrées à l'enseignement supérieur sur la période 2012-2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Évolution des crédits de paiement consacrés à l'enseignement supérieur sur la période 2012-2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Le programme 150 a pour particularité d'appliquer une mise en réserve forfaitaire aux crédits consacrés aux subventions pour charges de service public , lesquelles représentent 12 milliards d'euros (AE=CP), soit plus de 90 % des autorisations d'engagement et des crédits de paiement inscrits sur le programme (en loi de finances initiale et finalement consommés).

Ainsi, la mise en réserve pour ces subventions ne s'est élevée qu'à 70 millions d'euros (AE=CP) alors que, selon les calculs de la Cour des comptes 233 ( * ) , elle aurait dû s'élever à plus de 200 millions d'euros pour les seules subventions allouées aux universités (environ 10,5 milliards d'euros). Sur l'ensemble du programme, 228 millions d'euros d'autorisations d'engagement ont été gelés et 116 millions d'euros de crédits de paiement.

Au sujet de la réserve de précaution, la Cour des comptes critique, par ailleurs, des pratiques constatées sur les programmes 150 et 231, avec l'anticipation de dégels dès le début de l'année par les responsables de programme, notamment dans les documents prévisionnels de gestion. En outre, les notifications de subventions aux opérateurs du programme 150 contiennent les montants mis en réserve, indication qui, selon la Cour des comptes « tend, à tort, à indiquer aux établissements que les crédits réservés peuvent être pris en compte dans leurs prévisions d'exécution ».

Le programme 150 a tout de même contribué à l'équilibre général des dépenses de l'État en cours d'année , avec en particulier l'annulation de 85,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 73 millions d'euros en crédits de paiement dans le cadre des décrets d'avance. En tenant compte du programme 231, ces montants sont toutefois ramenés à 66,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 33,5 millions d'euros en crédits de paiement, au regard des ouvertures de crédits réalisés en cours d'année pour couvrir les dépenses d'aides directes.

Récapitulation de l'ensemble des mouvements de crédits opérés au sein des programmes 150 et 231 en 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du ministère du budget

Les restes à payer des programmes 150 et 231 progressent globalement de 168 millions d'euros :

- le programme 150 voit ses restes à payer progresser de 138 millions d'euros, en raison principalement de diverses opérations immobilières réalisées dans le cadre des CPER et de contrats de partenariats public-privé ;

- le programme 231 passe quant à lui de 21 à 51 millions d'euros de restes à payer, soit une hausse de 138 %.

La Cour des comptes indique dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire que la soutenabilité de la mission « Recherche et enseignement supérieur » reposera notamment sur l'évolution des engagements hors bilan liés au financement des constructions dans le cadre du plan « 40 000 logements », lesquels auraient augmenté de 1,1 milliard d'euros entre 2014 et 2015, « pour atteindre un niveau inégalé depuis 2010, de 2,3 milliards d'euros ».

Selon les chiffres publiés par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, 27 144 logements sociaux étudiants ont été livrés entre 2013 et 2016 et le nombre de 40 265 logements devrait être atteint à la fin de l'année 2017.

2. La récurrence d'une sous-consommation des plafonds d'emplois des opérateurs du programme 150, signe de prudence des établissements dans la gestion de leur masse salariale et de leur situation financière

Tandis que le précédent gouvernement a créé 5 000 emplois entre 2013 et 2017 au bénéfice de l'enseignement supérieur, à raison de 1 000 emplois par an (960 emplois sur le périmètre du programme 150 en 2016), il apparaît que les plafonds d'emplois des opérateurs du programme 150 restent largement sous-consommés, y compris en tenant compte des emplois hors plafonds.

Indépendamment d'éventuelles corrections de transferts réalisés en gestion au cours de l'année, il apparaît notamment que, tandis que le nombre d'équivalents temps plein travaillés (ETPT) sous plafond augmentait de 4 % entre 2013 et 2016 en lois de finances (initiale ou rectificative), en exécution il n'a connu qu'une hausse de 1,9 % (+ 6 478 ETPT sous plafond en lois de finances, contre + 2 847 ETPT sous plafond réalisés).

Évolution des emplois des opérateurs du programme 150

(en nombre d'ETPT)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

S'agissant des emplois hors plafond, la différence entre l'exécution et la prévision pour 2016 s'explique à la fois par le fait que 21 communautés d'universités et établissements (COMUE) ont désormais le statut d'opérateur du programme et par les moyens financiers par ailleurs obtenus par les établissements pour opérer des recrutements, notamment dans le cadre des actions du PIA.

Entre 2015 et 2016, l'écart entre la prévision et l'exécution en termes d'emplois (sous et hors plafond) pour les universités et établissements assimilés s'est creusé de 400 ETPT , passant de 8 571 à 8 974 emplois.

Comme l'indique le rapport annuel de performances, ce constat s'explique, au-delà du taux de vacance frictionnel qui ne peut être négligé, par la « politique prudente des ressources humaines adoptée par les établissements ». En effet, le principe d'autonomie des établissements passés aux « responsabilités et compétences élargies » (RCE) leur permet de procéder aux arbitrages nécessaires afin de gérer au mieux leur masse salariale et, plus globalement, leur situation financière .

Faisant face à des besoins toujours plus importants, notamment au regard du nombre croissant d'étudiants accueillis chaque année, les établissements d'enseignement supérieur ne font pas nécessairement le choix de recruter, ce qui peut sembler paradoxal mais constitue également le signe d'une gestion attentive de leurs budgets .

Concernant plus spécifiquement la création des 1 000 emplois par an entre 2013 et 2017 , l'enquête du ministère de l'enseignement supérieur auprès des établissements bénéficiaires fait état de 76 % des emplois notifiés et mis au recrutement pour la période 2013-2016. Près d' un quart des emplois budgétés n'ont donc pas été réellement créés .

52 % de ces recrutements concerneraient directement l'amélioration de la réussite étudiante en premier cycle, le reste consistant à « développer des projets spécifiques en matière d'entreprenariat et de formation continue ».

Par ailleurs, selon la Cour des comptes, sur 965 emplois relatifs à l'enseignement supérieur et à la recherche (hors enseignement supérieur agricole et enseignement supérieur culturel), 347 emplois ont été financés au titre de la politique de site : 170 directement aux COMUE et 177 aux établissements qui en sont membres.

3. Une nouvelle année de sur-exécution des crédits consacrés aux aides directes des étudiants du fait principalement de mesures nouvelles

Les aides directes des étudiants, dont les crédits sont regroupés au sein de l'action 01 « Aides directes » du programme 231 « Vie étudiante » dont elles représentent 85 % des crédits, engendrent une dépense de 2,18 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement en 2016, dont près de 2 milliards d'euros (AE=CP) pour les seules bourses sur critères sociaux.

Pour 2016, la consommation enregistrée sur cette action est supérieure de 60 millions d'euros à la prévision initiale et explique la sur-exécution des crédits constatée sur le programme 231.

Si une meilleure budgétisation des crédits consacrés aux aides sociales directes a été soulignée au cours des dernières années, il convient d'observer que, pour autant, l'exécution demeure chaque année supérieure à la prévision initiale.

Pour 2016, les besoins de crédits supplémentaires s'expliquent, tout d'abord, par le nombre plus important qu'attendu de bénéficiaires , avec un effectif de 670 663 boursiers sur critères sociaux au premier semestre 2016 et 690 236 à compter de la rentrée universitaire 2016-2017, contre respectivement 666 145 et 675 472 boursiers initialement prévus (soit une différence de 0,7 % et 2,2 %).

Ensuite, la dépense liée aux aides au mérite a également été plus élevée que prévue de près de 10 % (55,9 millions d'euros consommés pour une prévision initiale de 50,9 millions d'euros).

Enfin, deux mesures nouvelles ont été prises et ont engendré une consommation de crédits supplémentaires qui n'a pu être absorbée par la réserve de précaution. D'ailleurs, la Cour des comptes considère à ce titre que la « meilleure budgétisation des bourses [relevée au cours des dernières années] paraît [...] devoir être relativisée », considérant que « la réserve devrait précisément servir à financer des mesures nouvelles » 234 ( * ) .

En premier lieu, le Gouvernement a décidé de fusionner les deux premiers échelons 0 et 0 bis applicables pour les bourses sur critères sociaux à compter de la rentrée de l'année universitaire 2016-2017. Selon les données du rapport annuel de performances, l'échelon 0 concernaient ainsi près de 25 000 étudiants l'année précédente, lesquels ne percevaient alors aucune aide financière mais bénéficiaient d'une exonération de droits d'inscription et de sécurité sociale. Ces derniers relèvent désormais de l'échelon 0 bis qui compteraient au total près de 210 000 boursiers à la rentrée 2016 (contre 173 000 à la rentrée précédente), pour une aide annuelle de 1 009 euros.

En second lieu, le Gouvernement a surtout décidé de créer une nouvelle aide à la recherche du premier emploi (ARPE) , servie dès la rentrée de l'année universitaire 2016-2017 et pendant une période maximale de quatre mois, aux étudiants et apprentis diplômées à la recherche d'un premier emploi. Elle représente une dépense supplémentaire de 25 millions d'euros.

Indépendamment de l'opportunité des mesures prises, il appartient au Gouvernement de s'assurer également de la soutenabilité financière des politiques publiques qu'il met en place. En conséquence, une vigilance particulière doit être portée à toute nouvelle aide ou toute extension décidée dans le domaine des aides sociales directes des étudiants dont l'exécution s'avère déjà souvent très tendue.

En outre, aucune mesure forte ne semble avoir encore été prise pour renforcer le contrôle d'assiduité et de présence aux examens des étudiants boursiers , contrepartie pourtant essentielle au versement des aides financières. Comme votre rapporteur spécial avait notamment pu le mettre en évidence dans le cadre d'un rapport d'information sur ce thème, les dispositifs actuellement mis en place par certains établissements universitaires (et selon les filières) ne garantissent en rien que les bénéficiaires de ces aides poursuivent effectivement leurs études 235 ( * ) , créant aussi, par la même occasion, une inégalité de traitement entre les boursiers. Il avait formulé douze recommandations à l'issue de son contrôle budgétaire.

Évolution des dépenses d'intervention au titre des aides sociales directes accordées aux étudiants

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données budgétaires

4. Des réserves sur l'aide à la recherche du premier emploi (ARPE)

Comme indiqué supra , l'aide à la recherche du premier emploi (ARPE) a été instaurée à la rentrée 2016 par le précédent gouvernement. Elle a représenté une dépense supplémentaire de 25 millions d'euros pour 24 000 bénéficiaires.

Votre rapporteur spécial réitère les réserves qu'il a déjà précédemment formulées lors de l'examen de la loi de finances initiale pour 2017 concernant la création de cette aide au sein du programme 231 .

Tout d'abord, même si l'instruction des demandes et les paiements sont plus aisément réalisés par les CROUS qui connaissent déjà la population concernée, il ne s'agit pas à proprement parler d'une aide destinée aux étudiants puisqu'elle s'adresse à de jeunes diplômés et elle aurait probablement davantage sa place au sein de la mission « Travail et emploi ».

Ensuite, les contrôles prévus dans le cadre de la mise en oeuvre de cette aide semblent limités , tant à l'entrée du dispositif (simple déclaration sur l'honneur de la recherche d'emploi) que pendant la durée du versement de l'aide (quel contrôle sur la recherche effective d'emploi ?). En outre, la sortie du dispositif repose également sur la simple déclaration des bénéficiaires qui pourraient, dès lors, être tentés d'attendre la période des quatre mois à l'issue de laquelle l'aide s'arrête automatiquement.

Par ailleurs, partant pourtant de l' intention louable de répondre aux difficultés financières rencontrées par les jeunes diplômés qui voient leurs bourses s'arrêter, cette aide risque de créer un « effet d'aubaine » pour ceux qui seraient tentés de repousser leur recherche d'emploi .

Enfin, cette aide ne permet absolument pas de répondre efficacement au problème crucial du chômage des jeunes diplômés .

5. Des indicateurs rendant difficiles la mesure de la performance

De nombreuses critiques sont généralement formulées sur la mesure de la performance dans les documents budgétaires et la mission « Recherche et enseignement supérieur » n'y échappe pas.

Les programmes relatifs à l'enseignement supérieur comptent 9 objectifs, 23 indicateurs et 49 sous-indicateurs. Le rapport annuel de performances leur consacre 31 pages et pourtant, il est difficile d'appréhender, par eux-mêmes, la mesure de la performance de la politique gouvernementale en matière d'enseignement supérieur , en particulier pour le programme 150.

Tout d'abord, comme votre rapporteur spécial l'a déjà mis en évidence, un nombre important d'indicateurs et sous-indicateurs restent non renseignés pour l'année concernée : cela concerne la moitié des sous-indicateurs du programme 150 pour 2016.

Ensuite, d'autres indicateurs pourraient utilement renseigner sur l'efficacité de la politique gouvernementale en faveur de l'enseignement supérieur. Ainsi en est-il, comme le suggère également la Cour des comptes, de l'effectivité des créations d'emplois financées, pour lesquels il pourrait être pertinent de « mesurer où et dans quelles proportions [les] financements [attribués] donnent lieu à des créations d'emplois nouveaux » 236 ( * ) .

À ce titre, il pourrait être pertinent de prévoir, plus globalement, dans les projets et rapports annuels de performances, des indicateurs « temporaires » (sur quelques années), directement liés au suivi de la mise en oeuvre d'une politique développée par le gouvernement en place. Il est, par exemple, étonnant que les documents budgétaires ne fournissent pas non plus, de façon systématique, les données chiffrées relative au plan « 40 000 logements étudiants » depuis 2013.

Dans le cadre de son contrôle précité sur le maintien des droits des étudiants boursiers, votre rapporteur spécial avait aussi recommandé la création d'un indicateur de performance, au sein du programme 231 « Vie étudiante », dans l'objectif d'inciter les différents acteurs à développer un contrôle effectif de l'assiduité et de la présence aux examens. Par exemple, le temps nécessaire pour le retour des informations par les établissements d'enseignement supérieur ou encore le calcul du taux de retours obtenus des établissements par les CROUS à une certaine date pourraient être retenus.

Enfin, certains indicateurs mettent, au contraire, en évidence l'écart entre les moyens alloués et les résultats réellement obtenus. Par exemple, le taux d'obtention de la licence en trois ans s'élève à seulement 27,5 % en 2015 et ne progresse pas (2011 : 27,7 % ; 2012 : 26,6 % ; 2013 : 27,8 % ; 2014 : 27,2). Cela tient essentiellement à la forte proportion d'abandon des étudiants (un tiers environ en première année), renvoyant à la défaillance du système scolaire et universitaire en termes d'orientation.

De même, la part des étudiants inscrits dans l'enseignement supérieur et qui en sortent sans diplôme continue de progresser, pour atteindre 22 % en 2014 (donnée provisoire), contre 17 % en 2008, et alors que l'objectif pour 2016 reste établi à 16,8 %.

III. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL MICHEL BERSON SUR LES PROGRAMMES « RECHERCHE »

1. Une exécution qui a relativement préservé les crédits en faveur de la recherche votés par le Parlement, mais des fonds de concours en retrait par rapport aux estimations initiales

Dans un contexte de forte contrainte financière , le Gouvernement avait affiché sa volonté, lors du vote de la loi de finances pour 2016, de sanctuariser les crédits destinés à la recherche , l'investissement d'avenir par excellence.

Ainsi, la somme des crédits des programmes « Recherche » votés par le Parlement, hors programme d'investissements d'avenir, s'élevait à 10,7 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 10,8 millions d'euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse de 3,5 % en AE et de 1,2 % en CP par rapport aux crédits votés en loi de finances pour 2015.

En incluant les avances sur produits et les fonds de concours, les crédits prévus pour la recherche étaient censés atteindre 10,9 millions d'euros en AE et 11,2 milliards d'euros en CP.

Mais, comme le rappelle le compte général de l'État pour 2016 , cette hausse s'expliquait essentiellement par une évolution de périmètre du programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durable » , dont les crédits de l'action 15 ont doublé, passant de 369 à 740 millions d'euros (AE=CP) en raison du transfert en provenance du programme 731 « Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État » de crédits destinés à concourir à la couverture des charges nucléaires de long terme du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ainsi qu'au financement de ses opérations de démantèlement et d'assainissement .

En neutralisant cet effet, les crédits des programmes « Recherche » votés baissaient en réalité de - 1,8 % en AE et de - 1,7 % en CP par rapport à la loi de finances pour 2015.

En exécution, les autorisations d'engagement et les crédits de paiement des programmes « Recherche » ont été respectivement supérieurs de 0,4 % et inférieurs de - 0,8 % aux crédits votés en loi de finances initiale et supérieurs de 1,6 % et de 0,2 % aux crédits exécutés en 2015 .

La promesse de stabilité des crédits de la recherche du Gouvernement paraît donc avoir été plutôt respectée en exécution , même si la hausse constatée par rapport à l'exécution 2015 résulte là encore essentiellement du changement de périmètre du programme 190.

Toutefois, lorsque l'on prend en compte les avances sur produits et les fonds de concours qui étaient censés venir abonder les programmes recherche, force est de constater que le résultat est nettement moins satisfaisant , puisque les crédits exécutés sont inférieurs de - 0,8 % en AE et de - 4,1 % en CP au crédits prévus en loi de finances initiale.

Cet écart s'explique notamment par les moindres fonds de concours dont ont bénéficié , par rapport aux prévisions initiales, les programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables » et 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle » .

Exécution des crédits des programmes « recherche » en 2016 (y compris fonds de concours)

(en millions d'euros et en %)

Intitulé du programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés

LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Écart exécution 2016 / exécution 2015

Écart exécution 2016 / LFI 2016

142

Enseignement supérieur et recherche agricole

AE

323,9

331,8

324,7

0,2 %

- 2,2 %

CP

320,7

330,9

324,0

1,5 %

- 2,1 %

172

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

AE

6 198,1

6 244,3

6 274,1

1,2 %

0,5 %

CP

6 222,8

6 248,9

6 176,0

- 0,8 %

- 1,2 %

186

Recherche culturelle et culture scientifique

AE

112

122,8

117,7

5,1 %

- 4,2 %

CP

112,4

122,8

118,0

5,0 %

- 3,9 %

190

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durable

AE

1 559

1 748,1

1 689,4

8,4 %

- 3,4 %

CP

1 589,1

1 994,1

1 665,3

4,8 %

- 16,5 %

191

Recherche duale

AE

183,7

180,1

172,3

- 6,2 %

- 4,3 %

CP

183,7

180,1

166,7

- 9,3 %

- 7,4 %

192

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

AE

898,7

874,7

848,8

- 5,5 %

- 3,0 %

CP

923,3

929,8

909,3

- 1,5 %

- 2,2 %

193

Recherche spatiale

AE

1 344,5

1 371,7

1 363,0

1,4 %

- 0,6 %

CP

1 354,3

1 371,7

1 363,0

0,6 %

- 0,6 %

Total des programmes « Recherche »

AE

10 619,9

10 873,5

10 790

1,6 %

- 0,8 %

CP

10 706,2

11 178,3

10 722,3

0,2 %

- 4,1 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la direction du budget

Malgré tout, la relative stabilité des crédits votés a globalement permis d'améliorer le lancement des projets de recherche en garantissant une meilleure visibilité aux gestionnaires , même si les organismes de recherche demeurent soumis à de fortes tensions financières qui rendent souvent difficile la réalisation d'investissements de long terme indispensables à la réalisation de travaux à la frontière de la connaissance.

2. L'écart entre les crédits votés et les crédits exécutés a été moins important en 2016 qu'en 2015, même si la situation des différents programmes est contrastée

En 2015, les crédits consommés consacrés à la recherche avaient été inférieurs de 1,6 % aux crédits votés en loi de finances initiale.

Ainsi qu'il a été indiqué supra , les crédits de paiement des programmes consacrés à la recherche ont fait l'objet d'une régulation infra-annuelle moins importante en 2016 : ils ont été inférieurs en exécution de - 0,8 % au montant des crédits votés en loi de finances initiale, avec notamment 219,4 millions d'euros de crédits annulés par décrets d'avance , 0,1 million d'euros de crédits supprimé par décret d'annulation et 11,5 millions d'euros de crédits annulés par le collectif budgétaire de fin d'année .

Les programmes 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durable » et 191 « Recherche duale » ont connu des coupes relativement importantes de leurs crédits , avec des baisses respectives de - 3,4 % et de - 7,4 % de leurs crédits .

Dans la mesure où les projets de recherche nécessitent des investissements importants , les annulations décidées en cours d'exécution créent une instabilité nuisible aux gestionnaires de programmes comme aux chercheurs et aux organismes au sein desquels ils travaillent.

Il convient toutefois de noter que les programmes 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durable » et 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle » ont bénéficié de l'apport de fonds de concours (en AE exclusivement pour le programme 190) en provenance du programmes d'investissements d'avenir (PIA) . Même s'ils ont été moins importants qu'attendus, ceux-ci se sont élevés :

- à 240 millions d'euros en AE dans le cas du programme 190 au titre de la participation au financement du soutien au développement de l'A350 de l'avionneur Airbus . La fin du financement de ce programme, prévue pour 2016, est intervenue au début de l'année 2017 ;

- à 98,2 millions d'euros (AE=CP) dans le cas du programme 192, qui s'est vu rattacher ces crédits par un arrêté de juillet 2016, dans le cadre de l'action « Nano 2017 » du PIA, ce qui explique la forte hausse de 9,3 % de ses crédits en cours d'année .

Mouvements de crédits de paiement intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Programme

LFI

2016

Reports entrants

Décrets d'avance

Décrets d'annulation

Virement ou transfert

LFR de fin de gestion

Reports sortants

Fonds de concours et attributions de produits

Exécution 2016

Écart consommé/ prévu

142

330,9

-

- 6,6

-

0,4

-

- 1,8

-

325,4

- 1,7 %

172

6 248,9

82,2

2,1

- 0,1

0,7

- 6,5

-

1,6

6 176,0

- 1,2 %

186

122,1

2,9

- 7,3

-

-

-

-

0,9

118,0

- 3,4 %

190

1 724,0

-

- 58,7

-

-

-

-

-

1 665,3

- 3,4 %

191

180,1

-

- 7,8

-

0,3

-

-

-

166,7

- 7,4 %

192

831,6

39,0

- 51,1

-

54,6

- 5,0

-

98,2

909,3

+ 9,3 %

193

1 371,7

9,8

-90

-

-

-

-

-

1 363,0

- 0,6 %

Total programmes « Recherche »

10 809,3

133,9

- 219,4

- 0,1

56,0

- 11,5

- 1,8

100,7

10 723,7

- 0,8 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la direction du budget

3. Des mises en réserve dont les effets ont été très différents d'un programme à l'autre

La mise en réserve globale des programmes 172 et 193, principaux programme de recherche en volume, s'est élevée à 239,43 millions d'euros en AE et 239,8 millions d'euros en CP, soit un léger recul de - 2,9 % par rapport à 2015, qui est toutefois loin de contrebalancer les hausses de 6,8 % et de 30 % survenues respectivement en 2014 et en 2015. Cette diminution bienvenue a néanmoins permis de faire baisser de 3 % par rapport à 2015 les mises en réserve de crédits des opérateurs de ces programmes . Les réserves de précaution des autres programmes n'ont pas évolué en 2016 .

Comme en 2015, les impasses budgétaires constatées pour les contributions au financement des organismes internationaux de la recherche ont été comblées par l'utilisation d'une partie de la réserve de précaution , pour un total de 93 millions d'euros en AE et de 200 millions d'euros en CP, soit un niveau comparable à celui de 2015. Un certain nombre d'opérateurs du programme 172 ont également bénéficié de crédits dégelés, des reports de charge du CNRS et de l'INSERM ayant pour leur part entraîné un dégel de 153 millions d'euros .

Les reliquats de crédits mis en réserve sur le programme 191 « Recherche duale » ont été levés au profit du Centre national d'études spatiales (CNES) , à hauteur de 4,4 millions d'euros , et du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) , à hauteur de 1,2 million d'euros , mais la date tardive de la demande de levée n'a pas permis de les utiliser en 2016. Ils ont donc fait l'objet d'une demande de report sur 2017 .

Une levée de la réserve du programme 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle » à hauteur de 31,2 millions d'euros en CP a servi à financer la compensation par l'État à la sécurité sociale du coût du dispositif d'exonérations « Jeune entreprises innovantes » , le coût de ce dispositif ayant été revu à la hausse au dernier trimestre 2016.

En revanche, la réserve de précaution du programme 186 « Recherche culturelle » a été entièrement annulée .

4. Il convient de souligner que la gestion du programme 172 souffre d'insincérité en raison de la sous-budgétisation chronique du financement des très grandes infrastructures de recherche tandis que la soutenabilité du programme 193 est compromise par l'augmentation des contributions à l'Agence spatiale européenne

Le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » , fusionné en 2015 avec l'ancien programme 187 « Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources », constitue le support principal des politiques de recherche en France , puisqu'il porte environ 57,6 % des crédits de paiement exécutés en matière de recherche en 2016 , soit 6,18 milliards d'euros en exécution en 2016.

C'est lui qui porte les subventions de l'État en faveur des principaux organismes de recherche publics 237 ( * ) - CEA, CNRS, INRA, INRIA ou bien encore INSERM - et qui assure le financement des très grandes infrastructures de recherche (TGIR) . L'Agence nationale de la recherche (ANR) et le crédit d'impôt recherche (CIR) sont rattachés à ce programme stratégique (voir infra ).

Comme en 2014 et en 2015, les crédits destinés au financement des contributions de la France aux organisations scientifiques internationales (OSI) telles que le Centre européen de recherche nucléaire (CERN) et aux très grandes infrastructures de recherche (TGIR) ont été sous-budgétées , ce qui a provoqué des refus de visas du contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM).

De fait, après constitution de la réserve de précaution et mouvements de reports, les ressources prévisionnelles apparaissaient nettement inférieures aux prévisions de dépenses, conduisant, selon la Cour des comptes, à une nouvelle impasse de 131,5 millions d'euros en AE et de 130,6 millions d'euros en CP , en légère augmentation par rapport à 2015, alors que les crédits destinés aux OSI sont considérées comme des dépenses inéluctables au sens de l'article 95 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique 238 ( * ) .

Plus préoccupant, les engagements envers l'Agence spatiale européenne (ESA) continuent de faire peser un risque budgétaire sur le programme 193 , notamment à l'horizon 2022-2024 . Des contributions annuelles dépassant 900 millions d'euros sont en effet prévues à cette période pour honorer l'objectif d'apurement de la dette de l'ESA .

Contribution française à l'ESA et évolution de la dette

Source : réponses au questionnaire du rapporteur spécial, d'après PMT ESA présenté au Conseil d'administration du CNES le 7 juillet 2016

5. Il est à noter que l'Agence nationale de la recherche (ANR) a bénéficié en cours de gestion d'une hausse de ses autorisations d'engagement et a mis en place un plan d'apurement de ses engagements les plus anciens

La réduction de ses crédits d'intervention depuis 2012 (ils sont passés de 556 millions d'euros cette année-là à 390 millions d'euros en 2015 avant d'entamer une timide remontée à 457 millions d'euros en 2016) ayant entraîné une chute drastique du taux de sélection des projets qui lui sont présentés ( 11 % en 2014 et en 2015, 15 % en 2016 contre 20 % en 2012), l'Agence nationale de la recherche (ANR) a pu bénéficier de l'octroi de 129,7 millions d'euros en AE en cours d'année grâce à une décision du 24 juin 2016.

Simultanément, l'ANR a mis en place un plan d'apurement à moyen terme de ses engagements les plus anciens , intégré dans son contrat d'objectifs et de performance. Ce plan prévoit sur quatre ans (2016-2020) l'apurement des engagements résiduels antérieurs à 2010 , à travers un rapprochement des dettes et créances des principaux bénéficiaires et une procédure accélérée de traitement des dossiers par édition .

6. Un crédit d'impôt-recherche (CIR), deuxième dépense fiscale du budget de l'État, en légère hausse, et dont l'efficacité devrait prochainement être enfin mieux évaluée

Alors qu'il avait représenté une dépense fiscale de 5,1 milliards d'euros en 2014 et de 5,27 milliards d'euros en 2015, le crédit d'impôt-recherche (CIR) , deuxième dépense fiscale du budget de l'État , a atteint 5,42 milliards d'euros en 2016. Il représente à lui seul plus de la moitié des dépenses fiscales de la MIRES et 6,3 % de la totalité des dépenses fiscales , un chiffre stable depuis 2014.

Si la Cour des comptes note que le chiffrage du CIR est de plus en plus robuste , grâce à la dématérialisation de sa déclaration ainsi qu'à la mise en place de nouveaux outils 239 ( * ) , elle déplore néanmoins, à juste titre, que son efficacité au regard de l'augmentation de la dépense intérieure de recherche et de développement des entreprises (DIRDE) demeure difficile à mesurer . Elle en conclut qu'un réel effet d'entrainement [du CIR] n'apparaît pour l'heure « pas clairement établi » et en conclut que « des études complémentaires restent nécessaires ».

Une nouvelle d'étude d'impact du CIR , menée par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche sur des données postérieures à 2009, devrait précisément aboutir en 2017 . Par ailleurs, la Commission nationale d'évaluation des politiques d'innovation (CNEPI) a lancé en juin 2016 un appel à projets de recherche pour « évaluer les effets du crédit d'impôt recherche » . De nouvelles données devraient donc être prochainement disponibles .

En tout état de cause, votre rapporteur spécial estime que l'indicateur de performance 2.3 « Mesures de l'impact du crédit d'impôt recherche » est beaucoup trop imprécis pour permettre d'évaluer les effets véritables du CIR sur les dépenses de R&D des entreprises privées.

MISSION « RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE » ET CAS « PENSIONS » - M. JEAN-CLAUDE BOULARD, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION « RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE » EN 2016

La mission « Régimes sociaux et de retraite » regroupe les subventions versées par l'État à certains régimes spéciaux en déséquilibre démographique et comporte, à ce titre, presque exclusivement des crédits de titre 6 (dépenses d'intervention).

Ces régimes correspondent à des entreprises (SNCF, RATP, SEITA...) ou à des professions (marins, mineurs...) considérées comme dotées de caractéristiques particulières du fait d'une diversité de facteurs propres à leur histoire, leurs équilibres, la nature des professions exercées... Certains sont dits « ouverts » c'est-à-dire qu'ils renouvellent leur population quand d'autres dits « fermés » n'accueillent plus de nouveaux cotisants et sont appelés à s'éteindre plus ou moins rapidement.

Les dépenses budgétaires en provenance de la mission, qui ne couvre que certains des régimes spéciaux de retraite, s'élèvent en 2016 à 6,3 milliards d'euros .

À titre d'illustration, cette somme représente 11 % des dépenses de pensions autorisées dans le cadre du compte d'affectation spéciale « Pensions » ou encore, pour la comparer avec une autre mission budgétaire dédiée à des dépenses de transferts vers les ménages, deux fois et demi les dépenses d'intervention de la mission « Anciens combattants ».

Les dépenses de la mission ne financent pas la totalité des prestations servies par les régimes spéciaux mais seulement les déséquilibres financiers, qui sont assez différenciés selon les cas, entre les prestations qu'ils servent et leurs ressources propres.

Au niveau de la mission, qui comporte trois programmes d'importance inégale, les dépenses ont été conformes aux crédits initialement programmés pour 2016 , moyennant un léger ajustement en gestion entre les programmes qu'elle regroupe, marquant une réduction par rapport à l'année précédente , avec, toutefois, des nuances selon les programmes de la mission.

A. UNE EXÉCUTION PRESQUE CONFORME AUX PRÉVISIONS AU PRIX DE QUELQUES ADAPTATIONS EN GESTION

Au cours de l'exercice 2016, les crédits programmés ont connu des taux d'exécution élevés, manifestation d'une programmation budgétaire globalement satisfaisante. Quelques ajustements, mineurs, ont été nécessaires afin de compenser la sous-dotation des besoins de financement de la caisse de retraite de la SNCF, qui se révèle récurrente. La pleine consommation des crédits a contraint les gestionnaires à lever la réserve de précaution, qui apparaît comme d'application largement virtuelle s'agissant d'une mission budgétaire chargée de financer des droits sociaux.

Dans ces conditions, la contribution de la mission au bouclage des objectifs macrofinanciers a été nulle.

1. Des dépenses globales exactement identiques aux crédits programmés...

L'écart entre la prévision de dépenses et l'exécution a été très faible ces trois dernières années.

À titre d'exemple, 99,9 % des crédits votés en loi de finances initiale en 2014 avaient été consommés tandis qu'en 2015, la dépense n'avait été supérieure aux crédits votés en loi de finances initiale que de 38 millions d'euros, soit un écart minime de 0,5 %.

En 2016, l'écart entre les crédits de la mission et les dépenses est nul .

Données l'exécution des crédits de la mission entre 2014 et 2016

Exécution 2014

Exécution 2015

Crédits votés en LFI 2016

Crédits ouverts en 2016

Exécution 2016

Dépenses 2016/2015

Dépenses 2016/ crédits votés en 2016

Programme 198 « Régimes sociaux de retraite et transports terrestres »

4 129

4 089

4 039

4 066

4 066

- 23

27

Programme 197 « Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins »

820

853

825

825

825

- 28

0

Programme 195 « Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers »

1 557

1 510

1 457

1 429

1 429

- 81

- 27

Total

6 506

6 452

6 321

6 320

6 320

- 132

0

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données du rapport annuel de performances de la mission « Régimes sociaux et de retraite » annexé au projet de loi de règlement pour 2015 et 2016)

2. ...au prix d'adaptations en gestion, mineures mais récurrentes en leur nature
a) Des transferts mineurs entre programmes de la mission

Si, globalement, le taux de consommation des crédits ouverts par la loi de finances pour 2016 s'est élevé à 100 %, ce résultat s'est accompagné d'écarts entre les taux de consommation des crédits des différents programmes.

Si, pour le programme 197, les crédits ouverts en 2016 ont suffi, moyennant une consommation de 100 % des dotations, les crédits initialement ouverts pour le programme 198 n'auraient pas suffi à couvrir les dépenses effectives. Celles-ci ont excédé les crédits ouverts de 27,4 millions d'euros (soit un excédent de 0,7 %). De son côté, le programme 195 n'a pas dépensé la totalité de ses dotations. Ses dépenses ont été inférieures au niveau des crédits programmés de 27,4 millions d'euros.

Les écarts, en plus et en moins, observés sur les programmes 195 et 198 ont été constatés par un décret de transfert intervenu en gestion (le 26 novembre 2016) par lequel 27,3 millions d'euros ont été transférés du programme 195 vers le programme 198, permettant de financer l'impasse de la prévision initiale.

Dans son analyse de l'exécution budgétaire, la Cour des comptes s'interroge sur la conformité de ce transfert aux dispositions de la loi organique sur les lois de finances (article 12-2° de la loi organique) dans la mesure où les objets initial et final des crédits transférés pourraient être considérés comme différents. Elle en conclut que ce mouvement de crédits aurait dû passer par un décret d'avances ou par une loi de finances rectificative.

Votre rapporteur spécial prend acte de l'observation de la Cour des comptes et recommande qu'à l'avenir, si les conditions en sont réunies, des mouvements de crédits de cette nature empruntent les voies prévues par la loi organique.

b) Un arbitrage plus significatif au sein du programme 198

Au-delà, il y a lieu de considérer les mouvements de crédits intervenus au sein des programmes.

Deux mouvements d'ampleur disparate doivent être mentionnés. Le premier, interne au programme 195, a consisté à mettre à disposition de la Caisse des régies ferroviaires d'outre-mer des crédits de la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines. D'un montant très modeste (27 700 euros), il contraste de ce point de vue avec les 24 millions d'euros versés à la Caisse de prévoyance et de retraite de la SNCF, qui avait déjà été bénéficiaire du décret d'avances de novembre 2016.

Au total, les crédits destinés à cette caisse ont été abondés en gestion de plus de 51 millions d'euros , dont 16 millions d'euros redéployés à partir des crédits ouverts au bénéfice de la caisse de la RATP et 8 millions provenant de régimes divers.

L'an dernier, le besoin de financement de la CPRP SNCF avait déjà contraint à adapter en cours d'année la gestion de la mission pour le combler, un déficit supplémentaire de près de 81 millions d'euros par rapport aux prévisions budgétaires ayant dû être financé.

