EXAMEN DES ARTICLES

Article 6 (délégué)

Règles d'indexation des loyers et des bases de calcul
des aides personnelles au logement (APL)

Cet article vise à fixer et limiter l'indexation des loyers et des bases de calcul des APL à 3,5 %.

La commission a adopté un amendement COM-220 du rapporteur supprimant les exceptions et modulations territoriales du plafond de hausse des loyers.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Une indexation fondée sur l'IRL

Le parc locatif privé compte 7,4 millions de logements, le parc social 5,4 millions.

Par ailleurs, on dénombre 6,4 millions de ménages bénéficiaires des APL dont 6,1 millions de locataires, 300 000 étant des accédants à la propriété.

A. La révision des loyers dans le parc privé

• La libre fixation du loyer

Le principe est la liberté de fixation du loyer par les parties au contrat , conformément au respect des principes constitutionnels de propriété privée et de la liberté contractuelle (articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789) et qui est traduit dans l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.

Cette liberté est encadrée en cours de bail, lors de son renouvellement et à la relocation. S'y ajoutent des obligations spécifiques aux logements énergivores.

• La révision en cours de bail

Habituellement, le loyer peut être révisé annuellement dans la limite de l'indice de référence des loyers (IRL) défini à l'article 17-1 de la loi de 1989. L'IRL correspond à la moyenne, sur douze mois, de l'indice des prix à la consommation hors tabac et loyer. Cette révision intervient si elle figure au contrat et à la date prévue par celui-ci.

Une augmentation du loyer peut également intervenir consécutivement à des travaux si le bail le prévoit.

• L'encadrement lors du renouvellement

L'augmentation du loyer lors du renouvellement du bail entre les mêmes bailleur et locataire n'est autorisée que s'il est manifestement sous-évalué. Elle s'effectue alors en se fondant sur les loyers du voisinage.

• L'encadrement de la revalorisation des loyers à la relocation en zone tendue

Dans les 28 agglomérations situées en zone de tension locative 1 ( * ) , l'augmentation du loyer entre deux locataires est encadrée par décret en application de l'article 18 de la loi de 1989.

Il ne peut excéder le montant du dernier loyer sauf dans trois cas :

Lorsque le loyer n'a pas été révisé depuis un an, la révision se fait alors sur la base de l'IRL.

Lorsque le loyer est manifestement sous-évalué ou que le propriétaire a effectué des travaux importants, la revalorisation s'effectue en référence au loyer des logements comparables dans les environs ou du montant des investissements.

Par ailleurs, dans les zones tendues où est expérimenté l'encadrement des loyers en application de l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi ELAN 2 ( * ) , le loyer ne peut dépasser le montant du loyer fixé par arrêté préfectoral en fonction du type de logement et de sa localisation.

• L'interdiction de toute augmentation dans les « passoires thermiques »

Enfin, en application de l'article 159 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, toute augmentation de loyer est interdite en cours de bail, lors du renouvellement et à la relocation dans les logements classés F et G à partir du 25 août 2022.

B. La révision des loyers dans le parc social

La fixation et la révision des loyers dans le parc social obéissent à des règles fondamentalement différentes.

En fonction d'une convention entre l'État et le bailleur social, le loyer maximal est fixé en fonction du financement octroyé et de sa localisation. Le type de financement est déterminant puisqu'il indique le caractère plus ou moins social du logement : PLAI (prêt locatif aidé d'intégration), PLUS (prêt locatif à usage social) et PLS (prêt locatif social) 3 ( * ) .

Le loyer est révisé chaque 1 er janvier dans la limite de l'IRL du deuxième trimestre de l'année précédente, soit 3,6 % cette année. En cas de travaux de réhabilitation et après autorisation administrative, la révision peut être plus importante.

Cette révision s'effectue en application de l'article L. 353-9-2 du code de la construction et de l'habitation (CCH) pour les logements conventionnés à l'APL et L. 442-1 du CCH pour les autres.

C. La réévaluation des APL

Les aides personnelles au logement (APL) regroupent trois allocations : l'aide personnalisée au logement, l'allocation de logement familiale (ALF) et l'allocation de logement sociale (ALS) selon les bénéficiaires pour lesquelles elles ont été créées au fil du temps.

Elles sont calculées en prenant en compte deux groupes de critères : les paramètres représentatifs de la dépense et ceux relatifs aux ressources.

Les paramètres de la dépense de logement sont revalorisés au 1 er octobre. Il s'agit notamment du plafond de loyer et du forfait de charges. Ces paramètres sont revalorisés sur le fondement de l'IRL du deuxième trimestre de l'année qui est connu mi-juillet. Comme indiqué précédemment, il s'élève cette année à 3,6 %. Ce mode de revalorisation est fixé par la loi à l'article L. 823-4 du CCH.

Le plafond de loyer retenu pour le calcul varie en fonction de la zone géographique et de la composition du ménage (valeurs au 1 er octobre 2021) 4 ( * ) :

Zone

Personne seule

Couple sans personne à charge

Personne seule ou couple avec une personne à charge

Par personne à charge supplémentaire

1

298,07 €

359,49 €

406,30 €

+ 58,95 €

2

259,78 €

317,97 €

357,80 €

+ 52,08 €

3

243,48 €

295,15 €

330,94 €

+ 47,43 €

Le montant du forfait de charges est fixé à 53,99 euros pour une personne seule, puis 12,24 euros par personne à charge supplémentaire (montants en vigueur depuis le 1 er octobre 2020).

Les paramètres relatifs aux ressources sont revalorisés le 1 er janvier . Ils comprennent des forfaits de ressources pour les étudiants et un montant dit « R0 » du barème locatif. Ces deux forfaits obéissent chacun à une règle différente de revalorisation. Le forfait étudiant est revalorisé sur la base de l'IRL du 3 e trimestre tandis que le R0 est revalorisé sur le dernier indice des prix à la consommation hors tabac (IPC HT) du troisième trimestre, donc du 1 er octobre . Ces modalités sont définies par voie réglementaire aux articles D. 823-17 et D.  822-21 du CCH.

D. Le cas des fermages et de la location-accession

La révision des loyers des locaux d'habitation dans le cadre du fermage est réalisée sur la base de l'IRL en application de l'article L. 411-1 du code rural.

Dans le cadre d'une location-accession, celle du montant des redevances et du prix de vente restant dû est elle aussi capée sur l'IRL en vertu de l'article 7 de la loi n° 84-595 définissant la location-accession à la propriété immobilière.

II. Le dispositif envisagé - Une limitation des révisions à 3,5 %

L'IRL reproduisant, même de manière décalée et lissée, l'inflation, il fallait s'attendre à de fortes hausses menaçant le pouvoir d'achat des ménages locataires qui sont très majoritairement moins aisés que les bailleurs et qui sont plus jeunes. Seuls 5 % des moins de 30 ans sont propriétaires.

Sur la base d'une hausse de 4,5 % de l'IRL, le Gouvernement estime que les locataires devraient débourser 3,5 milliards d'euros supplémentaires se répartissant entre 2/3 pour le parc privé et 1/3 pour le parc social.

Le Gouvernement propose donc de limiter cette hausse à 3,5 % et d'augmenter dans la même proportion les paramètres de référence des APL. Cela permettrait de réduire la charge de 536 millions d'euros dans le parc privé et de 248 millions d'euros dans le parc social par rapport à cette anticipation et beaucoup plus si l'inflation devait augmenter plus rapidement.

A. Plafonnement de la hausse de l'IRL à 3,5 % pour un an

Le dispositif propose de plafonner à 3,5 % la hausse de l'IRL entre le troisième trimestre 2022 et le deuxième trimestre 2023.

Cela permet de limiter et de rendre prévisible les hausses.

Cela se fait également sans porter atteinte à la possibilité d'une revalorisation du loyer en cas de travaux d'amélioration alors que d'importants chantiers d'amélioration énergétique sont à prévoir.

B. Augmentation simultanée des paramètres de calcul des APL

Afin d'accompagner cette évolution des loyers, il est proposé de revaloriser les paramètres de calcul des APL au 1 er juillet avec trois mois d'avance . Il est important de noter que ce n'est pas le montant total des APL qui augmente uniformément mais certains éléments de leur formule de calcul (à la différence par exemple de la baisse de 5 euros en 2017) de telle sorte qu'ils n'ont pas le même impact pour tous et que tous les allocataires n'en bénéficieront pas.

Par la loi, les loyers plafonds et les forfaits de charges seraient réévalués de 3,5 % . L'augmentation du plafond de loyer ne va bénéficier qu'aux allocataires qui sont aujourd'hui au-dessus de celui-ci (environ 60 %) et donc moins aux locataires du parc social. Tandis que la hausse du forfait de charges va bénéficier à tous.

Selon l'étude d'impact, ces hausses se traduiraient par 10 à 14 euros d'APL en plus par mois selon les situations.

Par décret, le Gouvernement augmentera de 4 % le R0 (paramètre de ressources). La revalorisation du revenu de référence , qui fonctionne comme un abattement, bénéficiera à ceux dont les ressources sont inférieures à ce seuil et pas aux autres. Cela aboutirait à une hausse de 14 à 23 euros par mois qui cette fois-ci sera plus large.

Au final, ces hausses bénéficieront à 90 % des ménages allocataires .

L'étude d'impact présente des cas types en zone II où l'impact de la réforme est favorable mais qui permettent de toucher du doigt la grande diversité des situations.

Cas types en zone II - Selon l'étude d'impact

AL locative zone II

Base ressources

Loyer

Aide janvier 2022

Aide juillet 2022

Avantage revalo juillet sans R0

Couple avec 2 enfants

14 000

625

285 €

300 €

15 €

Couple sans enfants

9400

500

238 €

249 €

11 €

Isolé avec un enfant

12 000

553

262 €

275 €

13 €

Isolé sans enfants

7800

400

176 €

186 €

10 €

Couple avec 3 enfants

14 900

654

353 €

368 €

15 €

Cas type en zone II - AL

AL locative zone II

Base ressources

Loyer

Aide janvier 2022

Aide juillet 2022 avec R0

Avantage revalo juillet avec R0

Couple avec 2 enfants

14 000

625

285 €

308 €

23 €

Couple sans enfants

9400

500

238 €

258 €

20 €

Isolé avec un enfant

12 000

553

262 €

284 €

22 €

Isolé sans enfants

7800

400

176 €

190 €

14 €

Couple avec 3 enfants

14 900

654

353 €

376 €

23 €

Étudiant boursier en foyer

0

450

54 €

54 €

- 0 €

Étudiant boursier locataire

6300

400

222 €

231 €

9 €

Étudiant non boursier locataire

7800

400

176 €

181 €

5 €

La zone II correspond aux grandes villes et une partie de la région Île-de-France (en bleu sur la carte) :

Source : DGLAN.

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

A. En commission, des amendements rédactionnels

Lors de son examen par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, six amendements rédactionnels du rapporteur ont été adoptés.

Un grand nombre d'amendements ont été déclarés irrecevables au regard du texte déposé ou en raison du non-respect de l'article 40 de la Constitution.

B. En séance, des amendements de différenciation territoriale de la hausse des loyers

Lors de son examen en séance publique, l'Assemblée nationale a adopté trois amendements visant à limiter ou moduler la hausse des loyers dans les zones de revitalisation rurale, outre-mer et en Corse.

• Zones de revitalisation rurale

L'amendement 275 de Charles de Courson crée un II bis à l'article 6 visant à permettre, dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A du code général des impôts, au représentant de l'État, par arrêté, de moduler, dans la limite de 1,5 %, la variation mentionnée au II du présent article. Cette modulation serait opérée après consultation pour avis du conseil départemental concerné. L'arrêté du préfet prendrait en compte les critères suivants :

1° Les caractéristiques démographiques et sociales de la population, dont le taux de pauvreté de la région concernée, entendu comme la part de la population dont le revenu est inférieur à 60 % du revenu médian ;

2° Les caractéristiques du parc de logements privé et du parc de logements social ;

3° L'écart entre l'inflation annuelle constatée en moyenne en France métropolitaine et sur le territoire du département concerné.

Ces critères devront être précisés par arrêté du ministre chargé de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Selon les auteurs, dans ces zones où il n'y a pas de tension locative et où la hausse des loyers et des charges est moins élevée que sur le reste du territoire, un plafonnement de la revalorisation des loyers à 1,5 % serait légitime d'autant que les revenus y sont peu élevés.

• Outre-mer

L'amendement 993 de Charles de Courson crée un II ter à l'article 6 visant à limiter à 2,5 % la revalorisation maximale de loyers dans les départements et régions d'outre-mer relevant de l'article 73 de la Constitution. Par le sous-amendement n° 114, cette limitation est cantonnée, comme pour le reste du territoire, entre le 3 e trimestre 2022 et le 2 e trimestre 2023.

Cette mesure serait justifiée par la cherté de la vie et la pauvreté de ces territoires.

• Corse

L'amendement 767 de Michel Castellani, sous-amendé par Charles de Courson (n° 1154), afin de le borner dans le temps, crée un II quater à l'article 6.

Comme pour les ZRR, il prévoit que dans la collectivité de Corse, le représentant de l'État pourrait, par arrêté, moduler, dans la limite de 1,5 %, la variation plafond de l'indice des loyers. Cette modulation serait opérée après consultation pour avis de l'assemblée de Corse. Elle prendrait en compte les critères suivants :

1° Les caractéristiques démographiques et sociales de la population locale, dont le taux de pauvreté de la collectivité de Corse, entendu comme la part de la population dont le revenu est inférieur à 60 % du revenu médian ;

2° L'existence d'un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d'acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d'emménagements annuels dans le parc locatif social ;

3° L'écart entre l'inflation annuelle constatée en France métropolitaine et sur le territoire de la collectivité de Corse.

Ces critères devront être précisés par arrêté du ministre chargé de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

IV. La position de la commission - Un partage de l'effort qui ne résout pas tous les problèmes

A. Une solution de partage de l'effort

Au regard d'une augmentation anticipée de l'IRL de 4,5 % au total, telle que prévue par l'étude d'impact du projet de loi, le Gouvernement estime le manque à gagner par les propriétaires à 705 millions d'euros .

Pour l'État, l'impact est une surcharge de 169 millions d'euros qui se répartit entre la revalorisation anticipée des paramètres de dépense (plafond de loyer et forfait charges) pour 114 millions d'euros et la hausse du paramètre de ressources (R0) pour 55 millions d'euros. Le mécanisme mis en place entraîne aussi un ralentissement de la dépense d'APL au regard de la hausse des loyers de l'ordre de 27,6 millions d'euros. La charge budgétaire de l'État devrait donc être de l'ordre de 141 millions d'euros .

Les organisations de propriétaires estiment que le compromis est équilibré . Un gel des loyers aurait été une perte beaucoup plus importante et aurait handicapé la rénovation thermique de logements qui est l'une des solutions de moyen terme face à la hausse des coûts de l'énergie. Le gel des loyers aurait d'ailleurs aussi bien bénéficié aux locataires aisés qu'à ceux qui rencontrent des difficultés. Du côté des bailleurs, si une petite minorité (100 000 sur 3 millions environ) possède la moitié du parc, un tiers est au régime du micro foncier (moins de 15 000 euros de revenus locatifs) et deux tiers sont retraités.

Ils ont donc approuvé la solution proposée par le Gouvernement visant à plafonner la hausse sur un an et à soutenir les ménages allocataires des APL. Il faut souligner que l'IRL est en lui-même un bouclier anti-inflation car il la retranscrit, la lisse et la fige sur une année.

L'USH, représentant les bailleurs sociaux, se satisfait elle-aussi de cette évolution estimant que la mesure est plutôt favorable aux locataires et que la revalorisation à un niveau satisfaisant des paramètres de calcul des APL tranche avec les années antérieures où celle-ci avait été systématiquement minorée. Pour les bailleurs sociaux, un gel des loyers aurait été une seconde réduction de loyer de solidarité (RLS) difficilement supportable.

Pour plusieurs associations représentatives de locataires, il n'en est pas de même . Elles plaidaient en faveur du gel des loyers et d'une forte hausse des APL. Plusieurs souhaitent également un encadrement beaucoup plus strict des loyers.

B. Qui ne résout pas tous les problèmes

Les revalorisations proposées aujourd'hui par le Gouvernement, si elles apportent une solution ponctuelle, sont loin de répondre à toutes les attentes compte tenu des mesures de réduction intervenues antérieurement au détriment des APL et ne ferment pas le débat en cas de hausse plus importante de l'inflation.

En effet, il faut tout d'abord rappeler qu'au cours du quinquennat précédent environ 15 milliards d'euros d'économie ont été réalisés sur les APL du fait de la réduction de 5 euros, de la réduction de loyer de solidarité (RLS) et du calcul des APL sur les ressources contemporaines.

De plus, la méthode de calcul des APL est de plus en plus éloignée de la réalité des charges des locataires . Comme indiqué, les APL sont calculées à partir d'un loyer plafond qui n'a pas été revalorisé aussi rapidement que les loyers. Il est donc de plus en plus fictif au regard du loyer effectivement payé. Par rapport à une base 100 en 2000, le plafond de référence est de 123, tandis que la réévaluation sur la base de l'IRL a porté les loyers PLUS et PLAI à 142.

Il en est de même du forfait de charges dont l'augmentation a été deux fois moins rapide que la dépense réelle. Il ne couvre plus que 40 % des charges effectives .

Par ailleurs, si l'inflation devait être plus importante qu'estimée, se poserait de nouveau la question du partage de la charge entre l'État, les bailleurs et les locataires.

Aujourd'hui, les bailleurs acceptent de ne répercuter que la moitié de la hausse attendue. L'équation pourrait être différente dans quelques mois.

Cependant, il est nécessaire de rechercher le compromis le plus approprié, qui semble atteint ici , même si le choix de l'IRL du 2 e trimestre, soit 3,6 %, aurait sans doute été plus simple et plus clair en raison de son rôle d'ores et déjà prévu par les textes sur les parcs privés et sociaux.

Il faut ensuite rester dans les limites permises par l'article 40 de la Constitution qui ne permet aucun accroissement de charges , ce qui rend irrecevable, quoiqu'on en pense, tous les amendements visant à augmenter plus fortement les paramètres de calcul des APL ou à supprimer la baisse de 5 euros de 2017. La suppression de la réduction de 5 euros, ce sont environ 400 millions d'euros supplémentaires. La hausse du forfait de charges de 25 % est estimée quant à elle à 1 milliard d'euros.

C. Une différenciation territoriale difficile à appliquer et pas nécessairement justifiée

Par nature, le compromis proposé par le Gouvernement ne satisfait pas pleinement toutes les parties. L'Assemblée a souhaité créer la possibilité de différencier l'ampleur de l'augmentation des loyers autorisée dans certains territoires. Ces différenciations sont apparues difficilement applicables et pas nécessairement justifiée.

• Dans les ZRR

Les zones de revitalisation rurale (ZRR) visent à aider le développement des territoires ruraux principalement à travers des mesures fiscales et sociales. L'objectif est de concentrer les mesures d'aide de l'État au bénéfice des entreprises créatrices d'emplois dans les zones rurales les moins peuplées et les plus touchées par le déclin démographique et économique.

Elles ont été créées par la loi d'Orientation pour l'Aménagement et le Développement du Territoire (LOADT) du 4 février 1995.

La réforme des ZRR, votée en loi de finances rectificative pour 2015 (article 1465A du code général des impôts), a simplifié les critères de classement des territoires pris en compte. Les critères sont désormais examinés à l'échelon intercommunal et entrainent le classement de l'ensemble des communes de l'EPCI.

Pour être classé en ZRR au 1 er juillet 2017, l'EPCI doit avoir à la fois :

• une densité de population inférieure ou égale à la médiane des densités par EPCI ;

• un revenu fiscal par unité de consommation médian inférieur ou égal à la médiane des revenus fiscaux médians.

Pour les DOM, les communes classées en ZRR sont définies par la loi.

La loi de finances pour 2018 a créé une nouvelle condition de classement en ZRR, relative à la baisse de population au niveau de l'EPCI depuis 40 ans. Seules les communes de l'EPCI de Decazeville communauté sont concernées.

Les communes précédemment classées en ZRR et qui ne le sont plus bénéficient du maintien des effets du classement en ZRR :

• pour les communes de montagne en application de la loi de modernisation de développement et de protection des territoires de montagne du 28 décembre 2016 ;

• pour les autres communes en application de la loi de finances pour 2018.

Le classement des communes en ZRR est officiellement valable jusqu'au 31 décembre 2022.

Carte des ZRR selon l'Observatoire des territoires (ANCT)

Cette présentation des ZRR permet de faire ressortir plusieurs difficultés. Une modération des loyers n'entre pas dans l'objectif des ZRR. La carte des ZRR couvre une large partie du territoire métropolitain, de la Corse et de l'outre-mer. Elle ne semble pas cohérente avec les dispositions votées relatives à la Corse et à l'outre-mer. Elle conduirait à une fragmentation de la législation. Enfin, ce classement pourrait évoluer pendant la période de plafonnement des loyers.

Par ailleurs, le dispositif paraît très difficilement applicable en retenant une modulation en pourcentage et non en points de pourcentage, des critères complexes et aujourd'hui non définis et qui pourront très difficilement l'être à un horizon rapproché empêchant son application rapide.

Une telle disposition irait contre le principe de lisibilité de la loi, le taux plafond étant différent dans chaque département et ZRR. Elle pourrait ouvrir la voie à un contentieux important.

Enfin, on peut s'interroger sur la constitutionnalité d'une telle disposition au regard du principe d'égalité, les différences évoquées n'étant pas nécessairement suffisantes pour justifier un traitement particulier.

• Dans les DROM

Selon les dernières données de l'Insee, fin juin, alors que l'inflation était de 5,2 % en métropole, l'inflation constatée était de 3,8 % à La Réunion, de 3,5 % en Guyane, de 3,9 % en Guadeloupe, 4 % en Martinique et 6,2 % à Mayotte. Cette évolution part néanmoins sur une base plus élevée, le prix de beaucoup de produits étant affecté par les coûts de transport.

Si cette évolution plus lente de l'inflation pourrait justifier un traitement particulier dans des collectivités à statut spécial reconnu par la Constitution, il convient de rappeler que l'IRL s'y appliquait jusque-là comme sur le reste du territoire national.

Par ailleurs, selon les données disponibles, mais relativement anciennes (2019) et partielles, de l'Observatoire des loyers du ministère du logement, ces régions ne semblent pas frappées par une cherté particulièrement des loyers en s'inscrivant dans le bas de la fourchette nationale :

Par ailleurs, par rapport à la moyenne nationale (40,3 % de locataires en 2019), à l'exception de la Guyane (49,6 %) et La Réunion (45,4 %), la Martinique (37,9 %) et la Guadeloupe (36 %) comptent un pourcentage relativement faible de locataires de leur résidence principale selon les données Insee.

Ainsi, on peut se demander si limiter en outre-mer plus qu'en métropole la hausse des loyers est bien le bon outil pour agir en faveur du pouvoir d'achat dans ces territoires.

• En Corse

Au regard des différents éléments déjà évoqués, la disposition spécifique à la Corse présente les mêmes difficultés d'application que celle sur les ZRR car elle est complexe et les critères seront difficiles à définir dans un délai rapproché. En outre, la Corse ne bénéficie pas d'un statu constitutionnel propre.

En conséquence, la commission a adopté un amendement COM-220 du rapporteur de suppression des II bis , II ter et II quater .

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 6 bis (délégué) (supprimé)

Interdiction du complément de loyer dans des cas
de mauvais état du logement dans les agglomérations
expérimentant l'encadrement des loyers

Cet article vise à interdire la demande d'un complément de loyer dans des cas de mauvais état du logement dans les agglomérations participant à l'expérimentation de l'encadrement des loyers.

La commission a adopté un amendement COM-221 du rapporteur supprimant cet article.

La commission propose à la commission des affaires sociales de supprimer cet article.

I. La situation actuelle - Un complément de loyer déjà très encadré

A. Les principes de fonctionnement de l'encadrement des loyers

L'encadrement des loyers a pour but de réguler les augmentations de loyer afin d'en limiter les hausses dans les zones de fortes tensions et de permettre au plus grand nombre de se loger dans des conditions décentes à un prix non-excessif.

Une expérimentation a été instituée par l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) dans les zones tendues .

Cette expérimentation a remplacé le dispositif d'encadrement des loyers issu de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR). Il s'appliquait automatiquement dans les zones tendues. En effet, le Conseil constitutionnel (décision n° 2014-691 DC du 20 mars 2014) avait estimé que le législateur ne pouvait porter atteinte au droit de propriété que dans des conditions strictes et limitées. Il avait jugé que le dispositif d'encadrement des loyers, avec la fixation du loyer de référence majoré, impliquait que les catégories de logement et les secteurs géographiques devaient être définis finement et précisément pour permettre que la définition du loyer de référence soit en adéquation avec l'ensemble des caractéristiques qui déterminent habituellement la fixation du montant du loyer.

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions qui réservaient la possibilité d'un complément de loyer à des « caractéristiques de localisation ou de confort exceptionnelles par leur nature et leur ampleur ». En effet, le législateur ne saurait interdire que d'autres caractéristiques qui sont déterminantes pour la fixation du loyer et qui ne sont pas prises en compte pour la fixation du loyer de référence soient prises en compte pour la fixation du complément de loyer. En outre, le Conseil constitutionnel s'est opposé au dispositif qui prévoyait que le montant du loyer de référence majoré et le montant du loyer de référence minoré seraient fixés, non pas respectivement à + 20 % et - 30 % du loyer de référence, mais à l'intérieur de ces limites.

L'expérimentation prévue par la loi ELAN a une durée de huit ans 5 ( * ) soit jusqu'au 23 novembre 2026 inclus . Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents en matière d'habitat ou les collectivités nommément visées par la loi (ville de Paris, établissements publics territoriaux (EPT) de la métropole du Grand Paris, métropole de Lyon et métropole d'Aix-Marseille-Provence) pouvaient faire acte de candidature pendant un délai de quatre ans, qui sera échu par conséquent le 24 novembre 2022.

L'encadrement des loyers est en place à Paris (depuis juillet 2019), Lille (depuis mars 2020), Plaine Commune (juin 2021), Lyon et Villeurbanne (novembre 2021), Est Ensemble (décembre 2021), Montpellier et Bordeaux (juillet 2022).

Le périmètre, proposé par les collectivités territoriales ou leurs groupements pour la mise en place de l'expérimentation est délimité par décret et doit réunir quatre critères cumulatifs fixés par la loi :

1° un écart important entre le niveau moyen de loyer constaté dans le parc locatif privé et le loyer moyen pratiqué dans le parc locatif social ;

2° un niveau de loyer médian élevé ;

3° un taux faible de logements commencés, rapporté aux logements existants sur les cinq dernières années ;

4° des perspectives limitées de production pluriannuelle de logements inscrites dans le programme local de l'habitat (PLH) et de faibles perspectives d'évolution de celles-ci.

Sur ce périmètre, le préfet arrête chaque année un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, pour chaque secteur géographique et catégorie de logement :

- le loyer de référence est égal au loyer médian calculé à partir des niveaux de loyer constatés par l'observatoire local des loyers ;

- le loyer de référence majoré est égal au loyer de référence augmenté de 20 % ;

- le loyer de référence minoré est égal au loyer de référence diminué de 30 %.

Les niveaux de loyer sont constatés par un observatoire local des loyers agréé.

Lorsque le loyer excède le cadre ainsi tracé, le locataire peut exercer une action en diminution. Par ailleurs, le préfet peut mettre en demeure le bailleur de mettre en conformité le contrat de location et de rembourser au locataire les loyers trop-perçus. En cas d'inexécution de la mise en demeure, le préfet peut prononcer une amende administrative à l'encontre du bailleur.

B. Les règles régissant le complément de loyer et sa contestation par le locataire

La loi précise qu'un complément de loyer peut être appliqué au loyer de base tel que fixé par le préfet pour des logements présentant des caractéristiques de localisation ou de confort le justifiant, par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique .

