B. LE CONTRÔLE DES INSCRIPTIONS ET RADIATIONS PRONONCÉES PAR LE MAIRE

L'attribution au maire et, à l'étranger, à un ambassadeur ou chef de poste consulaire, de la responsabilité des inscriptions et radiations suppose, en contrepartie, le contrôle de leurs décisions afin de lever toute suspicion.

Les propositions de loi ne bouleversent pas l'état du droit en matière de recours juridictionnel. Elles maintiennent ainsi la possibilité pour tout électeur ou pour le préfet de saisir le tribunal d'instance pour solliciter l'inscription d'un électeur ou, au contraire, sa radiation. Ces recours sont généralement ouverts sept jours après la publication de la liste électorale voire, dans certains cas exceptionnels, jusqu'au jour du scrutin 10 ( * ) .

L'électeur concerné par une décision d'inscription et de radiation pourrait toujours présenter, pour sa part, un recours dans un délai de sept jours à compter de la notification de la décision du maire, alors qu'en l'état du droit, un tel recours n'est possible qu'entre le 10 et le 20 janvier.

Des voies de recours identiques sont ouvertes pour nos concitoyens expatriés devant le tribunal d'instance du premier arrondissement de Paris.

Les présents textes, par contre, innovent s'agissant du contrôle administratif des inscriptions et radiations prononcées au fil des mois. En surplomb des opérations d'inscription et de radiation, une commission de contrôle , dont les réunions seraient publiques, serait chargée de s'assurer de la régularité de la liste électorale, après l'affichage de cette dernière. Cette commission pourrait alors directement contester devant le tribunal d'instance les inscriptions et radiations prononcées par le maire.

Sur ce point, votre commission a souhaité répondre aux difficultés que les textes transmis au Sénat lui paraissaient soulever.

D'une part, la commission de contrôle prévue par les propositions de loi n'aurait aucun moyen d'intervention sur les listes électorales avant leur publication , ce qui empêcherait tout débat en amont entre la commission et le maire, même pour les demandes auxquelles il est facile de répondre 11 ( * ) . L a commission serait réduite, en cas de désaccord et éventuellement plusieurs mois après la décision du maire, à former un recours devant le tribunal d'instance pour contester cette décision et « externaliser » ainsi le différend qui l'opposerait au maire.

D'autre part, la composition de la commission porte en elle le risque, à l'approche du scrutin, de politiser un organe de contrôle au sein duquel l'examen objectif des dossiers doit impérativement prévaloir . Les propositions de loi prévoient, par exemple, que la commission des communes de plus de 1 000 habitants dans lesquelles au moins trois listes ont obtenu des sièges au conseil municipal soit composée d'un élu de la liste majoritaire et de deux représentants des autres listes arrivés à la suite. À une quinzaine de jours du scrutin, il n'est pas exclu que les opposants, majoritaires au sein de la commission, contestent les décisions du maire devant le tribunal d'instance pour des motifs étrangers au droit électoral, mais non au combat politique local en cours .

Enfin, le juge d'instance devient le seul arbitre , non seulement des litiges entre les électeurs et l'autorité administrative mais aussi des différends qui pourraient opposer le maire à sa commission de contrôle, dans des délais réduits et rapprochés de l'échéance électorale. À rebours de la politique de « déjuridictionnalisation » en cours paraît-il, ce système fait reposer directement sur le tribunal d'instance la responsabilité de contrôler les décisions d'inscription et de radiation.

En adoptant plusieurs amendements de son rapporteur , votre commission a revu le rôle et la composition de la commission de contrôle afin qu'elle exerce plus efficacement sa mission et qu'elle permette d'éviter une juridictionnalisation et une politisation excessive de la procédure d'établissement des listes électorales.

En lieu et place d'un contrôle abstrait et général - par sondage ou exhaustif - sur le travail du maire, la commission de contrôle se recentrerait sur une fonction de « filtre » pour juguler le développement des recours devant le tribunal d'instance. Avant la publication des listes, elle examinerait à cet effet les recours des électeurs contestant la décision du maire dans le cadre d'un recours administratif préalable obligatoire (RAPO) .

La commission de contrôle - dont les conclusions seraient directement intégrées à la liste électorale - pourrait ainsi réformer la décision du maire, résolvant par la voie gracieuse une part importante de dossiers reposant essentiellement sur une appréciation des faits et justificatifs produits et pour laquelle l'intervention du juge n'apparaît pas nécessaire. Évidemment, un électeur débouté par la commission conserverait la faculté de former un recours juridictionnel dans un délai de sept jours, l'accès au juge étant réservé à des contestations résiduelles.

S'agissant de la composition de cet organe de contrôle, votre commission a veillé à garantir la présence d'un représentant de l'administration ou du tribunal de grande instance afin de maintenir un regard extérieur dans les débats. Si le principe de représentation des listes minoritaires du conseil municipal est une innovation bienvenue maintenue, l'équilibre entre ces listes minoritaires et la liste majoritaire est rétabli afin d'éviter toute instrumentalisation de la commission de contrôle.

Le maire ou son représentant pourrait, enfin, siéger au sein de cette commission avec voix consultative. Il pourrait ainsi faire part à la commission des motifs de ses décisions d'inscription et de radiation et éclairer les débats s'y déroulant.


* 10 Un recours est possible jusqu'au jour du scrutin pour les électeurs prétendant avoir été omis de la liste en raison d'une erreur purement matérielle ou pour ceux souhaitant contester les décisions prises dans le cadre de la procédure d'inscription dérogatoire jusqu'à 10 jours avant le scrutin.

* 11 Vérification de la réalité de la résidence d'un électeur au sein de la commune, contrôle des doubles inscriptions, etc.

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