II. PLUSIEURS LEVIERS DE DÉCARBONATION IDENTIFIÉS

A. LES ÉMISSIONS DE CO2 DE L'AVIATION : MIEUX PARTAGER L'EFFORT DE DÉCARBONATION

Les émissions CO 2 et non-CO 2 du transport aérien doivent donner lieu à un partage plus responsable de l'effort de décarbonation .

Le débat sur le transport non commercial qui englobe les flottes d'affaires (« jets privés »), les ULM et les avions de loisirs - reflète cette exigence nouvelle : ce mode de transport représente en effet globalement peu d'émissions - quelques pour cent des rejets de l'aviation - mais, qui sont pour des raisons d'équité de moins en moins bien acceptées. L 'alignement des taxes applicables à l'essence d'aviation et aux carburéacteurs sur la taxation des essences routières (article 8 quater du PLF pour 2023) est une réponse à cette préoccupation.

Cette mesure s'ajoute à l'obligation de transparence accrue imposée par la loi « Climat et résilience » d'août 2021 aux entreprises qui doivent notamment mentionner dans leur déclaration annuelle de performance extra-financière (art. L. 225-102- 1 du code de commerce) - les conséquences sur le changement climatique de leur activité et de l'usage des biens et services qu'elle produit, dont les émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre liées à leurs activités de transport amont et ainsi que le plan d'action visant à réduire ces émissions.

B. UNE RÉGLEMENTATION ET DES PRATIQUES FAVORABLES AU VERDISSEMENT

Émissions de GES

en moyenne européenne 14 fois supérieures à celles du train
et jusqu'à 40 fois plus élevées
en comparaison d'un voyage
en TGV

Le nouveau cadre réglementaire européen toujours en cours d'élaboration du paquet « Fit for 55 » va entraîner des mutations profondes pour le secteur aérien . Les positions exprimées par le Parlement européen, plus ambitieuses que celles de la Commission européenne et du Conseil, pourraient même renforcer ce « paquet » : les équilibres finaux seront connus au terme de négociations engagées entre les trois institutions (trilogue) d'ici à la fin de l'année 2022.

Les orientations défendues par le Parlement européen correspondent à plusieurs propositions de la commission formulées dans le rapport d'information sur la réforme du marché carbone européen 2 ( * ) (cf. proposition visant à renforcer la régulation environnementale des trajets aériens internationaux pour compléter le mécanisme CORSIA) et la résolution sénatoriale sur le paquet « Fit for 55 » 3 ( * ) (cf. proposition visant à affiner les délais dans la mise en oeuvre de l'obligation d'incorporation de biocarburants).

Pour les compagnies aériennes entendues par la rapporteure, l'incorporation de carburants durables ( Sustainable Aviation Fuel ) constitue une nouvelle donne à prendre en compte et, en ce sens, un vrai défi , alors même qu'en pratique, il est actuellement difficile de se procurer des biocarburants. 200 millions d'euros de crédits sont alloués à des appels à projets pour faire évoluer cette situation, ce qui mérite d'être salué. La France a pris un certain retard par rapport aux Pays-Bas qui distribuent et exportent vers la France des biocarburants aux normes européennes (sans recours à la biomasse destinée à l'alimentation).

L'électrification de l'aviation qui se limite aux petits appareils (une vingtaine de passagers au maximum sur des distances courtes inférieures à 400 km) n'offre pas d'alternative véritable, à grande échelle. De même, le rayon d'action de l'avion à hydrogène sera limité au moyen-courrier soit environ 4 000 km avec 200 personnes et des réservoirs quatre fois plus volumineux que sur les appareils à kérosène. Pour les vols intercontinentaux , il n'y a pas d'alternative aux carburants durables, même à l'horizon 2050.

Le projet de loi d'accélération des énergies renouvelables (ENR) adopté par le Sénat le 4 novembre dernier permettra d'accompagner ce mouvement. Le déploiement des panneaux solaires sur les grandes surfaces devrait leur permettre de produire de l'hydrogène vert sous forme gazeuse pour les engins au sol et de l'hydrogène liquide pour les futurs avions à hydrogène dont la mise en service est annoncée pour 2035.

Les aéroports sont également des acteurs prenant une part active à l'effort de décarbonation. À court terme, les opérations au sol 4 ( * ) tendent vers l'objectif de « zéro émission » . Les aéroports se transforment par ailleurs en véritables centres de production et de distribution d'énergie renouvelable .

Enfin, la mise en oeuvre, au niveau communautaire, d'ici à 2025, des « espaces aériens en cheminement libre » se traduira par des réductions progressives de longueur des plans de vol déposés dans le plan horizontal, facteur de réduction de la distance effectivement parcourue et, en conséquence, de la consommation en carburants .


* 2 Voir le rapport d'information n° 576 (2021-2022) de M. Guillaume Chevrollier et Mme Denise Saint-Pé, Réformer le marché carbone pour bâtir une économie européenne souveraine, durable et juste, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 15 mars 2022.

* 3 Voir la Résolution du Sénat n° 124 (2021-2022) sur le paquet « Ajustement à l'objectif 55 ».

* 4 Comme la prise en charge des avions ayant atterri pour leur permettre de couper les moteurs le plus tôt possible.

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