Le montant du complément de loyer et les caractéristiques du logement le justifiant sont mentionnés au contrat de bail.

Lorsqu'un complément de loyer est appliqué, le loyer s'entend comme la somme du loyer de base et de ce complément. Un complément de loyer ne peut être appliqué à un loyer de base inférieur au loyer de référence majoré.

Le locataire qui souhaite contester le complément de loyer dispose d'un délai de trois mois à compter de la signature du bail pour saisir la commission départementale de conciliation .

En cas de contestation, il appartient au bailleur de démontrer que le logement présente des caractéristiques de localisation ou de confort justifiant ce complément.

En l'absence de conciliation, le locataire dispose d'un délai de trois mois à compter de la réception de l'avis de la commission départementale de conciliation pour saisir le juge d'une demande en annulation ou en diminution du complément de loyer.

II. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - L'interdiction de complément de loyer dans certains cas

Par un amendement 966 de William Martinet, l'Assemblée nationale a introduit en séance publique cet article 6 bis.

Venant compléter l'article 140 de la loi n° 2018-1021 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, il vise à interdire tout complément de loyer « lorsque le logement dispose de sanitaires sur le palier, de signes d'humidité sur certains murs, de problème d'isolation thermique des murs ou du toit, de fenêtres laissant anormalement passer l'air hors grille de ventilation, d'un vis-à-vis de moins de 10 mètres, d'infiltrations ou d'inondations provenant de l'extérieur du logement, de problème d'évacuation d'eau au cours des trois derniers mois, d'installation électrique dégradée ou de mauvaise exposition de la pièce principale. »

L'auteur déplorait que certains logements qui font l'objet de complément de loyer correspondent en réalité à des logements classés par l'Insee comme des logements « privés de confort ».

En séance, le rapporteur de la commission a reconnu que des bailleurs parfois peu scrupuleux avaient mis en place des compléments de loyer dans des situations qui ne correspondent clairement pas aux intentions du législateur mais que le juge avait eu l'occasion de les sanctionner.

Le juge a notamment eu l'occasion de préciser que :

- de simples travaux de rénovation du logement, par exemple, ne peuvent suffire à asseoir l'application d'un complément de loyer ;

- un complément ne peut pas non plus être exigé juste parce que le bien dispose d'une cuisine tout équipée ;

- un complément n'est pas applicable en cas de hauteur sous plafond caractéristique d'un appartement haussmannien ;

- un petit balcon, même en plein coeur de Paris, ne le justifie pas, pas plus que des moulures et des parquets.

Par ailleurs, le complément de loyer doit être expressément mentionné, chiffré et justifié dans le bail, ce qui permet d'éviter les abus.

III. La position de la commission - Suppression de précisions inutiles

La loi ne prévoit de complément de loyer que lorsque les conditions de confort ou de localisation le justifient .

Elle interdit donc déjà tout complément de loyer lorsque le logement présente des caractéristiques d'insalubrité .

Énumérer ces situations, d'ailleurs parfois de manière imprécise (traces d'humidité sur certains murs) ou avec excès de précision (10 mètres, 3 mois), complique la loi et son application en liant le juge ou en laissant de côté certains cas (infestation par des rongeurs ou des insectes par exemple). Ces nouvelles précisions ne sont donc pas indispensables.

C'est pourquoi, sur proposition du rapporteur (amendement COM-221), la commission a supprimé cet article.

La commission propose à la commission des affaires sociales de supprimer cet article.

TITRE II
PROTECTION DU CONSOMMATEUR
CHAPITRE IER

Résiliation des contrats
Article 7 (délégué)

Modalités de résiliation des contrats conclus par voie électronique

Cet article consacre la possibilité, pour un consommateur, de résilier un contrat de consommation par la voie électronique. Il prévoit à cet effet la mise en place, par le professionnel, d'une fonctionnalité dédiée, accessible gratuitement et en permanence, sur son site internet ou sur son application mobile. Il renvoie à un décret le soin d'édicter les spécifications techniques nécessaires. Initialement, cet article ne prévoyait une telle fonctionnalité que sous réserve que le contrat ait été conclu, en amont, par voie électronique, de telle sorte que seules les entreprises ayant la possibilité technique et financière de proposer une telle modalité de souscription soient soumises à l'obligation de proposer une modalité équivalente de résiliation.

Cet article supprime également les frais de résiliation de « deuxième année » en cas de résiliation avant échéance d'un contrat avec engagement de plus d'un an, sous réserve que le contrat ne soit pas « une offre groupée ». Il supprime également les frais de résiliation acquittés par le consommateur lorsque celui-ci est en situation de surendettement.

La commission a adopté deux amendements identiques dont un du rapporteur qui rétablissent le parallélisme des formes entre modalités de conclusion et de résiliation des contrats : le « bouton résiliation » devra être prévu lorsque le contrat peut être conclu au préalable par voie électronique, et non dans tous les cas, ce qui aurait fait peser de lourdes charges opérationnelles sur les petites entreprises.

Par ailleurs, la commission a adopté un amendement de M. Chaize qui, tout en maintenant le principe de la suppression des frais de résiliation de « deuxième année », précise que le consommateur, dans le cadre d'une offre groupée, peut toujours devoir s'acquitter de frais de résiliation sous réserve qu'ils soient inférieurs à 25 % du montant encore dû.

Elle a, enfin, adopté un amendement de M. Cardon qui prévoit l'entrée en vigueur de cet article au 1 er février 2023.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - L'absence d'un parallélisme des formes obligatoire entre conclusion et résiliation d'un contrat par voie électronique

Le droit de la consommation encadre de façon relativement précise les modalités de formation des contrats, notamment ceux conclus à distance 6 ( * ) et hors établissement 7 ( * ) , mais reste plus silencieux quant à leurs modalités de résiliation. Or, cette absence de précision est parfois source de difficultés pour les consommateurs qui souhaiteraient pouvoir résilier leurs contrats (d'abonnement internet, de plateforme de vidéo, d'abonnement téléphonique, etc.), les pratiques des professionnels divergeant d'une entreprise à l'autre.

Ainsi, les professionnels sont tenus de respecter diverses obligations d'information précontractuelle, précisément définies à l'article L. 221-5 du code de la consommation : ils doivent notamment fournir au consommateur, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, les caractéristiques essentielles du produit ou du service 8 ( * ) , la date de livraison, les informations relatives aux garanties, ou encore l'application ou non d'un prix personnalisé.

Le code de la consommation prévoit également des dispositions propres aux contrats conclus à distance, qui s'appliquent donc aux contrats conclus par voie électronique :

• le professionnel est tenu de fournir au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations dudit article L. 221-5 9 ( * ) ;

• il est tenu de lui fournir, dans un délai raisonnable après la conclusion du contrat (et au plus tard lors de la livraison du bien ou avant le début de l'exécution du service), la confirmation du contrat ainsi qu'un formulaire type de rétractation 10 ( * ) ;

• le professionnel est responsable de plein droit de la bonne exécution des obligations résultant du contrat conclu à distance 11 ( * ) .

En outre, des règles spécifiques s'appliquent à certains contrats ayant un objet particulier. C'est notamment le cas pour les contrats de fourniture de contenus numériques et de services numériques 12 ( * ) , et les contrats de services de communications électroniques 13 ( * ) .

En revanche, très peu de règles s'appliquent spécifiquement aux contrats conclus par voie électronique (ils sont régis, pour leur conclusion et leur exécution, par les dispositions susmentionnées en tant que contrats conclus à distance, mais sans que le fait qu'ils soient conclus par voie électronique n'emporte des dispositions particulières). Seul l'article L. 221-14, qui traite de la reconnaissance par le consommateur, lors de la commande passée par voie électronique, de son obligation de paiement, et de la fonction utilisée par le consommateur pour valider sa commande, s'applique uniquement aux contrats conclus par voie électronique.

L'étude d'impact du projet de loi note ainsi qu'« en l'état actuel du droit européen et national, aucune disposition, de portée générale, ne régit les modalités de résiliation des contrats conclus à distance par voie électronique ». Par conséquent, la possibilité pour un consommateur de résilier par voie électronique dépend des éléments du contrat signé conclu. Les pratiques des professionnels qui complexifieraient exagérément les modalités de résiliation peuvent certes être appréhendées dans le cadre du régime des pratiques commerciales agressives ; mais « l'appréciation de ces pratiques doit être réalisée au cas par cas : par conséquent, les pratiques agressives visant à entraver l'exercice du droit de mettre fin au contrat ne sont pas évidentes à caractériser ».

Or de fait, ainsi que l'a confirmé UFC Que Choisir au rapporteur, les obstacles pour un consommateur souhaitant résilier peuvent être nombreux, en raison de la « faiblesse » du cadre législatif en la matière :

• difficultés de savoir à qui s'adresser ;

• difficultés pour accéder aux modalités de résiliation sur un site en ligne ou une application mobile (qui implique de devoir contacter directement le professionnel, le délai de réponse pouvant alors être particulièrement long) ;

• demande d'un courrier recommandé alors que la conclusion du contrat a eu lieu, elle, par voie électronique ;

• divergences de pratiques entre professionnels, certains permettant la rédaction d'un courriel librement formulé quand d'autres requièrent de remplir un formulaire.

Ce faisant, ces difficultés restreignent la liberté de choix des consommateurs, en les rendant potentiellement captifs d'un opérateur économique, et peuvent les empêcher de souscrire à des offres plus attractives.

En Allemagne, a contrario , la loi pour les contrats de consommation équitables 14 ( * ) contraint depuis le 1 er juillet 2022 les professionnels à proposer un « bouton résiliation », clairement mis en évidence sur leur site internet ou l'application mobile, afin de faciliter le processus de résiliation pour les consommateurs. Le bouton doit comporter la mention « résiliation » ou « résilier un contrat ici », ou une autre formulation sous réserve qu'elle soit équivalente et non ambigüe. Une fois réceptionnée la demande de résiliation, il doit la confirmer au plus vite au consommateur, ainsi que la date à laquelle la résiliation prend effet.

II. Le dispositif envisagé - Une symétrie, pour les contrats conclus par voie électronique, entre modalités de conclusion et de résiliation

L'article 7 du projet de loi modifie l'article L. 221-14 du code de la consommation, aujourd'hui dédié uniquement aux modalités de reconnaissance, par le consommateur, de son obligation de paiement lorsqu'il souscrit à un contrat par voie électronique.

D'une part, il y inscrit le principe selon lequel « lorsqu'un contrat est conclu par voie électronique, sa résiliation par le consommateur est rendue possible selon cette même modalité », ce qui crée l'obligation pour le professionnel de prévoir, désormais, cette possibilité.

D'autre part, il crée un mécanisme de « bouton résiliation » afin que le consommateur puisse facilement, et de façon permanente, résilier son contrat : « à cette fin, le professionnel garantit au consommateur un accès facile, direct et permanent à une fonctionnalité dédiée ». En outre, le professionnel est tenu non seulement de confirmer au consommateur la réception de la notification de résiliation, mais également de l'informer de la date à laquelle le contrat prend fin, « sur un support durable et sans retard injustifié » (ce qui autorise les SMS, notamment).

L'article 7 prévoit par ailleurs que les modalités de présentation et d'utilisation de la fonctionnalité dédiée à la résiliation du contrat sont fixées par décret.

L'article 7 tire également les conséquences de cet ajout au sein de l'article L. 221-14 (qui ne traite plus uniquement de modalités d'information), en élargissement le champ des manquements passibles d'une amende administrative de 15 000 euros pour une personne physique et de 75 000 euros pour une personne morale aux infractions à cette nouvelle obligation de « parallélisme des formes ». Il supprime donc, au sein de l'article L. 242-10 du code de la consommation, les mots « d'information ».

L'article 7 prévoit que ces dispositions entrent en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1 er février 2023, et qu'elles sont applicables aux contrats en cours d'exécution à la même date.

À noter, par ailleurs, que cet article ne s'applique pas aux contrats listés à l'article L. 221-2 du code de la consommation, qui sont exclus du champ application du chapitre I er du titre II du livre II du code de la consommation (contrats portant sur les jeux d'argent et de hasard, sur les services financiers, sur un forfait touristique, sur les services de transport de passagers, par exemple). L'article 8 du présent projet de loi prévoit toutefois le même mécanisme de « bouton résiliation » pour les contrats d'assurance.

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Des ajustements techniques et une suppression de certains frais de résiliation des abonnements téléphoniques et internet

En commission, les députés ont adopté l'amendement de la rapporteure qui précise les modalités de mise en oeuvre de la fonctionnalité dédiée à la résiliation par les consommateurs. Il précise que « le professionnel met à leur disposition une fonctionnalité gratuite permettant d'accomplir, par un mode de communication à distance, la notification et les démarches nécessaires à la résiliation des contrats souscrits ». Par ailleurs, l'amendement précise que le professionnel informe également le consommateur, lorsqu'il confirme la réception de la notification, des effets qu'emporte la résiliation (et non uniquement de la date à laquelle elle prend effet). L'objectif de la rapporteure est en effet de répondre aux inquiétudes d'associations de protection des consommateurs, qui mettaient l'accent sur la nécessité que « les consommateurs puissent mesurer l'impact d'une résiliation sur les garanties et prestations dont ils peuvent disposer 15 ( * ) ».

L'amendement de la rapporteure précise également le contenu des dispositions qui devront être édictées par décret : celui-ci devra fixer les « spécifications techniques de nature à garantir une identification et un accès facile, direct et permanent à la fonctionnalité mentionnée au premier alinéa du présent II, telles que ses modalités de présentation et d'utilisation ».

Par ailleurs, les députés ont adopté en commission deux autres amendements.

Le premier, adopté contre l'avis de la rapporteure, prévoit que lorsqu'un consommateur résilie avant l'échéance un contrat téléphonique ou d'internet dont la durée d'engagement est supérieure à douze mois, les frais de résiliation dus au titre de la deuxième année d'engagement sont supprimés. Aujourd'hui en effet, pour les contrats de vingt-quatre mois, les frais dont le consommateur doit s'acquitter en cas de résiliation avant l'échéance se répartissent ainsi :

• la totalité des sommes dues au titre des mois restants jusqu'à la fin de la première année ;

• 25 % des sommes dues au titre des mois restants de la deuxième année.

Par exemple, pour un consommateur dont l'abonnement mensuel est de 60 euros et qui résilie au bout de trois mois d'engagement, les frais s'élèvent à 720€ (9 x 60€ + 0,25*(12*60)).

Le second amendement exonère un consommateur inscrit en procédure de surendettement de remboursement lorsqu'il résilie un contrat téléphonique ou d'internet, sous réserve que ce motif soit dûment prouvé et justifié auprès du fournisseur concerné.

En séance, les députés ont adopté :

• deux amendements identiques supprimant la précision selon laquelle le « bouton résiliation » s'applique aux contrats conclus « par voie électronique ». Dès lors, le « bouton résiliation » devra être appliqué à tous les contrats conclus à distance, et non uniquement à ceux conclus par voie électronique, ce qui impliquera, par exemple, les contrats conclus par téléphone ;

• un amendement prévoyant que la suppression des frais de résiliation « de deuxième année » ne s'applique pas aux offres groupées au sens de l'article L. 224-42-2 du code de la consommation ;

• deux amendements identiques, dont l'un de la rapporteure, clarifiant la rédaction de l'exonération de frais de résiliation pour les consommateurs en situation de surendettement. La principale différence avec la version issue de commission, outre les précisions relatives aux types de frais dont le remboursement ne peut être exigé, réside dans le fait que la déclaration de surendettement déposée par un consommateur devra, au préalable, être déclarée recevable par la commission de surendettement, pour que le consommateur puisse bénéficier de l'exonération de frais ;

• un amendement qui repousse la date maximale d'entrée en vigueur du I de cet article 7 au 1 er août 2023, et non plus au 1 er février 2023.

• trois amendements rédactionnels, dont deux de la rapporteure.

IV. La position de la commission - Un dispositif qui semble bienvenu, mais qui n'a pas fait l'objet de concertations préalables

La commission, en phase avec le rapporteur, considère particulièrement important la suppression progressive des différentes entraves qui rendent les consommateurs captifs de professionnels qui, parfois, complexifient à dessein la procédure de résiliation. Il en va d'une part de la protection économique du consommateur, et d'autre part du renforcement de l'intensité concurrentielle des marchés.

Par conséquent, le dispositif proposé par cet article 7 est bienvenu, en ce qu'il n'incite pas en lui-même à la résiliation, mais permet simplement, lorsque le consommateur souhaite le faire, qu'il ne soit pas bloqué par des obstacles inutiles.

En revanche, le rapporteur souligne que la disparition des mots « par voie électronique », actée en séance à l'Assemblée nationale, aura pour conséquence que le « bouton résiliation » devienne obligatoire pour tous les professionnels, y compris les petites entreprises qui ne proposent pas de souscription à un contrat par voie électronique (par exemple, un artisan). Cette mesure paraît dès lors disproportionnée et, à l'initiative du rapporteur, la commission a adopté deux amendements identiques COM-214 et COM-233 qui rétablissent l'exact parallélisme des formes, de telle sorte que le « bouton résiliation » ne soit obligatoire que pour les contrats conclus, au préalable, par voie électronique. Ainsi, la mesure s'appliquera aux grandes entreprises, qui proposent généralement ce mode de souscription, et aux PME qui ont la capacité de proposer cette modalité, mais non aux plus petites entreprises pour lesquelles cela entraînerait des difficultés opérationnelles conséquentes.

Le rapporteur note par ailleurs que, si d'un point de vue strictement juridique, la mesure ne s'applique pas aux contrats conclus « au comptoir » de l'établissement (opérateur téléphonique, d'internet, etc.) car il ne s'agit pas de contrats conclus à distance, il sera quasiment impossible pour les entreprises concernées d'en priver du bénéfice les consommateurs concluant un contrat selon cette modalité : le risque réputationnel serait élevé, et il est plus complexe pour un opérateur de prévoir l'affichage ou non du « bouton résiliation » selon le mode de conclusion du contrat choisi par le consommateur, que de prévoir sa mise en oeuvre pour tous ses clients. Autrement dit, même des contrats qui ne sont pas conclus à distance pourraient bénéficier de cette nouvelle disposition.

Il est toutefois regrettable que, comme souvent, le Gouvernement ait refusé de procéder à un minimum de concertations avec les parties prenantes. Ainsi qu'il est indiqué dans l'étude d'impact, en effet, « la mesure n'est pas soumise à consultations obligatoires et aucune consultation facultative n'a été conduite ». Ce manque de concertation est d'autant plus surprenant que le Gouvernement disposait de plusieurs mois pour conduire les consultations nécessaires.

Par ailleurs, en ce qui concerne l'ajout en commission à l'Assemblée nationale de la disposition relative à la suppression des frais de résiliation de la deuxième année d'un contrat avec engagement, le rapporteur souligne que cette mesure est susceptible de modifier les stratégies de subventionnement des contrats de certains opérateurs. En effet, aujourd'hui, certaines entreprises proposent l'équipement (téléphone, box, etc.) à un prix réduit, sous réserve d'un engagement de deux ans. Le modèle économique intègre le fait qu'en cas de résiliation, le consommateur devra s'acquitter des frais de résiliation, même dans une proportion réduite à un quart, jusqu'à la date d'échéance. Si, demain, ces frais disparaissent, il peut être attendu que les opérateurs ne proposeront plus que des contrats d'un an, au lieu de deux ans, ou qu'ils augmenteront le prix de l'équipement vendu. C'est pourquoi la commission a adopté un amendement COM-171 de M. Chaize précisant que pour les offres groupées, les consommateurs pourront toujours devoir s'acquitter de frais de résiliation, sous réserve que leur montant reste inférieur à 25 % de la somme encore due.

La commission a également adopté un amendement COM-148 de M. Cardon et des membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui prévoit une entrée en vigueur de cet article 7 au 1 er février 2023, et non plus au 1 er août.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 7 bis (délégué) (nouveau)

Résiliation à tout moment, à compter de la première reconduction,
des contrats de services de télévision et de vidéo à la demande

Cet article consacre la possibilité, pour un consommateur, de résilier gratuitement à tout moment, à partir de la première reconduction, les contrats de fourniture de service de télévision ainsi que les contrats de fourniture de services de médias audiovisuels à la demande.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article sans modification.

Aux termes de l'article L. 215-1 du code de la consommation, lorsqu'un contrat de prestation de services est conclu pour une durée déterminée avec une clause de reconduction tacite, le professionnel doit informer le consommateur (par écrit, lettre nominative ou courrier électronique), au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu'il a conclu.

Le consommateur dispose donc d'une « fenêtre de tir » bien précise pour résilier ce type de contrats (par exemple, un contrat pour recevoir une chaîne de télévision ainsi que la vidéo à la demande).

C'est uniquement dans l'hypothèse où cette information ne lui aurait pas été adressée, qu'il peut mettre gratuitement un terme au contrat, à tout moment à compter de la date de reconduction.

Si nombre d'acteurs économiques permettent déjà dans leurs contrats que ces derniers soient résiliables à tout moment, ce n'est pas le cas de tous, ce qui prive les utilisateurs de ces services de la possibilité de résilier quand ils le souhaitent. Pour peu que l'information leur soit parvenue par courriel mais qu'ils ne l'aient pas traité, ils sont à nouveau engagés, pour une période d'un an généralement.

La commission a donc adopté un amendement COM-201 portant article additionnel, de Mme Procaccia, qui précise que pour les contrats de fourniture de service de télévision, au sens de l'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, et pour les contrats de fourniture de services de médias audiovisuels à la demande, le consommateur peut mettre gratuitement un terme au contrat, à tout moment à compter de la première reconduction.

La commission a adopté l'amendement devenu article additionnel .

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article additionnel.

Article 8 (délégué)

Résiliation en « trois clics » des contrats d'assurance,
couvrant les consommateurs, souscrits par voie électronique

Cet article entend rendre obligatoire, pour les contrats d'assurance conclus par voie électronique, la mise à disposition d'un « bouton résiliation » permanent, afin de permettre plus efficacement aux clients de faire jouer la concurrence entre acteurs.

La commission a adopté deux amendements identiques, dont un du rapporteur, réécrivant cet article afin d'élargir ce dispositif à tous les contrats conclus soit par voie électronique (comme ceux en agence), soit à distance (téléphone, courriel, etc.), considérant que le secteur assurantiel est constitué d'opérateurs ayant la capacité informatique et matérielle de procéder à ces développements. Les amendements permettent également de tenir compte des spécificités du secteur des mutuelles.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Une obligation, pour les contrats d'assurance, de proposer des modalités identiques de conclusion et de résiliation, mais sans précision sur leur mise en oeuvre

Aux fins d'augmenter l'intensité concurrentielle du marché assurantiel et de permettre aux consommateurs de faire un usage effectif de leur droit à résiliation, le législateur est intervenu plusieurs fois ces dix dernières années pour consacrer de nouveaux droits à résiliation et en faciliter l'exercice. Par exemple :

• la loi du 28 janvier 2005 16 ( * ) , dite « loi Chatel », exige des assureurs qu'ils rappellent à leurs clients leur faculté de dénonciation de la tacite reconduction du contrat. Par ailleurs, la résiliation est désormais permise pendant vingt jours à compter de l'envoi de l'avis d'échéance, et à tout moment dans le cas en cas d'omission de l'envoi ;

• la loi du 17 mars 2014 17 ( * ) , dite « loi Hamon », permet la résiliation à tout moment au-delà d'un de souscription pour l'assurance habitation, l'assurance automobile et l'assurance affinitaire

• la loi du 14 juillet 2019 18 ( * ) , qui permet la résiliation à tout moment des contrats de complémentaire santé après la première année de souscription ;

• la loi du 28 février 2022 19 ( * ) , prévoit la possibilité pour un assuré de résilier à tout moment, au-delà de la première année, son contrat d'assurance emprunteur. Elle renforce par ailleurs les diverses obligations d'information qui incombent au prêteur et à l'assureur vis-à-vis de leurs clients.

La loi de 2019 modifie par ailleurs l'article L. 113-14 du code des assurances afin de consacrer une symétrie entre modalités de conclusion et modalités de résiliation d'un contrat d'assurance conclu à distance. Désormais, « lorsque l'assuré a le droit de résilier le contrat, la notification de la résiliation peut être effectuée, au choix de l'assuré [...], lorsque l'assureur propose la conclusion de contrat par un mode de communication à distance, par le même mode de communication ». Elle prévoit le même schéma pour les contrats des mutuelles 20 ( * ) et ceux des institutions de prévoyance 21 ( * ) .

Selon l'étude d'impact du présent projet de loi, « sur 150 millions de contrats d'assurance, environ 10 % des contrats sont souscrits entièrement en ligne ».

Cette consécration du parallélisme des formes en matière assurantielle, qui diffère donc du droit commun actuel de la consommation (l'article 7 du projet de loi entend aligner les deux régimes), ne serait toutefois pas pleinement effective « dans son esprit », dans la mesure où « les assurés consommateurs peuvent se heurter à des difficultés pratiques pour résilier leur contrat en ligne compte tenu des multiples canaux de souscription des contrats d'assurances ». Le fait de devoir permettre une résiliation par le même de communication à distance que celui choisi pour la conclusion du contrat n'emporte pas nécessairement que doive figurer un « bouton résiliation », gratuit et accessible en permanence. Certains assurés semblent donc rencontrer les mêmes difficultés, malgré ce parallélisme des formes, que pour les contrats classiques de consommation (identification du bon interlocuteur, documents complémentaires à fournir, absence de notification de la réception du document, etc.).

II. Le dispositif envisagé - Prévoir que la résiliation d'un contrat conclu à distance puisse se faire par un « bouton résiliation », en quelques clics

L'article 8 du projet de loi prévoit, en miroir à l'article 7 qui concerne les contrats de consommation, que « pour les contrats d'assurance, souscrits par voie électronique, couvrant les personnes physiques en dehors de leurs activités professionnelles, la résiliation est rendue possible selon cette même modalité par un accès facile, direct et permanent à une fonctionnalité dédiée ». Cet article s'appliquerait aux contrats des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance.

Cet article entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1 er février. L'obligation faite aux professionnels vaut pour les contrats en cours d'exécution à la date d'entrée en vigueur du dispositif.

En revanche, aucun décret n'est prévu pour déterminer les spécifications techniques à respecter. Selon l'étude d'impact, cela s'explique par le fait qu' « en raison de leur organisation particulière en réseau, la souscription de contrats d'assurance s'effectue par de multiples canaux qui disposent de spécificités dont il faut tenir compte ». Cette justification est difficile à comprendre, un acte règlementaire pouvant très bien traiter les différents cas de figure qui se présentent en matière de canal de résiliation.

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Des ajustements de précision et un décret fixant les spécifications techniques du « bouton résiliation »

À l'initiative de la rapporteure, les députés en commission ont adopté un amendement précisant les obligations incombant aux assureurs : ils devront mettre à la disposition des clients « une fonctionnalité gratuite permettant d'accomplir, par un mode de communication à distance, la notification et les démarches nécessaires à la résiliation des contrats d'assurance souscrits ». L'amendement précise également que le professionnel devra confirmer au consommateur la réception de la notification de résiliation.

Par cohérence avec les dispositions de l'article 7 applicables aux contrats de consommation, l'amendement de la rapporteure prévoit également, dans cet article 8, que la personne souscriptrice est informée de la date à laquelle le contrat prend fin et des effets de la résiliation.

Enfin, cet amendement prévoit un décret, chargé de fixer les spécifications techniques de nature à garantir une identification et un accès facile, direct et permanent à cette fonctionnalité, telles que ses modalités de présentation et d'utilisation.

En séance, les députés ont adopté :

• un amendement précisant que le décret devra déterminer, parmi les informations devant être produites par la personne souscriptrice, celles permettant de confirmer son identité et son consentement ;

• un amendement qui repousse la date maximale d'entrée en vigueur de cet article au 1 er août 2023 ;

• trois amendements rédactionnels, dont deux de la rapporteure.

