III. UNE REMONTÉE DES DÉFICITS DÈS 2024, UNE DÉGRADATION PERSISTANTE DES COMPTES SOCIAUX

Selon les prévisions pluriannuelles figurant à l'annexe B du projet de loi, le déficit de la sécurité sociale se creuserait à nouveau dès 2024 pour se situer autour de 12 milliards d'euros à partir de 2025.

Prévisions et objectifs pour 2023 à 2026

Recettes, dépenses et solde des régimes obligatoires de base et du FSV

(en milliards d'euros)

2023

2024

2025

2026

Recettes

594,7

618,8

638,0

657,3

Dépenses

601,9

627,4

650,5

669,0

Solde

- 7,2

- 8,6

- 12,5

- 11,7

Source : annexe B au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023

A. UNE TRAJECTOIRE DE DÉPENSES CONDITIONNÉE À L'ÉVOLUTION MAÎTRISÉE DES PRESTATIONS D'ASSURANCE MALADIE

Après une augmentation limitée à 2,1 % en 2023, en raison de dépenses de la branche maladie en diminution, les dépenses de la sécurité sociale progresseraient de 4,2 % en 2024, de 3,7 % en 2025 puis de 2,8 % en 2026, soit un rythme très légèrement inférieur à celui du PIB en valeur compte tenu des hypothèses de croissance et d'inflation hors tabac.

1. Une croissance soutenue des dépenses des branches famille, vieillesse et autonomie

La branche famille , dont les dépenses augmenteraient fortement en 2023 en raison des transferts de charges provenant de la branche maladie et de la revalorisation de l'allocation de soutien familial, connaîtrait une progression soutenue de ses dépenses à compter de 2024 .

La création d'un service public de la petite enfance , avec le développement de nouvelles places en crèches, représenterait un coût de 300 millions d'euros en 2024 pour une montée en charge à 900 millions d'euros à l'horizon 2027.

L'article 26 du projet de loi de financement prévoit également une modification du mode de calcul du complément de mode de garde (CMG) , afin de favoriser le recours des familles modestes à un assistant maternel par un reste à charge aligné sur celui des crèches, et son extension aux enfants âgés de 6 à 12 ans pour les familles monoparentales. Cette mesure est toutefois subordonnée à un décret d'application devant intervenir au plus tard en 2025. Le Gouvernement n'a pas prévu d'impact financier avant 2025 20 ( * ) .

S'agissant de la branche vieillesse , l'annexe B au projet de loi considère qu'elle « bénéficierait de l'objectif d'élévation progressive de l'âge effectif de départ sur le quinquennat » tout en soulignant qu'elle serait affectée « par les effets démographiques du vieillissement (augmentation de la taille des générations qui partent à la retraite) ».

Il a été confirmé au rapporteur pour avis que cette trajectoire inclut bien « de manière conventionnelle » le rendement financier d'une réforme des retraites , mais le Gouvernement ne précise pas, dans l'évolution des dépenses, la part prise par cette réforme et celle qui résulte du relèvement de l'âge effectif de départ en retraite lié à des mesures déjà en vigueur, notamment la majoration progressive de la durée d'assurance requise pour l'obtention d'une pension à taux plein.

La prise en compte, même de manière conventionnelle, d'une modification des paramètres influant l'âge de départ, souligne d'autant plus le rythme élevé de progression des dépenses de la branche vieillesse en 2024 (+ 6 %) et en 2025 (+ 4,7 %), après une augmentation de 4,4 % en 2023, même s'il ralentit en 2026 (+ 3,4 %).

Le rapport de l'annexe B indique qu'« à partir de 2024, à législation inchangée, les prestations continueraient d'être portées par le contexte d'inflation persistant, mais avec un effet retard moyen d'une année pour les pensions et les autres prestations, alors que les recettes réagiraient davantage au contexte contemporain de l'année ». Cet effet est particulièrement sensible pour la branche vieillesse, comme pour la branche famille.

Les dépenses de la branche autonomie seraient marquées par les effets de l'objectif de création, à l'horizon 2030, de 50 000 postes supplémentaires d'aides-soignants et d'infirmiers dans les EHPAD, et de l'accroissement des moyens consacrés au maintien à domicile. Cette branche bénéficiera à compter de 2024 d'une fraction supplémentaire de 0,15 point de CSG 21 ( * ) .

2. Un objectif d'évolution maîtrisée de l'Ondam

Selon les perspectives pluriannuelles associées au projet de loi, l'Ondam progresserait de 2,7 % en 2024 et en 2025, puis de 2,6 % en 2026 et en 2027 .

Dans le rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, le Gouvernement précise que « cette modération sera permise notamment par la maîtrise de certaines typologies de dépenses de soins de ville et de produits de santé, ainsi que le développement de la politique de prévention ».

Le Haut Conseil des finances publiques observe que « les dépenses d'assurance maladie dans le champ de l'ONDAM (+ 2,7 % en 2024 et 2025 puis 2,6 % en 2026 et 2027) sont inscrites en progression sensiblement moins rapide que le PIB (+ 4,1 % puis + 3,5 %, 3,3 % et 3,4 %), ce qui s'est rarement produit par le passé ». Cela suppose , à ses yeux « une action résolue pour freiner la dépense, en particulier de soins de ville , malgré l'impact haussier du vieillissement de la population et du progrès technique, dont les modalités ne sont pas documentées dans le projet de loi de programmation » 22 ( * ) .

La Cour des comptes souligne pour sa part, en ce qui concerne les objectifs d'évolution des dépenses d'assurance maladie, que leur « niveau nominal est équivalent à celui des années précédant la crise sanitaire (2,6 % à 2,7 %) mais est en réalité plus exigeant, dans le contexte d'une inflation plus élevée » 23 ( * ) .

Alors qu'un certain nombre d'économies sous-tendant l'évolution de l'Ondam en 2023 ne sont pas acquises, des efforts supplémentaires de maîtrise des dépenses d'assurance maladie seront nécessaires sur chacune des quatre années suivantes pour tenir un tel objectif.


* 20 Pour la branche famille, l'impact financier serait de 474 millions d'euros en 2025 et 632 millions d'euros en 2026.

* 21 En application de l'article 3 de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l'autonomie.

* 22 Avis n° HCFP-2022-5 relatif au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 - 21 septembre 2022 (page 17).

* 23 Cour des comptes - Rapport annuel sur les lois de finances de la sécurité sociale - octobre 2022 (page 62).

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