Avis n° 183 (2019-2020) de M. Didier MANDELLI , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 10 décembre 2019

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N° 183

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 10 décembre 2019

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi (procédure accélérée) modifiant la loi n° 2010-838
du 23 juillet 2010 relative à l'
application du cinquième alinéa de l' article 13
de la
Constitution et prorogeant le mandat des membres de la Haute autorité
pour la
diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet
et sur le projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837
du 23 juillet 2010 relative à l'
application du cinquième alinéa de l' article 13
de la Constitution (procédure accélérée),

Par M. Didier MANDELLI,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Hervé Maurey , président ; M. Claude Bérit-Débat, Mme Pascale Bories, MM. Patrick Chaize, Ronan Dantec, Alain Fouché, Guillaume Gontard, Didier Mandelli, Frédéric Marchand, Mme Nelly Tocqueville, M. Michel Vaspart , vice-présidents ; Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Jean-François Longeot, Cyril Pellevat , secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Jérôme Bignon, Joël Bigot, Jean-Marc Boyer, Mme Françoise Cartron, MM. Guillaume Chevrollier, Jean-Pierre Corbisez, Michel Dagbert, Michel Dennemont, Mme Martine Filleul, MM. Hervé Gillé, Jordi Ginesta, Éric Gold, Mme Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Benoît Huré, Olivier Jacquin, Mme Christine Lanfranchi Dorgal, MM. Olivier Léonhardt, Jean-Claude Luche, Pascal Martin, Pierre Médevielle, Louis-Jean de Nicolaÿ, Jean-Jacques Panunzi, Philippe Pemezec, Mme Évelyne Perrot, M. Rémy Pointereau, Mme Angèle Préville, MM. Jean-Paul Prince, Christophe Priou, Mmes Françoise Ramond, Esther Sittler, Nadia Sollogoub, Michèle Vullien .

Voir les numéros :

Sénat :

119, 120 (2019-2020)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, réunie le mardi 10 décembre 2019, sous la présidence de M. Patrick Chaize, vice-président, a examiné le rapport pour avis de M. Didier Mandelli sur les projets de loi organique et ordinaire modifiant respectivement la loi organique n° 2010-837 et la loi n° 2010-838 relatives à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

La commission s'est inquiétée de l'affaiblissement du contrôle parlementaire sur la nomination des dirigeants de la SNCF , que la seule transformation de l'architecture du groupe ne saurait justifier. Au contraire, dans un contexte d'incertitude quant à la gouvernance précise du futur groupe public unifié et alors même que l'indépendance du gestionnaire d'infrastructure est questionnée , il est essentiel de renforcer ce contrôle .

Aussi, la commission a adopté un amendement au projet de loi organique visant à prévoir que les dirigeants de la société nationale SNCF et ceux de la société SNCF Réseau seront nommés par le Président de la République après avis des commissions parlementaires permanentes compétentes . Deux amendements de coordination au projet de loi ordinaire ont en outre été adoptés. L'un d'entre eux prévoit également de soumettre la nomination du président du conseil d'administration de la société SNCF Réseau à l'avis conforme de l'Autorité de régulation des transports .

Enfin, la commission a regretté l'insuffisante association du législateur à la rédaction de l'ordonnance relative à la future gouvernance de la SNCF dont les projets de loi entendent tirer les conséquences. De surcroît, le Gouvernement n'est toujours pas en mesure de communiquer le calendrier envisagé pour sa ratification , alors même que ses dispositions entrent en vigueur au 1 er janvier 2020.

I. UN AFFAIBLISSEMENT INJUSTIFIÉ DU CONTRÔLE PARLEMENTAIRE SUR LA NOMINATION DES DIRIGEANTS DU GROUPE SNCF

A. LA REFONTE GLOBALE DE L'ARCHITECTURE DU GROUPE...

Les projets de loi organique n° 120 (2019-2020) et ordinaire n° 119 (2019-2020) entendent tirer les conséquences de la transformation de l'architecture de la SNCF telle que résultant de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire 1 ( * ) d'une part et de l'ordonnance de juin 2019 relative à la gouvernance de la SNCF 2 ( * ) d'autre part. Cette ordonnance, qui n'a pas été ratifiée par le Parlement , a été prise sur le fondement de l'habilitation prévue à l'article 5 de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire et entrera en vigueur le 1 er janvier 2020.

L'architecture actuelle, issue de la réforme ferroviaire de 2014 3 ( * ) , repose sur un groupe public ferroviaire (GPF) composé d'un Epic (établissement public national à caractère industriel et commercial) « de tête » (SNCF) et de deux Epic « filles » (SNCF Mobilités et SNCF Réseau).

La loi pour un nouveau pacte ferroviaire a prévu la transformation, du groupe public ferroviaire en un groupe public unifié (GPU) constitué de sociétés anonymes à capitaux publics. L'article 1er de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire prévoit ainsi que, à compter du 1 er janvier 2020, « la société nationale à capitaux publics SNCF et ses filiales constituent un groupe public unifié » et que le capital de la société nationale SNCF (maison mère) sera intégralement détenu par l'État et incessible. La société nationale SNCF détiendra en outre, en application du même article, l'intégralité du capital de la société SNCF Réseau et de la société SNCF Mobilités.

Ces trois sociétés seront soumises aux dispositions législatives applicables aux sociétés anonymes.

Le graphique ci-après représente la transformation de l'architecture du groupe à compter du 1 er janvier 2020 telle que prévue par l'ordonnance de juin 2019.

