Rapport n° 30 (2000-2001) de M. Daniel HOEFFEL , fait au nom de la commission des lois, déposé le 18 octobre 2000

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N° 30

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 18 octobre 2000

RAPPORT

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer , par ordonnances , des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire (Urgence déclarée),

Par M. Daniel HOEFFEL,

Sénateur.

TOME I

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin,
Mme Dinah Derycke, MM. Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Georges Othily, Robert Bret, vice-présidents ; Patrice Gélard, Jean-Pierre Schosteck, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; Nicolas About, Guy Allouche,
Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José Balarello, Jean-Pierre Bel, Christian Bonnet, Mme Nicole Borvo,
MM. Guy-Pierre Cabanel, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Gérard Deriot, Gaston Flosse, Yves Fréville, René Garrec, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Jean-François Humbert, Pierre Jarlier, Lucien Lanier, Edmond Lauret, François Marc, Bernard Murat, Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich.

Voir le numéro :

Sénat : 473 (1999-2000), 31 et 32 (2000-2001).

Union européenne .

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le mercredi 18 octobre 2000 sous la présidence de M. Jacques Larché, président, la commission des Lois a examiné, sur le rapport de M. Daniel Hoeffel, le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire.

M. Daniel Hoeffel, rapporteur, a tout d'abord constaté que la France faisait partie des Etats connaissant le plus grand retard dans la mise en oeuvre des directives communautaires et qu'elle figurait même au premier rang des pays à l'encontre desquels étaient engagées des procédures contentieuses pour application défaillante du droit communautaire. Il a précisé que l'absence de transposition des directives créait une insécurité juridique, qu'elle exposait la France à des condamnations au paiement d'astreintes et qu'elle donnait une piètre image de notre pays au moment où celui-ci exerçait la présidence de l'Union européenne.

Le rapporteur a observé que cette situation était entièrement imputable aux gouvernements et qu'elle s'était aggravée au cours des dernières années. Il a indiqué que le projet de loi d'habilitation tendait à autoriser le Gouvernement à transposer par ordonnances une cinquantaine de directives, afin d'améliorer la situation de la France en matière d'application du droit communautaire.

Soulignant que l'exposé des motifs du projet de loi qualifiait de techniques les textes visés dans le projet de loi d'habilitation, M. Daniel Hoeffel a estimé que la réforme du financement des autoroutes, la refonte du code de la mutualité ou la directive " Natura 2000 " n'étaient pas simplement des mesures techniques. Il a fait valoir que la mise à l'écart du Parlement à propos de sujets aussi importants n'était pas le meilleur moyen de faire progresser l'adhésion à la construction européenne.

Le rapporteur a proposé que la commission autorise, à titre exceptionnel, le recours aux ordonnances, afin que la France puisse combler une partie de son retard dans l'application du droit communautaire. Il a toutefois indiqué qu'il reviendrait aux commissions saisies pour avis d'examiner la liste des textes relevant de leurs compétences et de limiter, le cas échéant, le champ de l'habilitation, afin d'éviter que le Parlement soit privé de tout droit de regard sur des textes particulièrement importants. Il a estimé indispensable que le Gouvernement apporte des informations précises sur le calendrier de transposition des directives ne figurant pas dans le projet de loi d'habilitation. Il a enfin souhaité que le Gouvernement s'engage à faire ratifier expressément l'ensemble des ordonnances avant la fin de la législature.

La commission a adopté trois amendements réduisant les délais donnés au Gouvernement pour prendre les ordonnances et déposer les projets de loi de ratification, ainsi que des amendements d'amélioration rédactionnelle.

Elle a adopté le projet de loi ainsi modifié.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Au moment où la France exerce la présidence de l'Union européenne, il apparaît que notre pays connaît un retard considérable dans l'application du droit communautaire. Il semble que 176 directives européennes soient en attente de transposition.

Une telle situation expose la France à des condamnations par la Cour de justice des Communautés européennes assorties d'astreintes. Surtout, un tel comportement ne paraît guère acceptable de la part d'un pays qui entend jouer un rôle moteur dans la construction européenne.

Le Sénat, première assemblée saisie, est invité à examiner un projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, un très grand nombre de directives communautaires. Le projet de loi tend également à permettre au Gouvernement de prendre par ordonnances d'autres mesures nécessaires à l'application du droit communautaire et de procéder à une refonte du code de la mutualité.

Votre Commission des Lois est saisie au fond du projet de loi tandis que la commission des Affaires culturelles, la commission des Affaires économiques, la commission des Affaires sociales et la commission des Finances en sont saisies pour avis.

Avant de présenter le projet de loi et la position de la commission sur l'habilitation demandée par le Gouvernement, votre rapporteur rappellera brièvement la situation de la France en matière de transposition de directives et les risques qui en découlent.

I. L'APPLICATION PAR LA FRANCE DU DROIT COMMUNAUTAIRE : UNE SITUATION INACCEPTABLE

La France fait partie des Etats membres de l'Union européenne connaissant les plus grands retards dans l'application du droit communautaire. Cette situation, qui s'est aggravée au cours des dernières années, est entièrement imputable au comportement des gouvernements successifs.

A. UN RAPPEL : LES RÈGLES APPLICABLES POUR L'INTÉGRATION EN DROIT NATIONAL DU DROIT COMMUNAUTAIRE

1. Les sources du droit communautaire

Pour l'essentiel, les règles de droit communautaire peuvent être réparties en deux catégories : le droit " originaire " ou " primaire " et le droit dérivé.

Le droit " originaire " comprend les règles qui se trouvent dans les traités institutifs et dans les instruments juridiques qui y sont annexés ou les ont modifiés.

Le droit dérivé comprend les actes des institutions communautaires destinés à mettre en oeuvre les règles de droit primaire. Deux catégories d'actes forment l'essentiel de ce droit dérivé : les règlements et les directives.

Selon l'article 249 du traité instituant la communauté européenne, le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout Etat membre.

Pour sa part, la directive lie tout Etat membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens.

Ainsi, contrairement aux règlements, les directives doivent, le plus souvent, donner lieu à des mesures de transposition dans le droit des Etats membres, sauf si ce droit respecte déjà l'ensemble des principes posés par une directive.

2. Les procédures applicables en cas de manquement à une obligation du droit communautaire

Afin d'assurer l'application effective du droit communautaire, le traité instituant la Communauté européenne prévoit une procédure permettant de sanctionner les Etats qui manquent à leurs obligations.

L'article 226 de ce traité prévoit ainsi que si la Commission européenne estime qu'un Etat membre a manqué à une des obligations qui lui incombent en vertu du traité, elle émet un avis motivé à ce sujet, après avoir mis cet Etat en mesure de présenter ses observations.

En pratique, avant d'adresser un avis motivé, la Commission adresse une lettre de mise en demeure demandant des explications à l'Etat membre concerné à propos des griefs formulés. L'avis motivé n'est adressé que si la Commission considère que le manquement persiste.

Si l'Etat concerné ne se conforme pas à l'avis motivé dans le délai déterminé par la Commission, celle-ci peut saisir la Cour de justice des Communautés européennes. La Cour peut alors constater dans un arrêt qu'un Etat a manqué à ses obligations.

L'article 228 du traité, introduit par le traité de Maastricht, permet de donner une efficacité à la procédure du recours en manquement. Il prévoit en effet que, lorsque la Cour de justice a reconnu qu'un Etat avait manqué à ses obligations, la Commission peut, si elle estime que l'Etat n'a pas exécuté l'arrêt de la Cour, saisir à nouveau celle-ci après avoir adressé à l'Etat intéressé un avis motivé précisant les points sur lesquels il ne s'est pas conformé à l'arrêt. L'Etat membre doit, avant que lui soit adressé l'avis motivé, être mis en mesure de présenter ses observations.

Lorsque la Cour est saisie sur le fondement de cet article, elle peut infliger à l'Etat qui a manqué à ses obligations le paiement d'une somme forfaitaire ou d'une astreinte.

B. UNE SITUATION PRÉOCCUPANTE

1. Des chiffres accablants

La France n'applique pas de manière satisfaisante le droit communautaire. Les statistiques régulièrement établies par la Commission européenne le démontrent sans ambiguïté. Ainsi, comme le montre le tableau suivant, la France ne se situe qu'en douzième position au sein de l'Union européenne pour ce qui concerne le taux de transposition des directives communautaires.

La transposition des directives dans les Etats membres
de l'Union européenne

Etats membres

Nombre de directives applicables au 31/12/1999

Nombre de directives dont
les MNE* ont été communiquées

Pourcentages de communication au 31/12/1999

Pourcentages de communication au 31/12/1998

1

Danemark

1.499

1.456

97,13

98,21

2

Espagne

1.502

1.449

96,47

97,39

3

Pays-Bas

1.505

1.447

96,15

96,64

4

Finlande

1.498

1.436

95,86

97,11

5

Suède

1.500

1.437

95,80

97,04

6

Allemagne

1.507

1.439

95,49

96,71

7

Royaume-Uni

1.504

1.435

95,41

96,36

8

Autriche

1.501

1.425

94,94

95,00

9

Belgique

1.505

1.428

94,88

94,72

10

Italie

1.504

1.416

94,15

93,62

11

Irlande

1.499

1.411

94,13

95,52

12

France

1.505

1.412

93,82

94,44

13

Portugal

1.507

1.407

93,36

94,80

14

Luxembourg

1.503

1.402

93,28

94,17

15

Grèce

1.503

1.383

92,02

93,82

Total ou moyenne CE

1.508

1.426

94,53

95,70

* Mesures nationales d'exécution

Le tableau démontre que la situation de la France en matière de transposition de directives a tendance à s'aggraver. Le pourcentage de communication des mesures d'exécution est de 93,82 % au 31 décembre 1999 alors qu'il était de 94,44 % au 31 décembre 1998.

Dans son rapport sur l'application du droit communautaire, la Commission européenne fait également un bilan des procédures en cours contre les Etats membres, afin qu'ils mettent fin aux manquements constatés dans l'application du droit communautaire.

A propos de ces procédures, la Commission européenne observe pudiquement que, en ce qui concerne le nombre de dossiers d'infractions en cours au 31 décembre 1999, respectivement au stade de la mise en demeure, de l'avis motivé et de la saisine de la Cour de justice, un Etat membre " apparaît (...) à distance considérable du deuxième. On notera d'ailleurs que ce même Etat membre est celui contre lequel le plus grand nombre de plaintes a été déposé en 1999 ".

L'Etat membre concerné est la France.

Les graphiques ci-dessous illustrent parfaitement la situation sans qu'il soit besoin de commentaires supplémentaires.

Notre pays, pilier de la construction européenne depuis les origines est donc, de loin, celui qui fait l'objet du plus grand nombre de procédures pour manquement à ses obligations d'application du droit communautaire.

2. Des conséquences graves

La situation actuelle de la France en matière d'application du droit communautaire est particulièrement préoccupante pour trois raisons au moins.

• En premier lieu, le retard dans l'application de certains textes est tel que la Commission européenne, après que la Cour de justice a rendu des arrêts constatant des manquements, a entamé des procédures qui pourraient conduire à la condamnation de la France à payer des astreintes très élevées.

Jusqu'à présent, la procédure de l'article 228 du traité instituant la Communauté européenne, qui permet la condamnation d'un Etat à payer des astreintes, n'impressionnait guère, dans la mesure où elle n'avait jamais été menée jusqu'à son terme.

En juillet dernier, la Cour de justice des Communautés européennes a condamné la Grèce au paiement de telles astreintes.

Or, la France pourrait, elle aussi, subir des condamnations semblables au cours des prochains mois. En effet, la France a été condamnée dans plusieurs affaires pour non transposition ou mauvaise transposition de directives, sans que les mesures nécessaires pour se conformer à ces arrêts aient été prises.

Pour six de ces affaires qui concernent des textes que le Gouvernement souhaite transposer par ordonnances, la Commission européenne a déjà entamé des procédures fondées sur l'article 228 du traité instituant la Communauté européenne. Si ces procédures étaient menées à leur terme, la France pourrait être condamnée au paiement de lourdes astreintes.

Cela concerne :

- plusieurs directives relatives aux médicaments vétérinaires ;

- la directive dite " habitats " ou " natura 2000 " ;

- une directive sur l'égalité de traitement entre hommes et femmes dans les régimes professionnels de sécurité sociale ;

- les deux directives de 1992 dites assurance-vie et assurance non-vie.

Ainsi, à brève échéance, le défaut de transposition de certaines directives pourrait placer la France en situation très difficile.

• En deuxième lieu, l'absence de transposition ou d'application de textes communautaires importants est source d'insécurité juridique. Rappelons en effet que les règlements communautaires sont directement applicables dans les Etats membres. Sous certaines conditions, les directives communautaires peuvent elles aussi avoir un effet direct et être invoquées par les particuliers.

La Cour de justice des Communautés européennes a en effet considéré que les directives suffisamment précises sont invocables par les particuliers (arrêts du 17 décembre 1970, Sté SACE et du 4 décembre1974, Van Duyn), une fois expiré le délai de mise en oeuvre (arrêt du 5 avril 1979, Ministère public c/ Ratti), en cas d'absence de mise en application ou en cas de mauvaise mise en application par un Etat membre .