IV. La position de la commission - Un dispositif bienvenu, qui aligne les modalités de résiliation entre contrats d'assurance et contrats « communs » de consommation

Jusqu'à présent, le droit des contrats assurantiels était plus précis que le droit commun, puisqu'il prévoyait déjà un parallélisme des formes entre modalités de conclusion et modalités de résiliation. L'article 7 a, d'une certaine façon, permis de faire « deux pas en avant » : en consacrant la possibilité de résilier un contrat par voie électronique, et en prévoyant un « bouton résiliation ». Par conséquent, sans cet article 8, les dispositions relatives à la résiliation des contrats d'assurance auraient été « moins-disantes » que le nouveau régime commun.

Cet article 8 permet donc un alignement exact entre ces deux types de contrats, ce qui devrait permettre de simplifier les procédures de résiliation des Français, et de leur permettre de faire jouer effectivement la concurrence entre les acteurs.

En revanche, la rédaction actuelle pose une difficulté de forme : elle utilise le même vocable tant pour le secteur des assurances et des instituts de prévoyance que pour celui des mutuelles. Or ce dernier est régit par des dispositions particulières, comme par exemple le fait que la personne souscriptrice n'est pas simplement un assuré, mais un adhérent. Il convient dès lors de distinguer, au sein de cet article 8, la rédaction retenue pour les secteurs assurantielles et de prévoyance, et celle retenue pour le secteur des mutuelles. C'est l'objet des amendements identiques COM-234 du rapporteur et COM-28 de M. Babary.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 8 bis (délégué) (non modifié)

Extension de quatorze à trente jours du délai de rétractation
pour les contrats d'assurance affinitaire
et extension du champ de ses bénéficiaires

Cet article entend porter de quatorze à trente jours le délai de rétractation pour les contrats d'assurance affinitaire. Il élargit par ailleurs le champ des bénéficiaires de ce droit de rétractation en supprimant la condition actuelle d'une justification par l'assuré de garanties antérieures pour l'un des risques couverts par le nouveau contrat. Il fait en outre démarrer le délai de rétractation à compter du versement de la première prime, en cas de période de gratuité, et non lors de la conclusion du contrat.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article sans modification.

I. La situation actuelle - Un délai de rétractation de quatorze jours pour les contrats d'assurance affinitaire sous réserve que l'assuré prouve disposer de garanties antérieures plus ambitieuses

Aux termes de l'article L. 112-10 du code des assurances, les assurés disposent d'un délai de rétractation de quatorze jours pour les contrats d'assurance « constituant un complément d'un bien ou d'un service vendu par un fournisseur » (c'est-à-dire les contrats d'assurance affinitaire, qui assurent par exemple contre le vol un téléphone nouvellement acquis).

L'assuré, en effet, « peut renoncer à ce nouveau contrat, sans frais ni pénalités, tant qu'il n'a pas été intégralement exécuté ou que l'assuré n'a fait intervenir aucune garantie, et dans la limite d'un délai de quatorze jours calendaires à compter de la conclusion du nouveau contrat ».

En revanche, le bénéfice de ce délai de rétractation est soumis à la condition que l'assuré « justifie d'une garantie antérieure pour l'un des risques couverts par ce nouveau contrat ». Autrement dit, tous les assurés ne peuvent faire usage de ce délai de rétractation.

Un récent avis 22 ( * ) du Comité consultatif du secteur financier, a constaté que « les assurés se perdent souvent dans les différents cas de résiliation et ne comprennent pas dans quelles conditions et à quel moment ils peuvent résilier leurs contrats d'assurance ». Il notait notamment, en ce qui concerne les contrats d'assurance affinitaires, que :

• la condition de disposer de garanties antérieures supérieures, pour utiliser le délai de rétractation, gagnerait à être supprimée ;

• le délai de rétractation devrait être porté de quatorze à trente jours ;

• compte tenu de l'existence, parfois, d'une période de gratuité à compter de la conclusion du contrat, certains consommateurs peuvent ne « réaliser » qu'ils sont engagés par un tel contrat que lorsque la première prime d'assurance est payée, c'est-à-dire souvent au-delà d'un délai de quatorze jours. Lorsqu'ils le réalisent, ils ne peuvent plus faire usage de leur délai de rétractation.

II. Le dispositif envisagé - Porter le délai de rétractation de quatorze à trente jours, sans condition

En séance à l'Assemblée nationale, les députés ont adopté un amendement qui supprime la condition de justifier de garanties antérieures pour faire usage du droit de rétractation, et ont porté la durée durant laquelle ce dernier peut être exercé, de quatorze à trente jours.

Par ailleurs, l'amendement prévoit que lorsque l'assuré bénéficie d'une période de gratuité, le délai de rétractation ne court qu'à compter du paiement de tout ou partie de la première prime.

Cet article entre en vigueur au 1 er janvier 2023.

III. La position de la commission - Un dispositif utile et consensuel

La commission considère cette mesure utile et bienvenue. Il convient de rappeler que les avis du CSSF sont rendus à l'unanimité de ses membres, ce qui signifie que ces diverses dispositions revêtent un caractère consensuel entre les acteurs du marché de l'assurance affinitaire.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article sans modification .

CHAPITRE II

Lutte contre les pratiques commerciales illicites
Article 9 (délégué) (non modifié)

Aggravation des sanctions pour pratiques commerciales déloyales et renforcement des pouvoirs de la DGCCRF

Cet article alourdit les sanctions pénales pour pratiques commerciales trompeuses et agressives, lorsqu'elles ont débouché sur la conclusion d'un contrat, et lorsqu'elles ont été commises en bande organisée.

Par ailleurs, il prévoit un élargissement des cas dans lesquels les injonctions prononcées par la DGCCRF peuvent faire l'objet d'une publicité, et il facilite la transmission d'informations entre les agents de cette administration et les officiers de police judiciaire. Il renforce également les pouvoirs de la DGCCRF destinés à lutter contre les infractions commises par les professionnels via des interfaces en ligne.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article sans modification.

I. La situation actuelle - Des sanctions pour pratiques commerciales trompeuses et agressives qui semblent insuffisamment dissuasives, et des obstacles opérationnels qui freinent l'action de la DGCCRF

A. Un niveau de sanctions pénales pour les pratiques commerciales trompeuses et agressives insuffisant pour que la répression effective de ces agissements soit prioritaire

Les pratiques commerciales interdites 23 ( * ) , c'est-à-dire celles qui biaisent le marché et empêchent la concurrence par le mérite (innovations, prix moins élevés, etc.), regroupent :

• les pratiques commerciales déloyales 24 ( * ) , elles-mêmes composées des pratiques commerciales trompeuses (PCT, art. L. 121-2 à L. 121-5) et des pratiques commerciales agressives (PCA, art. L. 121-6 et L. 121-7) ;

• les abus de faiblesse, les refus et subordination de vente et de prestation de services ;

• les ventes et prestations de services sans commande préalable, les ventes ou prestation de services « à la boule de neige », les ventes ou prestations de service avec primes ;

• les numéros de téléphone surtaxés, les blocages géographiques injustifiés, les loteries publicitaires ;

• les paiements supplémentaires sans consentement exprès, les frais de recouvrement, les publicités portant sur des opérations commerciales règlementées, les remises ou réductions annulant l'effet de la taxe à l'immatriculation sur les émissions de CO 2 des véhicules de tourisme.

Le code de la consommation précise les différentes circonstances dans lesquelles une pratique commerciale doit avoir été effectuée pour être qualifiée de trompeuse : par exemple, créer une confusion avec un autre bien ou service, reposer sur des allégations fausses portant sur la disponibilité du produit ou ses caractéristiques essentielles, ou encore être mise en oeuvre pour le compte d'une personne qui n'est pas clairement identifiable. Par ailleurs, l'article L. 121-4 énumère limitativement les vingt-huit pratiques pouvant être qualifiées de PCT.

Aux termes de l'article L. 121-6, une pratique commerciale est, quant à elle, agressive, lorsque du fait de sollicitations répétées et insistantes ou de l'usage d'une contrainte (physique ou morale), et compte tenu des circonstances qui l'entourent, elle altère ou est de nature à altérer la liberté de choix d'un consommateur, vicie ou est de nature à vicier son consentement, ou entrave l'exercice des droits contractuels d'un consommateur. Comme pour les PCT, le code de la consommation précise quels types de pratiques commerciales peuvent être réputées agressives (art. L. 121-7).

La constatation des PCT et PCA est réalisée par les agents de la DGCCRF.

Les PCT et PCA sont sanctionnées pénalement d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 300 000 euros, aux termes des articles L. 132-2 et L. 132-11 du code de la consommation. Par ailleurs, le montant de l'amende peut être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du délit, à 10 % du chiffre d'affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d'affaires annuels connus à la date des faits. Pour les PCT, le montant de l'amende peut également être porté à 50 % des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité ou de la pratique constituant ce délit. Ce taux est porté à 80 % pour les PCT reposant sur des allégations en matière environnementale.

Des peines complémentaires 25 ( * ) pour PCT peuvent également être prononcées, comme l'interdiction d'exercer une fonction publique ou de diriger une entreprise commerciale. Les personnes physiques coupables d'une PCA encourent également, quant à elles, une interdiction d'exercer directement ou indirectement une activité commerciale, durant au plus cinq ans 26 ( * ) .

Actuellement, il n'est pas de fait de distinction, en matière de sanction, selon que les PCT et PCA ont débouché ou non sur la conclusion d'un contrat, et selon qu'elles ont été commises en bande organisée ou non, en dépit du fait que ces différences peuvent avoir un impact financier significatif pour les consommateurs.

Selon les éléments recueillis par le rapporteur auprès de la DGCCRF, aucune peine de prison ferme n'a été prononcée par le juge à l'encontre d'une personne ayant commise une PCT ou une PCA. En revanche, selon l'administration, le fait que ces pratiques ne soient sanctionnées que d'une peine de deux ans aurait pour conséquence de leur conférer un caractère « peu prioritaire » aux yeux de l'autorité judiciaire. La sanction pénale d'une PCT ou d'une PCA, potentiellement commise par une multinationale lésant des millions de clients, est aujourd'hui inférieure à celle encourue pour un vol dans un commerce.

B. Des modalités d'intervention de la DGCCRF qui pourraient gagner en efficacité et en fluidité

1) La DGCCRF devrait pouvoir communiquer davantage sur les injonctions qu'elle prononce et sur les enquêtes pénales auxquelles elle participe

L'action de la DGCCRF vise la protection des consommateurs, que celle-ci relève du volet économique (intensité concurrentielle des marchés, pratiques trompeuses ou agressives), ou du volet de la sécurité (qualité des produits et services mis sur le marché).

Pour ce faire, elle dispose de prérogatives de puissance publiques étendues.

Elle peut notamment formuler, après une procédure contradictoire, des injonctions à l'égard des opérateurs, afin qu'ils se conforment à leurs obligations dans un délai raisonnable (art. L. 521-1 du code de la consommation). Les agents de la DGCCRF peuvent également enjoindre à tout professionnel de cesser tout agissement illicite ou de supprimer toute clause illicite ou interdite. Cette injonction peut faire l'objet d'une mesure de publicité (art L. 521-2).

Par ailleurs, en ce qui concerne les contrats à distance, lorsqu'un professionnel est dans l'incapacité manifeste d'assurer la bonne exécution des obligations résultant du contrat, la DGCCRF peut lui enjoindre de ne plus prendre aucun paiement avant la livraison intégrale du bien ou service, et d'informer le consommateur de l'injonction dont il fait l'objet (art. L. 521-3).

La DGCCRF peut également prononcer des injonctions en cas de pratiques restrictives de concurrence (art. L. 470-1 du code de commerce).

Or le code de la consommation semble peu harmonisé en matière de publicité des injonctions prononcées par l'autorité administrative ; certaines, en effet, peuvent faire l'objet d'une telle communication, tandis que d'autres non. De la même façon, il ne peut être fait publicité des injonctions prononcées par le ministre de l'économie afin de mettre un terme aux pratiques anticoncurrentielles qui ne font pas, par ailleurs, l'objet d'une saisine de l'Autorité de la concurrence (art. L. 464-9 du code de commerce).

En outre, en application de l'article 11 du code de procédure pénale, seul le procureur de la République (ou, par son intermédiaire, un officier de police judiciaire) peut décider de divulguer certaines éléments tirés de l'enquête pénale pour des motifs d'offre public ou d'intérêt public. Par conséquent, les enquêtes pénales réalisées par les agents de la DGCCRF ne peuvent pas faire l'objet de mesures de publicité par l'administration, même si le procureur souhaitait leur en donner la possibilité, car les agents de la DGCCRF n'ont pas la qualité d'officier de police judiciaire. Quelques exceptions toutefois autorisent la communication d'éléments d'enquêtes pénales conduites par la DGCCRF :

• si le procureur décide de communiquer sur ces enquêtes directement, ou par la mise en oeuvre d'une transaction pénale incluant une action de communication (le protocole transactionnel peut en effet comporter une telle publicité de l'accord) ;

• si la divulgation d'un élément de l'enquête par la DGCCRF vise à prévenir un danger grave ou immédiat pour la santé ou la sécurité des consommateurs (art L. 512-22 du code de la consommation). L'administration est amenée à le faire notamment en matière alimentaire ou en matière de sécurité de produits industriels ;

• si l'enquête pénale porte sur des contenus illicites en ligne et que la communication des informations est à destination des hébergeurs de ces contenus (art L. 521-23).

En dehors de ces exceptions, même si le procureur souhaite communiquer par l'intermédiaire d'un agent de la DGCCRF des éléments tirés d'une enquête pénale (par exemple, une pratique commerciale trompeuse), il ne peut le faire, compte tenu du fait que les agents de cette administration n'ont pas la qualité d'officier de police judiciaire.

2) Les échanges autorisés d'informations entre agents de la DGCCRF et officiers de police judiciaire pourraient être élargis

Il n'y a en effet pas de dispositif général d'échange d'informations entre agents de la DGCCRF et OPJ, compte tenu du secret professionnel et du secret de l'enquête pénale (art. 11 du code de procédure pénale). Quelques exceptions existent toutefois : la lutte contre la contrefaçon 27 ( * ) , la lutte contre les activités lucratives non déclarées portant atteinte à l'ordre et à la sécurité publics 28 ( * ) , et la lutte contre le dopage 29 ( * ) .

Or de tels échanges sont nécessaires au bon déroulement de l'enquête et pour assurer l'efficacité la réponse judiciaire apportée aux infractions portant atteinte à la sécurité des consommateurs.

II. Le dispositif envisagé - Un alourdissement des sanctions pour pratiques commerciales trompeuses et agressives, et une habilitation à légiférer par ordonnance pour renforcer les outils de la DGCCRF

L'article 9 du présent projet de loi alourdit tout d'abord les sanctions encourues dans le cadre de PCT et PCA lorsque ces dernières ont été suivies de la conclusion d'un ou de plusieurs contrats. Les nouveaux articles L. 132-2-1 et L. 132-11-1 portent en effet de deux à trois ans la peine d'emprisonnement pouvant être prononcée.

Par ailleurs, il crée deux nouveaux articles L. 132-2-2 et L. 132-11-2 qui portent de deux à sept ans la peine d'emprisonnement encourue pour les cas où ces pratiques trompeuses et agressives auraient été commises en bande organisée. La DGCCRF a indiqué au rapporteur viser principalement, par cette disposition, les arnaques liées à la rénovation énergétique, ainsi que celles liées au compte personnel de formation.

L'article 9 modifie également l'article L. 454-1 du code de la consommation afin de porter à trois ans, au lieu de deux, la peine de prison encourue pour tromperie ou tentative de tromperie, lorsqu'elle porte, notamment, sur la nature et les qualités substantielles de la marchandise, sur la quantité des choses livrées, ou encore sur les contrôles effectués ou les précautions à prendre en cas d'utilisation d'un produit.

Par ailleurs, cet article 9 prévoit une habilitation à légiférer par ordonnance, dans un délai de six mois, pour modifier le code de la consommation et le code de commerce, afin :

• de faciliter les échanges d'information entre les officiers de police judiciaire et les agents habilités au titre du code de la consommation ;

• d'alléger la procédure prévue à l'article L. 521-3-1 du code de la consommation dans le domaine du numérique ;

• de renforcer les mesures de publicité des injonctions prononcées par les agents de la DGCCRF et par l'Autorité de la concurrence. Selon l'étude d'impact, ce sont les injonctions sous astreinte en matière de pratiques restrictives de concurrence, les transactions-injonctions en matière de pratique anticoncurrentielle, l'injonction numérique, et l'injonction en matière de protection économique du consommateur, qui seraient concernées ;

• de déterminer les conditions dans lesquelles les agents de la DGCCRF peuvent communiquer, avec l'accord du procureur de la République et sous son contrôle, sur les procédures pénales auxquelles ils concourent.

La procédure de l'article L. 521-3-1 du code de la consommation :
la possibilité pour la DGCCRF d'agir sur les interfaces en ligne

Introduit par la loi « DDADUE » de 2020 30 ( * ) , cet article crée plusieurs outils pour les agents de la DGCCRF, lorsqu'ils constatent une infraction ou un manquement au droit de la consommation commis à partir d'une interface en ligne (par exemple, un site de commerce en ligne), et que l'auteur de la pratique ne peut être identifié ou qu'il n'a pas déféré à une injonction.

Le premier outil consiste à pouvoir ordonner aux opérateurs de plateformes en ligne ainsi qu'aux fournisseurs d'accès à internet (FAI) l'affichage d'un message avertissant les consommateurs du risque de préjudice encouru lorsqu'ils accèdent au contenu manifestement illicite. Cet outil n'a cependant jamais été utilisé jusqu'à présent. Selon les éléments recueillis par le rapporteur, les prestataires de services de la société de l'information (PSSI) rencontreraient divers obstacles techniques.

Les deuxième, troisième et quatrième outils ne sont utilisables que lorsque l'infraction constatée est passible d'une peine d'au moins deux ans d'emprisonnement, et qu'elle est de nature à porter une atteinte grave à la loyauté des transactions ou à l'intérêt des consommateurs.

Dans ce cas, la DGCCRF peut :

- notifier aux opérateurs de plateformes en ligne et aux FAI les adresses électroniques des interfaces en ligne litigieuses pour qu'elles prennent toute mesure utile destinée à faire cesser leur référencement. Cette mesure a été utilisée une seule fois, à l'encontre du site internet Wish (les opérateurs ont procédé au retrait, dans les résultats de recherche des internautes sur les moteurs de recherche et sur les magasins d'application, du site en question) ;

- notifier à ces opérateurs, aux fournisseurs d'accès internet et aux hébergeurs, les adresses électroniques des interfaces en ligne litigieuses afin qu'ils prennent toute mesure utile destinée à en limiter l'accès. Cette procédure a été mise en oeuvre huit fois ;

- ordonner aux opérateurs de registre ou aux bureaux d'enregistrement de domaines de prendre une mesure de blocage d'un nom de domaine (pendant une durée maximale de trois mois, renouvelable une fois, suivie, si l'infraction persiste, d'une mesure de suppression ou de transfert du nom de domaine à l'autorité compétente). Cette mesure a été utilisée 27 fois.

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Le remplacement de l'habilitation à légiférer par ordonnance par l'inscription « en dur » des dispositions relatives aux pouvoirs de la DGCCRF

En commission, les députés ont adopté un amendement supprimant l'habilitation à légiférer par ordonnance, contre l'avis de la rapporteure. Le reste de l'article n'a pas été modifié.

En séance, les députés ont adopté un amendement du Gouvernement visant à inscrire directement dans la loi les éléments qui devaient initialement figurer dans l'ordonnance.

Aux termes de cette réécriture de l'article 9, les injonctions suivantes pourront faire l'objet d'une publicité :

• les injonctions prononcées par le ministre de l'économie pour faire cesser certaines pratiques anticoncurrentielles (art. L. 464-9 du code de commerce). Dans ce cas, le professionnel est informé, lors de la procédure contradictoire préalable au prononcé de l'injonction, de la nature et des modalités de la publicité envisagée. La publicité est effectuée aux frais du professionnel qui fait l'objet de l'injonction ou accepte la transaction ;

• les injonctions en matière de pratiques restrictives de concurrence (art. L. 470-1 du code de commerce).

À noter, du reste, que l'injonction de mise en conformité, permise par l'article L. 521-1 du code de la consommation, ne visera plus seulement à obtenir d'un professionnel qu'il se conforme à ses obligations, mais également qu'il cesse tout agissement illicite ou supprime toute clause illicite ou interdite.

Par ailleurs, suite à l'adoption de cet amendement, l'article 9 dispose désormais que les agents de la DGCCRF et les officiers et agents de police judiciaire pourront se communiquer spontanément les informations et documents détenus ou recueillis dans l'exercice de leurs missions respectives, sans que le secret de l'enquête pénal ni le secret professionnel ne puissent y faire obstacle. En outre, le procureur de la République pourra désormais rendre publics des éléments tirés d'une enquête pénale par l'intermédiaire des agents de la DGCCRF.

Enfin, en ce qui concerne la procédure de l'article L. 521-3-1 du code de la consommation, propre aux interfaces en ligne (cf. supra ), la DGCCRF ne se contentera plus de notifier aux fournisseurs d'accès internet, hébergeurs et opérateurs de plateforme en ligne les adresses électroniques des interfaces litigieuses pour qu'ils prennent les mesures utiles pour les déréférencer ou en bloquer l'accès, mais pourra leur ordonner de le faire. Ces mesures, de surcroît, pourront faire l'objet d'une mesure de publicité.

IV. La position de la commission - Un renforcement des sanctions pour pratiques trompeuses défendu encore récemment par le Sénat

Il ressort des différents travaux menés sur ce sujet par la commission des affaires économiques que les sanctions pour pratiques commerciales trompeuses et agressives sont insuffisamment dissuasives.

Récemment encore, un rapport 31 ( * ) de la commission des affaires économiques, relatif à l'information au consommateur, parvenait à cette conclusion et militait pour un alourdissement des sanctions.

Le rapporteur rappelle, par ailleurs, que plusieurs infractions au droit de la consommation sont déjà punies d'une peine d'emprisonnement de trois ans ou plus, comme le fait d'abuser de la faiblesse ou de l'ignorance d'une personne 32 ( * ) , les infractions en matière de courtage matrimonial 33 ( * ) , ou encore le fait d'exporter vers un pays tiers à l'Union européenne une denrée alimentaire préjudiciable à la santé ou un aliment dangereux 34 ( * ) .

Le choix de porter la peine d'emprisonnement encourue pour PCT et PCA ayant débouché sur la conclusion d'un contrat à trois ans, au lieu de deux ans, ne paraît dès lors pas disproportionnée. De même, la sanction de sept ans d'emprisonnement, lorsque ces pratiques sont commises en bande organisée, reste proportionnée. Cependant, compte tenu des demandes d'éclaircissement que cet article a soulevé durant les débats, l'examen en séance de cet article 9 permettra au Gouvernement d'expliciter sa position et la justification exacte de ces dispositions.

De la même façon, la commission soutient l'usage de la publicité des injonctions prononcées par la DGCCRF, considérant qu'il peut s'agir là d'une incitation supplémentaire, pour les opérateurs économiques, à se conformer à leurs obligations.

La commission est par ailleurs satisfaite que le Gouvernement ait entendu la demande des parlementaires de ne pas procéder par voie d'ordonnance, et de privilégier l'inscription « en dur » des mesures envisagées.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article sans modification.

Article 9 bis A (délégué)

Remboursement des frais perçus par un prestataire de services
de paiement en cas de multiples demandes de paiement
concernant une même opération

Cet article renforce le principe du remboursement au client par la banque des frais perçus en cas d'incidents bancaires se rapportant à une seule et même opération. Il supprime pour cela la condition selon laquelle le client doit apporter la preuve, pour obtenir le remboursement, que les opérations sont identiques, et inscrit ce principe directement dans la loi.

La commission a adopté un amendement du rapporteur prévoyant une entrée en vigueur de cet article au 1 er février 2023.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - En cas de multiples incidents bancaires relatifs à une même opération de paiement, possibilité pour le payeur de se voir rembourser les frais au-delà du premier rejet, sous réserve d'apporter certaines preuves

Aux termes de l'article D133-5 du code monétaire et financier, un incident de paiement est constitué de tout rejet d'un ordre de paiement reçu par le prestataire de services de paiement du payeur en raison d'un défaut ou d'une insuffisance de provision, quel que soit le moyen de paiement utilisé.

Les frais perçus par le prestataire de services de paiement du payeur au titre d'un incident (sauf rejet d'un chèque 35 ( * ) ) ne peuvent excéder le montant de l'ordre de paiement rejeté, dans la limite d'un plafond de 20 euros.

Par ailleurs, « lorsque plusieurs demandes de paiement concernant la même opération de paiement ont été rejetées par le prestataire de services de paiement, le payeur peut demander le remboursement des frais perçus au titre de ces incidents au-delà du montant facturé pour le premier rejet. La preuve que ces demandes de paiement concernent la même opération de paiement est apportée par le payeur par tout moyen » (art. D133-6 du code monétaire et financier).

Il semblerait toutefois que cette condition freine la possibilité pour certains clients, qui n'identifient pas forcément le caractère identique de plusieurs opérations de paiement, de faire un usage effectif de ce droit au remboursement.

II. Le dispositif envisagé - Inscrire dans la loi le remboursement automatique des frais perçus au titre d'incidents bancaires se rapportant à une opération identique, sans condition

En séance à l'Assemblée nationale, les députés ont adopté un amendement qui inscrit directement à l'article L. 133-26 du code monétaire et financier le principe selon lequel « lorsque plusieurs demandes de paiement concernant la même opération de paiement ont été rejetées, le prestataire de services de paiement rembourse à l'utilisateur les frais perçus au titre de ces incidents au-delà du montant prélevé au titre du premier rejet ». L'objectif de cet amendement est double :

• d'une part, il supprime la nécessité que le client apporte la preuve que les divers incidents bancaires concernés se rapportaient à une seule et même opération ;

• d'autre part, il renforce l'automaticité du remboursement, par le prestataire de services de paiement, des frais prélevés.

III. La position de la commission - Un dispositif utile qui tire les conséquences des avancées informatiques réalisées par les banques

Le secteur bancaire, en effet, est désormais en mesure d'identifier facilement si diverses demandes de paiement se rapportent ou non à une seule et même opération. Dès lors, il est devenu inutile de contraindre le client à apporter lui-même la preuve du caractère identique des incidents bancaires en question.

En revanche, tous les établissements bancaires ne semblent pas encore équipés du système informatique permettant ce traitement automatisé. Par conséquent, à l'initiative du rapporteur, la commission a adopté un amendement COM-235 fixant la date d'entrée en vigueur de cet article au 1 er février 2023, de telle sorte que les opérateurs en questions soient en mesure de déployer ledit système.

La commission souscrit donc à cet article 9 bis A, ainsi modifié.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 9 bis (délégué)

Taux d'intérêt légaux pour non-remboursement ou non-rétablissement d'un compte bancaire objet d'une opération de paiement non autorisée et signalée

Cet article prévoit des pénalités financières à l'encontre des prestataires de services de paiement qui ne procéderaient pas, dans les délais impartis, au remboursement des sommes ayant fait l'objet d'une opération non-autorisée, mais signalée, par le titulaire d'un compte bancaire.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article modifié par l'amendement du rapporteur, qui instaure une gradation dans le schéma des pénalités financières, de telle sorte que les établissements financiers soient incités à régulariser au plus vite l'éventuel retard de remboursement dont ils seraient à l'origine.

I. La situation actuelle - Les établissements financiers sont tenus de rembourser les sommes ou de rétablir un compte bancaire, en cas d'opération de paiement non autorisée

Aux termes de l'article L. 133-18 du code monétaire et financier, lorsque l'utilisateur d'un compte bancaire constate une opération de paiement non autorisée et qu'il la signale, le prestataire de services de paiement du payeur doit lui rembourser le montant de l'opération en question, immédiatement après avoir pris connaissance de l'opération ou après en avoir été informé, et en tout état de cause au plus tard à la fin du premier jour ouvrable suivant.