Source : Arafer, 2019

L'évolution des instances de gouvernance de la SNCF est une conséquence de cette transformation. Pour l'heure, la SNCF est dotée d'un conseil de surveillance et d'un directoire dont le président et le président délégué sont respectivement le président du conseil d'administration de SNCF Mobilités et le président du conseil d'administration de SNCF Réseau.

Les rôles respectifs du conseil de surveillance et du directoire dans la gouvernance actuelle

Aux termes de l'article L. 2102-10 du code des transports, « le conseil de surveillance de la SNCF arrête les grandes orientations stratégiques, économiques, sociales et techniques du groupe public ferroviaire et s'assure de la mise en oeuvre des missions de la SNCF par le directoire. Il exerce le contrôle permanent de la gestion de la SNCF. »

Le directoire assure quant à lui « la direction de la SNCF et est responsable de sa gestion. Il est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom de la SNCF. Il les exerce dans la limite de l'objet de la SNCF » . En outre, il conclut le contrat-cadre entre la SNCF et l'État, après approbation par le conseil de surveillance 4 ( * ) .

L'ordonnance de juin 2019 prévoit que la société nationale SNCF et SNCF Réseau seront chacune dotée d'un conseil d'administration . D'après les informations recueillies par le rapporteur, le choix sera laissé au conseil d'administration de confier la direction générale soit au président du conseil d'administration, soit à une autre personne physique. Le conseil d'administration pourrait en outre modifier ce choix à tout moment . Il existe donc une incertitude quant à la gouvernance précise de ces sociétés anonymes au 1 er janvier 2020.

B. ... NE SAURAIT JUSTIFIER LA RÉDUCTION DU CONTRÔLE PARLEMENTAIRE SUR LES NOMINATIONS DES DIRIGEANTS DU GROUPE SNCF

La refonte globale de l'architecture du groupe entraîne de facto des changements en matière de gouvernance du groupe. Néanmoins, les projets de loi organique et ordinaire, loin de procéder à de simples coordinations, conduisent à soustraire au contrôle du Parlement des fonctions importantes sur lesquelles il exerçait jusqu'à présent et depuis 2010 un droit de regard .

1. Le contrôle du Parlement sur les nominations des dirigeants de la SNCF a été introduit dès 2010 et réaffirmé en 2014

La révision constitutionnelle de 2008 5 ( * ) a entendu renforcer le contrôle du Parlement sur les nominations du Président de la République. Le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution introduit par cette révision constitutionnelle, prévoit ainsi qu'une loi organique détermine les emplois ou fonctions pour lesquels, « en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation , le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée ».

Ainsi, une telle nomination par le Président de la République ne peut avoir lieu si au moins 3/5 e des suffrages exprimés au sein des deux commissions compétentes s'y opposent.

54 fonctions sont actuellement soumises à cette procédure .

En 2010, le législateur organique a décidé de soumettre à cette procédure la fonction de président du conseil d'administration de Réseau ferré de France (RFF) - alors en partie responsable de la gestion de l'infrastructure 6 ( * ) - ainsi que celle de président du conseil d'administration de la SNCF.

En 2014, à l'occasion de l'examen du projet de loi portant réforme ferroviaire, les députés avaient déposé une proposition de loi organique relative à la nomination des dirigeants de la SNCF 7 ( * ) qui visait à réaffirmer le contrôle parlementaire .

Comme le précisait son exposé des motifs : « Il est impératif que les processus de nomination des dirigeants du futur groupe public ferroviaire continuent de se dérouler sous le regard des parlementaires. Nul ne comprendrait ni n'admettrait que la réforme soit l'occasion de soustraire ces personnalités à un contrôle qui constitue une avancée unanimement reconnue de la démocratie ».

Ce constat est toujours d'actualité , et d'autant plus dans la perspective d'ouverture à la concurrence .

Depuis 2014, trois fonctions sont ainsi soumises à la procédure prévue par le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, à savoir :

• la présidence du conseil de surveillance 8 ( * ) ;

• la présidence du directoire (qui emporte nomination en qualité de président du conseil d'administration de SNCF Mobilités 9 ( * ) ) ;

• la présidence déléguée du directoire (qui emporte nomination en qualité de président du conseil d'administration de SNCF Réseau 10 ( * ) ).

En application de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010, la commission permanente pour ces trois auditions est la commission compétente en matière de transports.

Ainsi, les commissions de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat et de l'Assemblée nationale ont entendu M. Jean-Pierre Farandou mercredi 2 octobre 2019 en tant que candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président du directoire de la SNCF 11 ( * ) .

2. Les présents projets de loi privent le Parlement de ce droit de regard

Le projet de loi organique entend tirer les conséquences de la transformation du groupe prévue au 1 er janvier 2020 par la loi pour un nouveau pacte ferroviaire et précisée par l'ordonnance de juin 2019 relative à la gouvernance du groupe.

Il prévoit, s'agissant de la SNCF, de remplacer les trois auditions des dirigeants de la SNCF par une unique audition du directeur général de la société SNCF .

Si la récente réforme emporte nécessairement des modifications en matière de gouvernance, aucune raison valable ne justifie de restreindre ainsi le contrôle du Parlement sur les nominations des dirigeants du groupe SNCF , et en particulier sur les nominations des dirigeants du gestionnaire d'infrastructure.

II. LA POSITION DE LA COMMISSION : MAINTENIR UN DROIT DE REGARD DES COMMISSIONS PARLEMENTAIRES COMPÉTENTES SUR LES POSTES CLÉS DU FUTUR GROUPE PUBLIC UNIFIÉ

La commission a souhaité conforter le contrôle du Parlement sur la nomination des dirigeants de la société nationale SNCF d'une part et ceux de la société SNCF Réseau d'autre part.