La Cour de Justice a néanmoins précisé que cet effet direct se limite aux rapports des citoyens avec l'Etat (" effet vertical "). En l'absence de mesure nationale de transposition, une directive n'a pas d'effet (" effet horizontal ") entre citoyens (26 février 1986, Marshall et 12 mai 1987, Ministère public c/ Traen).

Le Conseil d'Etat a, pour sa part, considéré que les effets des directives en droit interne sont subordonnés à l'intervention de mesures nationales d'application et qu'en l'absence de telles mesures, la légalité d'une décision individuelle ne saurait s'apprécier au regard d'une directive (22 décembre 1978, Ministre de l'Intérieur c/ Cohn Bendit).

Inversement, les autorités de l'Etat ne peuvent se prévaloir des dispositions d'une directive qui n'ont pas fait l'objet d'une transposition dans le droit interne (23 juin 1995, SA Lilly France).

Le Conseil d'Etat a néanmoins veillé à affirmer l'autorité des normes communautaires. Il a ainsi considéré que si une directive ne peut, en l'absence de mesures de transposition, être invoquée à l'encontre de mesures individuelles, un acte réglementaire est entaché d'illégalité lorsqu'il méconnaît les orientations d'une directive (7 décembre 1984, Fédération française des sociétés de protection de la nature). En outre, il a estimé qu'une directive constitue une circonstance de droit nouvelle qui oblige à modifier les règlements antérieurs qui, légaux à l'origine, s'avèrent incompatibles avec les orientations qu'elle définit (3 février 1989, Cie Alitalia). Il a également précisé qu'une loi devait s'interpréter notamment à la lumière d'une directive (22 décembre 1989, Cercle militaire mixte de la caserne Mortier).

Dans la ligne de la jurisprudence Nicolo (décision d'Assemblée du 20 décembre 1989) - qui a renversé une jurisprudence traditionnelle (1 er mars 1968, Syndicat général des fabricants de semoule) en écartant les dispositions de la loi postérieure qui sont incompatibles avec un traité international - le Conseil d'Etat a fait prévaloir les règlements communautaires sur les lois antérieures incompatibles (29 septembre 1990, Boisdet). La même solution prévaut en cas de contrariété avec une directive et le vote d'une loi qui méconnaît les orientations d'une directive engage la responsabilité de l'Etat (28 février 1992, Stés Rothmans international et Philip Morris). Cette dernière solution est conforme aux principes affirmés par la Cour de justice (arrêt Francovich c/ Italie, 9 novembre 1991).

Il ressort de cette jurisprudence que si le juge administratif s'oppose toujours à l'invocabilité directe des directives, il reconnaît de plus en plus largement l'illégalité des actes administratifs trouvant leur fondement dans des mesures nationales incompatibles avec les objectifs définis par elles.

Dans le cadre d'un litige de plein contentieux en matière fiscale , il a été conduit a accordé à une société requérante une exonération fiscale prévue par la 6 è directive TVA du 17 mai 1977 mais pas par le droit interne (30 octobre 1996, S.A Revert et Badelon).

Dans ces conditions, l'absence de transposition de certaines directives est susceptible de créer des situations juridiques inextricables.

• En troisième lieu, la mauvaise application du droit communautaire ne peut que donner une image déplorable de notre pays, qui prétend être un moteur de la construction européenne sans en tirer les conclusions lorsqu'il s'agit d'appliquer les textes adoptés par les institutions communautaires. A cet égard, il est intéressant de constater que le Danemark, souvent réticent face aux progrès de l'intégration européenne, est en revanche l'Etat qui met en oeuvre le plus scrupuleusement les textes adoptés par les institutions de l'Union européenne.

3. Une situation totalement imputable au Gouvernement

La situation catastrophique de la France en matière d'application du droit communautaire incombe intégralement aux gouvernements successifs, qui n'ont pas fait du respect par la France de ses obligations communautaires une priorité.

A cet égard, la situation s'est aggravée au cours des dernières années. De plus en plus souvent, le Gouvernement attend que les délais de transposition des directives les plus importantes soient écoulés, que des procédures contentieuses soient engagées par la Commission européenne. Il demande alors au Parlement de se prononcer dans la plus grande précipitation sur des textes de grande portée. Tel fut le cas pour la transposition de la directive sur le marché intérieur de l'électricité. Le Gouvernement a même procédé à la transposition d'une partie de la directive sur les services postaux par amendement au projet de loi d'orientation sur l'aménagement du territoire. D'ores et déjà, cette situation est appelée à se reproduire prochainement puisque le délai de transposition de la directive sur le marché intérieur du gaz est déjà dépassé...

Parfois, l'absence de transposition peut être expliquée de manière très prosaïque. Ainsi, le quotidien Le Monde dressait le constat suivant dans un article publié en octobre 1999 : " La transposition d'un texte européen peut être, sur le plan français, un véritable enjeu de pouvoir. Une trentaine de directives sur l'alimentation des animaux n'ont ainsi pas été transcrites, car deux administrations s'en disputent la responsabilité. Il s'agit d'une part de la direction générale de l'alimentation, qui relève du ministère de l'agriculture, et d'autre part de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, qui relève du ministère de l'économie. Sachant que l'administration qui transpose un texte est celle qui le fera appliquer, chacune a rédigé un projet prévoyant que ses propres fonctionnaires procéderont aux contrôles nécessaires. Elles attendent depuis plusieurs années un arbitrage de Matignon " 1 ( * ) .

Dans l'exposé des motifs du projet de loi, le Gouvernement invoque comme seule raison de la nécessité de transposer par ordonnances de nombreuses directives " la charge de travail qui pèse sur le Parlement " alors que celle-ci dépend de l'ordre du jour prioritaire fixé par le Gouvernement.

En effet, le Parlement et notamment le Sénat, est prêt à examiner les projets de loi de transposition des directives communautaires. La transposition de directives techniques ne risque aucunement d'encombrer l'ordre du jour, dans la mesure où les assemblées parviennent rapidement à un accord. Ainsi, en 1998, l'Assemblée nationale a adopté définitivement un projet de loi de transposition d'une directive sur la protection juridique des bases de données après seulement une lecture dans chaque assemblée.

En 1998, le Sénat, conscient de l'importance du respect par la France de ses engagements communautaires, a même pris l'initiative d'inscrire, dans le cadre d'une journée d'initiative parlementaire , une proposition de loi de M. Jean-François Le Grand tendant à transposer la directive de 1992 dite " Natura 2000 ". Or, cette proposition de loi adoptée par le Sénat et qualifiée d'initiative prématurée par la ministre de l'environnement n'a jamais été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Le Gouvernement souhaite aujourd'hui transposer cette directive par ordonnance.

Ainsi, les gouvernements qui, en application de l'article 48 de la Constitution, imposent par priorité et dans l'ordre qu'ils fixent l'essentiel de l'ordre du jour du Parlement, portent l'entière responsabilité d'une situation qui s'est encore aggravée au cours des dernières années puisque la France, qui occupait le onzième rang au sein des Etats membres en matière de transposition à la fin de 1998 n'occupait plus que le douzième à la fin de 1999. La France est également l'Etat qui a fait l'objet du plus grand nombre de plaintes en 1999 pour manquement au droit communautaire.

La situation actuelle démontre à l'évidence qu'il existe des dysfonctionnements importants dans les procédures, notamment administratives, devant permettre à la France de respecter ses engagements communautaires. Votre commission se félicite que M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes, se soit déclaré prêt à conduire une réflexion, en lien avec le Parlement, sur ce sujet. Il est hautement souhaitable qu'une initiative en ce sens soit prise dans les plus brefs délais.

II. LE PROJET DE LOI D'HABILITATION : PERMETTRE LA TRANSPOSITION PAR ORDONNANCES D'UN GRAND NOMBRE DE DIRECTIVES

Face à la situation préoccupante de la France en matière d'application communautaire, le projet de loi tend à habiliter le Gouvernement à transposer, par ordonnances, de nombreuses directives communautaires et à mettre en oeuvre, également par ordonnances, certaines dispositions du droit communautaire.

Ainsi, l'article premier tend à habiliter le Gouvernement à transposer, par ordonnances, cinquante directives ou parties de directives concernant les domaines les plus divers : environnement, télécommunications, droit du travail, assurances, médicaments vétérinaires...

Plusieurs des directives concernées par cet article ont été adoptées par les institutions communautaires il y a dix ans ou plus.

L' article 2 tend à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures susceptibles de mettre fin à des situations d'incompatibilité directe entre le droit national et certains articles du traité instituant la Communauté européenne. Le Gouvernement pourrait également prendre par ordonnances des mesures destinées à assurer la mise en oeuvre en droit interne des dispositions de certains règlements communautaires.

L' article 3 prévoit que le Gouvernement, habilité par l'article premier du projet à transposer, par ordonnances, deux directives communautaires relatives aux assurances, pourra procéder à la refonte du code de la mutualité et à la modification du code des assurances, du code de la sécurité sociale, de la loi de 1978 relative à l'orientation de l'épargne vers le financement des entreprises et de la loi de 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques.

L' article 4 tend à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures législatives destinées à faciliter la mise en oeuvre des dispositions du droit communautaire relatives aux marchés publics de travaux . Il s'agit en particulier de supprimer la garantie de reprise de passif accordée par l'Etat aux sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes et de prolonger les durées actuelles des concessions.

Enfin, l' article 5 prévoit que certaines des ordonnances prévues par le projet de loi devront être prises dans les six mois suivant la promulgation de la loi tandis que d'autres devront être prises dans les dix mois suivant la publication de la loi . Cet article dispose également que des projets de lois de ratification des ordonnances devront être déposés devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de l'expiration des délais prévus pour l'adoption des ordonnances.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : ACCEPTER, À TITRE EXCEPTIONNEL, L'HABILITATION

Votre commission des Lois, saisie au fond du projet de loi, s'est attachée à formuler des remarques de principe et notamment à examiner si le projet de loi d'habilitation qui vous est soumis réunissait bien les conditions requises par l'article 38 de la Constitution. Elle a en revanche laissé le soin aux quatre commissions saisies pour avis d'analyser de manière approfondie la liste des textes relevant de leur domaine traditionnel de compétences dont le Gouvernement souhaite assurer la transposition par ordonnances et, le cas échéant, de réduire le champ de l'habilitation.

A. LE RISQUE D'UN RECOURS FRÉQUENT AUX ORDONNANCES

1. Le respect formel des dispositions de l'article 38 de la Constitution

En vertu du premier alinéa de l'article 38 de la Constitution, " le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ".

Tout en écartant tout rapprochement entre ces dispositions et celles du premier alinéa de l'article 49 de la Constitution, le Conseil constitutionnel a néanmoins considéré qu'elles devaient être entendues " comme faisant obligation au Gouvernement d'indiquer avec précision au Parlement, lors du dépôt d'un projet de loi d'habilitation et pour la justification de la demande présentée par lui, quelle est la finalité des mesures qu'il se propose de prendre " (décision DC n° 76-72 du 12 janvier 1977).

En l'espèce, la finalité de l'habilitation demandée est précisée par l'exposé des motifs du projet de loi qui, après avoir mentionné les procédures engagées contre la France devant la Cour de Justice, souligne que " la charge de travail qui pèse sur le Parlement rend difficile, voire impossible, l'adoption dans les mois qui viennent des mesures législatives nécessaires à la transposition de ces directives " faisant l'objet de procédures.

Le Conseil constitutionnel a considéré, à propos de l'habilitation relative à la codification (loi n° 99-1071 du 16 décembre 1999) que " l'urgence est au nombre des justifications que le Gouvernement peut invoquer pour recourir à l'article 38 de la Constitution " (décision n°99-421 DC du 16 décembre 1999).

La loi d'habilitation doit, par ailleurs, préciser les " domaines d'intervention " des mesures envisagées (Conseil constitutionnel, décisions n° 287-DC des 25-26 juin 1986 et 99-421 du 16 décembre 1999).

Le projet de loi respecte cette obligation en énonçant les textes communautaires dont la transposition en droit interne doit faire l'objet des ordonnances ainsi que les domaines concernés par des mesures qui vont au-delà de cette transposition.

Comme l'a rappelé la décision précitée du Conseil constitutionnel, relative à la loi d'habilitation portant sur la codification, " la loi d'habilitation ne saurait permettre l'intervention d'ordonnances dans des domaines réservés par les articles 46, 47, 47-1, 74 et 77 de la Constitution à la loi organique, aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale ".

Conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 38 de la Constitution, l'habilitation ne vaudra que " pour un délai limité ". Les ordonnances devront, en effet, être prises dans un délia courant entre six et dix mois selon le domaine concerné.

Conformément au dernier alinéa de l'article 38, passé ce délai, les ordonnances ne pourront plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif.

En outre, les ordonnances - qui devront être prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat - entreront en vigueur dès leur publication mais deviendront caduques si le projet de loi n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par le projet de loi, soit dans les trois mois à compter de l'expiration des délais d'habilitation.

2. Une banalisation périlleuse du recours aux ordonnances

Pour la cinquième fois depuis son entrée en fonctions et pour la quatrième fois en moins d'un an, le Gouvernement demande au Parlement de l'habiliter à prendre par ordonnances des mesures législatives.

