B. L'APPLICATION DU DROIT DE RÉSILIATION DE L'ASSURANCE EMPRUNTEUR DOIT ÊTRE CLARIFIÉE

Compte tenu des considérations qui précèdent et des auditions qu'il a tenues, le rapporteur pour avis considère que la résiliation à tout moment ne présenterait que des avantages limités pour les emprunteurs présentant le meilleur profil , en contrepartie de risques réels pour les autres .

Il propose donc plutôt d' améliorer la mise en oeuvre du droit de résiliation annuelle , dont les avantages sont comparables à condition de lever certaines ambiguïtés d'application.

1. La procédure actuelle manque de clarté

En application de l'article L. 113-12 du code des assurances, qui concerne de manière générale les assurances de dommages et les assurances de personnes, l'assuré a le droit de résilier le contrat à l'expiration d'un délai d'un an, en adressant une notification à l'assureur au moins deux mois avant la date d'échéance du contrat.

Lorsque ce contrat d'assurance est associé à un crédit immobilier, l'article L. 113-12-2 du même code précise en outre que l'assuré peut résilier le contrat dans un délai de douze mois à compter de la signature de l'offre de prêt. Les crédits immobiliers concernés sont ceux destinés à financer l'acquisition ou la construction d'immeubles à usage d'habitation ou à usage mixte (professionnel et d'habitation), ainsi que l'acquisition des terrains destinés à la construction de ces immeubles (1° de l'article L. 313-1 du code de la consommation).

En cas de résiliation du contrat d'assurance et de présentation d'un autre contrat, le prêteur , en application de l'article L. 313-31 du code de la consommation, notifie à l'emprunteur sa décision d'acceptation ou de refus du contrat d'assurance dans un délai de dix jours ouvrés à compter de la réception d'un autre contrat d'assurance.

En cas d'acceptation par le prêteur, la résiliation du contrat d'assurance prend effet dix jours après la réception par l'assureur de la décision du prêteur , ou à la date de prise d'effet du contrat accepté en substitution par le prêteur si celle-ci est postérieure (article L. 113-12-2 précité du code des assurances).

Toutefois, l'article L. 313-39 du code de la consommation prévoit que les modifications au contrat de crédit initial sont apportées sous la seule forme d'un avenant, soumis à l'emprunteur qui dispose d'un délai de réflexion de dix jours.

Dans son rapport sur l'assurance emprunteur, le CCSF note que « l'articulation entre ces textes légaux pose clairement question et surtout entraîne une incompréhension totale entre les différentes parties sur ce que doivent être les délais applicables au cas d'espèce ».

L' article 4 de la présente proposition de loi ajoute une précision sur le délai de production de l'avenant, qui serait de dix jours ouvrés au maximum à compter de la réception de la demande de substitution. L'avenant serait donc produit dans le même délai que la décision d'acceptation ou de refus.

La détermination de la date d'échéance utilisée pour la résiliation annuelle fait toujours l'objet d'incertitudes qui ont rendu plus difficile l'application de ce droit instauré par la loi du 21 février 2017. Le CCSF notait ainsi dans un avis rendu le 27 novembre 2018 que « cette faculté de résiliation se heurte à une difficulté puisque la plupart des contrats d'assurance emprunteur en cours ne comportent pas de date d'échéance ». Le comité a alors recommandé, à l'issue d'une concertation de place, que cette date soit définie comme la date d'anniversaire de la signature de l'offre de prêt, sauf si le client a formulé une demande pour une autre date, indiquée dans le contrat.

2. Les deux assemblées du Parlement ont déjà adopté des dispositions permettant de clarifier l'application du droit de résiliation

Le rapporteur pour avis considère que l'inscription dans la loi de la date anniversaire de la signature de l'offre de prêt proposée par le CCSF doit s'imposer .

C'est ce qu'avait proposé le Sénat, sur un amendement de M. Martial Bourquin 21 ( * ) , lors de l'examen en février 2020 du projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP). Ce dispositif a fait l'objet d'un accord entre les deux assemblées réunies en commission mixte paritaire . Il a toutefois été censuré par le Conseil constitutionnel, non pas sur le fond, mais en raison de son absence de lien avec les dispositions du projet de loi.

Pour mémoire, ce dispositif a également été soutenu par le Gouvernement , qui avait souligné, lors des débats à l'Assemblée nationale en octobre 2020, le risque pour un dispositif de résiliation à tout moment de faire payer plus les personnes vulnérables, tandis que les personnes en bonne santé, jeunes et dotées d'un bon emploi paieraient moins 22 ( * ) . Le rapporteur pour avis s'étonne que le Gouvernement apporte aujourd'hui son soutien au principe de la résiliation à tout moment dont il dénonçait les effets pervers il y a un peu plus d'un an .

La commission a donc adopté , sur la proposition du rapporteur pour avis, un amendement COM-36 reprenant à l'article premier de la présente proposition de loi la disposition essentielle du « dispositif ASAP », à savoir que la date d'échéance à prendre en compte pour l'exercice du droit de résiliation mentionné à l'article L. 113-12 du code des assurances est, au choix de l'assuré, la date d'anniversaire de la signature de l'offre de prêt par celui-ci ou toute autre date d'échéance prévue au contrat .

Par cohérence, la commission a adopté, sur la proposition du rapporteur pour avis, un amendement COM-35 qui adapte l'intitulé du titre premier de la proposition de loi, qui serait « Information de l'emprunteur en matière de droit de résiliation de l'assurance emprunteur », et non « Droit de résiliation à tout moment de l'assurance emprunteur et autres mesures de simplification ».


* 21 Amendement n° COM-58 , présenté par M. Martial Bourquin et les membres du groupe socialiste et républicain, modifié par le sous-amendement n° COM-159 de Mme Patricia Morhet-Richaud, rapporteure au nom de la commission spéciale chargée de l'examen du texte. Cet amendement est distinct de l'« amendement Bourquin » qui a instauré en 2017 le droit de résiliation annuel.

* 22 Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l'industrie, intervention lors de la discussion du projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique devant l'Assemblée nationale , 2 octobre 2020.

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