C. UNE RÉFORME NÉCESSAIRE POUR S'ADAPTER AUX USAGES

1. Regrouper les entreprises de l'audiovisuel public pour développer l'offre numérique

La future réforme étant au coeur du débat budgétaire et au centre des conversations de tous les professionnels il n'est pas inutile de rappeler qu'elle trouve son origine dans notre époque et l'évolution des usages.

Le démantèlement de l'ORTF a eu lieu à une époque où les acteurs privés n'existaient pas à la télévision et n'étaient pas dominants à la radio. Faut-il rappeler qu'Internet n'existait pas dans les années 1970 et 1980 ? De nos jours, 77 % des foyers ont accès à une télévision connectée à Internet et 75 % des Français possèdent un smartphone.

Taux de possession des équipements média et multimédia en France

2016

2017

2018

Evolution 2017-2018

Téléviseur *

94 %

94 %

94 %

=

Téléviseur connectable *

63 %

65 %

77 %

+ 7 pts

Ordinateur *

85 %

86 %

85 %

- 1 pt

Tablette **

40 %

44 %

41 %

- 3 pts

Smartphone **

65 %

73 %

75 %

+ 2 pts

Internet Fixe **

88 %

85 %

86 %

- 1 pt

Internet Mobile **

65 %

71 %

NR

NR

Sources :* Observatoire de l'équipement audiovisuel des foyers T4 2016 / T4 2017 / T4 2018
- base : ensemble des foyers

** Baromètre du numérique 2018 / pour les smartphones : population de 12 ans et plus.

Durée d'écoute quotidienne de la télévision en moyenne annuelle, 1996-2017

(En heure : minutes - Cible : individus de 4 ans et plus, équipés d'un téléviseur en France métropolitaine)

Cette évolution des équipements rend surannée l'assiette de la CAP fondée sur la possession d'un téléviseur. Elle limite également structurellement les ambitions de FTV, de Radio France, de FMM et de l'INA dans le numérique. Les coopérations entre ces quatre entités existent mais elles se développent lentement du fait des querelles de clochers et des difficultés à obtenir des arbitrages.

Une évolution est cependant nécessaire car le taux d'écoute de la radio baisse chaque année de même que le temps passé devant la télévision. De plus en plus les Français délaissent les médias traditionnels dans lesquels le service public est puissant pour investir les nouvelles plateformes où ce dernier est plus faible.

2. Une spécificité de l'audiovisuel public à conforter

Le développement d'une gouvernance commune doit également permettre de réaffirmer et de défendre l'identité du service public. Les très bonnes audiences de Radio France tiennent d'abord à la qualité de l'offre et à la faiblesse de la publicité qui permet de traiter un ensemble de sujets diversifiés pour s'adresser à tous les publics. La puissance de France Télévisions dans la production cinématographique et audiovisuelle vient rappeler que le service public a des arguments à faire valoir pour concevoir une offre adaptée aux nouveaux usages.

La moindre dépendance à la publicité et l'investissement dans la production constituent deux fondements de l'identité du service public qui devront être mieux valorisés dans le cadre de la holding « France Médias ». Cela justifiera d'engager une décroissance de la publicité sur les antennes du service public, alors que cette ressource est aujourd'hui encouragée par les tutelles pour compenser les baisses de dotations de CAP. Cela nécessitera également de préserver la capacité de production de Radio France et de France Médias Monde et de développer les droits de France Télévisions sur les productions qu'il finance afin de mieux maîtriser leur diffusion délinéarisée.

Contribution des principaux éditeurs de services de télévision
à la production cinématographique et audiovisuelle

(en millions d'euros)

Éditeur

Total 2016

Total 2017

Evolution 2016-2017

Groupe FTV

453,8

470,5

3,7 %

Groupe C+

318,9

281,8

- 11,6 %

Groupe TF1

216,3

213,9

- 1,1 %

Groupe M6

132,8

137,7

3,7 %

OCS

41,6

42,4

5,9 %

Groupe AB

6

7

16,7 %

Autres

74,6

81,3

9,1 %

Total

1 244

1 234,7

- 0,7 %

Source : CSA

3. Une gouvernance commune consacrée aux enjeux stratégiques

La création de la holding publique « France Médias » suscite de nombreuses interrogations notamment de la part des syndicats. Les représentants FO de France Médias Monde « ne savent pas ce qui va leur arriver » et considèrent que le flou qu'ils perçoivent dans la stratégie de leur entreprise risque de s'accroître dans une structure plus large. L'UNSA de Radio France craint que le président de France Médias n'ait pas de culture de la radio tandis que la CGT de Radio France s'interroge sur « la question de la répartition de la ressource » . Du côté des salariés de FTV, FO se pose la question de l'intérêt de rajouter une structure supplémentaire tandis que la CFDT craint que la holding ne serve qu'à rechercher les économies.

En somme, du côté des salariés, chacun s'inquiète du risque que pourrait représenter la gouvernance commune soit pour défavoriser sa propre structure soit pour prolonger des tendances défavorables à l'ensemble des sociétés.

Du côté des dirigeants des entreprises publiques, les positions sont plus claires puisqu'il revient au management de respecter les choix de l'actionnaire. Si la présidente de France Télévisions a souvent insisté sur les difficultés inhérentes à une gouvernance commune, elle reconnaît aujourd'hui l'intérêt d'avoir « un chef d'orchestre commun qui permettra d'aller plus vite » . Cette nouvelle organisation devrait selon elle être particulièrement utile dans le numérique, par exemple pour permettre de réunir tous les podcasts produits par les différentes sociétés de l'audiovisuel public sur une plateforme confiée à Radio France.

La présidente de Radio France estime que le projet de loi permet de répondre à la question du pilotage stratégique qui incombait jusqu'alors aux tutelles. Cette nouvelle organisation peut être précieuse selon elle pour engager un dialogue plus équilibré avec les grandes plateformes sur les enjeux liés à la distribution comme le fait la BBC. Mais cette nouvelle autorité devra se limiter à un rôle stratégique insiste-t-elle.

Le président de l'INA qui a toujours défendu le principe du regroupement estime que la gouvernance commune doit permettre aux différentes entreprises de conduire des projets au même rythme et de développer des outils communs dans la recherche et la formation.

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