• La loi n° 98-145 du 6 mars 1998 a habilité le Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer. Sur le fondement de cette habilitation, le Gouvernement a pris sept ordonnances. La loi de ratification de ces ordonnances a été promulguée le 28 décembre 1999.

• La loi n° 99-899 du 25 octobre 1999 a habilité le Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer . Sur le fondement de cette habilitation, le Gouvernement a pris dix-huit ordonnances. Il a déposé trois projets de loi portant ratification d'ordonnances sur le Bureau du Sénat en juillet 2000.

• La loi n° 99-1071 du 16 décembre 1999 a habilité le Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l'adoption de la partie législative de certains codes. Sur le fondement de cette habilitation, le Gouvernement a pris sept ordonnances relatives notamment au code rural, au code de la route, au code de la santé publique, au code de commerce. Deux ordonnances doivent encore être prises avant le 22 décembre 2000.

Le Gouvernement a d'ores et déjà déposé quatre projets de loi de ratification d'ordonnances sur le Bureau du Sénat. Cinq doivent encore être déposés avant le 28 février 2001.

• La loi n°2000-517 du 15 juin 2000 a habilité le Gouvernement à adapter par ordonnance la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs. Sur le fondement de cette loi, le Gouvernement a pris une ordonnance le 19 septembre 2000. Un projet de loi de ratification doit être déposé avant le 31 mars 2001.

Il convient de signaler que l'ensemble des projets de loi de ratification des ordonnances prises dans le cadre des deux lois d'habilitation adoptées en 1999 (soit huit projets de loi) ont été déposés sur le Bureau du Sénat. Or, l'inscription à l'ordre du jour de ces projets n'est pas prévue dans le programme de travail du Sénat envisagé par le Gouvernement d'ici février 2001.

Il existe un risque réel, si le recours aux ordonnances se banalise, que ces dernières ne soient jamais ratifiées. Il appartient en effet au Gouvernement de veiller à ce que chacun de ces projets de loi de ratification soit inscrit le plus rapidement possible à l'ordre du jour des assemblées. Le simple dépôt d'un projet de loi de ratification ne vaut pas ratification implicite, laquelle ne peut résulter que d'une modification ultérieure du contenu de l'ordonnance par une loi (Conseil d'Etat, 10 juillet1972, Cie Air Inter ; 11 juin 1990 Congrès du Territoire de la Nouvelle-Calédonie ; Conseil constitutionnel, 72-73 L du 29 février 1972, 224-DC du 23 janvier 1987).

En outre, une ratification implicite des ordonnances par des lois ultérieures pouvant être partielle , elle ne pourrait que susciter des difficultés d'interprétation de nature à créer la confusion.

En effet, tant qu'elles n'ont pas été ratifiées par une loi, les ordonnances relèvent du contentieux des actes réglementaires.

Enfin, une habilitation ne saurait aboutir au dessaisissement du Parlement , lequel doit au contraire, lors de l'examen du projet de loi de ratification, pouvoir se prononcer expressément sur le contenu des ordonnances.

Dans ces conditions, le dépôt du présent projet de loi d'habilitation ne peut qu'augmenter le risque que certaines ordonnances ne soient jamais ratifiées par le Parlement. Votre commission souhaite réaffirmer solennellement sa volonté de voir les ordonnances expressément ratifiées par le Parlement.

B. UNE ATTEINTE PARTICULIÈRE AUX DROITS DU PARLEMENT

A en croire le Gouvernement, le présent projet de loi constituerait presque un instrument de revalorisation du Parlement. Il fait en effet valoir dans l'exposé des motifs que le recours à la procédure des ordonnances " permettra (...) de délester la charge de travail du Parlement (...) afin que la représentation nationale puisse se consacrer pleinement aux projets de loi de transposition de directives présentant un véritable enjeu politique ".

Le communiqué publié à l'issue de la réunion du Conseil des ministres qui a adopté le présent projet de loi précise : " Concernant des textes pour l'essentiel techniques, ce projet de loi d'habilitation préserve les droits du Parlement en allégeant son programme de travail ". Votre commission estime que de telles assertions traduisent une singulière conception du rôle du Parlement.

L'habilitation demandée dans le présent projet de loi par le Gouvernement est en effet d'une nature tout à fait particulière, dans la mesure où elle concerne le droit communautaire sur l'élaboration duquel le Parlement n'exerce qu'un droit de regard limité.

1. Un rappel : le rôle limité du Parlement dans l'élaboration du droit communautaire

Il convient de rappeler que le droit communautaire est élaboré par des institutions au sein desquelles les Parlements nationaux ne sont pas représentés. Le Conseil de l'Union européenne est composé de représentants des Gouvernements des quinze Etats membres de l'Union européenne, cependant que les membres du Parlement sont élus au suffrage universel direct au sein des Etats membres. Ainsi, de nombreuses mesures communautaires relevant du domaine de la loi au sens de l'article 34 de la Constitution sont adoptées sans intervention directe de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Dans ces conditions, la transposition des directives communautaires est l'unique occasion pour le Parlement français de connaître des textes adoptés par les institutions européennes et de définir les moyens permettant la mise en oeuvre de ces textes.

Depuis la révision constitutionnelle de 1992 préalable à la ratification du traité de Maastricht et conformément au voeu du Sénat, le Gouvernement est tenu, conformément à l'article 88-4 de la Constitution, de soumettre à l'Assemblée nationale et au Sénat, les propositions d'actes communautaires comportant des dispositions de nature législative.

Le Sénat et l'Assemblée nationale peuvent faire connaître leur position par le vote de résolutions . Le champ d'application de cette disposition a été légèrement élargi à l'occasion de la révision constitutionnelle de 1999 préalable à la ratification du traité d'Amsterdam, de sorte que le Gouvernement soumet désormais aux assemblées les projets d'actes relevant du deuxième pilier (politique étrangère et de sécurité commune) et du troisième pilier (justice et affaires intérieures) de l'Union européenne, dès lors qu'ils comportent des dispositions de nature législative. Depuis l'insertion de l'article 88-4 dans la Constitution, le Sénat a adopté 69 résolutions. La délégation du Sénat pour l'Union européenne examine pour sa part l'ensemble des textes soumis au Sénat.

Ainsi, depuis quelques années, le Parlement tente d'exercer un droit de regard sur le droit communautaire au stade de son élaboration. Ce progrès ne justifie pas qu'il soit privé de la possibilité d'intervenir au stade de la transposition des directives.

2. Une situation préoccupante pour le Parlement

Votre commission comprend pleinement la nécessité de mettre fin au retard actuel de la France en matière d'application du droit communautaire. Elle peut cependant difficilement accepter la manière dont le projet de loi d'habilitation est présenté par le Gouvernement.

Dans l'exposé des motifs, le Gouvernement observe que " le recours à des ordonnances pour prendre des mesures de transposition de directives communautaires ne constitue pas une innovation puisque cette procédure a déjà été utilisée dans les années soixante ".

De fait, en 1964, le Gouvernement demanda au Parlement de l'habiliter à transposer par ordonnances plusieurs directives. L'exposé des motifs de ce projet de loi indiquait que " Le Parlement ayant déjà admis toutes les conséquences du traité instituant la Communauté économique européenne et notamment toutes les mesures de droit interne que la mise en oeuvre de ce traité nécessite, il ne paraît pas nécessaire qu'il étudie en détail chacune des mesures d'application ainsi prises ".

Il n'est pas certain qu'un tel rappel, portant sur une période pendant laquelle le Parlement n'avait pas encore pris la mesure des bouleversements entraînés par la signature du traité de Rome, soit le meilleur argument d'un gouvernement épris de modernité pour justifier un nouveau recours aux ordonnances.

Par ailleurs, l'exposé des motifs précise que l'habilitation demandée au Parlement " porte principalement sur des directives de nature essentiellement technique ". Pareil argument ne saurait être reçu.

Le bouleversement complet du système de l'adossement, qui permettait le financement des nouvelles autoroutes par le prolongement de la durée des concessions existantes n'est-il qu'une mesure technique ?

La refonte du code de la mutualité n'est-elle donc qu'une mesure technique ?

La définition des conditions de mise en oeuvre de la directive Natura 2000 n'a-t-elle donc aucune portée autre que technique ?

Sans doute, le Parlement peut-il s'estimer heureux dans la mesure où, selon l'exposé des motifs du projet de loi, est " écartée du champ de l'habilitation la possibilité de prendre par ordonnances des mesures de grande ampleur, dépourvues de tout lien avec les dispositions transposées et de pure opportunité politique ".

Il reste que la mise à l'écart du Parlement en matière de droit communautaire n'est sans doute pas le meilleur moyen de faire progresser l'adhésion à la construction européenne.

Les assemblées pourraient trouver un motif de consolation si elles avaient eu l'occasion d'examiner les textes concernés par l'habilitation dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution. En pratique, le retard est tel que la plus grande partie des textes mentionnés dans le projet de loi ont été adoptés avant l'entrée en vigueur de l'article 88-4.

C. ACCEPTER L'HABILITATION SOUS CERTAINES RÉSERVES

Votre commission regrette profondément que l'attitude des gouvernements français successifs à l'égard du droit communautaire ait en définitive pour effet de priver le Parlement de son pouvoir de transposition des directives européennes.

Pour autant, il paraît nécessaire de mettre fin rapidement au retard considérable de la France en matière de transposition de directives, au moment où celle-ci exerce la présidence de l'Union européenne. Votre commission a donc décidé d'accepter les dispositions du projet de loi, sous certaines réserves.

Tout d'abord, il reviendra aux commissions saisies pour avis du projet de loi de déterminer si certains textes mentionnés dans le projet de loi et relevant de leurs compétences traditionnelles ne méritent pas d'être écartés du champ de l'habilitation, compte tenu de leur importance particulière et pour respecter les critères que semble s'être fixé le Gouvernement lui-même.

Votre commission souhaite que le Gouvernement veille scrupuleusement à ne faire figurer dans les ordonnances que des dispositions de nature législative, afin d'éviter que certaines mesures de nature réglementaire ne puissent par la suite être modifiées que par la loi.

Par ailleurs, pour éviter le renouvellement de la situation actuelle, il serait utile que le Gouvernement présente un calendrier précis de transposition des directives communautaires qui ne figurent pas dans le présent projet de loi. Il semble en effet que la France doive procéder à la transposition de 176 directives , dont un grand nombre sont de nature législative. Le présent projet de loi ne permettra donc pas d'apurer définitivement la situation. Il serait souhaitable en particulier que le Gouvernement précise au Sénat quand il entend inscrire à l'ordre du jour des assemblées des projets de loi de transposition de :

- la directive sur le marché intérieur du gaz adoptée le 11 mai 1998 ;

- la directive sur la protection des données à caractère personnel, adoptée le 20 février 1995 ;

- la directive sur l'exercice de la profession d'avocat adoptée en décembre 1997.

Enfin, votre commission souhaite que les ordonnances soient prises dans les meilleurs délais et ratifiées expressément avant la fin de la législature. Elle considère que les délais prévus pour l'adoption des ordonnances et le dépôt des projets de loi de ratification sont excessifs.

Ainsi, le délai de dix mois prévu pour prendre certaines ordonnances ajouté au délai de trois mois prévu pour le dépôt des projets de loi de ratification permettrait au Gouvernement de ne déposer des projets de loi que treize mois après la promulgation de la loi d'habilitation. Un tel délai permettrait aux assemblées d'examiner dans des conditions normales les projets de loi de transposition des directives.

Votre commission vous propose donc, par des amendements , de ramener respectivement de six à quatre mois et de dix à huit mois les délais prévus pour que le Gouvernement prenne les ordonnances. Elle propose également de ramener de trois à deux mois le délai prévu pour le dépôt des projets de loi de ratification.

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Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations et sous réserve des amendements qu'elle vous soumet, votre commission des Lois vous propose d'adopter le présent projet de loi d'habilitation .

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier
Habilitation à transposer par voie d'ordonnances
cinquante directives ou parties de directives

L'article premier du projet de loi tend à autoriser le Gouvernement à prendre, par ordonnances, les dispositions législatives nécessaires à la transposition de cinquante directives ou parties de directives , ainsi que les mesures d'adaptation de la législation qui lui sont liées. Ces mesures d'adaptation sont celles qui ne sont pas directement imposées par les directives, mais que la transposition de celles-ci rend indispensable pour que le droit national demeure cohérent.

L'article comporte deux paragraphes, le premier contenant une liste de vingt-six directives, le second une liste de vingt-quatre directives. Cette séparation de la liste des directives à transposer en deux parties s'explique par le contenu de l'article 5 du projet de loi, qui prévoit que les ordonnances devront être prises :

- dans les six mois suivant la promulgation de la loi pour celles transposant les directives mentionnées au I de l'article 1 er ;

- dans les dix mois suivant la promulgation de la loi pour celles transposant les directives mentionnées au II de l'article 1 er .

A. DES DIRECTIVES DONT LE GOUVERNEMENT SOUHAITE ASSURER LA TRANSPOSITION, PAR ORDONNANCES, DANS LES SIX MOIS SUIVANT LA PROMULGATION DE LA LOI

•  Le paragraphe I comporte une liste de vingt-six directives comportant des sujets très variés, que le Gouvernement serait autorisé à transposer par ordonnances.