A. LES NOMINATIONS DES DIRIGEANTS DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE SNCF

Aux termes de l'article L. 2102-1 tel que résultant de l'ordonnance n° 2019-552 du 3 juin 2019, la société nationale SNCF aura pour objet d'animer et de piloter le groupe public unifié qu'elle contrôlera et notamment d'en assurer le pilotage stratégique et financier et d'en définir l'organisation .

En outre, dans le respect des exigences d'indépendance afférentes aux gestionnaires d'infrastructure, elle sera chargée de définir et conduire notamment les politiques industrielles et d'innovation, de ressources humaines, de valorisation et de gestion des actifs du groupe public unifié.

Elle assurera également des fonctions mutualisées , au bénéfice de l'ensemble du groupe public unifié et des missions transversales nécessaires au bon fonctionnement du système de transport ferroviaire national.

L'ordonnance prévoit que la société nationale SNCF sera dotée d'un conseil d'administration qui « approuve[ra] les orientations stratégiques, économiques, financières, de ressources humaines, industrielles et de valorisation et de gestion des actifs du groupe public unifié. Il exerce[ra] le contrôle permanent de la gestion de la société nationale SNCF ».

Le projet de loi organique prévoit de soumettre à la procédure prévue à l'article 13 de la Constitution le directeur général de la société nationale SNCF. Ce dernier jouera en effet un rôle central dans la gouvernance du groupe public unifié. Le directeur général d'une société anonyme est en effet, d'après le code de commerce, « investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société [...]. Il représente la société dans ses rapports avec les tiers » 12 ( * ) .

Néanmoins, dans la mesure où le conseil d'administration pourra dissocier les fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général 13 ( * ) , il semble nécessaire de prévoir, le cas échéant, d'encadrer les modalités de désignation du président du conseil d'administration de la société nationale SNCF.

D'après les dispositions du code du commerce applicables aux sociétés anonymes, « le président du conseil d'administration organise et dirige les travaux de celui-ci, dont il rend compte à l'assemblée générale. Il veille au bon fonctionnement des organes de la société et s'assure, en particulier, que les administrateurs sont en mesure de remplir leur mission » 14 ( * ) . En outre, d'après les informations recueillies par le rapporteur, il aurait voix prépondérante en cas de partage des voix.

Il apparaît que le président du conseil d'administration aura au moins autant - si ce n'est plus - de prérogatives que l'actuel président du conseil de surveillance, qui est soumis à la procédure prévue à l'article 13 de la Constitution . Aux termes de l'article 17 du décret de 2015 relatif aux missions et aux statuts de la SNCF 15 ( * ) , ce dernier est chargé de convoquer le conseil de surveillance et de fixer l'ordre du jour, après consultation du directoire.

L'ordonnance de juin 2019 prévoit que le président du conseil d'administration de la société nationale SNCF serait désigné parmi les membres proposés par l'État 16 ( * ) . L'amendement au projet de loi organique DEVDUR.1 adopté par la commission vise à soumettre la nomination du président du conseil d'administration de la société nationale SNCF à la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 .

L'amendement au projet de loi ordinaire DEVDUR.1 précise que la commission compétente pour cette audition est la commission compétente en matière de transports. L'amendement DEVDUR.2 procède à des coordinations dans l'ordonnance et prévoit que la nomination du Président de la République du président d'administration de la « maison mère » sera faite sur proposition du conseil d'administration, parmi les membres nommés par l'État.

La commission précise toutefois que ces modifications ponctuelles du code des transports tel que résultant de l'ordonnance de juin 2019 ne saurait valoir ratification implicite de l'ensemble de ses dispositions, le Sénat entendant procéder à leur examen exhaustif sur la base du projet de loi de ratification déposé par le Gouvernement .

B. LES NOMINATIONS DES DIRIGEANTS DE LA SOCIÉTÉ SNCF RÉSEAU

Aux termes de l'article L. 2111-16 du code des transports tel que résultant de l'ordonnance n° 2019-552 du 3 juin 2019, la société SNCF Réseau sera notamment chargée d'assurer :

- l'accès à l'infrastructure ferroviaire (répartition des capacités et tarification) ;

- la gestion opérationnelle des circulations sur le réseau ;

- la maintenance (entretien et renouvellement de l'infrastructure) ;

- le développement, l'aménagement, la cohérence et la mise en valeur du réseau ferré national ;

- la gestion unifiée des gares de voyageurs, à travers une filiale.

D'une part, SNCF Réseau, en tant que gestionnaire d'infrastructure , joue un rôle central dans l'accès à l'infrastructure ferroviaire, rendu plus important encore dans le contexte de l'ouverture à la concurrence du transport national de voyageurs.

D'autre part, les décisions du gestionnaire d'infrastructure ont des conséquences importantes en matière d' aménagement du territoire.

Enfin, si SNCF Réseau constituera bien, au 1 er janvier 2020, une filiale de la société nationale SNCF, il n'en demeure pas moins que le gestionnaire d'infrastructure doit présenter, conformément au droit européen 17 ( * ) , des garanties d'indépendance vis à vis des entreprises ferroviaires sur ses fonctions essentielles .

Ainsi, la seule audition du directeur général de la société nationale SNCF, dont SNCF Réseau sera une filiale, ne justifie pas la suppression de l'audition du dirigeant de la société SNCF Réseau.

Au contraire, le fait même d'avoir choisi de maintenir une structure verticalement intégrée justifie d'encadrer à plus forte raison la nomination des dirigeants de SNCF Réseau , et en particulier de son directeur général.

Le directeur général d'une société anonyme est, d'après le code de commerce, « investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société [...]. Il représente la société dans ses rapports avec les tiers » 18 ( * ) .

