Avis n° 146 (2019-2020) de M. Jean-Yves LECONTE , fait au nom de la commission des lois, déposé le 21 novembre 2019

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N° 146

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2019

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2020 ,

TOME X

DIRECTION DE L'ACTION DU GOUVERNEMENT, PUBLICATIONS OFFICIELLES ET INFORMATION ADMINISTRATIVE

Par M. Jean-Yves LECONTE,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Bas, président ; MM. François?Noël Buffet, Jean?Pierre Sueur, Mme Catherine Di Folco, MM. Jacques Bigot, André Reichardt, Mme Sophie Joissains, M. Arnaud de Belenet, Mme Nathalie Delattre, MM. Pierre?Yves Collombat, Alain Marc, vice?présidents ; M. Christophe?André Frassa, Mme Laurence Harribey, M. Loïc Hervé, Mme Marie Mercier, secrétaires ; Mme Esther Benbassa, MM. François BonhoMme , Philippe Bonnecarrère, Mmes Agnès Canayer, Maryse Carrère, Josiane Costes, MM. Mathieu Darnaud, Marc?Philippe Daubresse, Mme Jacky Deromedi, MM. Yves Détraigne, Jérôme Durain, Mme Jacqueline Eustache?Brinio, MM. Jean?Luc Fichet, Pierre Frogier, Mmes Françoise Gatel, Marie?Pierre de la Gontrie, M. François Grosdidier, Mme Muriel Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean?Yves Leconte, Henri Leroy, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Jean Louis Masson, Thani Mohamed Soilihi, Alain Richard, Vincent Segouin, Simon Sutour, Mmes Lana Tetuanui, Claudine Thomas, Catherine Troendlé, M. Dany Wattebled.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 2272 , 2291 , 2292 , 2298 , 2301 à 2306 , 2365 , 2368 et T.A. 348

Sénat : 139 et 140 à 146 (2019-2020)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le mercredi 13 novembre 2019, sous la présidence de Philippe Bas , président , la commission des lois a examiné, sur le rapport pour avis de Jean-Yves Leconte 1 ( * ) , les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative » du projet de loi de finances pour 2020 .

Jean-Yves Leconte a souligné que les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » , tels qu'ils figurent dans le projet de loi de finances pour 2020 , étaient maîtrisés , tout en finançant des priorités telles que la sécurité, le numérique ainsi que le renforcement des moyens de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, et dans une moindre mesure les crédits du Défenseur des droits et de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Dans le projet de loi de finances initial, ces crédits sont en hausse de 4,36 % en autorisations d'engagement et de 0,46 % en crédits de paiement par rapport à ceux votés pour 2019. Les crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative » sont quant à eux en baisse significative du fait de la réduction de personnels engagée depuis plusieurs années.

Concernant le programme 129, votre rapporteur ne peut que se féliciter des efforts poursuivis en faveur de l' Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) chargée notamment de la protection des systèmes d'information des opérateurs d'importance vitale et des opérateurs essentiels à l'économie et à la société, et du groupement interministériel de contrôle (GIC), chargé de centraliser les demandes d'autorisation de mise en oeuvre des techniques de renseignement.

Toutefois, il ne peut que déplorer certains choix contestables. En effet, le transfert des crédits de la MIVILUDES vers le ministère de l'intérieur, annoncé par le Gouvernement le 1 er octobre 2019, est une mauvaise nouvelle pour la lutte contre les dérives sectaires qui doit absolument conserver son caractère interministériel.

Les importants crédits supplémentaires (1,25 M€ et 14 ETPT) alloués au Service d'information du Gouvernement n'emportent pas non plus la conviction de votre rapporteur.

Plus généralement, votre rapporteur souhaite rappeler la nécessité pour le Gouvernement de présenter au Parlement les crédits de la mission de manière lisible, ce qui ne peut être le cas lorsqu'il a recours à des mises à disposition de personnels exclues du plafond d'emplois, avec ou sans contrepartie financière.

S'agissant du programme 308 qui regroupe les crédits d'autorités administratives indépendantes (AAI), votre rapporteur s'inquiète cette année encore des atteintes à leur indépendance , par l'application d'une réserve de précaution qui ne leur permet pas de disposer, en toute liberté, de l'intégralité de leur budget, par le recours à la régulation budgétaire qui remet en cause les crédits alloués en loi de finances, enfin par le risque juridique et financier encouru en cas d'annulation d'une sanction prononcée par une AAI, l'exposant à des dommages-intérêts.

La commission a adopté un amendement tendant à augmenter de 430 000 € en autorisations d'engagement et en crédits de paiement le titre 2 de l'action n° 10 « Haute Autorité pour la transparence de la vie publique » afin de permettre le financement de 6 ETPT , soit l'équivalent des postes et du budget dont dispose la commission de déontologie de la fonction publique dont elle exercera les missions à compter du 1 er février 2020.

Elle a adopté un amendement tendant à augmenter de 350 000 € en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, dont 150 000 € pour le titre 2 , de l'action n° 9 « Défenseur des droits » afin de financer 2 ETPT supplémentaires et d' accompagner l'institution dans l'expérimentation de la médiation préalable obligatoire, dans la réorganisation de son maillage territorial et enfin dans le recrutement de délégués territoriaux supplémentaires.

Par amendement gouvernemental adopté le 15 novembre 2019 en seconde délibération par l'Assemblée nationale, les autorisations d'engagement et les crédits de paiement ont été diminués de 2 534 334 € pour le programme « Coordination du travail gouvernemental » et de 166 003 € pour le programme « Protection des droits et libertés ».

La commission, attachée au maintien des crédits de la mission, a adopté un amendement rétablissant partiellement les crédits tels que fixés dans le projet de loi de finances pour 2020 afin de préserver en priorité le budget des autorités administratives indépendantes, ainsi que de l'ANSSI et du GIC.

La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative » inscrits au projet de loi de finances pour 2020, sous réserve de l'adoption en séance de ses amendements.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Votre commission s'est saisie pour avis des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative » du projet de loi de finances pour 2020.

Le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » regroupe les crédits destinés à la mise en oeuvre de diverses actions : coordination du travail gouvernemental ; coordination de la sécurité et de la défense ; coordination de la politique européenne ; soutien ; stratégie et prospective ; ordre de la Légion d'honneur ; mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) ; coordination de la politique numérique.