C'est donc la deuxième année consécutive que le besoin de financement de la CPRP SNCF à couvrir par des crédits budgétaires se trouve sous-estimé en prévision avec, cette année, une ampleur de 1,5 % des dépenses effectives, somme toute modérée.

c) Une réserve de précaution globalement dégelée

La mise en réserve des crédits du programme 198 (au taux de 8 % en 2016) a été intégralement levée en fin de gestion. Il en a été de même pour le programme 197 tandis que pour le programme 195 une partie des crédits gelés (17,1 millions d'euros sur un total de 116,5 millions d'euros mis en réserve) a été laissée disponible pour les opérations de fin de gestion.

L'application d'un taux de réserve aussi élevé à des crédits dont la vocation, même si elle est moins directe que lorsque celui-ci verse directement des prestations représentatives de créances des administrés, est d'honorer des engagements de l'État suscite une réelle perplexité. Prise à la lettre, elle jette une sorte de suspicion sur la parole de l'État, qui, convenons-en est particulièrement fâcheuse. Sa seule justification pourrait provenir d'ajustements sur les recettes propres des régimes dont l'État garantit les équilibres financiers. Or, cette variable est peu flexible, se trouvant l'objet d'une programmation réglementaire qui est au coeur des réformes des régimes spéciaux de retraite mises en oeuvre depuis 2007.

B. LA POURSUITE D'UNE RÉDUCTION DES CHARGES DE LA MISSION

Les dépenses de la mission s'inscrivent sur une trajectoire régulièrement baissière dont la pente devrait s'accentuer à mesure de l'entrée en vigueur de l'ensemble des réformes apportées aux régimes spéciaux de retraite, dont le calendrier a été conçu comme devant être progressif et subir un décalage par rapport à l'application aux autres régimes de retraite, notamment à celui de la fonction publique de l'État.

La baisse des dépenses de la mission, qui permet de respecter le plafond de la programmation triennale des finances publiques, est étroitement liée cette année encore à une inflation contenue et à l'économie procurée de ce fait par l'absence de toute revalorisation des pensions en cours d'année.

Quelques nuances doivent être apportées à ce panorama pour tenir compte de la situation de certains régimes et mettre en évidence la vocation de subvention d'équilibre des dépenses de la mission sensibles à ce titre aux évolutions des dépenses mais aussi des recettes des régimes subventionnées.

1. Une dépense moins dynamique que prévu dans la programmation triennale

Malgré une plus que faible contribution à la gestion de l'équilibre budgétaire de l'exercice, la mission peut être considérée comme ayant participé à la maîtrise des dépenses publiques programmée à moyen terme, dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques.

Après que l'an dernier, avait été constaté un dépassement de la programmation, le montant des crédits exécutés en 2015 ayant été supérieur de 38 millions d'euros (soit + 0,5 %) au montant prévu dans le cadre du triennal 2014-2019, l'exécution des crédits a renoué en 2016 avec les résultats constatés en 2013 et 2014 où le plafond annuel fixé en loi de programmation des finances publiques avait été respecté.

En 2016, l'exécution a dégagé une marge de l'ordre 76 millions d'euros sous le plafond de la programmation pluriannuelle.

Dépassement et respect des dernières lois de programmation

(en millions d'euros de crédits de paiement)

2013

2014

2015

2016

2017

Triennal 2013-2015 (au format 2014)

6 540

6 755

Exécution

6 438

6 506

Triennal 2015-2017 (au format 2015)

6 414

6 396

6 396

Exécution

6 452

6 320,3

LFI

6 414

6 320,3

* Programmation initiale, à périmètre courant.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des rapports annuels de performances de la mission et des lois de programmation pour 2012-2017 et pour 2014-2019)

Ce résultat provient, en particulier, d'une inflation plus faible que celle sur laquelle avait été construite la programmation budgétaire (de 1 % pour les années 2015 et 2016).

Déjà, l'exécution 2015, malgré le dépassement du plafond auquel elle avait donné lieu avait profité d'une revalorisation moindre qu'escomptée (au lieu de + 0,9 % au 1 er octobre 2015, elle avait été limitée à 0,1 %) cet écart dégageant des économies chiffrées à 47 millions d'euros par le Gouvernement.

En 2016, les réformes apportées aux modalités d'indexation des prestations sociales, parmi lesquelles les retraites, par les lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2016 sont entrées en application.

Elles sont la dernière étape en date d'une chronique d'évolution des règles de revalorisation des pensions particulièrement fournie ces dernières années.

La revalorisation des pensions en 2014 et 2015 et depuis la réforme de 2016

Aux termes de la loi du 21 août 2003, le coefficient de revalorisation des pensions est égal à l'évolution prévisionnelle des prix hors tabac pour l'année N , corrigé, le cas échéant, de la révision de la prévision d'inflation de l'année N-1 telle que figurant dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances de l'année N.

Entre 2009 et 2013 , la revalorisation de l'ensemble des pensions est intervenue au 1 er avril de chaque année et non plus au 1 er janvier. La revalorisation pour l'année N était égale à la prévision d'inflation établie par la Commission économique de la Nation, ajustée sur la base de l'inflation définitive constatée pour N-1 (connue en avril N de manière définitive).

En application de la loi du 20 janvier 2014 « garantissant l'avenir et la justice du système de retraites », la revalorisation de l'ensemble des pensions (hors minimum vieillesse et majoration pour tierce personne) doit désormais intervenir au 1 er octobre de chaque année 240 ( * ) .

Dans ces conditions, aucune revalorisation n'est intervenue en 2014 compte tenu de l'application du correctif destiné à compenser les effets d'une surestimation du rythme de l'inflation en 2012 (0,7 effectif contre une prévision de 1,2 %) dans un contexte où cet écart s'était révélé juste égal à l'inflation prévue dans le rapport économique social et financier annexé au projet de loi de finances de l'année (0,5 %).

Compte tenu des prévisions d'inflation, les pensions de retraite ont été revalorisées de 0,1 % au 1 er octobre 2015 , soit la prévision d'inflation pour 2015 telle que figurant dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances pour 2016, car le gel initialement prévu lors de l'élaboration de la loi de financement rectificative pour la sécurité sociale de juillet 2014 a conduit à ne pas appliquer le correctif entre l'inflation prévisionnelle de 2014 et l'inflation définitive constatée.

Compte tenu du nouveau calendrier d'application des revalorisations des pensions, l'effet en année pleine de la revalorisation des pensions en 2015 peut être estimé à un équivalent-revalorisation entre 0,015 et 0,025 %.

Les lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2016 ont apporté de nouvelles évolutions. Elles prévoient d'harmoniser et de simplifier les règles de revalorisation de l'ensemble des prestations sociales, y compris des pensions de retraite. Ainsi, les pensions de retraite demeureront revalorisées au 1 er octobre de chaque année mais cette revalorisation se fondera désormais sur l'évolution des prix hors tabac constatée en moyenne annuelle sur les douze derniers mois disponibles . En cas d'évolution négative des prix, une règle de « bouclier » garantira le maintien des prestations à leur niveau antérieur.

Compte tenu de ces nouvelles règles et de l'hypothèse d'inflation retenue dans le projet de loi de finances pour 2016, les pensions de retraite devaient être revalorisées de 0,6 % au 1 er octobre 2016. Or, les évolutions des prix ont conduit à l'absence de toute revalorisation des pensions à cette échéance.

Ainsi, le jeu de l'indexation des pensions sur l'exercice 2016 s'est limité à l'application de l'indexation de l'année précédente en année pleine (soit, compte tenu du calendrier, un « effet-prix » de l'ordre de 0,06 %).

Néanmoins, même si l'inflation avait été conforme à la prévision qui en avait été formulée, les dépenses de la mission auraient respecté la programmation triennale, ne laissant toutefois qu'une marge d'environ 12,8 millions d'euros sous le plafond du triennal en 2016 contre les quelque 76 millions constatés.

2. Une baisse des dépenses de la mission qui admet quelques nuances...
a) Une baisse globale des dépenses de la mission...

Les réformes des régimes de retraite inaugurés en 2003 ont commencé à toucher les régimes spéciaux à partir de 2016 moyennant un calendrier d'application décalé (de quatre ans) par rapport à leur application aux fonctionnaires de l'État. Par ailleurs, des régimes ont été exemptés de ces réformes : les régimes fermés et le régime des marins que finance le programme 197 de la mission.

L'année 2016 est la dernière avant l'application du relèvement des seuils d'âge prévu par la loi de novembre 2010 (plus deux ans en respectant les différences existantes entre les catégories sédentaires et les catégories actives).

Néanmoins, un certain nombre de dispositions sont entrés en application : relèvement des taux de cotisation salariales et employeurs, décote, décalage de l'échéance de l'indexation des pensions..., tandis que les mesures de carrière négociées dans le cadre des réformes, comme la création d'échelons supplémentaires de fin de carrière) exercent déjà des effets sur les comportements de départ en retraite.

Ces mesures modifient le système dans le sens d'une hausse des recettes des régimes qu'elles touchent et d'une modération de la progression des dépenses. A contexte donné 241 ( * ) , elles tendent à réduire les besoins de financement des régimes.

L'exercice 2016 traduit cette réduction puisque les dépenses de la mission s'inscrivent en baisse de 132 millions d'euros par rapport à 2015, soit un repli de 2 % qui amplifie les économies constatées l'an dernier. Au total, par rapport à 2014, les dépenses de la mission ont été allégées de 186 millions d'euros (- 2,9 %).

b) ...qui admet quelques nuances

Les économies réalisées en 2016 ont touché tous les régimes spéciaux mais à l'exception du régime de la RATP et selon des proportions très variables.

Le régime de la RATP est le seul des régimes spéciaux couverts par la mission qui a dû appeler en 2016 une subvention d'équilibre supérieure à celle de 2015. L'augmentation de la subvention a été de l'ordre de 18 millions d'euros (+ 2,9 %). Les pensions ont connu une certaine dynamique (+ 28,8 millions d'euros, soit + 2,7 %) tandis que les cotisations ont progressé mais moins (de 1,9 %). La hausse des pensions résulte d'une augmentation du nombre des pensionnés qui devrait se prolonger jusqu'en 2050.

L'autre grand régime de retraite des transports terrestres, celui de la SNCF, même s'il a dû bénéficier d'une subvention supérieure à la prévision budgétaire (voir supra ) a dégagé une économie de 14,8 millions d'euros, qu'on peut qualifier de très mesurée (0,04 % par rapport à 2015), les cotisations versées au régime étant en repli de 25,4 millions d'euros (1,2 %) alors qu'elles étaient attendues en hausse, la moins-value de recettes atteignant 63,3 millions d'euros (soit une déconvenue de l'ordre de 3 %).

Dans ces conditions, l'essentiel du repli de la dépense de la mission est attribuable aux régimes des marins et aux régimes des mines, évolution qui traduit la baisse régulière des pensionnés de ces deux régimes.

C. UNE ÉTAPE VERS UNE RÉDUCTION PLUS PÉRENNE DES SUBVENTIONS AUX RÉGIMES SPÉCIAUX DE RETRAITE ?

Malgré une érosion des dépenses de la mission, les taux de subventionnement des régimes spéciaux demeurent élevés.

Néanmoins, l'exécution des crédits en 2016 peut être considérée comme une étape supplémentaire vers une réduction d'ampleur des dépenses d'équilibre des régimes spéciaux, moyennant toutefois un certain nombre d'incertitudes et le maintien d'une perspective d'appel aux contributions publiques pour couvrir un besoin de financement persistant, même à un horizon très long marqué par l'amplification des effets de rééquilibrage attendus d'une désindexation des pensions dont la soutenabilité au long cours peut susciter une certaine perplexité.

1. Les taux de subventionnement des régimes spéciaux par la mission demeurent élevés...

Taux de subventionnement des plus importants régimes spéciaux
par la mission

SNCF

RATP

Marins

Mines

Total

Subvention par la mission

(A)

3 266,50

636,6

824,8

1 263,70

5 991,60

Pensions

(B)

5 265,60

1 087,70

1 060,90

1 552,40

8 966,60

A/B

62,03 %

58,53 %

77,75 %

81,40 %

66,82 %

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du rapport annuel de performances de la mission et des comptes provisoires de la sécurité sociale pour 2016

La contribution des crédits de la mission au financement des pensions servies par les régimes spéciaux de retraite est variable selon le régime considéré mais dépasse 50 % pour les plus grands de ces régimes.

Si l'on considère que la plupart des régimes spéciaux correspondent à des entreprises opérant sur des champs plus ou moins concurrentiels cette situation qui revient à subventionner par appel aux contribuables une partie des coûts sociaux de l'exploitation apporte une distorsion évidente au fonctionnement du marché et fait subir aux contribuables une charge dont, ainsi, il dispense l'usager.

En bref, comme toujours, les subventionnements publics conduisent à s'interroger sur leurs effets économiques et sociaux, la redistribution des revenus et des niveaux de vie à laquelle elles contribuent méritant une clarification que l'information donnée dans le cadre budgétaire n'apporte pas.

2. ...mais la baisse des charges de la mission devrait se prolonger...

Le compte général de l'État présente une projection à long terme (horizon 2050 et 2116) des besoins de financement cumulés, et actualisés, des principaux régimes spéciaux de retraite qui fait ressortir les montants d'engagements implicites correspondant à différentes hypothèses de taux d'intérêt.

La fourchette va de 346 milliards d'euros à 174 milliards d'euros en 2116 , et de 164 milliards d'euros à 121 milliards d'euros en 2050.

Les résultats de la projection ressortent comme très sensibles au choix du taux d'actualisation 242 ( * ) .

Projection à moyen terme des besoins de financement cumulé actualisé des grands régimes spéciaux de retraite financés par la mission

(en milliards d'euros de 2016)

Source : compte général de l'État en 2016

Ces résultats sont de nature à impressionner mais il convient de garder à l'esprit qu'ils expriment des besoins de financement cumulés à long, voire très long, terme 243 ( * ) , le haut de la fourchette étant au surplus fondé sur une hypothèse d'assez nette contraction de l'équilibre économique des régimes.

Même en ce cas, le graphique ci-dessous l'illustre, le besoin de financement des régimes spéciaux se réduirait très fortement en début de période pour connaître une relative stagnation après 2060 autour d'un besoin de financement de 1,5 milliard d'euros constants.

Les charges de la mission devraient ainsi subsister tout au long de la période de projection mais connaître une très nette diminution, de 4,8 milliards d'euros à terme, si bien que le poids de la mission se trouverait allégé de près de 80 %.

Financement des retraites des régimes spéciaux subventionnées (hors SEITA)

Source : compte général de l'État pour 2016

La lecture du graphique suggère que cette évolution résulterait d'un mouvement en ciseaux, les pensions se réduisant tandis que les recettes propres des régimes progresseraient. Cette dissociation des dynamiques des ressources et des charges est attribuable à des variables en volume mais également au choix d'une structure d'indexation qui suscite des interrogations.

Par ailleurs, la part prise par le besoin de financement des retraites de la SNCF dans le total des besoins de financement des régimes spéciaux doit être remarquée. Elle conduit à souligner l'influence de ce régime spécial sur la problématique d'ensemble des régimes spéciaux (du moins pour ceux couverts par la mission) et, de ce fait, les liens entre la santé économique de l'entreprise et sa charge en subventions publiques.

3. ... non sans susciter quelques interrogations sur son modèle

Dans ces évolutions l'application des réformes des retraites aux régimes spéciaux joue un rôle important malgré l'hypothèse d'un maintien des limites d'âge dérogatoires ménagées au profit des catégories non sédentaires des entreprises de transport.

Une modification des bornes d'âge de ces catégories accentuerait la baisse du besoin de financement des régimes mais elle supposerait sans doute des évolutions de toutes sortes comme l'expérience a pu le montrer dans un passé récent.

Dans ce cadre, l'impact du différentiel entre l'indexation des pensions et la dynamique économique pèse d'un poids particulier sur les résultats de la projection ainsi que l'illustrent les écarts entre les résultats de long terme selon l'hypothèse de croissance.

Tout comme pour le régime de la fonction publique d'État pris en charge par le compte d'affectation spéciale « Pensions » (voir ci-dessous), on peut s'interroger sur la soutenabilité d'un modèle d'équilibre des régimes de retraite basé sur un décrochage des revenus des pensionnés par rapport à celui des actifs .

Même si sa traduction en niveau de vie peut être tempérée par plusieurs facteurs (situations patrimoniale, familiale, charges diverses...), ce décrochage programmé revient à rompre avec un objectif traditionnel de parité, qui avait été atteint .

À ce titre, il mériterait d'être plus pleinement pris en compte dans le débat sur la répartition des revenus entre période d'activité et période d'inactivité.

Dans un tel modèle, l'attractivité des régimes obligatoires de retraite tend à se détériorer par rapport à des alternatives où les créances constituées par les épargnants se trouvent implicitement indexées sur le PIB.

On dira que la portée pratique d'une telle perte d'attractivité , qui en soi mérite d'être relativisée, que l'éventualité d'un « opting out » 244 ( * ) , qui n'est légalement pas ouvert, sont assez virtuelles compte tenu de la structure de financement des régimes spéciaux pour lesquels la subvention de l'État revient à élever le taux de rendement des cotisations supportés par les salariés que ce soit directement (les cotisations salariales) ou indirectement (les cotisations des employeurs) 245 ( * ) . Néanmoins, outre que la subvention versée par l'État pourrait être considérée comme un engagement irréfragable de sa part, insusceptible d'être concrètement révoqué, il conviendrait de disposer d'un panorama plus systématique sur la totalité des transferts publics dont bénéficie le système de retraite en France, en particulier à travers les avantages fiscaux accordés au patrimoine, quelle qu'en soit leurs vecteurs. Cette information permettrait de mesurer les impacts de la perte de rendement des systèmes de retraite de base.

Une dernière observation conduit à mettre en relief les disparités de rendements des régimes spéciaux de retraite entre les générations. En effet, pour la partie qui correspond au différentiel d'indexation des pensions et des assiettes contributives, la réduction du besoin de financement peut être lue comme recelant la perspective d'un allègement structurel des contributions des générations futures aux pensions des retraités sans pour autant que leurs droits soient modifiés.

D. LA SUPERPOSITION DES RÉGIMES SPÉCIAUX CRÉE DES SURCOÛTS DE GESTION DONT LA JUSTIFICATION N'APPARAÎT PAS CLAIREMENT

Le suivi de la performance de la mission est conduit exclusivement à partir d'indicateurs de gestion dont la responsabilité échappe assez largement aux responsables de programme. Certes, les conventions d'objectifs et de gestion (COG) conclues avec les différents organismes chargés de la gestion des régimes, auxquelles les responsables de programme peuvent être associés, comportent des cibles visant à optimiser les coûts d'administration des régimes spéciaux subventionnés par l'État.

Il n'empêche que ce sont les organismes gestionnaires qui disposent d'une maîtrise, au demeurant relative, des conditions de gestion des prestations qu'ils servent.

C'est dans ce contexte et sous ces réserves que votre rapporteur spécial prend acte des commentaires, plutôt satisfaits, qui accompagnent ce volant du suivi de la performance.

Certaines observations ne s'en imposent pas moins.

En premier lieu, force est de constater que les données fournies manquent d'homogénéité et d'exhaustivité. À titre d'exemple, le déficit d'homogénéité peut être illustré par le recensement des coûts de gestion des régimes administrés par la Caisse des dépôts et consignations qui ne sont pas présentés, seule étant exposée la rémunération versée par l'État à la Caisse des dépôts et consignations en contrepartie de sa gestion de la caisse des mines.

En deuxième lieu, les performances extériorisées par les indicateurs apparaissent très disparates.

Éléments de comparaison des coûts de gestion de quelques régimes spéciaux de retraite

Coût de gestion

(en millions d'euros)

Coût de gestion rapporté au volume des prestations (euros/1 000 euros de prestations)

SNCF

22,6

4,3

RATP

6,05

5,6

Marins

8,56

8,1

Mines

15

10,1

Source : commission des finances du Sénat à partir des données du rapport annuel de performances 2016 de la mission

Selon les données fournies par le rapport annuel de performances de la mission, les coûts de gestion des différents régimes vont du simple au double entre le régime de la SNCF et celui des marins, le régime des mines ressortant comme le plus coûteux, situation paradoxale puisqu'il est en voie d'extinction. De même l'écart entre les coûts de gestion unitaire des régimes des transports terrestres (SNCF et RATP) atteint plus de 30 %.

Ces différences semblent directement corrélées aux volumes des pensions servies plus celui-ci étant élevé plus le coût unitaire de gestion se trouvant comparativement faible. Les pensions déjà liquidées susciteraient de plus faibles coûts de gestion si bien que la valeur de l'indicateur suivi pour apprécier les efforts d'optimisation des coûts de gestion bénéficierait d'un effet de composition qui viendrait atténuer les coûts plus élevés associés à la noria des pensionnés. Cette explication trouve une forme de vérification dans la comparabilité des coûts de primo liquidation qui fait ressortir une quasi identité entre la SNCF et la RATP. Cependant, d'autres régimes sont loin de partager ce constat. Ainsi, le coût de primo liquidation des pensions dans le régime des marins (783 euros) se révèle près de trois fois plus élevé que pour les régimes des entreprises de transports terrestres.

Enfin, il convient de s'interroger sur la rationalité d'une gestion séparée, entité par entité, des régimes sociaux. Il est peu douteux que cette organisation puisse conduire à des duplications de coûts qui, pour ne représenter qu'un enjeu relativement mineur au regard de la masse des prestations servies, et même des subventions accordées par l'État, s'élèvent pour les quatre régimes mentionnés dans le tableau ci-dessus à plus de cinquante millions d'euros.

Une appréciation plus systématique de la justification de ces éventuels, mais probables, surcoûts s'impose dans la perspective d'une meilleure utilisation des ressources.

II. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PENSIONS »

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » retrace les opérations relatives aux pensions civiles et militaires de retraite et d'invalidité des agents de l'État. Doté de 57,2 milliards d'euros 246 ( * ) en 2016, il est structuré en trois programmes, représentant chacun une section du compte spécial :

- le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité » est consacré aux régimes de retraite et d'invalidité des fonctionnaires civils et militaires de l'État, gérés par le service des retraites de l'État (SRE), créé en 2009. Il a mobilisé en 2016 93,2 % des crédits initiaux du CAS (53,297 milliards d'euros) ;

- le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État » retrace les opérations du fonds spécial des pensions des établissements industriels de l'État (FSPOEIE) et du fonds gérant les rentes d'accident du travail des ouvriers civils des établissements militaires (RATOCEM), tous deux gérés par la Caisse des dépôts et consignations. Les dotations correspondantes (1,916 milliard d'euros) représentaient 3,3 % des crédits du CAS ;

- le programme 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions » regroupe les pensions dues au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG) ainsi que des pensions financées par l'État au titre d'engagements historiques et de reconnaissance de la Nation. Programme-miroir reflétant les crédits correspondants ouverts dans le programme 169 de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », sa part dans les crédits initiaux du CAS « Pensions » tend à diminuer (3,5 % en 2016, soit 1,991 milliard d'euros).

Conformément à la vocation du compte d'affectation spéciale, les crédits sont ouverts moyennant des prévisions de recettes concourant au financement des charges particulières portées au compte.

Généralement, ces recettes doivent avoir un lien « naturel » avec les charges qu'elles financent si bien qu'un plafond de 10 % des crédits initiaux est imposé aux versements que le budget général peut effectuer au profit des comptes d'affectation spéciale. Toutefois, le compte « Pensions » bénéficie d'une dérogation à cette règle qui s'explique par la structure de financement du CAS. Celle-ci comporte en effet des cotisations salariales et des contributions des employeurs qui se trouvent inévitablement versées à partir du budget général même si par leur nature ces recettes sont incontestablement en lien avec les charges à financer, comme pour n'importe quel régime de retraite suivant les principes de la répartition.

Par ailleurs, les dépenses effectuées à partir des crédits du compte doivent être couvertes par des ressources suffisantes, ce qui ne signifie pas que les recettes d'une année doivent couvrir les dépenses de la période mais que l'addition de ces recettes et des ressources disponibles en trésorerie ne soit pas inférieure aux dépenses.

Autrement dit, le CAS « Pensions » peut présenter un déficit prévisionnel sous la condition que sa trésorerie, issue des opérations effectuées lors des exercices précédents couvre ses dépenses.

Ces dernières années, cette faculté n'a pas été utilisée dans la gestion globale du CAS même si, certains programmes composant le compte ont pu être votés en situation de déficit prévisionnel.

L'exercice 2016 n'a pas dérogé à cette tendance.

Il a été marqué par la poursuite d'une gestion du CAS orientée vers la constitution d'excédents, les recettes continuant à suivre un rythme supérieur à celui des dépenses .

Ce différentiel résulte principalement des réformes des retraites publiques adoptées depuis 2003, qui accroissent les prélèvements obligatoires appliqués aux rémunérations des agents publics et modèrent la dynamique des dépenses. Mais il résulte aussi d'un élargissement de la base des prélèvements obligatoires destinés à financer les pensions de retraite, du fait de mesures nouvelles dont les effets, encore mesurés en 2016, devraient se renforcer à court terme, tandis que leur impact en dépenses ne deviendrait significatif qu'à un terme nettement plus éloigné.

Cette orientation traduit également un choix de gestion consistant à maintenir la pression d'une contrainte de financement des retraites sur les ministères et autres employeurs publics dont les finalités peuvent apparaître, pour certaines, un peu « périphériques » par rapport à la problématique du financement des pensions en elle-même.

Cependant, il faut tenir compte du fait que, si l'équilibre global du compte d'affectation spéciale est mieux que respecté à court et plus encore à long terme, une période plus incertaine pourrait être traversée à moyen terme sous l'effet d'une dégradation transitoire du rapport démographique 247 ( * ) .

L'excédent structurel des régimes de pensions des fonctionnaires civils et militaires de l'État, au terme duquel on pourrait considérer que l'achat par un investisseur des engagements de retraite qu'ils portent constituerait un placement avisé (du moins aux conditions actuelles de financement), dépend évidemment d'un grand nombre d'hypothèses plus ou moins robustes, mais surtout plus ou moins soutenables.

Cette problématique de soutenabilité ouvre sur des questions plus larges.

Les régimes de retraite n'ont pas qu'une dimension macro-financière ; ce sont également des « véhicules d'informations », reflets de préférences collectives plus ou moins explicitées, susceptibles d'orienter les choix individuels, et passibles, sous cet angle, d'évaluation en termes d'efficacité et d'équité .

De ce point de vue, l'année 2016 a été marquée par quelques travaux d'importance dont votre rapporteur spécial recommande l'approfondissement.

E. UNE EXÉCUTION PRESQUE « NOMINALE » DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE EN 2016

Si les crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2016 ont été presque intégralement dépensés , avec ainsi des taux de consommation des crédits très élevés, on relève, malgré tout, que les dépenses effectives ont été légèrement moindres que prévu dans la loi de finances de l'année.

Elles ont laissé un niveau de dépenses inférieur de l'ordre de 176 millions d'euros (soit 0,3 % des ouvertures initiales) par rapport au plafond alors fixé.

Une fois pris en compte les mouvements de crédits intervenus en gestion (dans les faits, des reports de crédits de l'exercice précédent), qui ont abouti à des ouvertures nettes de plus de 1,2 milliard d'euros (rehaussant les crédits initiaux de 2,2 %), la sous-consommation des dotations disponibles ressort comme plus significative avec un déficit de consommation des crédits de 1,4 milliard d'euros (2,2 % des dotations finalement disponibles).

Les reports de crédits intervenus en début d'année (arrêté du 25 mars 2016) auront finalement été inutiles permettant tout au plus de procéder à de nouveaux reports sur l'exercice 2017.

C'est le programme 741, pourtant celui qui a connu la plus forte croissance de ses charges en 2016, qui a été concerné au premier chef par la sous-consommation des crédits avec 140 millions d'euros d'excès de dotations initiales et 1,3 milliard d'euros de réserve de crédits sur l'ensemble des dotations rendus disponibles.

La hiérarchie observée de ce point de vue ne fait que refléter celle des charges des différents programmes du compte qui sont très disparates. Les deux autres programmes ont connu des taux d'exécution un peu moins élevés mais les masses concernées sont sans commune mesure avec celles du programme 741.

La sous-exécution des crédits résulte d'évolutions diverses, exposées ci-dessous, dont certaines apparaissent essentiellement conjecturales. On relève, en particulier, l'existence d'une économie de 37 millions d'euros (plus d'un cinquième du déficit d'exécution) 248 ( * ) par rapport aux dotations prévues en loi de finances initiale au titre de la gestion des affiliations rétroactives des militaires. Celles-ci permettent aux fonctionnaires, en général et notamment les militaires quittant l'armée, d'être affiliés aux régimes de retraites de droit commun.

Équilibre en recettes et en dépenses du CAS « Pensions » en 2016

(crédits de paiement, en millions d'euros)

Recettes

Dépenses

Écart dépenses 2016 par rapport à

Solde

LFI 2016

Exécution 2016

Exécution 2015

LFI 2016

Exécution 2016

Exécution 2015

LFI 2016

Prévision LFI 2016

Exécution 2016

Programme 741
« Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité »

54 010

53 908

52 537

53 297

53 157

+ 1 2 %

- 0,2 %

+ 713,4

+ 751,6

Programme 742
« Ouvriers des établissements industriels de l'État »

1 873

1 897

1 903

1 916

1 898

-0,3 %

- 0,9 %

- 43,4

- 1,1

Programme 743
« Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions »

1 991

1 984

2 095

1 991

1 973

- 5,8 %

- 0,9 %

0

+ 11,2

Total mission

57 875

57 789

56 535

57 204

57 028

+ 0,9 %

- 0,3 %

+ 670

+ 762,4

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données du rapport annuel de performances du compte d'affectation spéciale « Pensions » annexé au projet de loi de règlement pour 2016)

Pour les recettes , les prévisions pour 2016 se montaient à 57,875 milliards d'euros. Les recettes finalement encaissées ont été légèrement inférieures à cette prévision , faisant apparaître, avec 57,789 milliards d'euros, un déficit de réalisation de 85,427 millions d'euros (0,1 % de la prévision). L'écart peut être jugé minime puisqu'il ne correspond guère plus qu'à un millième des recettes anticipées.

L'essentiel des moins-values de recettes a été constaté sur le premier programme du compte, ce qui n'a rien que de normal compte tenu de son importance relative. Ce sont les contributions des employeurs, en particulier celles versées par des entités extérieures à l'État (les établissements publics, les collectivités territoriales, Orange SA) qui se sont révélées légèrement moindres que prévu.

Dans ces conditions, l'équation de la réalisation des opérations du compte a permis de constater un excédent plus important que celui initialement projeté . La programmation budgétaire extériorisait un excédent prévisionnel du compte de 670,01 millions d'euros. Avec 762,47 millions d'euros , il s'est avéré supérieur de 92,46 millions d'euros au solde prévisionnel (un niveau supérieur de 13,8 % par rapport à la prévision).

F. DES MASSES FINANCIÈRES DONT LA LÉGÈRE ACCÉLÉRATION NE REMET PAS EN CAUSE LES INFLEXIONS INTERVENUES APRÈS LES RÉFORMES APPLIQUÉES AUX RÉGIMES DE RETRAITE DES FONCTIONNAIRES

Les masses financières retracées dans le CAS connaissent une certaine accélération. Mais, celle-ci reste modérée par rapport aux tendances observées sur longue période qui ont connu une rupture après la mise en oeuvre des réformes des régimes de retraite de la fonction publique.

1. Les recettes ont connu un dynamisme contrasté, principalement attribuables à l'alourdissement des cotisations salariales qui a pesé sur les salaires nets des fonctionnaires

En ce qui concerne les recettes, malgré la légère déception enregistrée par rapport aux prévisions de la loi de finances pour 2016, une croissance de 0,8 % peut être observée de 2015 à 2016.

Le supplément de recettes s'élève à 476 millions d'euros.

Il se trouve concentré sur le programme 741 (+ 607 millions d'euros), les deux autres programmes connaissant, de leur côté, une diminution de leurs recettes.

Évolution des recettes du compte entre 2015 et 2016

Exécution 2015

Exécution 2016

Écart (en %)

Écart (en valeur)

Programme 741

53 301

53 908

1,1

607

Programme 742

1 958

1 897

- 3,1

- 61

Programme 743

2 054

1 984

- 3,5

- 70

Total

57 313

57 789

0,8

476

Source : commission des finances du Sénat à partir des données des rapports annuels de performances pour 2015 et 2016

Les variations de recettes peuvent être décomposées comme suit.

Contributions à l'augmentation des recettes du CAS entre 2015 et 2016

(en millions d'euros)

Relèvement du taux de cotisation salariale

190

Augmentation des assiettes de contributions des employeurs

490

dont :

civils

400

militaires

90

Diminution des recettes du programme « Ouvriers et établissements industriels de l'État »

- 60

dont :

diminution de la subvention d'équilibre versée par l'État

- 48,7

diminution des subventions versées au programme 743

- 70

Source : commission des finances du Sénat d'après les données des annexes budgétaires (2016)

On relève l'importance relative du rôle joué par le relèvement du taux de cotisation sur les rémunérations d'activité des fonctionnaires dans l'augmentation des recettes observée en 2016 (près de 40 % de la variation nette de recettes à mettre en regard, à titre d'exemple, d'un poids relatif de 11,1 % de ces cotisations dans le total des recettes du programme 741).

Quant aux contributions versées par l'État employeur, en l'absence de relèvement de leur taux, elles ont procédé d'une revalorisation des assiettes de ces contributions, qui a eu un effet haussier sur les recettes correspondantes. Cet effet a toutefois été partiellement compensé par une réduction des subventions d'équilibre versées aux programmes 742 et 743 si bien qu'au total, la variation des contributions de l'État (et des établissements) employeur s'est située autour de 280 millions d'euros.

Les évolutions des recettes du programme 741 détaillées ci-dessous illustrent l'existence d'un dynamisme différencié des deux principales catégories de recettes finançant les pensions civiles et militaires.

Évolution des différentes catégories de recettes du programme 741 entre 2015 et 2016

Exécution 2015

Exécution 2016

Variation entre 2015 et 2016
(en %)

Variation entre 2015 et 2016
(en valeur)

Cotisations salariales

5 926

6 201

4,6

275

Contributions des employeurs

46 538

46 886

0,7

348

Autres

837

821

- 1,9

- 16

Total

53 301

53 908

1,1

607

Source : commission des finances du Sénat

La croissance des cotisations correspondant à des retenues sur les traitements des fonctionnaires a suivi un rythme 9 fois plus soutenu que les contributions des employeurs.

Ce différentiel provient, à dynamiques des assiettes de prélèvements identiques, d'une élévation du taux des cotisations salariales , qui a épargné les contributions des employeurs.

En ce qui concerne l'assiette des prélèvements, son évolution est restée très contenue en 2016 . Outre les effets traditionnels de revalorisation due au « glissement-vieillesse-technicité », auxquels il faut ajouter celui de mesures catégorielles diverses, il convient pourtant de mettre en évidence cette année l'impact de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique et le commencement de l'application du protocole sur l'amélioration des parcours professionnels, des carrières et rémunérations (PPCR), dont les impacts à long terme ont été exposés par votre rapporteur spécial 249 ( * ) , qui consiste à élargir légèrement la part indiciaire des rémunérations publiques, et, par-là, augmente l'assiette des prélèvements alimentant les compte d'affectation spéciale.

Ces deux évolutions n'auront eu en 2016 qu'une faible incidence sur les recettes du CAS.

L'effet de la revalorisation du point d'indice intervenue au début du mois de juillet (+ 0,6 %) sur la base des recettes du compte peut être estimé à un peu moins de 0,2 %, certaines recettes du compte n'étant pas affectées par cette revalorisation.

Quant au PPCR, son impact sur les recettes des régimes des trois volets de la fonction publique (fonction publique d'État, fonction publique territoriale et fonction publique hospitalière) a été estimé dans le cadre des travaux de simulation demandés par votre rapporteur spécial à 78 millions d'euros en 2016 (cotisations salariales et contributions employeurs confondues). À supposer qu'une cinquantaine de millions d'euros reviennent au CAS, on mesure l'effet encore limité d'un protocole qui devrait avoir une plus forte incidence à moyen et long terme (voir infra ).

Dans ces conditions, la contribution de l'augmentation du taux de cotisations salariales (de 9,54 % à 9,94 %) apparaît comme le principal facteur de dynamisme des recettes en 2016. Elle s'est traduite par une hausse de 4,2 % du taux de prélèvement supporté par les fonctionnaires qui, accompagnée par l'augmentation de la base des prélèvements, a engendré l'accroissement important (4,6 %) des produits des cotisations salariales.

Celui-ci a excédé les gains de revenus d'activité engendrés par les mesures générales de revalorisation salariale appliquées en cours d'année.

