Avis n° 144 (2019-2020) de M. Jean-François LONGEOT , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 21 novembre 2019

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N° 144

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2019

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2020 ,

TOME I

MESURES FISCALES RELATIVES À L'ENVIRONNEMENT
ET AUX TRANSPORTS

Par M. Jean-François LONGEOT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Hervé Maurey, président ; M. Claude Bérit-Débat, Mme Pascale Bories, MM. Patrick Chaize, Ronan Dantec, Alain Fouché, Guillaume Gontard, Didier Mandelli, Frédéric Marchand, Mme Nelly Tocqueville, M. Michel Vaspart, vice - présidents ; Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Jean-François Longeot, Cyril Pellevat, secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Jérôme Bignon, Joël Bigot, Jean-Marc Boyer, Mme Françoise Cartron, MM. Guillaume Chevrollier, Jean-Pierre Corbisez, Michel Dagbert, Michel Dennemont, Mme Martine Filleul, MM. Hervé Gillé, Jordi Ginesta, Éric Gold, Mme Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Benoît Huré, Olivier Jacquin, Mme Christine Lanfranchi Dorgal, MM. Olivier Léonhardt, Jean-Claude Luche, Pascal Martin, Pierre Médevielle, Louis-Jean de Nicolaÿ, Jean-Jacques Panunzi, Philippe Pemezec, Mme Évelyne Perrot, M. Rémy Pointereau, Mme Angèle Préville, MM. Jean-Paul Prince, Christophe Priou, Mmes Françoise Ramond, Esther Sittler, Nadia Sollogoub, Michèle Vullien.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 2272 , 2291 , 2292 , 2298 , 2301 à 2306 , 2365 , 2368 et T.A. 348

Sénat : 139 et 140 à 146 (2019-2020)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, réunie le mercredi 13 novembre 2019, sous la présidence de M. Hervé Maurey, président, a examiné le rapport pour avis de M. Jean-François Longeot sur les mesures fiscales relatives à l'environnement et aux transports de la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2020.

La commission a regretté que le PLF ne comporte aucune mesure permettant un financement dédié au profit des communautés de communes exerçant la compétence d'organisation des mobilités , et qu'il prévoie de réduire de 45 millions d'euros la compensation versée par l'État aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) à la suite du relèvement du seuil de salariés à partir duquel les employeurs sont assujettis au versement transport.

La commission a également déploré que la hausse de la fiscalité sur le transport routier de marchandises et sur le transport aérien soit uniquement conçue dans une logique de rendement budgétaire , pour pallier le manque de moyens de l'État pour financer les infrastructures de transports, et qu'elle ne s'inscrive pas dans une réflexion de plus long terme sur la transformation de ces secteurs , pour les accompagner à réaliser leur transition énergétique en s'orientant vers des technologies moins émettrices de gaz à effet de serre.

La commission a adopté 9 amendements visant notamment à :

1. Octroyer aux communautés de communes exerçant la compétence d'organisation des mobilités une part de la taxe sur les carburants (TICPE) pour développer des services de mobilité sur l'ensemble du territoire, et supprimer la baisse de la compensation du versement transport de l'État aux AOM ;

2. Renforcer les aides à la rénovation énergétique des logements en permettant aux les ménages des déciles 9 et 10 de revenus de bénéficier du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) en cas de rénovations globales de leurs logements permettant des gains énergétiques importants, en maintenant la possibilité pour les locataires de bénéficier du CITE, en réintroduisant l'éligibilité au crédit d'impôt des chaudières gaz à très haute performance énergétique et en augmentant le montant de l'aide pour le remplacement des fenêtres à simple vitrage par des fenêtres à double ou triple vitrage ;

3. Encourager l'acquisition de véhicules à faibles émissions par les entreprises , en augmentant les montants pouvant être déduits de l'impôt qu'elles acquittent au titre de l'amortissement de leurs véhicules à faibles et très faibles émissions.

LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR POUR AVIS

I. PERMETTRE AUX COLLECTIVITÉS DE DÉVELOPPER DES SERVICES DE MOBILITÉ SUR L'ENSEMBLE DU TERRITOIRE

Lors de l'examen du projet de loi d'orientation des mobilités, le Sénat s'était alarmé de l'absence de financement prévu pour permettre aux communautés de communes qui se saisiront de la compétence d'organisation des mobilités de développer une offre de transports dans les territoires qui en sont aujourd'hui dépourvus 1 ( * ) .

Dans la mesure où la plupart de ces intercommunalités ne mettront pas en place des services réguliers de transport compte tenu de leur coût élevé, elles ne bénéficieront pas des recettes du versement mobilité (VM) 2 ( * ) .

Or, sans ressources dédiées et pérennes, les communautés de communes ne pourront pas mettre en place des services de mobilité, pourtant essentiels pour lutter contre les fractures sociales et territoriales et réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Le Sénat avait par conséquent prévu dans le projet de loi d'orientation des mobilités un dispositif de financement de la compétence d'organisation des mobilités , qui a été supprimé par l'Assemblée nationale, le Gouvernement renvoyant le règlement de cette question au prochain projet de loi de finances.

Force est pourtant de constater que le projet de loi de finances pour 2020 ne comporte aucune mesure permettant aux intercommunalités de bénéficier d'une ressource dédiée pour financer des services de mobilité, puisqu'il se borne à attribuer aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre une fraction de TVA à compter de 2021 pour compenser la suppression de la taxe d'habitation.