Le directeur général de la société SNCF Réseau jouera donc un rôle central dans la gouvernance du futur groupe public unifié et, de fait, dans la vie économique de la Nation .

Lors de son audition devant la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable en 2016, Patrick Jeantet, candidat proposé aux fonctions de président délégué du directoire de la SNCF (et donc de président du conseil d'administration de SNCF Réseau), avait souligné l'importance que revêt cette procédure pour la nomination du dirigeant du gestionnaire d'infrastructure : « L'onction parlementaire me donnerait une légitimité certaine dans le management de SNCF Réseau et dans celui de l'établissement public à caractère industriel et commercial (Epic) de tête de la SNCF . C'est important puisque la SNCF est un service public, et que SNCF Réseau gère le patrimoine ferré national. » 19 ( * ) .

À ce titre, le rapporteur considère qu'il est indispensable que le directeur général de SNCF Réseau (ou le président directeur général, si les fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général ne sont pas dissociées) soit nommé par le Président de la République après avis des commissions parlementaires compétentes.

De plus, l'ordonnance de juin 2019 prévoit que « la nomination, le renouvellement et la révocation du directeur général, ou le cas échéant du président-directeur général, de la société SNCF Réseau sont préalablement soumis à l'avis conforme de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières » 20 ( * ) .

Le fait d'encadrer une nomination par un avis conforme du régulateur ne s'oppose pas au fait de la soumettre à la procédure prévue au dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution. Dans une décision du Conseil constitutionnel de 2009 21 ( * ) , il est ainsi précisé que : « le recours à la procédure prévue par le dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution n'interdi[t] pas au législateur de fixer ou d'ajouter, dans le respect de la Constitution, et, notamment, du principe de la séparation des pouvoirs, des règles encadrant le pouvoir de nomination du Président de la République afin de garantir l'indépendance de ces sociétés ».

D'ailleurs, la nomination du président du conseil d'administration de l'Epic SNCF Réseau, également président délégué du directoire, était jusqu'à présent à la fois soumise à l'avis conforme de l'Arafer 22 ( * ) et à l'avis des commissions parlementaires compétentes.

En outre, comme pour la société nationale SNCF, la commission a ajouté à la liste des fonctions soumises à la procédure prévue à l'article 13 de la Constitution la présidence du conseil d'administration de la société SNCF Réseau.

L'amendement DEVDUR.1 au projet de loi organique prévoit donc d'ajouter la direction générale et la présidence du conseil d'administration de la société SNCF Réseau à la liste des fonctions soumises à la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution .

L'amendement au projet de loi ordinaire DEVDUR.1 précise que la commission compétente pour ces auditions est celle compétente en matière de transports. L'amendement DEVDUR.2 procède aux coordinations nécessaires dans l'ordonnance de juin 2019. Il prévoit que le président du conseil d'administration sera nommé par décret du Président de la République sur proposition du conseil d'administration, parmi les membres nommés sur proposition de l'État. Le directeur général, s'il ne s'agit pas du président du conseil d'administration, sera quant à lui nommé par décret du Président de la République, sur proposition du conseil d'administration.

La commission a donc adopté un amendement au projet de loi organique ( DEVDUR.1 ) ajoutant les fonctions de président du conseil d'administration de la société nationale SNCF et de la société SNCF Réseau à la liste des emplois soumis à la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

Quatre fonctions seraient ainsi soumises à cette procédure :

- la présidence du conseil d'administration de la société nationale SNCF ;

- la direction générale de la société SNCF ;

- la présidence du conseil d'administration de la société SNCF Réseau ;

- la direction générale de la société SNCF Réseau.

Toutefois, si le conseil d'administration de chacune de ces deux sociétés fait le choix d'une gouvernance par un président-directeur général cumulant les fonctions de président et de directeur général, seules deux auditions seraient organisées.

Deux autres amendements ( DEVDUR.1 et DEVDUR.2 ) visent à tirer les conséquences de la modification du projet de loi organique dans la loi ordinaire. Le premier vise à préciser que la commission compétente pour ces auditions est la commission compétente en matière de transports. Le second procède aux coordinations nécessaires dans l'ordonnance de juin 2019

III. DES INQUIÉTUDES IMPORTANTES QUANT À L'INDÉPENDANCE DE SNCF RÉSEAU DANS LE CONTEXTE D'OUVERTURE À LA CONCURRENCE

Le renforcement du contrôle du Parlement sur les nominations des dirigeants de la SNCF, et notamment de la société SNCF Réseau, est d'autant plus souhaitable que l'indépendance du gestionnaire d'infrastructure dans la nouvelle gouvernance fait l'objet de vives inquiétudes .

La réforme de 2018 23 ( * ) a fait le choix de maintenir une structure verticalement intégrée , sur le modèle notamment de la Deutsche Bahn . Si le droit européen 24 ( * ) autorise ce choix, le gestionnaire d'infrastructure doit néanmoins présenter des garanties d'indépendance au regard des entreprises ferroviaires.

Or, comme l'avait souligné le rapporteur M. Gérard Cornu à l'occasion de l'examen du projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, « dans le cadre d'une structure verticalement intégrée, au sein de laquelle cohabitent la gestion de l'infrastructure et l'accès aux facilités essentielles avec l'exploitation de services de transports, l'indépendance du gestionnaire de réseau est sujette à caution » 25 ( * ) .

