III. L'ACTION IMMOBILIÈRE EST PAR NATURE PLURIANNUELLE DONC INCOMPATIBLE AVEC LE FONCTIONNEMENT ACTUEL DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE

La politique immobilière à l'étranger est à réinventer de toute urgence . Elle est grevée par le choix qui a été fait pendant plusieurs années de faire dépendre l'entretien normal des bâtiments des recettes exceptionnelles de cessions d'immeubles et du fonctionnement du compte d'affectation spéciale 723 qui sert à financer les investissements immobiliers du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Il est alimenté par les produits de cessions de biens situés à l'étranger mis à disposition du BOP ministériel sur la base d'une programmation de dépenses, dans le cadre d'un dialogue de gestion avec la direction de l'immobilier de l'État .

En 2022 et 2023, le MEAE prévoit de réserver environ 22 M€ pour des d'opérations nouvelles à l'étranger, sur le P723. Toutefois, les disponibilités sur le P723 restent très limitées car les ventes de biens restant à céder sont désormais les plus complexes.

Un compte d'affectation spéciale devenu inopérant ?

Les plus belles ventes ont déjà été réalisées. En 2018, 12 cessions de biens domaniaux à l'étranger ont été opérées pour un montant total de 30,3 M€ . En 2019 , les encaissements des produits de cession ont représentés 4 M€ , 13,5 M€ en 2020 , 22,6 M€ en 2021 , et 5,96 M€ en 2022 (à mi-septembre). Sont en cours de finalisation cette année les ventes de l'ancien logement du service économique régional à Séoul (7,8 M€) et de l'ancien logement du consul général à Barcelone (2,2 M€). Sont encore prévues les ventes de la villa Westlands à Nairobi (1,1 M€) et de la villa du service économique en Indonésie (3,3 M€).

Pour 2023, plusieurs ventes sont prévues : des parcelles à Dakar, des villas à Oslo et Tunis, des locaux de bureaux à St Pétersbourg, et à Bruxelles, l'ex-consulat général à Bilbao, d'anciens logements à Londres et au Brésil (Rio et Brasilia), l'annexe du Consulat à New York et la villa du service économique à New Delhi.

En 2022, une dotation exceptionnelle sur le CAS de 36 M€, sans contrepartie de remboursement attendue n'a pas été versée et pourrait être reprogrammée en 2023 . Or, en 2023, les marges de manoeuvre sur le CAS seront réduites, car les droits de tirage disponibles seront préemptés pour le financement du projet d'extension-réhabilitation de l'Aile des Archives (ERA) comme le souligne votre commission depuis des années. La phase travaux d'ERA est actuellement chiffrée à 60,8 M€ sans préjudice d'éventuels surcoûts liés à l'envolée des cours des matières premières et de l'énergie, ainsi qu'à d'autres aléas inhérents à une opération de cette envergure.

Un rebasage budgétaire des crédits immobiliers à augmenter, notamment en autorisations de paiement

Le financement par cessions appauvrit l'État et est en voie d'essoufflement au point qu'il est désormais nécessaire , pour pallier le manque à financer dû aux cessions non réalisées , d'augmenter les crédits budgétaires. Le financement budgétaire doit être privilégié par rapport au financement sur produits de cessions.

La LFI pour 2022 prévoyait l'inscription de 41,7 M€ de CP consacrés à l'entretien lourd à l'étranger . Les autorisations d'engagement étaient strictement égales aux CP ce qui ne permettait pas la programmation pluriannuelle des travaux prévus par le schéma directeur immobilier pluriannuel pour l'étranger (SDIPE). Cette dotation était insuffisante.

En LFI 2023, 50,2 M€ de CP et 56,7 M€ d'AE sont prévus . L'écart entre les AE est les CP ne permet toujours pas la programmation pluriannuelle des travaux .

De plus, la dotation budgétaire annuelle doit être fixée à un niveau nettement supérieur et correspondant aux besoins, c'est-à-dire au moins 80 M€ de CP par an et un niveau largement supérieur d'AE, soit 90 M€ , afin de permettre la réalisation des schémas pluriannuels de stratégie immobilière.

Enfin, le système de financement des dépenses de sécurisation du réseau par avance des crédits du CAS marque le pas : les produits de cessions sont difficiles à réaliser en période de pandémie, de guerre et d'inflation. Le plan pluriannuel de cessions décidé en 2019 dans le cadre du remboursement de « l'avance » de sécurité (67,8 M€) comportait une liste de 29 biens à vendre dont 9 ont été effectuées. En 2022, l'intégralité des crédits devrait être engagée d'ici la fin de l'année. La consommation des CP est à ce jour de 40,6 M€.

Le montant total des produits de cessions escomptés s'élève à 168 M€, dont 67,8 M€ consacrés au remboursement de l'avance de sécurité. Les produits de cessions restants seront quant à eux réaffectés au MEAE et contribueront au financement des opérations. L es droits de tirage disponibles sont fléchés vers l'opération d'extension et réhabilitation de l'aile des archives sur le site du Quai d'Orsay, dite QO XXI et désormais ERA.

Faute de ressources suffisantes sur le CAS 723 pour engager de nouvelles opérations, par exemple celles décidées dans le cadre des schémas directeurs immobiliers à l'étranger, aucune autre programmation n'a eu lieu sur ce programme en 2020, en 2021, en 2022. Aucune opération nouvelle n'est prévue pour 2023.

La gestion du CAS 723 doit donc être rénovée.

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