B. DES INTERROGATIONS SUR LES ORIENTATIONS RETENUES

La création de nouveaux postes d'éducateurs pour renforcer le milieu ouvert est unanimement saluée par les acteurs du secteur et les syndicats. Ces derniers remettent cependant en cause les orientations générales de la PJJ qui, malgré un renforcement ponctuel du secteur ouvert, recourrait de manière accrue au secteur fermé .

La PJJ a en effet engagé un programme de création de 20 centres éducatifs fermés d'ici 2022. 5 d'entre eux seront gérés par le secteur public et 15 par le secteur associatif. Le projet de budget reflète ce choix car, comme en 2019, il est prévu une aide à l'investissement de 2,25 millions d'euros pour le lancement de 5 nouveaux CEF en 2020.

Les centres éducatifs fermés sont critiqués car regardés par les syndicats de la PJJ comme l'antichambre de l'incarcération en raison des contraintes qu'ils font peser sur les mineurs et de leur caractère jugé excessivement disciplinaire . Saisie par la garde des sceaux, la Commission nationale consultative des droits de l'homme a formulé ces mêmes critiques dans son avis du 27 mars 2018 3 ( * ) .

Du strict point de vue budgétaire, les syndicats ont relevé que la dépense budgétaire annuelle moyenne d'un CEF telle qu'elle est présentée par le programme annuel est de « 1 555 551 euros ». Le budget de fonctionnement annuel des nouveaux CEF devrait donc s'élever à 31,11 millions une fois qu'ils auront tous été ouverts. Ces sommes, qui représentent un peu plus de 4 % du budget actuel de la PJJ, devront soit être ajoutées à son budget, soit être redéployées.

Les syndicats contestent cette mobilisation de crédits sur des centres dont ils remettent en cause l'efficacité, notamment en termes de récidive (ce taux serait de 70 % pour les mineurs placés en CEF ou incarcérés). Ils regrettent que ces sommes ne soient pas investies dans le secteur ouvert, par définition moins coûteux. La répartition du programme entre centres gérés par le secteur public et centres confiés au secteur associatif est par ailleurs dénoncée comme illustrant le désengagement du secteur public en faveur de structures associatives plus faciles à faire évoluer et à supprimer . Le transfert de mesures judiciaires d'investigation et d'enquête vers le secteur associatif est dénoncé comme illustrant cette même tendance.

Votre rapporteure estime que le budget pour 2020 de la PJJ marque un engagement nécessaire de l'Etat dans cette activité essentielle qu'est la protection judiciaire de la jeunesse. La création de 70 nouveaux postes d'éducateurs est une mesure qui peut être saluée par tous.

De nombreux éléments appellent toutefois à la vigilance. Tout d'abord, l'échéance d'octobre 2020 pour la mise en oeuvre de la réforme de l'ordonnance de 1945 paraît ambitieuse et risque dans un premier temps d'être facteur de désorganisation des services . Surtout, l'importance accordée aux centres éducatifs fermés comme structures et au secteur associatif habilité comme opérateur ne doit pas aboutir à détourner la PJJ de sa vocation première, qui est l'éducation et l'insertion des jeunes en danger en s'appuyant sur les compétences des éducateurs spécialisés et en milieu ouvert .


* 3 Avis sur la privation de liberté des mineurs, CNCDH 27 mars 2018.

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