Pourtant, l'autorité de régulation des transports (ART, ex-Arafer), s'était vivement inquiétée dans son avis du 9 mai 2019 26 ( * ) sur le projet d'ordonnance relative à la future gouvernance du groupe, du manque d'indépendance de SNCF Réseau . Pour l'ART, plusieurs dispositions de l'ordonnance de juin 2019 sont en effet susceptibles de porter atteinte à l'indépendance du gestionnaire d'infrastructure, notamment :

• la composition du conseil d'administration de la société SNCF Réseau , qui comprendrait un tiers de membres nommés sur proposition de l'actionnaire unique, la société nationale SNCF, holding du groupe public unifié qui est intéressée au résultat de l'entreprise ferroviaire SNCF Voyageurs ;

• la capacité de blocage de ces membres sur certaines décisions stratégiques ;

• l'absence d'avis conforme de l'Autorité sur la nomination du président du conseil d'administration de SNCF Réseau . L'ordonnance ne prévoit de réserver cette procédure qu'au seul directeur général (ou le cas échéant au président-directeur général).

Dans son avis de mai 2019 sur le projet d'ordonnance 27 ( * ) , l'Arafer avait en effet considéré que l'absence d'avis conforme de l'Autorité sur la nomination du président du conseil d'administration de SNCF Réseau était « non justifiée ».

L'article 5 de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire habilite le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relatives à la transformation du groupe public ferroviaire en un groupe public unifié pour fixer les conditions de fonctionnement du groupe, en prévoyant notamment « les garanties propres à assurer l'indépendance de SNCF Réseau [...] en veillant à l' introduction d'un avis conforme de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières sur la nomination, le renouvellement et la révocation de son dirigeant, afin de garantir son indépendance à l'égard des entreprises exerçant, directement ou par l'intermédiaire d'une filiale, une activité d'entreprise ferroviaire ». Cette précision avait été introduite par un amendement du rapporteur M. Gérard Cornu à l'occasion de l'examen du projet de loi en première lecture au Sénat.

Or, d'après l'Arafer, le terme de « dirigeant » recouvre non seulement la fonction de directeur général, ou, le cas échéant, de président-directeur général, mais également celle de président du conseil d'administration puisque, aux termes de l'article L. 2111-16-1 28 ( * ) du code des transports, sont considérés comme dirigeants de SNCF Réseau le président du conseil d'administration et les responsables de la direction générale .

Aussi, afin de renforcer l'indépendance du gestionnaire d'infrastructure, l'amendement au projet de loi ordinaire DEVDUR.2 prévoit de soumettre la nomination, le renouvellement et la révocation du président du conseil d'administration à l'avis conforme du régulateur.

L'ouverture à la concurrence du transport de voyageurs suppose d' adresser un signal fort aux nouveaux entrants et de leur assurer l'impartialité de SNCF Réseau .

Les nouveaux entrants, réunis au sein de l'association française du rail (Afra) avaient déjà évoqué leurs inquiétudes concernant l'autonomie décisionnelle et organisationnelle du gestionnaire d'infrastructure à l'occasion d'une table ronde organisée par la commission en juillet dernier 29 ( * ) . Auditionnés par le rapporteur, ils ont rappelé leurs craintes et indiqué qu'« une muraille de Chine » doit séparer SNCF Réseau de SNCF Mobilités.

Malgré ces inquiétudes, et alors même que la nouvelle gouvernance du groupe public unifié doit entrer en vigueur au 1 er janvier 2020, l'ordonnance n'a pas été ratifiée par le Parlement et aucun calendrier de ratification n'a été communiqué au rapporteur. La commission regrette l'insuffisante association du Parlement sur ces sujets pourtant essentiels

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 10 décembre 2019, la commission a examiné le rapport pour avis sur le projet de loi modifiant la loi du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution et prorogeant le mandat des membres de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet et sur le projet de loi organique du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

M. Patrick Chaize , président . - Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence du président Maurey, en déplacement pour la COP 25.

Nous sommes réunis ce matin pour examiner le rapport pour avis de la commission, d'une part, sur le projet de loi modifiant la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution et prorogeant le mandat des membres de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet et, d'autre part, sur le projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

La commission s'est saisie pour avis de ces textes, car ils tirent les conséquences, pour ce qui concerne l'application de l'article 13 de la Constitution relatif aux nominations par le Président de la République, de la transformation de l'architecture de la SNCF telle que résultant de l'ordonnance de juin 2019. Ces derniers présentent donc des enjeux très importants dans le contexte de l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs, alors même que cette ordonnance va entrer en vigueur au 1 er janvier 2020, sans avoir été ratifiée par le législateur. Ils seront examinés par la commission des lois demain matin et en séance publique mardi prochain à 14 heures 30.

M. Didier Mandelli , rapporteur pour avis . - Il y a près d'un an et demi, nous examinions le projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire. Nous avions, à l'époque, fortement critiqué le recours excessif aux ordonnances prévu par ce texte. Même si le Sénat l'avait enrichi et complété, plusieurs sujets d'importance ont été renvoyés à des ordonnances, parmi lesquels figurait, notamment, la transformation du groupe public ferroviaire SNCF composé d'établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) en un groupe public unifié composé de sociétés anonymes.

Le rapporteur du texte, Gérard Cornu, avait alors précisé que l'examen des mesures de ratification des ordonnances devrait s'accompagner d'un débat de fond sur les choix retenus. La gouvernance du futur groupe public unifié constitue en effet un sujet de grande vigilance dans la mesure où le choix de maintenir une structure verticalement intégrée impose, notamment, la mise en place d'importantes garanties d'indépendance vis-à-vis du gestionnaire d'infrastructure, SNCF Réseau.

Néanmoins, l'ordonnance relative à la gouvernance du groupe public unifié, publiée en juin 2019, a été rédigée et publiée sans que le législateur soit associé aux choix retenus. De surcroît, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), devenue l'Autorité de régulation des transports (ART), avait émis de sérieuses réserves au sujet de cette ordonnance. Selon elle, les dispositions prévues ne permettaient pas de garantir une indépendance suffisante du gestionnaire d'infrastructure.