Toutefois, « s'il a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l'utilisateur du service de paiement et s'il communique ces raisons par écrit à la Banque de France », le prestataire de service de paiement n'est pas tenu de procéder à ce remboursement, ou au rétablissement du compte débité dans l'état où il se serait trouvé si l'opération de paiement non autorisée n'avait pas eu lieu.

II. Le dispositif envisagé - La création de pénalités financières en cas de retard du remboursement incombant à l'établissement financier

Les députés en commission ont adopté un amendement prévoyant qu'en cas de retard de remboursement de la part du prestataire de service de paiement (généralement, la banque), les sommes dues portent intérêt au taux légal majoré de dix points. Par ailleurs, au-delà de trente jours, les pénalités sont majorées de 20 % par mois de retard.

Pour le second semestre 2022, le taux légal est fixé à 3,15 %.

En séance, les députés ont adopté un amendement de la rapporteure qui précise l'identité de l'établissement financier devant s'acquitter de ces pénalités. Ils ont, au préalable, adopté un sous-amendement qui substitue au mot « méconnaissance » les mots « non-respect ».

III. La position de la commission - Une validation du principe, mais une nécessaire clarification du montant des sanctions encourues par l'établissement financier

Les opérations de paiement non autorisées représentent une atteinte forte à la situation économique et financière des individus, qui peuvent dans certains cas s'apparenter à un vol. Dès lors, il importe de permettre le rétablissement au plus vite du compte dans son état initial.

Or il semble que plusieurs abus aient été constatés en la matière, certains établissements tardant exagérément à procéder au remboursement des sommes indûment débitées, ce qui peut placer les personnes concernées dans une situation financière précaire. Dès lors, la commission partage la nécessité de légiférer pour prévoir des pénalités dans les cas où l'obligation légale de procéder avec célérité ne serait pas respectée.

En revanche, la rédaction actuellement retenue pose plusieurs difficultés :

• il n'est pas clair si la majoration du taux légal de dix points signifie en réalité qu'il est augmenté de dix points de base, auquel cas cela représenterait un taux de 3,25 % (3,15 % + 0,1 %), ou si elle implique qu'il soit augmenté de 10 points de pourcentage (dans ce cas, il s'établirait à 13,15 %) ;

• de même, la disposition selon laquelle « au-delà de trente jours, les pénalités sont majorées de 20 % par mois de retard », manque de précision : elle peut aussi bien signifier que le taux applicable durant le premier mois (3,25 % ou 13,15 %) est multiplié par 1,2 (ce qui impliquerait un nouveau taux de 3,9 % ou de 15,78 %), ou par symétrie avant la phrase précédente, que le taux est majoré de vingt points (23,25 % ou 33,15 % selon l'interprétation retenue).

En outre, la rédaction actuelle prévoit la même sanction à l'encontre de la banque, que celle-ci ait deux jours de retard ou vingt-neuf jours.

Par conséquent, la commission a adopté l'amendement COM-236 du rapporteur, qui crée le schéma de pénalités suivant :

• jusqu'à sept jours de retard, les sommes dues produisent intérêt au taux légal majoré de 5 points ;

• entre sept et trente jours de retard, les sommes dues portent intérêt au taux légal majoré de 10 points ;

• au-delà de trente jours de retard, les sommes dues portent intérêt au taux légal majoré de 15 points.

La commission, par cet amendement, a donc souhaité créer un dispositif incitatif : si le retard est de moins de sept jours, le taux d'intérêt sera de 8,15 %, avant de passer à 13,15 % au-delà de sept jours de retard, puis éventuellement à 18,15 % s'il dépasse trente jours.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 9 ter (délégué) (nouveau)

Pénalités financières à l'encontre des établissements de crédits
pour dépassement du plafond de frais bancaires

Cet article prévoit qu'en cas de dépassement du plafond de frais bancaires prévu par la réglementation, l'établissement de crédit en cause est passible d'une amende égale à 100 % du surplus de frais facturés.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article additionnel.

Le code monétaire et financier encadre le montant des frais bancaires qui peuvent être appliqués au client d'un établissement financier à la suite d'incidents de paiement.

Ainsi, aux termes de l'article D131-25 du code, les frais perçus pour le rejet d'un chèque sont plafonnés à 30 euros si le montant du chèque est inférieur ou égal à 50 euros, et à 50 euros si le montant du chèque est supérieur à 50 euros.

De même, aux termes de l'article R312-4-1 du même code, les frais perçus à raison du traitement des irrégularités de fonctionnement d'un compte bancaire sont plafonnés à 8 euros par opération, et 80 euros par mois.

Aux termes de l'article D133-6, pour les incidents de paiement autres que le rejet d'un chèque, les frais perçus par le prestataire de services de paiement du payeur au titre d'un incident ne peuvent excéder le montant de l'ordre de paiement rejeté, dans la limite d'un plafond de 20 euros.

Or il semblerait qu'en cas de dépassement de ces plafonds, les établissements financiers ne supportent que de faibles sanctions, prononcées par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) à l'issue d'une instruction parfois longue.

La commission a par conséquent adopté l'amendement COM-270 de M. Menonville visant à créer un nouvel article L. 351-2 au sein du code monétaire et financier stipulant que les établissements de crédit dépassant le plafond de frais bancaires sont passibles d'une amende égale à 100 % du surplus de frais facturés.

La commission a adopté cet amendement devenu article additionnel.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article additionnel.

TITRE III

SOUVERAINETÉ ÉNERGÉTIQUE
CHAPITRE IER

Dispositions relatives à la sécurité d'approvisionnement en gaz
Article 10 (délégué)

Modification des obligations de stockage souterrain de gaz naturel

Cet article vise à modifier les obligations applicables aux opérateurs de stockage souterrain de gaz naturel, en instituant une trajectoire de remplissage et des stocks de sécurité, issus d'une proposition de règlement composant le Plan RePowerEU .

La commission a adopté un amendement ( COM-222 ), présenté par le rapporteur, visant à :

- faire uniformément référence à la trajectoire de remplissage, qui figure dans cette proposition de règlement ;

- clarifier la répartition des compétences entre la CRE et le Gouvernement s'agissant de la constitution et de la cession des stocks de sécurité, en préférant une gestion décentralisée ;

- prévoir une référence à un décret en Conseil d'État pour l'application de la disposition, dans un souci de protection juridique des opérateurs des infrastructures de stockage.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Un dispositif établi qui pourrait être modifié par le Plan RePowerEU

A. La loi « Hydrocarbures » , du 30 décembre 2017 36 ( * ) , a institué un cadre législatif complet en matière de stockage souterrain de gaz naturel.

Tout d'abord, la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) détermine les infrastructures de stockage de gaz naturel qui garantissent la sécurité d'approvisionnement du territoire à moyen et à long termes ainsi que le respect des accords bilatéraux de la France 37 ( * ) . En outre, elle peut comporter des sites dont l'autorisation est réduite, les capacités ont cessé ou sont en développement (article L. 421-3-1 du code de l'énergie).

Les capacités de ces infrastructures de stockage sont souscrites à l'issue d'enchères publiques , dont les modalités 38 ( * ) sont fixées par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) sur proposition des opérateurs de stockage (article L. 421-5-1 du même code).

Plus encore, le ministre chargé de l'énergie :

- fixe chaque année, par arrêté, les stocks minimaux 39 ( * ) nécessaires au 1 er novembre pour garantir la sécurité d'approvisionnement, entre le 1 er novembre et le 31 mars (article L. 421-4 du même code) ;

- peut imposer, à l'échéance d'un cycle d'enchères infructueux, aux fournisseurs ou aux opérateurs de stockage, de constituer des stocks complémentaires (article L. 421-6 du même code) ;

- peut lever l'obligation de remplissage des stocks minimaux (article L. 421-7 du même code) ;

De leur côté, les opérateurs de stockage :

- offrent un accès aux installations de stockage dans des conditions transparentes et non discriminatoires (article L. 421-5 du même code) ;

- assurent un niveau de stockage correspondant à celui fixé et le transmettent, avant le 1 er novembre (article L. 421-7  du même code) ;

- bénéficient d'une compensation pour la constitution de stocks complémentaires, dans le cadre des tarifs d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel, aussi appelés « accès des tiers aux réseaux de transport » (ATRT) (article L. 421-6 du même code) ;

- sont passibles de sanctions, le cas échéant pécuniaires, en cas de manquement aux obligations prévues pour les stocks minimaux comme complémentaires (article L. 421-6 et L. 421-7 du même code) ;

- établissent un programme annuel d'investissements soumis pour approbation à la CRE (article L. 421-7-1 du même code).

Les tarifs dits ATRT des infrastructures de stockage fixées par la PPE sont établis de manière transparente et non discriminatoire ; ils comprennent une rémunération normale des capitaux investis, les coûts induits par les stocks complémentaires, les dépenses de recherche et développement (R&D) nécessaires à la sécurité de ces infrastructures et les coûts induits par la modification du gaz acheminé (article L. 452-1 du même code). De plus, la méthode utilisée pour fixer ces tarifs 40 ( * ) est déterminée par la CRE (article L. 452-2 du même code).

Dans ce contexte, un arrêté du 9 mai 2018 41 ( * ) a fixé à 85 % le niveau de l'obligation de constitution des stocks minimaux , prévue à l'article L. 421-7 du code de l'énergie.

B. Annoncé le 8 mars 2022 et présenté le 18 mai, le Plan RePowerEU 42 ( * ) vise à permettre aux États membres de l'Union européenne de sortir de leur dépendance aux importations d'hydrocarbures russes .

Parmi ces mesures , le 23 mars 2022 , la Commission européenne a présenté une proposition de règlement 43 ( * ) instituant une obligation de stockage , et révisant à cette fin les règlements du 13 juillet 2009 44 ( * ) et du 25 octobre 2017 45 ( * ) .

À cette fin, un article 6 bis , inséré dans le règlement précité de 2017, fixe un objectif de 80 % de remplissage pour 2022 et de 90 % à compter de l'année suivante.

Pour y parvenir, les États membres doivent prendre toutes les mesures nécessaires, comme des obligations pour les fournisseurs de gaz, les propriétaires des installations de stockage et les gestionnaires des réseaux de transport, mais aussi des incitations financières pour les acteurs de marchés ou des compensations liées aux recettes et aux coûts induits (article 6 ter ).

Ils doivent aussi contrôler le niveau de remplissage des stocks et en rendre compte à la Commission européenne, en appliquant, le cas échéant des sanctions ou des amendes aux acteurs de marché (article 6 quinquies ).

Cette proposition, en cours d'examen à l'échelon européen, a été appuyée en ces termes par le Conseil européen , dès la réunion des 24 et 25 mars à Bruxelles 46 ( * ) : « le Conseil européen a évalué l'état de préparation de l'UE pour l'avenir immédiat et a chargé le Conseil d'examiner les travaux sur les propositions de la Commission relatives à une politique de l'UE en matière de stockage de gaz, en prenant dûment en compte et en respectant les intérêts des États membres disposant d'une capacité de stockage significative afin d'assurer un juste équilibre. La reconstitution des stocks de gaz dans l'ensemble de l'Union devrait commencer dès que possible, en tenant pleinement compte des mesures de préparation nationales ».

II. Le dispositif envisagé - L'institution de stocks de sécurité

L'article initial modifie sur plusieurs points le dispositif existant de stockage souterrain de gaz naturel.

Tout d'abord, le 1° supprime les opérateurs de stockage des stocks complémentaires ainsi que la compensation des coûts dont ils peuvent bénéficier dans le cadre de l'ATRT (articles L. 421-6 du code de l'énergie)

De plus, le 2° oblige le ministre chargé de l'énergie à fixer, par un arrêté pris après avis de la CRE, une trajectoire annuelle de remplissage aux opérateurs de stockage (nouvel article L. 421-7-2 du même code).

Le ministre peut, si le niveau des capacités souscrites par les fournisseurs de gaz, y compris complémentaires, ou leur utilisation, laisse prévoir un remplissage inférieur à l'objectif, ordonner aux opérateurs de stockage de constituer des stocks de sécurité. Pour ce faire, ils utilisent, en priorité, les capacités de leurs installations non souscrites et, dans la mesure nécessaire, la part non utilisée des capacités souscrites.

La CRE assure le suivi et l'atteinte des objectifs et en contrôle le respect. Elle élabore les outils de prévision d'un risque de non-atteinte.

Un décret, pris après avis de la CRE, précise les modalités et les conditions du présent article, en particulier celles de constitution des stocks de sécurité par les opérateurs de stockage et de leur cession.

Enfin, le 3° introduit une référence aux stocks de sécurité dans les coûts supportés par les opérateurs de stockage dans le cadre de l'ATRT (article L. 452-1 du code de l'énergie).

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Des ajustements techniques dont le renforcement des attributions de la CRE

A. En commission, l'Assemblée nationale a adopté 4 amendements présentés par Maud Bregeon , rapporteure pour avis pour la commission des affaires économiques, avec l'avis favorable du Gouvernement :

- un amendement a introduit des « objectifs intermédiaires de remplissage » , et précisé que l'objectif minimal intervient « au 1 er novembre de chaque année » ;

- un amendement a confié à la CRE le soin de définir « par délibération les modalités de constitution des stocks de sécurité par les opérateurs des infrastructures de stockage et les modalités de cession de ces stocks » plutôt que de renvoyer à un décret en Conseil d'État pris après son avis ;

- un amendement a préféré une référence « aux objectifs minimaux de remplissage », plutôt qu'à « la trajectoire minimale de remplissage », dans les coûts des opérateurs de stockage pris en compte dans l'ATRT ;

- un amendement a procédé à plusieurs modifications rédactionnelles, notamment pour harmoniser les termes d' « objectifs » et d' « opérateurs » .

B. En séance, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par le Gouvernement , avec l'avis favorable de la rapporteure Maud Bregeon, modifiant les stocks de sécurité :

- il prévoit que la CRE tienne compte des principes de constitution des stocks de sécurité précisées par décret ;

- de plus, il spécifie que ces principes sont :

§ l'interdiction de l'utilisation des stocks de sécurité en dehors des conditions fixées par le décret et des modalités définies par la CRE ;

§ l'assimilation de leur coût, diminué des recettes, à des charges imputables aux obligations de service public ;

§ la déclaration par les opérateurs commercialisant moins de 40 TWh de capacités des coûts associés à l'achat du gaz, des coûts faisant l'objet d'une certification par un commissaire aux comptes puis d'une délibération (un mois plus tard) et d'un versement (un mois plus tard) par la CRE ;

§ l'attribution par ces opérateurs des recettes tirées de la cession de ces stocks.

- enfin, les opérateurs de stockage ont été réintroduits dans les stocks complémentaires, mentionnés à l'article L. 421-6 du code de l'énergie.

Cet amendement a fait l'objet de deux sous-amendements, ayant reçu l'avis favorable de la rapporteur Maud Bregeon et du Gouvernement :

- le premier, présenté par la députée Marie-Noëlle Battistel, et les membres du groupe Socialistes et apparentés, prévoit que la CRE peut proposer aux opérateurs des infrastructures de stockage un versement anticipé, sur la base d'une déclaration préalable et dans la limite de leurs achats prévisionnels, si ceux-ci sont de nature à compromettre la viabilité économique de l'opérateur, notamment au regard de ses conséquences sur la trésorerie ;

- le second, présenté par les députés Thibault Bazin et Charles de Courson, prévoit le maintien de la prise en charge des stocks complémentaires dans  l'ATRT.

De plus, un amendement, présenté par le député Thibault Bazin, est venu préciser que la trajectoire de stockage est appréciée individuellement.

IV. La position de la commission - Un dispositif nécessaire pouvant être consolidé

A. Le rapporteur partage sur le principe la consolidation du dispositif de stockage, qui vise à garantir la sécurité d'approvisionnement en gaz cet hiver et les suivants.

Dans son étude d'impact 47 ( * ) , le Gouvernement a indiqué que l'article « complète ce mécanisme de régulation par un mécanisme de sécurisation du remplissage des infrastructures essentielles de stockage de gaz naturel permettant de pallier une éventuelle défaillance d'un fournisseur de gaz naturel ayant souscrit des capacités de stockage, ainsi que d'assurer un éventuel remplissage anticipé ou renforcé des infrastructures essentielles de stockage de gaz naturel. »

À cette fin, « les stocks de gaz naturel nécessaires pour pallier une éventuelle défaillance d'un fournisseur de gaz naturel ou assurer un éventuel remplissage anticipé ou renforcé seraient constitués par les opérateurs des infrastructures essentielles de stockage de gaz naturel et les coûts couverts par les tarifs d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel. »

Preuve de la réalité de ces risques de défaillances, la société russe Gazprom n'a pas rempli les stocks de gaz l'hiver dernier, en Allemagne, en Autriche et aux Pays-Bas.

Interrogé sur cette difficulté, le Gouvernement a indiqué au rapporteur que le dispositif permettrait d'y répondre, car « en cas de non-remplissage par un fournisseur de gaz naturel des capacités de stockage qu'il a souscrites, le niveau de remplissage assuré par les fournisseurs de gaz se retrouverait inférieur à la trajectoire de remplissage arrêté par la ministre chargée de l'énergie, et les opérateurs des infrastructures de stockage constitueraient alors les stocks de sécurité nécessaire au respect de la trajectoire. ».

B. Le rapporteur observe que le dispositif, tout comme les autres relatifs à la sécurité d'approvisionnement en gaz, emportent des atteintes - justifiées et proportionnées - au cadre constitutionnel.

Dans son avis 48 ( * ) , le Conseil d'État a estimé que les dispositions afférentes au marché du gaz emporte des atteintes au cadre constitutionnel : « Chacune de ces dispositions porte atteinte, à des degrés variables, à des droits ou libertés garantis par la Constitution, en particulier à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle, découlant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ou au droit de propriété, protégé par son article 2 ».

Cependant, il a souligné que les dispositions précitées sont justifiées par un motif impérieux d'intérêt général, en l'espèce la sécurité de l'approvisionnement en gaz, et proportionnées à cet objectif : « Le Conseil d'État regarde chacune des atteintes portées à des droits ou à des libertés, qui ne sont pas absolus, comme justifiées par l'intérêt général impérieux qui s'attache à la sécurisation de l'approvisionnement des consommateurs en gaz naturel. Cette sécurisation implique, désormais, non seulement de prévenir les difficultés d'approvisionnement, mais, en outre, d'être en mesure de remédier, en urgence, aux tensions très graves qui peuvent fragiliser les réseaux en période hivernale de forte demande. Ces mesures lui paraissent également proportionnées à l'objectif poursuivi »

Tout en prenant acte des justifications apportées par le Conseil d'État sur la constitutionnalité des dispositions d'urgence, le rapporteur appelle le Gouvernement à ne pas multiplier ou pérenniser de telles dispositions, au-delà de ce qui est strictement nécessaire pour répondre à la crise énergétique actuelle.

C. Le rapporteur constate que le dispositif présente un coût pour les consommateurs, à raison de sa prise en compte dans les tarifs d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel.

Dans son étude d'impact, le Gouvernement a estimé que le dispositif « n'a pas [...] d'impact budgétaire » , dans la mesure où le dispositif est financé via l'ATRT. Sa vérification « pourra être mutualisé[e] » par la CRE avec la régulation des opérateurs de stockage qu'elle régule déjà depuis 2018.

Le rapporteur tient à rappeler que les soutiens aux fournisseurs, aux producteurs ou aux stockeurs, octroyés à travers les tarifs d'utilisation des réseaux de distribution ou de transport, en gaz comme en électricité, se répercute in fine sur les consommateurs finals.

De plus, il relève que les coûts associés à la constitution des stocks de sécurité, nouvellement pris en charge dans l'ATRT, pourraient être plus élevés que ceux liés aux stocks complémentaires.

Sollicité sur ce point, le Gouvernement a indiqué que « l'achat de gaz naturel pour constituer des stocks de sécurité à hauteur de 15 points de remplissage nécessiterait de mobiliser 2,7 Mds€ dans l'hypothèse d'un prix du gaz naturel de 140 €/MWh. Il s'agit d'un montant similaire à celui nécessaire pour constituer 20 TWh de stocks complémentaires. »

Dans ce contexte, le rapporteur sera particulièrement vigilant au suivi du coût du dispositif dans le cadre de ses travaux budgétaires.

D. Enfin, le rapporteur observe que le dispositif présente plusieurs ambiguïtés et incomplétudes.

En premier lieu, le dispositif ne reprend pas l'ensemble des éléments prévus par la proposition de règlement : il évoque une trajectoire annuelle là où la proposition prévoit des rendez-vous infra-annuels ; il n'intègre pas l'objectif de 80 % de stockage pour 2022 et 90 % de stockage à compter de 2023 ; il ne réserve pas le cas de la déclaration d'urgence ; il ne prévoit pas d'obligation de certification ou de rabais jusqu'à 100 % pour l'ATRT.

Sur ces différents sujets, le Gouvernement a indiqué que « le niveau de remplissage [et] le traitement d'une déclaration d'urgence » relèvent « du domaine règlementaire » et que « l'application de certification ou les dispositions relatives au tarif d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel sont d'application immédiate et il n'a pas été identifié de précision devant être apportée par la législation française ».

En second lieu, dans sa rédaction initiale, le dispositif supprimait les opérateurs de stockage des stocks complémentaires, sans prévoir de délai, ce qui interrogeait, d'une part, sur l'intérêt du dispositif maintenu, qui semblait vidé de sa substance, d'autre part, sur les effets de son entrée en vigueur, immédiate pour les stocks, mais aussi pour les enchères publiques et l'ATRT.

Interrogé sur ce point, le Gouvernement a précisé que « l'article L. 421-6 du code de l'énergie n'est plus utile pour l'hiver 2022-2023 car toutes les capacités de stockage de gaz H ont désormais été souscrites ».

Pour autant, le Gouvernement est revenu sur cette suppression envisagée des opérateurs de stockage des stocks complémentaires, en séance publique à l'Assemblée nationale, ce qui convient au rapporteur.

Enfin, contrairement aux stocks complémentaires, les stocks de sécurité ne prévoient aucune sanction, le cas échéant pécuniaire, en cas de manquement aux obligations. C'est un oubli dans la mesure où l'objectif du texte est de garantir la sécurité d'approvisionnement en gaz.

Sollicité sur ce point, le Gouvernement a répondu que « le dispositif de sécurisation du remplissage des stockages de gaz naturel proposé au projet d'article L. 421--7-2 repose sur les opérateurs des infrastructures essentielle de stockage de gaz naturel, qui sont des opérateurs régulés par la CRE en application de l'article L. 425-2-1 du code de l'énergie. En cas de non-respect des obligations qui leur sont assignées, la CRE dispose d'ores et déjà de moyens pour sanctionner les opérateurs des infrastructures de stockage de gaz naturel dans le cadre de leur régulation ».

Dans ce contexte, la commission a adopté un amendement ( COM-222 ), présenté par le rapporteur, visant à :

- faire uniformément référence à la trajectoire de remplissage, qui figure dans la proposition de règlement sur le stockage présenté dans le cadre du Plan RepowerUE ;

- clarifier la répartition des compétences entre la CRE et le Gouvernement s'agissant de la constitution et de la cession des stocks de sécurité, en préférant une gestion décentralisée ;

- prévoir une référence à un décret en Conseil d'État pour l'application de la disposition, dans un souci de protection juridique des opérateurs des infrastructures de stockage.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 11 (délégué)

Modification du dispositif de l'interruptibilité rémunérée

Cet article vise à modifier le dispositif de l'interruptibilité rémunérée, en permettant au gestionnaire de réseau de transport de gaz naturel de procéder à l'interruption des consommateurs finals.

La commission a adopté un amendement ( COM-223 ), présenté par le rapporteur, prévoyant que :

- le gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel procède ou fait procéder à l'interruption du gaz, afin de lui laisser une souplesse de gestion interne ;

- l'autorité organisatrice de la distribution de gaz naturel est informée sans délai de cette interruption, dans un souci de transparence et d'évaluation.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Un dispositif exceptionnel dont la modification n'est pas prévue par le Plan RePowerEU

A. Institué par la loi de « Transition énergétique », du 17 août 2015 49 ( * ) , le dispositif de l'interruptibilité rémunérée permet au gestionnaire de réseau de transport de gaz naturel d'interrompre , à son initiative, la consommation en gaz des consommateurs finals agréés avec compensation , lorsque le fonctionnement des réseaux est menacé de manière grave et afin de sauvegarder l'alimentation des consommateurs protégés (article L. 431-6-2 du code de l'énergie).

Les sujétions de service public ainsi imposées aux consommateurs finals agréés sont l'objet d'une compensation par le gestionnaire du réseau de transport , dans la limite d'un plafond de 30 € par kilowatt.

Les volumes de capacités interruptibles sont fixées par un arrêté du ministre chargé de l'énergie, tandis que les conditions d'agrément, les modalités d'interruption et les conditions de compensation le sont par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie et de l'énergie, pris après avis de la CRE.

Quant au dispositif de l'interruptibilité non rémunérée, il permet au gestionnaire de réseau de transport de gaz naturel d'interrompre , à son initiative, la consommation de gaz des consommateurs finals agréés sans compensation , lorsque le fonctionnement normal de ces réseaux est menacé de manière exceptionnellement grave et ne peut plus être préservé par des appels au marché pour l'équilibrage et la continuité d'acheminement ni par l'interruption des capacités rémunérées (article L. 431-6-2 du code de l'énergie).

De plus, le gestionnaire de réseau de transport peut demander au gestionnaire d'un réseau de distribution alimenté par un réseau de transport de procéder à l'interruption ; ce dernier peut aussi y procéder à son initiative, lorsque le fonctionnement du réseau est menacé de manière exceptionnellement grave.

Les conditions d'agrément et les modalités de notification sont fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie et de l'énergie, pris après avis de la CRE.

Dans ce contexte, un arrêté 17 décembre 2019 50 ( * ) est venu préciser les modalités règlementaires de ces deux dispositifs .

B. Contrairement au stockage, le dispositif de l'interruptibilité ne fait l'objet d'aucune mesure législative dans le cadre du Plan RePowerEU 51 ( * ) , du 18 mai 2022.

Pour autant, le règlement 25 octobre 2017 52 ( * ) précise, dans ses considérants que « les clients qui consomment du gaz pour la production d'électricité ou à des fins industrielles peuvent également avoir un rôle important à jouer en matière de sécurité de l'approvisionnement en gaz, étant donné qu'ils peuvent réagir à une crise en prenant des mesures axées sur la demande, telles que les contrats interruptibles et le changement de combustible, qui peuvent avoir une incidence immédiate sur l'équilibre entre la demande et l'offre ». De plus, il liste l'obligation de recourir à des contrats interruptibles parmi les mesures axées sur la demande devant être prises en compte par l'autorité compétente pour l'élaboration du plan d'action préventif et du plan d'urgence (annexe VIII).

En outre, dans le cadre du Plan pour réduire la consommation de gaz naturel, proposé le 20 juillet 2022, la Commission européenne a énuméré les « contrats d'interruptibilité » 53 ( * ) parmi les mesures incitatives de réduction de cette consommation.

II. Le dispositif envisagé - La mobilisation du gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel

L'article initial propose de modifier l'article L. 431-6-2 du code de l'énergie, afférent au dispositif de l'interruptibilité rémunérée, pour permettre au gestionnaire de réseau de transport de gaz naturel de demander au gestionnaire de réseau de distribution alimenté par ce réseau de procéder à l'interruption des consommateurs finals agréés.

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Une adoption sans modification

En commission comme séance, l'Assemblée nationale a adopté l'article sans modification .

IV. La position de la commission - Un dispositif utile dont les coûts nécessitent d'être maîtrisés

A. Le rapporteur partage sur le principe l'ajustement du dispositif de l'interruptibilité rémunérée, qui contribue lui aussi à assurer la sécurité d'approvisionnement en gaz, cet hiver et les suivants.

Le volume de gaz naturel concerné n'est pas négligeable.

Dans son étude d'impact 54 ( * ) , le Gouvernement a ainsi estimé que les 4 000 consommateurs de gaz naturel raccordés à un réseau de distribution et consommant plus de 5 gigawattheures en puissance calorifique supérieure (GWh PCS) par an représentent une consommation cumulée d'environ 70 térawattheures (TWh PCS) par an.

