N° 118

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 novembre 2022

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet
de
loi de finances , considéré comme adopté par l'Assemblée nationale
en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, pour
2023 ,

TOME IV

SANTÉ

Par Mme Annie DELMONT-KOROPOULIS,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Deroche , présidente ; Mme Élisabeth Doineau , rapporteure générale ; M. Philippe Mouiller, Mme Chantal Deseyne, MM. Alain Milon, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin, MM. Olivier Henno, Martin Lévrier, Mmes Laurence Cohen, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge , vice-présidents ; Mmes Florence Lassarade, Frédérique Puissat, M. Jean Sol, Mmes Corinne Féret, Jocelyne Guidez , secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mme Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Laurent Burgoa, Jean-Noël Cardoux, Mmes Catherine Conconne, Annie Delmont-Koropoulis, Brigitte Devésa, MM. Alain Duffourg, Jean-Luc Fichet, Mmes Frédérique Gerbaud, Pascale Gruny, MM. Abdallah Hassani, Xavier Iacovelli, Mmes Corinne Imbert, Annick Jacquemet, M. Jean-Marie Janssens, Mmes Victoire Jasmin, Annie Le Houerou, Viviane Malet, Colette Mélot, Michelle Meunier, Brigitte Micouleau, Annick Petrus, Émilienne Poumirol, Catherine Procaccia, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, M. René-Paul Savary, Mme Nadia Sollogoub, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Mélanie Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) : 273, 285 , 286 rect., 292 , 337 , 341 , 364 , 369 , 374, 386 et T.A. 26

Sénat : 114 et 115 à 121 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

Réunie le mercredi 23 novembre 2022 sous la présidence de Catherine Deroche, la commission des affaires sociales a adopté le rapport pour avis d'Annie Delmont-Koropoulis sur les crédits de la mission Santé, ainsi qu'un amendement visant à créer un programme consacré au financement d'actions d'« aller-vers » et d'accompagnement des personnes en situation irrégulière.

Elle a par ailleurs une nouvelle fois questionné la cohérence de la mission « Santé ».

I. LE PROGRAMME 204 : UN FINANCEMENT PAR L'ÉTAT TOUJOURS AUSSI MARGINAL DE LA POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE

Les crédits du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » s'élèvent à 216 millions d'euros, soit une hausse de 1,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2022.

A. LE FINANCEMENT DES ACTEURS DU SYSTÈME SANITAIRE

1. Les crédits, stagnants, des opérateurs et agences sanitaires

Le programme 204 ne contribue plus qu'au financement de deux agences sanitaires :

- l' Institut national du cancer (INCa), dont les crédits s'élèveront à 40,5 millions d'euros, contre 40,8 millions dans la LFI pour 2022 ;

- l' Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSéS), dont les crédits s'élèveront à 23 millions d'euros, soit une hausse de 0,45 million par rapport à la LFI pour 2022. Celle-ci tient compte, d'une part, de la revalorisation salariale issue du Ségur de la santé qui touche les professionnels de santé intervenant dans le dispositif de toxicovigilance ; d'autre part, de l'intégration progressive d'une nouvelle compétence confiée à l'ANSéS à compter du 1 er janvier 2024 sur les cosmétiques et les produits de tatouage, en vertu d'un amendement retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité à l'Assemblée nationale, et conformément aux recommandations de plusieurs études récentes 1 ( * ) .
La subvention destinée à l'ANSéS reste éclatée entre six programmes, et principalement le 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », piloté par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation.

Le programme 204 finance également le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), qui ne constitue pas à proprement parler une agence sanitaire, à hauteur de 350 000 euros, comme l'an dernier.

2. Des crédits consacrés aux actions juridiques et contentieuses en baisse

Les crédits consacrés aux actions juridiques et contentieuses s'élèvent à 41,6 millions d'euros, en baisse de 11 millions d'euros par rapport à la LFI pour 2022. Cette diminution s'explique essentiellement par la diminution de la dotation à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam) qui assure pour le compte de l'État :

- l'indemnisation des accidents vaccinaux survenus depuis le 1 er janvier 2006 ainsi que l'indemnisation des victimes de mesures sanitaires d'urgence, pour 8 millions d'euros ;

- l'indemnisation des conséquences dommageables d'une vaccination réalisée dans le cadre de la compagne de vaccination contre la covid-19 . Dans le cadre de cette nouvelle mission qui lui a été confiée en 2021, l'Oniam a reçu, au 31 octobre 2022, 781 demandes d'indemnisation au titre d'une vaccination contre la covid-19, dont 36 demandes sur le mois d'octobre. Sur ce total, 73 décisions ont fait l'objet d'une décision de rejet justifiée notamment par une absence de lien de causalité entre les symptômes décrits et l'administration du vaccin ; 34 offres ont été notifiées. Les autres demandes sont toujours en cours d'instruction par les services juridiques et médicaux de l'établissement dont 68 dossiers en cours d'expertise.