1. Les médicaments vétérinaires

Les alinéas 1°, 2°, 5°, 8°, 13° et 16° du paragraphe I mentionnent six directives concernant les médicaments vétérinaires.

- La directive 81/851/CEE du Conseil du 28 septembre 1981 concerne le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux médicaments vétérinaires . Cette directive définit notamment les conditions de mise sur le marché des médicaments vétérinaires fabriqués industriellement. Elle prévoit les conditions d'obtention ou de refus d'une autorisation de mise sur le marché.

- La directive 81/852/CEE du Conseil du 28 septembre 1981 est relative au rapprochement des législations des Etats membres concernant les normes et protocoles analytiques , toxico-pharmacologiques et cliniques en matière d'essais de médicaments vétérinaires. Cette directive prévoit notamment qu'une autorisation de mise sur le marché peut être délivrée, sous certaines conditions, à un demandeur, bien que ce dernier ne soit pas en mesure de fournir tous les renseignements nécessaires à la bonne réalisation des essais cliniques.

- La directive 90/676/CEE du Conseil du 13 décembre 1990 a modifié la directive 81/851/CEE. Elle définit les autorisations temporaires d'utilisation . Ces autorisations peuvent être délivrées, lorsque la situation sanitaire l'exige, pour l'utilisation de certains médicaments ne bénéficiant pas de l'autorisation de mise sur le marché.

- La directive 93/40/CEE du Conseil du 14 juin 1993 a modifié les directives 81/851/CEE et 81/852/CEE. Elle comprend des dispositions relatives à l'autorisation de mise sur le marché , sa durée de validité et ses conditions de refus.

- La directive 90/167/CEE du Conseil du 26 mars 1990 établit les conditions de préparation, de mise sur le marché et d'utilisation des aliments médicamenteux pour animaux dans la Communauté. Cette directive prévoit que, pour la fabrication d'aliments médicamenteux, seuls peuvent être utilisés des prémélanges médicamenteux ayant obtenu une autorisation de mise sur le chargé ou une autorisation temporaire d'utilisation. Elle comprend en outre des dispositions visant à encadrer les règles de fabrication, d'importation, d'exportation, de prescription, de délivrance et d'utilisation de ces aliments médicamenteux.

- Enfin, la directive 92/74/CEE du Conseil du 22 septembre 1992 élargit le champ d'application de la directive 81/851/CEE et fixe les dispositions complémentaires pour les médicaments homéopathiques vétérinaires .

Le 10 mai dernier, le Gouvernement a déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale un projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine social. Ce projet de loi avait notamment pour objet d'achever la transposition de cinq directives relatives aux médicaments vétérinaires. Le Gouvernement a finalement renoncé à inscrire ce projet de loi à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

Les mesures nécessaires pour achever la transposition des directives concernent en particulier les autorisations de mise sur le marché et les autorisations temporaires d'utilisation. Des dispositions sont également indispensables en matière d'enregistrement du médicament vétérinaire homéopathique.

L' état du contentieux concernant ces directives est actuellement le suivant :

- la France a été condamnée en manquement par la Cour de justice des Communautés européennes le 12 février 1998 pour mauvaise transposition de la directive 92/74/CEE qui élargit le champ d'application de la directive de 1981 et fixe des dispositions complémentaires pour les médicaments homéopathiques vétérinaires ; en juillet 1999, la Commission européenne a adressé au Gouvernement français un avis motivé qui pourrait être suivi d'une saisine de la Cour de justice, afin que celle-ci prononce une astreinte ;

- la France a été condamnée en manquement par la Cour de justice des Communautés le 15 octobre 1988 à propos de la transposition incomplète des directives 81/851/CEE, 81/852/CEE et 93/40/CEE. La Commission européenne a adressé un avis motivé au Gouvernement sur le fondement de l'article 228 du traité instituant la Communauté européenne le 28 février 2000.

2. La protection des travailleurs

Plusieurs directives mentionnées aux 4°, 7°, 14°, 17°, 18° et 21° du paragraphe I concernent la protection des travailleurs.

- La directive 89/391/CEE du Conseil du 12 juin 1989 concerne la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail . Cette directive constitue le socle d'une douzaine de directives plus techniques. Elle énonce en particulier les règles générales qui doivent guider l'action de l'employeur en matière de santé et de sécurité (évaluation a priori des risques, information et consultation des travailleurs sur l'introduction de nouvelles technologies, formation appropriée des travailleurs...).

- La directive 92/85/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 porte sur l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail. Il s'agit de l'une des directives complétant la directive de 1989 sur l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs.

La Commission européenne a adressé au Gouvernement français un avis motivé pour non transposition de cette directive.

- La directive 94/33/CEE du Conseil du 22 juin 1994 concerne la protection des jeunes au travail. Cette directive s'applique aux jeunes travailleurs ainsi qu'aux jeunes effectuant des formations ou des stages en entreprise ainsi qu'aux enfants effectuant des travaux légers pendant les vacances scolaires. Cette directive tend notamment à interdire le travail de nuit pour les enfants de moins de seize ans, à allonger la période minimale de repos quotidien, à prévoir une pause de trente minutes au-delà de toute période de quatre heures et demi de travail quotidien...

Trois directives concernent la protection des travailleurs contre les rayons ionisants :

- La directive 90/641/ Euratom du Conseil du 4 décembre 1990 est relative à la protection opérationnelle des travailleurs extérieurs exposés à un risque de rayonnements ionisants au cours de leur intervention en zone contrôlée.

- La directive 96/29/Euratom du Conseil du 13 mai 1996 fixe les normes de base relatives à la protection sanitaire de la population et des travailleurs contre les dangers résultant des rayonnements ionisants. Cette directive introduit trois principes de base en matière de radioprotection : les principes de justification (évaluation du bénéfice par rapport au risque), d'optimisation et de limitation des doses d'exposition des personnes.

- La directive 97/43/Euratom du Conseil du 30 juin 1997 concerne la protection sanitaire des personnes contre les dangers des rayonnements ionisants lors d'expositions à des fins médicales. Cette directive introduit le principe de justification (évaluation du bénéfice par rapport au risque) et le principe d'optimisation des doses reçues pour tout examen ou pratique faisant appel aux rayonnements ionisants à des fins médicales.

*

Initialement, les directives relatives à la protection contre les rayons ionisants devaient être transposées par le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine social, que le Gouvernement a renoncé à inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Les mesures de transposition nécessaires impliquent en particulier l'inscription dans le code de la santé publique des principes généraux de radioprotection définis par les directives. La transposition de la directive relative à la protection des personnes exposées à des fins médicales implique par ailleurs de prévoir une obligation de formation des professionnels. D'après l'exposé des motifs du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire en matière sociale, les nouvelles règles du code de la santé publique en matière de radioprotection devraient être assorties de sanctions pénales.

L'insuffisante transposition par la France des directives relatives à la protection contre les rayons ionisants n'a pas, à ce stade, donné lieu à une saisine de la Cour de justice des Communautés européennes. Néanmoins, dans une lettre du 28 juillet 2000, la Commission européenne a reproché au Gouvernement français une mauvaise transposition de la directive 96/29/Euratom du 13 mai 1996.

3. La reconnaissance des diplômes

Deux directives concernent la reconnaissance des diplômes et des formations professionnelles.

- La directive 89/48/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 , mentionnée au 3° du paragraphe I, est relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans. Cette directive oblige les Etats membres de l'Union européenne à prendre en considération les qualifications acquises dans un autre Etat membre et à apprécier si elles correspondent à celles qu'ils exigent. Elle impose aussi aux Etats de reconnaître une valeur aux diplômes délivrés ou à l'expérience professionnelle acquise dans un autre Etat. Les Etats demeurent libres d'imposer un stage d'adaptation ou une épreuve d'aptitude.

- La directive 92/51/CEE du Conseil du 18 juin 1992 , mentionnée au 12° du paragraphe I, met en place un deuxième système de reconnaissance des formations professionnelles . Elle complète la directive 89/48 en étendant son dispositif aux enseignements supérieurs d'une durée inférieure à trois ans.

En juillet dernier, la Commission européenne a introduit un recours en manquement auprès de la Cour de justice des Communautés européennes pour non transposition de la directive 89/48/CEE en ce qui concerne les psychologues. De fait, la directive a été transposée en France pour tous les diplômes, à l'exception de ceux de psychologues.

4. L'environnement

Plusieurs des directives que le Gouvernement souhaite transposer par ordonnances, mentionnées aux 6°, 9°, 10°, 19° et 23° du paragraphe I concernent l'environnement et sont d'une importance très inégale. Comme en matière sociale, le Gouvernement a d'abord envisagé de déposer un projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'environnement avant de décider de recourir à la procédure des ordonnances.

- La directive 90/313/CEE du Conseil du 7 juin 1990 porte sur la liberté d'accès à l'information en matière d'environnement. Cette directive vise à garantir pour tout citoyen le droit d' accès à " l'information en matière d'environnement détenue par les autorités publiques ". Elle fixe les conditions dans lesquelles cette information doit être rendue accessible.

En pratique, la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public satisfait la plupart des obligations prises par la directive. Toutefois, la directive vise à assurer l'accès à " l'information en matière d'environnement ", tandis que la loi française se fonde sur la notion de " documents administratifs ". La Commission européenne considère que cette notion est plus restrictive que celle d'information relative à l'environnement, dans la mesure où l'information en matière d'environnement peut être détenue par l'administration, sans prendre nécessairement la forme d'un document administratif. Le Gouvernement souhaite donc notamment introduire la définition communautaire de l'information en matière d'environnement dans le dispositif juridique français. Cette information pourrait être communiquée de plein droit sans que le demandeur soit obligé de faire valoir un intérêt.

Trois directives concernent certaines substances dangereuses.

- La directive 92/32/CEE du Conseil du 30 avril 1992 modifie une directive de 1967 concernant le rapprochement de dispositions relatives à la classification, l'emballage et l' étiquetage des substances dangereuses. Cette directive a introduit une obligation d'évaluer les risques des substances nouvelles et non plus seulement les propriétés dangereuses. Toutes les substances doivent en outre être classées et étiquetées en tenant compte de leur danger pour l'environnement.

- La directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 février 1998 concerne la mise sur le marché des produits biocides , c'est-à-dire les substances actives qui sont destinées à détruire, repousser ou rendre inoffensifs les organismes nuisibles, à en prévenir l'action ou à les combattre par une action classique ou biologique. Il s'agit notamment de désinfectants et de produits antiparasitaires. La directive pose le principe de l'autorisation préalable de mise sur le marché d'un produit biocide.

- La directive 96/82/CEE du Conseil du 9 décembre 1996 est relative à la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses. Cette directive modifie et complète une directive de 1982, qui a établi une procédure par laquelle les opérateurs d'une installation industrielle, les autorités nationale et locales coopèrent afin d'identifier et de contrôler les risques d'accidents majeurs dans les installations industrielles. La directive prévoit notamment que le public doit être consulté lors de l'élaboration du plan particulier d'intervention.

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L'état du contentieux relatif à la transposition de ces directives est le suivant :

- la Commission européenne a adressé un avis motivé au Gouvernement français pour non transposition de la directive 96/82/CE du Conseil ;

- la Commission a en outre adressé une mise en demeure au Gouvernement français pour non transposition de la directive 98/8/CE du 16 février 1998.

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Un dernier texte mentionné dans le projet de loi est relatif à l'environnement et présente une portée très supérieure aux précédents.

- La directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concerne la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages. Cette directive prévoit la création d'un réseau écologique cohérent d'espaces dénommé " Natura 2000 ". Le réseau Natura 2000 comprend :

- des zones spéciales de conservation (Z.S.C.) pour la conservation des types d'habitats naturels et des habitats d'espèces dont la liste figure en annexe de la directive ;

- des zones de protection spéciale (Z.P.S.) pour la conservation des habitats des espèces d'oiseaux figurant en annexe d'une directive de 1979, dite directive " Oiseaux ".

La directive prévoit une responsabilité partagée des Etats membres et de la Commission européenne pour la désignation des zones spéciales de conservation : chaque Etat doit d'abord envoyer à la Commission européenne des propositions nationales de sites susceptibles de figurer dans le réseau Natura 2000 comme sites d'importance communautaire ; la Commission européenne doit ensuite mettre en cohérence les propositions nationales et établir une liste de sites d'intérêt communautaires.

Une transposition de l'article 6 de la directive apparaît nécessaire. Cet article instaure notamment un régime d'évaluation et d'autorisation des plans ou projets susceptibles d'affecter significativement un site du réseau Natura 2000. Il incite les autorités des Etats membres à n'autoriser un plan ou projet que si, au regard de l'évaluation de ses incidences, il ne porte pas atteinte à l'intégrité du site considéré. Sous certaines conditions cependant, un plan ou projet pourrait être autorisé en dépit des conclusions négatives de l'évaluation des incidences sur le site.

Selon les informations fournies par le Gouvernement, le droit français ne permet pas de répondre complètement aux exigences de l'article 6 de la directive. La loi de 1976 relative à la protection de l'environnement ne prévoit pas en effet l'obligation de refuser une demande d'autorisation au vu des conclusions négatives d'une évaluation des incidences d'un projet sur l'environnement.