2. Une progression mesurée des dépenses

La progression des dépenses a été en ligne avec celle des recettes (autour de 0,9 %). Elle a été un peu plus rapide (+ 1,2 %) pour les seules dépenses de pensions civiles et militaires retracées par le programme 741, qui concentre près de 95 % des dépenses du CAS.

Comme ces dernières années, la modération des charges supportées par le compte provient essentiellement d'une révision de l'inflation qui a permis, à travers l'absence de toute revalorisation des pensions au mois d'octobre, d'économiser 66 millions d'euros sur les dépenses du compte (programmes 741 et 742) 250 ( * ) , les charges du programme 743 échappant à ce « gel » d'indexation dans la mesure où elles sont liées à l'indice de traitement brut-grille indiciaire de la fonction publique dans le cadre du mécanisme dit du « rapport constant ». Il faut toutefois tenir compte d'un effet modéré d'alourdissement des pensions lié au protocole PPCR et à la revalorisation du point d'indice de la fonction publique au début juillet. Ces deux évolutions se sont traduits par un supplément de charges « symbolique », de 4 millions d'euros (2 millions d'euros chacune) pour le programme 741.

Les bilans des flux affectant le stock des pensions exercent un effet haussier sur les charges par deux canaux : l'augmentation nette du nombre des pensionnés et le renchérissement progressif de la valeur de la pension moyenne en stock.

Pour les pensions civiles, si les sortants entraînent une économie de 504 millions d'euros (pour 54 000 sorties de pensions en 2016), les entrées en pensions (53 100 pour les pensions de droit direct ; 20 400 pour les réversions) alourdissent les charges de 908 millions d'euros. Le coût unitaire des nouvelles pensions est près de deux fois plus élevé que la pension moyenne du stock (2 219 euros par mois contre 1 028 euros). Pour les pensions militaires, les entrées en paiement ont atteint le nombre de 19 700 dont 11 400 correspondant à des départs en retraite tandis que les sorties se sont élevées à 18 800. Les premières ont pesé sur les charges pour 165 millions d'euros tandis que les secondes ont engendré 117 millions d'euros d'économies. L'écart entre le montant moyen de la pension en stock (911 euros par mois) et celui des nouvelles pensions (1 657 euros) est inférieur à ce qu'il est pour les pensions civiles.

Le relèvement des bornes d'âge par la réforme de 2010 ainsi que le durcissement du régime de la décote (qui a débuté en 2016) renforcent leurs effets dans le sens d'une réduction des charges de retraite d'une année sur l'autre. En 2015 , ils avaient été chiffrés à 205 millions d'euros par rapport à une situation au fil de l'eau . Pour 2016, leur impact est évalué à 261 millions d'euros 251 ( * ) .

3. Mises en perspective

Sur longue période, tant les recettes que les charges du CAS ont connu une progression continue et forte. Mais, comme l'illustre le graphique ci-dessous, une inflexion s'est produite après la mise en oeuvre des réformes des régimes de retraite dans les fonctions publiques.

Évolution des recettes et des dépenses du CAS (2009-2016)

Source : Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016

Depuis 2009, les recettes affectées aux pensions budgétées à travers le CAS ont augmenté de 16,2 %, l'alourdissement des dépenses de pensions ayant été de 15,4 %.

Toutefois, depuis 2011-2012, une évolution à deux composantes peut être observée : une croissance ralentie des masses budgétaires et une inversion du différentiel de croissance des recettes et des dépenses au profit des premières.

Ainsi, alors que de 2009 à 2013, les dépenses du CAS avaient augmenté de 12,5 %, elles n'ont progressé au-delà (de 2013 à 2016) que de 2,6 %.

Quant aux recettes mobilisées par le CAS, leur croissance, de 12,2 % entre 2009 et 2013, a laissé place à une progression beaucoup plus modérée depuis (3,7 % entre 2013 et 2016) mais caractérisée par une inversion du différentiel de croissance entre les dépenses et les recettes.

Ce résultat n'a pas été remis en cause en 2016 malgré une légère accélération du rythme d'évolution des masses financières retracées par le CAS avec une progression des recettes et des dépenses, autour de 0,9 %, qui amorce une tendance dont la persistance doit être envisagée au vu d'évolutions structurelles (voir infra ).

G. UN EXCÉDENT APPAREMMENT DURABLE

Le bilan des recettes et des dépenses du CAS en 2016 prolonge les effets de l'inversion récente du différentiel de croissance entre les recettes et les dépenses portées par le CAS. Celui-ci a abouti à la constitution d'un excédent à partir de 2013 dont l'ampleur n'a depuis cessé de croître.

Malgré des perspectives plus incertaines à moyen terme, le régime de retraite de la fonction publique d'État ressort en projection de long terme comme sur-financé.

1. Un excédent plus fort que prévu qui contribue à accroître le « fonds de roulement » du compte

Les dynamiques effectives des recettes et des dépenses du compte en 2016 ont conduit à un solde d'exécution supérieur au niveau envisagé par la loi de finances initiale.

L'excédent a atteint 762,5 millions d'euros contre 670 millions en prévision (92,5 millions de plus que prévu).

Ce résultat prolonge la tendance à la constitution d'un solde cumulé de plus en plus fortement positif.

Source : rapport annuel de performances 2016

Depuis 2008, le solde positif cumulé du compte a été quadruplé .

Il atteint 3,2 milliards d'euros à la fin de l'exercice 2016, soit 5,6 % des dépenses totales de pensions qu'il finance. On rappelle que la prévision pour 2017 s'élève à 5,4 milliards d'euros.

Le solde se dirige vers un point où il représenterait jusqu'à plus d'un mois de dépense de pensions, niveau techniquement excessif par rapport aux normes usuelles, mais qu'il convient d'apprécier en fonction de considérations plus structurelles.

Parmi celles-ci doit d'abord être mentionné le processus de convergence des cotisations salariales de retraite des fonctionnaires avec celles en vigueur dans le régime général qui aboutit à une élévation du taux de contribution des fonctionnaires au financement du régime, même à contribution inchangée des employeurs. Compte tenu de l'objectif de parité des systèmes de prélèvement entre public et privé, la réduction du taux de contribution des employeurs apparaît comme la seule variable d'ajustement mobilisable pour limiter la progression du solde du compte.

Or, deux éléments au moins rendent cette variable peu maniable :

- ses effets sur l'équilibre entre cotisations salariales et contribution des employeurs amplifierait le mouvement déjà en marche vers un rééquilibrage ;

- et, probablement surtout, l'atténuation de la contrainte budgétaire appliquée aux ministères dans la gestion de leurs personnels qu'induirait une baisse de la contribution des employeurs.

2. Un excédent structurel ?

Le régime de retraite de la fonction publique de l'État (civile et militaire), qui représente l'essentiel des engagements du compte d'affectation spéciale, semble doté d'un excès de financement à moyen et, surtout, à long terme.

Ce résultat permet de tempérer l'impression exercée par le niveau élevé des engagements de retraite portés par l'État publiés dans le hors-bilan du compte général de l'État .

a) Des engagements de retraites élevés correspondant à un patrimoine important pour les ménages...

Ces engagements, qui totalisent l'ensemble des prestations que l'État devrait servir aux retraités actuels et, en fonction des droits acquis par eux au moment où ils sont évalués, aux personnes en activité, étaient estimés à 1 535 milliards d'euros à la fin de l'année 2015 .

Cette évaluation a été affinée dans le compte général de l'État pour 2016 avec quatre scénarios correspondant à des taux d'actualisation différenciés dont un nouveau taux d'actualisation négatif correspondant à une situation de taux d'intérêt réel négatif, qui n'a qu'une probabilité très minime d'occurrence.

Évaluation des engagements de pensions de l'État selon différentes hypothèses de taux d'actualisation

Source : compte général de l'État pour 2016

Les différentes évaluations récapitulées ci-dessus correspondent au montant des réserves dont devrait disposer l'État pour financer l'ensemble des prestations de retraite actuellement portées en engagements par l'État, tout au long de la retraite des pensionnés .

Cette estimation est sensible à de nombreux paramètres, la plupart fondés sur des hypothèses , parmi lesquelles l'espérance de vie des titulaires des droits à pension constitués au jour de l'évaluation, qui, sans être arbitraires peuvent être discutées.

On souligne également l'influence du taux d'actualisation sélectionné pour calculer l'indicateur. Plus il est bas, plus le montant des réserves dont doit disposer le débiteur doit être élevé, le rendement du fonds de pension fictif devant répondre des dettes de pensions se trouvant poitivement corrélés avec le taux d'intérêt.

Cette corrélation permet d'illustrer l'incidence des rendements d'actifs sur la valeur des engagements actuels des débiteurs, et, à travers elle, sur les liens entre la valorisation de ces engagements et le taux de croissance anticipé . Plus celui-ci est élevé, plus faible doit être le niveau des actifs en réserve nécessaire pour acquitter les dettes de pension. Avec un taux d'actualisation de 1,5 %, la valeur des actifs permettant de couvrir les engagements de retraite de l'État passe à 1 384 milliards d'euros (contre 1 535 milliards d'euros avec un taux d'actualisation de 0,18 % et 2 139 milliards d'euros avec un taux négatif de 0,49 %). Moyennant quelque simplification, 1 point de rendement supplémentaire allège les contraintes liées aux engagement de pension de l'État d'un niveau compris entre 250 milliards d'euros et 300 milliards d'euros.

Etant observé que l'indicateur des engagements de pension du hors-bilan de l'État permet d'apprécier l'équivalent patrimonial des droits à la retaite des fonctionnaires couverts par le régime, information utile à toute analyse des comportements d'épargne des ménages, on doit en nuancer l'intérêt pour ce qui concerne la soutenabilité du régime.

Celle-ci est nettement mieux appréciable à partir d'un raisonnement sur le besoin de financement du régime de retraite.

b) ...mais une capacité de financement durable du système de pensions de la fonction publique d'État

La projection des besoins de financement du régime résulte également d'un jeu d'hypothèses discutables. Il a d'ailleurs été profondément remanié en cours d'année (voir infra ) si bien que les projections déormais publiées comportent d'assez fortes différences par rapport aux précédentes.

Le compte général de l'État pour 2016 comporte de ce point de vue une projection à long terme 252 ( * ) (horizon 2050) qui extériorise un profil où, après une période de dix années d'excédents continus du compte, une période de déficit, de dix ans à nouveau, ferait place, au-delà, à une nouvelle phase d'excédents.

Financement des retraites du régime des fonctionnaires de l'État et des militaires

Source : compte général de l'État pour 2016

Il est remarquable que le solde cumulé du compte resterait constamment positif jusqu'en 2043 dans un contexte où il varierait, en valeur actualisée, entre 30 milliards d'euros, soit plus de la moitié des charges de pensions, et un retour à l'équilibre à l'échéance 2043.

Ainsi, malgré la résurgence de déficit après 2031, les charges de pensions pourraient être acquittées sans augmentation des prélèvements obligatoires jusqu'en 2043. Ce n'est qu'au-delà que les besoins de financement réguliers accumulés provoqueraient une dégradation très transitoire du solde cumulé.

A plus long terme, le système de pensions de l'État serait plus que financé, du moins si l'on se reporte aux informations publiées dans le compte général de l'État pour 2015 253 ( * ) .

La courbe verte du graphique ci-dessous cumule les barres du graphique colorées en rouge, qui figurent les excédents annuels du régime. A l'horizon de la projection (2111), l'excédent cumulé atteindrait 437 milliards d'euros .

Les résultats de la projection publiée en 2015, qui repose sur la législation en vigueur, montrent qu'en l'état actuel des financements et des projections portant sur les dépenses de pensions civiles et militaires correspondant aux engagements de retraite le régime connaît un excès de financement par rapport à une cible d'équilibre

Besoin de financement actualisé des retraites du régime des fonctionnaires civils et militaires de l'État

Source : compte général de l'État annexé au projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes pour 2015

On doit insister sur les incertitudes que comportent les projections à long terme d'équilibre du régime des pensions civiles et militaires de l'État, le solde projeté étant sensible à des erreurs portant à la fois sur les recettes et les charges projetées. La révision des projections de capacité de financement basée sur une recommandation de l'institut d'évaluation des politiques publiques au terme de laquelle les capacités de financement à horizon 2050 seraient nettement moins élevées que dans les projections usuelles en témoigne.

L'ampleur de la révision appelle une présentation beaucoup plus détaillée que celle publiée dans le compte général de l'État d'autant qu'elle tend à minorer les effets des réformes du système de retraites. Votre rapporteur spécial veillera à ce que lui soit explicité ses fondements.

En toute hypothèse, les perspectives d'équilibre de long terme du compte paraissent compatibles avec le choix entre une réduction des prélèvements obligatoires et une amélioration du niveau des pensions.

Le graphique ci-dessous, extrait des travaux du Conseil d'orientation des retraites, illustre à plus courte échéance (2059) les perspectives de réduction des prélèvements obligatoires (retenues salariales et/ou contribution des employeurs, assimilées à un prélèvement obligatoire) offertes par le surfinancement actuel du régime.

Si l'on peut remarquer certaines différences entre la projection du COR ici relatée et la projection figurant au compte général de l'État pour 2016, qui paraît liée à la substitution du modèle PABLO au modèle ARIANE préalablement employé, le recul envisageable des prélèvements obligatoires affectés au financement des retraites de la fonction publique d'État dans les différents scénarios ressort, dans certaines hypothèses, très significatif.

Scénarios d'évolution du taux de prélèvements obligatoires du régime de retraite de la fonction publique de l'État

(en points de prélèvements sur l'assiette de cotisation)

Source : Conseil d'orientation des retraites, juin 2016

Votre rapporteur spécial s'interroge sur les possibilités existant pour lisser dans le temps d'éventuels ajustements des prélèvements obligatoires d'autant que les générations actuelles semblent être confrontées à la perspective d'une baisse du rendement implicite de leurs contributions au financement du régime, ce qui, à l'évidence, ne satisfait pas au critère d'équité intergénérationnelle .

H. PAR DELÀ LES PROBLÈMES DE FINANCEMENT, CHOIX DE VIE, JUSTICE ET LISIBILITÉ

À supposer que les problèmes de financement du système de retraites publiques soient résolus, comme invitent à l'estimer les projections exposées ci-dessus, demeurent les problèmes de choix collectifs et d'évaluation de la justice du système de retraite que de nombreux travaux parus en cours d'année ont entrepris d'explorer.

Votre rapporteur spécial souhaite que ces travaux puissent être approfondis afin de disposer d'un diagnostic plus étayé encore sur l'ensemble des problématiques pertinentes associées au CAS « Pensions ».

1. La question de la répartition du temps de vie entre emploi et retraites appelle un approfondissement

La plupart des mesures prises pour ajuster le système de retraites publiques a tendu, comme pour les réformes du régime général, à élever l'âge de départ à la retraite, en instaurant des systèmes d'incitation au maintien en activité, en relevant les âges de départ en retraite ou le nombre d'années de cotisations nécessaires pour disposer d'une pension à taux plein.

Ces mesures se sont traduites par un relèvement progressif de l'âge effectif de départ en retraite d'autant qu'elles se sont inscrites dans un contexte marqué par un décalage dans l'entrée en emploi du fait de l'extension du temps de formation initiale, des accidents de vie professionnelle plus nombreux et des incertitudes sur la valeur future des pensions du fait de la modification des règles d'indexation.

Le relèvement de l'âge de départ en retraite, qui satisfait des conditions d'équilibre financier des régimes de retraite, est, en outre, souvent justifié par l'allongement de l'espérance de vie et par un objectif d'élévation du taux d'activité des seniors.

a) Réduction du temps en retraite et allongement du temps au travail, une relation à mieux apprécier

Sur ce dernier point, il existe une différence importante entre la situation des affiliés du régime général et de ceux des fonctions publiques 254 ( * ) pour lesquels il existe généralement une concomitance entre la fin d'activité et l'entrée en retraite. Cependant, on peut s'interroger sur les effets de la hausse des taux d'activité des seniors de la fonction publique sur les taux d'activité des autres catégories de la population, du moins dans un raisonnement où l'effet de « file d'attente » jouerait effectivement.

En bref, il n'est pas établi que la réduction du temps de vie en retraites s'accompagne systématiquement, et à due proportion, d'un allongement de la durée de vie passée au travail , tant macroéconomiquement que du point de vue microéconomique des personnes appelées à se présenter sur le marché du travail.

Cette question devrait faire l'objet d'une évaluation fine, notamment pour ses effets sur les revenus de toute sorte (activité et revenus différés d'inactivité des générations futures) .

b) Report de l'âge de la retraite, allongement de l'espérance de vie et durée de vie en retraite en bonne santé, une combinatoire à préciser

Quant à l'incidence du décalage de l'âge de liquidation des pensions sur la répartition entre temps de travail et temps de retraite, il ressort d'un document de travail publié en cours d'année 255 ( * ) qu'elle suit des profils différenciés selon les générations. Si, globalement, une certaine progression subsisterait malgré le relèvement des âges de départ en retraite, elle ne serait pas proportionnelle à l'élévation de l'espérance de vie et connaîtrait des modulations selon un certain nombre de caractéristiques sociodémographiques, dont il faut recommander la prise en compte dans les règles de liquidation des pensions .

Tant l'existence des catégories actives de la fonction publique que celle du compte pénibilité dans le régime privé témoignent que cette préoccupation n'est pas absente des systèmes de retraites.

Toutefois, une évaluation plus systématique, qui devrait comprendre une dimension générationnelle, s'impose .

c) Quel objectif de parité de niveau de vie en retraite et en activité ?

Un élément important de la répartition entre temps de travail et temps de retraite réside dans les conditions de niveau de vie attachées à chacune de ces situations.

L'un des objectifs historiques de la politique des retraites a été d'assurer une certaine homogénéité entre le niveau de vie en retraite et en activité.

La réforme des conditions d'indexation des pensions déliées de toute référence à la croissance économique tend à instituer un décalage entre la dynamique des revenus d'activité, et de la propriété, et celle des retraités.

Sur la base d'une vingtaine d'années passées en retraite et d'un différentiel de 1 % entre l'indexation des retraites et la croissance économique, l'écart de gains de pouvoir d'achat dépasse 20 % entre les actifs et les retraités au cours de la période de perception de la retraite.

Ces perspectives accentueraient la tendance actuelle à un décrochage entre le niveau de vie des retraités et celui des actifs après l'atteinte d'une quasi-parité au milieu des années 2000 que certaines réformes tendant à restructurer le système des prélèvements obligatoires autour d'une plus grande neutralité de l'origine des revenus pourraient accentuer.

La soutenabilité des effets de toutes sortes d'un tel décrochage, qui est une variable centrale de la « planification » des retraites, mériterait d'être évaluée sous l'angle des comportements des agents en tenant le plus grand compte de la distribution des droits de retraite entre ceux-ci 256 ( * ) .

Le recul de l'attractivité des systèmes de retraite de base ne saurait être indifférent du point de vue de nombre de paramètres majeurs de la vie économique : taux d'épargne, répartition des revenus, incitations au travail...

2. La question des différences entre le régime de retraites de la fonction publique d'État et le régime général

Malgré des réformes qui en ont homogénéisé de nombreuses règles, il existe des différences institutionnelles importantes entre le régime général de retraites et celui de la fonction publique d'État.

Les travaux récemment publiés conduisent à attribuer à des différences a priori considérables des effets mineurs.

Toutefois, ces résultats devraient être complétés afin de mieux faire ressortir les niveaux comparés des taux de rendement implicites des régimes et d'appréhender certaines situations concrètes.

a) Des différences institutionnelles a priori majeures demeurent

Les réformes des retraites ont tendu à faire converger les règles applicables aux salariés du secteur privé et aux fonctionnaires. Mais des différences subsistent.

L'architecture des régimes et les règles de calcul (en cas de retraite sans décote ni surcote)

Régimes de salariés du privé

(CNAV, MSA salariés, ARRCO, AGIRC)

Régimes de fonctionnaires

(CNRACL, régime de la FPE, RAFP)

Partie

« principale »

des

rémunérations

Rémunérations sous le plafond de la sécurité sociale (= environ 85 % du total des rémunérations en moyenne)

Régime de base ( CNAV ou MSA salariés ) :

Pension = 50 % x salaire moyen des 25 meilleures années x proratisation

+ Régime complémentaire ARRCO :

Pension = nombre de points acquis sur toute la carrière x valeur du point

+ Régime supplémentaire d'entreprise

(éventuellement) : règles spécifiques à chaque régime

Traitement indiciaire de base (= environ 75 à 80 % des rémunérations totales en moyenne, dépend du grade et de l'ancienneté)

Régime intégré ( régime des fonctionnaires d'État , ou CNRACL pour les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers) :

Pension = 75 % x traitement indiciaire

des 6 derniers mois x proratisation

Reste des

rémunérations

Rémunérations au-dessus du plafond de la sécurité sociale (= environ 15 % du total des rémunérations)

Régime complémentaire ARRCO (pour les non-cadres) ou AGIRC (pour les cadres) :

Pension = nombre de points acquis sur toute la carrière x valeur du point

+ Régime supplémentaire d'entreprise

(éventuellement) : règles spécifiques à chaque régime

Primes et indemnités (= environ 20 à 25 % du total des rémunérations)

(dans la limite de 20% du traitement indiciaire)

Régime additionnel de la Fonction publique ( RAFP ) :

Pension = coefficient d'ajournement x nombre de points acquis sur toute la carrière (depuis 2005) x valeur du point

+ Une partie des primes est prise en compte dans la pension du régime intégré (pour certaines catégories actives)

+ Rémunérations non prises en compte pour la retraite : participation, intéressement...

+ Rémunérations non prises en compte pour la retraite : partie des primes au-delà de 20 % du traitement indiciaire

Parmi ces différences, les conditions du calcul de liquidation des droits dans le régime de base (assiette de référence et taux plein) ressortent tout particulièrement comme l'indique le tableau ci-dessus.

Néanmoins, d'autres différences doivent être prises en compte, parmi lesquelles la structure des rémunérations prises en compte et l'existence de régimes complémentaires, voire supplémentaires, nettement plus développés dans le secteur privé.

b) Au total, des taux de remplacement analogues ?

Une fois la totalité des différences institutionnelles prises en compte, les taux de remplacement offerts par les pensions publiques et privées seraient globalement proches.

Tel est l'enseignement du tableau ci-dessous qui porte sur le taux de remplacement net médian dans la fonction publique d'État et dans le secteur privé.

Taux de remplacement nets médians dans la fonction publique d'État et le secteur privé

Le taux de remplacement net médian ressort comme légèrement supérieur dans le secteur privé mais des écarts de sens inverse caractérisent certaines situations-types si bien qu'une analogie des situations peut être dégagée.

Par ailleurs, les âges de liquidation dans les deux catégories se sont progressivement homogénéisés, du moins pour les personnels ne relevant pas des statuts « actifs », ce qui permet d'exclure, sauf à constater des espérances de vie en retraite différentes, une différenciation réelle résultant d'un effet d'accumulation.

Âges moyens des nouveaux retraités de 2002 à 2014

Cependant, les situations particulières des agents considérés comme « actifs », qui continuent de liquider leurs pensions à un âge beaucoup plus précoces conduisent à nuancer la conclusion d'une équivalence des taux de remplacement. Encore conviendrait-il de disposer d'une information plus aboutie sur la durée de perception de la retraite par ces agents pour disposer d'un diagnostic plus précis.

c) Mais un flou à dissiper sur le rendement des contributions des affiliés

L'existence d'un taux de remplacement analogue dans le régime de la fonction publique d'État et dans le régime général n'équivaut pas à constater que la justice contributive est assurée. Le recours à un critère d'équivalence des taux de rendement implicites des régimes est nécessaire pour apprécier cette condition 257 ( * ) .

Cette question difficile en soi l'est encore davantage quand on la considère d'un point de vue prospectif dans la mesure où les taux de contribution d'équilibre sont appelés à évoluer sous l'effet d'un grand nombre de variables.

En toute hypothèse, on peut mentionner à ce stade les travaux réalisés par le COR et publiés en juin 2016 qui tendent à comparer les taux de prélèvement qui équilibreraient les différents régimes, ces taux pouvant être considérés comme illustratifs des taux de contribution implicites desdits régimes.

Si a priori , d'un point de vue nominal, les taux de contribution aux régimes de pensions varient considérablement, un certain nombre de corrections permettant d'assurer la significativité des comparaisons aboutissent à un panorama plus homogène que celui offert par la comparaison des taux faciaux.

Au total, d'un écart de près de cinquante points entre le régime de la fonction publique d'État et le régime général, elles ramènent l'écart entre ces régimes à 6 points.

Taux de prélèvement corrigés des écarts de champs et de rapports démographiques de grands régimes de retraites

Les résultats obtenus restent d'une interprétation difficile dans la mesure où l'écart final de taux de contribution d'équilibre peut refléter des profils de revenus des affiliés aux régimes en cause différents et devrait être corrigé d'effets fiscaux généraux non pris en compte.

Il convient également de mentionner les difficultés que rencontre l'analyse du fait de l'hétérogénéité des structures de financement des régimes qui font une place plus ou moins grande à des ressources prélevées sur des tiers .

Le tableau ci-dessous en témoigne.

Structure de financement des retraites par groupe professionnel en 2011

Le niveau relatif des cotisations sociales dans le total des financements varie nettement d'un régime à l'autre et le renforcement de la part des pensions financées par l'impôt en liaison notamment avec les allègements de cotisations sociales trouve un écho particulier dans les régimes hors fonction publique (salariés, exploitants agricoles, artisans et commerçants et régimes spéciaux).

De même, l'existence de droits non contributifs plus ou moins développés selon les régimes (voir le tableau ci-dessous ) devrait être prise en compte pour apprécier la hiérarchie des taux de rendement des cotisations sociales entre régimes (comme d'ailleurs au sein de chaque régime).

Les dépenses d'avantages non contributifs en 2012

En toute hypothèse, votre rapporteur spécial recommande que le débat sur les retraites puisse reposer sur des comparaisons de taux effectifs de contribution dans les différents régimes ainsi que sur des taux de rendement implicites suffisamment précis pour informer l'appréciation de la justice contributive du système de retraite.

MISSION « RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES » - MM. CHARLES GUENÉ ET CLAUDE RAYNAL, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

1. La mission « Relations avec les collectivités territoriales »

La mission « Relations avec les collectivités territoriales » retrace principalement les crédits de dotations versées aux collectivités territoriales en compensation de transferts de compétences et aussi, mais dans une proportion moindre, de certaines dotations spécifiques, comme la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation politique de la ville (DPV) ou encore la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), créée en 2016.

Toutefois, les principaux transferts de l'État au profit des collectivités territoriales et en particulier la dotation globale de fonctionnement (DGF) correspondent à des prélèvements sur recettes et, à ce titre, ne figurent pas dans cette mission.

La loi de finances initiale prévoyait 3,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 3 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). 96 % des AE ont été exécutées, contre 93 % des crédits de paiement.

Évolution et exécution des crédits de la mission

(en millions d'euros)

Exécution 2015

Crédits votés LFI 2016

Exécution 2016

Évolution 2015-2016

Exécution 2016 / LFI 2016

Relations avec les collectivités territoriales

AE

2 983,1

3 899,8

3 726,6

24,9 %

- 4,4 %

CP

2 747,6

3 034,0

2 813,7

2,4 %

- 7,3 %

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

AE

2 685,3

3 565,6

3 435,4

27,9 %

- 3,7 %

CP

2 451,6

2 710,8

2 491,9

1,6 %

- 8,1 %

Concours spécifiques et administration

AE

297,8

334,1

291,2

- 2,2 %

- 12,9 %

CP

296,0

323,2

321,8

8,7 %

- 0,4 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

2. Le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales »

Le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » retrace principalement les versements aux collectivités territoriales, du produit des impôts locaux perçus pour leur compte par l'État. Il garantit également le versement, depuis 2014, de frais de gestion sur divers impôts locaux qui ont été transférés aux départements et aux régions.

En 2016, les recettes du compte s'élèvent à 100,95 milliards d'euros, en hausse de 3,9 % par rapport à l'année précédente.

Recettes du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales »

(en millions d'euros)

Réalisation 2015

Prévision LFI 2016

Réalisation 2016

Exécution 2016 / exéc. 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie

31,4

0,0

0,0

- 100,0 %

Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes

97 097,5

104 545,9

100 954,4

4,0 %

96,6 %

Total du compte de concours financiers

97 128,9

104 545,9

100 954,4

3,9 %

96,6 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

Les dépenses du compte d'avance s'élèvent à 99,6 milliards d'euros, en hausse de 2,6 % par rapport à l'année précédente.

Exécution du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales »

(en millions d'euros)

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exéc. 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie

AE

0,0

6,0

0,0

CP

0,0

6,0

0,0

Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes

AE

97 055,1

103 713,4

99 573,1

2,59 %

96,01 %

CP

97 055,1

103 713,4

99 573,1

2,59 %

96,01 %

Total du compte de concours financiers

AE

97 055,1

103 719,4

99 573,1

2,59 %

96,00 %

CP

97 055,1

103 719,4

99 573,1

2,59 %

96,00 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

Le compte d'avances enregistre un solde excédentaire de 1,38 milliard d'euros, qui s'explique notamment par le fait que le trop versé des acomptes de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) est restitué aux entreprises par le biais de la mission « Remboursements et dégrèvements », ce qui conduit à un excédent structurel du compte d'avances.

Évolution du solde du compte de concours financiers

(en millions d'euros)

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Solde du compte

- 453

- 458

- 1 453

10 247

696

1 089

- 375

838

74

1 381

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performance (RAP)

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

L'exercice 2016 a été marqué par la création, au sein de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), dotée de 800 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 120 millions d'euros en crédits de paiement (CP).

1. Des dotations d'investissement victimes d'une réserve de précaution aveugle

En raison d'un dégel tardif de la réserve de précaution, les dotations d'investissement ont été utilisées pour assurer le versement des dotations générales de décentralisation (DGD), constitutionnellement garanties.

La mise en réserve initiale, de 285 millions d'euros en AE et de 217 millions d'euros en CP, correspond à 8 % des crédits ouverts. Dès le mois d'avril, un gel supplémentaire de 19 millions d'euros en AE et de 21 millions d'euros en CP a été opéré.

Selon le rapport annuel de performances, « le dégel partiel dans le cadre du schéma de fin de gestion (...) à hauteur de 262,3 millions d'euros en AE et de 76,8 millions d'euros en CP, n'a pas permis le dégel des CP de plusieurs DGD, mis en réserve initialement ou dans le cadre du surgel. (...) Les dotations d'investissement ont donc contribué, par des mouvements de fongibilité interne, à faire en sorte que la totalité des crédits constitutionnellement dus (...) soient délégués et consommés à la fin de l'exercice. »

Cette situation met en évidence les limites d'une mise en réserve importante des crédits des missions (8 % des crédits hors dépenses de personnel), quelles que soient les caractéristiques des dépenses : le gel de crédits constitutionnellement garantis a conduit à minorer les dotations de soutien à l'investissement local, pourtant mises en avant par le Gouvernement.

Extrait de la première séance publique du 9 novembre 2015, à l'Assemblée nationale

Marylise Lebranchu , ministre de la décentralisation et de la fonction publique, « Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, partager entre l'État, les collectivités et notre système de santé l'effort de redressement des finances publiques ne signifie pas que l'on sacrifie l'avenir : d'abord parce que nous laissons à nos enfants et petits-enfants les marges de progrès que nous leur devons ; ensuite parce que le Gouvernement vous propose d'accompagner de mesures fortes l'effort demandé aujourd'hui aux collectivités territoriales.

« Nous sommes tous convaincus du rôle essentiel que jouent les collectivités territoriales, lorsqu'il s'agit d'offrir des services publics de qualité à nos concitoyens ou de soutenir l'activité économique. Ce rôle, nous devons le pérenniser et le conforter. C'est pourquoi, outre les mesures de péréquation contenues dans le PLF, un fonds de 1 milliard d'euros est inscrit à l'article 59 afin de soutenir l'investissement local . »

Ainsi, ce mouvement de fongibilité a conduit à diminuer les crédits disponibles de 112 millions d'euros :

- de 34 millions d'euros de CP de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) ;

- de 10 millions d'euros au titre de la dotation politique de la ville (DPV) ;

- enfin, de 66 millions d'euros au titre de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL).

Vos rapporteurs spéciaux relevaient déjà, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2016, que face « à la baisse des investissements locaux de 8 à 9 milliards d'euros en deux ans, le Gouvernement répond par un fonds de soutien dont les crédits de paiement (CP) n'atteindront que 120 millions d'euros en 2016 ». Finalement, moins de la moitié des crédits a été rendue disponible pour les communes et seuls 35 % de l'enveloppe initiale promise ont été effectivement consommés.

Consommation des principales dotations d'investissement aux communes (en crédits de paiement)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

Toutefois, la consommation des autorisations d'engagement est conforme à la prévision et devrait permettre un soutien effectif des communes concernées par des décaissements progressifs sur les prochains exercices - ce qui contraindra donc encore plus les marges de manoeuvre des futurs exercices et justifie encore plus d'exonérer cette mission de l'application de la réserve de précaution.

Consommation des principales dotations d'investissement aux communes (en autorisations d'engagement)

(en millions d'euros)

LFI

Crédits disponibles

Crédits consommés

Taux de consommation par rapport aux crédits de LFI

DETR

815,6

816

770,6

94,5 %

Dotation politique de la ville

100

100,84

96,3

96,3 %

Dotation de soutien à l'investissement

800

790,6

790,6

98,8 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des rapports annuels de performances (RAP)

2. Des dotations mises en ligne tardivement

La notification de la dotation forfaitaire et des dotations de péréquation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) se stabilise entre le 31 mars le 10 avril. Tardive, cette publication rend difficile la construction des budgets locaux, surtout dans un contexte de diminution de son montant.

Plus généralement, la direction générale des collectivités locales (DGCL) considère que la mise en ligne des dotations et de certains critères suffisent à l'information du Parlement et ne lui fournit plus l'ensemble des données utilisées pour la répartition de la DGF.

3. Un faux compte d'avances

Le fonctionnement du compte d'avances aux collectivités territoriales n'est pas satisfaisant : il ne s'agit pas d'avances dans la mesure où les sommes versées aux collectivités ne sont pas remboursées par celles-ci.

En outre, les informations contenues dans le rapport annuel de performances se bornent à constater les produits versés aux collectivités territoriales, sans aucune analyse sur les évolutions constatées, par type d'impôts notamment.

MISSION « REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS » - MME MARIE-FRANCE BEAUFILS, RAPPORTEURE SPÉCIALE

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

Les crédits consommés sur la mission « Remboursements et dégrèvements » sont, après une forte augmentation entre 2014 et 2015 que rappelle le graphique ci-après, restés stables entre 2015 et 2016, avec une croissance de 0,1 % .

Exécution des crédits (CP) de la mission « Remboursements et dégrèvements »
et de programmes 200 et 201 sur les trois derniers exercices

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Comme le souligne le tableau ci-après, cette apparente stabilité cache en réalité des évolutions très différentes des deux programmes qui composent la mission. La consommation du programme 201 « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » est en forte hausse (8,8 %) , quand les crédits consommés pour le programme 200 « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État » sont en légère baisse (- 1,1 %).

Les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » ont un caractère évaluatif, conformément à l'article 10 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances. Les crédits adoptés en loi de finances ne sont donc pas des plafonds de dépense mais des prévisions.

Exécution des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » par programme en 2016

(en millions d'euros)

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Évolution exécution 2016 / 2015

Mission et programmes

Programme 200

Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État

AE

91 509,7

88 194,2

90 617,2

- 1,0 %

CP

91 509,0

88 194,2

90 617,7

- 1,0 %

Programme 201

Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux

AE

11 676,2

11 970,0

12 707,9

8,8 %

CP

11 676,3

11 970,0

12 707,9

8,8 %

Mission

Remboursements

et dégrèvements

CP

103 185,3

100 164,2

103 325,6

0,1 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

1. Une exécution supérieure aux crédits votés en LFI, mais inférieure aux prévisions révisées en LFR
a) Des crédits revus à la hausse en LFR

La loi de finances rectificative pour 2016 258 ( * ) (LFR 2016) a actualisé à l'automne 2016 les prévisions de consommation des crédits pour la mission « Remboursements et dégrèvements », les majorant de près de 4,6 milliards d'euros , soit 4,6 % des crédits votés en loi de finances pour 2016 259 ( * ) . Cette majoration est venue abonder principalement les crédits du programme 200 (4,9 %) et, dans une moindre mesure, ceux du programme 201 (2,4 %), comme le précise la répartition des crédits dans le tableau ci-après.