Le programme 308 « Protection des droits et libertés » réunit cette année les budgets de dix autorités indépendantes :

- la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) ;

- le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) ;

- le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) ;

- la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) ;

- le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) ;

- la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) ;

- le Défenseur des droits ;

- la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) ;

- la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) ;

- la Commission du secret de la défense nationale (CSDN).

Les moyens de l'Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP) quittent le programme 308 à destination du programme 134 « Développement des entreprises et régulations », qui relève du ministère de l'économie et des finances. C'est la conséquence de la fusion de l'ARDP au sein de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) consacrée par la loi n° 2019-1063 du 18 octobre 2019 relative à la modernisation de la distribution de la presse.

Enfin, le programme 333 « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées », qui représentait l'an passé 40 % des crédits de paiement de la mission, est supprimé. Ses moyens sont repris dans un nouveau programme 354 « Administration territoriale de l'État » créé au sein de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ». Cette nouvelle architecture présente désormais une réelle cohérence.

I. BUDGET 2020 « DIRECTION DE L'ACTION DU GOUVERNEMENT »

A. ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION « DIRECTION DE L'ACTION DU GOUVERNEMENT »

1. Le projet de loi de finances examiné à l'Assemblée nationale

Les crédits demandés en 2020 pour la mission « Direction de l'action du Gouvernement » sont, hors programme 333 qui quitte la mission, en hausse de 4,36 % en autorisations d'engagement et de 0,64 % en crédits de paiement par rapport à ceux votés pour 2019.

Évolution à périmètre courant et par programme des crédits
de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » (hors programme 333)

(en euros) 2 ( * )

Mission Direction
de l'action
du Gouvernement

AE

LFI 2019

AE

PLF 2020

Évolution

CP

LFI 2019

CP

PLF 2020

Évolution

Coordination du travail gouvernemental

682 510 075

712 923 850

+ 4,46 %

690 280 286

692 565 556

+ 0,33 %

Protection des droits et libertés

97 085 917

100 666 939

+ 3,69 %

98 299 331

101 085 665

+ 2,83 %

Total de la mission

779 595 992

813 590 789

+ 4,36 %

788 579 617

793 651 221

+ 0,64 %

Source : réponses au questionnaire budgétaire

À périmètre constant, les autorisations d'engagement de la mission augmentent de 4,48 % tandis que les crédits de paiement augmentent de 0,76 %.

Évolution à périmètre constant et par programme des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement »

(en millions d'euros)

Programme

LFI 2019

PLF 2020
structure constante

Évolution 2019/2020 structure constante

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Coordination du travail gouvernemental

682,51

690,28

713,46

693,10

+ 4,53 %

+ 0,41 %

Protection des droits et libertés

96,95

98,16

100,89

101,31

+ 4,06 %

+ 3,21 %

Total

779,46

788,44

814,35

794,41

+ 4,48 %

+ 0,76 %

Source : réponses au questionnaire budgétaire

2. Les crédits votés en première lecture par l'Assemblée nationale

Par amendement gouvernemental adopté le 15 novembre 2019 en seconde délibération, les autorisations d'engagement et les crédits de paiement ont été diminués de 2 534 334 € pour le programme « Coordination du travail gouvernemental » et de 166 003 € pour le programme « Protection des droits et libertés ».

Cet amendement a été justifié par le Gouvernement par le besoin « de tenir compte des votes intervenus dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2020 ».

Votre rapporteur ne peut que déplorer cette baisse des dotations, notamment des autorités chargées de la protection des droits et libertés, dont les budgets doivent être « sanctuarisés » eu égard à leurs missions.

B. ÉVOLUTION DES CRÉDITS ET DES PLAFONDS D'EMPLOIS AU SEIN DE CHAQUE PROGRAMME

1. Des crédits du programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » quasi stables en crédits de paiement

Évolution des crédits du programme 129 demandés en 2020
par rapport à la loi de finances pour 2019

(en euros)

Intitulé
de l'action

Autorisations d'engagement en €

Crédits de paiement en €

Ouvertes
en LFI
pour 2019

Demandées
pour 2020

Évolution
en %

Ouverts
en LFI
pour 2019

Demandés
pour 2020

Évolution
en %

01

Coordination du travail gouvernemental

97 930 376

97 455 557

- 0,48 %

97 994 905

97 520 087

- 0,48 %

02

Coordination de la sécurité et de la défense

377 058 590

387 813 589

+ 2,85 %

360 694 411

354 320 905

- 1,77 %

03

Coordination de la politique européenne

14 954 032

15 463 757

+ 3,41 %

14 954 032

15 463 757

+ 3,41 %

10

Soutien

88 668 261

99 318 864

+ 12 %

112 688 122

115 338 724

+ 2,35 %

11

Stratégie et prospective

22 840 180

23 273 801

+ 1,90 %

22 840 180

23 273 801

+ 1,90 %

13

Ordre de la Légion d'honneur

27 532 425

28 032 425

+ 1,81 %

27 532 425

28 032 425

+ 1,81 %

15

MILDECA

17 419 341

17 101 669

- 1,82 %

17 419 341

17 101 669

- 1,82 %

16

Coordination de la politique numérique

36 106 870

44 464 188

+ 23,15 %

36 156 870

41 514 188

+ 14,82 %

Total

682 510 075

712 923 850

+ 4,46 %

690 280 286

692 565 556

+ 0,33 %

Source : PAP de la mission « Coordination du travail gouvernemental »
annexé au projet de loi de finances pour 2020

2. Des crédits du programme 308 « Protection des droits et libertés », en hausse globale de 2,83 % en crédits de paiement, qui recouvrent des situations très contrastées

Évolution des crédits du programme 308 demandés en 2020
par rapport à la loi de finances pour 2019

(en euros)