Le 6 avril 2000, la France a été condamnée en manquement par la Cour de justice des Communautés européennes pour transposition incomplète de la directive Habitats. En juillet dernier, la Commission européenne a adressé au Gouvernement français une mise en demeure pour non exécution de l'arrêt de la Cour. Cette mise en demeure pourrait être suivie d'une nouvelle saisine de la Cour. Celle-ci pourrait alors prononcer une astreinte à l'encontre de la France.

Il est tout à fait paradoxal que cette directive figure dans la liste de celles dont le Gouvernement entend assurer la transposition par ordonnances. En effet, le sujet concerné intéresse au premier chef les collectivités territoriales et la pleine association du Parlement à la transposition de la directive paraît particulièrement nécessaire.

Surtout, en juin 1998, à l'initiative de M. Jean-François Le Grand, le Sénat, conscient de l'importance de ce texte, a inscrit à son ordre du jour réservé une proposition de loi destinée à transposer la directive. Cette proposition de loi, adoptée par le Sénat il y a plus de deux ans, n'a jamais été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Lors du débat devant le Sénat, Mme Dominique Voynet, ministre de l'environnement, qualifiait la proposition de loi sénatoriale de " texte prématuré ".

Le Gouvernement explique désormais que la situation est telle qu'il n'est plus possible de soumettre au Parlement un projet de loi de transposition de la directive Habitats. Une telle évolution apparaît difficilement compréhensible.

5. Les assurances

Deux des directives à transposer, mentionnées aux 11° et 15°du paragraphe I, concernent le secteur des assurances.

- La directive 92/49/CEE du Conseil du 18 juin 1992 porte coordination des dispositions concernant l' assurance directe autre que l'assurance sur la vie .

- La directive 92/96/CEE du Conseil du 10 novembre 1992 porte coordination des dispositions concernant l' assurance directe sur la vie .

Ces directives ont modifié des directives de 1973, 1979, 1988 et 1990. Elles imposent en particulier aux entreprises d'assurance communautaires de gérer dans une personne morale distincte les activités qui ne découlent pas directement de leurs opérations d'assurances. Ces directives prévoient en outre l'harmonisation des règles prudentielles applicables à l'ensemble des entreprises d'assurance de l'Espace économique européen. Par ailleurs, elles définissent les conditions de délivrance d'un agrément unique par l'Etat membre sur le territoire duquel est situé le siège social de l'entreprise d'assurance communautaire en vue d'intervenir en liberté d'établissement et en libre prestation de services dans l'Espace économique européen.

*

La France a été condamnée en manquement par la Cour de justice des Communautés européennes le 16 décembre 1998 pour non transposition de ces deux directives. La Commission européenne a entamé en avril dernier une procédure afin d'obtenir la condamnation de la France au paiement d'une astreinte.

Il convient de souligner que l'article 3 du projet de loi tend à autoriser le Gouvernement à procéder par ordonnances à la refonte du code de la mutualité à l'occasion de la transposition des directives relatives aux assurances.

6. L'égalité entre hommes et femmes

Une directive mentionnée au 20° du paragraphe I de l'article 1 er concerne l'égalité entre hommes et femmes.

- La directive 96/97/CE du Conseil du 20 décembre 1996 modifie une directive de 1986 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes dans les régimes professionnels de sécurité sociale. Cette directive prend en compte un arrêt de 1990 dit " arrêt Barber ", qui a invalidé des dérogations au principe d'égalité permises par la directive de 1986 en ce qui concerne la fixation de l'âge de la retraite et les conditions d'attribution des pensions de réversion.

La France a été condamnée en manquement par la Cour de justice des Communautés européennes en juillet 1999 pour non transposition de la directive 96/97/CE. Une lettre de mise en demeure a été adressée au Gouvernement français afin qu'il mette fin au manquement constaté par la Cour de justice.

7. Le comité d'entreprise européen

Une directive, mentionnée au 22° du paragraphe I, concerne le comité d'entreprise européen.

- La directive 97/74/CE du Conseil du 15 décembre 1997 étend au Royaume Uni une directive de 1994 concernant l'institution d'un comité d'entreprise européen ou d'une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d'entreprises de dimension communautaire en vue d'informer et de consulter les travailleurs. La directive de 1994 permettait la conclusion d' accords d'anticipation entre représentants de travailleurs et d'employeurs pour la mise en place de comités d'entreprise dans des entreprises de dimension communautaire. La directive de 1997 permet aux entreprises de dimension communautaire ayant une implantation sur le territoire britannique de conclure des accords d'anticipation.

8. Le diagnostic in vitro

- La directive 98/79/CE du Parlement et du Conseil du 27 octobre 1998 , mentionnée au 25° du paragraphe I, est relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro. Cette directive prévoit la nécessité pour les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro de satisfaire à des exigences essentielles concernant notamment la santé et la sécurité des patients, des utilisateurs et des tiers.

La Commission européenne a adressé une mise en demeure au Gouvernement français en juillet 2000 pour non transposition de cette directive.

9. La sécurité sociale

- La directive 98/49/CE du Conseil du 29 juin 1998 , mentionnée au 24° du paragraphe I, est relative à la sauvegarde des droits à pension complémentaire des travailleurs salariés et non salariés qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté. Cette directive a pour objet d'éliminer les entraves à la libre circulation des travailleurs et réaliser le marché unique dans le domaine des retraites complémentaires . Elle fixe, pour les travailleurs salariés et non salariés qui se déplacent dans la Communauté européenne et l'Espace économique européen, des règles minimales de protection des droits à pension complémentaire. Elle prévoit notamment un principe général d'exportation des prestations.

10. Les transports

- La directive 99/62/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 1999 , mentionnée au 26° du paragraphe I, est relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures. Cette directive a pour objectif l'harmonisation des systèmes de tarification pesant sur les transporteurs pour couvrir les coûts d'infrastructure. Elle ne concerne que les poids lourds et établit d'une part des plafonds pour les droits d'usage, d'autre part un mode de calcul pour les péages.

B. DES DIRECTIVES QUE LE GOUVERNEMENT SOUHAITE TRANSPOSER PAR ORDONNANCES DANS LES DIX MOIS SUIVANT LA PROMULGATION DE LA LOI

Le paragraphe II de l'article comporte une liste de vingt-quatre directives que le Gouvernement souhaite transposer par ordonnances dans un délai de dix mois suivant la promulgation de la loi d'habilitation. Comme celles mentionnées au paragraphe I, ces directives concernent des domaines très divers.

1. Les télécommunications

Les directives mentionnées aux 3°, 8°, 10°, 11°, 12°, 14°, 16°, 23° et 24° du paragraphe II concernent le secteur des télécommunications.

- La directive 90/388/CEE de la Commission européenne du 28 juin 1990 est relative à la concurrence dans les marchés des services de télécommunications . Cette directive a déjà été transposée en 1996 et ne figure dans le projet de loi, selon le Gouvernement, qu'à titre de précaution, dans la mesure où plusieurs des directives relatives aux télécommunications dont la transposition par ordonnances est souhaitée par le Gouvernement sont des modifications de celle-ci.

- La directive 96/19/CE de la Commission du 13 mars 1996 modifie la directive 90/388 en ce qui concerne la réalisation de la pleine concurrence sur le marché des télécommunications. La France a transposé cette directive, mais il lui est reproché une mauvaise transposition en ce qui concerne l'étendue du service universel.

- La directive 97/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 avril 1997 définit un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunications. La transposition de cette directive par la France est pour l'instant incomplète. Le Gouvernement estime qu'il est nécessaire d'incorporer au droit national le principe selon lequel les taxes liées aux autorisations sont destinées uniquement à couvrir les frais administratifs afférents à la délivrance, à la gestion et au contrôle des autorisations.

- La directive 97/33/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 1977 est relative à l' interconnexion dans le secteur des télécommunications en vue d'assurer un service universel et l'interopérabilité par l'application des principes de fourniture d'un réseau ouvert (ONP). La loi française du 26 juillet 1996 ne semble pas pleinement conforme à la directive. Il paraît en particulier nécessaire d'intégrer en droit français le principe selon lequel l'évaluation du coût des obligations de service universel prend en compte les " avantage immatériels " liés à la fourniture de ce service.

- La directive 97/51/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 1997 modifie deux directives de 1990 et 1992 en vue de les adapter à un environnement concurrentiel dans le secteur des télécommunications. Les obligations prévues par cette directive, en particulier la transparence des offres et l' orientation des tarifs vers les coûts , sont déjà transposées en droit français mais ne s'appliquent qu'à France Telecom. Il paraît nécessaire de prévoir un mécanisme permettant d'imposer, le cas échéant, ces obligations à d'autres opérateurs puissants sur le marché.

- La directive 97/66 du Parlement européen et du conseil du 15 décembre 1997 concerne le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications. La plupart des dispositions nécessaires à la transposition de cette directive sont de nature réglementaire. Toutefois, l'article 12 implique une transposition législative. Il prévoit que les appels affectés à des fins de prospection directe au moyen d'automates d'appel ou de télécopieurs ne peuvent être autorisés que s'ils concernent des abonnés qui ont donné leur accord pour recevoir ce type d'appels.

- La directive 98/10/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 1998 concerne l'application de la fourniture d'un réseau ouvert (ONP) à la téléphonie vocale et l'établissement d'un service universel des télécommunications dans un environnement concurrentiel. Pour assurer la transposition complète de cette directive, des mesures législatives paraissent nécessaires notamment en ce qui concerne les annuaires et le pouvoir pour l'autorité réglementaire nationale d'imposer à un opérateur de modifier ses conditions contractuelles types lorsqu'elles ne sont pas conformes à la réglementation.

- La directive 99/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 1999 concerne les équipements hertziens et les équipements terminaux de télécommunications et la reconnaissance mutuelle de leur conformité. Cette directive prévoit en particulier le remplacement de l'attestation de conformité des équipements hertziens et des équipements terminaux de télécommunications délivrée par l'administration par une auto-certification par les fabricants d'équipements.

- La directive 99/64/CE de la Commission européenne du 23 juin 1999 modifie la directive 90/388/CEE en vue de garantir que les réseaux de télécommunications et les réseaux câblés de télévision appartenant à un seul et même opérateur constituent des entités juridiques distinctes. En pratique, les obligations posées par la directive sont respectées en France, mais ne figurent pas explicitement dans un texte de droit interne.

*

Dans un premier temps, le Gouvernement a envisagé de déposer un projet de loi portant diverses dispositions d'harmonisation communautaire dans le secteur des télécommunications. Un avant-projet a été soumis à l'autorité de régulation des télécommunications, à la commission nationale de l'informatique et des libertés ainsi qu'à la commission supérieure du service public des postes et télécommunications.

L'état des contentieux concernant les directives relatives au secteur des télécommunications est actuellement le suivant :

- la Cour de justice des Communautés européennes a été saisie par la Commission européenne pour mauvaise transposition par la France des directives 90/388/CEE, 96/19/CE et 97/33/CE ; la Cour est également saisie d'une requête concernant le défaut de transposition de la directive 97/66/CE sur le traitement des données à caractère personnel dans le secteur des télécommunications ;

- la Commission européenne pourrait saisir très prochainement la Cour de justice, afin de faire constater l'absence de transposition par la France des directives 97/13/CE, 97/51/CE et 98/10/CE.

2. Les services postaux

- La directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 , mentionnée au 15° du paragraphe II, concerne des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service. L'essentiel de cette directive très importante a été transposé par voie d'amendement dans le cadre de la loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire. Le Sénat a vigoureusement protesté contre une telle manière de procéder. Certaines dispositions législatives complémentaires semblent nécessaires, notamment en ce qui concerne les procédures d'autorisation pour les nouveaux entrants.

Une telle manière d'envisager la transposition d'une directive essentielle pour l'avenir du service public postal ne peut que laisser perplexe. Cette directive aurait dû faire l'objet d'un projet de loi de transposition autonome, afin que la représentation nationale puisse l'appréhender globalement et non de manière parcellaire. Le Sénat a démontré dès l'origine son intérêt profond pour cette question en adoptant une résolution sur la proposition de directive devenue la directive 97/67/CE. Par ailleurs, le groupe sénatorial d'étude sur La Poste a consacré d'importants travaux à l'avenir de la Poste 2 ( * ) et aux évolutions rendues nécessaires par le droit communautaire.

Il convient enfin de signaler que, d'ores et déjà, une procédure de révision de la directive a été entamée par les institutions communautaires.

3. La protection des consommateurs

Quatre directives, mentionnées aux 6°, 9°, 13° et 18° du paragraphe II, concernent la protection des consommateurs.

- La directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concerne les clauses abusives dans les contrats avec les consommateurs. Un complément de transposition de cette directive apparaît nécessaire au sein du code de la consommation. Il s'agit d'apporter des précisions sur la rédaction des clauses essentielles du contrat.

- La directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concerne la protection des consommateurs en matière de contrats à distance . Cette directive implique des modifications du code de la consommation, notamment pour apporter des précisions sur la protection des consommateurs (contenu des informations préalables à fournir, délai de rétractation, délai d'exécution, prohibition de la fourniture sans commande préalable, protection du consommateur en cas d'utilisation frauduleuse de carte bancaire...).