En outre, si le projet de loi de ratification de cette ordonnance a été déposé en août 2019 sur le bureau de l'Assemblée nationale, aucun calendrier de ratification ne m'a été communiqué, alors que la nouvelle gouvernance du groupe public unifié doit entrer en vigueur au 1 er janvier 2020.

Les projets de loi organique et ordinaire que nous examinons aujourd'hui, et dont notre commission s'est saisie pour avis, prévoient de tirer les conséquences de cette ordonnance, alors même que celle-ci fait l'objet de sérieuses inquiétudes et que le Parlement n'a pas eu l'occasion de se prononcer sur son contenu ni d'en débattre en amont.

Le projet de loi organique porte, pour ce qui concerne la SNCF, sur l'actualisation des fonctions pour lesquelles, en raison de leur importance pour la vie économique et sociale de la Nation, la nomination par le Président de la République ne peut avoir lieu qu'après l'avis des commissions permanentes compétentes, en application de l'article 13 de la Constitution.

En 2010, le législateur organique avait décidé de soumettre à cette procédure les fonctions de président du conseil d'administration de la SNCF et de président du conseil d'administration de Réseau ferré de France. En 2014, lors de l'examen du projet de loi de réforme ferroviaire, les députés avaient déposé une proposition de loi organique relative à la nomination des dirigeants de la SNCF qui confortait le contrôle parlementaire sur ces nominations.

D'après l'exposé des motifs de cette proposition de loi, « il est impératif que les processus de nomination des dirigeants du futur groupe public ferroviaire continuent de se dérouler sous le regard des parlementaires. Nul ne comprendrait ni n'admettrait que la réforme soit l'occasion de soustraire ces personnalités à un contrôle qui constitue une avancée unanimement reconnue de la démocratie ».

Il me semble que ce constat est toujours d'actualité, et plus encore dans la perspective d'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire national de voyageurs.

Ainsi, depuis 2014, trois auditions sont prévues pour la SNCF, à savoir celle du président du conseil de surveillance ; celle du président du directoire, qui est également le président du conseil d'administration de SNCF Mobilités ; et, enfin, celle du président délégué du directoire, qui est également le président du conseil d'administration de SNCF Réseau.

Pourtant, le projet de loi organique que nous examinons aujourd'hui prévoit de substituer à ces trois auditions une unique audition, celle du directeur général de la société nationale SNCF, c'est-à-dire la « maison mère ».

Or, si la loi pour un nouveau pacte ferroviaire et les dispositions prévues par ordonnance emportent, de fait, des évolutions en matière de gouvernance du groupe, une telle modification traduit un affaiblissement injustifié du contrôle parlementaire.

D'une part, la nomination du dirigeant du gestionnaire d'infrastructure par le Président de la République sur avis des commissions compétentes existe depuis 2010 et a été réaffirmée en 2014. Aussi, dans la mesure où le choix a été fait de maintenir une structure verticale intégrée, il est fondamental d'encadrer la nomination des dirigeants de SNCF Réseau, de surcroît dans la perspective de l'ouverture à la concurrence. Le gestionnaire d'infrastructure joue en effet un rôle central en matière d'accès à l'infrastructure ferroviaire, mais aussi de choix d'investissements. Ses décisions emportent, en outre, d'importantes conséquences en termes d'aménagement du territoire. Il me semble donc nécessaire de maintenir le droit de regard du Parlement sur les nominations du dirigeant de la société SNCF Réseau.

D'autre part, il semble que les conseils d'administration de la société mère, mais aussi de la société SNCF Réseau pourront choisir de confier la direction générale soit au président du conseil d'administration, soit à une autre personne physique. Aussi, dans les cas où les fonctions de directeur général et de président du conseil d'administration seraient dissociées, les textes ne prévoient pas de soumettre le président du conseil d'administration à la procédure prévue par l'article 13 de la Constitution.

Or le président du conseil d'administration sera vraisemblablement amené à jouer un rôle important dans la gouvernance de la société anonyme. Il serait chargé d'organiser et de diriger les travaux de celui-ci ; il rendrait compte des travaux du conseil d'administration à l'assemblée générale et il aurait, enfin, voix prépondérante en cas de partage des voix - c'est dire son importance. À ce titre, il me semble nécessaire de soumettre les présidents du conseil d'administration de la société nationale SNCF, mais aussi de SNCF Réseau à ladite procédure.

C'est pourquoi je vous propose un amendement au projet de loi organique visant à ajouter les fonctions de directeur général de SNCF Réseau, d'une part, et de président du conseil d'administration de la société nationale SNCF et de SNCF Réseau, d'autre part, à la liste des fonctions soumises à la procédure prévue par l'article 13 de la Constitution. Dans le cas où la direction générale et la présidence du conseil d'administration de chacune de ces sociétés anonymes seraient assurées par la même personne, seules deux auditions seraient organisées.

Deux autres amendements sont de nature à apporter des coordinations au niveau de la loi ordinaire : le premier précise que ces auditions seront effectuées par la commission compétente en matière de transport, tandis que le second procède à des coordinations dans l'ordonnance de juin 2019 sur la gouvernance du groupe public unifié.

Le contrôle parlementaire sur la nomination des dirigeants de la SNCF est d'autant plus nécessaire que l'indépendance de SNCF Réseau fait l'objet de vives inquiétudes, exprimées tant par l'Arafer que par les nouveaux entrants.