Évolution des prévisions en LFI et LFR des crédits évaluatifs des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » et des programmes 200 et 201 pour l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Crédits votés LFI 2016

Ouvertures LFR 2016

Crédits prévus après LFR 2016

Missions et programmes

Remboursements et dégrèvements CP

100 164,2

4 592,5

104 756,6

Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État

AE=CP

88 194,2

4 306,5

92 500,6

Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux

AE=CP

11 970,0

286,0

12 256,0

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

b) Une sous-exécution de la mission, des différences d'exécution entre les programmes

L'exécution 2016 a montré des écarts importants par rapport aux prévisions : elle a en effet dépassé de près de 3,2 % la prévision initiale , comme le montre le tableau ci-après, mais a aussi été inférieure de près d'1,4 % aux prévisions actualisées en loi de finances rectificative.

Les deux programmes suivent des trajectoires différentes dans leur exécution 2016 :

- le programme 200, qui avait porté la plus grande majoration en loi de finances rectificative, a ainsi finalement montré une sous-exécution de près de 2 %. En effet, les remboursements d'excédents liés à la mécanique de l'impôt sur les sociétés ont été moins élevés que prévus, en raison d'une augmentation du bénéfice fiscal moindre qu'anticipée. Aussi, les remboursements de crédits de TVA, bien plus élevés que prévus en loi de finances initiale, se sont révélés moindres que la prévision révisée en loi de finances rectificative ;

- le programme 201, qui avait déjà vu ses crédits revus à la hausse dans le cadre de la loi de finances rectificative, a finalement montré une sur-exécution de près de 3,7 %.

L'exécution budgétaire 2016 montre une nouvelle fois la difficile prévision des consommations de crédits pour la mission « Remboursements et dégrèvements », que votre rapporteure spéciale a exposé dans un récent rapport d'information 260 ( * ) .

Exécution 2016 des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » et des programmes 200 et 201 au regard des prévisions

(en millions d'euros)

Crédits votés LFI 2016

Crédits prévus après LFR 2016

Crédits exécutés 2016

Évolution exécution 2016 / LFI 2016

Exécution 2016 / prévisions

Missions et programmes

Remboursements et dégrèvements

CP

100 164,2

104 756,6

103 325,6

3,2 %

- 1,4 %

Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État

AE=CP

88 194,2

92 500,6

90 617,7

2,7 %

- 2,0 %

Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux

AE=CP

11 970,0

12 256,0

12 707,9

6,2 %

3,7 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

2. Une diminution en trompe l'oeil des consommations pour les actions du programme 200

Les crédits consommés au titre du programme 200 « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État » ont diminué de 0,89 milliard d'euros entre 2015 et 2016. La répartition des dépenses par action est décrite par le graphique ci-après.

Pour autant, cette baisse apparaît comme un trompe-l'oeil de la dynamique des crédits de ce programme.

Exécution des crédits (CP) du programme 200 « Remboursements et dégrèvements d'État » par action en 2015 et 2016

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

a) Une légère baisse ...

La baisse des dépenses du programme 200 est le résultat de deux baisses de caractères et d'importances différents :

- la disparition de la prime pour l'emploi à compter des revenus 2015 a conduit à la disparition des dépenses liées à ce dispositif au sein de l'action 12, provoquant une baisse substantielle (- 1,93 milliard d'euros) des crédits. Seules subsistent en 2016 des dépenses issues de réclamations contentieuses (37 millions d'euros en 2016) ;

- la baisse des admissions en non-valeur (action 13), après des niveaux élevés lors des deux exercices précédents, occasionnant une baisse de près d'un demi-milliard d'euros.

b) ... qui cache deux postes dynamiques de dépenses

En excluant ces deux éléments, l'exécution 2016 aurait été, comme le souligne la Cour des comptes, en progression de 1,37 milliard d'euros par rapport à 2015.

La dynamique des crédits du programme 200 porte sur deux aspects :

- un coût plus important en 2016 des contentieux communautaires , dont l'importance des enjeux financiers a été rappelée par votre rapporteure spéciale lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2017. Cette dépense pourrait s'accroître dans les exercices à venir ;

- une forte progression des dépenses liées aux crédits d'impôts. Ainsi, concernant l'impôt sur les sociétés, la mécanique même du CICE occasionne une hausse de 0,5 milliard d'euros, quand les restitutions de créances de crédit d'impôt recherche (CIR) augmentent de 0,4 milliard d'euros. Pour l'impôt sur le revenu, le crédit d'impôt pour la transition énergétique conduit à une majoration des dépenses, de l'ordre de 0,3 milliard d'euros.

3. Performance : des résultats satisfaisants dans l'ensemble

Comme le montrent les trois graphiques ci-après, chacune des cibles fixées en matière de performance par le projet de loi de finances pour 2016 a été respectée - et même dépassée - au niveau du programme 200 , qui n'a qu'un seul objectif consistant à « permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits le plus rapidement possible ». Les trois indicateurs qui déclinent cet objectif sont tous relatifs à la rapidité du traitement des demandes des contribuables , qu'il s'agisse de remboursements ou de réclamations contentieuses.

Deux remarques sont cependant à formuler :

- l'indicateur 1.1 , relatif au traitement des demandes de remboursement de crédit TVA non imputable et de restitutions d'IS remboursées, s'est légèrement amélioré en 2016 après deux années de baisse . La DGFiP note un redressement de la composante IS résultant selon elle d'une meilleure appropriation du formulaire de liquidation de cet impôt ;

- l' indicateur 1.2 , relatif à l'ancienneté des demandes de remboursement de crédit de TVA et l'indicateur 1.3 , relatif au traitement des réclamations contentieuses en matière de CAP et d'IR, marquent en 2016, comme déjà en 2015, une légère dégradation par rapport aux années précédentes.

Évolution de l'indicateur relatif au taux de demandes de remboursement de crédit TVA non imputable et de restitutions d'IS remboursées dans un délai inférieur ou égal à 30 jours

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Évolution de l'indicateur relatif à l'ancienneté des demandes de remboursement de crédit de TVA non imputable qui ont fait l'objet d'un remboursement (partiel ou total) dans un délai strictement supérieur à 30 jours

(en jours)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Évolution de l'indicateur relatif au taux de réclamations contentieuses en matière d'IR et de contribution à l'audiovisuel public traitées dans le délai d'un mois

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Le programme 201 est également associé à l'objectif « permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits le plus rapidement possible ». L'indicateur déclinant cet objectif est mesuré par le taux de réclamations contentieuses relatives à la taxe d'habitation traitées dans le délai d'un mois. Il affiche un bon résultat de 97,72 %, au-dessus de la cible (96,7 %).

Évolution du taux de réclamations contentieuses relatives à la taxe d'habitation traitées dans le délai d'un mois

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEURE SPÉCIALE

1. Une démarche de performance au point mort sur le programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État »

Le suivi de la performance du programme 200 n'apparaît toujours pas pleinement satisfaisant à deux égards : d'une part, les cibles choisies pour chacun des indicateurs, et quasi invariablement reconduites d'année en année, sont largement en-dessous des réalisations observées depuis plus de cinq ans, malgré des baisses parfois sensibles comme sur l'indicateur 1.1 depuis 2014. Il est permis de douter que ces cibles demeurent un réel facteur de mobilisation des agents et de pilotage du programme .

En outre, à un niveau plus fondamental, la focalisation du programme sur un seul objectif, celui de la rapidité, conduit à ne tenir aucun compte des conditions de travail des agents et de la nécessaire sécurisation des deniers publics . Le rapport annuel de performances indique d'ailleurs que l'objectif est en réalité double : « permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits dans les meilleurs délais », mais aussi « garantir le bien-fondé des décisions au regard de la législation ».

Votre rapporteure spéciale développe ses conclusions sur le suivi de la performance de la mission dans le cadre de son récent rapport de contrôle budgétaire précité.

2. L'impact du CICE s'amplifie, interrogeant la soutenabilité du programme 200

Votre rapporteure spéciale suit avec attention l'évolution de la gestion du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) depuis le début de sa mise en oeuvre en 2013, ainsi que son impact sur la mission « Remboursements et dégrèvements ».

a) Une montée en puissance du CICE qui pèse sur les crédits de la mission

Le CICE pèse budgétairement sur les crédits de la mission depuis 2014, année des premiers remboursements de créances 2013. Une montée en puissance de la mobilisation du CICE a été relevée lors de l'analyse de l'exécution 2015 de la mission. Le coût budgétaire du CICE, porté par la mission, est ainsi croissant depuis 2014, comme le montre le graphique ci-après, et s'amplifiera dans les exercices à venir pour deux raisons :

- conformément à la mécanique de ce crédit d'impôt, le remboursement des reliquats d'une créance déclarée en année n intervient en année n+4 : l'exercice 2017 marquera une augmentation nette des crédits du programme 200 dédiés aux remboursements de CICE ;

- les relèvements successifs des taux à partir de 2014 et 2017 augmentent les créances de CICE.

Chronique du coût budgétaire prévisionnel du CICE

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après données DGFiP)

Les créances du CICE peuvent être mobilisées selon les cas par des imputations sur l'impôt dû, dans les trois ans suivants la déclaration, ou par des remboursements. Les créances non encore consommées constituent pour l'État une dépense certaine à un horizon de moins de quatre ans après la déclaration. Si les créances non consommées ne figurent pas dans les documents budgétaires, elles apparaissent au sein du compte général de l'État, annexé au projet de loi de règlement. Selon celui-ci, les charges à payer au titre du CICE pour des remboursements d'impôt sur les sociétés - comptabilisées en autres dettes non financières - s'élèvent à 15,2 milliards d'euros en 2016, soit une augmentation de 5,6 milliards d'euros par rapport à 2015. Lors de l'exercice 2016, le stock de créances non encore consommées s'élevait à 17,11 milliards d'euros selon la direction générale des finances publiques.

b) Un risque à moyen terme pour la soutenabilité de la mission

La Cour des comptes montre dans ses analyses des réticences à juger de la soutenabilité de la mission, les crédits de cette mission étant évaluatifs, et ceux-ci n'entrant pas dans la programmation pluriannuelle. Cependant, la Cour des comptes reconnaît en 2017 un « risque en terme de soutenabilité sur la mission » 261 ( * ) à partir de 2018, du fait de la hausse du taux du CICE. Une hausse de 5 milliards d'euros des crédits dédiés sur la mission est à prévoir en 2018, suivie d'une progression de 0,8 milliard d'euros par an ensuite. En effet, le taux du CICE ayant été relevé de 4 % à 6 % en 2014, les remboursements issus des reliquats de créances seront en importante hausse dès 2018.

Si votre rapporteure spéciale avait déjà alerté sur ce sujet lors de son contrôle budgétaire mené en 2016, elle ne peut que renouveler ses inquiétudes sur la soutenabilité budgétaire de la mission, notamment au regard du relèvement du taux du CICE à 7 % par la loi de finances pour 2017. Ainsi, au-delà de l'augmentation des remboursements - à destination des PME notamment - dès 2018, un autre ressaut sera à anticiper pour 2021.

Pourtant, votre rapporteure spéciale, considérant les conclusions des rapports de France Stratégie et celles formulées dans son rapport de contrôle budgétaire, estime qu'aucun élément nouveau concernant l'efficacité de ce crédit d'impôt, au regard des motivations ayant conduit à sa création, ne justifie une réduction de l'impôt sur les sociétés de cette ampleur.

MISSION « SANTÉ » - M. FRANCIS DELATTRE, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. APERÇU GÉNÉRAL DE L'EXÉCUTION 2016

Participant à la mise en oeuvre de la politique sanitaire du Gouvernement, la mission « Santé » du budget général a un périmètre limité dans la mesure où l'essentiel des problématiques de santé relève du champ des lois de financement de la sécurité sociale. Elle regroupe essentiellement les subventions pour charges de service public versées aux opérateurs sanitaires (programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ») et l' aide médicale d'État (AME) (programme 183 « Protection maladie »).

Les dépenses de la mission relèvent exclusivement du titre 3 « Dépenses de fonctionnement » (21 %) et du titre 6 « Dépenses d'intervention » (79 %). Celle-ci ne comporte pas de crédits de personnel : les crédits de rémunération des personnels concourant à la mise en oeuvre des programmes de la mission sont regroupés au sein du programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

En 2016, les crédits de paiement consommés au titre de la mission « Santé » s'élèvent à 1 314,5 millions d'euros , soit 5,1 % de plus que la prévision faite en loi de finances initiale et 5 % au-dessus de l'exécution 2015 .

Exécution des crédits de la mission « Santé » par programme à périmètre courant en 2016

(en millions d'euros)

Programme

Crédits exécutés en 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits ouverts 2016

Crédits exécutés 2016

Évolution exécution 2016 / 2015

Écart exécution 2016 / LFI 2016

P. 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

AE

501,6

496,8

476,8

474,1

- 5,5 %

- 4,6 %

CP

477,6

498,1

478,1

476,7

- 0,2 %

- 4,3 %

P. 183 Protection maladie

AE

773,9

752,4

837,7

837,7

8,2 %

11,3 %

CP

773,9

752,4

837,7

837,7

8,2 %

11,3 %

TOTAL

AE

1 275,5

1 249,2

1 314,5

1311,8

2,8 %

5,0 %

CP

1 251,5

1 250,5

1 315,8

1314,5

5,0 %

5,1 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Comme les années passées, mais de façon moins marquée, l'évolution des crédits est contrastée entre les deux programmes de la mission :

- 96 % des crédits de paiement du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » ont été effectivement consommés par rapport à la prévision initiale. Ceci correspond à une baisse de 1 million d'euros, soit 0,2 % par rapport à l'exécution 2015 ;

- tandis que le taux de consommation des crédits de paiement du programme 183 « Protection maladie » atteint 111 % des crédits prévus en loi de finances initiale pour 2016. Ce dépassement répété d'une exécution à l'autre, s'il traduit les difficultés de prévision des dépenses d'aide médicale d'État, est toutefois plus mesuré que ceux constatés au cours des exercices précédents (à l'exception de l'exercice 2012, comme l'illustre le graphique ci-dessous).

Évolution du taux d'exécution des crédits de la mission « Santé » par programme

(en %)

Note de lecture : le taux d'exécution est calculé par référence aux crédits ouverts en loi de finances initiale, y compris fonds de concours et attributions de produits, et non aux crédits disponibles (qui incluent également les reports de crédits et les mouvements réglementaires intervenus en cours d'exercice).

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'analyse des mouvements de crédits confirme cette évolution contrastée . La quasi-totalité des annulations réalisées en cours et en fin de gestion ont porté sur les crédits du programme 204 , soit au total environ 20 millions d'euros , en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. À l'inverse, le programme 183 a bénéficié d'une ouverture de 85,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, dans le cadre de la seconde loi de finances rectificative pour 2016 262 ( * ) , et ce, afin de couvrir le besoin de financement en matière d'AME.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Prog.

LFI 2016

Décrets de transfert

Décrets d'avance

Décrets d'annulation

Arrêtés de report

Fonds de concours et attributions de produits

Lois de finances rectificatives

Total des ouvertures et annulations

Exécution 2016

Écart consommé/ crédits alloués en LFI

P204

AE

496,8

2,8

- 42,1

- 0,4

1,16

18,6

0,01

- 20

476,8

- 4 %

CP

498,1

2,8

- 41,4

- 0,4

0,5

18,6

0,01

- 20

478,1

- 4 %

P183

AE

752,4

-

- 0,4

-

-

-

85,7

85,3

837,7

11,3 %

CP

752,4

-

- 0,4

-

-

-

85,7

85,3

837,7

11,3 %

Total mission

AE

1 249,3

2,8

- 42,5

- 0,4

1,2

18,6

85,7

65,4

1314,6

5,2 %

CP

1 250,6

2,8

- 41,8

- 0,4

0,5

18,6

85,7

65,3

1315,9

5,2 %

Note de lecture : les chiffres présentés n'intègrent pas les ajustements techniques prévus par le présent projet de loi de règlement ; ils peuvent donc légèrement différer des données présentées dans le rapport annuel de performances de la mission.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Un dépassement du plafond fixé par la programmation triennale 2015-2017 ...

La sur-exécution des crédits du programme 183 entraîne le dépassement de 7,2 % (94,5 millions d'euros) du plafond fixé pour la deuxième année de la programmation triennale 2015-2017 263 ( * ) , en tenant compte des modifications de périmètre intervenues sur le programme 204. Déjà, en 2015, la première année du triennal n'avait pas été respectée, avec un écart d'environ 48,5 millions d'euros entre les crédits programmés et l'exécution.

La programmation 2013-2015 ne peut pas être directement comparée avec le triennal 2015-2017, dans la mesure où des mesures de périmètre et des transferts importants sont intervenus en 2015 264 ( * ) . Toutefois, l'objectif d'évolution de la dépense de 2 % au cours de la période 2015-2017 sera difficile à atteindre, compte tenu du rythme de progression des dépenses d'aide médicale d'État (AME).

Programmation pluriannuelle de la mission

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

Budget triennal 2013-2015

1 300

-

-

Budget triennal 2015-2017

1 203

1 220

1 228

Loi de finances initiale

1 203

1 251

1 256

Exécution

1 251,5

1 314,5

-

Écart exécution / LPFP

4,3 %

7,2 %

-

Note de lecture : les crédits considérés sont des crédits de paiement, hors contribution du budget général au compte d'affectation spéciale « Pensions ».

Source : ministère du budget

2. La sous-budgétisation chronique de l'AME contrevient au principe de sincérité budgétaire et compromet la soutenabilité de la mission

En 2016, les crédits consommés au titre de l'AME (programme 183 « Protection maladie ») s'élèvent à 825,4 millions d'euros , soit une hausse de près de 61 millions d'euros par rapport aux crédits consommés en 2015. Les crédits de paiement ont été augmentés de 85,7 millions d'euros par la loi de finances rectificative du 29 décembre 2016 265 ( * ) - après 87,6 millions d'euros ouverts en 2015 par la loi de finances rectificative du 29 décembre 2015 266 ( * ) .

Plus précisément, la dépense d'AME de droit commun représente 783,7 millions d'euros . Ce montant s'est, cette année, avéré suffisant pour couvrir la totalité des dépenses avancées par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

Si la dette de l'État envers la CNAMTS, qui assure la gestion de l'AME, d'un montant de 57,3 millions d'euros, contractée au titre des exercices précédents, a été apurée par la loi de finances rectificative pour 2015 du 29 décembre 2015 par affectation de produits de TVA, l'exercice 2015 avait conduit à la constitution d'une nouvelle dette de 12,5 millions d'euros. L'excédent de financement de 1 million d'euros constaté en 2016 a ainsi été affecté à la réduction de la dette de l'État envers la CNAMTS, portant son montant à 11,4 millions d'euros à la fin de l'année 2016.

Écart entre la prévision en loi de finances initiale et l'exécution des crédits du programme 183 « Protection maladie »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des rapports annuels de performances

Cette sous-budgétisation récurrente des dépenses d'AME de droit commun contrevient au principe de sincérité budgétaire .

Les hypothèses retenues dans le projet annuel de performances se fondaient sur l'effet conjugué d'une évolution moyenne annuelle des effectifs de bénéficiaires de l'AME identique à celle observée entre 2008 et 2014 , d'une stabilité des coûts moyens des dépenses de santé prises en charge et des économies attendues au titre de la fin de la prise en charge des médicaments à faible service médical rendu et de la réduction des effectifs résultant de la mise en oeuvre de la réforme du droit d'asile . Dans son rapport spécial sur le projet de loi de finances pour 2016, votre rapporteur spécial mettait déjà en doute la fiabilité de cette prévision, notant que le montant prévu dans le projet de loi de finances était déjà inférieur de près de 20 millions d'euros à la prévision actualisée des dépenses d'AME pour 2015.

3. ... qui dépend d'efforts toujours plus soutenus de maîtrise de la dépense de la part des opérateurs sanitaires

Le périmètre des opérateurs rattachés au programme 204 a fait l'objet d'une évolution substantielle au cours de l'exercice 2016. La loi de modernisation de notre système de santé prévoyait en effet le regroupement de trois opérateurs, l'Institut de veille sanitaire (InVS), l'Institut national de prévention et d'éducation à la santé (INPES) et l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) au sein d'une nouvelle Agence nationale de santé publique (ANSP), dénommée « Santé publique France », créée par l'ordonnance du 14 avril 2016. L'impact budgétaire sur 2016 est toutefois limité, les gains escomptés de la fusion étant attendus pour 2017.

Pour autant, les opérateurs sanitaires ont à nouveau enregistré une baisse de leurs subventions pour charges de service public en 2016. Au total, les crédits exécutés sont inférieurs de 9,3 % aux crédits prévus en loi de finances initiale pour 2016 et de 5 % aux crédits exécutés en 2015.

Par exemple, la subvention versée à l ' INCa diminue de 30 % par rapport à la subvention prévue en loi de finances initiale pour 2016. Au total, l'INCa aura vu le montant de sa subvention pour charges de service public se réduire de 25 % entre l'exécution 2014 et l'exécution 2016. Parmi les autres opérateurs, la diminution des subventions est moins prononcée, compte tenu des prélèvements déjà opérés sur leurs fonds de roulement, approchant pour certains du niveau prudentiel.

Subventions pour charges de service public versées aux opérateurs

(en millions d'euros)

Opérateur

Exécution 2014

Exécution 2015

LFI 2016

Exécution 2016

Écart crédits consommés/ alloués en LFI

Agence de biomédecine (ABM)

12,8

12,7

13,9

13

- 6,5 %

Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM)

102,4

113,2

113,7

111,8

- 1,7 %

Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Ansés)

12,3

14,5

13,2

12,7

- 3,8 %

École des hautes études en santé publique (EHESP)

9,4

9,7

9,5

7,1

- 25,3 %

Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus)

16,2

8,4

10,6

3,9

- 63,2 %

Institut national du cancer (INCa)

42,1

38,8

45,0

31,4

- 30,2 %

Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes)

21,2

22,3

23,8

8,9

- 62,6 %

Institut de veille sanitaire (INVS)

49,5

53,3

55,7

21,5

- 61,4 %

Agence nationale de santé publique (ANSP)

48,7

-

Total

265,9

272,9

285,6

259

- 9,3 %

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des projets et rapport annuels de performances de la mission Santé pour 2016)

Comme le rappelait votre rapporteur spécial dans son rapport sur la mission en loi de finances initiale, les évolutions répétées du champ de la mission ne suffisent pas à contenir une progression non maîtrisée de la dépense , mais révèlent au contraire la faiblesse du pilotage de la mission « Santé » depuis 2012. La concentration des efforts sur le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » ne compense pas le dynamisme non maîtrisé des dépenses du programme 183 « Protection maladie ».

Au total, l'essentiel des crédits est concentré sur les subventions pour charges de service public aux opérateurs sanitaires, caractérisées par un pilotage contraint, et les dépenses de guichet de l'AME, au pilotage difficile. Il s'ensuit une réduction des marges de manoeuvre du Parlement et un affaiblissement de la capacité de pilotage de l'État vis-à-vis de ces opérateurs, au profit de l'assurance maladie.

Surtout, la soutenabilité même de la mission pose question . Les dynamiques des deux programmes divergent, l'augmentation peu contrôlée des dépenses de l'AME de droit commun contrastant avec les efforts menés sur le programme 204. Alors que le fonds de roulement des opérateurs sanitaires se rapproche du niveau prudentiel et que les économies structurelles engagées en matière d'AME ne suffisent pas à contenir la hausse tendancielle du nombre de bénéficiaires, votre rapporteur spécial souligne à nouveau la nécessité d'une réforme en profondeur du dispositif d'AME de droit commun.

4. Les premiers résultats du remaniement de la maquette de performance sont décevants

L'analyse de la mission selon la démarche de performance s'impose pour l'exécution 2016. En effet, jugée inadaptée par la Cour des comptes , la maquette de performance a été refondue par la loi de finances initiale pour 2016 afin de tenir compte des modifications introduites par la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 267 ( * ) .

Le projet annuel de performances pour 2016 avait ainsi introduit un nouvel indicateur au niveau de la mission concernant l'« état de santé perçue » . Comme votre rapporteur spécial le rappelait dans son rapport sur la mission en loi de finances initiale pour 2016, les précédents indicateurs 268 ( * ) avaient en effet le défaut d'être peu ou mal renseignés et de présenter une vision cloisonnée de la politique de prévention.

L'« état de santé perçue » correspond au pourcentage de la population de 16 ans et plus se déclarant en bonne ou très bonne santé générale . Aucune valeur cible n'a été définie ni pour 2016 ni pour 2017 mais un taux de 68 % est indiqué pour 2015 269 ( * ) .

Les indicateurs de performance du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » ont été modifiés : cinq indicateurs ont été supprimés 270 ( * ) , afin de tenir compte des modifications du périmètre du programme opérées ces dernières années et des difficultés méthodologiques liées, notamment, au recueil des données.

Deux nouveaux indicateurs ont été créés concernant le taux de couverture vaccinale contre la grippe pour les personnes âgées de 65 ans et plus, et la participation au dépistage du cancer colorectal pour les personnes de 50 à 74 ans. L'indicateur concernant le tabagisme a quant à lui été modifié, conformément à une recommandation de la Cour des comptes, afin de viser les adultes et non la consommation quotidienne de tabac chez les jeunes - ce dernier indicateur n'était pas disponible chaque année.

L'analyse de ces indicateurs en exécution 2016 révèle que les prévisions en matière de dépistage ne seront pas atteintes en 2016 , avec seulement 49,2 % de personnes de 65 ans et plus vaccinées contre la grippe en 2016 alors que la cible se situe à 75 %. Il en va de même en ce qui concerne le dépistage organisé du cancer colorectal pour les personnes de 50 à 74 ans, où le taux de participation s'élève à 29,3 % en 2016.

Les résultats ne sont pas plus satisfaisants en matière de prévention et de maîtrise des risques sanitaires : l'indicateur relatif à la qualité de l'eau se dégrade, tandis que le pourcentage de signalements traités en une heure par le département des urgences sanitaires de la direction générale de la santé est inférieur de 13 % à la prévision réalisée dans le projet annuel de performances annexé à la mission en loi de finances initiale pour 2016.

Les objectifs et indicateurs de performance du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins »

2015
Réalisation

2016
Prévision PAP 2016

2016
Réalisation

RAP 2016

2017
Cible

Objectif n° 1 : Améliorer l'état de santé de la population et réduire les inégalités territoriales et sociales de santé

Indicateur 1.1 Taux de couverture vaccinale contre la grippe chez les personnes de 65 ans et plus (en %)

50,2

50

49,2

75

Indicateur 1.2. Taux de participation au dépistage organisé du cancer colorectal pour les personnes de 50 à 74 ans (en %)

nc

35

29,3

40

Indicateur 1.3 Prévalence du tabagisme quotidien en population adulte (en %)

29

28

nc

27,4

Objectif n° 2 : Prévenir et maîtriser les risques sanitaires

Indicateur 2.1 Pourcentage d'unités de distribution d'eau potable présentant des dépassements des limites de qualité microbiologique

12,5

14,25

12,4

14

Indicateur 2.2 Pourcentage de signalements traités en 1 heure par nombre total de signaux*

80

95

82

97

Indicateur 2.3 : Délai de traitement des autorisations de mise sur le marché par l'ANSM**

Autorisation nationale (en nombre de jours)

152

150

nc

120

Reconnaissance mutuelle et décentralisée (en nombre de jours)

330

350

nc

300

* Cet indicateur porte sur le pourcentage de signalements traités par le département des urgences sanitaires de la direction générale de la santé.

** ANSM : Agence nationale de sécurité du médicament.

Source : projet et rapport annuels de performances pour 2016 de la mission « Santé »

S'agissant du programme 183 « Protection maladie », le maintien de l'indicateur 1.2 « Contrôle des ressources déclarées des bénéficiaires de l'AME » pose question, dans la mesure les résultats du sous-indicateur « pourcentage des dossiers présentant des ressources nulles contrôlés en entretien » plafonne à 100 % depuis 2014. La maquette de performance envisagée pour le projet de loi de finances 2018 271 ( * ) résout toutefois ce problème, en remplaçant l'indicateur par celui du « pourcentage des dossiers de demande d'AME contrôlés ».

MISSION « SÉCURITÉS» - PROGRAMMES « GENDARMERIE NATIONALE » ET « POLICE NATIONALE » - M. PHILIPPE DOMINATI, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DES PROGRAMMES « POLICE NATIONALE » ET « GENDARMERIE NATIONALE » EN 2016

L'année 2016 est marquée par l'annonce et la mise en oeuvre, par le Gouvernement, de divers plans d'action ou de renforcement 272 ( * ) des forces de Police et de Gendarmerie nationale ainsi que par la crise migratoire de l'été 2015, dont les effets se poursuivent sur l'exercice 2016. Cette priorité explique les taux d'exécution élevés des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » , qui s'élèvent respectivement à 99,56 % et 99,18 % en crédits de paiement (CP) et 99,84 % et 98,87 % en autorisations d'engagement (AE).

Exécution des crédits en 2016

(en millions d'euros)

Programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Évolution des crédits exécutés

Exécution 2016 / LFI 2016

(en %)

(en %)

Police nationale

AE

9 709,00

9 970,90

9 927,10

2,25 %

99,56 %

CP

9 702,57

9 973,50

9 957,80

2,63 %

99,84 %

Gendarmerie nationale

AE

8 162,38

8 560,80

8 490,40

4,02 %

99,18 %

CP

8 147,32

8 403,30

8 308,30

1,98 %

98,87 %

Total

AE

17 871,38

18 531,70

18 417,50

3,06 %

99,38 %

CP

17 849,89

18 376,80

18 266,10

2,33 %

99,40 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Évolution du taux d'exécution des crédits des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale »

(en crédits de paiement)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Sur le plan budgétaire, cette priorité se traduit également par l'absence de contribution des deux programmes au respect des normes de dépenses « zéro valeur » 273 ( * ) et « zéro volume » 274 ( * ) : les crédits consommés ont augmenté de 2 % et de 2,60 % respectivement pour le programme « Gendarmerie nationale » et « Police nationale », soit une hausse fortement supérieure à l'inflation, nulle sur l'exercice.

Évolution de l'exécution des crédits entre 2015 et 2016

(en millions d'euros)

Exécution

Exécution hors CAS « Pensions »

2015

2016

Évolution

2015

2016

Évolution

Gendarmerie nationale

8 147,32

8 308,26

2 %

4 882,30

5 118,66

2,40 %

Police nationale

9 702,57

9 957,78

2,60 %

6 810,57

7 012,64

3 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les crédits des programmes « Gendarmerie nationale » et « Police nationale » constituent en 2016 97,6 % de l'ensemble des crédits de la mission « Sécurités », le respect de la programmation pluriannuelle dépend principalement de leur trajectoire budgétaire.

Écart à la trajectoire pluriannuelle

(en millions d'euros)

2016

LPFP au format 2016

12 149

Exécution 2016 (c)

18 752

Écart entre l'exécution et le plafond de dépenses fixé par la LPFP (III= II-I)

289

Écart en pourcentage

2,38 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Contrairement aux années précédentes, l'exécution 2016 dépasse de 2,38 % la trajectoire pluriannuelle fixée en LPFP.

Mouvements de crédits étant intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Police nationale

Gendarmerie nationale

AE

CP

AE

CP

LFI

9 970,9

9 973,5

8 560,8

8 403,3

LFR

- 16,5

- 16,5

- 42,5

- 42,5

Total des mouvements de crédits, dont :

72,7

68,26

163,43

109,24

Reports

72,04

38,7

25,89

6,2

Virements

- 39,12

-6,38

31,37

- 3,33

Transferts

- 0,88

-4,72

2,04

1,64

Décrets d'avance

7,46

7,46

- 16,1

- 15,5

Décrets d'annulation

/

/

/

/

Fonds de concours

17,88

17,88

4,63

4,63

Attributions de produits

15,32

15,32

115,6

115,6

Total des crédits disponibles

10 003,82

10 001,92

8 573,89

8 362,28

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Un exercice marqué par la réalisation des objectifs de recrutement des différents plans gouvernementaux, mettant les filières de formation et de recrutement sous forte tension

Les différents plans de soutien devaient permettre le recrutement, en 2016, de 4 727 policiers et gendarmes.

Impact des principaux plans gouvernementaux sur les effectifs

(en ETPT)

Plans

Police nationale

Gendarmerie nationale

Plan de renforcement du dispositif de lutte contre le terrorisme (PLAT)

390

55

Plan de lutte contre l'immigration clandestine (PLIC)

530

370

Pacte de sécurité (PDS)

1 366

1 736

Source : commission des finances du Sénat (d'après l'inspection générale des finances)

Comme l'indique le compte général de l'État 2016, ces plans de renfort ont principalement bénéficié aux services spécialisés (renseignement, police judiciaire et immigration).

Le schéma d'emplois réalisé en 2016 par la mission Sécurités (4 764 ETP), en nette rupture avec les schémas d'emplois antérieurs, est supérieur de 26 emplois à celui prévu en LFI (4 738 ETP).

Créations nettes d'emplois prévues et réalisées depuis 2013

(en ETP)

2013

2014

2015

2016

Police nationale

LFI

288

243

243

2 438

Réalisation

- 197

822

553

2 417

Écart à la LFI

- 485

579

310

21

Gendarmerie nationale

LFI

192

162

162

2 289

Réalisation

192

173

244

2 336

Écart à la LFI

0

11

82

- 47

Total des créations d'emplois

Effectives

- 5

990

1 787

4 753

Attendues

-

-

-

4 727

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Si l'exercice est donc marqué par le respect des annonces gouvernementales et des mesures votées en loi de finances initiale, ces importants recrutement ont « nécessité un effort particulier des filières de formation, les recrutements au titre de la mission passant de 19 300 en 2015 à plus de 29 000 en 2016 » 275 ( * ) . Votre rapporteur rappelle que cette mise sous tension des filières de formation n'est à terme, pas soutenable. Il est à cet égard symptomatique que les durées de scolarité aient été réduites de 12 à 8 mois pour les gendarmes et de 12 à 9,5 mois pour les policiers.

2. Malgré l'augmentation des effectifs, une inadéquation persistante entre le plafond d'emploi voté et l'exécution

L'écart entre le plafond d'emploi voté et les effectifs réels de l'exercice continue à s'accroître, alors même que les plans de recrutement auraient dû avoir pour effet de rapprocher ces deux données. Pour les deux programmes, il passe de 2 982 en 2015 à 5 230 en 2016.

Plafonds d'emplois depuis 2014

(en ETPT)

2014

2015

2016

Police nationale

LFI

143 606

145 197

147 076

Réalisation

142 767

143 982

145 570

Écart

- 839

- 1215

- 1 506

Gendarmerie nationale

LFI

97 167

97 215

99 760

Exécution

95 195

95 448

96 036

Écart

- 1 972

- 1 767

- 3 724

Total pour les deux programmes

LFI

240 773

242 412

246 836

Exécution

237 962

239 430

241 606

Écart

- 2 811

- 2982

- 5 230

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Si le maintien d'un écart « frictionnel » entre effectifs et plafonds d'emplois est cependant utile afin d'absorber les décalages conjoncturels liés à l'exécution des schémas d'emplois, cet écart, lorsqu'il devient excessif, devrait avoir vocation à être ajusté de manière à se conformer au plus près à l'autorisation parlementaire.

3. Des interrogations sur la soutenabilité des dépenses de rémunération

L'augmentation des dépenses de personnel reste contenue à 1,50 % par rapport à l'exercice 2016.

Variation des dépenses de personnel

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

Évolution 2015-2016

Police nationale

Titre 2

8 269,3

8 421,5

8 568,3

8 692,7

8 837,9

1,67 %

Total

9 205,2

9 345,5

9 467,3

9 702,5

9 957,8

2,63 %

Titre 2 / Total

89,80 %

90,10 %

90,50 %

89,60 %

88,8 %

Gendarmerie nationale

Titre 2

6 649,5

6 825,9

6 859,4

6 908,6

6 998,1

1,30 %

Total

7 849,3

8 051,5

8 076,5

8 147,3

8 308,3

1,98 %

Titre 2 / Total

84,70 %

84,80 %

84,90 %

84,80 %

84,2 %

Total pour les deux programmes

Titre 2

14 918,9

15 247,5

15 427,6

15 601,3

15 836,0

1,50 %

Total

17 054,6

17 397

17 543,8

17 850

18 266,1

2,33 %

Titre 2 / Total

87,5 %

87,6 %

87,9 %

87,4 %

86,7 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Cette faible hausse masque toutefois d'importantes fragilités pour les exercices à venir.

En contrepartie de leur forte mobilisation, les policiers et les gendarmes ont obtenu, en avril 2016, la signature de deux protocoles leur accordant d'importantes mesures de revalorisation des carrières et des rémunérations. Les coûts supplémentaires liés à ces protocoles, limités sur l'année 2016, seront particulièrement élevés sur les années 2017 à 2019 et s'échelonneront jusqu'en 2022.