- La directive 97/55/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 1997 modifie une directive de 1984 sur la publicité trompeuse afin d'y inclure la publicité comparative. D'après les informations transmises par le Gouvernement, une modification du code de la consommation paraît indispensable pour modifier le dispositif relatif à la publicité comparative, afin d'autoriser et d'encadrer des citations implicites d'un concurrent ou d'un bien ou d'un service offert par un concurrent.

- La directive 98/27/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 porte sur les actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs . Le délai de transposition de cette directive expirera le 19 novembre 2000. Une modification du code de la consommation est nécessaire pour prévoir la reconnaissance du droit d'exercer en justice pour les entités de défense des intérêts des consommateurs inscrites sur une liste publiée au Journal officiel des Communautés européennes.

4. La propriété intellectuelle

Deux directives, mentionnées aux 1° et 19° du paragraphe II, concernent la propriété intellectuelle.

- La directive 89/104/CEE du Conseil du 21 décembre 1989 rapproche les législations des Etats membres sur les marques . Des précisions doivent être apportées au sein du code de la propriété intellectuelle sur les conditions dans lesquelles l'apposition d'une marque peut constituer une contrefaçon. Selon le droit français actuel, la vente en dehors du territoire concédé constitue une contrefaçon de marque communautaire, alors que, selon la directive, seule l'apposition de la marque en dehors du territoire couvert par la licence constitue une contrefaçon.

- La directive 98/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 1998 concerne la protection juridique des dessins ou modèles . Certains principes posés par la directive devront être inscrits dans le code de la propriété intellectuelle, en particulier le principe selon lequel la protection du droit sur le dessin ou modèle résulte de l'enregistrement et non de la création. Des précisions doivent être apportées sur les motifs de la nullité d'un dessin ou modèle.

5. Les denrées alimentaires et l'alimentation animale

Quatre directives mentionnées au 2°, 7°, 21° et 22° du paragraphe II concernent les denrées alimentaires.

- La directive 89/397/CEE du Conseil du 14 juin 1989 est relative au contrôle officiel des denrées alimentaires . D'après les informations transmises par le Gouvernement, des précisions doivent être apportées au sein du code de la consommation, notamment sur les conditions dans lesquelles les agents chargés du contrôle peuvent opérer des vérifications sur place.

- La directive 95/53/CE du Conseil du 25 octobre 1995 fixe les principes relatifs à l'organisation des contrôles officiels dans le domaine de l'alimentation animale.

- La directive 99/2/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 février 1999 concerne le rapprochement des législations des Etats membres sur les denrées et ingrédients alimentaires traités par ionisation . Il paraît nécessaire d'intégrer dans le code de la consommation la définition et les conditions de l'agrément préfectoral des produits destinés à l'alimentation humaine et animale.

- La directive 99/3/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 février 1999 établit une liste communautaire de denrées et ingrédients alimentaires traités par ionisation.

6. La fiscalité

- La directive 92/12/CEE du Conseil du 25 février 1992 , mentionnée au 4° du paragraphe II, est relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accises . Le livre des procédures fiscales devrait être modifié afin d'ouvrir, pour les administrations des douanes et des droits indirects, la possibilité de communiquer aux autorités compétentes des autres Etats membres les renseignements nécessaires à l'établissement des droits d'accises grevant l'alcool, les boissons alcoolisées et le tabac.

- La directive 92/83/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 , mentionnée au 5° du paragraphe II, concerne l'harmonisation des structures des droits d'accises sur l' alcool et les boissons alcooliques. Il semble nécessaire de modifier le code général des impôts pour définir les cas d'exonération des divers droits pour les petits producteurs et pour les opérateurs enregistrés réceptionnant de faibles quantités d'alcool en provenance d'autres Etats membres.

7. Les opérations sur titres

- La directive 98/26/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 concerne le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres. Des modifications de la loi de 1984 sur l'activité et le contrôle des établissements de crédit paraissent nécessaires pour assurer la pleine application de cette directive.

8. Les assurances

- La directive 98/78/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 1998 concerne la surveillance complémentaire des entreprises d'assurance faisant partie d'un groupe d'assurance. La transposition doit notamment permettre d'inscrire certaines définitions dans le code des assurances et de mettre en conformité avec la directive les compétences de la commission de contrôle des assurances.

*

* *

Les directives que le Gouvernement envisage de transposer par ordonnances concernent donc les matières les plus diverses et sont d'importance très inégale. Certaines d'entre elles ne revêtent manifestement pas un " caractère essentiellement technique ". La plupart des directives mentionnées dans cet article relèvent de la compétence des commissions saisies pour avis ; il leur reviendra donc d'apprécier si le champ de l'habilitation doit être réduit, afin que le Parlement puisse exercer l'ensemble de ses prérogatives sur les textes les plus importants.

Votre commission vous soumet un amendement de clarification rédactionnelle et vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 2
Habilitation à prendre par ordonnances les mesures requises pour permettre l'application de certaines dispositions de droit communautaire

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures législatives destinées, d'une part, à mettre fin à certaines incompatibilités entre le droit français et le traité instituant la Communauté européenne, d'autre part, à permettre la mise en oeuvre de plusieurs règlements communautaires.

Comme le précédent, cet article comporte deux paragraphes :

- les textes mentionnés au paragraphe I donneraient lieu à des mesures législatives dans les six mois suivant la promulgation de la loi ;

- les textes mentionnés au paragraphe II donneraient lieu à des mesures législatives dans les dix mois suivant la promulgation de la loi.

II.

A. DES TEXTES DONT LA MISE EN OEUVRE SERAIT ASSURÉE PAR ORDONNANCES DANS LES SIX MOIS SUIVANT LA PROMULGATION DE LA LOI D'HABILITATION

Le paragraphe I de cet article mentionne six textes dont la bonne application par la France implique l'adoption de mesures législatives que le Gouvernement souhaite prendre par ordonnances dans les six mois suivant la promulgation de la loi d'habilitation.

- Les articles 43 et 49 du traité instituant la Communauté européenne semblent faire l'objet d'une application défaillante par la France en ce qui concerne la profession d'agent artistique . Une disposition législative paraît nécessaire pour permettre l'exercice en France de l'activité de placement d'artistes du spectacle aux agents artistiques ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne. La législation actuelle ne respecte pas le principe de libre circulation des travailleurs inscrit dans le traité instituant la Communauté européenne.

- Le règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 est relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté. La Cour de justice des Communautés européennes a considéré, dans deux arrêts du 15 février 2000, qu'eu égard au lien direct et suffisamment pertinent qu'entretiennent la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), il y avait lieu de leur faire application de la règle de l'unicité de la législation posée par le règlement communautaire de 1971. En conséquence, la CSG et la CRDS ne peuvent être prélevées sur les revenus d'activité des personnes qui, tout en résidant fiscalement en France, ne sont pas à la charge d'un régime français de sécurité sociale.

- le règlement (CEE) n° 2455/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concerne les exportations et importations de certains produits chimiques dangereux. Ce règlement prévoit notamment la notification de l'exportation hors Union européenne de substances dangereuses interdites ou strictement réglementées dans l'Union européenne. Le respect de ce règlement impose la mise en place de contrôles et de sanctions au niveau national.

- le règlement (CEE) n° 259/93 du Conseil du 1 er février 1993 concerne la surveillance et le contrôle des transferts de déchets à l'entrée et à la sortie de la Communauté européenne. Ce règlement remplace une directive de 1984, afin de rendre le système communautaire de surveillance et de contrôle des mouvements de déchets conforme aux exigences de la Convention de Bâle et de la quatrième convention entre les pays ACP (Afrique-Caraïbes-Pacifique) et la Communauté européenne. Il prévoit que les transferts de déchets ne répondant pas à certaines exigences constituent un trafic illégal, les Etats membres devant intenter toute action pour interdire et sanctionner ce trafic. Il est donc nécessaire d'édicter en droit national des sanctions appropriées.

- le règlement (CEE) n° 793/93 du Conseil du 23 mars 1993 concerne l'évaluation et le contrôle des risques présentés par les substances existantes . Ce règlement prévoit notamment l'évaluation des risques des substances dans un inventaire des substances présentes sur le marché communautaire avant le 18 septembre 1981. Tout producteur ou importateur d'une substance produite ou importée en grande quantité a dû transmettre à la Commission européenne des informations permettant d'établir des listes prioritaires. Selon les informations transmises par le Gouvernement, il est nécessaire de mettre en place des contrôles et sanctions au niveau national afin d'assurer le respect de ce règlement.

- le règlement (CE) n° 3093/94 du Conseil du 15 décembre 1994 est relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone . Ce règlement prévoit l'interdiction progressive de la production et de la mise sur le marché des substances qui appauvrissent la couche d'ozone. Là encore, les Etats membres doivent édicter les contrôles et sanctions requis pour faire respecter le règlement. Il convient de signaler que ce règlement vient d'être modifié par un règlement du 29 juin 2000 (reproduit au sein des annexes au présent rapport).

B. DES TEXTES DONT LA MISE EN OEUVRE SERAIT ASSURÉE PAR ORDONNANCES DANS LES DIX MOIS SUIVANT LA PROMULGATION DE LA LOI D'HABILITATION

Le paragraphe II de cet article mentionne cinq textes dont la bonne application par la France implique l'adoption de mesures législatives que le Gouvernement souhaite prendre par ordonnances dans les six mois suivant la promulgation de la loi d'habilitation.

- L'article 28 du traité instituant la Communauté européenne semble faire l'objet d'une application défaillante par la France en ce qui concerne les règles d'apposition des poinçons de garantie sur les ouvrages en métaux précieux. Les règles posées par le Code général des impôts ne paraissent pas conformes au principe de l'interdiction des restrictions quantitatives à l'importation et des mesures d'effet équivalent.

Un recours en manquement a été introduit par la Commission européenne auprès de la Cour de justice en juin dernier.

- Les articles 43 et 49 du traité instituant la Communauté européenne font l'objet d'une application défaillante par la France en ce qui concerne la profession d' agent en brevets . Il semble nécessaire de modifier le code de la propriété intellectuelle afin de permettre à une personne n'ayant pas son domicile, siège ou établissement en France d'être représentée devant l'Institut national de la propriété intellectuelle par un conseil habilité de l'Etat membre dans lequel il est établi.

La Commission européenne a adressé un avis motivé au Gouvernement français en février dernier.

- Le règlement (CEE) n° 2238/93 de la Commission des Communautés Européennes du 26 juillet 1993 est relatif aux documents accompagnant les transports des produits viti-vinicoles et aux registres à tenir dans le secteur viti-vinicole. Pour assurer le plein respect de ce règlement, il paraît nécessaire d'édicter un dispositif de sanctions en cas de manquement aux obligations qu'il définit.

- Le règlement (CE) n° 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 porte sur la marque communautaire . Des modifications du code de la propriété intellectuelle paraissent indispensables pour assurer le plein respect de ce règlement. Il s'agit notamment de prévoir l'application de sanctions civiles et pénales en cas d'atteinte à la marque communautaire.

- La décision du Conseil du 31 décembre 1998 visée dans le projet de loi est relative aux arrangements monétaires relatifs aux collectivités territoriales françaises de Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte . Des dispositions législatives paraissent nécessaires pour l'application à ces deux territoires de plusieurs règlements concernant l'Euro.

Comme le précédent, cet article tend donc à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures législatives, dans des domaines très variés, afin de permettre la pleine application par la France d'obligations du droit communautaire.

Votre commission vous soumet un amendement d'amélioration rédactionnelle et vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 3
Habilitation du Gouvernement à procéder par ordonnance
à la refonte du code de la mutualité

Cet article tend à autoriser le Gouvernement à compléter la transposition des directives communautaires relatives aux assurances par une refonte du code de la mutualité. Cette refonte s'accompagnerait de modifications du code des assurances, du code de la sécurité sociale, de la loi du 13 juillet 1978 relative à l'orientation de l'épargne vers le financement des entreprises et de la loi du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques.

Le texte de l'article précise que la refonte du code de la mutualité aura pour objectifs essentiels :

- d'assurer l'harmonisation des règles applicables aux organismes mutualistes, institutions de prévoyance et entreprises d'assurances ;

- de garantir les droits et d'assurer la protection des intérêts des membres des organismes mutualistes ou des institutions de prévoyance et de leurs bénéficiaires, ainsi que des assurés souscripteurs, adhérents et bénéficiaires de contrats d'assurances ;

- enfin, d'assurer la participation effective des membres des organismes mutualistes au fonctionnement de leurs instances dirigeantes.

Dans un premier temps, le Gouvernement a envisagé de déposer un projet de loi portant refonte du code de la mutualité. Un texte a même été soumis au Conseil d'Etat. Le Gouvernement estime désormais qu'il est très difficile de transposer les directives communautaires relatives aux assurances sans procéder simultanément à la refonte du code de la mutualité et considère que le calendrier parlementaire ne permet pas l'examen par les assemblées du projet de loi qu'il envisageait de déposer.

Cet article devant être examiné de manière plus détaillée par la commission des affaires sociales et la commission des Finances, votre rapporteur se bornera à souligner qu'il est difficile de soutenir qu'une refonte complète du code de la mutualité constitue une mesure " technique ".

Votre commission vous soumet un amendement de précision et vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 4
Habilitation du Gouvernement à prendre certaines mesures législatives
concernant les autoroutes et les péages

Cet article tend à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures législatives destinées à faciliter la mise en oeuvre de dispositions du droit communautaire concernant les marchés publics de travaux.