Le rapporteur Gérard Cornu avait souligné, en juin 2018, que, dans une structure verticalement intégrée, « l'indépendance du gestionnaire de réseau est sujette à caution ». L'Arafer avait émis plusieurs réserves quant à l'indépendance du gestionnaire d'infrastructure à l'occasion de la table ronde organisée par notre commission en juillet dernier. Les nouveaux entrants, que j'ai eu l'occasion d'auditionner, partagent également ces craintes.

L'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire suppose d'envoyer un signal fort aux nouveaux entrants, et non de les dissuader d'entrer sur le marché. Les choix en matière de gouvernance et les modalités de nomination des dirigeants de SNCF contribuent, au moins en partie, à refléter le degré d'indépendance du gestionnaire d'infrastructure vis-à-vis de la maison mère et de la filiale Voyageurs du groupe. C'est pourquoi je vous propose un amendement prévoyant un avis conforme de l'ART sur la nomination, le renouvellement ou la révocation du président du conseil d'administration de la société SNCF Réseau. L'ordonnance ne prévoit cette procédure que pour le directeur général ou, le cas échéant, le président-directeur général.

Ces amendements, si nous les adoptons, seront présentés demain matin devant la commission des lois. Ils permettent un renforcement du contrôle parlementaire et du contrôle opéré par le régulateur sur les nominations des dirigeants du groupe public unifié, ce qui me paraît indispensable pour réussir l'ouverture à la concurrence.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Je souligne, à titre personnel, l'importance de ces amendements. En effet, SNCF Réseau est un bien public ; il est donc tout à fait normal que le Parlement donne son avis sur la nomination du dirigeant de cette société. Un avis conforme de l'ART me semble aussi une mesure cohérente.

M. Jérôme Bignon . - Je remercie Didier Mandelli de ses explications claires sur un sujet très technique. Il ne faut pas que le Parlement soit écarté des décisions essentielles, des décisions quasiment stratégiques pour l'avenir de l'organisation des transports en France et probablement en Europe. Aussi, je souscris aux amendements proposés.

M. Didier Mandelli , rapporteur pour avis . - Insistons sur le double contrôle, celui du Parlement et celui de l'autorité indépendante.

EXAMEN DES ARTICLES

PROJET DE LOI ORGANIQUE

Article unique

M. Didier Mandelli , rapporteur pour avis . - L'amendement DEVDUR.1 vise à inscrire les fonctions de président du conseil d'administration de la société nationale SNCF et de président du conseil d'administration et de directeur général de la société SNCF Réseau parmi les fonctions soumises à la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

L'amendement DEVDUR.1 est adopté.

PROJET DE LOI ORDINAIRE

Article 1 er

M. Didier Mandelli , rapporteur pour avis . - L'amendement DEVDUR.1 est un amendement de coordination : la commission compétente pour les auditions relatives à la nomination des dirigeants de la SNCF est celle qui est compétente en matière de transports.

L'amendement DEVDUR.1 est adopté.

Article additionnel après l'article 2

M. Didier Mandelli , rapporteur pour avis . - L'amendement DEVDUR.2 procède à des coordinations dans l'ordonnance relative à la gouvernance du groupe public unifié et prévoit que les présidents des conseils d'administration ainsi que les directeurs généraux de la société nationale SNCF et de la société SNCF Réseau sont nommés par décret du Président de la République. Par ailleurs, il introduit un avis conforme de l'ART sur la nomination, le renouvellement et la révocation du président du conseil d'administration de la société SNCF Réseau, afin de renforcer l'indépendance du gestionnaire d'infrastructure.

L'amendement DEVDUR.2 est adopté.

LES AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

PROJET DE LOI ORGANIQUE

Amendement DEVDUR-1

ARTICLE UNIQUE

Alinéas 7 et 8

Rédiger ainsi ces alinéas :

4° L'avant-dernière ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

«

Société nationale SNCF

Présidence du conseil d'administration

Direction générale

Société SNCF Réseau

Présidence du conseil d'administration

Direction générale

»

OBJET

Cet amendement vise à conforter le contrôle parlementaire sur la nomination des dirigeants de la SNCF.

D'une part, il prévoit de soumettre à la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 le dirigeant de la société SNCF Réseau. L'encadrement de la nomination du dirigeant du gestionnaire d'infrastructure est prévu depuis 2010 et a été réaffirmé en 2014. Eu égard au rôle central joué par SNCF Réseau en matière d'accès à l'infrastructure et d'aménagement du territoire, il est indispensable de maintenir le droit de regard du Parlement sur la nomination de son dirigeant. Cette modification est d'autant plus nécessaire dans la mesure où le régulateur, ainsi que les nouveaux entrants ont exprimé de vives inquiétudes concernant l'indépendance du gestionnaire d'infrastructure, qui conditionne l'effectivité de l'ouverture à la concurrence.

D'autre part, dans la mesure où le choix sera laissé au conseil d'administration de dissocier les fonctions de direction générale et de présidence du conseil d'administration, et en raison de l'importance du rôle de président de conseil d'administration, cet amendement vise à soumettre les futurs présidents des conseils d'administration de la société nationale SNCF et de la société SNCF Réseau à la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

PROJET DE LOI ORDINAIRE

Amendement DEVDUR-1

ARTICLE 1 ER

I. - Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

3° La première colonne de la cinquante-deuxième ligne est ainsi rédigée : « Présidence du conseil d'administration de la société nationale SNCF » ;

II. - Après l'alinéa 4

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

...° La première colonne de la cinquante-troisième ligne est ainsi rédigée : « Direction générale de la société nationale SNCF » ;

...° La première colonne de l'avant-dernière ligne est ainsi rédigée : « Présidence du conseil d'administration de la société SNCF Réseau » ;

...° Après l'avant-dernière ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :

«

Direction générale de la société SNCF Réseau

Commission compétente en matière de transports

» ;

III. - Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

OBJET

Cet amendement procède à des coordinations dans la loi ordinaire relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

Il prévoit que la commission compétente pour les auditions des présidents des conseils d'administration et des directeurs généraux de la société nationale SNCF et de la société SNCF Réseau est la commission compétente en matière de transports.