La Cour des comptes, évalue leur coût supplémentaire par rapport au montant des dépenses exécutées en 2016, hors contribution au CAS « Pensions », à plus de 200 millions d'euros en 2017 et à 492,8 millions en 2019.

Variation des dépenses de personnel

(en millions d'euros)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Coût supplémentaire annuel hors CAS par rapport à l'exécution 2016

217,8

348,1

492,8

528,8

577,1

543,6

Coût supplémentaire annuel CAS compris par rapport à l'exécution 2016 63

430,6

692,9

979,4

1 047,0

1 061,7

1 073,1

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données de la Cour des comptes)

En plus de ces revalorisations, les facteurs suivants devraient peser sur la soutenabilité des dépenses de personnel :

- la croissance du nombre d'heures supplémentaires récupérables, dont le stock, évalué à 21,4 millions d'heures (soit 13 000 ETPT) à la fin de l'année 2016, est en augmentation de 14 % par rapport à 2015 ;

- la réorganisation en cours du temps de travail au sein des deux forces, au sujet de laquelle votre rapporteur spécial a d'ores et déjà formulé de fortes réserves, qui devrait avoir un effet négatif sur la disponibilité des personnels 276 ( * ) ;

- la création de la garde nationale en 2016, qui aura une incidence sur les exercices budgétaires à venir.

Face à ce risque de voir la soutenabilité des dépenses de personnel remise en question, votre rapporteur rappelle la nécessité de mettre en place des mesures de réorganisation ambitieuses.

4. Une poursuite de l'effort de rééquilibrage des dépenses de personnel avec les dépenses de fonctionnement et d'investissement

Votre rapporteur spécial avait salué, l'an passé, l'amorçage d'une diminution de la part des dépenses de titre 2 dans les dépenses des deux programmes au profit des dépenses d'investissement et de fonctionnement, contribuent à restaurer la capacité opérationnelle des forces de sécurité intérieure .

L'exercice 2016 poursuit, à cet égard, les efforts entamés en 2015, la part des dépenses de personnel dans les dépenses totales étant ramenée de 87,9 % à 86,7 %.

Dépenses de personnel / dépense totale des deux programmes

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Ce constat globalement positif doit toutefois être nuancé, la part des dépenses de personnel dans le total des dépenses demeurant encore à un niveau significativement plus élevé qu'en 2006.

Évolution comparée des dépenses de personnel et des autres dépenses depuis 2006

(en millions d'euros)

2006

2016

Évolution 2006 / 2016

Titre 2

12 685

15 836

24,84 %

Hors titre 2

2 641

2 430,1

- 7,99%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les dépenses de fonctionnement augmentent de 14,7 % en AE et de 3,8 % en CP.

Évolution des dépenses de fonctionnement entre 2015 et 2016

(en millions d'euros)

Programme

Dépenses de fonctionnement 2015

Dépenses de fonctionnement 2016

Variation

Police nationale

AE

775

897

15,7 %

CP

786

841

7,0 %

Gendarmerie nationale

AE

1 143

1 302

13,9 %

CP

1 129

1 147

1,6 %

Total

AE

1 918

2 199

14,7 %

CP

1 915

1 988

3,8 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Surtout, les dépenses d'investissement connaissent une hausse particulièrement significative, de 15 % en AE et de 45,5 % en CP . Les investissements des deux forces ont principalement porté sur les véhicules et les opérations immobilières.

Évolution des dépenses d'investissement entre 2015 et 2016

(en millions d'euros)

Programme

Dépenses d'investissement 2015

Dépenses d'investissement 2016

Variation

Police nationale

AE

185

147,00

- 20,5 %

CP

168

234,00

39,3 %

Gendarmerie nationale

AE

102

183,00

79,4 %

CP

101

157,00

55,4 %

Total

AE

287,00

330,00

15,0 %

CP

269,00

391,00

45,4 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

5. Une sous-budgétisation et un usage contestable de la réserve de précaution

Malgré la forte croissance des crédits ouverts en loi de finances initiale, les dépenses programmées ont dépassé les crédits disponibles et les budgets prévisionnels n'ont été équilibrés que par l'usage de la réserve de précaution.

Ainsi, pour le programme « Gendarmerie nationale », les dépenses liées aux plans de renfort ont été financées par une mobilisation de l'intégralité de la réserve sur les loyers de droit commun. Pour le programme « Police nationale » , les besoins complémentaires, pourtant prévisibles, nés de la réalisation des plans gouvernementaux ainsi que de l'organisation de l'« Euro 2016 », ont été financés grâce au positionnement de la réserve de précaution sur les loyers budgétaires à hauteur de 60,9 millions d'euros (en AE et en CP), sur un total de crédits mis en réserve de 86,7 millions d'euros en AE et de 86,9 millions d'euros en CP.

À cet égard, votre rapporteur s'associe à la recommandation de la Cour des comptes pour « l'établissement d'une programmation qui comprenne l'ensemble des besoins inéluctables connus et qui respecte le principe d'affectation de la réserve de précaution au financement des seuls aléas de gestion ».

MISSION « SÉCURITÉS » - PROGRAMME « SÉCURITÉ ET ÉDUCATION ROUTIÈRES » ET CAS « CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS » - M. VINCENT DELAHAYE, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. LE PROGRAMME 207 « ÉDUCATION ET SÉCURITÉ ROUTIÈRES »

Le programme 207 « Sécurité et éducation routières » retrace les dépenses réalisées par l'État pour réduire le nombre d'accidents de la route à travers des mesures de prévention, d'information et d'éducation routières. Les dépenses liées au volet répressif de la politique de sécurité routière (radars et gestion des points des permis de conduire) sont, quant à elles, financées par le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

Il y a deux ans, le montant des crédits alloués à ce programme a été considérablement réduit. En effet, le 1 er janvier 2015, les dépenses de titre 2 du programme 207 « Sécurité et éducation routières », soit 81 millions d'euros correspondant à 1 569 ETPT , ont été transférées au programme support 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », afin d'en améliorer la gestion.

1. Des taux d'exécution très élevés en 2016

Les taux de consommation sont très élevés sur le programme 207 « Sécurité et éducation routières », tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, avec des taux respectivement établis à 96,6 % et 100 %.

Évolution des taux de consommation des AE et des CP du programme 207

(en %)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances de la mission « Sécurités » annexé au projet de loi de règlement pour 2016

Le tableau ci-dessous retrace les principaux chiffres de l'exécution 2016 pour le programme :

Récapitulation de l'exécution 2016 du programme 207

(en millions d'euros)

Type de crédit

Exécution 2015

Crédits ouverts
en LFI

Total des crédits ouverts

Exécution 2016

Écarts exécution 2016/

Exec. 2015

LFI

AE

41,03

39,04

32,71

31,59

- 23,00

- 19,08

CP

39,61

39,04

31,91

31,91

- 19,44

0,00

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances de la mission « Sécurités » annexé au projet de loi de règlement pour 2016

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

Prog.

Type de crédit

LFI 2016

Reports entrants

Décrets d'avance

Virement ou transfert

LFR de fin de gestion

Reports sortants

Fonds de concours et attributions de produits

Ajustements 2016 et DDAI 1

Exécution 2016

Écart consommé/ prévu

207

AE

39,04

1,04

- 7,42

ns

0,70

0,05

31,59

80,92 %

CP

39,04

0,60

- 7,78

ns

0,00

0,05

31,91

81,74 %

(en millions d'euros)

1 Dotation pour les dépenses accidentelles et imprévisibles.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données de la note d'analyse de l'exécution budgétaire de la mission « Sécurités » de la Cour des comptes pour 2016

Les mouvements enregistrés en gestion sont loin d'être négligeables.

- 7,42 millions d'euros en AE et 7,78 millions d'euros en CP ont été annulés 277 ( * ) , ces annulations ont été en partie permises par la rationalisation des dépenses de communication et les économies sur le permis à un euro par jour engendrées par la baisse des taux d'intérêt ;

- 1,04 million d'euros en AE et 0,60 million d'euros en CP - correspondant à des reports 278 ( * ) de crédits non consommés en 2015 venus abonder le montant des crédits ouverts.

À la différence de l'an passé, la réserve de précaution - qui s'élevait à 3,12 millions d'euros en 2016 en AE et CP -, n'a pas été utilisée et les reports - hors fonds de concours et AE affectées non engagées - ont même été « surgelés » au mois d'avril. Le décret n° 2016-1652 du 2 décembre 2016 portant annulation de crédits a annulé cette réserve de précaution et ce « surgel ».

2. Des dépenses hors personnel en forte baisse

En exécution, les dépenses hors personnel se sont élevées à 31,91 millions d'euros, soit un montant nettement inférieur - de 7,7 millions d'euros, soit 19,4 % - à celui de 2015 et de 11,2 millions d'euros à celui de 2014 . En loi de finances initiale pour 2016, un montant de 39,04 millions d'euros avait été inscrit pour les dépenses hors personnel. Ce sont donc près de 7,13 millions d'euros qui ont été économisés en exécution.

Évolution des dépenses hors personnel du programme 207 (2013-2016)

(en millions d'euros)

Montant des dépenses hors personnel

Année

AE

CP

2013

42,66

44,02

2014

42,04

43,12

2015

41,03

39,61

2016

31,59

31,91

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances de la mission « Sécurités » annexé au projet de loi de règlement pour 2016

Les dépenses d'intervention (titre 6) sont en diminution, de 8,69 millions d'euros en 2015, à 6,78 millions en 2016, - soit une baisse de 22 % - principalement en raison de la diminution des taux d'intérêt des prêts subventionnés dans le cadre du dispositif « permis de conduire à un euro par jour ».

Quant aux dépenses de fonctionnement (titre 3), réduites de 21 % (29,49 millions d'euros en 2015 contre 23,30 millions en 2016), elles enregistrent une baisse significative, essentiellement supportée par les crédits de prévention. Cependant une partie de ces crédits a été déplacée vers le programme 751 du CAS « Radars » dont les dépenses de communication augmentent de 5,3 millions en 2015 à 14,9 millions en 2016.

À l'inverse, les dépenses d'investissement (titre 5), dont l'enveloppe avait été légèrement réduite de 3,3 millions (en loi de finances initiale pour 2015) à 3,2 millions (en loi de finances pour 2016), et qui sont consacrées à la création ou à la rénovation de centres d'examen du permis de conduire, le montant des crédits consommés s'avère finalement supérieur de 28,7 % à celui enregistré en 2015 (1,84 million d'euros ont été consommés en 2016 contre 1,43 million en 2015, 2,41 millions en 2014 et 3,25 millions en 2013).

3. Une mortalité routière en hausse pour la troisième année consécutive, une première depuis 45 ans

D'après le rapport annuel de performances de la mission « Sécurités », en 2016, 3 655 279 ( * ) personnes ont perdu la vie sur les routes françaises (3 477 en France hexagonale et 178 dans les 5 DOM), contre 3 616 en 201, 3 557 en 2014, 3 427 en 2013, 3 842 en 2012 et 4 111 en 2011). Pour la première fois depuis 45 ans, la mortalité sur les routes françaises augmente trois années de suite , alors que l'objectif du Gouvernement est, depuis 2012, de parvenir à moins de 2 000 morts en 2020.

Si la mortalité automobiliste diminue de 2 % par rapport à 2015, nombre d'indicateurs associés à la sécurité routière sont en légère augmentation [nombre de blessés hospitalisés (+ 2,2 %), de blessés (+ 2,6 %) et d'accidents corporels (+ 1,2 %) ou augmentent nettement (mortalité des usagers vulnérables (piétons (+ 19 %), cyclistes (+ 9%))]. De même, si la mortalité des jeunes est en légère baisse (- 3,6 %), la mortalité des plus de 75 ans évolue à la hausse (+ 9,1 %). À cet égard, on peut s'interroger sur l'opportunité de la suppression , en 2015 , de l'indicateur de performance « caractérisation de la mortalité routière selon les catégories d'usagers de la route », introduit l'année précédente. Cet indicateur comptait 9 sous-indicateurs affichant des objectifs ciblant, dans l'Hexagone et dans les DOM, la mortalité des usagers de deux-roues motorisés, des 18-24 ans ainsi que le nombre de personnes tuées dans des accidents de la route impliquant au moins un conducteur dont l'alcoolémie est supérieure au taux légal.

La tendance observée est d'autant plus inquiétante que le plan gouvernemental, annoncé en janvier 2015, comprenant 26 mesures pour accroître la lutte contre l'accidentalité routière, conjugué aux 55 mesures décidées en octobre 2015 par le comité interministériel de sécurité routière (CISR), semble tarder à porter ses fruits.

4. Le permis de conduire : des indicateurs de performance aux résultats mitigés

Les indicateurs de performance relatifs au permis de conduire affichent en 2016 un bilan mitigé.

Le délai moyen d'attente pour un candidat entre sa première et sa deuxième présentation à l'examen pratique se réduit encore . Après avoir diminué fortement entre 2014 (90 jours) et 2015 (72 jours), il est désormais de 63 jours. Le délai de passage du permis de conduire en cas d'échec à la première présentation a ainsi fondu d'un tiers depuis le lancement de la réforme en 2014. Cette réduction résulte notamment de l'augmentation, depuis l'été 2014, de 12 à 13 passages d'examens pratiques B par jour et par inspecteur, et du transfert, à partir de juin 2016, de l'organisation de l'examen pratique général à des organismes agréés, qui permet aux inspecteurs de pouvoir davantage se consacrer à l'examen pratique.

En revanche, le coût unitaire d'obtention du permis de conduire a légèrement augmenté : 61,30 euros en 2016 contre 60,60 euros en 2015, cette hausse étant justifiée par le recrutement exceptionnel d'inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière. Compte tenu de l'investissement financier que représente le permis pour les jeunes conducteurs, l'effort qui avait permis une forte réduction de ce coût en 2014, ne doit pas être relâché.

De même, la tendance à la baisse du taux de conducteurs novices parmi les conducteurs impliqués dans un accident corporel , observée depuis plusieurs années, marque le pas . Alors que taux stagne chez les conducteurs ayant leur permis depuis moins d'un an, il augmente légèrement chez ceux l'ayant obtenu depuis moins de deux ans et moins de trois ans.

II. LE COMPTE SPÉCIAL « CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS »

1. Une légère sous-exécution des dépenses en 2016

Le compte spécial « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » se caractérise en 2016 par une légère sous-exécution des dépenses . L'écart entre la programmation initiale et l'exécution est en effet de 27,88 millions d'euros , soit - 2,04 %, pour les autorisations d'engagement, et de 21,49 millions d'euros , soit - 1,58 %, pour les crédits de paiement, comme l'illustre le tableau suivant qui retrace les principaux chiffres de l'exécution 2016 du compte spécial.

Comme en 2015, la Cour des comptes, dans son analyse d'exécution budgétaire pour 2016, constate qu'« aucune anomalie dans l'exécution budgétaire n'a été observée ».

Elle relève de nouveau que les reports de crédits dont a bénéficié le programme 751 « Radars » jusqu'en 2013 ne sont plus autorisés à la suite de l'application, à partir de 2014, de l'article 160 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 sur la gestion budgétaire et comptable publique (GBCP). En vertu de ce dernier, les reports de fait qui bénéficiaient au programme sont désormais rendus indisponibles, sauf arrêté du ministre chargé du budget en disposant autrement. En outre, elle constate que le décalage important entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement résulte en partie d'un « défaut de mise à jour des engagements juridiques pris dans le cadre des marchés à bons de commande, dont certains, malgré leur ancienneté étaient encore comptabilisés comme restes à payer au 31 décembre 2015 (90,7 M€). Cette situation devrait s'améliorer en 2017, 18,8 M€ de CP sans rattachement juridique ayant été annulés fin 2016 ».

Exécution des crédits de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros et en %)

Programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits
exécutés
2016

Exécution 2016
/exéc. 2015
(en %)

Exécution 2016
/ LFI 2016
(en %)

En %

En %

Section 1 - Contrôle automatisé

AE

231,98

224,75

231,62

- 0,16

3,06

CP

208,99

224,75

237,70

13,74

5,76

751 -  Radars

AE

206,39

204,21

208,19

0,87

1,95

CP

182,40

204,21

216,08

18,46

5,81

752 - Fichier national du permis de conduire

AE

25,59

20,54

23,43

- 8,44

14,07

CP

26,59

20,54

21,62

- 18,69

5,26

Section 2 - Circulation et stationnement routiers

AE

1 076,18

1 138,77

1 104,02

2,59

- 3,05

CP

1 076,60

1 138,77

1 104,33

2,58

- 3,02

753 - Contrôle

et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

AE

30,00

26,2

26,20

- 12,67

0,00

CP

30,00

26,2

26,20

- 12,67

0,00

754 - Contribution
à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

AE

635,08

672,03

637,28

0,35

- 5,17

CP

635,50

672,03

637,59

0,33

- 5,12

755 - Désendettement de l'État

AE

411,10

440,54

440,54

7,16

0,00

CP

411,10

440,54

440,54

7,16

0,00

Total

AE

1 308,16

1 363,52

1 335,64

2,10

- 2,04

CP

1 285,59

1 363,52

1 342,03

4,39

- 1,58

Source: commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » annexé au projet de loi de règlement pour 2016

Évolution du taux d'exécution des crédits du CAS « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers »

(en %)

Crédits de paiement exécutés en 2015, prévus initialement et exécutés en 2016, rattachés au CAS « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers »

(en millions d'euros)

Source: commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » annexé au projet de loi de règlement pour 2016

Prog.

Type de crédit

LFI 2016

Reports entrants

Décrets d'avance

Annulation

Reports sortants 280 ( * )

Exécution 2016

Écart consommé/ prévu

751

AE

204,21

17,38

0,00

13,74

208,19

3,98

CP

204,21

47,78

18,84

29,50

216,08

11,87

752

AE

20,54

3,69

0,80

23,43

2,89

CP

20,54

8,56

4,50

21,62

1,08

753

AE

26,20

0

26,20

0

CP

26,20

0

26,20

0

754

AE

672,03

579,28

4,08

609, 95

637,28

- 34,75

CP

672,03

579,59

5,25

608,78

637,28

- 34,75

755

AE

440,54

440,54

0

CP

440,54

440,54

0

Total mission

AE

1 363,52

600,35

4,08

624,49

1 335,64

- 27,88

CP

1 363,52

635,93

24,09

642,78

1 342,03

- 21,49

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » annexé au projet de loi de règlement pour 2016

2. Un solde positif en raison de moindres dépenses et une augmentation des recettes

Un autre élément remarquable est le solde positif au terme de l'exercice 2016. De l'ordre de 79 millions d'euros , il résulte de l'écart entre les dépenses en CP (près de 1,342 milliard d'euros) et les recettes affectées au compte, soit 1,421 milliard d'euros (78,2 % du produit total des amendes). Le CAS qui, depuis 2011, alternait les déficits et les excédents, est en excédent pour la deuxième année consécutive.

Le montant cumulé du solde du compte spécial , depuis son ouverture en 2006 , se monte désormais à 878 millions d'euros .

Évolution des recettes et dépenses du CAS depuis 2011

(en millions d'euros)

Année

Produit total des amendes

Recettes affectées au CAS

Dont contrôle automatisé

Dépenses en CP du CAS

Solde budgétaire du CAS

2011

1 515,60

1 299,60

641,80

683,90

615,70

2012

1 623,90

1 296,09

730,70

1 375,40

- 79,31

2013

1 597,50

1 382,30

708,30

1 315,10

67,20

2014

1 562,80

1 315,10

740,10

1 332,90

- 17,80

2015

1 607,70

1 329,60

789,00

1 285,60

44,00

2016

1 817,90

1 421,40

920,30

1 342,00

79,40

Source: commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » annexé au projet de loi de règlement pour 2016

Le compte d'affectation spéciale a vu également ses recettes augmenter en 2016 pour la deuxième année consécutive . Après s'être établies à 1,329 milliard d'euros en 2014, elles enregistrent une hausse de 6,90 % et atteignent 1,421 milliard d'euros.

Pour mémoire, le produit total des amendes de stationnement et de la circulation routière - 1 817,90 millions d'euros en 2016 - n'est pas intégralement affecté au CAS .

En effet, seule une partie du produit des amendes forfaitaires perçues par la voie des radars - qui s'élève à 760,5 millions d'euros en 2016 - lui est affectée. Cette fraction est plafonnée 281 ( * ) à un montant fixé dans la loi de finances initiale pour 2016, à 409 millions d'euros . 239 millions d'euros sont affectés la section 1 « Contrôle automatisé » (programmes 751 et 752) tandis que 170 millions d'euros bénéficient à la section 2 « Circulation et stationnement routiers » (programmes 753, 754 et 755).

Quant au  solde des amendes « radars » - soit 351,5 millions d'euros -, il est affecté à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).

En outre, l'intégralité du produit des amendes forfaitaires hors radars et des amendes forfaitaires majorées de toute nature - qui s'élève à 1 057,4 millions d'euros - n'est pas versée au CAS . En effet, une  fraction, inférieure à 5 % - soit 45 millions d'euros en 2016 - est transférée au budget général pour financer le Fonds interministériel de prévention de la délinquance et de lutte contre la radicalisation (FIPDR) 282 ( * ) . Le montant affecté au CAS pour ces types d'amende est donc de 1 012,40 millions d'euros.

Au total, près de 78 % du produit total des amendes de toute nature est donc affecté au CAS, alors qu'il en avait reçu 85 % en 2015.

3. Des recettes record, sous-estimées dans la loi de finances initiale

À la différence des dernières années, marquées par leur surestimation régulière, les recettes issues des amendes de la circulation et du stationnement routiers (radars et hors radars) ont, en 2016, été sous-estimées : 1,681 milliard d'euros en loi de finances initiale 2016 contre 1,818 milliard d'euros réalisés (dont versement à l'AFITF). L'écart entre prévision et en réalisation (137 millions) est deux fois plus important que celui observé en 2015 (64 millions en 2015), mais demeure inférieur à l'écart constaté en 2014 (164 millions).

Ce constat vaut également pour les seules recettes liées aux radars, qui s'élèvent en 2016 à 920,3 millions d'euros (amendes forfaitaires et amendes forfaitaires majorées) - un record depuis 2003, année de déploiement des premiers radars - et enregistrent une hausse de 16,6 % par rapport à 2015.

Contribuent à cette hausse :

- l'augmentation du parc de radars dont le nombre, après avoir stagné ces dernières années, repart à la hausse et atteint 4 398. Au 31 décembre 2016, le nombre de radars est bien supérieur à la prévision inscrite en loi de finances initiale (4 200) et à celui observé fin 2015 (4 116). Cette augmentation s'explique par la stratégie « radars » annoncée par le Premier ministre le 2 octobre 2015 qui vise à déployer 500 radars supplémentaires d'ici 2018 et quadrupler le nombre de zones sécurisées par des équipements de contrôle automatisé. Elle comprend également une augmentation du nombre de radars mobiles, embarqués sur des véhicules, qui rendent le contrôle bien moins prévisible ;

- l'amélioration du taux de disponibilité des radars automatiques. En effet, la disponibilité des équipements, après avoir chuté de 92,6 % à 92,3 % en 2013, s'améliore légèrement (92,5 % en 2016), sans pour autant atteindre le niveau constaté en 2012 (94,5 %). La diminution du nombre de dégradations sur les équipements au cours de l'année passée contribue à cette évolution ;

- la verbalisation de plus en plus fréquente des véhicules immatriculés à l'étranger grâce à la mise en place d'accord bilatéraux d'échanges d'informations avec 9 autres pays européens, après la conclusion d'un accord avec l'Autriche en 2016. Bien qu'il diminue par rapport à 2015 - à l'instar de celui des contrevenants français -, en 2016, le taux de paiement des amendes forfaitaires par les pays partenaires - 71,8 % - demeure supérieur à celui des contrevenants français (69,6 %).

Toutefois il faut souligner que le pourcentage d'avis de contravention émis par rapport au nombre de « flashs » diminue nettement. Il s'élève désormais à 69,6 % (contre 77,1 % en 2015). Cette baisse est justifiée par « la hausse d'activité particulièrement exceptionnelle en 2016 qui s'est traduite par :

- + 26,5 % de de messages d'infractions émis par rapport à 2015 (soit 25,64 millions) ;

- + 20,6 % d'avis de contraventions envoyés rapport à 2015 (soit 16,05 millions). »

En 2016, 216,08 millions d'euros ont été consommés pour maintenir en état et étendre le parc et pour traiter les messages d'infraction envoyés par les équipements de contrôle automatisé.

Des écarts importants entre les crédits de la loi de finances initiale et les crédits consommés caractérisent certaines dépenses de l' action 01 « Dispositifs de contrôle » du programme 751 « Radars ».

Certes le coût du déploiement de nouveaux dispositifs - consistant à remplacer des radars existants par des équipements plus « intelligents » - s'élève à 23,57 millions d'euros en CP en 2016, soit un montant légèrement supérieur - 22,75 millions - à celui prévu en loi de finances initiale.

Cependant les crédits consommés pour le maintien en condition opérationnelle , s'élèvent à 52,09 millions d'euros contre 60,08 millions en loi de finances initiale, cet écart conséquent étant justifié par le fait que « certaines opérations programmées n'ont pu être menées à bien, le mainteneur ayant dû redéployer ses équipes vers deux chantiers jugés plus prioritaires : la réparation des équipements qui ont souffert à l'été 2016 des conditions climatiques particulièrement violentes, et l'équipement d'une partie du parc de radars fixes de la fonctionnalité « double sens » ».

A l'inverse, les dépenses de « pilotage » 283 ( * ) , définies comme « des dépenses transversales à la fois au déploiement et à la maintenance des dispositifs de contrôle », s'élèvent à 27,04 millions d'euros, soit un montant nettement supérieur aux 21,91 millions prévus en loi de finances initiale. L'écart est expliqué par la notification de plusieurs nouveaux marchés dès la fin de l'année 2016, concernant notamment l'assistance à maîtrise d'ouvrage et les panneaux de signalisation des radars.

Dans le cadre de l'action 02 « Centre national de traitement » , l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI), au titre du traitement des messages d'infraction émis par les radars, reçoit quant à elle un budget de 92,7 millions d'euros, soit un montant identique à celui prévu en loi de finances initiale.

Enfin, dans le cadre de l'action 03 « Soutien au programme » 20,7 millions d'euros sont consacrés à des études, du fonctionnement courant et des programmes de communication de la Direction de la sécurité et de la circulation routières (DSCR) centrés sur le thème de la vitesse sur les routes. Ce montant est bien plus élevé que celui prévu par la loi de finances initiale (6,78 millions), en raison du lancement de campagnes de communication supplémentaires, et de la diminution des crédits du programme 207 de la mission « Sécurités » consacrés à la prévention routière.

4. Un compte d'affectation spéciale qui contrevient au principe de spécialité

L' article 21 de la loi organique portant loi de finances 284 ( * ) dispose que les comptes d'affectation spéciale « retracent (...) des opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées ».

Dans la mesure où plus de la moitié des recettes du CAS ne financent pas directement la politique de sécurité routière, son fonctionnement actuel contrevient au principe de spécialité dicté par la loi.

En effet, en 2016, 485,6 millions d'euros affectés au CAS, ont bénéficié au budget de l'État - à travers le versement au FIPDR ou au programme 755 - Désendettement de l'État -, soit environ un tiers des recettes des amendes de la circulation et du stationnement routiers. En outre, dans la mesure où 351,5 millions d'euros ont été versés à l'AFITF, il apparaît que plus de la moitié des recettes des amendes ne sont pas directement affectées à la mission.

Comme le souligne la Cour des comptes, dans note d'exécution budgétaire,  « la désaffectation partielle des recettes du CAS est contestable tant au regard du droit que de la performance du dispositif dont la finalité est la baisse de la mortalité et de l'accidentalité routières ».

5. Une politique de sécurité routière aux résultats peu probants

Or, si le dispositif de suivi de la performance demeure pertinent et continue de s'affiner 285 ( * ) , force est de constater que les résultats sont loin d'être à sa hauteur.

En 2016, pour la première fois depuis 45 ans, le nombre de morts a augmenté pour la troisième année de suite et les statistiques de l'accidentalité évoluent négativement dans de nombreux domaines (cf. I 3).

Les indicateurs de performance utilisés dans le projet annuel de performance affichent par ailleurs des résultats mitigés, ce qui conduit à s'interroger sur l'efficacité de cette politique.

La vitesse moyenne a légèrement baissé entre 2015 (80,1 km/h) et 2016 (79,9 km/h), mais demeure supérieure à celle enregistrée en 2014 et surtout à la cible fixée dans le projet annuel de performances 2015 (77 km/h).

Alors que la disponibilité des radars automatiques s'améliore en 2016 tout en restant inférieure aux objectifs fixés , comme cela a été vu, le pourcentage d' avis de contravention émis par rapport au nombre de « flashs » concernant des immatriculations françaises se dégrade quant à lui pour s'établir à 69,6  % (contre 77,1 % en 2015), soit un niveau supérieur à la cible fixée (77 %). Le pourcentage relatif aux immatriculations étrangères relevant d'un pays « partenaire », c'est-à-dire ayant conclu un échange de données d'immatriculation avec la France au titre des infractions routières, enregistre une diminution également significative, de 80,9 % à 71,8 %, soit un pourcentage également bien en-deçà de la cible (75 %).

Enfin l'indicateur « taux de transformation des messages d'infraction (MIF) émis par les dispositifs de verbalisation électronique en avis de contravention (ACO) (immatriculations françaises et étrangères) » s'élève à 97,5 %, soit un taux identique à 2016, sachant que le nombre de paiements immédiats a fortement augmenté entre 2015 (16 534) et 2016 (43 782).

S'agissant du déploiement du procès-verbal électronique (PVé), fin 2016, 3 164 communes avaient intégré le dispositif dont les 41 communes de plus de 100 000 habitants. Ces communes équipées de PVé ont délivré 17,65 millions d'avis de contravention contre 15 millions en 2015 (soit une hausse de 17,7 %). En revanche, le nombre de PVé émis par les forces de l'ordre - auprès desquelles le procès-verbal électronique est achevé depuis 2012 - a encore diminué de 8,5 % par rapport à 2015, cette baisse étant justifiée par la mobilisation des forces de l'ordre sur d'autres priorités. Compte tenu de la désormais large diffusion du PVé, il serait pertinent, dans les prochains rapports annuels de performance, d'avoir communication du taux de recouvrement des différentes catégories d'amendes .

6. Une stratégie arrêtée en 2015 et centrée sur le déploiement massif de nouveaux radars, qui tarde à porter ses fruits

Outre la question de l'implantation des nouveaux radars - déjà abordée dans le rapport sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2015 -, qui devraient permettre de rééquilibrer le parc en faveur des réseaux secondaires et de certains départements, se pose celle de leur efficacité . La diffusion des avertisseurs de radars et des informations en ligne sur les réseaux sociaux les rend de plus en plus prévisibles. Bien qu'un projet de décret, visant à limiter l'activité de ces réseaux et avertisseurs, vienne d'être transmis, en avril dernier, à la Commission européenne, ses conditions d'application, assez contraignantes, permettent de douter de son impact.

7. L'ANTAI, une agence au périmètre d'activité élargi, qui continue de bénéficier d'un fonds de roulement confortable

Le périmètre d'activité de l'ANTAI a été significativement étendu en 2015 et 2016 : après l' élargissement de ses missions au traitement des forfaits post-stationnement (FPS), incombe désormais à l'agence le projet de développement et d'exploitation du système ROCADE , nouvelle application de recouvrement des amendes et des condamnations pécuniaires.

Le fonds de roulement augmente sensiblement.

D'après la note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016 de la Cour des comptes, le fonds de roulement de l'ANTAI, dont la dotation est portée par les programmes 751 « Radars » et 753 « PVé », est estimé, fin 2015, à 30,04 millions, soit « le double de son niveau prudentiel  estimé à 14,5 M€ par la direction du budget ». Ce fonds augmente encore - de 23,5 % - pour atteindre 37,1 millions d'euros au 31 décembre 2016. 286 ( * )

La note de la Cour des comptes fait également état d'un audit de l'exercice de la tutelle du ministère de l'intérieur sur ses opérateurs réalisé par plusieurs corps d'inspection et daté du 22 octobre 2015 qui souligne « la dispersion des enjeux fixés à l'agence entre missions réglementaires à forts enjeux techniques et technologiques et son implication directe dans la mise en oeuvre de la politique de sécurité routière du gouvernement ».

Bien qu'en 2016, le pilotage et les capacités techniques de l'agence aient été nettement renforcées et qu'un nouveau contrat d'objectifs ait été signé entre l'ANTAI et l'État couvrant la période 2016-2019 , l'évolution de ce fonds de roulement, censé financer un décalage de trésorerie, appelle à la plus grande vigilance .

8. Un programme 752 lesté par une nouvelle augmentation du nombre de lettres de retrait ou de restitution de points en 2016

Quant au programme 752 « Fichier national du permis de conduire » - dont on peut s'interroger sur l'utilité, compte tenu de son très faible poids dans l'ensemble du CAS - l'écart constaté entre la consommation des crédits et le montant voté en loi de finances s'élève en 2016 à 1,08 million d'euros. Les dépenses constatées, de 23,43 millions d'euros en AE et 21,52 millions d'euros en CP, sont en effet plus élevées que celles inscrites en loi de finances initiale (20,54 millions d'euros en AE=CP). Cependant l'écart observé et le montant de ces dépenses s'avèrent toutefois nettement inférieurs à ceux enregistrés en 2015.

Votre rapporteur spécial déplore à nouveau que le programme 752 « Fichier national du permis de conduire » supporte une dépense d'environ 13,22 millions d'euros pour adresser aux conducteurs 16,7 millions de lettres de retrait ou de restitution de points du permis de conduire. Surtout que, s'agissant en particulier du retrait des points, cet envoi fait double emploi avec l'envoi de l'avis de contravention qui mentionne déjà le nombre de points retirés.

Toutefois on observe un fléchissement des dépenses liées à ces envois : une baisse de 1,66 million d'euros, soit plus de 11 %, par rapport à 2015 (14,88 millions d'euros), malgré une hausse du nombre de lettres envoyées de 2,9 %.

9. Un pilotage faible des dépenses pour les programmes 754 et 755, lié à la base de calcul de leurs crédits

Comme l'a déjà fait plusieurs fois remarquer votre rapporteur spécial, la plupart des dépenses du compte spécial obéissent à des facteurs sur lesquels les responsables de programme ne peuvent influer . C'est le cas notamment des programmes 754 « Collectivités territoriales » et 755 « Désendettement de l'État » dont les crédits sont calculés sur la base d'une formule établie par une loi de finances. Seule la baisse des recettes inscrites sur le compte peut conduire à une diminution de ces crédits.

Concernant le programme 754, la règle de détermination et de répartition de la part du produit des amendes 287 ( * ) imputée en février aux communes et aux groupements de communes a pour effet de décaler la consommation de crédits (en AE et en CP) à l'exercice suivant celui où ils étaient disponibles, ce qui engendre un report de plus de 500 millions d'euros chaque année.

Votre rapporteur déplore que les collectivités territoriales assument, pour la deuxième année consécutive, une part significative de la sous-exécution du CAS. Le montant qui leur a été effectivement versé en 2016 - 635,08 millions d'euros - est inférieur de 32 millions d'euros au montant ouvert en loi de finances initiale - 667,19 millions.

S'agissant du programme 755 288 ( * ) , un décalage entre la programmation en loi de finances initiale et la consommation en 2016, est également constaté. Il provient du fait que le montant consommé en 2016 correspond :

- au versement au budget général du produit des amendes au titre des dix premiers mois de 2016,

- au versement des recettes des deux derniers mois de 2015.

Compte tenu de ce décalage, le solde des deux derniers mois de 2016, supérieur à 70 millions d'euros, est versé en 2017.

En conclusion, votre rapporteur souligne que ces deux programmes s'apparentent davantage à des supports budgétaires permettant de reverser des recettes qui ne sont plafonnées que par la loi de finances qu'à de véritables programmes .

MISSION « SÉCURITÉS» - PROGRAMME « SÉCURITÉ CIVILE » - M. JEAN PIERRE VOGEL, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La loi de finances pour 2016 prévoyait pour le programme 161 « Sécurité civile » de la mission « Sécurités » 461 millions d'euros de crédits de paiement (CP) et 426,7 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE).

La consommation des AE et des CP est très légèrement inférieure à la prévision ainsi qu'aux crédits disponibles, compte tenu des annulations et ouvertures intervenues en cours de gestion ainsi que des reports sur 2014). Les taux d'exécution s'élèvent à 98,15 % en AE et 98,52 % en CP.