La Commission européenne considère que le système français de financement des nouvelles concessions d'autoroutes n'est pas conforme au principe de non discrimination et d'égalité de traitement des candidats à l'attribution des nouvelles concessions d'autoroutes. Le système dit de l'adossement permet en effet de financer la construction des nouvelles autoroutes par une prolongation de la durée des concessions attribuées à certaines sociétés.

Le Gouvernement souhaite donc mettre fin à ce système sans pour autant empêcher les sociétés françaises d'autoroutes de postuler pour l'attribution de nouvelles concessions. Il souhaite donc, par ordonnance, supprimer la garantie de reprise du passif accordée par l'Etat à certaines sociétés d'économie mixte tout en allongeant corrélativement la durée de leurs concessions.

Le Gouvernement souhaite également modifier par ordonnance le régime juridique des ouvrages d'art à péage afin de le simplifier. Il envisage également d'inscrire dans la loi le principe de non discrimination pour l'application des péages et la possibilité de moduler les péages pour des motifs de régulation de trafic.

Le Gouvernement a bien voulu transmettre aux rapporteurs du Sénat un projet d'ordonnance comportant six articles.

Cet article faisant l'objet d'un examen détaillé par la commission des affaires économiques et du Plan et la commission des finances, votre rapporteur souhaite simplement rappeler que l'évolution du réseau autoroutier intéresse au premier chef la représentation nationale et notamment le Sénat, représentant des collectivités territoriales. Le réseau autoroutier est en effet un élément déterminant de la politique d'aménagement du territoire.

A cet égard, le projet de rapport au Président de la République qui accompagne le projet d'ordonnance transmis par le Gouvernement à votre rapporteur, comporte de singulières affirmations s'agissant d'un texte par ailleurs qualifié de " technique ". Ce rapport indique en effet que la politique autoroutière " doit cependant évoluer pour mieux tenir compte des préoccupations environnementales de nos concitoyens, qui acceptent de moins en moins le " tout routier " comme le " tout autoroutier ". Un tel sujet ne mérite-t-il pas un débat devant le Parlement ?

Votre commission vous soumet un amendement de précision et vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 5
Délais pour prendre les ordonnances
et déposer les projets de loi de ratification

Cet article précise les délais dans lesquels les ordonnances devront être prises et les projets de loi de ratification déposés sur le Bureau de l'une ou l'autre assemblée.

Les ordonnances transposant les vingt-six directives mentionnées au paragraphe I de l'article premier du projet de loi devraient être prises dans les six mois suivant la promulgation de la loi d'habilitation. Il en irait de même pour l'ordonnance portant refonte du code de la mutualité et les ordonnances relatives aux concessions d'autoroutes. Plusieurs ordonnances destinées d'une part à mettre fin à certaines incompatibilités entre le droit français et le traité instituant la Communauté européenne, d'autre part à assurer la mise en oeuvre en droit interne de certains règlements, devraient également être prises dans les six mois.

En revanche, l'article 5 prévoit que certaines des ordonnances devront être prises dans les dix mois suivant la promulgation de la loi. Cette différence de délais semble s'expliquer par le fait que certains projets d'ordonnances sont déjà prêts ou très avancés, tandis que d'autres doivent être entièrement élaborés.

Les projets de loi de ratification des ordonnances devraient être déposés devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de l'expiration des délais donnés au Gouvernement pour prendre les ordonnances.

Ainsi, les dispositions de cet article pourraient conduire au dépôt de certains projets de loi de ratification treize mois après la promulgation de la loi d'habilitation. Or, il est hautement souhaitable que l'ensemble des ordonnances soient ratifiées avant la fin de la législature . Les délais prévus à l'article 5 risquent de ne pas permettre la ratification dans ce délai.

Dans ces conditions, votre commission vous propose, par trois amendements , de modifier les délais prévus dans cet article. Elle propose de :

- ramener à quatre mois le délai de six mois prévu pour prendre les ordonnances dont l'élaboration est déjà très avancée ;

- ramener à huit mois le délai de dix mois prévu pour prendre les autres ordonnances ;

- ramener à deux mois le délai de trois mois prévu pour le dépôt des projets de ratification.

Ainsi, tous les projets de ratification pourraient être déposés dans les dix mois suivant la promulgation de la loi d'habilitation, ce qui facilitera la ratification des ordonnances avant la fin de la législature. Ces modifications ne devraient pas soulever de difficultés majeures, un grand nombre de projets d'ordonnances étant d'ores et déjà prêts. Le Gouvernement, avant de recourir à la procédure de l'article 38 de la Constitution, avait en effet préparé des projets de loi qu'il suffira de transformer en ordonnances.

Votre commission vous soumet également trois amendements de précision ou d'amélioration rédactionnelle. Elle vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

*

* *

Sous le bénéfice de l'ensemble de ces remarques et sous réserve des amendements qu'elle vous soumet, votre commission vous propose d'adopter le présent projet de loi.

ANNEXE


AUDITION DE

M. PIERRE MOSCOVICI,
MINISTRE DÉLÉGUÉ CHARGÉ DES AFFAIRES EUROPÉENNES,


M. JEAN-CLAUDE GAYSSOT,
MINISTRE DE L'ÉQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT


M. GUY HASCOËT,
SECRÉTAIRE D'ÉTAT À L'ÉCONOMIE SOLIDAIRE

Lors d'une réunion élargie à l'ensemble des commissions, la commission a procédé à l'audition de M. Pierre Moscovici , ministre délégué chargé des affaires européennes, de M. Jean-Claude Gayssot , ministre de l'équipement, des transports et du logement et de M. Guy Hascoët , secrétaire d'Etat à l'économie solidaire sur le projet de loi n° 473 (1999-2000) portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire.

M. Jacques Larché, président, a souligné l'importance du projet de loi d'habilitation soumis au Sénat. Il a rappelé que les directives étaient négociées par le Gouvernement au sein du Conseil de l'Union européenne, le Parlement français n'intervenant qu'ensuite, au moment de la transposition en droit national. Il a observé que le recours à la procédure des ordonnances conduisait à retirer au Parlement son pouvoir d'examen des directives à l'occasion de la transposition. Il a fait valoir que le Parlement n'avait aucune garantie concernant l'inscription à l'ordre du jour de projets de loi de ratification des ordonnances. Il a indiqué que le projet de loi soulevait à la fois des problèmes de procédure et des problèmes de fond, certaines des mesures mentionnées dans le projet de loi, en particulier la refonte du code de la mutualité et la réforme du financement des autoroutes allant bien au-delà de la simple transposition de directives.

M. Pierre Moscovici a présenté les dispositions du projet de loi. Il a indiqué que l'article premier tendait à habiliter le Gouvernement à transposer par ordonnances 50 directives ou parties de directives. Il a fait valoir que, dans la plupart des cas, il s'agissait d'achever la transposition des directives concernées. Il a indiqué que l'article 2 tendait à permettre au Gouvernement de prendre par ordonnances des mesures susceptibles de mettre fin à des situations d'incompatibilité directe entre le droit national et le droit communautaire.

Le ministre a ensuite souligné que l'article 3 du projet de loi devait permettre au Gouvernement de procéder par ordonnances à la refonte du code de la mutualité. Il a indiqué que l'article 4 autoriserait le Gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer le plein respect par la France des obligations contenues dans la directive communautaire relative aux marchés publics de travaux. Il a enfin précisé que l'article 5 était relatif aux délais demandés pour prendre les ordonnances et déposer les projets de loi de ratification.

M. Pierre Moscovici a ensuite insisté sur la portée limitée de l'habilitation demandée au Gouvernement. Il a observé que la plupart des directives visées dans le projet de loi avaient déjà fait l'objet de mesures de transposition et que les ordonnances ne feraient que compléter ces mesures. Il a ainsi noté que les directives relatives aux télécommunications avaient, pour l'essentiel, été transposées par la loi de réglementation des télécommunications de 1996, des mesures marginales devant cependant être encore adoptées. Il a en outre souligné que certaines directives, en particulier la directive de 1999 imposant une séparation des réseaux de télécommunications et des réseaux câblés appartenant à un même opérateur, étaient pleinement respectées par la France, la Commission européenne exigeant cependant une transposition formelle en droit national.

Le ministre a alors indiqué que le recours à un projet de loi d'habilitation, conformément à l'article 38 de la Constitution, était justifié par le retard considérable de la France en matière d'application du droit communautaire. Il a indiqué qu'au 30 septembre 2000, il existait un stock de 176 directives à transposer, la date de transposition étant dépassée pour 136 d'entre elles. Il a observé qu'un tiers des directives concernées présentait un caractère législatif.

M. Pierre Moscovici a fait valoir que ce retard handicapait fortement la France et créait une forte insécurité juridique, la Cour de justice des Communautés européennes reconnaissant un effet direct aux directives dès l'achèvement du délai de transposition. Il a en outre noté que la France figurait au premier rang des Etats contre lesquels étaient engagées des procédures contentieuses ou précontentieuses pour absence d'application du droit communautaire. Il a ainsi relevé que douze recours en manquement étaient pendants devant la Cour de justice, que la France avait déjà été condamnée en manquement à sept reprises et que la Commission européenne avait entrepris des procédures qui pourraient conduire à la condamnation de la France à verser de lourdes astreintes. Il a enfin souligné que la position de la France au sein du Conseil de l'Union européenne était fragilisée lorsque des négociations s'engageaient sur une directive en l'absence de transposition par notre pays de la précédente directive portant sur le même sujet.

Le ministre a fait valoir que la nécessité d'améliorer la situation de la France en matière de transpositions de directives avait justifié le dépôt par le Gouvernement, en plein accord avec le Président de la République, d'un projet de loi d'habilitation. Il a indiqué que le Gouvernement, depuis son entrée en fonction en 1997, avait fait des efforts pour assurer la transposition de plusieurs directives, en particulier la directive sur les bases de données, la directive sur le marché intérieur de l'électricité. Il a observé que le Gouvernement avait recouru à un nouvel instrument, à savoir le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire. Il a précisé que deux projets de loi de ce type étaient actuellement examinés par le Parlement. Il a toutefois noté que le recours à cette procédure ne suffirait pas pour réduire dans de brefs délais le retard de la France dans l'application du droit communautaire et en a déduit que le recours aux ordonnances constituait un moyen extraordinaire pour faire face à une situation extraordinaire.

Concluant son propos, M. Pierre Moscovici a souligné que la France faisait partie des pays connaissant le plus grand retard dans la mise en oeuvre du droit communautaire et que cette situation ne pouvait plus durer.

M. Jacques Larché, président , a souligné que la liste considérable des textes dont le Gouvernement envisageait la transposition par ordonnances démontrait à l'évidence qu'il existait un problème d'organisation du travail gouvernemental. Il a observé que le Président de la République ne pouvait s'opposer au dépôt d'un projet de loi d'habilitation, mais que des précédents célèbres démontraient qu'il n'était pas tenu de signer une ordonnance.

M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire, a évoqué la refonte du code de la mutualité prévue par l'article 3 du projet de loi d'habilitation. Il a observé que la France n'avait pas transposé des directives relatives aux assurances adoptées en 1992 et qu'elle avait été condamnée à ce titre par la Cour de justice en décembre 1999. Il a précisé que la décision du Gouvernement de recourir aux ordonnances avait été prise après l'engagement par la Commission européenne d'une procédure risquant de conduire à une condamnation de la France au versement d'astreintes.

Le secrétaire d'Etat a ensuite souligné qu'il n'était pas possible de transposer les directives relatives aux assurances sans procéder à la refonte du code de la mutualité. Il a fait valoir que les mesures de transposition s'inséraient mal dans la structure actuelle du code. Il a en outre noté que le Gouvernement envisageait au départ de déposer un projet de loi de sorte que les dispositions de pure transposition et les dispositions de réorganisation étaient étroitement mêlées au sein du texte qu'il avait préparé. Il a en outre indiqué que la solution retenue par le Gouvernement permettrait d'assurer une pleine cohérence entre les mesures de transposition et les autres dispositions.

M. Guy Hascoët a enfin précisé qu'un projet d'ordonnance était prêt, qu'il avait été examiné par le Conseil supérieur de la mutualité et par le Conseil national des assurances, dont faisaient partie des parlementaires, et qu'il ne devrait pas être substantiellement modifié avant sa publication par le Gouvernement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, a évoqué l'article 4 du projet de loi d'habilitation. Il a souligné que la réforme du système de financement des autoroutes était attendue depuis longtemps et que le Sénat avait consacré des travaux importants à ce sujet, notamment dans le cadre de sa commission d'enquête sur les infrastructures. Il a fait valoir qu'il était indispensable de tirer les conséquences de la directive de 1993 sur les marchés publics de travaux et de la directive de 1999 sur les péages. Il a estimé que la technique de l'adossement utilisée pour le financement des nouvelles autoroutes n'était pas conforme au droit communautaire et a rappelé que le Conseil d'Etat avait annulé la procédure d'attribution de la concession de l'autoroute A 86.