Intitulé
de l'action

Autorisations d'engagement en €

Crédits de paiement en €

Ouvertes
en LFI
pour 2019

Demandées
pour 2020

Évolution
en %

Ouverts en LFI
pour 2019

Demandés
pour 2020

Évolution
en %

02

CNIL

18 791 573

20 444 923

+ 8,80 %

18 791 573

20 444 923

+ 8,80 %

03

CSA

37 436 931

37 556 823

+ 0,32 %

37 436 931

37 556 823

+ 0,32 %

05

CGLPL

4 952 616

4 971 241

+ 0,37 %

5 352 616

5 371 241

+ 0,37 %

06

Autres autorités

Indépendantes

4 086 447

4 045 979

- 0,99 %

4 086 447

4 045 979

- 0,99 %

CADA

1 798 833

1 487 779

- 17,30 %

1 798 833

1 487 779

- 17,30 %

CCNE

1 026 624

1 019 703

- 0,67 %

1 026 624

1 019 703

- 0,67 %

CNCDH

1 260 990

1 538 497

+ 22 %

1 260 990

1 538 497

+ 22 %

09

Défenseur des droits

22 337 980

22 937 056

+ 2,68 %

22 337 980

22 937 056

+ 2,68 %

10

HATVP

5 645 583

7 289 591

+ 29,12 %

6 458 997

7 308 317

+ 13,15 %

11

ARDP

296 958

0

296 958

0

12

CNCTR

2 925 241

2 772 099

- 5,23 %

2 925 241

2 772 099

- 5,23 %

13

CSDN

612 588

649 227

+ 5,98 %

612 588

649 227

+ 5,98 %

Total

97 085 917

100 666 939

+ 3,69 %

98 299 331

101 085 665

+ 2,83 %

Source : PAP de la mission « Direction de l'action du Gouvernement »
annexé au projet de loi de finances pour 2020

La hausse du budget du programme 308, plus importante que pour le programme 129, est pondérée par le fait que la protection des droits et libertés représente un peu moins de 13 % des crédits de la mission.

C. UNE ÉVOLUTION DES EMPLOIS QUI ACCOMPAGNE LA MONTÉE EN PUISSANCE DE CERTAINES ENTITÉS DE LA MISSION

Évolution du plafond d'emplois
(exprimé en équivalent temps plein travaillé, [ETPT])

Plafond LFI 2019

Plafond PLF 2020

Évolution

Programme 129

2 944

2 964

+ 20 ETPT

Action 01 : Coordination du travail gouvernemental

679

687

+ 8

Cabinet du Premier ministre et ministres rattachés

348

348

=

SGG

118

118

=

SIG

74

88

+ 14

Commissions rattachées aux services centraux

132

126

- 6

CIVEN

7

7

=

Action 02 : Coordination de la sécurité et de la défense

1216

1267

+ 51

SGDSN

988

1 027

+ 39

GIC

228

240

+ 12

Action 03 : Coordination de la politique européenne

136

136

=

Action 10 : Soutien

594

553

- 41

Action 11 : Stratégie et prospective

146

143

- 3

Action 15 : Mission interministérielle de lutte contre la drogue et les conduites addictives

21

19

- 2

Action 16 : Coordination de la politique numérique

152

159

+ 7

Programme 308

569

595

+ 26 ETPT

CNIL

208

220

+ 12

CGLPL

34

34

=

CADA

16

17

+ 1

CCNE

6

6

=

CNCDH

8

8

=

Défenseur des droits

219

226

+ 7

HATVP

51

57

+ 6

CNCTR

23

23

=

CSDN

4

4

=

Source : PAP de la mission « Direction de l'action du Gouvernement »
annexé au projet de loi de finances pour 2020

II. LA COORDINATION DU TRAVAIL GOUVERNEMENTAL, UN PROGRAMME QUI DÉGAGE DES PRIORITÉS MAIS MANQUE CETTE ANNÉE ENCORE DE LISIBILITÉ BUDGÉTAIRE

Le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » regroupe des fonctions d'état-major, de stratégie, de prospective et de coordination permettant le soutien du Premier ministre dans sa responsabilité de direction de l'action du Gouvernement.

A. DES PRIORITÉS QU'IL FAUT SALUER

1. Des moyens supplémentaires en faveur de la défense et de la sécurité nationale

Cette année encore, un effort budgétaire particulier est porté sur l'action n° 2 relative à la coordination de la sécurité et de la défense. La lutte contre le terrorisme et la cybercriminalité demeurent des priorités qu'il faut financer à leur juste mesure.

Le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) assure la coordination interministérielle de la sécurité et de la défense pour le compte du Premier ministre et du Président de la République. À ce titre, il gère le secrétariat des conseils de défense et de sécurité nationale qui se réunissent chaque semaine depuis les attentats de 2015.

Dans le cadre de la protection et sécurisation de l'État, le SGDSN travaille actuellement à la diffusion de la culture de la sécurité au-delà du cercle des publics qui y sont déjà sensibilisés. Cela prend par exemple la forme d'un MOOC portant sur la menace terroriste destiné au grand public. Il développe également une approche pratique en matière de sécurité nationale au moyen de conseils dispensés aux élus et organisateurs de spectacles ou de la parution prochaine d'un guide de lutte contre la radicalisation. Le SGDSN a mis l'accent en 2019 sur la thématique de la sécurité dans les différents modes de transport. La tenue des jeux olympiques en France en 2024 est l'échéance retenue pour les différents travaux engagés.

Le SGDSN propose et met en oeuvre la politique du Gouvernement en matière de sécurité des systèmes d'information, notamment par l'intermédiaire de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) qui considère, par la voix de son directeur général, Guillaume Poupard, que « la menace ne faiblit pas » . En 2017, la loi de programmation des finances publiques pour 2018 à 2022 a fixé la hausse des effectifs de l'ANSSI à 25 ETPT par an. Pourtant, en 2018, faute de masse salariale suffisante, celle-ci avait dû suspendre ses recrutements pendant les neuf premiers mois de l'année et avait vu ses effectifs n'augmenter que de 8 ETPT. Votre rapporteur s'était ému l'an dernier de cette situation fort regrettable.

Pour 2019, l'Agence a obtenu le report des emplois non pourvus en 2018 qui s'ajoutent ainsi à ceux actés par la loi de programmation des finances publiques pour 2018 à 2022.

Dans le PLF pour 2020, 42 ETPT sont alloués à l'ANSSI, permettant de retrouver quasiment la croissance antérieure à 2017 qui était de 50 emplois par an, ce dont votre rapporteur se félicite. Lors de son audition par votre rapporteur, le directeur général de l'ANSSI, Guillaume Poupard, a expliqué être en capacité de faire croître ses effectifs de 40 à 50 emplois par an, ce qui représente plus de 150 recrutements annuels du fait d'un renouvellement naturel des effectifs de 15 à 20 %. Cette particularité, liée en partie à un taux de 80 % de contractuels, n'en constitue pas moins une force dans la mesure où ces personnels qui quittent l'ANSSI au bout de 4 ou 5 ans diffusent sa culture de la sécurité.