La principale variation par rapport à l'exécution 2016 porte sur les autorisations d'engagement, qui ont baissé, entre 2015 et 2016, de 34,1 %. L'année 2015 était en effet marquée par l'engagement d'un marché de maintien en condition opérationnelle pour sept ans de la flotte d'avions de la sécurité civile, à la suite de l'échec de l'appel d'offres lancé en 2014.

Exécution des crédits en 2014

(en millions d'euros)

Programme

Crédits exécutés en 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exécution 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

(en %)

(en %)

Sécurité civile

AE

641,4

426,7

418,8

65,3 %

98,15 %

CP

423,6

461

454,2

107,2 %

98,52 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

En gestion 2016, les crédits du programme ont été modifiés par des arrêtés de report de crédits (composés à près de 90 % d'autorisations d'engagement non exécutées affectées aux tranches fonctionnelles des marchés en cours), des décrets de transfert et de virement, des décrets d'avance et d'annulation et une loi de finances rectificative. Le programme a notamment bénéficié d'importants reports de l'exercice 2015 vers l'exercice 2016. Il bénéficie également de fonds de concours, à hauteur de 12 millions d'euros, dont 11,4 au titre du fonctionnement de l'infrastructure nationale partageable des transmissions (INPT). Le montant des fonds de concours et des attributions de produits perçus (12,5 millions d'euros en AE et en CP) est proche de celui attendu (14 millions d'euros).

Les crédits disponibles ont toutefois été réduits par le décret du 2 juin 2016 289 ( * ) pour un montant de 27,73 millions d'euros en AE et en CP suite à diverses décisions portant notamment sur le décalage de certaines opérations immobilières et des économies sur certaines dépenses de fonctionnement et d'investissement.

Mouvements de crédits intervenus en gestion sur l'année 2016

(en millions d'euros)

AE

CP

LFI

426,7

461

LFR

0,05

0,05

Total des mouvements de crédits, dont :

31,34

8,16

Reports

35,47

12,79

Virements

8,35

7,85

Transferts

2,79

2,79

Décrets d'avance

- 27,73

- 27,73

Décrets d'annulation

/

/

Fonds de concours

12,05

12,05

Attributions de produits

0,41

0,41

Total des crédits disponibles

445,69

456,84

Crédits consommés

418,78

454,2

Solde

26,91

2,64

Source : commission des finances du Sénat (d'après la Cour des comptes)

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Une légère hausse des effectifs au titre du pacte de sécurité

La prévision de schéma d'emplois du programme (- 10 ETP), a été majorée en cours d'exercice d'un renfort de 21 ETP accordé au titre du pacte de sécurité, portant la hausse des effectifs à 11 ETP . Le plafond d'emplois prévisionnel (2 387 ETPT) respecte toutefois celui fixé en loi de finances initiale (2 402 ETPT).

Plafond d'emplois exécutés de 2012 à 2016

(en ETPT)

2012

2013

2014

2015

2016

Écart à la LFI+LFR 2016

Sécurité civile

2 451

2 422

2 395

2 382

2 379

- 23 (2 402)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La part des dépenses de titre 2 au sein du total des dépenses (en CP) du programme baisse de près de deux points, en raison de cette stabilisation des effectifs et de la hausse des CP exécutés en 2016.

Évolution de la part des dépenses de personnel au sein du total des dépenses totales du programme

(en millions d'euros)

2015

2016

Évolution 2015 / 2016

Titre 2

164,1

167,1

1,8 %

Total

423,6

454,2

7,2 %

Titre 2 / Total

38,7 %

36,8 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

2. Une utilisation de la réserve de précaution contraire aux principes budgétaires

La réserve de précaution (19,7 millions d'euros en CP et 24,1 millions d'euros en CP) a été intégralement dégelée en fin de gestion.

Le besoin de financement des dépenses hors titre 2 excédait les ressources disponibles après régulation de 8,3 millions d'euros pour les premières et de 14 millions d'euros pour les seconds. Le financement complémentaire devait être assuré par l'obtention de reports (pour 2,3 millions d'euros en AE et pour 8 millions d'euros en CP) ainsi que par le dégel de la réserve de précaution (à hauteur de 7,8 millions d'euros en AE et en CP).

De même, les crédits nécessaires pour les dépenses de titres 2 ont été inférieurs de 0,9 million d'euros aux crédits disponibles (hors contribution au CAS « Pensions »).

Ce dépassement justifié, selon la DGSCGC, par des mesures catégorielles décidées en cours d'année par le ministère de la défense et bénéficiant aux personnels des FORMISC ainsi que par l'effet « année pleine » d'une prime octroyée en 2015 aux démineurs, a été financé par le dégel de la totalité de la réserve de précaution appliquée aux crédits hors CAS « Pensions » (pour 0,55 million d'euros) ainsi que par l'utilisation de crédits du CAS « Pensions » excédentaires, pourtant non fongibles (pour 0,3 million d'euros).

À ce titre, votre rapporteur s'associe aux remarques de la Cour des comptes qui renouvelle sa recommandation tenant à l'établissement d'une programmation qui comprenne l'ensemble des besoins inéluctables connus (au premier rang desquels figurent les dépenses de personnel) et qui respecte le principe d'affectation de la réserve de précaution au financement des seuls aléas de gestion.

3. Un amorçage de l'apurement des restes à payer à poursuivre

L'engagement, pour une durée de sept ans, d'un marché de maintien en condition opérationnel (MCO) des quatre flottes fin 2015 a entrainé une forte augmentation des restes à payer, qui ont atteint 124 % des CP consommés en 2015. En 2016, ces derniers baissent de 9 % pour atteindre 292 millions d'euros.

Évaluation comparée des restes à payer et des CP hors titre 2 depuis 2012

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

Restes à payer

130,442

115,32

101,186

323,5

292,0

CP hors titre 2 (consommés)

282,67

268,436

262,162

259,1

292,8

Restes à payer / CP
hors titre 2

46,1 %

43,0 %

38,6 %

124 %

99,7%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

4. Une forte reprise des dépenses d'investissement, principalement en raison du déménagement de la BASC

Les crédits exécutés augmentent de 19,3 millions d'euros par rapport à 2015, soit presque un doublement, en raison essentiellement des coûts résultent de la relocalisation de la base aérienne de la sécurité civile (BASC) à Nîmes (Gard). Pour leur part, les autorisations engagements diminuent de 13,6 %.

Évolution des dépenses d'investissement exécutées

(en millions d'euros)

AE

CP

Exécution 2015

32,9

20

Exécution 2016

37,4

39,3

% d'exécution des crédits ouverts en LFI

13,68 %

96,50 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les taux d'exécution des crédits d'investissement du programme s'établissent à 112,3 % des autorisations d'engagement ouvertes en loi de finances initiale et à 76,9 % pour les crédits de paiement.

Taux d'exécution des dépenses d'investissement

(en millions d'euros)

AE

CP

LFI 2015

34,1

40,93

LFI 2016

33,296

51,1

Exécution 2016

37,4

39,3

% d'exécution des crédits ouverts en LFI

112,33 %

76,91 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les principaux investissements ont porté sur l'immobilier. 11,4 millions d'euros ont été consacrés à l'aménagement de la base aérienne de Nîmes. Les autres projets concernés sont le projet d'alerte aux populations (SAIP) qui doit remplacer l'actuel réseau national d'alerte (RNA), sur le projet de réseau de télécommunication ANTARES ainsi que sur les capacités nationales de réponse aux risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC).

Principaux investissements de la sécurité civile

(en millions d'euros)

Nature

Montant (en CP)

En % des crédits d'investissement exécutés

Immobilier et travaux

13,9

35,40 %

Projet ANTARES

5,9

15 %

Projet SAIP

5,6

14,30 %

Chaînes de décontamination

4,5

11,40 %

Véhicules et équipements spécialisés des UIISC

2,1

5,30 %

Modernisation des hélicoptères

1,7

4,30 %

Équipement du déminage

1,4

3,60 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Il est toutefois regrettable que des opérations de modernisation et de mise en conformité des équipements aéronautiques (simulateur de vol, avions, hélicoptères) aient été reportées sur 2017 , pour des montants initialement programmés de 6,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 4 millions d'euros en crédits de paiement.

5. Une efficacité des dispositifs de protection des feux de forêts pendant la « saison feu » et d'intervention de déminage sur les objets suspects légèrement en deçà des objectifs

Pour l'année 2016, deux objectifs d'indicateurs de performance ne sont pas atteints.

Le pourcentage des incendies ne dépassant pas cinq hectares atteint 94,3 %, contre une prévision de 96 %. Selon la DGSCGC, cette sous-performance s'explique notamment par la sécheresse intense et les vents violents qui ont touché certaines zones. Par ailleurs, la suspension temporaire de la flottille des CL415 à la suite d'un accident a pénalisé les interventions.

Le taux d'intervention des démineurs prépositionnés sur des objets suspects est également légèrement en deçà de l'objectif fixé : à 97,1 % contre 98 %. Si cette sous-performance s'explique par l'augmentation des objets suspects (de 65 % en 2016) et n'est pas alarmante, le contexte d'état d'urgence doit mener le ministère de l'intérieur à la résorber .

MISSION « SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES » - M. ÉRIC BOCQUET, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

1. Des dépenses en hausse de 4 % par rapport à la prévision

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » regroupe les dépenses de solidarité financées par l'État, c'est-à-dire principalement la prime d'activité, l'allocation aux adultes handicapés (AAH), les dépenses de protection juridique des majeurs ainsi que les subventions aux établissements et services d'aide par le travail (ESAT). Au total, les dépenses d'intervention portées par la mission représentent plus de 92 % des crédits exécutés .

Ces dépenses, structurellement dynamiques, ont poursuivi leur progression en 2015 et ont conduit à une sur exécution des crédits de près de 4 % par rapport à la prévision initiale .

Exécution des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » par programme en 2016

(en millions d'euros et en %)

Programme

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exéc. 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

(en %)

(en %)

304 « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire »

AE

2 834,5

5 143,2

5 460,7

+ 93 %

+ 6,2 %

CP

2 846,6

5 143,2

5 460,1

+ 92 %

+ 6,2 %

157 « Handicap et dépendance »

AE

11 910,0

11 689,5

12 117,1

+ 2 %

+ 3,7 %

CP

11 911,6

11 689,5

12 115,9

+ 2 %

+ 3,6 %

137 « Égalité entre les femmes et les hommes »

AE

23,4

27,6

23,6

+ 0,9 %

- 14,5 %

CP

23,4

27,6

22,7

- 3 %

- 17,8 %

124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative »

AE

1 482,2

1 487,3

1 452,5

- 2 %

- 2,3 %

CP

1 493,2

1 497,6

1 477,8

- 1%

- 1,3 %

Total

AE

16 250,0

18 347,6

19 053,9

+ 17,3 %

+ 3,8 %

CP

16 274,9

18 357,9

19 076,5

+ 17,2 %

+ 3,9 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La progression des dépenses entre l'exécution 2015 et 2016 se concentre sur deux programmes :

- la plus forte hausse concerne le programme 304 « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire » (+ 93 %), en raison de la création de la prime d'activité ;

- le programme 157 « Handicap et dépendance » voit ses dépenses progresser de 2 %, principalement au titre de l'allocation adultes handicapés ( AAH ).

2. Une progression traduisant la part des dépenses de guichet et des changements de périmètre

La mission « Solidarité » se caractérise par une forte hétérogénéité des dépenses qu'elle finance. Trois dispositifs représentent ainsi 76 % des crédits de la mission : l'AAH, la prime d'activité et la dotation aux établissements et services d'aide par le travail (ESAT) 290 ( * ) .

Part des différents programmes de la mission

Source : commission des finances du Sénat

Deux effets se sont conjugués en 2016 :

- un changement de périmètre : la prime d'activité, qui remplace la prime pour l'emploi et le RSA activité 291 ( * ) se traduit par un doublement des dépenses entre 2015 et 2016, de 2 milliards d'euros à 4,1 milliards d'euros, et la fin du cofinancement de l'État et des organismes de sécurité sociale de la protection juridique des majeurs au profit d'un financement unique par l'État a entraîné une hausse de 166 % des crédits correspondants ;

- le dynamisme des dépenses liées à l'AAH , en augmentation de 3 %.

À périmètre constant, l'exécution a progressé de 1,6 % entre 2015 et 2016.

3. Un dynamisme et des sous-budgétisations ayant entraîné le dégel de la réserve de précaution et l'ouverture de crédits supplémentaires en loi de finances rectificative

Ces évolutions en cours de gestion ont rendu nécessaire :

- un dégel quasi complet de la réserve de précaution - à l'exception du programme 137 (cf. infra ) ;

- l'ouverture de 793 millions d'euros de crédits supplémentaires en loi de finances rectificative .

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Prog.

Crédits prévus LFI 2016 (hors FDC/ADP)

FDC/ADP prévus LFI 2016

Reports entrants hors FDC

Reports entrants sur crédits FDC

Transferts et virement

Décrets d'avance

LFR 2016

Total des crédits alloués

Écart crédits alloués/LFI 2016

Exécution 2016

304

5 143,2

-

1,33

0,678

2,26

- 50,0

369,3

5 466,7

+ 6,3 %

5 460,1

157

11 689,5

15

2,95

1,8

-

- 13,3

423,8

12 119,1

+ 3,7 %

12 115,9

137

27,6

0,04

0,76

0,02

-

- 4,1

-

24,3

- 12 %

22,7

124

1 497,6

10,9

1,0

0,77

34,5

- 48,4

-

1 496,7

- 0,6 %

1 477,8

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère du budget

Votre rapporteur spécial prend acte du dynamisme de ces prestations de guichet, qui viennent utilement répondre à des situations de pauvreté ou de précarité.

Toutefois, il déplore la sous-budgétisation chronique dont font l'objet ces dépenses nécessitant des ouvertures de crédits en cours de gestion. S'il n'est pas contestable que la prévision exacte du montant d'une dépense de guichet constitue un exercice complexe, a fortiori pour un nouveau dispositif comme la prime d'activité, les écarts entre prévision et exécution laissent à penser que la sous-dotation du programme 157 en crédits budgétaires relève d'une pratique volontaire. L'écart entre la programmation initiale et la consommation des crédits s'accentue depuis deux années.

Programmation initiale et consommation des crédits du programme 157

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. La mise en oeuvre de la prime d'activité se traduit par une progression des crédits en cours de gestion

Sur le plan budgétaire, la prime d'activité a entraîné une double difficulté pour le programme 304 « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire » :

- la montée en charge du dispositif a été plus rapide que prévue. Dès la fin du premier semestre, le taux de recours de 50 % retenu dans les hypothèses de budgétisation a été dépassé ;

- le champ des bénéficiaires potentiels a été étendu en cours de gestion.

Ces difficultés expliquent la progression de 6,2 % des crédits exécutés par rapport à la prévision.

La mise en oeuvre de la prime d'activité se traduit dans le compte général de l'État par la progression des charges d'intervention nettes . Dans ce cadre, les transferts aux ménages progressent de 2,5 milliards d'euros .

La prime d'activité vise à répondre aux difficultés des deux dispositifs précédents. Elle garantit un gain systématique de revenu. Elle concerne désormais les jeunes adultes dès 18 ans, dont le taux de chômage est plus de deux fois supérieur au taux de chômage moyen - 21,8 % contre 9,3 % au premier trimestre 2017 292 ( * ) .

2. Le dynamisme des dépenses d'AAH doit être intégré dès la prévision

Quoique moins important que les années précédentes, le rythme d'augmentation de l'AAH reste élevé (+ 3,4 %) . La progression des dépenses s'élève à 39 % depuis 2010, celle des bénéficiaires près de 20 %.

Par rapport à 2015, l'évolution résulte à la fois de la revalorisation annuelle de la prestation de 0,9 % et de la croissance du nombre de bénéficiaires de 2,5 %.

Évolution des dépenses d'AAH et du nombre de bénéficiaires depuis 2010

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Il convient toutefois de distinguer entre les deux composantes de l'allocation, puisque l'essentiel de la progression résulte de l'AAH 2 , à savoir celle versée aux personnes présentant un taux d'incapacité compris entre 50 % et 79 %.

Plusieurs facteurs expliquent la croissance du nombre de bénéficiaires : le vieillissement démographique conjugué au recul de l'âge légal de départ à la retraite, ainsi que la « porosité » identifiée par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) entre minima sociaux, notamment avec la part du RSA supportée par les départements. Dans sa réponse à la Cour des comptes sur la note d'exécution budgétaire pour 2016, la DGCS explique ainsi « un rebond des dépenses d'AAH 2 par certaines pratiques d'attributions départementales dans un contexte de baisse de la dotation de l'État allouée aux collectivités territoriales » 293 ( * ) .

Cette hypothèse est d'ailleurs corroborée par le dispositif de performance, dans la mesure où la disparité des taux départementaux d'attribution et de renouvellement de l'AAH augmente depuis plusieurs années.

Plus généralement, une sous-budgétisation chronique caractérise le programme 157 retraçant essentiellement les dépenses liées à l'AAH. Encore cette pratique s'est-elle accentuée ces dernières années. En effet, entre 2008 et 2016, l'écart moyen entre la prévision et l'exécution était de 256 millions d'euros, mais il s'élève à 446,2 millions d'euros en 2016. Cette progression a nécessité le dégel complet de la réserve de précaution ainsi que l'ouverture de 423,8 millions d'euros de crédits supplémentaires en loi de finances rectificative.

3. La protection juridique des majeurs : une dépense dynamique désormais totalement financée par l'État mais non maîtrisée par le ministère des affaires sociales

L'exercice 2016 marque également le transfert du financement de la protection juridique des majeurs à l'État , pour un montant de 637,6 millions d'euros.

Au-delà de l'effet de périmètre, ce dispositif se caractérise par un dynamisme tendanciel du dispositif depuis plusieurs années. Les dépenses ont ainsi progressé de plus de 22 % entre 2010 et 2016.

Or ce dispositif relève des prérogatives des juges, et n'est donc pas maîtrisé par le responsable de programme. Selon le ministère des affaires sociales, le vieillissement démographique se traduit par la croissance du nombre de décisions de tutelle ou de curatelle prononcées chaque année.

Le programme 304 retraçant désormais l'intégralité du financement de la protection juridique des majeurs, il conviendra de prendre en compte le dynamisme de ce dispositif lors de la programmation budgétaire .

4. Le programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » : une priorité politique contrastant avec l'atrophie progressive des crédits consommés

Le programme 137 constitue le plus petit programme de la mission, représentant 0,12 % des crédits de paiements exécutés en 2016.

De fait, il est traditionnellement considéré comme le « parent pauvre » de la mission. Ses crédits ont fait l'objet d'un gel depuis 2013. De ce point de vue, la loi de finances pour 2016 marquait une différence , les crédits ouverts ayant progressé de 6,5 % par rapport à 2015.

Il s'agissait principalement de traduire la préfiguration, la création puis le renforcement du fonds pour la prévention de la prostitution et l'accompagnement social et professionnel des personnes prostituées 294 ( * ) . En regard, les autres actions financées par le programme voyaient leurs crédits diminuer.

Votre rapporteur spécial souligne le contraste entre la priorité accordée à l'égalité entre les femmes et les hommes et la traduction budgétaire sur ce programme . Outre la faiblesse des crédits qu'il porte, il se distingue par rapport aux trois autres programmes de la mission par une sous-exécution chronique . De 94,2 % en 2014, il a chuté à 92 % en 2015, puis à 82,2 % en 2016.

Évolution du taux d'exécution des crédits du programme 137

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La croissance des crédits ouverts en loi de finances pour 2016 ne s'est donc pas traduite par une progression des crédits consommés, ce qui doit conduire à s'interroger sur le mode de sélection et de préparation des actions conduites .

MISSION « SPORT, JEUNESSE ET VIE ASSOCIATIVE » - M. DIDIER GUILLAUME, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

La mission « Sport, jeunesse et vie associative » est composée de deux programmes :

- le programme n° 219 « Sport » , qui porte essentiellement les subventions aux fédérations sportives et aux opérateurs du sport (Institut national du sport, de l'expertise et de la performance [INSEP], écoles nationales du sport, Agence française de lutte contre le dopage) ;

- le programme n° 163 « Jeunesse et vie associative » , qui comprend à titre principal la subvention à l'Agence de service civique pour le financement des missions des jeunes en service civique et au Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep), ainsi que des subventions aux associations « Jeunesse et éducation populaire ».

En application des dispositions de la loi NOTRE du 7 août 2015 295 ( * ) , les centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (Creps) ont été transférés aux régions le 1 er janvier 2016.

1. La montée en charge du service civique se traduit par une exécution de la mission supérieure aux crédits votés

L'exécution de la mission traduit la décision du Président de la République François Hollande de poursuivre la montée en charge du service civique visant à garantir son universalité . Les crédits qui lui sont consacrés représentent près de 80 % des crédits du programme 163 et la moitié des crédits de la mission.

L'exécution est supérieure de près de 8 % aux crédits votés en loi de finances, ainsi que le retrace le tableau ci-dessous.

Exécution des crédits de la mission par programme en 2016

(en millions d'euros)

Programme

Crédits exécutés en 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits ouverts 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exécution 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

219

AE

229,6

218,0

227,4

224,7

- 2,1 %

+ 3,1 %

CP

238,8

224,7

233,9

232,2

- 2,8 %

+ 3,3 %

163

AE

265,1

392,2

436,4

433,1

+ 63,4 %

+ 10,4 %

CP

265,4

392,2

437,2

433,6

+ 63,4 %

+ 10,6 %

Total

AE

494,7

610,2

663,8

657,8

+ 33,0 %

+ 7,8 %

CP

504,2

616,9

671,1

665,8

+ 32,1 %

+ 7,9 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Ces évolutions se sont traduites par l'ouverture de 41,1 millions d'euros en loi de finances rectificative et par le dégel en fin de gestion du solde de la réserve de précaution du programme 163.

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016, en CP

(en millions d'euros)

Programme

LFI 2016

Reports entrants

Fonds de concours et attribution de produits

Mouvements en cours de gestion (DA de juin et d'octobre)

Mouvements de fin de gestion (LFR de décembre)

Virement ou transfert

Total des crédits alloués

Écart crédits alloués / LFI 2016

Écart crédits consommés / LFI 2016

163

392,2

3,7

0

1,5

41,1

- 1,6

437,2

11,5 %

10,6 %

219

224,7

3,6

19,8 296 ( * )

- 10,5

- 3,7

0

233,9

4,1 %

3,3 %

Total

616,9

7,3

19,8

- 9

37,4

- 1,6

651,3

5,6 %

7,9 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses du ministère du budget

Les crédits exécutés en 2016 dépassent le plafond triennal de 32,4 %, fixé par cette loi à 503 millions d'euros .

2. Des dépenses fiscales stables

Les dépenses fiscales rattachées à la mission s'élèvent à 2,6 milliards d'euros , en hausse de 2 % par rapport à 2015. Elles reflètent essentiellement la priorité accordée au soutien à la vie associative , puisque le programme 163 représente plus de 96 % de ce montant.

La réduction d'impôt sur le revenu ouverte pour les dons aux associations des particuliers 297 ( * ) constitue la principale dépense fiscale, avec un montant de 1,37 milliard d'euros, en hausse de 8,7 % par rapport à 2015.

II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. La poursuite du redressement financier du CNDS ne doit pas conduire à affaiblir son indispensable soutien au mouvement sportif

Le programme 219 « Sport » ne retrace pas l'intégralité du soutien de l'État en faveur du sport. En particulier, les interventions du centre national pour le développement du sport (CNDS) ne sont pas incluses. Financé par des taxes affectées, son budget s'est établi en 2016 à 244,8 millions d'euros.

En raison de la situation financière dégradée du CNDS, le plan de redressement financier mis en oeuvre par le Gouvernement depuis 2012 s'est traduit par un recentrage de ses actions sur les territoires les plus défavorisés.

En 2015, le centre avait dégagé un excédent de 25,3 millions d'euros, nettement supérieur à la prévision de 2,7 millions d'euros. Aussi, pour 2016, il était initialement prévu une perte de 8,3 millions d'euros. L'exécution enregistre finalement un bénéfice de 9,8 millions d'euros , expliqué par une sous-consommation de l'enveloppe relative aux subventions d'équipement de 13 % en crédits de paiement.

Si le redressement des comptes du CNDS doit être salué, son indispensable rôle de soutien au mouvement sportif doit être confirmé . Le déséquilibre des dépenses et des recettes ne doit donc pas être pérennisé.

2. Une année olympique pesant sur les comptes de l'Insep

L'année 2016 a été marquée par la réussite de la délégation française aux Jeux olympiques de Rio, avec 42 médailles, dont dix titres olympiques. La France atteint ainsi la septième place des nations les plus médaillées.

Malgré le dispositif pérenne créé par la loi de finances pour 2016 à l'initiative de votre rapporteur spécial, prévoyant un étalement sur quatre ans de la prime olympique 298 ( * ) , la loi de finances pour 2017 a finalement prévu une exonération d'impôt sur le revenu.

L'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (Insep), a fortement contribué à cette réussite olympique, puisque la moitié des athlètes médaillés s'y entraîne.

Une subvention pour charges de service public de 19 millions d'euros affectée à cet opérateur est retracée dans le programme 219 « Sport ». Elle est complétée par des ressources propres, essentiellement constituées des tarifs de pension demandés aux sportifs accueillis, majoritairement pris en charge par leurs fédérations sportives.

Après un résultat positif en 2015 (0,8 million d'euros), l'exercice 2016 se solde par une perte à hauteur de 1,47 million d'euros, très proche de la prévision . Elle s'explique principalement par le caractère exceptionnel de cette année olympique , conduisant à la fois à des charges supplémentaires et à des recettes tirées des stages et formations moindres que d'habitude.

3. Le nécessaire accompagnement de la montée en puissance du service civique

Plus de 95 % de la hausse des crédits consommés sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative » entre 2015 et 2016 s'expliquent par la progression du service civique . Ce dispositif est financé par l'État à travers l'Agence du service civique.

Universel depuis le 1 er juin 2015, le service civique est désormais ouvert à tous les jeunes remplissant les conditions d'âge. De fait, près de 92 000 jeunes ont exercé une mission de service civique en 2016 , soit une progression de 77 % par rapport à 2015 (52 000 jeunes). Il s'agit d'une réforme majeure initiée sous le précédent quinquennat , conjuguant l'engagement des jeunes dans un projet, l'acquisition d'une expérience et le soutien au secteur associatif.

Afin d'accompagner cette extension, la loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté a prévu une diversification des missions et l'ouverture du service civique aux organismes d'habitation à loyer modéré et aux sociétés publiques locales. La durée moyenne des contrats s'approche de 8 mois.

Les dépenses afférentes sont particulièrement complexes à prévoir , puisqu'elles dépendent à la fois du nombre de jeunes s'engageant dans un service civique et de la durée de cet engagement. La variable essentielle est ainsi le nombre de « mois jeunes 299 ( * ) » en service civique à indemniser. Un délai de trois mois est nécessaire pour consolider le nombre de jeunes entrant dans le dispositif, ce qui induit un pilotage plus difficile.

De fait, la prévision initiale, établie à l'automne 2015, portait sur près de 355 000 mois jeunes . Cependant, le nombre de jeunes en service civique au début 2016 était inférieur à celui retenu lors de la prévision. Aussi le décret du 2 juin 2016 a-t-il annulé 10,5 millions d'euros.

Cependant, un mouvement inverse a été constaté au premier trimestre 2016, avec un nombre plus important que prévu de contrats conclus. Cette augmentation a conduit à réévaluer les projections sur la base de 388 000 « mois jeunes » et s'est conjuguée à la hausse de l'indemnisation induite par la revalorisation du point d'indice de la fonction publique. Il s'en est suivi un besoin de financement supplémentaire de 31,7 millions d'euros .

C'est pourquoi un financement supplémentaire a été dégagé par :

- le dégel du solde de la réserve de précaution à hauteur de 18,5 millions d'euros ;

- l'ouverture de 12 millions d'euros supplémentaires par le décret d'avance du 2 décembre 2016 ;

- l'ouverture de 31 millions d'euros par la loi du 29 décembre 2016 de finances rectificative.

Les crédits consommés au titre du service civique sont ainsi supérieurs de 12 % à la prévision initiale .

Si votre rapporteur spécial comprend la difficulté de gestion entraînée par la montée en puissance du service civique, il appelle de ses voeux une évolution de son mode de financement . L'ouverture progressive à de nouveaux acteurs doit s'accompagner d'un meilleur partage des coûts du dispositif. Améliorer la soutenabilité budgétaire du programme participera de son succès .

MISSION « TRAVAIL ET EMPLOI » ET CAS « FINANCEMENT NATIONAL DU DÉVELOPPEMENT ET DE LA MODERNISATION DE L'APPRENTISSAGE » - MM. FRANÇOIS PATRIAT ET JEAN-CLAUDE REQUIER, RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. MISSION « TRAVAIL ET EMPLOI »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

En 2016, contribution au CAS « Pensions » incluse, les dépenses de la mission « Travail et emploi » se sont élevées à 16,8 milliards d'euros en AE et 13 milliards d'euros en CP , soit une augmentation de près de 4 milliards d'euros en AE et de près d'un milliard d'euros en CP par rapport à 2015 .

L'écart aux prévisions est significatif, tant en AE (+ 5 milliards d'euros) qu'en CP (+ 1,3 milliard d'euros) .

L'exercice 2016 se caractérise par le plus fort taux de consommation des crédits depuis 2009 en AE (145,2 %) et depuis 2010 en CP (111,3 %) .

Évolution du niveau de consommation des crédits de la mission « Travail et emploi »

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

AE

Prévision

12 109,2

11 426,1

12 425,5

10 143,4

12 519,2

12 332,6

11 958,6

11 547,0

Exécution

13 722,4

14 746,9

12 284,9

10 631,8

12 494,6

11 648,7

12 785,7

16 764,3

Taux de consommation

(en pourcentage)

113,3 %

129,1 %

98,9 %

104,8 %

99,8 %

94,5 %

106,9 %

145,2 %

CP

Prévision

12 195,6

11 478,6

11 650,6

10 175,5

10 392,5

11 186,9

11 376,6

11 704,3

Exécution

13 650,7

14 685,8

11 745,6

10 344,3

10 527,1

10 674,0

12 105,3

13 025,8

Taux de consommation (en pourcentage)

111,9 %

127,9 %

100,8 %

101,7 %

101,3 %

95,4 %

106,4 %

111,3 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Évolution des dépenses de la mission « Travail et emploi » en autorisations d'engagement

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Évolution des dépenses de la mission « Travail et emploi » en crédits de paiement

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Cette surconsommation concerne les programmes 102 « Accès et retour à l'emploi », dont les dépenses se sont élevées à près de 9 milliards d'euros en AE (+ 1,6 milliard d'euros par rapport aux prévisions) et à 8,3 milliards d'euros en CP (+ 800 millions d'euros par rapport aux prévisions), et 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi », dont les dépenses se sont élevées à 7 milliards d'euros en AE (+ 3,6 milliards d'euros par rapport aux prévisions) et à 4 milliards d'euros en CP (+ 580 millions d'euros par rapport aux prévisions).

Évolution des dépenses en autorisations d'engagement par titre

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Évolution des dépenses en crédits de paiement par titre

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

L'essentiel de la hausse des dépenses et de l'écart aux prévisions est lié à un surcroît de dépenses d'intervention (titre 6) , à hauteur de + 4 milliards d'euros en AE (soit un écart de 5,3 milliards d'euros par rapport aux crédits inscrits en loi de finances) et de + 984 millions d'euros en CP (soit un écart de 1,4 milliard d'euros par rapport aux prévisions) par rapport à 2015, ces dernières représentant 86 % des AE et 82 % des CP de la mission « Travail et emploi » .

Répartition des crédits de paiement de la mission « Travail et emploi » par nature de dépense

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Il convient enfin de noter que l'exercice 2016 a donné lieu à un rétablissement de crédits à hauteur de 20 millions d'euros, lié à un redéploiement du programme d'investissement d'avenir au bénéfice du programme 103 . Ces opérations, retracées en dépenses d'opérations financières (titre 7), se sont traduites par une minoration de la consommation du programme 103.

La sous-budgétisation initiale des crédits de la mission « Travail et emploi » s'est logiquement traduite par des mouvements de crédits importants en cours de gestion .

Au total, le montant des CP ouverts s'est élevé à 13 milliards d'euros pour une prévision inscrite en loi de finances de 11,7 milliards d'euros. L'essentiel des crédits ouverts en cours de gestion l'ont été par le décret d'avance du 2 décembre 2016, à hauteur de 1,3 milliard d'euros, et par la loi de finances rectificative 300 ( * ) , à hauteur de 257 millions d'euros .

Mouvements de crédits intervenus en gestion pendant l'exercice 2016

(en millions d'euros)

Prog.

LFI 2016

Reports entrants

Décrets d'avance

Virement, transfert et annulation

LFR de fin de gestion

Fonds de concours et attributions de produits

Total des crédits ouverts

Crédits non consommés

Exécution 2016

Écart consommé/ LFI

102

7 535,7

22,7

544,7

- 1,5

212,3

25,1

8 339,0

6,8

8 332,3

796,6

103

3 309,6

30,0

766,0

- 1,8

44,9

5,7

4 154,4

262,3

3 892,1

582,5

111

91,8

10,5

- 5,1

0,0

0,0

0,0

97,3

12,7

84,6

- 7,3

155

767,3

16,7

- 13,1

- 39,2

0,0

9,2

737,8

20,8

716,9

- 50,4

Total mission

11 704,3

79,9

1 292,5

- 42,5

257,3

40,0

13 331,5

305,6

13 025,8

1 321,5

* Hors fonds de concours et attributions de produits inscrits en loi de finances.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Une enveloppe de contrats aidés majorée de 56 % en cours d'année pour faire face à la persistance d'un haut niveau de chômage

La loi de finances pour 2016 prévoyait une enveloppe de contrats aidés s'élevant à 295 000 contrats , dont 35 000 emplois d'avenir, 200 000 contrats d'accompagnement dans l'emploi dans le secteur non-marchand (CUI-CAE), et 60 000 contrats initiative emploi dans le secteur marchand (CUI-CIE), soit une diminution de plus de 173 000 contrats aidés par rapport à l'exercice 2015 .

Or, face à la persistance d'un niveau de chômage élevé, le Gouvernement a décidé de réévaluer cette enveloppe en cours d'exercice à hauteur de + 99 540 CUI-CAE, + 15 000 CUI-CIE et de + 30 000 emplois d'avenir, portant l'enveloppe totale de contrats aidés à 439 540 .

Cet objectif a été dépassé puisque 460 607 contrats aidés ont été finalement signés en 2016 (304 393 CUI-CAE, 80 323 CIE et 75 891 emplois d'avenir, dont 984 emplois d'avenir professeur), soit 56 % de plus que prévu en loi de finances initiale .

Nombre de prescriptions et coût des principaux dispositifs d'emplois aidés

Nombre de contrats

AE
(en millions d'euros)

CP
(en millions d'euros)

Exécution 2015

Prévision 2016

Prévision actualisée 2016

Exécution 2016

Prévision

Exécution

Écart

Prévision

Exécution

Écart

CUI-CAE

91 895

200 000

299 540

304 393

1 106,93

1 944,85

837,92

1 023,31

1 739,41

716,10

CUI-CIE

289 234

60 000

75 000

80 323

274,24

369,15

94,91

196,50

311,88

115,38

Emplois d'avenir

87 180

35 000

65 000

75 891

767,89

1 585,87

817,98

1 211,49

1 281,84

70,35

Total

468 309

295 000

439 540

460 607

2 149,06

3 899,87

1 750,81

2 431,30

3 333,13

901,83

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Cette augmentation en cours d'exercice de l'enveloppe de contrats aidés s'est logiquement traduite par une très forte surconsommation des crédits qui leur était consacrée tant en AE (+ 1,75 milliard d'euros) qu'en CP (+ 901 millions d'euros) .

Il convient par ailleurs de noter qu' un effort a été consenti afin de cibler davantage ces dispositifs sur les personnes les plus éloignées de l'emploi . Ainsi, selon le rapport annuel de performances pour 2016, au 31 décembre 2016, les demandeurs d'emploi de très longue durée, les habitants des quartiers prioritaires de la ville, les seniors et les travailleurs handicapés représentaient 67,1 % des bénéficiaires d'un CUI-CAE et 69,5 % d'un CUI-CIE.

2. La poursuite de la montée en puissance de la Garantie jeunes avant sa généralisation en 2017

Expérimentée à partir de 2013, la Garantie jeunes s'adresse aux jeunes de 18 à 25 ans en situation de grande précarité et qui ne sont ni étudiants, ni en emploi, ni en formation ( not in education, employment or training : NEET's ).