La direction de la sécurité sociale estime qu'« en l'absence d'une doctrine pérenne et établie, il reste difficile à ce jour de chiffrer l'impact financier de cette nouvelle mission ». Les auteurs du rapport d'étape de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) sur les effets indésirables des vaccins contre la covid-19, publié en juin dernier 2 ( * ) , s'étaient dits « surpris par ce nombre relativement faible - bien qu'en hausse - de demandes, au regard du nombre de déclarations faites dans le cadre de la pharmacovigilance » et avaient dit leur regret « que les possibilités d'indemnisation n'aient pas été plus largement communiquées auprès de la population ». La commission ne peut que réitérer leur appel au soutien des moyens de l'Oniam.

Il apparaît essentiel que l'Oniam soit doté des moyens humains et financiers nécessaires pour mener à bien sa mission.

- l'indemnisation, pour le compte de l'État ou en substitution d'autres responsables des victimes du valproate de sodium et de ses dérivés (Dépakine®) et les frais de fonctionnement de ce mécanisme , pour 24,379 millions d'euros. C'est ici que se retrouve la baisse de 11 millions d'euros des crédits de cette action par rapport à 2022.

Le rapport de la commission des finances fait par notre collègue Christian Klinger en septembre dernier 3 ( * ) a fait la lumière sur l'écart systématique de la prévision à l'exécution de ces crédits. Alors que les prévisions initiales évaluaient la dépense à 77,7 millions par an, l'exécution annuelle du dispositif jusqu'en 2021 n'a jamais dépassé 16,8 millions d'euros.

L'explication réside essentiellement dans le non-recours au dispositif. Il existe en effet un écart important entre les prévisions et le nombre de dossiers déposés à l'Oniam et les données épidémiologiques : dans un rapport de 2018, l'ANSM estimait qu'entre 2 150 et 4 100 enfants souffriraient de malformations, et qu'entre 16 600 et 30 400 connaîtraient des troubles neuro-développementaux. Seuls 850 dossiers environ ont toutefois été déposés à l'Oniam au milieu de l'année 2022.

3. Les autres acteurs de la politique sanitaire financés sur le programme 204

Le programme 204 porte également le financement de l'agence de santé de Wallis-et-Futuna, dont les crédits sont au même niveau que l'an dernier : 48,10 millions d'euros en autorisations d'engagement et 49,40 millions d'euros en crédits de paiement.

Les comités de protection des personnes sont ainsi financés, comme l'an dernier et l'année précédente, à hauteur de 4,1 millions d'euros. Par ailleurs, 4,36 millions d'euros leur ont été consentis en 2022 - soit davantage que les 860 000 euros initialement prévus - au titre de la part de la contribution des laboratoires pharmaceutiques à l'ANSM instaurée par la LFSS pour 2021, et qui s'ajoute à la dotation de l'État et justifie sans doute de la maintenir au même niveau depuis trois ans. Depuis 2020, la quantité d'ETP sur le poste de responsable administratif est en outre passée de 1 à 1,5.

Cet effort, timide, de soutien financier et humain doit être poursuivi et la rationalisation des canaux de financement des CPP engagée, afin de leur donner les moyens de remplir sereinement leurs missions.


* 1 Le transfert à l'ANSéS de la veille et du traitement des signalements d'événements indésirables est envisagé par la Cour des comptes (communication à la commission des affaires sociales du Sénat sur l'Agence nationale de sécurité du médicaments et des produits de santé, 2019), l'Inspection générale des affaires sociales (Organisation de la sécurité sanitaire des produits cosmétiques et de tatouage : état des lieux et évolutions souhaitables, mars 2020) et le Haut Conseil de la santé publique (Avis relatif aux risques des produits et pratiques de tatouage et de détatouage, 15 décembre 2020).

* 2 Les effets indésirables des vaccins contre la Covid-19 et le système de pharmacovigilance français, rapport d'étape fait au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques par M. Gérard Leseul, député, et Mmes Sonia de La Provôté et Florence Lassarade, sénatrices, déposé le 9 juin 2022.

* 3 Le dispositif d'indemnisation pour les victimes de la Dépakine : mieux anticiper pour mieux indemniser, rapport d'information n° 904 (2021-2022) de M. Christian Klinger, fait au nom de la commission des finances, le 28 septembre 2022.

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