L'autre enjeu important pour l'ANSSI est son implantation immobilière en cours de règlement. S'il s'y est dans un premier temps opposé, Guillaume Poupard s'est finalement rallié au choix d'une troisième implantation plus éloignée de Paris à horizon de 2025. Une implantation unique en région parisienne s'avérait beaucoup trop coûteuse. Le maintien d'un site à Paris permet cependant à l'ANSSI de conserver son attractivité. À cette fin, 33 M€ en autorisations d'engagement seront consacrés en 2020 au renouvellement du bail de la tour Mercure, située sur le front de Seine.

Le groupement interministériel de contrôle (GIC), adossé administrativement et financièrement au SGDSN par le décret n° 2016-1772 du 20 décembre 2016, poursuit lui aussi son développement. Il bénéficie en PLF pour 2020 de 12 emplois supplémentaires lui permettant d'atteindre un plafond de 240 ETPT. Il pourra ainsi faire face à la croissance de son activité d'un niveau de 20 à 25 % par an depuis 2015.

L'expansion de ses effectifs a conduit le GIC à faire l'acquisition fin 2018 d'une nouvelle emprise immobilière nécessitant d'importants travaux. L'entrée dans les lieux est prévue en septembre 2021.

Votre rapporteur estime primordial d'allouer au GIC les moyens de réaliser ses missions afin que le recueil de renseignements par les services s'opère conformément aux dispositions légales, sous le contrôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) dont les missions pourraient évoluer prochainement. En 2020, seront très certainement réexaminées les dispositions de la loi n° 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement autorisant, sous le contrôle de la CNCTR, les traitements automatisés de données ou algorithmes. Initialement applicables jusqu'au 31 décembre 2018, ces dispositions ont été prorogées jusqu'au 31 décembre 2020 par la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme. Dans son rapport d'activité pour 2018, la CNCTR a formulé des propositions d'évolutions législatives et émis le souhait que s'engage une réflexion sur l'encadrement légal des échanges de données entre les services de renseignement français et leurs partenaires étrangers.

2. L'accent sur la place du numérique au coeur de l'État

La direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État (DINSIC) a été renommée direction interministérielle du numérique (DINUM) et a vu ses missions redéfinies par décret du 27 octobre 2019.

Cette direction a pour mission d'assurer la qualité, la modernité et l'efficacité du système d'information de l'État ; d'accompagner le développement des nouveaux services publics numériques ; de soutenir la transformation des administrations.

L'année 2019 a été marquée par le lancement du programme « TECH.GOUV » destiné à accélérer la transformation des politiques publiques et des méthodes de travail dans les administrations. Ce projet est financé par la DINUM mais également par des contributions ministérielles. Il semble justifié dans la mesure où la France a été classée seulement au 15 ème rang européen en 2019 par la Commission européenne dans son rapport DESI (Indice relatif à l'économie et à la société numérique), gagnant une place au classement général.

La participation de la DINUM au programme « TECH.GOUV » s'élève à 14,2 M€ en autorisations d'engagement et 11,2 M€ en crédits de paiement pour 2020. Le programme a vocation à développer 35 projets dans des champs différents tels qu'une nouvelle solution de travail des agents en réseau ou le développement des métiers et pratiques managériales numériques. Plus généralement, il s'agit d'accompagner la transformation des métiers publics par le numérique afin de faire évoluer les politiques publiques et leur mise en oeuvre par les administrations.

Les autres missions de la DINUM ont été élargies par le décret du 29 octobre 2019. Sont désormais soumis à son avis simple les projets en matière d'action publique numérique et de systèmes d'information et de communication de plus de 9 M€ des organismes placés sous la tutelle de l'État. Les projets ministériels ou interministériels restent en revanche soumis à son avis conforme, ce qui confère à la DINUM, grâce à cette vision d'ensemble, la faculté de « recadrer » les projets ministériels et désormais d'alerter les opérateurs en cas de risque de dérive financière notamment.

Un effort devra être porté sur l'open data au sein de l'administration qui ne met pas toujours en oeuvre de façon satisfaisante cette obligation légale.

B. DES CHOIX CONTESTABLES

1. La MIVILUDES

Le Gouvernement a annoncé le 1 er octobre 2019 que la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES), instituée par le décret n° 2002-1392 du 28 novembre 2002, serait, en janvier 2020, placée sous la tutelle du ministère de l'intérieur, en étant rattachée au comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR).

Jusqu'alors, ses crédits figuraient en titre 2 de l'action « Coordination de l'action du Gouvernement » qui permet le financement de plusieurs structures.

Votre rapporteur s'étonne d'une telle décision qu'il juge contraire au but poursuivi.

En effet, l'action de la MILIVUDES ne saurait être réduite à la lutte contre la radicalisation.

Dans sa circulaire en date du 27 mai 2005, le Premier ministre, Jean Pierre Raffarin, rappelait que le phénomène sectaire s'exerce par le biais de petites structures diffuses, mouvantes et difficilement identifiables. Il ajoutait que « l'existence d'une mission interministérielle rattachée au Premier ministre permet la cohérence de l'action de l'État en coordonnant l'activité des services. Le comité de pilotage opérationnel, qui réunit les représentants des administrations centrales les plus concernées, se réunit tous les deux mois » .

Dans son référé du 23 mai 2017, la Cour des comptes a estimé que le caractère opérationnel de la MIVILUDES pourrait être renforcé par un rattachement au ministre de l'intérieur, tout en reconnaissant que la nécessité de conserver une mission interministérielle soit un élément à prendre en considération. La Cour des comptes formule d'ailleurs trois recommandations permettant de confirmer la MIVILUDES dans sa vocation interministérielle tout en lui permettant de mieux remplir ses missions.

Dans sa réponse datée du 1 er août 2017, le Premier ministre Édouard Philippe expliquait que si la MIVILUDES apportait depuis trois ans une contribution au dispositif de prévention de la radicalisation, « prévenir les risques et lutter contre les dérives dans les domaines aussi divers que la santé et le bien-être, l'éducation, la formation professionnelle, reste un enjeu majeur ». Il ajoutait que « les préjudices pour la société en matière d'atteintes physiques, morales, financières pour les adeptes, de délitement des liens familiaux ou encore de détournements de circuits économiques justifient le maintien d'une politique interministérielle, garantie par le rattachement de la Mission aux services du Premier ministre ».