Amendement DEVDUR-2

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 2

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le livre I er de la deuxième partie du code des transports, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2019-552 du 3 juin 2019 portant diverses dispositions relatives au groupe SNCF, est ainsi modifié :

1° L'article L. 2102-8 est complété par une phrase  ainsi rédigée : « Il est nommé par décret du Président de la République, sur proposition du conseil d'administration. » ;

2° Après l'article L. 2102-9, il est inséré un article L. 2102-9-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2102-9-1. - Lorsque la direction générale n'est pas assurée par le président du conseil d'administration, le directeur général de la société nationale SNCF est nommé par décret du Président de la République, sur proposition du conseil d'administration. » ;

3° L'article L. 2111-16 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

- Les mots : « par le conseil d'administration » sont supprimés ;

- Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Il est nommé par décret du Président de la République, sur proposition du conseil d'administration. » ;

b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la direction générale n'est pas assurée par le président du conseil d'administration, le directeur général de la société SNCF Réseau est nommé par décret du Président de la République, sur proposition du conseil d'administration de la société SNCF Réseau. » ;

c) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

- À la première phrase, après le mot : « révocation » sont insérés les mots : « du président du conseil d'administration, » ;

- À la deuxième phrase, après le mot : « poste » sont insérés les mots : « de président du conseil d'administration, » ;

- À la dernière phrase, après le mot : « révocation » sont insérés les mots : « du président du conseil d'administration, »;

4° À l'article L. 2133-9, les mots : « de SNCF Réseau » sont remplacés par les mots : « et du directeur général, ou le cas échéant du président-directeur général, de la société SNCF Réseau ».

OBJET

Cet amendement vise à procéder à des coordinations dans l'ordonnance relative à la gouvernance qui doit entrer en vigueur au 1er janvier 2020.

Il prévoit que les présidents des conseils d'administration, les directeurs généraux ou, le cas échéant, les présidents-directeurs généraux de la société nationale SNCF et de la société SNCF Réseau sont nommés par décret du Président de la République.

Enfin, il vise à introduire un avis conforme de l'Arafer sur la nomination du président du conseil d'administration de SNCF Réseau, que l'ordonnance restreignait au seul directeur général ou, le cas échéant, au président directeur général.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mardi 3 décembre 2019

- Association Française du Rail : M. Claude STEINMETZ , président, M. Franck TUFFEREAU , délégué général, Mme Solène GARCIN-BERSON , responsable juridique.

LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

- SNCF ;

- Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) ;

- Autorité de régulation des transports.


* 1 Loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire.

* 2 Ordonnance n° 2019-552 du 3 juin 2019 portant diverses dispositions relatives au groupe SNCF.

* 3 Loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire.

* 4 Article L. 2102-11 du code des transports.

* 5 Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la V e République.

* 6 Loi n° 97-135 du 13 février 1997 portant création de l'établissement public « Réseau ferré de France » en vue du renouveau du transport ferroviaire.

* 7 Loi organique n° 2014-871 du 4 août 2014 relative à la nomination des dirigeants de la SNCF.

* 8 Article L. 2102-8 du code des transports : le président du conseil de surveillance de la SNCF est nommé par décret, sur proposition du conseil de surveillance.

* 9 Article L. 2102-9 du code des transports.

* 10 Idem.

* 11 Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, 2 octobre 2019, audition de M. Jean-Pierre Farandou, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président du directoire de la SNCF.

* 12 Article L. 225-56 du code de commerce.

* 13 Cette possibilité est prévue par l'article 18 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique.

* 14 Article L. 225-51 du code de commerce.

* 15 Décret n° 2015-137 du 10 février 2015 relatif aux missions et aux statuts de la SNCF et à la mission de contrôle économique et financier des transports.

* 16 Nommés en application des dispositions de l'article 6 de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique.

* 17 Directive 2012/34/UE du Parlement européen et du conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen.

* 18 Article L. 225-56 du code de commerce.

* 19 Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, 24 mai 2016, audition de M. Patrick Jeantet, candidat proposé aux fonctions de Président délégué du directoire de la SNCF.

* 20 Article 4 de l'ordonnance n° 2019-552 du 3 juin 2019 portant diverses dispositions relatives au groupe SNCF.

* 21 Conseil constitutionnel, décision n° 2009-577 DC du 3 mars 2009 (Loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision).

* 22 Article L. 2111-16 du code des transports.

* 23 Loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire.

* 24 Directive 2012/34/UE du Parlement européen et du conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen.

* 25 Rapport n° 494 (2017-2018) de M. Gérard CORNU, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 23 mai 2018.

* 26 Avis n° 2019-028 du 9 mai 2019 relatif au projet d'ordonnance portant diverses dispositions relatives à la nouvelle SNCF.

* 27 Avis n° 2019-028 du 9 mai 2019 relatif au projet d'ordonnance portant diverses dispositions relatives à la nouvelle SNCF.

* 28 Dans sa rédaction telle que résultant de l'ordonnance n° 2019-552 du 3 juin 2019 portant diverses dispositions relatives au groupe SNCF.

* 29 Rapport d'information n° 87 (2019-2020) de MM. Hervé MAUREY et Didier MANDELLI , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 23 octobre 2019.

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