Ce dispositif, qui prend la forme d'un accompagnement, individuel et collectif, assuré par les missions locales, doit permettre un accès à l'emploi ou à une formation.

Une allocation d'un montant maximal équivalent au revenu de solidarité active est attribuée aux jeunes bénéficiaires (472,37 euros par mois au 1 er avril 2017). Elle est versée pendant un an renouvelable et est dégressive. Cette dégressivité s'effectue à partir du moment où le jeune déclare un revenu supérieur à 300 euros nets par mois. L'allocation est nulle lorsque que le revenu net du jeune atteint 80 % du SMIC brut.

Par ailleurs, les missions locales bénéficient d'un soutien financier de l'État permettant d'accompagner les jeunes, le coût unitaire de cet accompagnement étant de 1 600 euros par bénéficiaire. Ce soutien n'est prévu que pour la première année d'accompagnement du jeune.

Ne concernant à l'origine que dix territoires, la Garantie jeunes a été progressivement étendue. 91 départements et 358 missions locales faisaient partie de ce dispositif en 2016 . Sa généralisation est en outre effective depuis le 1 er janvier 2017, conformément à l'article 47 de la loi du 8 août 2016 301 ( * ) .

La loi de finances pour 2016 prévoyait l'inscription de 281,99 millions d'euros en AE et de 255,39 millions d'euros en CP au titre de la Garantie jeunes , dont 185,99 millions d'euros en AE comme en CP au titre de l'allocation et 96 millions d'euros en AE et 69,4 millions d'euros en CP au titre de l'accompagnement.

Cette dotation reposait sur deux hypothèses principales : l'entrée de 60 000 jeunes supplémentaires dans le dispositif et le maintien de 5 687 jeunes entrés en 2015 (soit un taux de renouvellement des contrats de l'ordre de 15 %).

L'exécution 2016 a été inférieure aux prévisions, s'élevant à 266 millions d'euros en AE et 232 millions d'euros en CP , dont 174 millions d'euros en AE comme en CP au titre de l'allocation et 92 millions d'euros en AE et 58 millions d'euros en CP au titre de l'accompagnement.

Cet écart s'explique par différents facteurs : s'agissant des crédits d'allocation, un nombre d'entrées 2015 et 2016 inférieur aux prévisions (54 068 en 2016 sur un objectif de 60 000), une saisonnalité des entrées et une durée maximale d'allocation se différentes des hypothèses, une hypothèse de revalorisation du RSA qui ne s'est pas vérifiée, s'agissant des crédits d'accompagnement, la non-atteinte par les missions locales d'objectifs quantitatifs, qualitatifs et de reporting . Dans un rapport consacré aux missions locales 302 ( * ) , vos rapporteurs spéciaux ont appelé à la fixation d'objectifs, notamment qualitatifs, plus réalistes, ainsi qu'à des obligations de reporting assouplies afin de préserver l'équilibre financier de ces structures.

Vos rapporteurs spéciaux se félicitent de la montée en puissance de ce dispositif, généralisé à compter de 2017, dont les résultats semblent positifs . Ainsi, comme le rappelait le Comité scientifique en charge de l'évaluation de la Garantie Jeunes dans son rapport intermédiaire de novembre 2016, « la part des jeunes pré-identifiés dans les territoires pilotes qui sont en emploi est de 40,4 %, au lieu de 34,1 % si la Garantie Jeunes n'avait pas été introduite. De même, leur part en emploi durable est de 20,5 %, au lieu des 15,9 % que l'on aurait constatés sans la Garantie Jeunes ».

3. Un exercice 2016 marqué par la mise en oeuvre du « plan d'urgence pour l'emploi »

Annoncé par le Président de la République François Hollande le 18 janvier 2016, le « plan d'urgence pour l'emploi » comporte deux volets :

- le versement d'une aide à l'embauche pour les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME) ;

- la mise en place de 500 000 formations supplémentaires .

Le coût total lié à la mise en oeuvre de ce plan s'est élevé en 2016 à 3,9 milliard d'euros en AE et à 916 millions d'euros en CP.

Ces mesures ayant été décidées en cours d'exercice 2016, aucun crédit n'avait été inscrit à ce titre dans la loi de finances pour 2016.

a) L'aide à l'embauche à destination des TPE et des PME, un dispositif ayant rencontré un très fort succès

Le dispositif « embauche PME » s'adresse aux TPE et aux PME employant moins de 250 salariés et qui embauchent un salarié à temps plein en CDI ou en CDD de 6 mois ou plus, pour une rémunération comprise entre 1 et 1,3 SMIC.

Il prend la forme d'une aide forfaitaire de 2 000 euros par an versée pendant une durée maximale de deux ans, soit 4 000 euros au total. Initialement prévue jusqu'au 31 décembre 2016, cette aide a été prolongée jusqu'au 30 juin 2017.

Sur un objectif initial de 1 035 858 demandes d'aides, 1 025 450 demandes ont été enregistrées par l'Agence de services et de paiement (ASP), soit un taux d'atteinte proche de 99 % .

Selon le rapport annuel de performances pour 2016, les entreprises ayant le plus sollicité ce dispositif sont les PME dont les effectifs sont compris entre 20 et 49 salariés .

3 milliards d'euros en AE et 517 millions d'euros en CP ont été dépensés au titre de ce dispositif en 2016 .

b) Le plan 500 000 formations supplémentaires

Le plan « 500 000 formations supplémentaires » poursuit trois objectifs principaux : porter le nombre de formations proposées aux demandeurs d'emploi à un million fin 2016, contre 500 000 en 2015, soit un doublement, concentrer cet effort sur les demandeurs d'emploi peu ou pas qualifiés ou de longue durée et développer une offre de formations aux métiers les plus porteurs ou en tension.

La coordination de la mise en oeuvre de ce plan a été confiée aux régions volontaires qui se sont engagées à maintenir leur effort propre pour la formation des personnes en recherche d'emploi, au niveau de 2015. Celles-ci ont pu confier à Pôle emploi tout ou partie de la réalisation opérationnelle d'une partie des formations prescrites.

L'État contribue au financement de ce plan à hauteur de 3 000 euros pour chaque formation supplémentaire .

Le rapport annuel de performance pour 2016 relève que, « hors La Réunion pour laquelle les données ne sont pas disponibles et hors conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes, non engagé dans le plan, les conseils régionaux et Pôle emploi ont réalisé plus de 323 827 formations supplémentaires par rapport à 2015 sur un objectif de 330 377 formations supplémentaires, soit un taux de réalisation de plus de 98 % ».

Un comité d'évaluation de ce dispositif a été mis en place qui devrait rendre un rapport d'étape en juillet 2017 et son rapport final à la fin de l'année 2017.

Au total 987 millions d'euros en AE et 399 millions d'euros en CP ont été dépensés en 2016 au titre de la mise en oeuvre du plan « 500 000 formations supplémentaires », selon la répartition figurant dans le tableau ci-dessous.

Répartition des crédits consacrés au financement du plan « 500 000 formations supplémentaires »

Consommation
AE

Consommation
CP

Bourgogne-Franche-Comté

35 463 000

21 277 800

Bretagne

40 254 000

24 152 400

Centre-Val de Loire

35 274 000

19 903 200

Corse

1 800 000

732 000

Grand Est

74 895 000

44 937 000

Guadeloupe

6 948 000

2 084 400

Guyane

1 782 400

534 720

Hauts-de-France

62 316 500

19 819 950

Île-de-France

102 000 000

30 600 000

La Réunion

19 845 000

5 953 500

Martinique

11 394 000

3 418 200

Mayotte

2 250 000

975 000

Normandie

21 390 600

6 417 180

Nouvelle-Aquitaine

60 531 000

18 159 300

Occitanie

90 000 000

54 000 000

PACA

28 386 750

8 516 025

Pays de la Loire

56 211 000

16 863 300

Sous-total

650 741 250

278 343 975

Convention nationale avec Pôle emploi

336 639 750

121 004 290

Total

987 381 000

399 348 265

Source : rapport annuel de performances pour 2016

4. Une contribution de la mission à l'effort de modération des dépenses publiques se traduisant par une baisse de ses dépenses de personnel et de fonctionnement

La loi de finances pour 2016 prévoyait la suppression de 192 ETP. L'exécution 2016 laisse apparaître une surconsommation du schéma d'emplois à hauteur de 54 ETP.

Pour autant, il convient de souligner que les effectifs portés par le programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » diminuent à hauteur de 138 ETP par rapport à 2015 .

Schéma d'emplois de la mission « Travail et emploi »

(en ETP)

Catégorie d'emplois

Sorties

dont départs en retraite

Entrées

dont primo recrutements

Schéma d'emplois

Schéma d'emplois

Écart aux prévisions

Réalisation

Prévision PAP

Emplois fonctionnels

19

8

12

0

- 7

0

- 7

A administratifs

179

34

241

68

62

12

50

A techniques

130

76

89

45

- 41

- 6

- 35

B administratifs

64

20

96

51

32

67

- 35

B techniques

141

117

15

0

- 126

- 145

19

Catégorie C

142

85

84

22

- 58

- 120

62

Total

675

340

537

186

- 138

- 192

54

Source : rapport annuel de performances pour 2016

En outre, le dépassement du schéma d'emplois constaté en 2016 ne s'est pas traduit par une surconsommation des dépenses de personnel. À l'inverse, celles-ci se sont établies à 620 millions d'euros, soit une diminution de 4 millions d'euros par rapport à l'exécution 2015 et un écart de - 6 millions d'euros par rapport aux prévisions , en raison notamment d'une contribution au CAS « Pensions » inférieure aux prévisions (184,7 millions d'euros pour une hypothèse qui s'établissait à 190 millions d'euros).

Par ailleurs, hors subventions pour charges de service public, les dépenses de fonctionnement se sont élevées 94,5 millions d'euros en AE (- 10 millions d'euros par rapport à 2015) et 106,6 millions d'euros en CP (- 29 millions d'euros par rapport à 2016).

Au total, les crédits de fonctionnement ont été sous-consommés à hauteur de 45,2 millions d'euros en AE et de 48,5 millions d'euros en CP .

S'agissant du programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail », programme « support » du ministère, ses dépenses de fonctionnement ont diminué de près de 5 millions d'euros en AE et de 18 millions d'euros en CP par rapport à 2015. Cette baisse traduit notamment, comme le souligne la Cour des comptes dans son analyse de l'exécution budgétaire 2016 de la mission « Travail et emploi » « un effort important des services pour maîtriser leurs consommations courantes ».

5. Une mesure de la performance au niveau de la mission à refondre entièrement

La mission « Travail et emploi » ne comporte que deux objectifs et indicateurs les plus représentatifs de la mission : l'objectif « Mobiliser au mieux les outils d'insertion professionnelle au bénéfice des jeunes », dont l'atteinte est mesuré par l'indicateur « Part des jeunes chômeurs dans la population des 15-24 ans », et l'objectif « Dynamiser la négociation collective et améliorer les conditions du dialogue social », dont l'atteinte est mesurée par l'indicateur « Part des entreprises et des salariés concernés par une négociation collective ».

Ces objectifs et indicateurs ne semblent cependant pas refléter les résultats enregistrés par la mission « Travail et emploi ».

Le choix de certains indicateurs de programme, tels que le « Taux d'insertion dans l'emploi 6 mois après un contrat aidé » 303 ( * ) , le « Taux d'accès à l'emploi durable 6 mois après la fin d'une formation prescrite par Pôle emploi » du programme 102 ou encore certains indicateurs transversaux du programme 155, qui permettent une comparaison interministérielle, apparaîtrait, à cet égard, plus pertinent.

Par ailleurs, le taux de renseignement des indicateurs les plus représentatifs de la mission apparait, cette année encore, très insuffisant, seul un sous-indicateur sur cinq ayant été renseigné en 2016 (« Part des jeunes chômeurs dans la population des 15-24 ans »).

Au total, vos rapporteurs spéciaux appellent à une refonte de la maquette de performance de la mission « Travail et emploi » afin que celle-ci permette une véritable évaluation de l'impact des dispositifs financés sur les crédits de la mission sur l'emploi et l'employabilité des personnes bénéficiaires . Il pourrait par exemple être envisagé de créer des indicateurs mesurant l'impact des principaux dispositifs en faveur de l'emploi des jeunes financés sur la mission « Travail et emploi » tels que la Garantie jeunes ou encore les missions locales, les écoles de la deuxième chance et l'établissement pour l'insertion dans l'emploi (Épide). Ces indicateurs devraient notamment donner une information sur le taux de sorties positives, le type de sortie, le nombre de jeunes bénéficiaires, le coût par jeune accueilli, voire le nombre de structures, etc.

De même, il serait souhaitable que des indicateurs permettent de mesurer ou de synthétiser l'impact des grandes mesures annoncées par l'exécutif, en particulier le plan d'urgence pour l'emploi : nombre de d'aides versées, type d'entreprises concernées, entreprises recrutant pour la première fois, nombre de formations prescrites, etc.

II. COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « FINANCEMENT NATIONAL DU DÉVELOPPEMENT ET DE LA MODERNISATION DE L'APPRENTISSAGE »

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2016

Le compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » (CAS « FNDMA ») a été créé par l'article 23 de la loi du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011, en remplacement du fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage.

Depuis 2015, le CAS « FNDMA » retrace en recettes :

- les versements opérés au Trésor public au titre des sanctions prévues en matière de taxe d'apprentissage ;

- les fonds de concours ;

- la fraction régionale de la taxe d'apprentissage.

Par ailleurs, le CAS « FNDMA » comporte deux programmes :

- le programme 787 « Répartition de la ressource régionale consacrée au développement de l'apprentissage » ;

- le programme 790 « Correction financière des disparités régionales de taxe d'apprentissage et incitations au développement de l'apprentissage ».

Exécution des crédits du CAS « FNDMA » par programme en 2016

(en millions d'euros et en %)

Programmes

Crédits exécutés 2015

Crédits votés LFI 2016

Crédits exécutés 2016

Exécution 2016 / exéc. 2015

Exécution 2016 / LFI 2016

Répartition régionale de la ressource consacrée au développement de l'apprentissage

AE

1 397,82

1 395,78

1 395,78

99,9 %

100,0 %

CP

1 397,82

1 395,78

1 395,78

99,9 %

100,0 %

Correction financière des disparités régionales de taxe d'apprentissage et incitations au développement de l'apprentissage

AE

96,70

95,08

106,42

110,1 %

111,9 %

CP

99,30

95,08

106,42

107,2 %

111,9 %

Total

AE

1 494,52

1 490,85

1 502,19

100,5 %

100,8 %

CP

1 497,12

1 490,85

1 502,19

100,3 %

100,8 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le CAS « FNDMA » était doté pour 2016 de 1,49 milliard d'euros en AE comme en CP , soit un niveau quasi stable par rapport à l'exécution 2015.

L'exécution 2016 est proche des prévisions et s'élève à 1,5 milliard d'euros en AE comme en CP, soit un taux de consommation de crédits de 100,8 %.

Le programme 787 vise à répartir le montant de la fraction régionale pour l'apprentissage (51 % du produit de la taxe d'apprentissage). Il était doté en 2016 de 1,396 milliard d'euros en AE comme en CP .

Par ailleurs, conformément à l'article L. 6241-2 du code du travail, ces crédits ont été complétés par une fraction du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) s'élevant à 148,38 millions d'euros pour atteindre le montant de la part fixe de la ressource régionale pour l'apprentissage fixé à 1 544,09 millions d'euros . Au total, ces crédits ont été répartis selon la clé figurant dans le tableau ci-dessous.

Répartition de la part fixe de la fraction régionale de la taxe d'apprentissage

(en euros)

PART FIXE 2016

Régions

Total

CAS

TICPE

Grand Est

142 151 837

128 497 432

13 654 405

Nouvelle Aquitaine

145 763 488

131 762 166

14 001 322

Auvergne-Rhône-Alpes

171 919 332

155 405 608

16 513 724

Bourgogne-Franche-Comté

68 326 924

61 763 777

6 563 147

Bretagne

68 484 265

61 906 004

6 578 261

Centre-Val de Loire

64 264 468

58 091 540

6 172 928

Corse

7 323 133

6 619 709

703 424

Île-de-France

237 100 230

214 325 551

22 774 679

Occitanie

114 961 330

103 918 711

11 042 619

Hauts-de-France

133 683 302

120 842 343

12 840 959

Normandie

84 396 951

76 290 196

8 106 755

Pays de la Loire

98 472 922

89 014 099

9 458 823

Provence-Alpes-Côte d'azur

104 863 542

94 790 867

10 072 675

Guadeloupe

25 625 173

23 163 745

2 461 428

Guyane

6 782 107

6 130 651

651 456

Martinique

28 334 467

25 612 798

2 721 669

Réunion

41 293 546

37 327 092

3 966 454

Mayotte

346 383

313 111

33 272

France entière

1 544 093 400

1 395 775 400

148 318 000

Source : rapport annuel de performances 2016

Le programme 790 vise à procéder à la répartition du solde dynamique de la ressource régionale pour l'apprentissage, après versement de la part fixe tel que prévu par le programme 787. Il était doté pour 2016 de 95 millions d'euros .

Le programme 790 a bénéficié de reports de crédits à hauteur de 2 millions d'euros en AE et de 4,4 millions d'euros en CP, ainsi que d'une majoration à hauteur de 51,3 millions d'euros en AE comme en CP.

Au total, sur des montants de crédits ouverts s'élevant à 148,5 millions en AE et de 150,8 millions d'euros en CP , 106,4 millions d'euros ont été consommés en AE comme en CP en 2016 .

B. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL FRANÇOIS PATRIAT

1. Un surcroît de recettes dont une partie seulement a été dépensée en 2016

Un niveau de recettes significativement supérieur aux prévisions, à hauteur de 51,3 millions d'euros, ayant été constaté en 2016, en lien avec l'évolution favorable de la masse salariale, un arrêté du 19 décembre 2016 a ouvert des crédits en AE et en CP à due concurrence .

Or, seuls 106 millions d'euros ayant été dépensés au titre du programme 790 « Correction financière des disparités régionales de taxe d'apprentissage et incitations au développement de l'apprentissage », un solde positif de plus de 42 millions d'euros peut être constaté en 2016 .

Évolution de l'équilibre du compte

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

Recettes

575

653,5

688

675,7

774

678,3

1 490,70

1 498,30

1 490,85

1 545,02

Dépenses

575

560,1

825

813,7

865,8

785,4

1 490,70

1 497,10

1 490,85

1 502,19

Solde

0

93,4

- 137

- 138

- 91,8

- 107,1

0

1,2

0

42,83

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Une part importante de ce solde (40 millions d'euros) aura donc vocation à être versée en 2017 au titre de l'exercice 2016, le montant de la part dynamique de la ressource régionale pour l'apprentissage s'étant élevé à plus de 146 millions d'euros .

Au total, cette part sera répartie selon la clé figurant dans le tableau ci-dessous.

Répartition de la part dynamique de la fraction régionale de la taxe d'apprentissage

(en euros)

Total

Versée en 2016

Versée en 2017

Pourcentage

(106 millions d'euros)

(40 millions d'euros)

Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine

15 172 604

11 018 316

4 154 288

10,38572

Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes

13 207 937

9 591 578

3 616 359

9,0409

Auvergne et Rhône-Alpes

16 095 297

11 688 374

4 406 923

11,01731

Bourgogne et Franche-Comté

7 836 138

5 690 588

2 145 550

5,36387

Bretagne

6 101 718

4 431 056

1 670 662

4,17666

Centre-Val de Loire

7 959 020

5 779 825

2 179 195

5,44799

Corse

1 115 136

809 809

305 327

0,76332

Île-de-France

19 727 368

14 325 976

5 401 392

13,50348

Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées

11 203 947

8 136 284

3 067 663

7,66916

Nord-Pas-de-Calais et Picardie

11 479 778

8 336 592

3 143 186

7,85796

Normandie

9 154 557

6 648 021

2 506 536

6,26634

Pays de la Loire

10 992 636

7 982 831

3 009 805

7,52451

PACA

10 290 552

7 472 979

2 817 573

7,04393

Guadeloupe

1 297 176

942 007

355 169

0,88792

Guyane

231 715

168 271

63 444

0,15861

Martinique

776 215

563 686

212 529

0,53132

Réunion

3 108 540

2 257 416

851 124

2,12781

Mayotte

340 666

247 391

93 275

0,23319

France entière

146 091 000

106 091 000

40 000 000

100

Source : rapport annuel de performances 2016

2. Une évolution positive des effectifs d'apprentis résultant d'une politique volontariste en faveur de l'apprentissage

Dans le cadre de la priorité accordée à la jeunesse, le précédent Gouvernement s'était fixé l'objectif de relancer l'apprentissage et d'atteindre 500 000 apprentis en 2017 .

Dans cette perspective, différentes mesures financières et fiscales ont été prises lors du précédent quinquennat .

En premier lieu, le financement de l'apprentissage a fait l'objet d'une réforme engagée par l'article 60 de la loi de finances rectificative pour 2013 et parachevée par la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale et l'article 8 de la loi de finances rectificative pour 2014.

Par ailleurs, il a été procédé à une refonte des dispositifs financiers de soutien à l'apprentissage (exonération de certaines cotisations patronales et salariales, création d'une prime à l'apprentissage, ciblage du crédit d'impôt de 1 600 euros, création d'une aide au recrutement d'apprentis pour les entreprises de moins de 250 salariés).

Enfin, le décret du 29 juin 2015 304 ( * ) a créé une aide en faveur des très petites entreprises embauchant des jeunes apprentis destinée à compléter les dispositifs existants. Elle s'adresse aux entreprises de moins de onze salariés recrutant en contrat d'apprentissage, à compter du 1 er juin 2015, un jeune de moins de 18 ans à la date de la conclusion du contrat.

Son montant est fixé à 1 100 euros par trimestre d'exécution du contrat. Elle est attribuée dans la limite des douze premiers mois (soit un total de 4 400 euros).

Les résultats enregistrés par cette politique volontariste en faveur de l'apprentissage semblent positifs .

Si les effectifs d'apprentis ne peuvent être connus qu'au mois de mai de l'année N+1, les évolutions constatées depuis 2015 apparaissent favorables.

Ainsi, selon le tableau de bord sur les politiques en faveur de l'emploi publié par la Dares, les entrées en contrats d'apprentissage se sont élevées à 289 438 en 2016 contre 283 506 l'année précédente .

Le rapport annuel de performances pour 2016 note en outre que 272 000 contrats ont été enregistrés sur la période allant de juin 2016 à janvier 2017, soit une progression de 1,8 % par rapport à la même période 2015-2016, laissant entrevoir une progression significative en 2017 .


* 1 Renommé Ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) en juin 2017.

* 2 Les reports de paiement au titre des OMP se sont élevés à 117 millions d'euros en 2015 et à 42,5 millions d'euros en 2014.

* 3 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016 de la mission « Action extérieure de l'État », 2016.

* 4 Rapport annuel de performances pour 2016 de la mission « Action extérieure de l'État », p. 10.

* 5 Auxquels s'ajoutent 72 millions d'euros de transferts liés notamment aux bourses et aux échanges d'expertise et scientifiques de Campus France.

* 6 Rapport d'information n° 127 (2015-2016) des sénateurs Éric Doligé et Richard Yung, fait au nom de la commission des finances, « Faire de la délivrance des visas un outil d'attractivité pour la France », 29 octobre 2015.

* 7 Les 5 millions d'euros restants du fonds d'urgence ont été versés à Atout France début 2017.

* 8 Action 2 « Accès des élèves français au réseau AEFE » du programme 151 « Français à l'étranger et affaires consulaires ».

* 9 Un nouveau prélèvement sur la trésorerie de l'AEFE de 7,4 millions d'euros devrait intervenir en 2017 et un autre de 6,7 millions d'euros en 2018.

* 10 Rapport d'information n° 64 (2016-2017) du sénateur Eric Doligé, fait au nom de la commission des finances sur l'enquête de la Cour des comptes relative à l'enseignement français à l'étranger et l'accès des Français de l'étranger à cet enseignement.

* 11 Fin 2016, les restes à payer du programme étaient très faibles (20 388 euros) et correspondaient à des factures arrivées tardivement, qui seront prises en charge en 2017 par les autres programmes de la mission.

* 12 3,78 millions d'euros en 2015 et 1,9 million d'euros en 2016 versés par voie de fonds de concours et d'attributions de produits

* 13 Rapport annuel de performances pour 2016 de la mission « Action extérieure de l'État », p. 196.

* 14 Rapport annuel de performances pour 2016 de la mission « Action extérieure de l'État », p. 37.

* 15 Carte nationale d'identité.

* 16 Votre rapporteur spécial souhaite vivement que les rapports annuels de performances présentent systématiquement une confrontation entre les dépenses de la mission AGTE au cours de l'exercice sous revue et la norme de dépense cohérente avec la programmation pluriannuelle.

* 17 Hors contributions employeurs au CAS « Pensions » induites.

* 1 « Sous-préfectures : l'État à proximité » . Rapport d'information d'Hervé Marseille, fait au nom de la commission des finances n° 420 (2016-2017) - 15 février 2017.

* 18 La loi de finances pour 2017 a restructuré la mission en fusionnant les crédits du programme 154consacré au développement de l'agriculture et ceux du programme 149 qui regroupait jusqu'alors les crédits de la politique de la forêt.

* 19 Vos rapporteurs spéciaux souhaitent que les avis de contrôle budgétaire et comptable ministériel soient annexés aux projets de loi de finances.

* 20 Il en est allé ainsi, en particulier, des compensations dues à raison des exonérations de cotisations sociales accordées dans le cadre du dispositif TO-DE (travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi).

* 21 Publiés par l'INSEE le 13 décembre 2016, ces comptes ne retracent pas la totalité des flux économiques de l'année. Il apparaît, en particulier, que les opérations budgétaires de fin de gestion, qui peuvent être particulièrement lourdes, comme l'exercice 2016 l'atteste, ne sont pas comptabilisées. Ainsi en va-t-il notamment des ouvertures de crédits liées à la gestion des crises et aléas de production. La campagne de publication des comptes de l'agriculture pourrait utilement intégrer une mise à jour permettant de disposer de comptes provisoires actualisés par la prise en considération de l'exécution budgétaire assez rapidement après la fin de l'année.

* 22 Cette partie des comptes provisoires de l'agriculture est particulièrement incertaine du fait des opérations de fin de gestion budgétaire qui peuvent conduire à des modifications plus ou moins importantes. En 2016, les révisions nécessitées par l'exécution effective des crédits de la mission AAFAR pourraient revêtir une ampleur particulière.

* 23 Il faut prendre ce total avec beaucoup de précautions dans la mesure où des transferts très substantiels, ceux résultant de la prise en charge de cotisations sociales par l'État ne sont pas inventoriés comme subventions en comptabilité nationale.

* 24 Il faut noter également la publication au mois de juillet du bilan des concours publics à l'agriculture qui repose sur une méthode plus en phase avec les opérations budgétaires et suggérer que celle-ci puisse être jointe au rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement.

* 25 Ainsi, les exonérations de cotisations sociales ne sont pas isolées venant directement en déduction des charges salariales qui sont comptabilisées pour leur valeur nette.

* 26 Les régimes d'imposition des revenus agricoles comportent des règles d'assiette qui retiennent fréquemment des références pluriannuelles. Elles permettent de lisser la progressivité de l'imposition du revenu en cas de pic exceptionnel mais jouent à l'inverse dans les phases de dépression des revenus agricoles en introduisant un facteur d'inertie fiscale.

* 27 Vos rapporteurs spéciaux s'interrogent sur l'exhaustivité des dépenses fiscales recensées par la documentation budgétaire. Le suivi de l'application des lois fait découvrir des situations particulièrement insatisfaisantes où certains prélèvements obligatoires font l'objet de conditions de perception déconcertantes pouvant aller jusqu'à des recouvrements aléatoires selon les régions. Pour d'autres, le défaut de fixation de leur taux aboutit à des non-prélèvements. Ces situations sont souvent liées à des choix de qualification desdits prélèvements très incertains, un certain nombre de taxes étant, à tort, qualifiées de redevances. Une rationalisation s'impose.

* 28 Les dépenses fiscales en faveur de la forêt passeraient quant à elles de 125 à 126 millions d'euros.

* 29 Rapport d'information de Joël Bourdin, fait au nom de la commission des finances n° 93 (2008-2009) - 13 novembre 2008.

* 30 Compte tenu des montages complexes auxquels donne lieu les décisions de la commission européenne relatives au paiement des aides agricoles, les agriculteurs subissent une série de coûts supplémentaires du fait de l'atmosphère contentieuse de la gestion des aides européennes.

* 31 « Pour une politique de sécurité sanitaire des aliments « zéro défaut » ». Rapport d'information d'Alain Houpert et Yannick Botrel, fait au nom de la commission des finances n° 442 (2016-2017) - 23 février 2017.

* 32 Outre les effets en retour de la réduction des dépenses d'analyses sur les laboratoires publics départementaux dont la santé financière est, pour beaucoup d'entre eux, très préoccupante, il y a lieu de relever un certain paradoxe entre la baisse des analyses et les augmentations de moyens en personnels décidées ces dernières années. Si le contrôle en abattoirs assuré par les personnels vétérinaires ne dépend pas exclusivement de la prescription d'analyses, la capacité laissée à ces personnels de procéder à des analyses régulières demeure une condition de leur pleine efficacité.

* 33 La recherche fondamentale financée sur fonds publics est principalement prise en charge par les dispositifs fiscaux ou budgétaires mis en oeuvre par le ministère de la recherche.

* 34 Il existe actuellement 20 ONVAR financés par le CASDAR, deux ONVAR étant présentés comme « non financés ».

* 35 L'indicateur « Part des financements correspondant aux priorités retenues pour l'évolution quantitative » correspond à la poursuite de l'objectif intitulé « Renforcer l'évolution qualitative des appels à projets et des programmes pluriannuels ».

* 36 À titre d'illustration, la mention que 2,38 millions d'euros d'autorisations d'engagement ont été consacrés au financement d'« actions d'accompagnement sur des thématiques d'actualité et innovantes » recèle une dimension énigmatique plus propre à susciter la curiosité qu'à la satisfaire.

* 37 Décret n° 2016-1684 du 5 décembre 2016 portant modification du décret n° 2006-1139 du 12 septembre 2006 sur le Fonds de solidarité pour le développement.

* 38 134 millions d'euros ont été affectés à l'aide bilatérale, dont il faut retrancher 38 millions d'euros de bonifications versées à l'AFD en contrepartie des 38 millions d'euros versés à l'Iffim à partir du programme 110 (cf. infra ).

* 39 Pour rappel, ce fonds est alimenté par le produit de la taxe sur les billets d'avions et par une partie du produit de la taxe sur les transactions financières.

* 40 Voir le détail de l'exécution des programmes 851 et 852 infra.

* 41 Voir le commentaire de l'exécution de la mission « Aide publique au développement » dans le présent rapport.

* 42 Dont 54,5 millions d'euros au titre de l'accord entre la république française et les États-Unis.

* 43 Dont 54,5 millions d'euros au titre de l'accord entre la république française et les États-Unis.

* 44 On rappelle que si les crédits votés par le Parlement constituent un plafond de dépenses, certaines approches, non dénuées de justification, tendent à leur attribuer également la nature d'un choix plus positif par lequel le Parlement traduit ses choix d'allocation des ressources.

* 45 Voir le rapport spécial n° 140 du 24 novembre 2016 consacré à la mission dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2017 par votre rapporteur spécial.

* 46 Dont 54,5 millions d'euros au titre de l'accord entre la République française et les États-Unis.

* 47 La loi de programmation des finances publiques fixe un plafond aux dépenses fiscales mais celui-ci est global et, en conséquence, n'est pas décliné par mission au contraire du régime applicable aux crédits de paiement qui sont, de leur côté, plafonnés par mission. Ce hiatus dans le statut des transferts de l'État selon qu'ils passent par des dépenses ou par des faveurs fiscales n'est pas purement arbitraire dans la mesure où les dépenses fiscales sont présumées moins pilotables que les crédits mais, outre que cette présomption n'est pas irréfragable (le plafond de dépenses fiscales fixé par la loi de programmation l'atteste), elle ouvre la perspective d'arbitrages au profit de transferts par les dépenses fiscales plutôt que par des dépenses publiques pouvant aboutir (effet pervers s'il en est) à une plus grande inertie des finances publiques et à une plus faible visibilité des interventions de l'État.

* 48 Rapport d'information de Marc Laménie, fait au nom de la commission des finances n° 475 (2015-2016) 16 mars 2016.

* 49 Chiffres DSN pour la classe d'âge 1989 (annexe 7 du rapport de la Cour des comptes).

* 50 Rapport d'information de Marc Laménie, fait au nom de la commission des finances n° 72 (2016-2017) - 25 octobre 2016.

* 51 Ce changement d'indicateur s'explique par la volonté de suivre les nouveaux délais de jugement instaurés par la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 portant réforme du droit d'asile.

* 52 À la suite des travaux d'un groupe de travail instauré en février 2014, avec le contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM) et le concours de la direction générale des finances publiques (DGFiP)

* 53 Le second volet de la réforme est prévu par la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral ainsi que le décret n° 2015-1199 du 30 septembre 2015. Il fait suite au premier volet de la réforme qui avait permis le regroupement de sept CRC et la fixation du ressort de 20 CRC en application de la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles et le décret n° 2012-255 du 23 février 2012 relatif au siège et au ressort des CRC.

* 54 Loi n ° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 55 Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

* 56 Ces quatre avis concernent les prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, le solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement 2015, les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2017 et le projet de loi de finances rectificatives pour 2016.

* 57 Hors remboursements et dégrèvements.

* 58 Rapport annuel de performances de la mission « Culture » joint au projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2016, p. 296.

* 59 Pris dans le cadre du budget triennal.

* 60 Dans la mesure où elles relèvent des opérateurs, les dépenses de personnel des programmes 131 et 175 sont assurées sur des crédits de titre 3.

* 61 Les territoires prioritaires correspondent à la géographie de la politique de la ville et aux réseaux d'éducation prioritaire (REP +) ainsi qu'aux zones rurales pauvres, éloignées des grands centres urbains et présentant une forte concentration de jeunes ainsi qu'une croissance démographique élevée.

* 62 Voir la communication des rapporteurs spéciaux de la mission « Culture » sur le fonds d'urgence pour le spectacle vivant, présentée à la commission des finances du Sénat le 1 er juin 2016.

* 63 Article 119 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.

* 64 Les quatre dispositifs relatifs au secteur cinématographique et audiovisuel ont été transférés à la mission « Médias, livre et industries culturelles » en raison du transfert du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) à cette mission en 2015. Le crédit d'impôt phonographique a également été transféré au programme 334 par la loi de finances initiale. Enfin, un nouveau crédit d'impôt en faveur du spectacle vivant a été créé par l'article 113 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 et rattaché au programme 131.

* 65 Article 238 bis-0-A du code général des impôts (CGI), dépense fiscale n° 320118.

* 66 Rapport d'information n° 18 (2015-2016), de Vincent Eblé, fait au nom de la commission des finances, sur les dépenses fiscales relatives à la préservation du patrimoine historique bâti.

* 67 Le financement des opérations extérieures : préserver durablement la capacité opérationnelle de nos armées, rapport d'information n° 85 (2016-2017) de Dominique de Legge, fait au nom de la commission des finances, déposé le 26 octobre 2016.

* 68 « Le programme CONTACT vise à doter les forces d'un réseau de radiocommunications tactiques haut débit, sécurisé et interopérable avec l'OTAN, et de postes associés . [...] Il fournira une famille de postes radios sécurisés destinés à équiper différentes plateformes (fantassin, blindés, aéronefs de combats, de renseignement et de transport, navires) en remplacement des systèmes existants ».

* 69 Assemblée nationale, question n° 74447de François Cornut-Gentille, 14 e législature.

* 70 « Le programme SCORPION vise à assurer la modernisation des groupements tactiques interarmes (GTIA) afin d'accroître dans une approche globale et cohérente leur efficacité et leur protection, en utilisant au mieux les nouvelles capacités d'échanges d'information au sein du GTIA ».

* 71 « Le MRTT (Multi-role transport tanker - avion multi-rôles de ravitaillement en vol et de transport) est destiné à remplacer les composantes actuelles de ravitaillement en vol (C-135 FR et KC-135 R) et de transport stratégique de personnel et de fret (flotte Airbus de l'armée de l'air) par un parc unique d'avions gros porteurs polyvalents ».