Revenir sur ce choix ne ferait qu'affaiblir la MIVILUDES en la diluant dans l'action du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), que votre rapporteur estime au demeurant peu convaincante.

L'argument financier ne saurait pas plus être invoqué. Si les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances ne précisent pas le budget de la MIVILUDES, dans son référé daté du 23 mai 2017, la Cour des comptes précise que ses ressources budgétaires sont « très modestes (moins de 0,5 M€ en tenant compte des coûts indirects supportés par les services du Premier ministre)» .

Votre rapporteur réaffirme par conséquent son souhait que la MIVILUDES reste rattachée aux services du Premier ministre.

2. Le Service d'information du Gouvernement

La hausse importante des crédits alloués au Service d'information du Gouvernement n'emporte pas non plus l'adhésion de votre rapporteur.

Réorganisé par arrêté du 26 février 2019, le Service d'information du Gouvernement voit son budget augmenter de 1,25 M€, de 19,81 M€ à 21,06 M€, et son plafond d'emplois passer de 74 à 88 ETPT. En effet, la création de 5 ETPT pour 2020 s'ajoute à l'arbitrage en 2019 en lettre plafond de + 9 ETPT.

Votre rapporteur estime que les hausses de moyens prévues en projet de loi de finances pour 2020 ne sont pas justifiées . En effet, la communication de l'exécutif, notamment en matière d'études d'opinion, s'exerce par l'action du SIG mais aussi par les services de la Présidence de la République. De plus, la communication interministérielle n'a pas vocation à se substituer aux actions menées par les ministères qui détiennent les connaissances et compétences nécessaires à leur réussite.

C. UN MANQUE DE LISIBILITÉ RÉCURRENT LIÉ AUX MISES À DISPOSITION DE PERSONNELS

Votre rapporteur dénonce depuis plusieurs années le manque de lisibilité dans la présentation des budgets qui nuit à leur compréhension et leur analyse.

Les mises à disposition de personnels en constituent une des illustrations. Par principe, votre rapporteur y est opposé dans la mesure où l'entité qui en bénéficie n'a pas le choix des personnels qui lui sont affectés.

Sur le plan budgétaire, les mises à disposition, qui ne sont pas comptabilisées dans le plafond d'emplois, ne donnent pas toujours lieu à remboursement par l'entité bénéficiaire auprès du pourvoyeur d'emplois.

C'est ainsi que, pour 2020, afin de respecter la trajectoire de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025, 255 ETPT mis à disposition par le ministère de la défense au SGDSN ne seront plus remboursés par ce dernier. Cette opération, qui diminue fictivement de 16 millions d'euros les crédits de personnels du SGDSN, constitue une entrave majeure à la lisibilité budgétaire, destinée à laisser croire que la loi de programmation militaire est respectée.

III. LA PROTECTION DES DROITS ET LIBERTÉS, UN OBJECTIF QUI NE PEUT ETRE ATTEINT QUE PAR L'ACTION D'AUTORITÉS RÉELLEMENT INDÉPENDANTES

A. UNE PRIORITÉ QUI JUSTIFIE DES EFFORTS BUDGÉTAIRES

La loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes en a fixé la liste limitative, permettant ainsi au législateur de réaffirmer son rôle dans la création et le contrôle de ces autorités.

Ces autorités administratives indépendantes ne se substituent pas au législateur mais encadrent l'action du Gouvernement avec pour seul objectif la protection des droits de l'homme et des libertés publiques et individuelles.

• Le Défenseur des droits , autorité de rang constitutionnel, réunit les compétences du Médiateur de la République, de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, du Défenseur des enfants et de la Commission nationale de déontologie et de sécurité. Il est, depuis la loi organique n° 2016-1690 du 9 décembre 2016, chargé d'orienter et de protéger les lanceurs d'alerte.

La loi n° 2016-1547 de modernisation de la justice du XXIe siècle, désigne cette autorité en qualité d'organisme compétent dans le cadre du recours à la médiation préalable obligatoire, avant saisine du juge administratif pour le traitement des litiges relatifs au revenu de solidarité active (RSA), à l'aide exceptionnelle de fin d'année et à l'aide personnalisée au logement (APL). Cette nouvelle expérimentation est mise en place depuis avril 2018 dans 6 départements.

L'autorité bénéficie pour 2020 de 7 ETPT supplémentaires ; cela ne correspond cependant pas à 7 créations de postes. Pour 3 ETPT, c'est la conséquence d'une correction technique consistant à prendre en charge sous plafond des postes antérieurement mis à disposition avec remboursement par l'institution. Pour 3 autres ETPT, il s'agit de l'impact du schéma d'emploi 2020 sur 2020, et pour 1 ETPT de l'extension en année pleine sur 2020 du schéma d'emplois de 2019.

Ces postes supplémentaires sont nécessaires à l'institution dont l'activité croît d'année en année (+ 30 % de réclamations en 5 ans). En 2019, le Défenseur des droits devrait dépasser la barre des 100 000 réclamations traitées, dont 25 000 par le siège, les 75 000 autres par les délégués territoriaux. Cette tendance est la conséquence de la défaillance des autres institutions, cette autorité étant le dernier recours de nombreux citoyens, et ce alors même que l'institution estime que le niveau de non recours aux droits reste préoccupant dans notre pays.

Le Défenseur des droits va mettre à profit les 3 postes qui lui sont alloués pour se réorganiser, et créer une meilleure synergie entre le siège et les délégués territoriaux. Des cadres internes seront nommés chef(fe)s de pôle régional, avec pour mission d'apporter appui, assistance technique et formation aux délégués territoriaux. L'augmentation des crédits de fonctionnement permettra de recruter 20 délégués supplémentaires, pour un coût de 100 000 € (indemnité de 400 € par mois et remboursement de frais).

Le Défenseur des droits estime que 20 autres délégués territoriaux seront nécessaires, l'activité ne faiblissant pas. Elle pourrait au contraire augmenter davantage si l'expérimentation de la médiation préalable obligatoire était étendue à toute la France. Cette généralisation serait certainement une bonne chose dans la mesure où elle permet de diminuer de 30 % le contentieux concerné devant les tribunaux administratifs et ainsi de dégager du temps pour que les magistrats traitent d'autres contentieux. Elle pourrait se traduire, selon les estimations du Défenseur des droits, par 100 000 demandes nouvelles.