Pour autant, ce volume demeure limité au regard de la consommation totale de gaz naturel, qui atteint 494 TWh en 2020 55 ( * ) .

B. Le rapporteur observe que le coût de l'ajustement du dispositif de l'interruptibilité rémunérée, tel que proposé par l'article 11, pourrait être élevé.

C'est, au reste, un sujet de préoccupation pour le Conseil d'État.

Dans son avis 56 ( * ) , il a ainsi relevé la nécessité de préciser le montant de la compensation : « Le Conseil d'État appelle, toutefois, l'attention du Gouvernement sur la nécessité, alors même que la situation résultant de l'arrêt des importations de gaz russe justifie particulièrement cette mesure, de déterminer avec soin le montant du rabais tarifaire consenti aux clients acceptant d'intégrer le mécanisme d'interruption de leur alimentation en gaz décrit au point 17, afin que ce soutien tarifaire soit proportionné à la contribution effective des clients à l'équilibrage du réseau ».

Or, le Gouvernement ne fournit aucun élément tangible sur ce sujet.

Il se contente, dans son étude d'impact, de préciser que l'impact financier « dépendra du volume de capacités interruptibles à contractualiser arrêté par la ministre chargée de l'énergie » ainsi que de « l'éventuelle fixation d'un prix plafond inférieur au niveau de 30 € par kilowatt ».

Sollicité sur ce sujet, le Gouvernement n'a pas fourni d'élément chiffré au rapporteur, se contentant d'indiquer que « le coût du dispositif dépendra par nature des volumes souscrits et du prix des offres proposées en réponse aux appels d'offres ».

C. Enfin, le rapporteur observe que le dispositif est perfectible, sur le fond comme sur la forme.

Tout d'abord, il ne prévoit que la possibilité pour le gestionnaire de réseau de transport de gaz naturel de demander au gestionnaire de réseau de distribution de procéder à l'interruption : ne sont prévus ni l'initiative propre du gestionnaire de réseau distribution ni encore la délégation par lui de l'interruption à un tiers.

À ce sujet, le Gouvernement a indiqué que « les contrats d'interruptibilité étant un outil d'équilibrage, il est préférable que les contrats soient passés avec les gestionnaires de réseaux de transport de gaz naturel. Le gestionnaire du réseau de distribution conserve néanmoins un rôle essentiel pour la vérification du respect de l'ordre d'interruptibilité ».

Plus encore, il ne précise pas de seuil ou de montant applicable, alors que le Gouvernement, dans son étude d'impact, évoque un seuil de 5 GWh PCS et un montant inférieur à 30 € et que le Conseil d'État, dans son avis, a insisté sur la prévention des dépassements de coûts.

Sur ce point, le Gouvernement a précisé « qu'il ne relève pas d'objection pour la précision du seuil de 5 GWh PCS par an. Le plafond de 30 € par kilowatt ne pose pas de difficulté particulière car il est possible de fixer un plafond inférieure dans le cahier des charges de l'appel d'offres » .

Aussi, la commission a adopté un amendement ( COM-223 ), présenté par le rapporteur, prévoyant que :

- le gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel procède ou fait procéder à l'interruption de gaz , afin de lui laisser une souplesse de gestion interne ;

- l'autorité organisatrice de la distribution de gaz naturel est informée sans délai de cette interruption , dans un souci de transparence et d'évaluation.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 11 bis (délégué)

Évaluation annuelle des ordres de délestage pris
dans le cadre de mesures de solidarité européenne

Cet article prévoit la transmission par le Gouvernement au Parlement d'un rapport annuel sur les ordres de délestage pris dans le cadre de mesures de solidarité européenne.

La commission a adopté un amendement rédactionnel ( COM-224 ), présenté par le rapporteur.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Des mesures exceptionnelles de délestage pouvant être prises par les gestionnaires des réseaux de transport et de distribution de gaz naturel

Créé par l'ordonnance du 19 décembre 2018 57 ( * ) , sur le « système gazier », l'article L. 434-3 du code de l'énergie dispose que « les gestionnaires des réseaux de transport et de distribution de gaz naturel peuvent émettre des ordres de délestage dans le cadre de la mise en oeuvre de mesures de solidarité européenne mentionnées à l'article 13 du règlement (UE) 2017/1938 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2017 concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en gaz naturel et abrogeant le règlement (UE) n° 994/2010 ».

II. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Une évaluation annuelle des ordres de délestage pris dans le cadre de mesures de solidarité européenne

En séance, l'Assemblée nationale a adopté un amendement, présenté par Mme la députée Valérie Rabault, prévoyant que le Gouvernement remette au Parlement une évaluation des ordres de délestage pris dans le cadre mesures de solidarité européenne, au plus tard le 31 mars de l'année suivante.

III. La position de la commission - Une évaluation utile, compte tenu de la crise gazière, pouvant gagner en intelligibilité

A. Tout en étant opposé à la multiplication des évaluations , le rapporteur observe que l'évaluation des ordres de délestage pris dans le contexte de la crise gazière est utile.

B. Pour autant, il constate que le dispositif proposé est perfectible, la rédaction proposée pouvant être simplifiée pour gagner en intelligibilité.

C'est pourquoi la commission a adopté un amendement rédactionnel ( COM-224 ) présenté par le rapporteur.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 12 (délégué)

Restriction, suspension ou réquisition
des installations de production d'électricité utilisant du gaz naturel

Cet article vise permettre au ministre chargé de l'énergie de restreindre, suspendre ou réquisitionner les installations de production d'électricité utilisant du gaz naturel en cas de menace sur la sécurité d'approvisionnement en gaz ou en électricité.

La commission a adopté un amendement ( COM-225 ) présenté par le rapporteur, proposant de :

- prévoir l'existence d'une menace grave et imminente, comme pour les articles 15 bis et 15 ter introduits par le Gouvernement en matière d'électricité ;

- consolider l'évaluation introduite à l'Assemblée nationale, en la transmettant aux comités régionaux de l'énergie, créés par la loi « Climat-Résilience », de 2021 ;

- préciser que les contrats d'achat visés pour les installations en cogénération sont l'ensemble de ceux en vigueur, en application de la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre III du code de l'énergie ;

- prévoir que la décision d'indemnisation est motivée, comme celle de restriction, de suspension ou de réquisition ;

- renvoyer à un décret en Conseil d'État l'application de la disposition, tout en laissant inchangée la caducité de la mesure dans un délai de 5 ans suivant la promulgation de la loi, issue des travaux de l'Assemblée nationale.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - De nombreuses mesures de sauvegarde en cas de menace ou d'atteinte sur le système électrique ou gazier, dont la révision n'est pas prévue par le Plan RePowerEU

A. En l'état actuel du droit, le code de l'énergie prévoit plusieurs mesures de sauvegarde 58 ( * ) en cas de crise :

- la possibilité pour le Gouvernement de soumettre , par décret en Conseil des ministres, à contrôle et à répartition , sur une période limitée, tout ou partie des ressources et produits énergétiques , en vue de remédier à une pénurie énergétique y compris localisée ou à une menace sur l'équilibre des échanges extérieurs (article L. 143-1 du code de l'énergie) ;

- la possibilité pour le ministre chargé de l'énergie de prendre des mesures temporaires de sauvegarde , sans qu'elles puissent faire l'objet d'une indemnisation, notamment en matière d'octroi ou de suspension des autorisations d'exploiter des installations de production d'électricité , en cas de crise grave sur le marché de l'énergie, de menace pour la sécurité ou la sûreté des réseaux et installations électriques, ou de risque pour la sécurité des personnes (article L. 143-4 du même code) ;

- la possibilité pour le ministre chargé de l'énergie d'ordonner des mesures conservatoires , en cas d'atteinte grave et immédiate à la sécurité et à la sûreté des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité ou à la qualité de leur fonctionnement (article L. 143-5 du même code) ;

- la possibilité pour le ministre chargé de l'énergie d'ordonner des mesures conservatoires , notamment en matière d'octroi ou de suspension des autorisations de fourniture ou de transport et des concessions de stockage souterrain de gaz naturel, en cas de menace pour la sécurité d'approvisionnement en gaz naturel local, national ou européen (article L. 143-6 du même code).

Les mesures conservatoires peuvent être proposées par la CRE en matière d'électricité et elles sont surveillées par elle, en électricité comme en gaz (article L. 143-5 et L. 143-6 du code de l'énergie).

S'agissant du pétrole, le Gouvernement peut, en outre, par voie règlementaire, réglementer ou suspendre l'importation ou l'exportation de pétrole brut ou de produits pétroliers (article L. 143-7 du même code).

B. Comme l'interruptibilité , les installations de production d'électricité à partir du gaz ne font l'objet d'aucune mesure législative dans le cadre du Plan RePowerEU 59 ( * ) , du 18 mai 2022.

Cependant, le règlement 25 octobre 2017 60 ( * ) précise, dans ses considérants que « les clients qui consomment du gaz pour la production d'électricité ou à des fins industrielles peuvent également avoir un rôle important à jouer en matière de sécurité de l'approvisionnement en gaz, étant donné qu'ils peuvent réagir à une crise en prenant des mesures axées sur la demande, telles que les contrats interruptibles et le changement de combustible, qui peuvent avoir une incidence immédiate sur l'équilibre entre la demande et l'offre ». De plus, il liste l'obligation d'utiliser l'électricité produite à partir d'autres sources que le gaz parmi les mesures axées sur l'offre devant être prises en compte par l'autorité compétente pour l'élaboration du plan d'action préventif et du plan d'urgence (annexe VIII).

En outre, la directive du 13 juillet 2009 61 ( * ) autorise les États membres à prendre temporairement des mesures de sauvegarde nécessaires « en cas de crise soudaine sur le marché de l'énergie et de menace pour la sécurité physique ou la sûreté des personnes, des appareils ou installations, ou encore l'intégrité du réseau » (article 46).

Enfin, dans le cadre du Plan pour réduire la consommation de gaz naturel, proposé le 20 juillet 2022, la Commission européenne a énuméré un « changement de combustible dans les secteurs de l'industrie et de l'énergie » 62 ( * ) parmi les mesures visant à sortir du gaz.

II. Le dispositif envisagé - Des pouvoirs de restriction, de suspension et de réquisition du ministre chargé de l'énergie à l'égard des installations de production d'électricité utilisant du gaz naturel

Créant un article L. 143-6-1 dans le code de l'énergie, l'article initial prévoit que le ministre chargé de l'énergie peut :

- d'une part, ordonner à des exploitants d'installation de production d'électricité utilisant du gaz naturel de restreindre ou de suspendre l'activité de leurs installations, en cas de menace sur la sécurité d'approvisionnement en gaz naturel au niveau local, national ou européen ;

- d'autre part, réquisitionner les services chargés de l'exploitation de ces installations, en cas de menace, en sus, sur la sécurité d'approvisionnement en électricité, sur tout ou partie du territoire national.

Les mesures ne s'appliquent que pendant la durée strictement nécessaire au maintien de la sécurité d'approvisionnement et sont proportionnées à la gravité de la menace pesant sur cette dernière.

Elles sont prises au terme d'une décision motivée, précisant sa durée et ses modalités.

Elles donnent lieu à une indemnisation, qui compense exclusivement la perte matérielle, directe et certaine. Cette indemnisation tient compte de toutes les dépenses exposées de manière effective et certaine, de la rémunération du travail, de l'amortissement et de la rémunération du capital, appréciés sur des bases normales. En cas de réquisition, les éventuelles recettes sont reversées à l'exploitation et déduites de l'indemnité. De plus, la responsabilité et l'indemnisation de l'État, prévues par les articles L. 2234-7 et L. 2234-19 du code de la défense, s'appliquent.

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Des ajustements techniques dont l'exonération des installations de cogénération et l'évaluation à compter du 31 mars de l'année suivante

A. En commission, l'Assemblée nationale a adopté 6 amendements présentés ou soutenus par Maud Bregeon , rapporteure pour avis pour la commission des affaires économiques, avec l'avis favorable du Gouvernement :

- un amendement excluant du champ de l'article les « installations de cogénération assurant une production combinée d'au moins deux énergies utiles, électrique et thermique, à partir de gaz naturel lorsque celles-ci sont raccordées à un réseau de chaleur » - cet amendement ayant été présenté initialement par la députée Marie-Noëlle Battistel et les membres du groupe Socialistes et apparentés ;

- un amendement prévoyant « l'établissement d'un rapport d'évaluation comportant une synthèse des mesures prises et un bilan de leurs effets [...] transmis par le Gouvernement au Parlement au plus tard le 31 mars de l'année suivante » - cet amendement ayant été présenté initialement par la députée Marie-Noëlle Battistel et les membres du groupe Socialistes et apparentés ;

- 4 amendements notamment pour faire référence à « la menace mentionné au 1° » plutôt qu'à « la menace précédente », à « la suspension d'activité » plutôt qu'à « la suspension » ou encore clarifier des connecteurs ( « en outre », « ainsi que » ).

B. En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements :

- un amendement, présenté par le député Didier Le Gac , consolidant l'exclusion des installations de cogénération, pour viser celles « pour lesquelles un contrat d'obligation ou d'électricité est en vigueur ou qui alimentent en énergie thermique un réseau de distribution de chaleur ou de froid répondant à la qualification de service public industriel et commercial » ;

- un amendement , présenté par la rapporteure Maud Bregeon, modifiant la référence « au rapport devant être remis par le Gouvernement au plus tard le 31 décembre de l'année suivante » , dont la portée est essentiellement rédactionnelle ;

- 2 amendements , présentés la députée Marie-Noëlle Battistel et les membres du groupe Socialistes et apparentés et la députée Perrine Goulet et plusieurs de ses collègues, prévoyant l'application du dispositif « jusqu'à une date fixée par décret et au plus tard cinq ans après la promulgation de la loi » et l'abrogation de l'article L. 143-6-1 du code de l'énergie « cinq ans après la date de promulgation de la présente loi ».

IV. La position de la commission - Des mesures de restriction, de suspension ou de réquisition fortement dérogatoires, appelant à être précisées, pour trouver un équilibre entre la situation de crise, d'une part, et la liberté d'entreprendre et le droit de propriété, d'autre part

A. Le rapporteur observe que les mesures de restriction, de suspension et de réquisition se superposent à un cadre déjà bien étoffé pour assurer la sécurité d'approvisionnement en électricité comme en gaz.

Dans son étude d'impact 63 ( * ) , le Gouvernement a indiqué nécessaire que « la loi permette à la ministre chargée de l'énergie de restreindre ou suspendre le fonctionnement des centrales à gaz, ou de les réquisitionner, en cas de menace sur la sécurité d'approvisionnement », précisant qu'« il est prévu une indemnisation de l'exploitant à hauteur de la perte matérielle, directe et certaine que la restriction, la suspension ou la réquisition lui impose ».

Selon lui, le cadre actuel ne permet pas cette possibilité : « Les articles L. 143-1 et L. 143-4 à 6 du code de l'énergie ne sont pas explicites sur la possibilité de réquisitionner des unités de production d'électricité, ni sur la possibilité de prendre des mesures exceptionnelles sur le fondement d'une double menace, à la fois sur la sécurité d'approvisionnement en gaz et en électricité. Il est donc proposé de clarifier cette possibilité ».

Pour ce qui le concerne, le rapporteur ne partage pas cette analyse : d'une part, les mesures de sauvegarde ou conservatoires, prévues aux articles L. 143-4 à L. 143-6 du code de l'énergie, sont particulièrement larges ; d'autre part, la réquisition des biens et des personnes, prévues aux articles L. 2212-1 et L. 2213-1 du code de la défense, existe déjà en droit positif ; enfin, l'article L. 143-4 de l'énergie peut être utilisé « en cas de crise sur le marché de l'énergie », n'excluant donc pas le risque d'une double crise gazière et électrique.

Pour le rapporteur, ce qui diffère, entre les dispositions existantes et celles proposées sont plutôt :

- les attributions de la CRE, le dispositif proposé ne lui réservant aucun rôle, alors que les articles L. 143-5 et L. 143-6 du code de l'énergie lui permettent actuellement de proposer les mesures conservatoires ou d'en surveiller la mise en oeuvre ;

- les modalités d'indemnisation, le dispositif proposé prévoyant une indemnisation dans tous les cas, alors qu'elle est exclue des mesures temporaires de sauvegarde, visées à l'article L. 143-4 du même code.

Interrogé sur l'opportunité de légiférer, le Gouvernement a indiqué que « le recours aux dispositifs de droit commun semble trop incertain juridiquement, en particulier car ceux-ci ne prévoit pas d'indemnisation des exploitants ».

B. Le rapporteur observe que les mesures de restriction, de suspension et de réquisition emportent des atteintes - là aussi justifiées et proportionnées - au cadre constitutionnel.

Dans son avis 64 ( * ) , le Conseil d'État a estimé que les dispositions afférentes aux installations de gaz sont proportionnées au motif d'intérêt général lié à la nécessité d'assurer la sécurité d'approvisionnement : « En particulier, les pouvoirs de réquisition des services responsables de l'exploitation de certaines installations fonctionnant au gaz sont précisément encadrés, limités dans le temps et strictement proportionnés à la gravité de la menace pesant sur les réseaux ».

Pour autant, ici encore, il appelle le Gouvernement à ne pas multiplier ou pérenniser de telles dispositions, au-delà de ce qui est strictement nécessaire pour répondre à la crise énergétique actuelle.

C. Le rapporteur constate que les mesures de restriction, de suspension et de réquisition présentent un coût mal évalué.

Dans son étude d'impact 65 ( * ) , le Gouvernement a estimé que « l'impact budgétaire devrait être faible », ajoutant qu'« en cas de réquisition, les recettes tirées du fonctionnement de l'installation devraient suffire à couvrir la perte matérielle imposée à l'exploitant ».

Le rapporteur considère au contraire que le coût pourrait être élevé, puisque le dispositif proposé prévoit une indemnisation « dans tous les cas ».

Sur ces enjeux, le Gouvernement a indiqué que « l'indemnisation est nécessaire afin de garantir la proportionnalité de la restriction du droit de propriété imposée par cet article 2 » et que « le coût n'a pas été estimé car il dépendra de la durée de la réquisition et des prix du gaz [même si] le coût devrait toutefois être limité, car l'électricité produite en cas de réquisition sera vendue sur le marché et les revenus seront versés à l'exploitant et viendront en déduction de l'indemnité due ».

D. Enfin, le rapporteur relève que les mesures de restriction, de suspension et de réquisition présentent plusieurs ambiguïtés et incomplétudes.

Tout d'abord, le dispositif afférent à l'électricité s'appliquerait en cas de mesure sur la sécurité d'approvisionnement sur tout ou partie du territoire national, ce qui appelle deux observations : d'une part, l'ensemble du territoire national est visé, alors que l'étude d'impact exclut les outre-mer dont Wallis-et-Futuna ; d'autre part, les cas de menace locale ou européenne sur la sécurité d'approvisionnement ne sont pas prévus, au contraire du gaz.

Sur ce sujet, le Gouvernement a indiqué que « si la sécurité d'approvisionnement d'un autre pays européen est menacée, alors la sécurité d'approvisionnement française sera impactée du fait des échanges d'électricité avec les interconnexions. Il semble donc suffisant de se référer à la sécurité d'approvisionnement nationale ». Il a ajouté que « l'article ne sera applicable que dans les outre-mer dans lesquels le livre I du code de l'énergie est applicable ».

Par ailleurs, la CRE ne dispose d'aucune attribution, de proposition ou de surveillance, contrairement à ce que prévoient les articles L. 143-5 et L. 143-6 du code de l'énergie.

Interrogé sur ce point, le Gouvernement a précisé que « l'article prévoit d'ores et déjà un encadrement strict : limite dans le temps et stricte proportion à la gravité de la menace pesant sur les réseaux. Cela permet un contrôle de leur usage par le juge, qui peut être saisi par tout exploitant qui estimerait que le Gouvernement outrepasse ce qui est strictement nécessaire. Un contrôle supplémentaire par la CRE ne nous semble pas nécessaire et serait éloigné des missions de la CRE, qui n'a pas pour mission de s'assurer de la proportionnalité des atteintes au droit de propriété ».

De plus, si la décision de restriction ou de suspension de même que la réquisition doit être motivée, il n'en va pas de même de l'indemnisation, dont l'impact économique et financier est important.

Sur ce sujet, le Gouvernement a précisé que « cela ne [lui] semble pas nécessaire. L'indemnisation est calculée au vu des dépenses exposées par l'exploitant. En cas de refus de l'indemnisation demandée, l'administration devra motiver ce refus ».

Enfin, la rédaction de l'article est parfois complexe et redondante, appelant donc à être clarifiée. Il en va ainsi des conditions d'application, qui omettent la référence à une menace « grave » et « imminente » , comme le font les articles 15 bis et 15 ter adoptés à l'initiative du Gouvernement dans le domaine de l'électricité. Il en va également ainsi des contrats d'achat des installations en cogénération, qui ne sont pas définis juridiquement. Il en va enfin ainsi du rapport d'évaluation ou du délai d'application.

Dans ce contexte, le rapporteur a présenté un amendement ( COM-225 ), proposant de :

- prévoir l'existence d'une menace grave et imminente, comme pour les articles 15 bis et 15 ter introduits par le Gouvernement en matière d'électricité ;

- consolider l'évaluation introduite à l'Assemblée nationale, en la transmettant aux comités régionaux de l'énergie, créés par la loi « Climat et résilience », de 2021 ;

- préciser que les contrats d'achat visés pour les installations en cogénération sont l'ensemble de ceux en vigueur, en application de la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre III du code de l'énergie ;

- prévoir que la décision d'indemnisation est motivée, comme celle de restriction, de suspension ou de réquisition ;

- renvoyer à un décret en Conseil d'État l'application de la disposition, tout en laissant inchangée la caducité de la mesure dans un délai de 5 ans suivant la promulgation de la loi, issue des travaux de l'Assemblée nationale.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 13 (délégué)

Soumission des terminaux méthaniers flottants
à un régime administratif propre

Cet article vise à instituer un régime administratif propre pour les terminaux méthaniers flottants.

La commission a adopté un amendement ( COM-226 ) présenté par le rapporteur visant à :

- circonscrire la possibilité de recourir à un terminal méthanier flottant au territoire métropolitain continental, au sens de l'article L. 141-1 du code de l'énergie ;

- préciser que le programme annuel d'investissements comprend les opérations d'entretien ou de renouvellement des installations et des équipements, conformément à l'intention du Gouvernement.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Un cadre parcellaire qui pourrait être modifié par le Plan RePowerEU

A. Selon leur nature, les méthaniers sont assujettis à un régime juridique différent, plus robuste pour ceux terrestres que ceux flottants .

Ainsi, les méthaniers terrestres relèvent du régime des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) (articles L. 511-1 et L. 511-2 du code de l'environnement).

En revanche, ceux flottants sont soumis au droit international maritime - pour les règles et les contrôles de sécurité - ainsi qu'aux règlements de police portuaire, généraux ou spécifiques, ou à des prescriptions additionnelles - pour leurs activités dans l'enceinte des ports (articles L. 5331-2, L. 5331-7 et L. 5331-10 du code des transports).

B. Dans le cadre du Plan RePowerEU 66 ( * ) , présenté le 18 mai 2022 , la Commission européenne a proposé la constitution d'une plateforme pour l'achat volontaire de gaz, de gaz naturel liquéfié (GNL) et d'hydrogène . Elle a aussi rappelé que la poursuite des projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC), dans le cadre des réseaux transeuropéens d'énergie (RTE-E), devront permettre aux États membres d'avoir accès à trois sources de gaz ou au marché mondial du GNL. À cette fin, elle a évalué les besoins financiers à 10 Mds€ d'ici 2030, pour disposer d'infrastructures gazières suffisantes, y compris de terminaux d'importation de GNL.

Ces propositions, en cours d'examen, ont été appuyées par le Conseil européen, dès la réunion des 24 et 25 mars à Bruxelles 67 ( * ) , qui a indiqué que « Dans la perspective de l'hiver prochain, les États membres et la Commission, s'attacheront d'urgence à : a) établir les mécanismes de solidarité et de compensation nécessaires ; b) collaborer à l'achat commun volontaire de gaz, de GNL et d'hydrogène, en faisant un usage optimal du poids politique et commercial collectif de l'Union européenne et de ses États membres pour modérer les prix lors des négociations 68 ( * ) [...] ; c) achever et améliorer nos interconnexions gazières et électriques dans toute l'Union européenne, avec notamment la synchronisation complète des réseaux électriques ; d) veiller à la sécurité des approvisionnements pour l'ensemble des États membres. »

II. Le dispositif envisagé - Un régime administratif appliqué aux terminaux méthaniers flottants

L'article initial prévoit que le ministre chargé de l'énergie peut décider, par arrêté, de soumettre un terminal méthanier flottant ou un projet d'installation à un régime administratif spécial, en cas de nécessité d'augmenter les capacités nationales de traitement de GNL.

Ce régime juridique emporte plusieurs conséquences :

- l'obligation pour l'opérateur de maintenir le terminal en exploitation sur le territoire national pendant une durée fixée par l'arrêté (I) ;

- la soumission de terminal aux règles et aux contrôles de sécurité du droit international maritime de la catégorie dont il relève ainsi qu'à l'ensemble des prescriptions prises par le préfet, sur proposition de l'autorité investie du pouvoir de police portuaire, afin de prévenir les inconvénients ou dangers, pour la santé, la sécurité et la salubrité publiques et pour l'environnement (II) ;

- l'établissement par l'opérateur d'un programme annuel d'investissements soumis pour approbation à la CRE, cette dernière veillant à la réalisation des investissements et au bon fonctionnement de l'installation (III) ;

- la couverture des coûts supportés par l'opérateur du terminal, dont la rémunération des capitaux investis, de manière transparente et non discriminatoire, dans le cadre des tarifs d'utilisation des réseaux de transport de gaz, ou « accès des tiers aux réseaux de transports de gaz » (ATRT), dans la mesure où ils correspondent à ceux d'un opérateur efficace et sous réserve (IV) :

§ du reversement des gestionnaires des réseaux de transport de gaz naturel à l'opérateur du terminal d'une part du montant recouvrés, selon des modalités fixées par la CRE ;

§ du reversement par l'opérateur du terminal vers les gestionnaires des réseaux de transport de gaz naturel de l'excédent de recettes, lorsque celles-ci sont supérieures aux coûts, selon des modalités fixées par la CRE ;

§ d'un accès transparent et discriminatoire des tiers aux capacités et aux services offerts par le terminal méthanier en application du droit d'accès, prévu à l'article L. 111-97 du code de l'énergie, sous l'égide de la CRE.

- l'impossibilité pour l'opérateur bénéficiant d'une autorisation d'exploitation d'une installation de GNL, d'un stockage de gaz ou d'un ouvrage d'interconnexion, mentionnée à l'article L. 111-109 du code de l'énergie, de bénéficier de la garantie de couverture susmentionnée (V) ;

- la définition par la décision accordant l'autorisation précitée des règles et des mécanismes applicables à la gestion et à l'attribution des capacités de l'installation, définis par la CRE (VI).

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Des ajustements techniques dont une obligation de démantèlement et de renaturation

A. En commission, l'Assemblée nationale a adopté 6 amendements présentés par Maud Bregeon, rapporteure pour avis pour la commission des affaires économiques :

- 2 amendements précisant, outre des ajustements rédactionnels, que la durée du terminal méthanier flottant est fixée par « l'arrêté » pris par le ministre chargé de l'énergie,

- un amendement prévoyant qu'un décret en Conseil d'État fixe les obligations incombant à l'opérateur en matière de démantèlement des installations, de renaturation des espaces artificialisés et de construction des réseaux de raccordement et des installations connexes - cet amendement ayant initialement été présenté par la députée Marie-Noëlle Battistel et les membres du groupe Socialistes et apparentés ;

- 3 amendements rédactionnels préférant « s'il est nécessaire d'augmenter les capacités » à « en cas de nécessité », le « montant des tarifs d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel qu'ils recouvrent » au « montant correspondant au recouvrement » de ces tarifs et le « droit d'accès prévu à l'article L. 111-97 du code de l'énergie » au « principe énoncé » à cet article.

