EXAMEN EN COMMISSION

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MERCREDI 17 NOVEMBRE 2021

M. Thani Mohamed Soilihi , rapporteur pour avis de la mission « Outre-mer » . - Il me revient aujourd'hui de vous présenter les crédits de la mission « Outre-mer » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022, dont notre commission s'est saisie pour avis.

Les effets de la crise de la covid-19 ont été et sont encore très importants sur les économies ultramarines ; des contraintes particulières sur l'activité économique, mais également sur les activités touristiques et le transport maritime trouvent encore à s'appliquer sur certains territoires ultramarins. Cela justifie le maintien des mesures de soutien aux collectivités ultramarines comme aux acteurs économiques, soutien qui me paraît indispensable au regard de la situation sanitaire et économique particulièrement dégradée de certains territoires. Dans ce cadre, la mission « Outre-mer » est cette année encore pertinente, puisqu'elle a pour ambitions premières la relance et le développement des territoires ultramarins.

La principale problématique à laquelle est confrontée cette mission est celle de la sous-exécution chronique des crédits votés. Chaque année, les crédits consommés sont largement inférieurs aux crédits attribués en loi de finances. Cependant, en dépit d'une dégradation de la situation sanitaire et économique des outre-mer, cette sous-exécution a été, l'année dernière, significativement inférieure à celle qui a été constatée les années précédentes.

En effet, depuis le projet de loi de finances pour 2021, des mesures visant à remédier à la sous-exécution chronique des crédits de cette mission ont été déployées par le ministère des outre-mer suivant deux axes : la sincérisation du budget de la mission en PLF et l'amélioration du pilotage budgétaire au cours de l'exécution budgétaire de la mission. Je constate, avec satisfaction, que des efforts de fiabilisation des prévisions et hypothèses budgétaires instruisant des baisses ciblées de crédits en programmation initiale ont été menés avec succès et appellent à leur approfondissement.

Aussi, je souhaite saluer les efforts entrepris par la direction générale des outre-mer (DGOM), qui s'est pleinement engagée dans une démarche active d'évolution de ses modalités de pilotage des crédits, qui s'illustre en particulier par l'accélération des décaissements sur la mission.

Cet effort de sincérisation est positif : il permet de disposer d'une vision plus crédible de la conduite des politiques de la mission « Outre-mer ». Je vous invite toutefois à être vigilants, afin que cela ne conduise pas à terme à une diminution de l'ambition pour nos territoires ultramarins. En tout état de cause, ce n'est pas le cas dans le projet de budget qui nous est présenté aujourd'hui : les crédits alloués à la mission « Outre-mer » restent stables par rapport à 2021. Ainsi, la mission est dotée pour 2022 de 2,62 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 2,47 milliards en crédits de paiement (CP), soit une augmentation de 1,3 %.

La programmation des crédits pour 2022 est en effet marquée par un effort de relance à la suite de la crise de la covid-19, qui se traduit par des mesures nouvelles et un effort significatif en matière de lutte contre l'habitat insalubre, de soutien à l'emploi et à la formation ciblé sur les jeunes ultramarins, et d'accompagnement des collectivités territoriales.

Permettez-moi de vous présenter ces trois priorités.

En matière de construction et de rénovation des infrastructures, l'année 2022 constituera la dernière année de mise en oeuvre du plan « Logement outre-mer 2019-2022 ». Le projet de loi de finances pour 2022 prévoit une hausse de 10 millions d'euros des crédits mobilisables pour de nouveaux projets. Cela permettra de poursuivre la mise en oeuvre du plan et d'accompagner les stratégies territoriales des établissements publics fonciers et d'aménagement de Guyane et de Mayotte.

Un effort conséquent est également fait en faveur de la lutte contre l'habitat insalubre et informel sur ces deux territoires : une expérimentation du dispositif Logement locatif très social adapté a été lancée afin de permettre, d'une part, la construction massive de nouveaux logements par un soutien financier de l'État pouvant atteindre 100 % de subventions et, d'autre part, de proposer des loyers abordables pour ces ménages. J'y suis tout à fait favorable, car la situation particulière de l'habitat dans les territoires ultramarins impose une politique particulièrement volontariste.