Votre rapporteur souhaite que des moyens complémentaires soient accordés au Défenseur des droits en loi de finances pour 2020 afin de l'accompagner dans ses missions.

• La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) , régulateur de la protection des données personnelles, voit son budget pour 2020 progresser de 8,80 % en autorisations d'engagement et crédits de paiement.

Le règlement européen sur la protection des données personnelles (RGPD), entré en vigueur le 25 mai 2018, octroie à la CNIL de nouveaux outils de régulation que sont les référentiels, la certification, le règlement type ou les analyses d'impact obligatoires.

L'année 2019 a été consacrée par l'autorité à l'amplification des actions d'accompagnement des professionnels ainsi qu'à des actions de pédagogie à l'égard des plus petits organismes ou des moins sensibilisés au RGPD. C'est ainsi que la CNIL a publié en septembre 2019 un guide de sensibilisation des collectivités territoriales au RGPD.

Trois axes de travail ont été dégagés par la CNIL pour 2019 : pédagogie et création de contenus ; incitation des organisations professionnelles des secteurs public et privé à se structurer en têtes de réseaux qui sont autant de relais auxquels l'autorité apporte son appui ; déploiement d'outils pratiques tels les MOOC (formations en ligne ouvertes à tous).

Le « changement d'échelle » engendré par la mise en oeuvre du RGPD se constate à tous niveaux. Le nombre d'interlocuteurs est passé de 18 000 organismes dotés d'un correspondant informatique et liberté, à 39 500 organismes ayant désigné un délégué à la protection des données fin 2018, et à 50 000 moins d'un an plus tard. Le site internet de la CNIL a reçu 8 millions de visites en 2018. Les plaintes ont augmenté de 32 % la même année et la CNIL a reçu, du 25 mai au 31 décembre 2018, 1 170 notifications de violations de données faisant suite le plus souvent à des atteintes à la confidentialité des données.

Le pouvoir de contrôle de la CNIL prend lui aussi une autre dimension avec la possibilité pour l'autorité de prononcer des sanctions, dont des sanctions pécuniaires d'un montant maximal de 20 M€ ou 4 % du chiffre d'affaires mondial. Eu égard aux enjeux financiers en cause, l'autorité doit sécuriser les procédures engagées qui ne manqueront pas de déboucher sur des contentieux.

Enfin, la coopération européenne dans les dossiers transfrontaliers (soit 20 % des dossiers), pour lesquels la CNIL sera chef de file ou autorité concernée, engendre pour celle-ci une charge importante, avec un travail supplémentaire en anglais.

Les moyens supplémentaires alloués à la CNIL pour 2020 sont les bienvenus mais seraient, selon cette autorité, insuffisants pour lui permettre d'assurer pleinement ses fonctions de contrôle et de sanction. C'est un point sur lequel votre rapporteur sera particulièrement vigilant.

• La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) , dont la mission première est de recevoir et contrôler les déclarations de situation patrimoniale et d'intérêts d'environ 15 800 responsables publics, se félicite d'un taux de conformité de 99,82 % avec 30 dossiers transmis en 2018 à l'autorité judiciaire.

La loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique a confié à la HATVP la mission de contrôler l'inscription des représentants d'intérêts sur un registre ainsi que le respect de leurs obligations déclaratives et déontologiques. À cette fin, la Haute Autorité dispose d'un pouvoir de vérification sur pièces et sur place. Les premiers contrôles sur pièces ont eu lieu fin 2018.

Tout représentant d'intérêts est tenu de communiquer à la HATVP un certain nombre d'informations dont, notamment, son identité, le champ de ses activités, les actions menées auprès des membres du Gouvernement, des parlementaires et autres personnes listées par la loi. Le fait, pour un représentant d'intérêts, de ne pas communiquer ces informations est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

Cette activité liée au registre est en pleine expansion avec, fin décembre 2018, 1 734 inscrits et environ 2 000 à la mi-octobre 2019. Sur cette même période, les actions de lobbying déclarées sont passées de 6 362 à plus de 14 000, preuve que s'opère une réelle appropriation de ce registre.

La HATVP déplore néanmoins que la définition des actions à déclarer soit difficile à appréhender par les acteurs, impliquant de sa part un important travail d'accompagnement. Les 6 emplois supplémentaires alloués à la Haute Autorité pour 2020 contribueront à accomplir cette mission.

La loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique confie, à compter du 1 er février 2020, le contrôle des allers-retours des agents publics entre le secteur public et le secteur privé. Ce contrôle sera obligatoire pour certains emplois ou fonctions dont la liste reste à déterminer par décret ; la Haute autorité pourra être saisie pour avis pour les autres emplois.

La commission de déontologie de la fonction publique, qui exerçait en partie les missions nouvellement confiées à la HATVP, disposait de 6 ETPT et d'un budget de 450 000 €. Or les arbitrages budgétaires ayant eu lieu avant l'adoption de la loi de transformation de la fonction publique, la HATVP n'a pas obtenu les moyens financiers de la commission.

Votre rapporteur souhaite vivement que la HATVP soit dotée en PLF pour 2020, et non pas par simple régulation budgétaire, de moyens financiers et humains supplémentaires afin d'assumer ces nouvelles compétences.

• Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) va connaître plusieurs changements dans les mois à venir. Outre ses missions de régulateur des services de radio, télévision et services de médias audiovisuels à la demande, le CSA s'est vu attribuer, par la loi n° 2018-1202 du 22 décembre 2018 relative à la lutte contre la manipulation de l'information, une nouvelle compétence dans un domaine qui n'était jusqu'alors pas le sien. Il sera en effet chargé de contrôler le respect, par certains opérateurs de plateformes en ligne, de leur obligation de coopération en matière de lutte contre la diffusion de fausses informations. Ces nouveaux interlocuteurs dans le champ de la régulation conduisent le CSA à renouveler ses méthodes de travail.

Deux autres textes pourraient élargir encore ce rôle de régulateur au champ très vaste des plateformes, réseaux sociaux et sites de partages de vidéos.

La proposition de loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet adoptée par l'Assemblée nationale le 9 juillet 2019 confierait au CSA un pouvoir de sanction administrative à l'encontre des plateformes ayant manqué à leur obligation de mettre en oeuvre les moyens proportionnés nécessaires à un traitement dans les meilleurs délais des signalements de contenus haineux.