À l'exception de l'amendement de Mme Battistel, ces amendements ont reçu l'avis favorable du Gouvernement.

B. En séance, l'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements :

- un amendement, présenté par Mme Battistel , et ayant reçu l'avis favorable de la rapporteure et du Gouvernement, supprimant la référence au décret en Conseil d'État pour la détermination des obligations en matière de démantèlement. À la place, il a prévu que les prescriptions prises par le préfet, sur proposition de l'autorité investie du pouvoir de police portuaire, « précisent en particulier les obligations liées au démantèlement ou à l'adaptation des installations et équipements à l'issue de leur exploitation, incluant les éventuelles obligations de renaturation des espaces artificialisés du site » Cet amendement a été sous-amendé par la rapporteure, pour supprimer la limitation aux « espaces artificialisées du site » ;

- 2 amendements, présentés par la rapporteure , précisant que l'arrêté peut assigner des capacités de traitement à atteindre s'agissant du « gaz naturel liquéfié » et préférant la référence au « représentant de l'État dans le département » à celle du « préfet ».

IV. La position de la commission - Un régime administratif utile mais devant être ajusté

A. Le rapporteur estime utile l'institution d'un régime administratif propre aux terminaux méthaniers flottants, pour garantir l'approvisionnement en GNL.

Dans son étude d'impact 69 ( * ) , le Gouvernement a indiqué que le dispositif poursuit deux objectifs : « Le premier objectif est de pouvoir accroître rapidement les capacités d'importation de gaz naturel liquéfié pour assurer la capacité du réseau de transport de gaz naturel à satisfaire une demande raisonnable. Le second objectif est de sécuriser la disponibilité des capacités d'importation de gaz naturel liquéfié nécessaires à la sécurité d'approvisionnement en gaz naturel. »

Il a ajouté qu' « une fois réalisées les mesures d'optimisation des terminaux méthaniers existants, le raccordement d'un terminal méthanier flottant constitue l'option la plus rapide pour accroître les capacités d'importation de gaz naturel. Cette option consiste en effet à utiliser un navire terminal méthanier flottant existant et à le raccorder au réseau français de transport de gaz naturel. »

Il a précisé qu' « un projet d'implantation d'un terminal méthanier flottant dans la circonscription du port du Havre est actuellement étudié. Les premiers éléments transmis par les porteurs du projet mettent en évidence la possibilité d'une mise en service en amont de l'hiver 2023-2024, sous réserve d'une réalisation rapide des procédures administratives. »

Au total, le dispositif permettra de consolider le réseau de terminaux méthaniers dont dispose la France.

Certes, la France est bien dotée par rapport aux autres pays européens, puisqu'elle dispose de 4 terminaux contre aucun en Allemagne, selon la CRE.

Cependant, ces terminaux sont à des degrés divers d'avancement : celui flottant du Havre est encore à l'étude, tandis que ceux terrestres - 1 à Dunkerque, 2 à Fos Cavaou 70 ( * ) et 1 à Montoir - ont été optimisés, selon le Gouvernement.

B. Le rapporteur juge suffisamment protecteur le régime administratif créé pour les terminaux méthaniers flottants.

Le régime administratif proposé existe partiellement en droit, le Gouvernement envisageant simplement sa clarification et sa consolidation.

Interrogé sur ce point, le Gouvernement a en effet indiqué que « le II de l'article 13 ne crée pas de droit, mais permet d'expliciter le droit existant applicable aux terminaux méthaniers flottants. Cette explicitation a été considérée comme souhaitable par le Conseil d'État. »

Dans son avis 71 ( * ) , le Conseil d'État a en effet rappelé la nécessité de séparer le régime administratif spécial (article 13) du régime procédural dérogatoire appliqué au cas du port du Havre (article 14) : « Le Conseil d'État estime plus clair de distinguer, par deux articles, le régime administratif spécial auquel sera soumise cette nouvelle catégorie d'équipements, d'une part, et le régime procédural dérogatoire dont bénéficieront les travaux d'aménagement portuaires et de raccordement du futur terminal du port du Havre, d'autre part ».

S'agissant du régime administratif spécial, le Conseil d'État l'a considéré au total comme adapté : « Cet encadrement paraît au Conseil d'État de nature à garantir un degré d'exigence suffisant en matière de protection de la santé, de la sécurité et de la salubrité publiques ainsi qu'en matière de protection de l'environnement. »

C. Le rapporteur estime potentiellement coûteux le régime administratif créé pour terminaux méthaniers flottants.

Dans son étude d'impact 72 ( * ) , le Gouvernement a indiqué qu' « il n'est [...] pas prévu d'impact budgétaire » dans la mesure où « il est proposé un financement de la garantie de couverture des coûts [...] par les tarifs d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel ».

Quant aux bénéfices apportés par le terminal, pour éviter une rupture de sécurité d'approvisionnement pour les particuliers, les entreprises ou les collectivités consommatrices de gaz, l'étude d'impact précisé qu' « il n'est [...] pas facilement probabilisable » .

Sollicité sur les coûts, le Gouvernement a précisé que « comme le terminal méthanier flottant est un navire existant, les investissements associés à un projet de raccordement d'une telle installation au réseau français de transport sont limités et correspondant avant tout à la canalisation de raccordement », ajoutant que « ces coûts sont estimés à environ 60 M€ par pan pour le projet d'implantation d'un terminal méthanier flottant au sein du port du Havre ».

D. Enfin, le rapporteur relève que le régime administratif créé pour les terminaux méthaniers flottants est perfectible tant sur le fond que sur la forme.

En premier lieu, l'article n'est pas codifié parmi les dispositions du code de l'énergie, mais est présenté dans le cadre de la loi pouvoir d'achat.

Pour le Gouvernement, « il n'est pas souhaité pérenniser le dispositif de garantie de couverture des coûts par un terminal méthanier flottant nécessaire pour la sécurité d'approvisionnement en gaz ».

En second lieu, le champ d'application du dispositif est perfectible. D'une part, il s'applique en cas d'augmentation des capacités nationales de gaz - et non locales ou européennes. Or, l'article L. 143-6 du code de l'énergie vise ce type de menace sur la sécurité d'approvisionnement « au niveau local, national ou européen ». D'autre part, il s'applique à l'ensemble du territoire national. Pour autant, l'étude d'impact précise « qu'il n'existe pas à ce jour de réseau de gaz naturel en dehors du territoire métropolitain continental ».

Sur ces sujets, le Gouvernement a indiqué qu'il ne voit « pas d'objection » à limiter le dispositif au territoire national métropolitain continental. Il a ajouté qu' « il n'existe pas de dispositif de coordination des capacités des réseaux de gaz naturel au niveau européen » et que « les enjeux locaux sont implicitement pris en compte à travers l'adéquation du réseau gazier national face aux risques de congestions » .

De plus, certains dispositifs ne sont pas explicités : il en va ainsi du programme annuel d'investissements, dont le contenu n'est tout simplement pas défini législativement.

Interrogé sur ce point, le Gouvernement a précisé que ces programmes « devraient avant tout comprendre des opérations de gros entretien renouvellement ».

En dernier lieu, certaines références ne sont pas harmonisées. Il en va ainsi des projets d'installations (I), de l'opérateur du terminal (IV), du droit d'accès (IV et V) ou des tarifs d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel (V).

Parmi ces difficultés, le Gouvernement a indiqué qu'il ne voit « pas d'objection » à harmoniser les références aux projets d'installations ou à l'opérateur du terminal.

Dans ce contexte, la commission a adopté un amendement ( COM-226 ), présenté par le rapporteur, visant à :

- circonscrire la possibilité de recourir à un méthanier flottant au territoire métropolitain continental, au sens de l'article L. 141-5-1 du code de l'énergie ;

- préciser que le programme annuel d'investissements comprend les opérations d'entretien ou de renouvellement des installations et des équipements, conformément à l'intention du Gouvernement.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 15 bis (délégué)

Mise à disposition du gestionnaire du réseau de transport d'électricité
des capacités d'effacements non utilisées
ou vente sur les marchés de ces capacités
par les opérateurs du mécanisme d'ajustement ou d'effacement

Cet article vise à permettre au gestionnaire du réseau de transport d'électricité, sauf opposition du ministre chargé de l'énergie, de demander aux opérateurs du mécanisme d'ajustement de mettre leurs capacités non utilisées d'effacement de consommation, de production ou de stockage à sa disposition ou aux opérateurs du mécanisme d'effacement de vendre leurs capacités d'effacement de consommation sur les marchés de l'énergie.

La commission a adopté un amendement ( COM-227 ) présenté le rapporteur prévoyant le recours à un décret en Conseil d'État pour l'application de ce dispositif exceptionnel, dans un souci de sécurité juridique pour les opérateurs des capacités d'ajustement ou d'effacement.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Des attributions bien étoffées pour garantir l'équilibre du marché de l'électricité dont la révision n'est pas prévue par le Plan RePowerEU

A. Comme indiqué dans le commentaire de l'article 15 ter , le gestionnaire du réseau public de transport d'électricité dispose déjà d'attributions étoffées pour garantir l'équilibre entre l'offre et la demande d'électricité.

S'agissant des effacements de consommation, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité est en charge, dans le cadre de l'appel d'offres mis en place par l'autorité administrative, lorsque les capacités d'effacement ne répondent pas à la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) ou lorsque leur développement est insuffisant (article L. 271-4 du code de l'énergie) :

- d'organiser la concertation sur les modalités techniques de mise à disposition des effacements sur le système électrique, en fonction des orientations données par l'autorité administrative et de proposer leurs modalités correspondantes à l'autorité administrative ;

- d'analyser les offres et de proposer leur classement à l'autorité administrative, selon des procédures concurrentielles, non discriminatoires et transparentes dont les modalités sont fixées par l'autorité administrative ;

- de conclure un contrat rémunérant les effacements de consommation du ou des candidats retenus en tenant compte de l'appel d'offres.

B. Comme l'interruptibilité de la consommation de gaz ou la production d'électricité à partir du gaz, les effacements de consommation ne sont l'objet d'aucune mesure législative dans le cadre du Plan RePowerEU 73 ( * ) , présenté le 18 mai 2022.

En revanche, le plan évoque les économies d'énergie et les baisses de consommation en ces termes : « Les économies d'énergie sont la manière la plus rapide et la moins coûteuse de faire face à la crise énergétique actuelle. La baisse de la consommation d'énergie permet aux ménages et aux entreprises de réduire leurs factures d'énergie élevées à court et à long terme et de réduire les importations de combustibles fossiles russes. La baisse de la consommation d'énergie grâce à une meilleure efficacité énergétique est un volet essentiel de la transition vers une énergie propre qui renforce la résilience de l'économie de l'UE . [...] Réduire la consommation d'énergies fossiles dans les secteurs de l'industrie et des transports où cette réduction est difficile à réaliser et protège sa compétitivité face aux prix élevés des combustibles fossiles. »

De plus, il prévoit 41 Mds€ pour les économies d'énergie dans le secteur industriel et 29 Mds€ pour le développement des réseaux électriques.

Cette proposition, en cours d'examen à l'échelon européen, a été appuyée en ces termes par le Conseil européen , dès la réunion des 24 et 25 mars à Bruxelles 74 ( * ) : « Dans la perspective de l'hiver prochain, les États membres et la Commission s'attacheront d'urgence à [...] achever et améliorer nos interconnexions électriques dans toute l'Union européenne, avec notamment la synchronisation complète des réseaux électriques [...] La sécurité énergétique et la neutralité climatique ne seront possibles que si l'Union européenne s'appuie sur un marché intérieur de l'électricité solide et pleinement interconnecté ainsi que sur un marché du carbone performant. Le Conseil européen a débattu de la manière de faire avancer les travaux sur le suivi et l'optimisation de leur fonctionnement  »

De plus, dans le cadre du Plan pour réduire la consommation de gaz naturel, proposé le 20 juillet 2022, la Commission européenne a énuméré la « réduction de consommation de grandes entreprises » 75 ( * ) parmi les mesures incitatives de réduction de la consommation.

II. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - La mise à disposition des capacités d'effacement de production, de consommation ou de stockage

En séance , l'Assemblée nationale a adopté un amendement, présenté par Maud Bregeon, rapporteure pour avis pour la commission des affaires économiques, permettant au gestionnaire de réseau de transport d'électricité de mobiliser les capacités non utilisées d'effacement de consommation, de production et de stockage des opérateurs d'ajustement ou les capacités non utilisées d'effacement de consommation des opérateurs d'effacement, dans des conditions similaires à l'article 15 ter :

- il prévoit que RTE puisse avoir recours à un dispositif exceptionnel en cas de menace grave et imminente sur la sécurité d'approvisionnement électrique et si les mécanismes prévus (programme d'appel, réserves, réservation de puissance, mécanisme d'ajustement) ne sont pas suffisants ;

- pour ce faire, RTE publie une information sur la situation de forte tension justifiant la mise en oeuvre des dispositifs au plus tard la veille du jour concerné ;

- de son côté, le ministre chargé de l'énergie peut s'opposer à l'activité des dispositifs ou limiter leur recours, au plus tard la vieille du jour concerné ;

- la totalité des capacités d'effacement de consommation, de production ou de stockage valorisées par les opérateurs d'ajustement doivent être mises à disposition du gestionnaire du réseau de transport d'électricité par l'intermédiaire du mécanisme d'ajustement et la totalité des capacités d'effacement de consommation valorisées sur les marchés de l'énergie par des opérateurs d'effacement, techniquement disponibles et non utilisés, doivent être offertes à la vente sur ces marchés par ces opérateurs ;

- les modalités d'application de cet article, notamment les pénalités financières associées, sont précisées par voie réglementaire.

III. La position de la commission - Un dispositif de crise utile dont la rédaction est perfectible

A. Le rapporteur partage l'intérêt de ce dispositif de crise visant à mobiliser les capacités d'effacement non utilisées

Il lui semble complémentaire avec celui prévu s'agissant des groupes électrogènes, à l'article 15 ter .

B. Pour autant, le rapporteur relève des ambiguïtés et des incomplétudes :

- tout d'abord, il n'est pas précisé si le risque sur la sécurité d'approvisionnement est local, national ou européen ;

- plus encore, tous les dispositifs de crise de RTE ne sont pas visés (interruptibilité, effacements, stockage) ;

- enfin, les modalités sont précisées par « voie règlementaire » sans que l'autorité administrative ni la nature du texte règlementaire ne soient précisées.

Aussi, la commission a adopté un amendement ( COM-227 ) présenté le rapporteur prévoyant le recours à un décret en Conseil d'État pour l'application de ce dispositif exceptionnel, dans un souci de sécurité juridique pour les opérateurs des capacités d'ajustement ou d'effacement.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 15 ter (délégué)

Mise à disposition du gestionnaire du réseau de transport d'électricité
des installations de production ou de stockage d'électricité
de secours supérieures à 1 MW

Cet article vise à permettre au gestionnaire du réseau de transport d'électricité, sauf opposition du ministre chargé de l'énergie, d'obtenir la mise à disposition des installations de production ou de stockage d'électricité de secours supérieures à 1 MW.

La commission a adopté un amendement ( COM-228 ) présenté par le rapporteur prévoyant le recours à un décret en Conseil d'État pour son application, dans un souci de sécurité juridique pour les détenteurs de telles capacités de stockage. De plus, l'amendement prévoit que le décret fixe, à titre obligatoire, et non facultatif, des dérogations : en effet, il est exclu que des établissements liés à santé, à la sécurité ou à l'énergie se retrouvent privés des groupes électrogènes dont ils ont besoin.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Des attributions bien étoffées pour garantir l'équilibre du marché de l'électricité dont la révision n'est pas prévue par le Plan RePowerEU

A. Le gestionnaire du réseau public de transport d'électricité dispose déjà d'attributions étoffées pour garantir l'équilibre entre l'offre et la demande d'électricité :

- l'élaboration du schéma décennal de développement des réseaux (article L. 321-6 du code de l'énergie) ;

- la gestion des programmes d'appel et des programmes d'approvisionnement (articles L. 321-9, L. 321-10 et L. 321-11 du même code) ;

- la gestion des écarts (article L. 321-15 du même code) ;

- la gestion des effacements (article L. 321-15-1 du même code) ;

- la gestion des ajustements (article L. 321-13 du même code) ;

- les contrats de réservation de puissance (article L. 321-12 du même code) ;

- l'interruptibilité instantanée (article L. 321-9 du même code) ;

- la concertation technique sur les appels d'offres sur les effacements (article L. 271-4 du même code) ;

- la concertation technique sur les appels d'offres sur le stockage (article L. 352-1-1 du même code).

B. Comme l'interruptibilité de la consommation de gaz, la production d'électricité à partir du gaz ou les effacements de consommation, les installations de production ou de stockage d'électricité de secours ne sont l'objet d'aucune mesure législative dans le cadre du Plan RePowerEU 76 ( * ) , présenté le 18 mai 2022.

En revanche, ce plan prévoit 29 Mds€ dans les réseaux électriques et 10 Mds€ dans le stockage d'électricité.

Cette proposition, en cours d'examen à l'échelon européen, a été appuyée en ces termes par le Conseil européen , dès la réunion des 24 et 25 mars à Bruxelles 77 ( * ) : « Dans la perspective de l'hiver prochain, les États membres et la Commission s'attacheront d'urgence à [...] achever et améliorer nos interconnexions électriques dans toute l'Union européenne, avec notamment la synchronisation complète des réseaux électriques [...]. La sécurité énergétique et la neutralité climatique ne seront possibles que si l'Union européenne s'appuie sur un marché intérieur de l'électricité solide et pleinement interconnecté ainsi que sur un marché du carbone performant. Le Conseil européen a débattu de la manière de faire avancer les travaux sur le suivi et l'optimisation de leur fonctionnement ».

II. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - La mise à disposition des installations de production ou de stockage d'électricité de secours supérieures à 1 MW.

En séance, l'Assemblée nationale a adopté un amendement, présenté par le Gouvernement, mobilisant les installations de production ou de stockage d'électricité de secours supérieures à 1 MW, dans des conditions similaires à l'article 15 bis :

- il prévoit que RTE puisse avoir recours à un dispositif exceptionnel en cas de menace grave et imminente sur la sécurité d'approvisionnement électrique et si les mécanismes prévus (programme d'appel, réserves, réservation de puissance, mécanisme d'ajustement) ne sont pas suffisants ;

- pour ce faire, RTE publie une information sur la situation de forte tension justifiant la mise en oeuvre des dispositifs au plus tard la veille du jour concerné ;

- de son côté, le ministre chargé de l'énergie peut s'opposer à l'activité des dispositifs ou limiter leur recours, au plus tard la vieille du jour concerné ;

- dans ces périodes, les exploitants des installations de production ou de stockage d'électricité de plus de 1 MW utilisées en vue de fournir une alimentation de secours à un site de consommation sont tenus de mettre à disposition la totalité de la puissance non utilisée et techniquement disponible par l'intermédiaire du mécanisme d'ajustement ;

- sur signalement de RTE ou d'Enedis, l'autorité administrative peut leur demander de justifier que leurs installations de production ou de stockage d'électricité ne sont pas disponibles techniquement ;

- les modalités d'application de cet article, notamment les pénalités financières associées, sont précisées par voie réglementaire.

Cet amendement a fait l'objet de plusieurs sous-amendements :

- 5 sous-amendements déposés par Maud Bregeon, rapporteure pour avis pour la commission des affaires économiques , visant à :

§ supprimer une référence aux « analyses prévisionnelles » de RTE ;

§ supprimer une référence au « recours exceptionnel » par RTE au dispositif ;

§ préférer la référence au singulier plutôt qu'au pluriel dans la mention du « dispositif » ;

§ préciser que « les sites de consommation qui utilisent des installations de production ou de stockage de l'électricité de plus de 1 MW en vue de leur fournir une alimentation de secours sont tenus de mettre à disposition du gestionnaire du réseau public de transport d'électricité la totalité de la puissance non utilisée et techniquement disponible de ces installations par l'intermédiaire du mécanisme d'ajustement mentionné à l'article L. 321-10 » , remplacer le terme « utilisateurs » par « sites de consommation » et viser les installations de production ou de stockage « de secours » ;

§ préciser que « les exploitants des installations de production et de stockage concernés, le cas échéant, ne peuvent refuser cette mise à disposition » mais que « les sites de consommation, titulaires des contrats mentionnés au II de l'article L. 111-91, peuvent leur déléguer sa mise en oeuvre. » ;

- 1 sous-amendement de le député Thierry Bazin , prévoyant la possibilité d'exempter, par voie règlementaire, « les catégories de sites de consommation [...] cas échéant ».

III. La position de la commission - Un dispositif de crise utile dont la rédaction est perfectible.

A. Le rapporteur partage l'intérêt de ce dispositif de crise visant à mobiliser les installations de production ou de stockage d'électricité supérieures à 1 MW.

Il lui semble complémentaire avec celui prévu en matière de gaz, à l'article 12.

B. Pour autant, le rapporteur relève des ambiguïtés et des incomplétudes :

- tout d'abord, il n'est pas précisé si le risque sur la sécurité d'approvisionnement est local, national ou européen ;

- plus encore, tous les dispositifs de crise de RTE ne sont pas visés (interruptibilité, effacements, stockage) ;

- enfin, les modalités sont précisées par « voie règlementaire » sans que l'autorité administrative ni la nature du texte règlementaire ne soient précisées.

C'est pourquoi la commission a adopté un amendement ( COM-228 ) présenté par le rapporteur prévoyant le recours à un décret en Conseil d'État pour l'application de ce dispositif exceptionnel, dans un souci de sécurité juridique pour les détenteurs d'installations de stockage d'électricité de secours. Ce décret doit fixer, à titre obligatoire, et non facultatif, des dérogations : en effet, il est exclu que des établissements liés à santé, à la sécurité ou à l'énergie se retrouvent privés des groupes électrogènes dont ils ont besoin.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

CHAPITRE III

Dispositions relatives
à l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique
Article 17 (délégué)

Réattribution des volumes de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh) du fournisseur défaillant ou dont l'autorisation a été suspendue ou retirée vers le fournisseur de secours

Cet article vise à réattribuer les volumes de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh) du fournisseur défaillant ou dont l'autorisation a été suspendue ou retirée vers le fournisseur de secours.

La commission a adopté un amendement ( COM-230 ) présenté par le rapporteur visant à qualifier les fournisseurs dont le volume d'Arenh serait réattribué, pour mieux articuler la rédaction du fournisseur de secours, prévue à l'article L. 333-3 du code de l'énergie, avec celle des fournisseurs éligibles à l'Arenh, mentionnée à l'article L. 336-2 du même code.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - L'Arenh et le fournisseur de secours : deux dispositifs sans lien entre eux

A. Institué par la loi « Nome », du 7 décembre 2010 78 ( * ) , l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh) est un dispositif de régulation par lequel le groupe EDF vend une partie de l'électricité produite par centrales nucléaires à un prix régulé aux fournisseurs titulaires d'une autorisation en faisant la demande (article L. 336-1 du code de l'énergie).

Ce mécanisme est prévu pour une période transitoire, d'une date fixée par décret 79 ( * ) jusqu'au 31 décembre 2025 (article L. 336-8 du même code).

Le volume maximal cédé, qui ne peut excéder 150 TWh par an, est déterminé par arrêté des ministres chargés de l'économie et de l'énergie, après avis de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) ; les conditions dans lesquelles s'effectue cette vente, ainsi que les stipulations de l'accord-cadre, sont fixées par arrêté du ministre chargé de l'énergie, sur proposition de la CRE (articles L. 336-2 et L. 336-5 du même code).

Pour assurer une juste rémunération au groupe EDF, le prix cédé, qui est réexaminé chaque année, est représentatif des conditions économiques de production d'électricité ; ainsi, il tient compte de l'addition de la rémunération des capitaux, des coûts d'exploitation, des coûts de maintenance et des coûts prévisionnels liés aux charges à long terme (article L. 337-14 du même code).

C'est selon une périodicité infra-annuelle que la CRE fixe et notifie le volume cédé à chaque fournisseur (article L. 336-3 du code de l'énergie).

De plus, en cas de souscription de volumes d'Arenh supérieurs à leurs droits théoriques ou à leurs besoins réels, les fournisseurs doivent s'acquitter de compléments de prix 80 ( * ) (article L. 336-5 du code de l'énergie).

La loi « Énergie-Climat » , du 8 novembre 2019 81 ( * ) , a modifié ces dispositions sur plusieurs points :

- d'une part, elle a autorisé le ministre chargé de l'énergie à relever l'Arenh jusqu'à 150 TWh , tout en prévoyant que son prix tienne compte de « la stabilité des prix pour le consommateur final » , cette précision ayant été apportée à l'initiative de la commission des affaires économiques ;

- d'autre part, elle a ajusté les compléments de prix , afin qu'ils tiennent compte de « l'effet du plafonnement » de l'Arenh et de « la compensation des charges imputables aux missions de service public » d'EDF.

Récemment, un décret 82 ( * ) et un arrêté du 11 mars 2022 83 ( * ) ont relevé le plafond de l'Arenh, de 100 à 120 TWh, et , dans une moindre mesure, son prix, de 42 à 46,2 € / MWh 84 ( * ) , pour l'année 2022, dans le cadre du « bouclier tarifaire » annoncé par le Gouvernement.

Le groupe EDF a estimé l'impact financier de ce relèvement entre 7,7 et 8,4 Mds€ 85 ( * ) puis 10,2 Mds 86 ( * ) ; interrogés sur ce point, le Gouvernement a avancé un chiffre de 8 Mds € et la CRE entre 8 et 9 Mds 87 ( * ) .

Des syndicats et des administrateurs du groupe EDF ont engagé un recours à l'encontre de ce relèvement : si le recours en référé a été rejeté le 5 mai 2022 88 ( * ) , le contentieux au fond est pendant.

B. Créé par la loi « Énergie-Climat » 89 ( * ) , le fournisseur de secours d'électricité vise à assurer la continuité de la fourniture d'électricité auprès des consommateurs dont les fournisseurs sont défaillants ou se sont vus retirer ou suspendre leur autorisation (article L. 333-3 du code de l'énergie).

Ces fournisseurs de secours sont désignés par le ministre chargé de l'énergie, après un appel à candidatures, organisé avec l'appui de la CRE.

Un décret du 11 mars 2021 90 ( * ) est venu préciser les modalités de mise en oeuvre du fournisseur de secours , et notamment les modalités de désignation de ce fournisseur et le pourcentage de clients finals domestiques de la zone de desserte qui oblige un fournisseur à présenter une offre pour la désignation de ces fournisseurs.

Des arrêtés des 3 91 ( * ) et 5 novembre 2021 92 ( * ) ont désigné , à titre provisoire, pour toutes les catégories de clients, le groupe EDF pour les zones de desserte d'Enedis et de RTE et les entreprises locales de distribution (ELD) pour leur zone de desserte .

II. Le dispositif envisagé - La réattribution vers le fournisseur de secours des volumes de l'Arenh des fournisseurs défaillants ou dont l'autorisation a été suspendue ou retirée

L'article initial vise à permettre la réattribution, vers le fournisseur de secours, des volumes d'électricité réservés au titre de l'Arenh, du fournisseur défaillant ou dont l'autorisation a été suspendue ou retirée.

À cette fin, il est prévu qu'un arrêté, pris par le ministre chargé de l'énergie, sur proposition de la CRE, détermine les conditions et les modalités de cette réattribution.

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Des ajustements rédactionnels

A. En commission, l'Assemblée nationale a adopté un amendement, présenté par Mme Maud Bregeon , rapporteure pour avis pour la commission des affaires économiques, avec l'avis favorable du Gouvernement, ajoutant une occurrence aux « fournisseurs » .

Son incidence est essentiellement rédactionnelle.

B. En séance, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de coordination, présenté par la rapporteure Maud Bregeon, avec l'avis favorable du Gouvernement, modifiant l'article L 121-5 du code de l'énergie.