Le ministre a fait valoir qu'il était indispensable de trouver de nouvelles ressources financières pour assurer le financement des autoroutes. Il a indiqué que le Gouvernement envisageait donc de prendre par ordonnances des mesures destinées à permettre aux sociétés d'économie mixte de jouer pleinement leur rôle sans bénéficier d'avantages particuliers, mais sans être non plus désavantagées. Il a précisé que le projet d'ordonnance prévoyait la suppression de la garantie de reprise du passif accordée par l'Etat à ces sociétés et, corrélativement, un allongement de la durée des concessions.

M. Jean-Claude Gayssot a indiqué que le Gouvernement souhaitait également prendre des mesures relatives aux péages, notamment pour assurer la pleine conformité de notre droit avec une directive de 1999. Il a précisé que l'ordonnance pourrait être prise avant la fin du premier semestre 2001 et qu'un projet de loi de ratification serait déposé dans la foulée.

M. Daniel Hoeffel , rapporteur au nom de la commission des lois saisie au fond, observant que les ministres qualifiaient de techniques les textes mentionnés dans le projet de loi d'habilitation, a souligné que la directive " Natura 2000 ", la refonte du code de la mutualité, la réforme du système autoroutier avaient des implications politiques et pas simplement techniques. Il a observé que, dans certains cas, le Gouvernement envisageait de prendre des mesures allant très au-delà de la simple transposition de directives. Il a fait valoir que la consultation du Conseil national des assurances et du Conseil supérieur de la mutualité était une manière ténue d'associer le Parlement à la refonte du code de la mutualité.

Le rapporteur a ensuite interrogé le ministre des Affaires européennes sur les causes des retards observés dans l'application du droit communautaire. Il a demandé s'il n'existait pas un dysfonctionnement dans la procédure supposée permettre à la France de veiller au respect de ses engagements et a souhaité savoir quelles mesures le Gouvernement envisageait de prendre pour que la situation ne se reproduise pas.

M. Daniel Hoeffel , rapporteur, a demandé combien d'ordonnances seraient prises et combien de projets de loi de ratification seraient déposés sur le Bureau des Assemblées. Il a souhaité que le Gouvernement prenne l'engagement de faire ratifier les ordonnances avant la fin de la législature. Il a en outre souhaité savoir si un calendrier précis était prévu pour la transposition des directives ne figurant pas dans le projet de loi d'habilitation, en particulier la directive relative au marché intérieur du gaz, la directive relative aux données à caractère personnel et la directive relative à l'exercice de la profession d'avocat.

Concluant son propos, le rapporteur a estimé qu'au moment où l'on parlait de construire l'Europe des citoyens, il n'était pas sain de priver les représentants de ces citoyens du droit de se prononcer sur des pans entiers de la politique européenne.

M. Pierre Moscovici a tout d'abord observé que les retards dans l'application du droit communautaire étaient parfois très anciens et qu'ils s'expliquaient notamment par des comportements internes à l'administration et par la lenteur de la procédure parlementaire. Il a indiqué que le recours à la procédure des projets de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire était une première réponse à la situation actuelle, mais qu'une réflexion devait être menée en commun par le Parlement et le Gouvernement pour améliorer la situation.

A propos de la signature des ordonnances par le Président de la République, le ministre a souligné qu'il existait un plein accord de fond et de forme entre le Gouvernement et le Président de la République, président en exercice de l'Union européenne, à propos de ce projet de loi d'habilitation. Il a estimé qu'il était indispensable que la France achève sa présidence de l'Union européenne en améliorant fortement sa situation en matière d'application du droit communautaire. Il a précisé que le Gouvernement envisageait le dépôt de plusieurs projets de loi de ratification en procédant à des regroupements thématiques et qu'il s'attacherait à inscrire ces projets de loi à l'ordre du jour des Assemblées avant la fin de la législature. Evoquant les directives ne figurant pas dans le projet de loi d'habilitation, il a précisé que le Gouvernement envisageait l'inscription à l'ordre du jour des Assemblées de projets de loi de transposition à compter de la fin du mois de mars sans qu'un échéancier précis soit encore établi.

M. André Jourdain, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires sociales, a tout d'abord souligné que la refonte du code de la mutualité n'était pas une mesure d'importance limitée. Observant que le Gouvernement insistait sur l'urgence de la refonte de ce code, il a demandé si un délai de six mois pour prendre l'ordonnance n'était pas excessif, un projet ayant déjà été examiné par le Conseil d'Etat. Il a souhaité savoir si le texte transmis pour information par le Gouvernement était susceptible de recevoir des modifications ou des ajouts avant que l'ordonnance soit prise. Il a enfin demandé si les dispositions de transposition des directives sur les assurances envisagées par le Gouvernement avaient été validées par la Commission européenne.

M. Denis Badré, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances , a observé que la situation présente allait donner une image singulière de l'Union européenne, la France ayant le choix entre une condamnation à payer des astreintes ou le recours à une procédure empêchant de légiférer dans de bonnes conditions. Il a indiqué que si le Gouvernement négociait les directives puis en assurait lui-même la transposition, les citoyens et leurs représentants seraient privés de tout droit de regard sur l'élaboration du droit communautaire. Evoquant la refonte du code de la mutualité, il a souligné qu'il était essentiel que la transposition des directives soit acceptée par les citoyens et qu'un tel sujet méritait bien un débat au Parlement. Il a exprimé la crainte qu'en l'absence d'un tel débat, la future loi soit celle de la mutualité et non celle des Français. Il a demandé si le Gouvernement envisageait de reprendre à son compte certaines propositions formulées par la commission des Finances du Sénat dans le cadre d'un rapport consacré aux assurances.

M. Guy Hascoët a rappelé que le recours à la procédure des ordonnances avait été décidé face au risque de condamnation de la France au paiement d'astreintes. Il a précisé que l'intégration des éléments des directives dans le code de la mutualité impliquait une réorganisation de celui-ci. Il a indiqué que l'ordonnance serait prise au printemps 2001 et que la Commission européenne, informée du contenu du texte préparé par le Gouvernement, n'avait formulé aucune objection.

M. Denis Badré a ensuite évoqué la réforme du système de financement des autoroutes. Il a demandé si le droit communautaire interdisait à une société bénéficiant d'une garantie de reprise de passif de concourir pour l'obtention de nouvelles concessions. Soulignant que le ministre des transports indiquait qu'il était nécessaire de trouver de nouveaux financements pour la construction des autoroutes, il a observé que le projet d'ordonnance que le Gouvernement envisageait de prendre ne contenait aucune disposition sur ce sujet. Il a fait valoir que le projet d'ordonnance prévoyait pour l'essentiel une généralisation du péage routier et a souhaité savoir si un texte communautaire imposait une telle évolution.

M. Jean-Claude Gayssot a indiqué que la directive sur les marchés publics de travaux et la loi Sapin imposaient une mise en concurrence des entreprises pour l'attribution des nouvelles concessions d'autoroutes. Il a observé que la garantie de reprise du passif apportée par l'Etat aux sociétés d'économie mixte était une distorsion de concurrence et que le Gouvernement souhaitait créer les conditions pour que ces sociétés d'économie mixte soient sur un pied d'égalité avec les sociétés privées. Il a indiqué que les sociétés d'économie mixte auraient à l'avenir des résultats, qu'elles seraient soumises à l'impôt sur les sociétés et verseraient à l'Etat des dividendes qui permettraient le financement des nouveaux investissements. Il a observé que ces mesures ne relevaient pas du domaine législatif. Il a enfin noté que les dispositions relatives aux péages envisagées par le Gouvernement visaient à supprimer le principe de gratuité de la circulation sur les voies routières et que cette mesure avait des liens avec les textes communautaires.

M. Pierre Moscovici a indiqué qu'il partageait le sentiment de M. Badré sur le caractère peu satisfaisant du choix entre une condamnation par la Cour de justice et un recours aux ordonnances. Il a toutefois observé que le pire serait de ne rien faire et que le Gouvernement souhaitait sortir de la situation actuelle. Il a rappelé que les Assemblées pouvaient désormais se prononcer en amont sur les textes communautaires grâce à l'article 88-4 de la Constitution et que le Gouvernement avait souhaité étendre le champ d'application de cette disposition à l'occasion de la révision constitutionnelle préalable à la ratification du traité d'Amsterdam. Il a alors observé que les Assemblées avaient adopté des résolutions sur moins de 10 % des textes qui leur étaient soumis. Il en a déduit que les textes communautaires étaient d'importance très inégale et que s'il ne fallait pas légiférer mal, il ne fallait pas non plus légiférer trop.

M. Aymeri de Montesquiou, intervenant au nom de la délégation pour l'Union européenne , a estimé que le retard de la France dans l'application du droit communautaire avait affaibli la présidence française de l'Union européenne. Soulignant que chaque Gouvernement avait sa part dans cette situation, il a observé que celle-ci s'était aggravée au cours des dernières années. Il a exprimé la crainte que le recours à la procédure des ordonnances ne fasse que renforcer l'image d'une Union européenne technocratique dans l'esprit des citoyens. Il a enfin observé qu'il aurait été préférable que le Gouvernement se préoccupe de la situation avant le début de la présidence française de l'Union européenne, soulignant que le projet de loi d'habilitation risquait de n'être adopté qu'à la fin de cette période.

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, a estimé que les dispositifs de veille permettant d'assurer le respect par la France de ses engagements communautaires laissaient fortement à désirer. Il a rappelé que le Parlement avait adopté très récemment une loi sur l'audiovisuel sans qu'y soit intégrée la transposition de la disposition imposant la séparation dans des structures distinctes des réseaux de télécommunications et des réseaux câblés appartenant à un même opérateur.

M. Jacques Oudin a observé que le projet d'ordonnance que le Gouvernement envisageait de prendre sur le fondement de l'article 4 du projet de loi d'habilitation démontrait une volonté d'étendre les péages à toutes les structures autoroutières et routières. Il s'est demandé si une telle évolution ne traduisait pas un retour à l'Ancien régime par le rétablissement des octrois. Il a rappelé qu'une loi de 1888 précisait que les voies de la République étaient libres à toute circulation.

M. Robert Bret a observé que le Sénat avait déjà eu l'occasion de débattre de la réforme du système autoroutier, notamment à l'occasion de la discussion du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains, un amendement de M. Michel Mercier sur ce sujet ayant été repoussé à une large majorité.

M. Jacques Larché, président , a observé que, si le Parlement n'avait adopté des résolutions que sur un nombre réduit de textes communautaires, il serait souhaitable de connaître les suites données à ces résolutions par le Gouvernement.

M. Pierre Moscovici a indiqué que l'ambition du Gouvernement était de rendre à la France une situation conforme à son rang en matière d'application du droit communautaire. Il s'est déclaré ouvert à la recherche de solutions qui permettraient d'éviter de reproduire le retard actuel.

Evoquant la séparation des réseaux de télécommunications et des réseaux câblés, il a noté que la France respectait de facto ses obligations, mais que la Commission européenne exigeait une transposition dans les textes de droit interne.

M. Jean Delaneau a souhaité savoir s'il existait des moyens de contraindre un pays au versement d'astreintes en cas de condamnation.

M. Denis Badré a pris note de la volonté du ministre d'associer le Parlement à la recherche de solutions pour l'avenir, mais a jugé que cette proposition était affaiblie par l'attitude consistant à demander au préalable au Parlement de renoncer à exercer ses prérogatives à propos de nombreux textes parfois importants. Il a observé que le Parlement n'était pas systématiquement hostile au recours aux ordonnances et a rappelé que cette procédure avait été récemment utilisée pour l'adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs.

M. Pierre Moscovici a précisé qu'il n'existait pas de moyens de contraindre un Etat à verser des astreintes. Il a rappelé que le recours à l'habilitation était une réponse extraordinaire à une situation extraordinaire et a estimé que l'administration, le Gouvernement et le Parlement n'étaient pas très performants en matière de transposition de directives.

M. Jean-Claude Gayssot a précisé que le Gouvernement souhaitait simplifier les règles relatives aux péages. Il a rappelé que le code de la voirie routière précisait que la circulation sur les autoroutes était en principe gratuite. Il a noté que ce principe était devenu une fiction. Il a en outre observé que le système de l'adossement pour le financement des nouvelles autoroutes avait pour effet d'allonger la durée d'existence des péages sur les autoroutes. Il a enfin souligné qu'il n'était pas question de mettre en place des péages sur les routes départementales et communales. Il a précisé que l'amendement de M. Mercier avait été retiré à la demande du Gouvernement.

M. Jacques Larché, président , a souligné que le Sénat ne pouvait que constater que le Gouvernement avait été contraint de recourir à la procédure de l'habilitation face à l'encombrement de l'ordre du jour prioritaire des Assemblées qu'il imposait lui-même semaine après semaine en conférence des présidents. Il s'est demandé s'il serait possible à la Haute assemblée de suivre sans réserve le Gouvernement, observant que les assemblées pouvaient refuser l'habilitation, l'accepter sans réserve ou encore en réduire le champ. Il a fait valoir que la volonté louable du Gouvernement de voir la France occuper une place plus conforme à son rang en matière d'application du droit communautaire ne pouvait avoir pour corollaire la mise à l'écart du Parlement sur des textes de grande importance.

* 1 Le Monde, 15 octobre 1999.

* 2 " Sauver la Poste : devoir politique, impératif économique ", rapport n° 42 (1997-1998) de M. Gérard Larcher

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