La directive (UE) 2018/1808 du 14 novembre 2018 du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive « Services de médias audiovisuels », qui sera transposée par la future loi audiovisuelle, devrait en outre élargir le champ d'action du CSA aux plateformes de partage vidéos sur internet.

Dans le PLF pour 2020, 6 emplois supplémentaires sont alloués au CSA dont le plafond atteindra 290 ETPT. Toutefois, aucun moyen financier supplémentaire n'accompagne ces emplois, notamment de spécialistes de l'algorithme, compétences recherchées et coûteuses.

La fusion envisagée entre le CSA et la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI), qui devrait être effective en 2021, doit se préparer dès 2020, ce qui entraînera dès l'an prochain des dépenses ponctuelles de réaménagement des locaux du CSA, de dépôt de noms de domaine, de création d'une nouvelle identité visuelle, de création d'un site internet unique.

Avec une dotation stable depuis 2010, le CSA risque de devoir faire appel à la solidarité au sein du programme, alors qu'il eut été plus cohérent de lui accorder les moyens de faire face à ces nouvelles dépenses à venir.

Enfin, votre rapporteur souhaite émettre deux observations. La première concerne le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL). Ses rapports gagneraient certainement en efficacité s'ils étaient publiés plus rapidement, et non plus d'un an après la visite. Bien qu'en diminution ces dernières années, ce délai est dû notamment au non-respect par les ministères des deux mois qui leur sont accordés pour apporter leurs observations. Peut-être le Contrôleur général des lieux de privation de liberté devrait-il revoir à la baisse son nombre de visites annuelles actuellement fixé à 150. En effet, ce délai de publication nuit à l'impact de ces rapports qui sont attendus par les professionnels et le grand public, en ce qu'ils dénoncent des situations problématiques ou, au contraire, soulignent de bonnes pratiques. C'est particulièrement le cas en matière d'enfermement psychiatrique, où les rapports du CGLPL sont attendus par les professionnels afin d'améliorer leurs pratiques.

La seconde observation porte sur la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) qui est très sollicitée, notamment pour des demandes qui ne sont pas liées à des documents administratifs. En effet, votre rapporteur s'étonne qu'elle fasse droit à des demandes, tels des échanges de courriels, créant ainsi de la donnée administrative, sous prétexte de questions légitimes. Peut-être la commission des lois devrait-elle se saisir du périmètre d'intervention de la CADA afin que l'autorité recentre son activité sur la communication de documents administratifs.

B. LA NÉCESSITÉ IMPÉRIEUSE DE GARANTIR L'INDÉPENDANCE DES AUTORITÉS

Depuis plusieurs années votre rapporteur déplore l'application de la réserve de précaution aux autorités administratives indépendantes. D'un taux de 0,5 % sur les dépenses de titre 2, et de 3 % sur les dépenses de fonctionnement, la réserve de précaution dite de « régulation budgétaire » constitue une atteinte à leur indépendance. Les autorités peuvent être amenées à en demander le déblocage à leur profit, ce qui implique un dialogue avec le directeur de programme et l'obtention d'un arbitrage en leur faveur.

Il est souhaitable que les AAI disposent en loi de finances des moyens d'accomplir leurs missions, plutôt que de financer des dépenses qui sont certaines par des mesures de régulation budgétaire, que votre rapporteur déplore par ailleurs dans leur principe.

Le CSA est particulièrement pénalisé par cette mesure car c'est la totalité de sa dotation qui est soumise à une réserve de précaution de 3 %.

Les mises à disposition de personnels au profit des autorités administratives indépendantes sont elles aussi à éviter. Non seulement elles nuisent à la clarté des moyens alloués aux AAI, mais celles-ci perdent toute maîtrise dans la gestion de ces emplois. Le plus souvent, les autorités qui en bénéficient ne choisissent pas les personnes qui sont mises à leur disposition, ce qui constitue une réelle atteinte à leur indépendance. Votre rapporteur se félicite qu'après les avoir déplorées plusieurs années de suite, les mises à disposition au sein de la CSDN aient été transformées en emplois sous plafond. Il en est de même pour le Défenseur des droits en 2020 pour 3 mises à disposition.

Enfin, le pouvoir de sanction accordé à certaines AAI, et plus particulièrement au CSA et à la CNIL en ce qui concerne le programme 308 est une prérogative à manier avec beaucoup de précaution.

Comme l'an dernier, votre rapporteur s'inquiète des prérogatives accordées au CSA consistant à interdire temporairement la diffusion de séquences publicitaires. En effet, en cas d'annulation par le juge, le recours indemnitaire qui en découle fait peser un risque financier sur l'institution eu égard au quantum des sommes qui pourraient être mises à sa charge.

C'est ainsi que le 13 novembre 2019, le Conseil d'État a condamné le CSA à indemniser la chaîne C8 de son préjudice à hauteur de 1,1 M€. Cette décision fait suite à l'annulation par le Conseil d'État en juin 2018 de la sanction prononcée par le CSA à l'encontre de la chaîne la privant de publicité pendant une semaine. Si l'autorité ne peut assumer sur son budget les sommes mises à sa charge, c'est l'État qui devra au final prendre en charge les condamnations.

La CNIL pourrait elle aussi être fragilisée en raison du quantum des sanctions financières qu'elle peut désormais infliger (20 M€ ou 4 % du chiffre d'affaires mondial), et des éventuels dommages-intérêts qui pourraient être mis à sa charge en cas d'annulation.

IV. LE BUDGET ANNEXE « PUBLICATIONS OFFICIELLES ET INFORMATION ADMINISTRATIVE »

La direction de l'information légale et administrative (DILA) bénéficie de crédits qui relèvent du budget annexe « Publications officielles et information administrative » regroupant le programme 623 « Édition et diffusion » et le programme 624 « Pilotage et ressources humaines ».

Selon le décret n° 2010-31 du 11 janvier 2010, la DILA a pour missions de garantir l'accès au droit, d'informer les citoyens sur leurs démarches administratives ou encore de contribuer à la transparence de la vie publique, économique et financière.

La DILA conduit plusieurs chantiers dans le cadre de ce plan stratégique. Après avoir supprimé, le 1 er janvier 2016, la version papier du Journal officiel qui ne comptait plus que 1 700 abonnés payants en 2015, la DILA mettra en service en 2020 une nouvelle version du site « legifrance.gouv.fr ». L'objectif est d'élargir le spectre des utilisateurs au monde de l'entreprise notamment, et de rendre le site accessible sur tablette et téléphone portable.