IV. La position de la commission - Une disposition issue d'une recommandation de la CRE devant être consolidée formellement

A. Le rapporteur observe que le dispositif résulte d'une recommandation de la CRE.

Dans son étude d'impact, le Gouvernement précise que la disposition est une recommandation de la CRE : dans une délibération du 14 octobre 2021 93 ( * ) , sur le dispositif de fournisseur de secours, la CRE a en effet indiqué qu' « en l'absence de transfert d'ARENH, le dispositif de fourniture de secours en électricité n'apporterait aucune protection aux consommateurs ».

B. Le rapporteur relève que le dispositif présente des bénéfices pour les consommateurs mais des coûts pour la CRE.

Dans son étude d'impact 94 ( * ) , le Gouvernement identifie un bénéfice pour les particuliers, les entreprises et les collectivités territoriales consommateurs d'électricité ; il relève également « une charge supplémentaire marginale » pour la CRE.

Sollicité sur le coût du dispositif, le Gouvernement a indiqué pour les consommateurs que, « si l'on suppose un prix de marché de l'ordre de 300€/MWh (ce qui est le niveau actuellement prévu pour 2023) et un droit Arenh du consommateur de 50 % (après écrêtement), le fait de disposer du maintien de l'Arenh permettrait une hausse de 43 % de la part d'approvisionnement en énergie du prix payé par le consommateur, par rapport au contrefactuel sans transferts de droits Arenh » .

Il a ajouté que, pour les fournisseurs que, « la disposition n'a pas en tant que telle d'impact sur les fournisseurs de secours. En l'absence de cette disposition, ils n'auront d'autres choix que de proposer des offres de secours intégralement indexées sur les prix de marché. Avec cette disposition, ils pourront restituer aux clients secourus les droits Arenh que leurs consommations avaient permis à leur fournisseur initial d'obtenir ».

C. Pour autant, le rapporteur constate que le dispositif présente plusieurs difficultés de forme.

D'une part, il est fait référence aux volumes d'Arenh « réservés » aux fournisseurs, alors qu'ils cessent de l'être après leur défaillance pour pouvoir être transférés aux fournisseurs de secours.

D'autre part, les fournisseurs défaillants visés, en l'espèce ceux éligibles à l'Arenh au titre de l'article L. 336-2 du code de l'énergie, ne sont pas mentionnés expressément de sorte que le dispositif reste flou.

Enfin, il est prévu qu'un arrêté du ministre chargé de l'énergie, pris sur proposition de la CRE, définisse les modalités du transfert, alors que l'article L. 333-3 du code de l'énergie prévoit qu'un décret en Conseil d'État fixe les conditions et les modalités d'application de cet article.

Interrogé sur ce point, le Gouvernement a indiqué « qu'il semble préférable de fixer ces modalités, qui sont d'ordre très techniques, par arrêté » dans la mesure où elles n'ont « pas d'incidence sur les volumes globaux d'Arenh ».

Dans ce contexte, le rapporteur a présenté un amendement ( COM-230 ) visant à qualifier les fournisseurs dont le volume d'Arenh serait réattribué, pour mieux articuler la rédaction du fournisseur de secours, prévue à l'article L. 333-3 du code de l'énergie, avec celle des fournisseurs éligibles à l'Arenh, mentionnée à l'article L. 336-2 du même code.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 18 (délégué)

Suppression du guichet infra-annuel prévu dans le cadre
de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh)

Cet article vise à supprimer le guichet infra-annuel prévu dans le cadre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh).

La commission a adopté un amendement ( COM-229 ) inscrivant directement dans la loi l'annualité de ce guichet, selon l'intention du Gouvernement.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Un guichet infra-annuel pour la fixation et la notification à chaque fournisseur du volume de l'Arenh

Comme indiqué au commentaire de l'article 17, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) fixe et notifie actuellement le volume d'accès régulé à l'énergie nucléaire historique (Arenh), cédé à chaque fournisseur, selon une périodicité infra-annuelle (article L. 336-3 du code de l'énergie).

II. Le dispositif envisagé - La suppression de la périodicité infra-annuelle pour lui préférer une périodicité définie règlementairement

L'article initial supprime la référence à une périodicité infra-annuelle pour le guichet de l'Arenh, mentionnée à l'article L. 336-3 du code de l'énergie, pour lui préférer une périodicité « définie par voie règlementaire ».

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Une adoption sans modification

En commission et en séance publique, l'Assemblée nationale a adopté l'article sans modification .

IV. La position de la commission - Une simplification issue d'une recommandation de la CRE appuyée par l'ensemble des professionnels appelant à être pleinement mise en oeuvre

A. Le rapporteur observe que la disposition résulte d'une recommandation de la CRE.

Dans son étude d'impact 95 ( * ) , le Gouvernement précise que la disposition est issue d'une recommandation de la CRE : dans le rapport d'évaluation de l'Arenh, publié le 18 janvier 2018 96 ( * ) , cette dernière « recommande la suppression du guichet infra-annuel, qui ne répond pas à un besoin fondamental des fournisseurs, afin de simplifier le fonctionnement du dispositif et éliminer les possibilités d'arbitrages à mi-année avec le marché de gros ».

B. Le rapporteur constate que la disposition apporte de la simplification.

Dans son étude d'impact 97 ( * ) , le Gouvernement estime que la disposition, « d'ordre purement technique » , permet de « simplifier » la périodicité des guichets et d' « éviter » tout effet d'arbitrage. Il ajoute que la disposition évitera à la CRE « l'instruction éventuelle de dossiers de demandes déposés au guichet de mi-année » .

Le rapporteur souscrit à cette simplification, appuyée tant par la CRE que par l'ensemble des professionnels.

C. Pour autant, le rapporteur constate que le dispositif présente des difficultés de forme.

D'une part, si la périodicité « infra-annuelle » est supprimée, une périodicité, dont la durée n'est pas précisée, demeure. C'est curieux car l'étude d'impact évoque en ces termes la mise en oeuvre d'un guichet annuel : « La périodicité des guichets serait fixée à un rythme annuel ».

D'autre part, la référence à une définition « par voie règlementaire » est floue, alors que l'article L. 336-10 du code de l'énergie prévoit un décret en Conseil d'État, pris après avis de la CRE, pour définir les modalités d'application du chapitre.

Enfin, aucune coordination n'est prévue à l'article L. 336-5 du code de l'énergie, qui fait référence aux droits alloués aux fournisseurs « au début de la période ».

Sollicité sur ces points, le Gouvernement a précisé que la périodicité serait définie « par décret en Conseil d'État » et que « le début de période renvoie bien à l'article L. 336-3 du code de l'énergie s'agissant de la définition de la période ».

Au total, la commission a adopté un amendement ( COM-230 ) présenté par le rapporteur inscrivant directement dans la loi l'annualité de ce guichet.

Il reprend ainsi l'intention exprimée par le Gouvernement dans l'étude d'impact du projet de loi.

Cette précision ne rigidifierait pas pour autant le guichet de l'Arenh, puisque l'actuel article L. 336-10 du code de l'énergie permettrait toujours au Gouvernement de préciser, par un décret en Conseil d'État, « les conditions dans lesquelles la Commission de régulation de l'énergie calcule et notifie les volumes et propose les conditions d'achat de l'électricité cédée dans le cadre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique » .

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 18 bis (délégué)

Abaissement à 120 térawattheures (TWh) par an
du plafond de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh)

Cet article vise à abaisser à 120 TWh par an le plafond légal de l'Arenh jusqu'au 31 décembre 2023.

La commission a adopté un amendement ( COM-231 ) présenté par le rapporteur et déposé à l'identique par le sénateur Fabien Gay et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste (CRCE) ( COM-2013 ) supprimant l'échéance du 31 décembre 2023, pour appliquer le plafond de 120 TWh tout au long de la durée de vie du dispositif.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - L'Arenh : un plafond substantiellement augmenté depuis 10 ans

La loi « Nome » du 7 novembre 2010 98 ( * ) a prévu que le volume global de l'Arenh soit déterminé par arrêté des ministres chargés de l'économie et de l'énergie pris après avis de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) ; elle a précisé que ce volume global , qui doit demeurer proportionné aux objectifs poursuivis, ne peut excéder 100 térawattheures (TWh) par an (article L. 336-2 du code de l'énergie).

Depuis la loi « Énergie-Climat » , du 8 novembre 2019 99 ( * ) , il est prévu que le volume global de l'Arenh soit pris « dans l'objectif de contribuer à la stabilité des prix pour le consommateur final » et ne puisse excéder 100 TWh jusqu'au 31 décembre 2019 et 150 TWh à compter du 1 er janvier 2020 . Ce relèvement avait été adopté, compte tenu de l'augmentation des demandes en 2017 et du dépassement des plafonds en 2018 et 2019.

Dans ce contexte, un décret 100 ( * ) et un arrêté du 11 mars 2022 101 ( * ) ont effectivement relevé le volume de l'Arenh, à 120 TWh , pour l'année 2022, dans le cadre du « bouclier tarifaire » annoncé par le Gouvernement, alors que le dispositif était demeuré inchangé depuis la loi « Nome ».

Dans son rapport d'évaluation sur l'Arenh, du 22 juillet 2020 102 ( * ) , la CRE a justifié l'évolution de la loi « Énergie-Climat » en ces termes :

« Depuis 2017, les demandes d'Arenh des fournisseurs alternatifs ont augmenté de manière continue et ont même dépassé, lors des guichets de novembre 2018 et de novembre 2019, le plafond Arenh qui est fixé à 100 TWh depuis l'entrée en vigueur du dispositif. Cette hausse est due à l'augmentation continue du volume d'activité des fournisseurs alternatifs sur le marché de détail de l'électricité ainsi qu'à la compétitivité conjoncturelle du produit Arenh par rapport aux prix observés sur les marchés de gros.

Dans ce contexte, le dispositif Arenh ne garantit que partiellement au consommateur le bénéfice du parc électro-nucléaire largement amorti, et celui-ci est ainsi exposé à des hausses de coût d'approvisionnement, mais également à une instabilité des prix [...]. De plus, l'ampleur de ce phénomène est d'autant plus importante que le volume de demandes formulées lors d'un guichet Arenh est élevé.

La loi Énergie-Climat a également rehaussé à 150 TWh le niveau maximal auquel peut être fixé le plafond Arenh. La CRE prend acte de la volonté de l'exécutif, jusqu'à maintenant, de ne pas modifier ce plafond avant l'aboutissement des négociations avec la Commission européenne sur la nouvelle régulation du nucléaire.

Toutefois, l'atteinte du plafond de l'Arenh entraîne des dysfonctionnements du marché de détail de l'électricité, au détriment des consommateurs résidentiels, entreprises et collectivités : hausse des prix, instabilité et imprévisibilité des prix, difficulté à anticiper les prix et pour les fournisseurs à établir des offres de prix pluriannuelles, lien paradoxal entre développement de la concurrence et hausse des prix de l'électricité.

La CRE recommande que le plafond de l'Arenh soit porté à 150 TWh en vue du prochain guichet de novembre 2020 portant sur l'année 2021. Si le dispositif actuel de l'Arenh devait aller jusqu'à son terme prévu en 2025, une hausse à 200 TWh de ce plafond devrait même être envisagée, au vu du rythme de développement de la concurrence sur le marché de détail. Enfin, et bien que la question de la révision du prix Arenh, fixé à 42 €/MWh depuis 2012 se pose, ce sujet doit être traité dans le cadre de la nouvelle régulation du nucléaire qui est notamment en cours de discussion avec la Commission européenne ».

II. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Un abaissement de 150 à 120 TWh du plafond légal de l'Arenh

En séance, l'Assemblée nationale a adopté un amendement , présenté par le député Thierry Bazin, abaissant de 150 à 120 TWh par an le plafond légal de l'Arenh.

Cet amendement a reçu l'avis favorable de Maud Bregeon, rapporteure pour avis pour la commission des affaires économiques, et du Gouvernement, tel que sous-amendé par ce dernier, avec la mention « jusqu'au 31 décembre 2023 » .

III. La position de la commission - Un abaissement logique compte tenu de la diminution historique de la production d'électricité nucléaire aux alentours de 300 TWh

A. Le rapporteur observe que le groupe EDF a évalué sa production d'énergie nucléaire à 280-300 TWh pour 2022 et 300-330 TWh pour 2023 103 ( * )

Dans ce contexte, l'abaissement de 150 à 120 TWh du plafond maximal de l'Arenh pour l'année 2023 paraît nécessaire : en 2023, 120 TWh sur une production de 300 à 330 TWH représentait entre 36 et 40 % de la production nucléaire ; en 2019, 100 TWh pour une production de 370 TWh représentait 27 % de cette production.

B. Pour autant, le rapporteur relève que l'abaissement de ce plafond ne fait pas l'unanimité

Tout d'abord, la CRE s'est exprimée 104 ( * ) en faveur d'un relèvement du plafond à 130 TWh, compte tenu notamment de l'augmentation et de l'imprévisibilité des prix des énergies 105 ( * ) : « Compte tenu de ces dysfonctionnements, et dans l'attente d'une suite à l'ARENH qui devra être mise en place pour le 1 er janvier 2026, la CRE recommande depuis plusieurs années le relèvement du plafond. Compte tenu de la situation du parc nucléaire historique d'EDF, la CRE recommande au Gouvernement de fixer le plafond de l'Arenh à 130 TWh pour les années 2023, 2024 et 2025 avec un prix révisé d'au minimum 49 euros. Cette décision doit être prise le plus rapidement possible pour donner de la visibilité aux acteurs et ne pas revivre la situation de 2022 avec une décision tardive. Le relèvement du plafond de l'Arenh permettra de limiter la hausse des prix de l'électricité en France, et notamment des tarifs réglementés de vente d'électricité au 1 er février 2023 alors que les prix de gros sont aujourd'hui supérieurs à ceux constatés en 2021 principalement du fait de la situation du parc nucléaire français ».

Plus encore, le Gouvernement a émis des réserves sur une fixation à 120 TWh/an du plafond de l'Arenh, car il rigidifierait le cadre juridique dans un contexte de hausse des prix des énergies : « Dans le contexte de crise des marchés de l'électricité, marqué par la guerre en Ukraine, il est plus que jamais nécessaire de faire bénéficier à tous les consommateurs français de l'avantage du parc nucléaire français. L'Arenh permet aujourd'hui cela. Un tel amendement conduirait à limiter les possibilités dont dispose le Gouvernement pour faire bénéficier aux consommateurs français de la compétitivité de l'énergie nucléaire. Figer le plafond de l'Arenh à au plus 120 TWh/an serait trop rigide et potentiellement à un niveau insuffisant au regard de la crise majeure que nous rencontrons qui ne se terminera pas à la fin de cette année ».

C. Le rapporteur observe que le dispositif adopté par l'Assemblée nationale induit un lourd effet de bord.

Tel qu'il a été sous-amendé par le Gouvernement, ce dispositif supprimerait le plafond légal de l'Arenh entre le 31 décembre 2023 et l'extinction du dispositif d'ici le 31 décembre 2025.

En effet, l'article L. 336-2 du code de l'énergie disposerait « ce volume global maximal, qui demeure strictement proportionné aux objectifs poursuivis, ne peut excéder 120 térawattheures par an jusqu'au 31 décembre 2023 ».

Or, l'article L. 336-5 du code de l'énergie prévoit que « le dispositif transitoire d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique est mis en place [...] jusqu'au 31 décembre 2025 ».

Il y a donc un vide juridique de deux ans, dans lequel aucun défini plafond légal ne trouverait à s'appliquer.

Cela ne semble pas correspondre à l'intention exprimée par la ministre de la transition énergétique, lors de l'examen du projet de loi à l'Assemblée nationale, le 21 juillet dernier.

D. Le rapporteur s'est interrogé sur la compatibilité de cet abaissement avec le droit de l'Union européenne.

Sollicité sur ce point, le Gouvernement a précisé que « cet amendement ne nécessiterait pas d'accord de la Commission européenne, puisque c'est un plafond qui est abaissé.

La commission a donc adopté un amendement ( COM-231 ), présenté par le rapporteur, et déposé à l'identique par le sénateur Fabien Gay et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste ( COM-213 ), supprimant l'échéance du 31 décembre 2023, pour appliquer le plafond légal de 120 TWh tout au long de la durée de vie de l'Arenh.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 18 ter (délégué)

Relèvement à 49,5 € par mégawattheure (MWh)
du montant de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh)

Cet article vise à relever de 46,2 à 49,5 € par MWh le montant de l'Arenh à compter du 1 er janvier 2023.

La commission a adopté un amendement ( COM-232 ) présenté par le rapporteur, appliquant le relèvement à la totalité des volumes de l'Arenh, dans un délai d'un mois suivant la réponse de la Commission européenne sur sa compatibilité avec le droit de l'Union européenne.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - L'Arenh : un montant largement inchangé depuis 10 ans

La loi « Nome » du 7 novembre 2010 106 ( * ) a prévu que le prix de l'Arenh soit arrêté par les ministres chargés de l'énergie et de l'économie après avis motivé de la CRE (article L. 337-16).

Depuis la loi « Énergie-Climat », du 8 novembre 2019 107 ( * ) , il est prévu que le volume global de l'Arenh soit pris « dans l'objectif de contribuer à la stabilité des prix pour le consommateur final » et que le prix tienne compte « notamment de l'évolution de l'indice des prix à la consommation et de celle du volume global maximal d'électricité nucléaire historique pouvant être cédé » .

Si un décret 108 ( * ) et un arrêté du 11 mars 2022 109 ( * ) ont relevé le prix de l'Arenh, de 42 à 46,2 €/MWh , pour l'année 2022 110 ( * ) , dans le cadre du « bouclier tarifaire » annoncé par le Gouvernement, ce montant est demeuré inchangé depuis l'adoption du dispositif par la loi « Nome ».

II. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Un relèvement de 46,2 à 49,5 € / MWh du montant de l'Arenh

En séance, l'Assemblée nationale a adopté un amendement , présenté par le député Thierry Bazin relevant de 46,2 à 49,5 €/MWh le prix de l'Arenh.

Cet amendement a été adopté avec l'avis défavorable de Maud Bregeon, rapporteure pour avis pour la commission des affaires économiques, et du Gouvernement.

III. La position de la commission - Un relèvement bienvenu qui ne résout pas les difficultés financières du groupe EDF

A. Le rapporteur observe que le relèvement du montant de l'Arenh est de nature à améliorer les recettes du groupe EDF sans répondre à ses difficultés financières.

En effet, le relèvement du plafond de l'Arenh, opéré en mars dernier, représente pour le groupe EDF entre 7,7 et 8,4 Mds€ 111 ( * ) puis 10,2 Mds 112 ( * ) ; de son côté, le Gouvernement a avancé un chiffre de 8 Mds€ et la CRE entre 8 et 9 Mds 113 ( * ) .

Or, le groupe est grevé d'une dette, de 43 Mds€ en 2021 114 ( * ) . De plus, le phénomène de corrosion sous contrainte représente un manque à gagner de 18,1 Mds€ 115 ( * )116 ( * ) . Or, il doit financer des investissements importants : le Grand carénage, de 65 Mds€ sur la période 2014-2028, la construction des EPR, de 12,7 Mds€ à Flamanville 117 ( * ) , 30 Mds€ à Hinkley Point C 118 ( * ) et 46 Mds€ pour les 3 nouvelles paires 119 ( * ) , ou encore la transition énergétique, de 10 Mds€ par an 120 ( * ) .

Si l'Arenh, focalisé sur le nucléaire existant, n'a pas vocation à financer le nouveau nucléaire ou la transition énergétique, force est de constater que le relèvement de son plafond a dégradé la situation financière du groupe.

B. Plusieurs instances ont relevé le caractère inadapté et obsolète du montant de l'Arenh.

Tout d'abord, la Cour des comptes 121 ( * ) a pointé les conséquences de l'absence de révision substantielle de ce prix depuis la loi « Nome » de 2010, sur les recettes du groupe EDF : « À cet égard, le niveau du prix de l'Arenh a été fixé à 42 €/MWh et n'a pas évolué depuis 2012, malgré l'augmentation continue des coûts de production du nucléaire sur la période (+ 46 % entre 2011 et 2021, pour atteindre 46,6 €/MWh). Or, ce niveau de prix ne valorise pas uniquement les ventes effectuées par EDF, au guichet Arenh, à destination des fournisseurs alternatifs : il a un impact beaucoup plus important sur le niveau des recettes issues de la vente de l'électricité nucléaire historique. En effet, il pèse également sur la tarification d'une partie de la consommation des clients aux TRV du fait du mode de calcul de ces tarifs, ainsi que sur celle des clients d'EDF en offre de marché, puisqu'EDF réplique dans ses offres les conditions d'approvisionnement des fournisseurs alternatifs ».

De plus, la CRE a plaidé pour que le relèvement du plafond de l'Arenh, qu'elle soutient, s'accompagne d'une revalorisation du prix : « la CRE recommande au Gouvernement de fixer le plafond de l'Arenh à 130 TWh pour les années 2023, 2024 et 2025 avec un prix révisé d'au minimum 49 euros ».

C. Le rapporteur s'est interrogé sur l'opportunité d'un relèvement du montant de l'Arenh.

Sollicité sur ce sujet, le Gouvernement a indiqué partager certaines critiques sur le dispositif actuel de l'Arenh : « il est cependant exact que le prix de l'Arenh n'a pas évolué depuis plusieurs années et qu'en outre, les variations de la production nucléaire d'une année sur l'autre pourraient induire des révisions du prix de l'Arenh. C'est d'autant plus vrai dans le contexte de disponibilité historiquement faible du parc nucléaire français, notamment du fait de la corrosion sous contrainte découverte l'année dernière. »

Pour autant, le Gouvernement a relevé le caractère prématuré d'un relèvement du prix directement dans la loi : « Une réflexion doit être menée sur le niveau du prix d'Arenh, il serait pour autant prématuré et hasardeux de fixer dès à présent, dans la loi, sans aucune étude préalable. Cette réflexion s'intègre en revanche pleinement dans celles sur les modalités de régulation du parc nucléaire existant post Arenh, ce dispositif devant s'éteindre en 2025 ».

Rappelant que la commission des affaires économiques déplore depuis longtemps la faiblesse du prix de l'Arenh, le rapporteur approuve son relèvement, de 46,2 à 49,5€ / MWh.

D. Le rapporteur s'est interrogé sur la compatibilité d'un relèvement du montant de l'Arenh avec le droit de l'Union européenne.

Dans une décision du 12 juin 2012 122 ( * ) , la Commission européenne a assimilé les tarifs réglementés de vente de l'électricité à une aide d'État et prévu, dans le même temps, le dispositif de l'Arenh comme une mesure compensatoire.

Il était prévu qu'un décret définisse une méthode de calcul pour le prix de l'Arenh , et soit soumis à la Commission européenne à l'état de projet en vue de son approbation. Ce décret n'a jamais été pris, de sorte que le prix est longtemps resté à 42€ / MWh.

En 2019, le Gouvernement a eu confirmation par la Commission européenne de la nécessité d'une nouvelle décision d'approbation en cas de relèvement du plafond de l'Arenh : aussi a-t-il indiqué que « dans le cadre des échanges intervenus en 2019, la Direction générale de la concurrence de la Commission européenne a indiqué qu'un relèvement du plafond du volume de l'Arenh constituerait une modification substantielle du dispositif, nécessitant une nouvelle décision d'approbation » 123 ( * ) .

Interrogé par le rapporteur, il a ainsi précisé que « le relèvement du plafond de 120 TWh en 2022 a été notifié à la Commission européenne ».

S'agissant des dispositions introduites à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a indiqué au rapporteur qu'un « un tel amendement nécessiterait un accord préalable de la Commission européenne », ajoutant qu'il s'agirait d'une « notification formelle ».

Au total, la commission a adopté un amendement ( COM-232 ) présenté par le rapporteur, apportant deux modifications au dispositif.

D'une part, il suggère de préciser le texte issu de l'Assemblée nationale, en appliquant ce prix à l'ensemble des volumes d'électricité attribués au titre de l'Arenh, rappelant à cet égard que le décret précité du 11 mars 2022 n'a relevé ce prix que pour les 20 TWh additionnels.

D'autre part, il propose de garantir la conformité de ce relèvement avec le droit de l'Union européenne.

C'est pourquoi il a pour objet d'appliquer le relèvement du prix de l'Arenh dès la réponse apportée par la Commission européenne.

Il s'agit d'une pratique courante, de telles dispositions ayant été adoptées par le Sénat dans la loi de finances initiale pour 2019, la loi visant à protéger la rémunération des agriculteurs de 2021 et la loi visant à renforcer le contrôle parental de 2022.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 19 (délégué) (non modifié)

Validation législative, au titre des consultations,
du décret du 11 mars 2022 modifiant
l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh)

Cet article vise à valider législativement, au titre des consultations, le décret du 11 mars 2022 modifiant l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh).

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article sans modification.

I. La situation actuelle - Un relèvement du volume et, dans une moindre mesure, du montant de l'Arenh faisant l'objet d'un recours

Comme indiqué au commentaire de l'article 17 , des syndicats et des administrateurs du groupe EDF ont engagé un contentieux à l'encontre du décret 124 ( * ) et de l'arrêté du 11 mars 2022 125 ( * ) , qui ont relevé, le plafond de 100 à 120 TWh et le prix de 42 à 46,2 € / MWh 126 ( * ) de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh) pour l'année 2022 : si le recours en référé a été rejeté le 5 mai 2022 127 ( * ) , le contentieux au fond est pendant.

II. Le dispositif envisagé - Une validation législative des consultations du décret précité

L'article initial consiste en une validation législative du décret précité « en tant que sa régularité serait contestée pour le motif tiré du défaut d'accomplissement des consultations auxquelles le code du commerce, le code de l'énergie ou le code monétaire et financier confère un caractère obligatoire, eu égard à l'objet du décret ».

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Des précisions techniques

A. En commission, l'Assemblée nationale a adopté un amendement, présenté par Maud Bregeon , rapporteure pour avis pour la commission des affaires économiques, ayant reçu l'avis favorable du Gouvernement, remplaçant la référence aux consultations « ayant un caractère obligatoire eu égard à l'objet du décret » par celles ayant « le cas échéant, un caractère obligatoire ».

B. En séance, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par la rapporteure Maud Bregeon , ayant reçu l'avis favorable du Gouvernement, précisant que la validation intervient « dans l'objectif d'éviter une répercussion rétroactive sur les factures d'électricité de tous les Français en 2022 des conséquences de son annulation contentieuse ».

IV. La position de la commission - Une validation législative ayant de lourdes implications financières

A. Le rapporteur observe que, si le recours en référé contre le décret du 11 mars 2022 a été rejeté, celui au fond est pendant.

Dans son ordonnance précitée, le Conseil d'État a rejeté le recours en référé, considérant que la condition d'urgence n'était pas satisfaite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité des requêtes ni sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité des dispositions contestées.

Le recours au fond est donc pendant, certains requérants ayant notamment soulevé en substance :

- la compatibilité de la mesure avec le droit de l'Union européenne, car elle constituerait une aide d'État, encadrée par l'article 108§3 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), et ne comporterait pas de garanties contre les subventions croisées, prévues par l'article 5 de la directive du 5 juin 2019 128 ( * ) ;

- la compatibilité de la mesure avec le cadre constitutionnel, notamment l'article 34 de la Constitution, la liberté d'entreprendre et la liberté contractuelle garanties par l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- un doute sérieux sur la légalité, une erreur manifeste d'appréciation ou encore une procédure consultative irrégulière.

B. Le rapporteur constate que la validation législative a pour objet d'éteindre le recours au fond contre le décret du 11 mars 2022 du point de vue de certaines consultations.