En matière de soutien à l'insertion et à la formation des jeunes ultramarins, ces crédits connaissent une hausse de près de 7 % en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, illustrant la volonté gouvernementale de recentrer son action sur cette priorité.

Je souhaite revenir sur la double mesure relative au service militaire adapté (SMA). Celui-ci a de nouveau montré toute sa pertinence lors de la crise sanitaire. Le niveau d'insertion a certes chuté en 2021, mais il demeure à un niveau très élevé et devrait avoisiner les 75 % à la fin de l'année. Ces bons résultats justifient qu'une expérimentation du programme SMA 2025+, élargissant le public cible et enrichissant le contenu du programme, soit financée via le PLF pour 2022 et lancée à Mayotte cette année.

Aussi, deux nouvelles compagnies seront créées à Mayotte et en Polynésie française, respectant ainsi les engagements pris par le Gouvernement au cours de l'année 2021. Ainsi, près de 9,7 millions d'euros et 251 équivalents temps plein (ETP) seront affectés à ces mesures auxquelles je souscris pleinement.

En ce qui concerne l'accompagnement des collectivités ultramarines, troisième priorité du budget pour 2022, des efforts sont en premier lieu prévus en matière d'aide à l'équipement des territoires. Cela passe par les contrats de convergence et de transformation, qui visent à réduire significativement et durablement les écarts de développement en matière économique, sociale et environnementale. En 2022, 209 millions d'euros sont prévus en autorisations d'engagement et 156,26 millions d'euros en crédits de paiement au titre de ces contrats. Cela est conforme aux engagements pris par le Gouvernement. Toutefois, je constate à regret que les outils de contractualisation ne permettent pas de pallier les difficultés de sous-consommation des crédits budgétaires. La faiblesse des montants consommés par rapport aux montants contractualisés est particulièrement alarmante : les dernières prévisions disponibles font état d'un taux de consommation des crédits qui s'établirait à 30 % seulement fin 2022... J'appelle par conséquent l'État à renforcer l'accompagnement des collectivités concernées par ce dispositif.

L'aide aux territoires passe également par l'introduction de deux mesures nouvelles relatives à la lutte contre la prolifération des algues sargasses et à l'accompagnement des mineurs isolés à Mayotte, qui répondent à des attentes formulées de longue date par les élus locaux.

Des actions fortes devraient enfin être menées afin d'accompagner les collectivités ultramarines dans le redressement de leur situation financière et budgétaire : 50 millions d'euros supplémentaires devraient y être dédiés. Cela traduit l'engagement de l'État à accompagner la collectivité territoriale de Guyane pour rétablir sa capacité d'autofinancement, mais également à financer le dispositif Contrat de Redressement en Outre-mer (COROM). Ce soutien renforcé de l'État est d'autant plus nécessaire que la situation financière et budgétaire fortement dégradée de certaines collectivités ultramarines est particulièrement préoccupante.

Pour terminer, je souhaite vous rappeler que les crédits portés par la mission « Outre-mer » ne constituent qu'un dixième environ de l'effort total de l'État en faveur des territoires ultramarins. Il s'agit des actions spécifiques de l'État dans les outre-mer, chaque ministère étant par ailleurs en charge de la mise en oeuvre de ses politiques sur l'ensemble du territoire français, outre-mer compris. Ainsi, l'effort global de l'État en faveur des territoires ultramarins en 2022 représenterait 19,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 21,2 milliards d'euros en crédits de paiement. Parmi ces crédits, 1,5 milliard d'euros devrait provenir de plan de relance qui contient des mesures spécifiques aux outre-mer. Je suis particulièrement favorable à cette territorialisation, mais je souhaite rappeler que ces dispositifs appellent un accompagnement et un suivi attentif de l'État afin que les acteurs locaux puissent pleinement s'en saisir.

L'ensemble de ces éléments me conduisent donc à vous proposer un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Outre-mer ».

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