III. LA CHUTE FINALE DE PRESSTALIS

A. UNE FAILLITE QUI NE SURPREND PAS MAIS DÉÇOIT

Dans ses trois précédents rapports budgétaires pour avis 2 ( * ) , ainsi que dans le rapport consacré à la loi de modernisation de la distribution de la presse 3 ( * ) , le rapporteur pour avis a évoqué en détail la situation, devenue peu à peu intenable, de Presstalis. Le 1 er juillet 2020, le tribunal de commerce a homologué la reprise du « niveau 1 » de la société par la Coopérative des quotidiens et la création de France Messagerie , tandis que le « niveau 2 » (SAD et SOPROCOM) était liquidé.

La cessation de paiement de la société ne peut être qualifiée de surprenante. Elle n'en constitue pas moins une déception au regard des moyens mis en oeuvre par l'État ces dernières années pour préserver ce canal essentiel de distribution de la presse, en particulier quotidienne, et un coup très rude porté au secteur, qui a dû assumer presque simultanément pandémie, période d'incertitude sur l'avenir de la distribution et mouvements de protestation sociale localisés, mais malheureusement particulièrement violents et durables.

B. FRANCE MESSAGERIE : UN AVENIR À CONSTRUIRE

Les éditeurs actionnaires de la messagerie ont échangé pendant plusieurs mois afin d'identifier une solution de reprise de l'activité. La perte de deux mois de chiffre d'affaires consécutive à la crise de la distribution représente environ 118 millions d'euros. Compte tenu du risque systémique que faisait peser une liquidation judiciaire de la messagerie sur la filière, dont le coût total a été estimé à près de 623 millions d'euros , l'État a décidé d'apporter son soutien dans le cadre d'un financement de pré-reprise de la structure.

La coopérative des quotidiens (CDQ) a finalement été la seule à déposer une offre de reprise des actifs du niveau 1 de Presstalis ainsi que du niveau 2 pour Paris (site de Bobigny, dépositaire) le 12 mai. D'autres alternatives, qui opéraient un rapprochement plus poussé avec les Messageries lyonnaises de presse (MLP) n'ont finalement pas été retenues, principalement pour des raisons tenant au statut des personnels de Presstalis. Le tribunal de commerce a prononcé le redressement judiciaire des activités du siège et du dépôt de Bobigny, assorti d'une période d'observation de deux mois, ainsi que la liquidation judiciaire sans poursuite d'activité de ses filiales en province (SAD et SOPROCOM). Cette liquidation a entraîné le licenciement de 512 salariés, à ajouter aux 133 salariés licenciés au niveau 1.

En matière de financement, le plan présenté par la CDQ représente un coût total évalué à 127 millions d'euros . L'État s'est engagé de son côté dans le financement à hauteur de 80 millions d'euros , dont 14 sous forme de prêt, en plus d'un maintien du niveau d'aides actuel, de la péréquation et de l'abandon des prêts du Fonds de développement économique et social (FDES).

Ce soutien a été conditionné à la prise en charge par les éditeurs du coût des départs dans la durée 2021-2022 , soit 47 millions d'euros.

Suite à ces garanties, France Messagerie présente un compte de résultat prévisionnel positif, avec un résultat d'exploitation à 0,7 million d'euros en 2021 et 1,6 million d'euros en 2022.

La création de cet organisme permet d'apurer en bonne partie les dettes à la fois financières mais également sociales de l'entreprise Presstalis. Le niveau 2 ayant été cédé en presque totalité, le périmètre de France Messagerie peut laisser espérer un avenir pour la société. Cependant, il semble utile de poser dès à présent quatre conditions :

• réserver les aides exceptionnelles consenties par l'État à la restructuration de l'entreprise , et non pas à alimenter avec le grand concurrent maintenant dominant, les MLP, une guerre des prix qui, de part et d'autre, a montré ses effets mortifères ;

• adapter le format de la société à un marché dont il est difficile de penser qu'il ne va pas poursuivre la baisse de volume enregistrée ces dix dernières années ;

• mener rapidement à bien les adaptations, en particulier en termes d'assortiment, rendues nécessaires par la loi sur la modernisation de la distribution de la presse ;

• poursuivre les travaux sur un rapprochement, à terme, avec les MLP, sous des conditions réalistes de part et d'autre.

IV. L'AFP POURSUIT SA REFONTE


* 2 Le dernier consacré au projet de loi de finances pour 2020 : https://www.senat.fr/rap/a19-145-42/a19-145-42.html

* 3 https://www.senat.fr/rap/l18-501/l18-501.html

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