B. LE « SERVICE PUBLIC DE LA RUE AU LOGEMENT » POUR RENFORCER LE PILOTAGE DU PLAN « LOGEMENT D'ABORD »

1. Une clarification du pilotage pour résorber les difficultés rencontrées sur le terrain

Financée par l'État, la mise en oeuvre de cette politique est déléguée à de nombreux tiers - principalement des personnes privées . Les associations à but non lucratif constituent la plus grande partie de ces opérateurs (17 des 20 plus grands gestionnaires de CHU en 2018). De manière résiduelle, des fondations, des sociétés d'économie mixte, des groupements d'intérêt public ou des établissements publics gèrent des CHU ou des CHRS.

En conséquence, la politique publique pâtit d'une gouvernance complexe et de difficultés de gestion. La Cour des comptes indique par exemple que, pour le logement adapté, le SIAO, opérateur désigné par le préfet de département, « reste en situation de faiblesse par rapport aux autres acteurs qu'il est censé coordonner » 2 ( * ) .

2. Des progrès restent à faire pour un pilotage efficace de cette politique

Face à ces difficultés, l'initiative du « Service public de la rue au logement », lancée le 1 er avril 2021 vise à mieux articuler les acteurs du secteur dans la poursuite de la stratégie du « Logement d'abord ». Le pilotage budgétaire a été confié à la Dihal déjà chargée du pilotage « métier ». La concrétisation du « Service public de la rue au logement » n'est cependant pas encore visible sur le terrain.

La Dihal a fait part au rapporteur du projet de replacer le SIAO comme pierre angulaire de la chaîne de l'hébergement et du logement adapté . Il a ainsi prévu que l'État intègre la gouvernance des SIAO afin de les piloter selon des modalités variant toutefois en fonction de leur statut.

Cette programmation pluriannuelle doit non seulement aider au pilotage des capacités d'accueil mais également prévoir la configuration de l'offre d'hébergement et de logement adapté afin de répondre aux besoins des personnes sans abri et d'accélérer la montée en qualité des places.

Le parachèvement de cette stratégie de moyen et long terme serait l'adoption à intervalle régulier d'une loi de programmation pluriannuelle à l'instar de ce qui est mis en place pour d'autres politiques. Porté par la Fédération des acteurs de la solidarité et accueilli favorablement par le Gouvernement, ce projet pourrait constituer un outil supplémentaire dans la transformation structurelle à l'oeuvre depuis quelques années.

Le dispositif d'accueil des réfugiés ukrainiens

Sur les 7 millions de déplacés d'Ukraine ayant fui leur pays, la France recense aujourd'hui 100 000 personnes sur son territoire, majoritairement des femmes et des enfants.

L'hébergement généraliste financé par le programme 177 n'a que faiblement été mobilisé pour l'accueil de ces personnes puisque l'État a choisi de privilégier des solutions d'hébergement « de type sas » et de capacités d'accueil ad hoc , susceptibles d'être ouvertes en lien avec un opérateur associatif chargé d'y assurer un accompagnement social, et dont les capacités sont censées venir en supplément des capacités de l'hébergement généraliste. Ces solutions d'hébergement "sas" et " ad hoc " ont été financées par le programme 303 (Asile et immigration). Malgré ce dispositif et des orientations nationales qui ne ciblaient pas l'hébergement d'urgence généraliste, certains SIAO ont pu être très sollicités. Cela a pu susciter une forme de concurrence entre publics en situation de précarité.

Bien que les solutions d'hébergement soient financées par une autre ligne budgétaire, le décret d'avance d'avril 2022 ratifié par la LFR d'août 2022 a prévu une dotation de 100 millions d'euros, financée par le programme 177, dédiée à l'accompagnement des réfugiés ukrainiens. La prévision de dépenses est, à ce jour, estimée entre 45 et 50 millions d'euros.

À cette prévision, s'ajoutent les crédits nécessaires au financement de l'aide mensuelle de 150 euros aux ménages qui accueillent ou ayant accueilli en 2022 des réfugiés ukrainiens, qui sera versée à partir de la fin du mois de novembre par l'Agence de service des paiements. La dotation nécessaire est estimée entre 10 et 15 millions d'euros selon le nombre de familles accueillantes : 4 000 familles ayant une convention avec l'État auxquelles pourront s'ajouter entre 5 et 10 000 familles non conventionnées mais éligibles à cette aide.

L'intégralité de la dotation ne devrait pas être entièrement exécutée sur la gestion 2022. Toutefois, il est envisagé une demande de report des crédits sur le budget 2023, ce qui permettrait d'assurer dès le début du mois de janvier la continuité des versements aux associations qui oeuvrent au titre de l'accueil de réfugiés ukrainiens et de leur accompagnement social.

Déplacement à la Cité des dames le 27 octobre 2022

Créé en décembre 2018, la Cité des dames est un dispositif d'accueil innovant qui à notre connaissance ne dispose pas d'équivalent dans le dispositif de veille sociale nationale. Elle est gérée par la fondation de l'Armée du salut et situé dans des locaux qui comprennent également un centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS).

Depuis sa création, la Cité des dames a répondu de manière inconditionnelle à l'accueil de plus de 2 500 femmes dont la plupart n'avaient pas de contact avec le monde du travail social. La souplesse des modalités d'accès en direct à ce service permet d'apporter une réponse immédiate de mise à l'abri à des femmes en situation de détresse.

Bien qu'en nombre insuffisant, il existe aujourd'hui des centres dédiés aux femmes victimes de violence conjugales. La Cité des dames propose quant à elle un accueil de première intention à des femmes victimes de toute forme de violence car selon leurs déclarations, plus de 70 % des femmes accueillies déclarent avoir subi au moins une violence grave du fait de leur situation de rue et/ou sur les routes de l'exil.

L'originalité de ce projet repose sur le couplage d'un accueil de jour et d'un accueil de nuit ouvert 24h/24 et 7j/7j spécialement dédié à des femmes seules et sans abri. Outre des prestations de base (hygiène, repos, restauration...), la Cité des dames propose un premier niveau d'accompagnement social (ouvertures de droits, orientations vers de l'hébergement...), ainsi qu'une première réponse sur l'aspect santé (gynécologie, psychologie).

Une initiative frappée par un sous-financement chronique

Malgré sa pertinence, ce dispositif peine largement à trouver des financements à hauteur du besoin des femmes accueillies. Ceci s'explique en partie par une autocensure lors du montage budgétaire initial. Un cofinancement de la Cité des dames a en effet été proposé à l'État et à la Ville de Paris, alors que ce projet ne correspondait à aucune programmation budgétaire des deux parties.

Réunie le 16 novembre 2022, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » de la mission « Cohésion des territoires ».


* 2 Cour des comptes, référé au Premier ministre sur la politique en faveur du « Logement d'abord », 20 octobre 2020.

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