* 72 « Le MRTT (Multi-role transport tanker - avion multi-rôles de ravitaillement en vol et de transport) est destiné à remplacer les composantes actuelles de ravitaillement en vol (C-135 FR et KC-135 R) et de transport stratégique de personnel et de fret (flotte Airbus de l'armée de l'air) par un parc unique d'avions gros porteurs polyvalents ».

* 73 Rapport sur le décret d'avance relatif à la fin de gestion 2016, rapport d'information n° 153 (2016-2017) d'Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances, déposé le 29 novembre 2016.

* 74 Loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.

* 75 Rapport spécial de Michel Canevet, annexe n° 9 du Tome III du rapport général fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2016.

* 76 Loi n° 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement.

* 77 Une autorité publique indépendante est une AAI dotée de la personnalité morale.

* 78 Article 4 de la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques.

* 79 Article 1 du décret n° 2002-497 du 12 avril 2002 relatif au groupement interministériel de contrôle.

* 80 Article 2 du décret précité.

* 81 Par la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale.

* 82 Il s'agit des six services spécialisés de renseignement et de certains services de la direction centrale de la police judiciaire, de la direction centrale de la sécurité publique, de la direction générale de la gendarmerie nationale, de la préfecture de Paris ou de services placés sous l'autorité d'emploi du ministre de la Défense.

* 83 En particulier les lois n° 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement et n° 2015-1556 du 30 novembre 2015 relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales.

* 84 Audition de Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur, et Jean-Yves Le Drian, devant les commissions des Lois et des affaires étrangères, de la défense et des formes armées du Sénat, le 12 mai 2015.

* 85 « Le Premier ministre organise la traçabilité de l'exécution des techniques autorisées (...) et définit les modalités de la centralisation des renseignements collectés. »

* 86 Rapport n° 445 (2014-2015), 13 mai 2015.

* 87 Décret n° 2016-1772 du 20 décembre 2016 portant création d'un service à compétence nationale dénommé « groupement interministériel de contrôle ».

* 88 Site internet du Secrétariat général pour la défense et la sécurité nationale (SGDSN).

* 89 Selon le rapport annuel de performances (RAP) annexé au projet de loi de règlement pour l'année 2015.

* 90 Amendement n° II-319 présenté par le Gouvernement.

* 91 Selon cet article, le GIC est rattaché « pour sa gestion administrative et budgétaire, au secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale. Ce dernier est notamment chargé de la passation des marchés, de la gestion budgétaire et financière et du recrutement des agents du service ».

* 92 En application de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques.

* 93 Rapport relatif à l'activité de la délégation parlementaire au renseignement pour l'année 2016.

* 94 À périmètre courant.

* 95 L'inscription des recettes et des crédits du CAS « Transition énergétique » et du programme 345 s'est faite dans la loi de finances pour 2016 au cours de l'examen parlementaire, par coordination avec le projet de loi de finances rectificative.

* 96 Ce dernier constitue le programme support commun de gestion du ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer et du ministère du logement et de l'habitat durable.

* 97 Rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques, tome II.

* 98 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016 de la mission.

* 99 L'article 3 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 a étendu la liste des équipements éligibles au crédit d'impôt et porté son taux de 15 % à 30 %, avec application rétroactive au 1 er septembre 2014.

* 100 Rapport d'information n° 110 (2016-2017) du 8 novembre 2016 d'Albéric de Montgolfier, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances, sur l'enquête de la Cour des comptes sur l'efficience des dépenses fiscales relatives au développement durable.

* 101 Principalement afin de ne pas déstabiliser ces filières.

* 102 Rapport d'information n° 110 (2016-2017) du 8 novembre 2016 d'Albéric de Montgolfier, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances, sur l'enquête de la Cour des comptes sur l'efficience des dépenses fiscales relatives au développement durable.

* 103 Loi organique n° 2001-692 du 1 août 2001 relative aux lois de finances.

* 104 Selon la Cour des comptes, ce redéploiement a permis de « satisfaire une annonce gouvernementale visant à porter l'objectif de logements rénovés à 100 000 et non (de) répondre à un besoin urgent de crédits de l'ANAH ».

* 105 Au regard des articles 8 et 9 de la LOLF, et notamment de l'article 8 qui prévoit que « les crédits de paiement constituent la limite supérieure des dépenses pouvant être ordonnancées ou payées pendant l'année pour la couverture des engagements contractés dans le cadre des autorisations d'engagement ».

* 106 Délibération de la CRE du 15 octobre 2015.

* 107 Rapport annuel de performance de la mission.

* 108 Créée par l'article 20 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV).

* 109 Cour des comptes, mission Écologie, développement et mobilité durables, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016, p. 79.

* 110 Rapport général n° 140 (2016-2017) fait au nom de la commission des finances, déposé le 24 novembre 2016.

* 111 En neutralisant les crédits de paiement alloués à l'ESTE - soit 250 millions d'euros de CP alloués sur le titre 6 « Dépenses d'intervention » en 2015.

* 112 Loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

* 113 Par exemple, les annulations de crédits sur le programme ont représenté 14 % des crédits initiaux en exécution 2014.

* 114 Ce montant est réparti, chaque année, entre les agences de l'eau au prorata de leur part respective dans le produit total prévisionnel pour l'année concernée des redevances pour atteintes aux ressources en eau mentionnées à l'article L. 213-10 du code de l'environnement.

* 115 Article 29 de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

* 116 27 131 véhicules électriques et 3 921 véhicules hybrides rechargeables ont bénéficié d'un bonus à l'achat contre une prévision de 33 000 et 11 000.

* 117 Le super-bonus a été remplacé au 1 er avril 2015 par une prime à la conversion dont les montants et les conditions d'attribution ont été revus : le montant varie en fonction des niveaux d'émissions de CO 2 des véhicules. En 2015, la prime était de 3 700 euros pour les véhicules électriques, de 2 500 euros pour les véhicules hybrides rechargeable et de 500 euros pour les véhicules hybrides non rechargeables, ainsi que, sous conditions de ressources, pour les véhicules thermiques respectant la norme Euro 6. Le nombre de primes à la conversion versées en 2015 a toutefois été nettement inférieur aux objectifs fixés - 3 230 primes ont été attribuées au lieu de 80 000 - en raison du faible nombre de véhicules thermiques qui ont bénéficié de la prime de 500 euros, probablement par méconnaissance de de son existence et en raison de son faible montant.

* 118 Le décret n° 2016-1980 du 30 décembre 2016 prévoit notamment la suppression du bonus pour les véhicules hybrides non rechargeables, et la diminution du bonus pour les véhicules électriques, de 6 300 à 6 000 euros.

* 119 Le programme 345 regroupe les charges liées à la péréquation tarifaire dans les zones non interconnectées, aux dispositifs sociaux, au soutien à la cogénération, les intérêts de la dette accumulée auprès des opérateurs au titre du déficit de compensation, le budget du médiateur de l'énergie et les frais de gestion de la CDC au titre du CAS « Transition énergétique » et du programme 345.

* 120 Cette action devient sans objet avec la modification des recettes du CAS réalisée en loi de finances pour 2017.

* 121 Ces dispositifs étaient prévus à l'article L. 121-21 du code de l'énergie.

* 122 Les appels d'offres visant à développer les capacités d'effacement de consommation électrique seront organisés à partir de 2018, d'où un montant nul pour 2016 et 2017. L'ancien dispositif de soutien aux effacements, financé par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE), perdure en 2016 et en 2017.

* 123 Dans sa délibération du 13 juillet 2016, la CRE évalue le besoin complémentaire au titre des charges de service public de l'énergie à 365,5 millions d'euros et précise que le montant de ces charges à compenser serait intégré à l'évaluation des charges pour 2017.

* 124 Rapport n° 229 sur le projet de loi de finances rectificative pour 2015, tome I (2015-2016) d'Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances, déposé le 9 décembre 2015.

* 125 Rapport général n° 140 (2016-2017) fait au nom de la commission des finances, déposé le 24 novembre 2016.

* 126 Mise en place dans le cadre de la loi de finances pour 2014, la CCE introduit une composante carbone dans les différentes taxes intérieures de consommation sur les énergies fossiles (TICPE, TICGN, TICC). Le prix de la tonne de carbone est fixé à 22 euros pour 2016, 30,5 euros pour 2017, et atteindra 56 euros en 2020.

* 127 Cette mesure s'impose pour mettre en conformité les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables avec le régime des aides d'État européen.

* 128 Cet amendement reprend la philosophie de l'amendement adopté par le Sénat à l'initiative de sa commission des finances, avec l'accord de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer dans le cadre de l'examen du projet de loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte en première lecture.

* 129 Doivent conclure un contrat de complément de rémunération les installations de puissance supérieure à 500 kW et, sauf exceptions, dont la puissance n'excède pas 1 MW. La filière éolienne bénéficie de seuils plus élevés, compris entre 3 MW et 6 MW.

* 130 Cet article, repris à l'article L. 2121-8 du code des transports, met à la charge de l'État le financement de l'augmentation de l'offre de transport ferroviaire décidée par les conseils régionaux à la suite des mises en service de LGV.

* 131 Une cession Dailly est une forme particulière de cession de créance par laquelle un créancier cédant transfère à un établissement de crédit sa créance contre son débiteur, appelé débiteur cédé. Le débiteur cédé, c'est-à-dire le débiteur de ladite créance, devra donc s'acquitter de son obligation envers l'établissement de crédit.

* 132 À ce titre, il définit les obligations que l'exploitant doit assurer pour l'ensemble de ces trains, en matière de desserte des gares, de fréquence, de maintenance et de régénération du matériel roulant existant.

* 133 La trentaine de ligne TET actuellement en service permettent de desservir quelque 300 villes grâce aux 320 trains qu'elles font circuler tous les jours.

* 134 Ces lignes représentaient 3 % du trafic des lignes TET mais 25 % de leur déficit d'exploitation.

* 135 La ligne Paris-Tarbes-Hendaye était maintenue jusqu'au 1 er juillet 2017 (ouverture de la ligne Tours--Bordeaux) et Paris-Nice jusqu'au 1 er octobre 2017.

* 136 Paris-Caen-Cherbourg/Trouville-Deauville, Paris-Rouen-Le Havre, Paris-Evreux-Serquigny, Paris-Granville et Caen-Le Mans-Tours.

* 137 Redevance pour services terminaux de la circulation aérienne.

* 138 Cour des comptes, référé n° 71553, « Les investissements de la direction générale de l'aviation civile ».

* 139 Décret n° 2016-557 du 6 mai 2016. La compensation carbone était initialement rattachée au le programme 345 « Service public de l'énergie » de la mission « Écologie, développement et mobilités durables. À compter de la loi de finances initiale pour 2017, elle est inscrite sur les crédits du programme 134 (à hauteur de 116,7 millions d'euros).

* 140 La différence entre les deux expliquant la sur-exécution de 4,4 % des crédits de la mission en AE, là où la non-consommation des CP permet de respecter la prévision initiale malgré le transfert de la compensation carbone en cours de gestion.

* 141 Ni dans les documents budgétaires publics (PAP et RAP), ni dans les réponses aux questionnaires budgétaires successifs de vos rapporteurs.

* 142 Par le décret de transfert n° 2016-631 du 19 mai 2016.

* 143 Notamment prévues par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite « loi Macron ».

* 144 Toutes catégories de dépenses confondues, les dépenses de la direction générale des entreprises (DGE) baissent de 13,1 % en exécution, celles de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de 4,7 %, et celles de la direction générale du Trésor de 6,1 %.

* 145 Rapport n° 126 (2015-2016) de Jacques Mézard, au nom de la commission d'enquête sur le bilan et le contrôle de la création, de l'organisation, de l'activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes, « Un État dans l'État : canaliser la prolifération des autorités administratives indépendantes pour mieux les contrôler », 28 octobre 2015.

* 146 Source : audition de Muriel Pénicaud, directrice générale de Business France (19 octobre 2016).

* 147 Dans la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires, la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (loi « Macron »), la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du 20 e siècle et enfin la loi du 6 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (loi « Sapin 2 »).

* 148 Sur le plan budgétaire, la participation de l'État au plan « France très haut débit » est portée par deux outils :

- jusqu'en 2014, le fonds national pour la société numérique (FSN), géré par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir (PIA), à hauteur de 900 millions d'euros ;

- depuis 2015, le programme 343 « Plan France très haut débit », qui prend le relais du FSN pour les financements restants, soit 2,1 milliards d'euros à horizon 2022.

* 149 En raison de la logique budgétaire propre au programme 343, ceux-ci ne figurent pas dans le tableau ci-dessus des mouvements intervenus en cours d'exercice.

* 150 Cour des Comptes, Les réseaux fixes de haut et très haut débit : un premier bilan, 31 janvier 2017.

* 151 Tome II du rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques, publié en juillet 2017.

* 152 Compte tenu de l'enjeu qui s'attache à la rationalisation de ces dispositifs et au renforcement de leur pilotage. Un tel indicateur pourrait être construit par analogie avec l'indicateur 1.2 « Nombre de corps de fonctionnaires relevant de l'État ou des établissements publics administratifs après des mesures de fusion ou de mise en extinction - ou par un alignement sur des dispositions statutaires communes » du programme 148 « Fonction publique ».

* 153 Compte tenu notamment de la hausse tendancielle de la part relative des crédits de titre 2 au sein de la mission, évoquée supra .

* 154 Cette contrainte est justifiée par la nécessité de ne pas entraîner la qualification d'aides d'État au sens du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), de ne pas entraîner d'effet de substitution à l'initiative privée, et de ne pas exposer l'État à des risques excessifs.

* 155 Parallèlement, un appel d'offres a également été lancé pour 5 000 autres places destinées à l'hébergement des demandeurs d'asile.

* 156 La société nationale immobilière et sa filiale Adoma ont notamment développé un dispositif innovant d'hébergement d'urgence en s'appuyant sur le rachat d'hôtels à bas prix par un fonds d'investisseurs privés. Transformées en résidences hôtelières à vocation sociale (RHVS), ces structures hôtelières doivent faire l'objet de travaux d'équipement pour proposer une solution alternative à l'hébergement à l'hôtel, en garantissant notamment un accompagnement social.

* 157 Rapport d'information n° 193 (2016-2017) de Philippe Dallier, au nom de la commission des finances du Sénat, L'hébergement d'urgence sous forte tension : sortir de la gestion dans l'urgence.

* 158 Note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016 pour la mission « Égalité des territoires et logement ».

* 159 Source : rapport annuel de performances ou note d'analyse de l'exécution budgétaire par la Cour des comptes de la mission pour 2016.

* 160 Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de la Cour des comptes, avril 2017.

* 161 La Cour des comptes considérait en effet qu'il devait être mis fin à cette pratique ne respectant pas l'article 17 de la LOLF car « au vu notamment de la nature des ressources de ce fonds et de la composition de la commission chargée d'en arrêter les emplois, où les représentants de l'État ont la majorité des voix, [...] le respect des critères d'externalité à l'État et d'intentionnalité de la partie versante n'est pas assuré ».

* 162 Selon les termes mêmes du rapport annuel de performances.

* 163 Décret n° 2016-732 du 2 juin 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance.

* 164 L'ouverture de crédits de paiement par fonds de concours doit parallèlement s'accompagner de l'ouverture d'autorisations d'engagement.

* 165 Ces chiffres différant légèrement des montants présentés dans le rapport annuel de performances compte tenu du décalage de prise en compte de certaines dépenses de fin d'année (rattachées à 2017) et à certaines actions complémentaires comme par exemple les maîtrises d'oeuvre urbaine et sociale (MOUS).

* 166 Article 22 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances : « les opérations budgétaires relatives à la dette et à la trésorerie de l'État, à l'exclusion de toute opération de gestion courante, sont retracées dans un compte de commerce déterminé ».

* 167 Compte de commerce 903 « Gestion de la dette et de la trésorerie de l'État ».

* 168 Voir observation n° 5 de la présente contribution.

* 169 Rapport d'information n° 50 (2016-2017) relatif aux spécialistes en valeur du Trésor, de Serge Dassault, fait au nom de la commission des finances, 19 octobre 2016.

* 170 Article 34 du décret n° 70-104 du 30 janvier 1970 fixant les modalités d'application des majorations de rentes viagères de la caisse nationale de prévoyance, des caisses autonomes mutualistes et des compagnies d'assurances.

* 171 Article 21 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012.

* 172 Commission européenne, « European Economic Forecast. Winter 2017 », Institutional Paper, 13 février 2017.

* 173 Conformément à l'article 21 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les « comptes d'affectation spéciale retracent, dans les conditions prévues par une loi de finances, les opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées ».

* 174 Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 175 Ce nombre est issu de l'analyse de l'exécution budgétaire 2016 de la mission « Enseignement scolaire » produite par la Cour des comptes, celui-ci n'étant pas retracé dans les documents budgétaires alors qu'il est pris en compte, bien que de manière contestable, dans l'atteinte de l'objectif de création de 55 000 postes sur le quinquennat et constitue, par conséquent, un indicateur important .

* 176 Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 177 OCDE, Connectés pour apprendre ? Les élèves et les nouvelles technologies - Principaux résultats, PISA.

* 178 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016 du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ».

* 179 « Le FACÉ : un outil indispensable mais perfectible au service de la qualité de l'électricité dans le monde rural », Rapport d'information n° 422 (2016-2017) de Jacques Genest, fait au nom de la commission des finances le 15 février 2017.

* 180 Ibidem

2 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016 du CAS « FACÉ ».

* 181 Cette mesure de périmètre correspond en fait à deux changements :

- d'une part, pour 29 millions d'euros, le reversement direct des contributions des débitants de tabac (collectées par les fournisseurs) au receveur régional des douanes d'Ile-de-France, devenu depuis le 1 er janvier 2017 le trésorier général des douanes, sans transit par le budget de l'État ;

- d'autre part, pour 26 millions d'euros, le remplacement d'une partie du financement du RAVGDT par le budget de l'État par un prélèvement de 0,25 % sur le produit du droit de consommation sur les tabacs, directement versé par l'ACOSS.

* 182 Décret n° 2016-920 du 6 juillet 2016.

* 183 Tome II du rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques, publié en juillet 2017.

* 184 D'après les chiffres fournis par le directeur interministériel des systèmes d'information et de communication (DISIC), Jacques Marzin, à l'occasion de l'audition conjointe du 21 mai 2014 sur le projet de l'ONP devant la commission des finances.

* 185 Audition de Bruno Parent, directeur général des finances publiques, par la commission des finances du Sénat, le 19 octobre 2016.

* 186 Tome II du rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques, publié en juillet 2017.

* 187 Il s'agit du décret n° 2016-1652 du 2 décembre 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance et de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 188 Par le décret n° 2016-1652 précité et la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 189 Par le décret n° 2016-220 du 6 juillet 2016.

* 190 Par le décret non publié du 7 juillet 2016.

* 191 Terme utilisé par la Cour des comptes, dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire de la mission pour 2015.

* 192 Article 61 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

* 193 Aux recettes retracées dans le CAS s'ajoute la contribution exceptionnelle du ministère des affaires étrangères transitant par le budget de la mission « Action extérieure de l'État ». Cette contribution exceptionnelle résulte des dispositions de l'article 38 de la loi de finances pour 2015, qui prévoit le versement annuel jusqu'en 2017 d'une contribution annuelle au désendettement au moins égale à 25 millions d'euros. Prévue initialement à hauteur de 73 millions d'euros en 2016, elle s'est finalement élevée à 100 millions d'euros en raison de la cession du site de Kuala Lumpur.

* 194 Voir le rapport d'information n° 570 (2016-2017), « De la rationalisation à la valorisation : 12 propositions pour une politique immobilière de l'État soutenable et efficace », mai 2017.

* 195 Frontex, Risk Analysis for 2017.

* 196 Amendement n° II-240 présenté par le Gouvernement à l'article 24 (état B) du projet de loi de finances pour 2016.

* 197 Décret n° 2016-1652 du 2 décembre 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance.

* 198 Amendement du Gouvernement précité.

* 199 Ce qui représente une sous-consommation de 27,7 millions d'euros, sur une prévision initiale de 717,8 millions d'euros.

* 200 Soit une sous consommation de 17,4 millions d'euros, sur une prévision initiale de 714,9 millions d'euros.

* 201 Ces opérations relèvent alors du programme 731 « Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État ».

* 202 Ces opérations relèvent alors du programme 732 « Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État ».

* 203 En application de l'article 3 de la loi organique relative aux lois de finances, les dividendes en numéraire sont versés au budget général de l'État, contrairement aux dividendes en actions, qui sont affectés au compte d'affectation spéciale.

* 204 Pour une analyse détaillée, voir « La politique de dividendes de l'État actionnaire », rapport d'information n° 355 (2016-2017), 25 janvier 2017.

* 205 Il convient toutefois de relever que ce biais a été en partie intégré dans la programmation pour l'exercice 2017, le compte étant pour la première fois présenté en déficit (- 1,5 milliard d'euros), afin de tenir compte du montant des recapitalisations à venir.

* 206 Décrets d'avance du 2 juin 2016 et du 3 octobre 2016.

* 207 Note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016, CAS Participations financières de l'État, page 31.

* 208 Avis de la commission des finances du Sénat sur le projet de décret d'avance notifié le 23 septembre 2016, portant ouverture et annulation de 1 532 millions d'euros en autorisations d'engagement et 699 millions d'euros en crédits de paiement.

* 209 « EDF annonce le succès de son augmentation de capital avec maintien du droit préférentiel de souscription d'un montant d'environ 4 milliards d'euros », communiqué de presse d'EDF, 28 mars 2017.

* 210 « L'État confirme qu'il participera à hauteur de 3 milliards d'euros à l'augmentation de capital de 4 milliards d'euros lancée par EDF », communiqué de presse de l'APE, 7 mars 2017.

* 211 « La situation et les perspectives des finances publiques », Cour des comptes, juin 2017, page 66.

* 212 Soit 3 milliards d'euros supplémentaires en prenant en compte la cession des titres Peugeot pour un montant de 1,87 milliard d'euros.

* 213 Portefeuille de participations cotées de l'État, 6 juin 2017, APE.

* 214 Les données au titre de 2016 ne sont pas encore disponibles. La publication des comptes combinés 2015 n'a eu lieu qu'en novembre 2016.

* 215 L'élargissement du périmètre de la mission à la politique de la ville par la loi de finances initiale pour 2015 faisait suite à la création, en mars 2014, du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), qui regroupe la délégation à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR), le secrétariat général du comité interministériel des villes (SG CIV) et l'agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé).

* 216 Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

* 217 Décret n° 2016-732 du 2 juin 2016, décret n° 2016-1300 du 3 octobre 2016 et décret n° 2016-1652 du 2 décembre 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance.

* 218 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire de la mission « Politique des territoires », 2016.

* 219 Prévue à l'article 44 quindecies du code général des impôts.

* 220 À la suite de la réforme introduite par l'article 45 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.

* 221 Rapport annuel de performances de la mission « Politique des territoires » annexé au projet de loi de règlement et d'approbation des comptes pour 2016.

* 222 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 223 Cf. le 2 de la présente partie.

* 224 Créés en 2016 à la suite du CIEC du 26 octobre 2015, les délégués du gouvernement sont au nombre de 10 et interviennent dans des quartiers nécessitant une action renforcée. Il s'agit d'une expérimentation d'un an renouvelable une fois. À l'exception d'un agent contractuel occupant ces fonctions et pris en charge sur le programme 147, ils sont en principe suivis au sein des administrations qui les mettent à disposition.

* 225 Cf . notamment infra la mobilisation prioritaire de la trésorerie de l'Agence de services et de paiements pour le dispositif adultes-relais, conduisant à une moindre dépense budgétaire pour 2016.

* 226 Rapport d'information n° 128 (2016-2017) du 17 novembre 2016 de Daniel Raoul au nom de la commission des finances, « Le contrat adultes-relais, un dispositif de la politique de la ville à préserver ».

* 227 Un avenant du 20 juin 2016 prévoit que cette « poche » de 100 millions d'euros puisse être utilisée pour les décaissements au titre du PNRU (et non seulement pour le NPNRU).

* 228 Loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 229 Cf. décision du Conseil constitutionnel n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001.

* 230 Les crédits figurant auparavant sur le programme 731 « Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État » du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » ont été annulés à due concurrence.

* 231 Avec deux programmes : programme 421 « Soutien des progrès de l'enseignement et de la recherche », doté de 2,9 milliards d'euros en AE et programme 422 « Valorisation de la recherche » doté de 3 milliards d'euros.

* 232 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour 2016.

* 233 Note d'analyse de l'exécution budgétaire, op.cit .

* 234 Note d'analyse de l'exécution budgétaire, op. cit .

* 235 Rapport d'information n° 729 (2015-2016) de Philippe Adnot, fait au nom de la commission des finances, « Le contrôle des conditions de maintien des droits des étudiants boursiers : le scandale des "copies blanches" ».

* 236 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire, op. cit.

* 237 Il regroupe 17 des opérateurs ou catégories d'opérateur sur 29 au total pour les programmes « Recherche ». 95 % de ses crédits sont destinés à ces 17 opérateurs.

* 238 Dépenses liées à la mise en oeuvre des lois, règlements et accords internationaux.

* 239 La direction générale des finances publiques a mis à la disposition du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche une nouvelle base de données permettant de fiabiliser le chiffrage des créances fiscales.

* 240 En pratique, compte tenu des délais de paiement, le versement effectif de la pension revalorisée n'intervient qu'en novembre, dans la plupart des cas.

* 241 Le contexte des régimes spéciaux est sensible à des évolutions économiques et sociodémographiques pouvant marquer les entreprises auxquelles ils sont associés, sort commun à tous les régimes de retraites mais particulièrement prononcé pour les régimes spéciaux qui, du fait de leur isolement, ne bénéficient pas des effets amortisseurs de régimes plus diversifiés.

* 242 Par ailleurs, compte tenu de l'isolement de ces régimes et du fait que certains d'entre eux concernent des entreprises (plus ou moins) soumises à la concurrence, les hypothèses économico-démographiques sur lesquelles reposent les projections apparaissent d'emblée affectées d'incertitudes qu'il serait utile d'illustrer par des projections établies en variantes. Cette recommandation s'impose d'autant plus que les hypothèses choisies pour réaliser les projections ne sont pas présentées avec un détail suffisant dans le cadre du compte général de l'État. On ne peut qu'ajouter quelques interrogations sur les effets de l'innovation technologique notamment sur les conditions de financement des régimes concernant les entreprises de transport où les progrès de productivité par tête pourraient aboutir à une reconsidération radicale des modalités de financement de la protection sociale dans l'hypothèse où ils seraient captés par le capital.

* 243 Ainsi, un besoin de financement de 346 milliards d'euros en 2016 équivaut grosso modo à un besoin de financement annuel moyen de 3,5 milliards d'euros, résultat à comparer avec les 6,3 milliards d'euros de dépenses de la mission en 2016.

* 244 L'« opting out » désigne l'option ouverte dans certains régimes d'assurances sociales de ne pas s'affilier au régime de base. La levée de l'option dépend d'une appréciation d'opportunité reposant sur une perception du bilan risque-rendement des différentes offres d'assurance.

* 245 Votre rapporteur spécial tend à considérer que cotisations salariales et cotisations employeurs sont également des éléments de rémunération différées des salariés.

* 246 En autorisations d'engagement (AE) = crédits de paiement (CP).

* 247 Le rapport démographique comporte à son numérateur les effectifs de cotisants et à son dénominateur les effectifs de retraités de droit direct ou indirect.

* 248 En parallèle, la même rubrique de dépenses a été plus coûteuse s'agissant des personnels civils (+ 16 millions d'euros).

* 249 Rapport d'information de Jean-Claude Boulard, rapporteur spécial, fait au nom de la commission des finances n° 109 (2016-2017) - 8 novembre 2016 .

* 250 Une revalorisation de 1 % appliquée au premier jour du mois d'octobre entraîne une augmentation des charges de pensions de 85 millions d'euros sur l'exercice concerné. Un retour au calendrier d'indexation antérieur à la réforme de 2014 (premier jour d'avril) attribuerait à une revalorisation des pensions du programme de 1 point une valeur de 255 millions d'euros. Le décalage de la date d'indexation permet de diviser par trois sa charge budgétaire pour un exercice donné.

* 251 Le bilan consolidé du mécanisme de surcote décote pour le CAS s'améliore ; il passe de 49,9 millions d'euros à 42,7 millions d'euros entre 2016 et 2016.

* 252 Fondée sur un nouveau jeu d'hypothèses.

* 253 Le compte général de l'État pour 2016 ne reprend pas la projection à très long terme (horizon de 100 ans) des besoins de financement actualisés cumulés du compte. Peut-être est-ce dû à un changement de module d'évaluation, le modèle PABLO ayant pris la suite du modèle ARIANE par lequel étaient évalués jusqu'en 2015 les besoins de financement du régime.

* 254 Cette asymétrie des effets de l'instrument de régulation des équilibres financiers des régimes de retraite qu'est le décalage de l'âge de départ en retraite entre les fonctionnaires et les salariés du secteur privé passe par une inégale probabilité d'être sans emploi au long de la vie professionnelle et, en particulier, dans les dernières années de celle-ci. Elle est rarement prise en compte dans les études sur l'équité du système de retraite et de ses différents régimes alors qu'elle peut exercer des impacts considérables sur les situations individuelles. Il faut donc en recommander une évaluation systématique.

* 255 « L'espérance de vie en retraite sans incapacité sévère des générations nées entre 1960 et 1990 : une projection à partir du modèle Destinie » G 2017/3 Alexandre Cazenave-Lacroutz et Fanny Godet. DESE. INSEE.

* 256 L'impact de la désindexation sur les taux de pauvreté en retraite en est bien sûr une des composantes.

* 257 Ce critère satisfaisant pour apprécier la justice contributive ne l'est pas nécessairement pour mesurer l'équité contributive. Celle-ci est une notion plus complexe qui suppose de tenir compte d'un ensemble d'éléments plus diversifié que le seul revenu des affiliés (les conditions concrètes des carrières par exemple).

* 258 Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 259 Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 260 Rapport d'information n° 625 (2016-2017) sur la maquette budgétaire de la mission « Remboursements et dégrèvements », déposé le 12 juillet 2017.

* 261 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016.

* 262 Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 263 Fixée par la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

* 264 En particulier, le transfert de la formation médicale initiale des internes et de l'intégralité du financement du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (CNG), de l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH) et de la Haute Autorité de santé (HAS) vers l'assurance maladie.

* 265 Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 266 Loi de finances rectificative n° 2015-1786 du 29 décembre 2015.

* 267 Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

* 268 Il s'agissait d'indicateurs concernant la prévalence du Sida, le cancer du sein et la consommation annuelle d'alcool.

* 269 En effet, 68 % des personnes interrogées dans le cadre de l'enquête statistique de l'Insee sur les ressources et les conditions de vie ont déclaré être en bonne ou en très bon état de santé.

* 270 Proportion de découvertes de séropositivité diagnostiquées à un stade SIDA, taux de participation au dépistage du cancer du sein pour les femmes de 50 à 74 ans, consommation annuelle d'alcool par habitant de plus de 15 ans, nombre de donneurs décédés et prélevés, pourcentage des étudiants en médecine s'orientant vers la médecine générale de premier recours.

* 271 Rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques, tome II.

* 272 « Plan de renforcement du dispositif de lutte contre le terrorisme » (PLAT), présenté en avril 2015 ; « Plan de lutte contre l'immigration clandestine » (PLIC), présenté en septembre 2015 ; « Plan BAC - PSIG », présenté en octobre 2015 ; « Pacte de sécurité » (PDS), annoncé en novembre 2015 ; « Plan de sécurité outre-mer » (PSOM), annoncé en avril 2016 ; « Plan de sécurité publique » (PSP), annoncé en octobre 2016.

* 273 Hors charge de la dette et pensions, les dépenses de l'État ne doivent pas progresser en euros courants.

* 274 Les dépenses de l'État ne doivent pas progresser plus vite que l'inflation.

* 275 Rapport IGA-IGF « Évolution des effectifs de la police et de la gendarmerie nationales », février 2017.

* 276 Rapport général n° 140 (2016-2017) de Philippe Dominati, fait au nom de la commission des finances, déposé le 24 novembre 2016.

* 277 Décrets n° 2016-732 du 2 juin 2016 et n° 2016-1652 du 2 décembre 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance. Le premier a porté annulation de crédits à hauteur de 4,06 millions d'euros en AE et CP, le second à hauteur de 3,36 millions d'euros en AE et 3,72 millions d'euros CP.

* 278 Arrêtés du 1 er mars 2016 et du 29 mars 2016.

* 279 Bilan de l'accidentalité routière en 2016 de l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR).

* 280 Engagements non couverts par paiements au 31 décembre 2016.

* 281 En application de l'article 49 modifié de la loi n° 2005-1719 de finances pour 2006.

* 282 Ce versement a été introduit par l'article 47 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 pour 2013.

* 283 Ce poste comprend trois catégories de dépenses :

- la gestion du déploiement et de la maintenance des dispositifs par chacun des équipementiers  de radars (il inclut notamment la permanence d'un technicien au Centre national de traitement de Rennes chargé de la supervision des radars) ;

- la maintenance et la supervision des télécommunications par un prestataire afin d'assurer la transmission des messages d'infractions au Centre national de traitement de Rennes ;

- l'assistance à maîtrise d'ouvrage confiée à des prestataires chargés de coordonner les différents acteurs des marchés publics, d'assurer le suivi financier et le suivi du stock des pièces de rechange.

* 284 « I. - Les comptes d'affectation spéciale retracent, dans les conditions prévues par une loi de finances, des opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées. »

* 285 Dans son analyse d'exécution budgétaire 2016, la Cour des comptes relève que « le nombre et le contenu des indicateurs continuent de gagner en précision » et que « les objectifs de performance attachés aux programmes qui en disposent semblent pertinents ».

* 286 Dans son rapport de 2013, votre rapporteur spécial indiquait déjà que l'ANTAI disposait alors de 16,7 millions euros de fonds de roulement, alors que son niveau optimal était estimé à 14,5 millions, soit « 40 - 45 jours de dépenses de fonctionnement ». Il concluait que le « confort » budgétaire de l'ANTAI « doit donc amener à une vigilance accrue en matière de gestion des deniers publics afin de minimiser le ratio dépenses de l'Agence/ produit des amendes. »

* 287 Pour mémoire, le programme 754 bénéficie :

- de 170 millions d'euros provenant des amendes forfaitaires « radars » (montant plafonné par la loi de finances initiale) ;

- de 53 % des amendes forfaitaires hors « radars » et des amendes majorées « radars » ou « hors radars » (hors versement au budget général pour alimenter le Fonds interministériel de prévention de la délinquance et de lutte contre la radicalisation (FIPDR) et au programme 753, au profit de l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI)), soit 522,7 millions.

Sont imputés sur ce programme en 2016 :

- en février, le paiement des sommes dues aux communes et à leur groupement, au titre des amendes encaissées en 2015, réparties selon les statistiques de verbalisation de 2014, pour un montant de 572,44 millions d'euros, auquel s'ajoutent 0,8 million et 1,15 million d'euros en CP au titre de 2014 ;

- en novembre, le montant de 64 millions d'euros (fixé par la loi de finances initiale pour 2016) dû aux départements, au titre des amendes forfaitaires radars, encaissées en 2015.

* 288 Le programme 755 bénéficie de 47 % des amendes forfaitaires (hors « radars ») et des amendes majorées « radars » ou  « hors radars » (hors versement au budget général au profit du FIPDR et au programme 753, au profit de l'ANTAI).

* 289 Décret n° 2016-732 du 2 juin 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance.

* 290 En application de la loi de finances pour 2017, leur financement est transféré à l'assurance maladie à compter du 1 er janvier 2017.

* 291 Loi n° 2015-994 relatif au dialogue social et à l'emploi.

* 292 INSEE, 18 mai 2017, taux de chômage au sens du Bureau international du travail.

* 293 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2016 pour la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », page 53.

* 294 Loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

* 295 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 296 Le programme 219 bénéficie depuis 2009 du versement d'un fonds de concours du centre national pour le développement du sport (CNDS), de 19,8 millions d'euros.

* 297 Article 200 du code général des impôts.

* 298 Article 163-0 A ter du code général des impôts.

* 299 Il s'agit du nombre d'indemnités mensuelles à verser aux jeunes en service civique.

* 300 Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 301 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 302 Rapport d'information n° 575 (2016-2017) de François Patriat et Jean-Claude Requier, fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 juin 2017.

* 303 Cela supposerait néanmoins que cet indicateur soit renseigné chaque année, ce qui n'est pas le cas.

* 304 Décret n° 2015-773 du 29 juin 2015 portant création d'une aide en faveur des très petites entreprises embauchant des jeunes apprentis.

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