III. INCLUSION SOCIALE : DES POLITIQUES EN VOIE DE RENOUVELLEMENT

A. LA PRIME D'ACTIVITÉ : UNE DÉPENSE DYNAMIQUE À RATIONALISER

Les crédits inscrits au PLF au titre de la prime d'activité, qui s'élèvent à 10,9 milliards d'euros pour 2023, sont en hausse de 11 % : 4 points s'expliquent par la hausse tendancielle des dépenses, à laquelle s'ajoute une hausse exceptionnelle liée à la revalorisation anticipée de 4 % des barèmes de la prestation au 1 er juillet 2022 (+ 7 points). La revalorisation de la prime d'activité apparaît ainsi comme le premier facteur d'augmentation des crédits de la mission . L'effectif des bénéficiaires reste stable et atteindrait 4,54 millions de foyers en moyenne en 2023.

Le versement de la prime d'activité pourrait connaître une forme d'automatisation dans le cadre de la « solidarité à la source » promise par le Président de la République. En tout état de cause, une amélioration du versement à bon droit de la prestation semble nécessaire : le dernier rapport de la Cour des comptes sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, qui consacre un chapitre aux prestations sociales versées sous conditions de ressources, fait état de nombreuses anomalies et recommande d'engager un chantier de simplification.

Selon la Cour des comptes, 1 euro de prime d'activité sur 5 serait versé à tort à titre définitif.

Le rapporteur pour avis regrette que, dans la perspective des prochaines réformes des prestations de solidarité, le rapport de Fabrice Lenglart sur le revenu universel d'activité n'ait pas été rendu public.

B. UNE ANNÉE DE TRANSITION EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ

• La stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté arrivant en fin de cycle, les crédits consacrés à cette action au sein du programme 304 diminuent de 327,6 millions à 252 millions d'euros entre 2022 et 2023. Ce plan, qui repose pour une large part sur la contractualisation entre l'État et les départements, entre en effet dans une année de transition au cours de laquelle les conventions seront renouvelées.

Parmi les mesures emblématiques de la stratégie au niveau national, l'offre de cantine scolaire à 1 euro a atteint son objectif, après plusieurs ajustements de ses paramètres, puisque 115 000 élèves en bénéficient actuellement dans 1 550 communes. Les crédits qui lui sont consacrés augmenteraient de 7 millions d'euros en 2023.

À l'inverse, le plan de formation des travailleurs sociaux n'a pas répondu aux attentes : selon le comité d'évaluation de la stratégie pauvreté, 16 420 professionnels auraient été formés au total, soit 16,4 % de l'objectif.

Un nouveau « Pacte des solidarités » prendrait la suite de la stratégie 2018-2022 en structurant la politique de lutte contre la pauvreté autour de quatre priorités stratégiques :

- la prévention de la pauvreté , afin d'éviter la reproduction de la pauvreté entre générations et de protéger les personnes dans les moments de rupture ;

- l'insertion par l'emploi , en particulier des personnes les plus éloignées de l'emploi et notamment des bénéficiaires du RSA, axe qui s'inscrit dans le chantier France Travail ;

- la lutte contre la grande marginalité , en restaurant l'égale dignité de chacun par la garantie d'un même accès aux droits et aux services ;

- l'organisation d'une transition écologique et solidaire afin de réduire le poids des dépenses contraintes (alimentation, mobilité, logement).

• L'expérimentation du transfert à l'État du financement et de la gestion du RSA a été lancée en 2022 dans deux départements volontaires : la Seine-Saint-Denis et les Pyrénées-Orientales. Selon les informations fournies par la DGCS, l'ouverture à une seconde vague de départements par la loi « 3DS » 5 ( * ) n'a suscité que quatre candidatures. Au regard des conditions financières prévues par la loi de finances pour 2022 6 ( * ) , seuls les départements anticipant une augmentation de leurs dépenses et un accroissement de leur reste à charge ont intérêt à entrer dans l'expérimentation. Compte tenu des critères récemment fixés par décret et du retrait de la Guadeloupe, seule la candidature de l'Ariège a été retenue pour entrer dans l'expérimentation en 2023.

Les départements participant à l'expérimentation, d'une durée de 5 ans, s'engagent à développer et déployer de nouvelles politiques d'insertion à destination des bénéficiaires du RSA. Ainsi, le conseil départemental doit formaliser dans une convention avec l'État les engagements qu'il prend en matière d'augmentation de ses dépenses d'insertion, de renforcement des effectifs dédiés à l'accompagnement vers l'emploi des bénéficiaires du RSA et de développement des offres de solutions d'insertion.

Par ailleurs, l'attribution et le financement du RSA ont été recentralisés de manière pérenne, depuis 2019, en Guyane et à Mayotte et, depuis 2020, à La Réunion.

Au total, les crédits dédiés au RSA recentralisé augmenteraient en 2023 de 1,42 milliard à 1,56 milliard d'euros sous l'effet notamment de la revalorisation anticipée de 4 % de la prestation au 1 er juillet 2022.

• De nouvelles expérimentations sont simultanément lancées en matière d'accompagnement des bénéficiaires du RSA, qui ont vocation à converger vers France Travail :

- l'expérimentation d'un RSA sous conditions d'activité , qui répond à un engagement de campagne du Président de la République, sera lancée en début d'année 2023 dans dix territoires correspondant à des bassins d'emploi. 43 départements ont déposé leur candidature. Dans ce cadre, la logique d'engagements réciproques sera renforcée autour d'un accompagnement plus dense et tourné vers l'emploi ;

- l'expérimentation de « territoires zéro non recours » vise à favoriser l'accès aux droits sociaux sur dix territoires et pour une durée de trois ans à compter de la publication d'un décret en Conseil d'État prévu par l'article 133 de la loi « 3DS » .

Elle comportera a minima des actions de lutte contre le non-recours au RSA et à la prime d'activité. Les collectivités territoriales candidates seront chargées du pilotage des projets au niveau local. Les territoires sélectionnés bénéficieront d'une participation financière de l'État et devront apporter un cofinancement dont le taux n'est pas défini à ce stade. 2 millions d'euros inscrits au titre de la stratégie pauvreté seront ainsi fléchés vers cette expérimentation en 2023.


* 5 Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale - Article 132.

* 6 Loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 - Article 43.

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