Dans son étude impact 129 ( * ) , le Gouvernement rappelle bien cet objectif : « Au vu des contentieux formés contre le décret n° 2022-342 du 11 mars 2022 et de l'impérieuse nécessité de sécuriser les dispositions qu'il instaure pour la protection des consommateurs contre les prix de marchés de l'électricité qui se sont envolés avec le conflit russo-ukrainien, seule l'option de passer par la loi permet de répondre à la difficulté soulevée. »

C'est pourquoi il a précisé que l'article valide le décret « en tant que sa régularité serait contestée pour le motif tiré du défaut d'accomplissement des consultations auxquelles le code de commerce, le code de l'énergie ou le code monétaire et financier confère un caractère obligatoire ».

Le rapporteur constate que la validation législative, qui ne porte que sur certaines consultations préalables, n'éteint pas les moyens portant sur le respect par le dispositif du cadre constitutionnel ou européen.

Interrogé sur ces sujets, le Gouvernement a indiqué que « le décret du 11 mars 2022, qui organise les modalités d'attribution d'un volume supplémentaire de 20 TWh d'électricité nucléaire, avait fait initialement l'objet de l'ensemble des consultations prévues (Commission de régulation de l'énergie, Conseil supérieur de l'énergie, Caisse des dépôts et consignations, Autorité de la concurrence) »

Il a ajouté qu' « à la suite de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, les prix sur les marchés de l'électricité se sont envolés et leur liquidité était incertaine. Le dispositif initial aurait dû conduire EDF à racheter les 20 TWh d'Arenh sur les marchés, dans des conditions qui se sont trouvées extrêmement dégradées. [...] L'article 5 du décret contesté prévoit un dispositif imposant aux fournisseurs souhaitant bénéficier d'un nouveau volume d'Arenh au titre de cette attribution exceptionnelle, de céder des volumes d'électricité de même hauteur à EDF à un prix représentatif du marché auquel ils les ont eux-mêmes achetés à terme sur les marchés pour garantir la capacité de fourniture, à savoir 257 €/MWh. Ce sont ces dispositions qui n'ont pas pu faire l'objet de consultations, introduites tardivement, compte tenu de l'évolution brutale du contexte énergétique ».

Il a précisé que « l'article 19 éteint uniquement le risque lié à un défaut de consultation. En tout état de cause, une disposition législative ne peut pas éteindre un risque qui serait lié à une inconventionalité » .

C. Le rapporteur observe que la validation législative respecte formellement la jurisprudence constitutionnelle.

Dans une décision du 22 juillet 1980 130 ( * ) , le Conseil constitutionnel a fixé trois conditions aux validations législatives : la non-immixtion dans l'exercice du pouvoir juridictionnel par le respect des décisions de justice devenues définitives ; le respect du principe de non-rétroactivité de la loi en matière pénale ; l'existence d'un motif d'intérêt général.

De plus, dans des décisions du 11 janvier 1995 131 ( * ) et du 21 décembre 1999 132 ( * ) , le Conseil constitutionnel a ajouté une quatrième condition, celle de définir précisément la portée de cette validation.

Le rapporteur relève que la validation législative, qui ne concerne pas la matière pénale, semble répondre à deux critères :

- d'une part, la formulation « sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée » garantit la non-immixtion dans l'exercice du pouvoir juridictionnel ;

- d'une part, la référence au décret du 11 mars 2022 « en tant que sa régularité serait contestée pour le motif tiré du défaut d'accomplissement auxquelles le code de commerce, le code de l'énergie ou le code monétaire et financier confère un caractère obligatoire » précise la portée de la validation.

S'agissant du motif d'intérêt général, dans l'étude d'impact 134 ( * ) , le Gouvernement expose plusieurs arguments :

- tout d'abord, le législateur a reconnu l'équilibre comme « un bien de première nécessité » (article L. 121-1 du code de l'énergie) ;

- en outre, dans une décision du 7 novembre 2019 135 ( * ) , le Conseil constitutionnel, au sujet du relèvement à l'article L. 336-3 du code de l'énergie, plafond légal de l'Arenh de 100 à 150 TWh, a indiqué que « le législateur, qui a entendu assurer un fonctionnement concurrentiel du marché de l'électricité et garantir une stabilité des prix sur ce marché, a poursuivi un objectif d'intérêt général », précisant qu' « en portant à cent-cinquante térawattheures le volume maximal d'électricité, le législateur a entendu éviter la situation où les fournisseurs, faute d'accéder au volume d'énergie nucléaire nécessaire pour fournir leurs clients, seraient contraints d'acquérir sur le marché une électricité plus chère entraînant ainsi un renchérissement des prix pour le consommateur final »

- de plus, dans l'ordonnance précitée, le Conseil d'État, au sujet du relèvement par le décret susmentionné, du volume règlementaire de l'Arenh de 100 à 120 TWh, a indiqué qu' « il résulte de l'instruction que la livraison d'un volume additionnel d'Arenh a pour objet de compléter ces mesures, en limitant l'effet de l'augmentation du prix de l'électricité sur les coûts d'approvisionnement des fournisseurs qui en bénéficient et indirectement sur les tarifs qu'ils sont en mesure de proposer aux clients finaux » et qu' « il suit de là que l'incidence des mesures contestées sur les prix de l'électricité est de nature à caractériser un intérêt public à poursuivre leur exécution ».

D. Le rapporteur note que la validation législative emporte des implications financières importantes.

Dans son étude d'impact, le Gouvernement estime que la validation législative bénéficie aux particuliers, entreprises et collectivités consommateurs d'électricité. Elle n'induirait aucune charge administrative nouvelle. Pour le Gouvernement, « ce même décret représente un coût direct pour EDF de l'ordre de 4,2 Mds€ ».

Le rapporteur relève que le coût pourrait être plus élevé : d'une part, le groupe EDF a estimé l'impact financier de ce relèvement entre 7,7 et 8,4 Mds€ 136 ( * ) puis 10,2 Mds 137 ( * ) ; de plus, sollicité sur ce point, le Gouvernement a avancé un chiffre de 8 Mds € et la CRE entre 8 et 9 Mds 138 ( * ) .

E. Enfin, le rapporteur observe que la validation législative est perfectible sur le plan rédactionnel.

D'une part, la mention « dans l'objectif d'éviter une répercussion rétroactive des conséquences de son éventuelle annulation contentieux sur les factures d'électricité de tous les Français en 2022 » semble superflue.

D'autre part, son champ ne vise pas l'arrêté du 11 mars 2022 mais seulement le décret, alors que les deux sont l'objet d'un recours pendant.

Sollicité sur ce point, le Gouvernement a précisé que cet arrêté « ne présente pas de risque vis-à-vis d'un défaut de consultation ».

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article sans modification.

Article 22 (délégué) (non modifié)

Rapport au Parlement sur le zonage des aides au logement

Cet article vise à compléter le rapport demandé au Gouvernement, à l'initiative du Sénat, dans le cadre de la loi 3DS sur le zonage des aides au logement.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter cet article sans modification.

I. La situation actuelle - Une demande de rapport introduite par le Sénat dans la loi 3DS

L'article 76 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale a été introduit à l'initiative de la commission des affaires économiques. Il demande au Gouvernement remettre au Parlement un rapport sur les conséquences de l'application du zonage déterminant le financement du logement social dans les communes soumises à la loi SRU.

C'était l'une des propositions du rapport d'évaluation sur l'application de la loi SRU remis en mai 2021 par nos collègues Dominique Estrosi Sassone et Valérie Létard.

La consultation des maires qui a été organisée pour sa préparation avait fait apparaître que, dans nombre de communes déficitaires, la non-révision du zonage déterminant le financement empêche les élus de réaliser leurs objectifs. La hausse des prix du foncier est un obstacle à la rentabilisation des opérations de logement social. C'est particulièrement le cas des communes littorales, touristiques ou à proximité de métropoles attractives (le Genevois par exemple). Il apparaissait donc nécessaire que l'impact du zonage sur les possibilités effectives de rattrapages puisse être mesuré afin de préparer sa révision.

Après l'accord intervenu en commission mixte paritaire, l'article 76 est rédigé comme suit : « Avant le 1 er janvier 2023, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conséquences de l'application du zonage déterminant le financement du logement social sur sa production dans les communes où s'appliquent les articles L. 302-5 à L. 302-9-2 du code de la construction et de l'habitation. »

II. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Par amendement n° 820 du rapporteur de la commission des affaires économiques et sous-amendé par Guillaume Vuilletet, l'Assemblée nationale a introduit un article additionnel après l'article 20 qui vient élargir l'article 76 aux conséquences des classements pris en application de l'arrêté du 17 mars 1978 relatif au classement des communes par zones géographiques et de l'article R. 304-1 du code de la construction et de l'habitation dans leur rédaction en vigueur à la date de publication de la présente loi.

Ce rapport évaluerait non seulement les effets sur la production de logements sociaux dans les zones SRU comme prévu initialement mais également :

- l'adéquation du zonage en matière de calcul des aides personnelles au logement dans les zones dont les coûts immobiliers ont connu une augmentation significative au cours des cinq dernières années ;

- l'opportunité de faire évoluer le premier dans les territoires
relevant de l'article 73 de la Constitution

- et l'opportunité d'une révision et, à des fins de simplification et d'intelligibilité des aides, de la fusion de ces classements.

L'auteur de l'amendement souligne que dans certains secteurs, notamment les zones littorales et de montagne, les coûts du logement ont connu de très nettes augmentations au cours des cinq dernières années, jusqu'à devenir difficiles à supporter pour les locataires. Pour cette raison, il appelle de ses voeux l'actualisation du zonage des APL afin qu'il corresponde aux coûts réels des loyers, car certaines zones très chères ne se trouvent pas dans les zones APL pertinentes, ce qui a un impact sur le loyer plafond, paramètre de dépense de l'APL, et donc sur la prestation versée.

Comme ce zonage est mis à jour par la voie réglementaire, il importe que le Gouvernement se saisisse de ce problème et en rende compte au Parlement.

Le sous-amendement de Guillaume Vuilletet a porté sur la situation des départements et régions d'outre-mer afin de tenir compte de leur situation particulière.

III. La position de la commission - Adoption sans modification

La proposition de la commission des affaires économiques prolonge et précise les demandes de notre propre commission et l'accord intervenu entre les rapporteurs à l'occasion de la CMP sur la loi 3DS.

Elle est tout à fait en phase avec l'analyse de l'évolution du calcul des APL présentée par le rapporteur et déplorée par de nombreux observateurs et qui avait conduit le Sénat à adopter, le 4 juin 2020, une PPL sur l'efficacité des APL présentée par notre collègue Cécile Cuckierman.

La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article sans modification.


* 1 La zone tendue est une zone géographique qui regroupe au total 1 149 communes composant 28 agglomérations de métropole. Il s'agit des agglomérations suivantes : Ajaccio, Annecy, Arles, Bastia, Bayonne, Beauvais, Bordeaux, Draguignan, Fréjus, Genève-Annemasse, Grenoble, La Rochelle, La Teste-de-Buch-Arcachon, Lille, Lyon, Marseille-Aix-en-Provence, Meaux, Menton-Monaco, Montpellier, Nantes, Nice, Paris, Saint-Nazaire, Sète, Strasbourg, Thonon-les-Bains, Toulon, Toulouse. Cette liste est fixée par le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 régulièrement mis à jour.

* 2 Est-Ensemble, Lyon, Plaine-Commune, Paris, Montpellier, Villeurbanne.

* 3 Classé du plus au moins social.

* 4 Arrêté du 23 septembre 2021 relatif au calcul des aides personnelles au logement.

* 5 La durée de l'expérimentation a été portée de 5 à 8 ans et celle de candidature de 2 à 4 ans par l'article 85 de la loi n'°2022-217 du 21 février 2022 dite 3DS.

* 6 Un « contrat à distance » s'entend de tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat.

* 7 Articles L. 221-1 à L. 221-29 du code de la consommation.

* 8 Le b) du 2° de l'article L. 121-2 du code de la consommation précise que les caractéristiques essentielles d'un bien ou service sont : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l'usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien et service.

* 9 Si la technique de communication employée impose des limites d'espace ou de temps pour la présentation des informations, l'article L. 221-12 dispose que le professionnel est tout de même tenu de fournir, a minima, les informations relatives aux caractéristiques essentielles des biens et services, à leur prix, à son identité, à la durée du contrat et au droit de rétractation. Le professionnel doit ensuite transmettre les autres informations par un autre moyen adapté.

* 10 Art. L. 221-13 du code de la consommation.

* 11 Art. L. 221-15 du code de la consommation.

* 12 Section 2 bis du chapitre IV du titre II du livre II du code de la consommation.

* 13 Section 3 du chapitre IV du titre II du livre II du code de la consommation.

* 14 Gesetz für faire Verbraucherverträge Vom 10 August 2021, Bundesgesetzblatt 2021 Teil I Nr. 53 vom 17 August 2021.

* 15 Rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, par Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, députée.

* 16 Loi n° 2005-67 du 28 janvier 2005 tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur.

* 17 Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.

* 18 Loi n° 2019-733 du 14 juillet 2019 relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé

* 19 Loi n° 2022-270 du 28 février 2022 pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur.

* 20 Article L. 221-10-3 du code de la mutualité.

* 21 Articles L. 932-12-2 et L. 932-21-3 du code de la sécurité sociale.

* 22 Avis du CCSF : Accord pour simplifier la résiliation des contrats d'assurance et pour une extension du délai de renonciation des contrats affinitaires, 5 mai 2022.

* 23 Chapitre I er du titre II du livre I er du code de la consommation.

* 24 Art. L. 121-1 à L. 121-7 du code de la consommation.

* 25 Art. L. 132-3 du code de la consommation.

* 26 Art. L. 132-12 du code de la consommation.

* 27 Art. L. 512-21 du code de la consommation.

* 28 Art. L. 214-4 du code de la sécurité intérieure.

* 29 Art. L. 232-20 du code du sport.

* 30 Loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière.

* 31 Rapport d'information de M. Fabien GAY, Mmes Françoise FÉRAT et Florence BLATRIX CONTAT, fait au nom de la commission des affaires économiques, n° 742 (2021-2022) - 29 juin 2022.

* 32 Art. L. 132-14 du code de la consommation (trois ans de prison et une amende de 375 000 euros).

* 33 Art. L. 242-33 du code de la consommation (cinq ans de prison et une amende de 375 000 euros).

* 34 Art. L. 452-1 du code de la consommation (cinq ans de prison et une amende de 600 000 euros).

* 35 Dans ce cas, le plafond est 30 euros pour un chèque d'un montant inférieur ou égal à 50 euros, et de 50 euros pour un chèque d'un montant supérieur à 50 euros, conformément à l'article D131-25 du code monétaire et financier.

* 36 Loi n° 2017-1839 du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement (article 12).

* 37 Conclus par la France avec un État membre de l'Union européenne ou de l'Association européenne de libre-échange (AELE).

* 38 Notamment le calendrier de commercialisation, le prix de réserve, les produits commercialisés et le type d'enchères.

* 39 Fixés pour un débit de soutirage ainsi qu'éventuellement une localisation ou un volume.

* 40 Tout comme ceux des réseaux de distribution, aussi appelés « accès des tiers aux réseaux de distribution » (ATRD) ou des installations de gaz naturel liquéfié (GNL).

* 41 Arrêté du 9 mai 2018 précisant certaines dispositions relatives au stockage souterrain de gaz naturel.

* 42 Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Conseil économique et social européen et au Comité des régions, COM(2022) 230 final, 18 mai 2022 : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/ ?uri=CELEX :52022DC0230&from=EN .

* 43 Proposition de Règlement du parlement européen et du conseil modifiant le règlement (UE) 2017/1938 du Parlement européen et du Conseil concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en gaz naturel et le règlement (CE) n° 715/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant les conditions d'accès aux réseaux de transport de gaz naturel :

https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/ ?uri=CELEX :52022PC0135 .

* 44 Règlement (CE) n° 715/2009 du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant les conditions d'accès aux réseaux de transport de gaz naturel et abrogeant le règlement (CE) n o 1775/2005.

* 45 Règlement (UE) 2017/1938 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2017 concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en gaz naturel et abrogeant le règlement (UE) n° 994/2010.

* 46 Conseil européen, Réunion du Conseil européen (24 et 25 mars 2022) - Conclusions, 25 mars 2022 (OR. en) : https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-1-2022-INIT/fr/pdf .

* 47 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 48 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/les-avis-du-conseil-d-etat-rendus-sur-les-projets-de-loi/2022/avis_ce_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 49 Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (article 158).

* 50 Arrêté du 17 décembre 2019 relatif à l'interruptibilité de la consommation de gaz naturel.

* 51 Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Conseil économique et social européen et au Comité des régions, COM(2022) 230 final, 18 mai 2022 : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/ ?uri=CELEX :52022DC0230&from=EN .

* 52 Règlement (UE) 2017/1938 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2017 concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en gaz naturel et abrogeant le règlement (UE) n o 994/2010.

* 53 Consultable ci-après :

https://france.representation.ec.europa.eu/informations/economiser-le-gaz-pour-un-hiver-sur-la-commission-propose-un-plan-de-reduction-de-la-demande-de-gaz-2022-07-20_fr

* 54 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 55 Ministère de la transition écologique (MTE), Chiffres clés de l'énergie , Édition 2021, 2022, p. 61.

* 56 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/les-avis-du-conseil-d-etat-rendus-sur-les-projets-de-loi/2022/avis_ce_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 57 Ordonnance n° 2018-1165 du 19 décembre 2018 modifiant les missions et les obligations incombant aux gestionnaires de réseaux de transport, aux fournisseurs, aux opérateurs d'infrastructures de stockage et aux opérateurs de terminaux méthaniers en matière de fonctionnement du système gazier et définissant les règles relatives au délestage de la consommation de gaz naturel.

* 58 Ces dispositions sont anciennes car datant respectivement de la loi n° 74-908 du 29 octobre 1974 (article 1 er ), de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 (articles 6 et 21) et de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 (article 18).

* 59 Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Conseil économique et social européen et au Comité des régions, COM(2022) 230 final, 18 mai 2022 : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/ ?uri=CELEX :52022DC0230&from=EN .

* 60 Règlement (UE) 2017/1938 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2017 concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en gaz naturel et abrogeant le règlement (UE) n o 994/2010.

* 61 Directive 2009/73/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE.

* 62 Consultable ci-après :

https://france.representation.ec.europa.eu/informations/economiser-le-gaz-pour-un-hiver-sur-la-commission-propose-un-plan-de-reduction-de-la-demande-de-gaz-2022-07-20_fr .

* 63 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 64 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/les-avis-du-conseil-d-etat-rendus-sur-les-projets-de-loi/2022/avis_ce_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 65 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 66 Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Conseil économique et social européen et au Comité des régions, COM(2022) 230 final, 18 mai 2022 : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/ ?uri=CELEX :52022DC0230&from=EN .

* 67 Conseil européen, Réunion du Conseil européen (24 et 25 mars 2022) - Conclusions, 25 mars 2022 (OR. en) : https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-1-2022-INIT/fr/pdf .

* 68 Précisant que « la plateforme d'achat commun sera également ouverte aux pays des Balkans occidentaux et aux trois pays du Partenariat oriental associés ».

* 69 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 70 Aussi la capacité a-t-elle été augmentée, de 11 à 17 TWh, à Fos Cavaou, de 2022 à 2023.

* 71 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/les-avis-du-conseil-d-etat-rendus-sur-les-projets-de-loi/2022/avis_ce_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 72 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 73 Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Conseil économique et social européen et au Comité des régions, COM(2022) 230 final, 18 mai 2022 : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52022DC0230&from=EN .

* 74 Conseil européen, Réunion du Conseil européen (24 et 25 mars 2022) - Conclusions, 25 mars 2022 (OR. en) : https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-1-2022-INIT/fr/pdf .

* 75 Consultable ci-après :

https://france.representation.ec.europa.eu/informations/economiser-le-gaz-pour-un-hiver-sur-la-commission-propose-un-plan-de-reduction-de-la-demande-de-gaz-2022-07-20_fr

* 76 Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Conseil économique et social européen et au Comité des régions, COM(2022) 230 final, 18 mai 2022 : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52022DC0230&from=EN .

* 77 Conseil européen, Réunion du Conseil européen (24 et 25 mars 2022) - Conclusions, 25 mars 2022 (OR. en) : https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-1-2022-INIT/fr/pdf .

* 78 Loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (article 1 er ).

* 79 Décret n° 2011-466 du 28 avril 2011 fixant les modalités d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (abrogé par le décret n° 2015-1823 du 30 décembre 2015 relatif à la codification de la partie réglementaire du code de l'énergie).

* 80 Il existe deux compléments de prix : d'une part, le « complément de prix 1 » dit « CP1 » vise à neutraliser la situation d'un fournisseur ayant demandé une quantité excédentaire d'Arenh par rapport à ses droits théoriques, pour la revendre sur le marché de gros de l'électricité, en l'obligeant à restituer à EDF la valeur de cette quantité excédentaire ; d'autre part, le « complément de prix 2 » dit « CP2 » consiste à pénaliser la situation d'un fournisseur ayant demandé une quantité excédentaire d'Arenh par rapport à ses besoins réels, au-delà d'une marge de tolérance de 10 %, en l'obligeant à réserver à l'ensemble des fournisseurs la valeur de cette quantité excédentaire.

* 81 Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat (article 62).

* 82 Décret n° 2022-342 du 11 mars 2022 définissant les modalités spécifiques d'attribution d'un volume additionnel d'électricité pouvant être alloué en 2022, à titre exceptionnel, dans le cadre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH).

* 83 Arrêté du 11 mars 2022 fixant le volume global maximal d'électricité devant être cédé par Électricité de France au titre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, pris en application de l'article L. 336-2 du code de l'énergie.

* 84 Sur les volumes additionnels délivrés.

* 85 Groupe EDF, Mesures exceptionnelles annoncées par le Gouvernement français , 13 janvier 2022.

* 86 Groupe EDF , Point d'actualité sur le phénomène de corrosion sous contrainte et ajustement de l'estimation de production en France pour 2022 , 18 mai 2022.

* 87 Dans le cadre de la mission d'information sur l'énergie et l'hydrogène nucléaires.

* 88 Conseil d'État, Décision n° 462841, 5 mai 2022.

* 89 Loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (article 63).

* 90 Décret n° 2021-273 du 11 mars 2021 relatif à la fourniture de gaz naturel et d'électricité.

* 91 Arrêté du 3 novembre 2021 portant nomination à titre transitoire d'un fournisseur de secours en électricité.

* 92 Arrêté du 5 novembre 2021 portant nomination à titre transitoire d'un fournisseur de secours en électricité sur les zones de dessertes des entreprises locales de distribution.

* 93 Délibération n° 2021-315 de la Commission de régulation de l'énergie du 14 octobre 2021 portant proposition de cahiers des charges des appels à candidatures portant sur la désignation de fournisseurs de secours en gaz naturel et en électricité.

* 94 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 95 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 96 Commission de régulation de l'énergie (CRE), Évaluation du dispositif ARENH entre 2011 et 2017, 18 janvier 2018.

* 97 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 98 Loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (article 1 er ).

* 99 Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat (article 62).

* 100 Décret n° 2022-342 du 11 mars 2022 définissant les modalités spécifiques d'attribution d'un volume additionnel d'électricité pouvant être alloué en 2022, à titre exceptionnel, dans le cadre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh).

* 101 Arrêté du 11 mars 2022 fixant le volume global maximal d'électricité devant être cédé par Électricité de France au titre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, pris en application de l'article L. 336-2 du code de l'énergie.

* 102 Commission de régulation de l'énergie (CRE), Rapport pris en application de l'article R. 336-39 du code de l'énergie analysant les causes et les enjeux de l'atteinte du plafond de l'Arenh, 22 juillet 2020.

* 103 Groupe EDF, « EDF ajuste son estimation de production nucléaire en France pour 2022 », 7 février 2022, « EDF ajuste son estimation de production nucléaire en France pour 2023 », 11 février 2022 et « Point d'actualité sur le phénomène de corrosion sous contrainte et ajustement de l'estimation de production nucléaire en France en 2022 », 18 mai 2022.

* 104 Dans le cadre de la mission sur l'énergie et l'hydrogène nucléaires, conduite par les rapporteurs Daniel Gremillet, Jean-Pierre Moga et Jean-Jacques Michau.

* 105 La CRE évoque également le fait que « le bénéfice du parc nucléaire est déjà amorti ».

* 106 Loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (article 1 er ).

* 107 Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat (article 62).

* 108 Décret n° 2022-342 du 11 mars 2022 définissant les modalités spécifiques d'attribution d'un volume additionnel d'électricité pouvant être alloué en 2022, à titre exceptionnel, dans le cadre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh).

* 109 Arrêté du 11 mars 2022 fixant le volume global maximal d'électricité devant être cédé par Électricité de France au titre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, pris en application de l'article L. 336-2 du code de l'énergie.

* 110 Sur les volumes additionnels délivrés.

* 111 Groupe EDF, Mesures exceptionnelles annoncées par le Gouvernement français , 13 janvier 2022.

* 112 Groupe EDF, Groupe EDF, Point d'actualité sur le phénomène de corrosion sous contrainte et ajustement de l'estimation de production en France pour 2022 , 18 mai 2022.

* 113 Dans le cadre de la mission d'information sur l'énergie et l'hydrogène nucléaires.

* 114 Idem.

* 115 Groupe EDF, Publication du décret et des arrêtés relatifs à l'attribution de 20 TWh de volumes d'Arenh supplémentaires pour 2022 : mise à jour de l'impact sur les perspectives d'EBITDA 2022, 14 mars 2022.

* 116 Groupe EDF, Point d'actualité sur le phénomène de corrosion sous contrainte et ajustement de l'estimation de production en France pour 2022, 18 mai 2022.

* 117 Groupe EDF, Point d'actualité sur l'EPR de Flamanville, 12 janvier 2022.

* 118 Groupe EDF, Point d'actualité sur Hinkley Point C, 19 mai 2022.

* 119 Le Monde, « Nucléaire : comment le Gouvernement travaille en catimini à la construction de six nouveaux EPR », 14 octobre 2019 .

* 120 Données indiquées par Jean-Bernard Lévy à l'occasion de son audition susmentionnée par la commission des affaires économiques, 10 novembre 2021.

* 121 Cour des comptes, L'organisation des marchés de l'électricité, juillet 2022, p. 114.

* 122 Décision de la Commission européenne du 12 juin 2012, concernant l'aide d'État n° sa.21918 (c 17/2007) (ex nn 17/2007) mise à exécution par la France, Tarifs réglementés de l'électricité en France, p. 41.

* 123 Ministère de la transition écologique (MTE), Document de consultation « Nouvelle régulation du nucléaire existant », 2019, p. 5.

* 124 Décret n° 2022-342 du 11 mars 2022 définissant les modalités spécifiques d'attribution d'un volume additionnel d'électricité pouvant être alloué en 2022, à titre exceptionnel, dans le cadre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh).

* 125 Arrêté du 11 mars 2022 fixant le volume global maximal d'électricité devant être cédé par Électricité de France au titre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, pris en application de l'article L. 336-2 du code de l'énergie.

* 126 Sur les volumes additionnels délivrés.

* 127 Conseil d'État, Décision n° 462841, 5 mai 2022.

* 128 Directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et modifiant la directive 2012/27/UE (refonte).

* 129 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 130 Décision n° 80-119 DC du 22 juillet 1980, Loi portant validation d'actes administratifs.

* 131 Décision n° 95-363 DC du 11 janvier 1995 sur la loi relative au financement de la vie publique.

* 132133 Décision n° 99-422 DC du 21 décembre 1999 sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

* 134 Consultable ci-après :

https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2022/ei_ecox2217989l_cm_7.07.2022.pdf .

* 135 Décision n° 2019-791 DC du 7 novembre 2019 sur la loi relative à l'énergie et au climat.

* 136 Groupe EDF, Mesures exceptionnelles annoncées par le Gouvernement français , 13 janvier 2022.

* 137 Groupe EDF, Groupe EDF, Point d'actualité sur le phénomène de corrosion sous contrainte et ajustement de l'estimation de production en France pour 2022 , 18 mai 2022.

* 138 Dans le cadre de la mission d'information sur l'énergie et l'hydrogène nucléaires.

Page mise à jour le

Partager cette page