B. DES ASSISES DE LA CONSTRUCTION EN OUTRE-MER SONT NÉCESSAIRES

Dans un contexte de multiples freins à la production et la rénovation, la rapporteure renouvelle sa proposition, issue du rapport sénatorial de 2021 susmentionné, d'organiser des assises de la construction en outre-mer , permettant à l'ensemble des acteurs de partager des constats et travailler en commun à des solutions pour enfin répondre à une demande forte de la population ultramarine.

Recommandation 1 : Organiser à l'occasion de la préparation du PLOM 3 des assises de la construction en outre-mer.

Dans la mesure où 70 % des ménages des DROM sont éligibles au logement très social, c'est sur ces derniers que les efforts doivent être particulièrement accentués. L'objectif de 30 % de LTS financés n'est malheureusement pas atteint 10 ( * ) , il doit pourtant être prioritaire pour l'année 2023, et plus généralement dans les réflexions qui s'engageront autour du PLOM 3.

Recommandation 2 : Concentrer les objectifs de construction dans le cadre du PLOM 3 sur les besoins en logements très sociaux.

Bien qu'une amélioration ait pu être observée en 2021, avec une surconsommation des AE de la LBU, les CP ont, eux, fait l'objet d'une nouvelle sous-consommation (147M€ sur les 177 disponibles). La Direction du budget (DB) indique qu'une nouvelle sous-consommation pour 2022 est probable. Les raisons de cette sous-consommation, comme l'indique le rapport sur la politique du logement en outre-mer du Sénat de juillet 2021, sont multiples et appellent une variété de réponses.

L'accès et le coût du foncier constituent de plus en plus des freins à la réalisation des opérations . À ce titre, l'agrément Organisme foncier solidaire (OFS) des Sociétés d'économie mixte (SEM) d'outre-mer pourrait permettre, au travers du bail réel solidaire, de garantir un encadrement du prix de revente des logements, en dissociant le foncier, propriété de l'OFS et le bâti, proposé à l'achat. La rapporteure, co-auteure du rapport sur le logement en outre-mer, invite donc le Gouvernement à avancer sur ce sujet, conformément à la proposition 25 du rapport, tout en étant attentif à ce que le foncier acquis soit bien mobilisé en priorité pour le développement du parc social et très social.

Recommandation 3 : Permettre aux SEM d'outre-mer d'être agréées OFS.

La réalisation des opérations est également ralentie par le coût et la rareté des matériaux de construction, bien souvent importés depuis l'Europe . À ce titre, la rapporteure souligne la difficulté d'établir un constat partagé entre les acteurs du logement social d'une part, et la DGOM de l'autre, pour laquelle la hausse des prix serait modeste, et limitée à certains matériaux. Certains acteurs centraux du logement social en outre-mer ne semblent pas partager cette analyse, faisant le constat d'augmentations fin 2021 de l'ordre de 3 à 5 %, et fin 2022 de 5 à 10 %. Ces augmentations, dans un contexte de plafonnement des loyers, conduisent nécessairement à bouleverser les équilibres précaires nécessaires pour boucler les opérations, notamment dans le cas des logements très sociaux, pour lesquels les loyers d'atterrissage pourraient rapidement ne plus correspondre aux situations de précarité des demandeurs. Symptôme d'une situation qui se tend, l'USH fait état d'une multiplication d'appels d'offre infructueux.

Ce constat est du reste assez similaire concernant les opérations de rénovations / réhabilitations, dont le financement s'avère de plus en plus compliqué pour les programmes situés hors zone Quartier politique de la ville (QPV), et ne bénéficiant donc pas du crédit d'impôt prévu par l'État. Or, la rénovation est une nécessité pour certains territoires faisant face au vieillissement de leur population (Guadeloupe, Martinique) ainsi que pour éviter le déclassement de quartiers entiers souvent situés en centre-ville. De plus, le coût d'une rénovation demeure inférieur à celui d'une destruction / reconstruction à neuf . En moyenne, le prix de revient d'un logement locatif social s'établit à 170 000€ pour les cinq DROM, quand le coût d'une réhabilitation s'établit lui à 41 500€ 11 ( * ) .

Face à cette situation , la rapporteure souligne d'une part la nécessité de travailler sur le prix des matériaux, notamment en avançant sur les équivalences entre les normes européennes (CE) et étrangères , problématique prégnante dans les DROM, particulièrement en Guyane. Des auditionnés soulignaient d'ailleurs que certains matériaux locaux étaient en réalité mieux adaptés aux circonstances climatiques des territoires que des matériaux acheminés à grands frais depuis l'Europe tempérée. À ce titre, il convient de se féliciter du travail mené par le ministère pour établir des référentiels de matériaux biosourcés présents sur les territoires, ainsi que l'introduction prochaine de marquages spécifiques aux DROM, en substitution du marquage CE. Ces processus sont cependant trop lents et doivent s'accélérer pour aboutir dans les prochains mois.

Recommandation 4 : Accélérer les procédures en cours pour permettre l'utilisation de matériaux de production locaux ou provenant de l'environnement régional.

D'autre part, concernant la réhabilitation, la rapporteure invite l'État à soutenir la proposition visant à permettre aux propriétaires modestes de réhabiliter leur logement par le biais de l'investissement fiscal . En effet, à l'heure actuelle, l'Agence nationale pour l'habitat (ANAH), chargée de l'amélioration du parc privé, ne peut, en outre-mer intervenir qu'au bénéfice des propriétaires bailleurs.

Recommandation 5 : Étendre la réduction d'impôt prévue au VI bis de l'article 199 undecies C du code général des impôts aux propriétaires occupants modestes.


* 10 Dans sa contribution, l'USH indique que près de 80 % des demandeurs de logement social attendent un LTS.

* 11 Réponse au questionnaire budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2023.

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