L'autre site majeur de la DILA, « service-public.fr », qui a fait l'objet d'une refonte en 2016, devrait quant à lui recevoir plus de 280 millions de visites en 2019. L'objectif général est de mieux informer l'usager et de faciliter sa mise en relation avec l'administration.

La DILA souhaiterait enfin développer l'audience de son site « vie-publique.fr » qui a fusionné avec celui de la Documentation française et qui reçoit environ 15 millions de visite par an.

Sur le plan budgétaire, la DILA poursuit ses efforts de maîtrise des dépenses de fonctionnement et de personnels.

(en euros)

Budget annexe « publications officielles et information administrative »

AE

LFI 2019

AE

PLF 2020

Évolution

CP

LFI 2019

CP

PLF 2020

Évolution

Programme 623

62 240 000

51 440 000

- 17,35 %

52 535 000

46 735 000

- 11,04 %

01

Diffusion légale

6 000 000

6 000 000

=

6 000 000

6 000 000

=

02

Information administrative, édition publique et promotion

56 240 000

45 440 000

- 19, 2 %

46 535 000

40 735 000

- 12,46 %

Programme 624

113 771 746

110 178 854

- 3,16 %

113 471 700

109 878 854

- 3,17 %

01

Pilotage, modernisation et activités numériques

8 000 000

8 000 000

=

7 700 000

7 700 000

=

02

Dépenses de personnel

65 912 746

64 568 854

- 2,04 %

65 912 700

64 568 854

- 2,04 %

03

Convention d'État - Société anonyme de composition et d'impression des journaux officiels

39 859 000

37 610 000

- 5,64 %

39 859 000

37 610 000

- 5,64 %

Source : PAP du budget annexe « Publications officielles et information administrative »
annexé au projet de loi de finances pour 2020

L'évolution à venir des crédits de paiement (en millions d'euros) de la mission annexe est la suivante :

Budget annexe « publications officielles et information administrative »

LFI 2019

PLF 2020

2021

2022

Crédits de paiement

161

153

150

147

Des efforts sont menés afin de poursuivre la réduction des effectifs qui a déjà connu une forte ampleur depuis 2015. Des négociations sont actuellement menées afin de reconduire les dispositifs de cessation anticipée volontaire d'activité.

Le plafond d'emplois sera de 620 ETPT en 2020, soit une diminution de 43 ETPT. La DILA poursuit ainsi sa politique de réduction des effectifs de forte ampleur engagée depuis 2015.

Le budget global de la DILA provient, d'une part, des recettes d'annonces liées aux missions d'accès au droit et de transparence économique (annonces des associations, annonces des marchés publics BOAMP, annonces légales et obligatoires BALO, annonces civiles et commerciales BODACC, annonces du Journal officiel « lois et décrets » - JOLD), et, d'autre part, des recettes hors annonces relevant des missions d'édition publique et d'information administrative (vente de publications et abonnements, prestations et travaux d'édition).

Après la gratuité des annonces relatives à la création d'entreprises, celle des immatriculations en cas de reprise d'entreprise est instaurée au 1 er janvier 2020 par la loi PACTE n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, ce qui représente une perte de recettes de plus de 6 M€ pour le budget annexe.

En 2020, le projet immobilier Desaix lancé en 2018 et destiné à augmenter la surface de bureaux afin d'accueillir les agents du site du Quai Voltaire puis une partie des agents du site de Ségur sera finalisé, ce qui permettra de maîtriser les dépenses immobilières.

*

* *

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et au budget annexe « Publications officielles et information administrative » dans le projet de loi de finances pour 2020, sous réserve de l'adoption en séance de ses amendements.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Commission du secret de la défense nationale (CSDN)

M. Patrick Pierrard , secrétaire général

Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL)

M. Jean Lessi , secrétaire général

M. Olivier Tournut , directeur administratif et financier

Mme Tiphaine Havel , conseillère pour les questions institutionnelles et parlementaires

Commission d'accès aux documents administratifs (CADA)

M. Marc Dandelot , président

Mme Christelle Guichard , secrétaire générale

Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN)

M. Xavier le Pelletier de Woillemont , général de corps d'armée, secrétaire général-adjoint de la défense et de la sécurité nationale

M. Henri Zeller , sous-directeur finances

M. Julien Barnu , conseiller technique et numérique

M. Pascal Chauve , ingénieur général de l'armement, directeur du GIC

M. Olivier Robert , ingénieur en chef de l'armement, sous-directeur de l'administration du GIC

Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP)

M. Jean-Louis Nadal , président

Mme Lisa Gamgani , secrétaire générale

M. Emmanuel Hoblingre , directeur administratif et financier

Secrétariat général des affaires européennes (SGAE)

M. Salvatore Serravalle , secrétaire général adjoint

M. Jean-Michel Thivel , chef du secteur ADMIN

M. David Michel , adjoint au secteur PARL

Direction de l'information légale et administrative (DILA)

M. Bertrand Munch , directeur

Mme Fabienne Boussin , sous-directrice, secrétaire générale

Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI)

M. Guillaume Poupard , directeur général

Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL)

Mme Adeline Hazan , Contrôleure générale

Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR)

M. Francis Delon , président

M. Samuel Manivel , conseiller

Défenseur des droits

M. Jacques Toubon , Défenseur des droits

M. Christophe Brès , chef du service de l'administration générale

M. Marc Loiselle , conseiller auprès de la directrice de la protection des droits et des affaires publiques

Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA)

M. Guillaume Blanchot , directeur général

M. Alban Marino , directeur administratif et financier

Direction interministérielle du numérique (DINum)

M. Nadi Bou Hanna , directeur

M. Paul Schmite , chargé de rédaction

Service d'information du Gouvernement (SIG)

M. Michaël Nathan , directeur

Mme Florence Barrès , secrétaire générale

Secrétariat général du Gouvernement (SGG)

M. Marc Guillaume , secrétaire général

M. Serge Duval , directeur des services administratifs et financiers des services du Premier ministre


* 1 Le compte rendu de cette réunion est consultable à l'adresse suivante :

www.senat.fr/compte-rendu-commissions/lois.html .

* 2 Hors fonds de concours et attributions de produits attendus en 2020.

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