C'est pourquoi, la commission a adopté un amendement de M. Jean-François Longeot, rapporteur pour avis des crédits de la première partie, et de M. Didier Mandelli, rapporteur du projet de loi d'orientation des mobilités et rapporteur pour avis des crédits relatifs aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux, visant à réintroduire un dispositif de financement dans le projet de loi de finances. Il s'agit d'attribuer aux communautés de communes qui exercent la compétence d'organisation des mobilités, et qui ne perçoivent pas de versement mobilité, une part du produit de la taxe sur les carburants (TICPE) d'un montant de 10 euros par habitant , c'est-à-dire le montant moyen que coûte la mise en place d'un « bouquet de services de mobilité » (transport à la demande, plateforme d'autopartage ou de covoiturage, vélos en libre-service, etc.).

Comme l'a relevé le Conseil des prélèvements obligatoires dans un rapport récent 3 ( * ) , la fiscalité environnementale a représenté en 2018 un rendement total de 56 milliards d'euros ; une partie de ces recettes doit être allouée au développement de l'offre de transports sur l'ensemble du territoire.

Par ailleurs, la commission a adopté un amendement supprimant la baisse de 45 millions d'euros de la compensation versée par l'État aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) liée au relèvement du seuil de salariés à partir duquel les employeurs sont assujettis au VM opéré en 2016.

Outre le fait qu'elle revient sur l'engagement de l'État à compenser la perte de recettes subie par les AOM, cette baisse va à l'encontre des objectifs de développement des mobilités pourtant affichés par le Gouvernement, en privant les autorités organisatrices de ressources importantes pour financer leur politique de mobilité . Elle pénalise de surcroît les collectivités qui ont fait des efforts pour encourager l'installation d'entreprises et la création d'emplois.

Par ailleurs, elle s'ajouterait à la perte de recettes de 45 millions d'euros en 2023, puis de 30 millions d'euros par an à partir de 2024 que les autorités organisatrices connaîtront du fait de la réforme des modalités de franchissement des seuils sociaux prévue par la loi « PACTE » du 22 mai 2019 4 ( * ) .

II. UNE TAXATION DU TRANSPORT AÉRIEN ET ROUTIER SANS ACCOMPAGNEMENT DES SECTEURS À RÉALISER LEUR TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

A. UNE HAUSSE DE LA FISCALITÉ SUR LE TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES ET SUR LE TRANSPORT AÉRIEN MAL ANTICIPÉE ET MAL ACCOMPAGNÉE

Le projet de loi de finances traduit les annonces du Gouvernement de juillet dernier , à l'issue du 2 e Conseil de défense écologique, relatives à la fiscalité des transports - il prévoit, à compter du 1 er janvier 2020 :

- de diminuer de 2 centimes d'euros par litre le remboursement de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur le gazole dont bénéficient les entreprises de transport routier de marchandises 5 ( * ) , ce qui représenterait une hausse de la fiscalité sur ce secteur de 70 millions d'euros en 2020 et de 140 millions d'euros à partir de 2021 (article 19) ;

- d'augmenter les tarifs de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (dite taxe « Chirac »), entre 1,50 et 3 euros par billet pour les vols intérieurs et intra-européens, et entre 9 et 18 euros pour les vols hors Union européenne, ce qui représenterait un produit supplémentaire de 180 millions d'euros par an (article 20).

Ces deux recettes seraient affectées à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) pour financer la hausse de ses dépenses, qui s'élèveront à près de 3 milliards d'euros en 2020, conformément à la trajectoire prévue par le projet de loi d'orientation des mobilités.

S'agissant du transport routier de marchandises, la commission regrette que la solution retenue pour faire contribuer ce secteur au financement des infrastructures de transport repose essentiellement sur les entreprises françaises et non sur les transporteurs étrangers qui s'approvisionnent en carburant en dehors de France, et qui par conséquent utilisent et dégradent les infrastructures sans contribuer à leur entretien. Lors du lancement des Assises de la mobilité, la ministre chargée des transports avait pourtant indiqué son souhait de « faire payer les poids lourds qui transitent par notre réseau sans participer à son financement » 6 ( * ) , un objectif qui avait été rappelé à plusieurs reprises au cours des débats relatifs au projet de loi d'orientation des mobilités.

La commission déplore par ailleurs que cette augmentation de fiscalité ne soit pas assortie d'un plan permettant d'accompagner le secteur du transport routier de marchandises pour réaliser sa transition énergétique et recourir à des véhicules moins émetteurs de gaz à effet de serre . Il est essentiel que ce secteur, comme celui de l'automobile à travers le contrat stratégique de filière, puisse bénéficier d'une visibilité sur la trajectoire fiscale et règlementaire envisagée ainsi que sur les dispositifs d'accompagnement pouvant être mis en oeuvre.

S'agissant du transport aérien, plutôt que d'introduire une véritable « éco-contribution » comme annoncé, le Gouvernement a fait le choix de majorer les tarifs de la taxe sur les billets d'avion, qui ne prend qu'imparfaitement en compte l'impact environnemental des vols puisque ses tarifs varient en fonction de la classe du billet (affaire, économique, premium) et de la destination du vol (à l'intérieur ou à l'extérieur de l'Union européenne).

Comme pour le secteur routier, il est regrettable que cette hausse de la fiscalité ne soit pas assortie d'une politique d'aide à la réduction des émissions de CO 2 du transport aérien , à travers notamment le soutien au développement d'une filière de biocarburants.

Par ailleurs, alors que les vols vers la Corse et vers les territoires ultra-marins ainsi que les lignes d'aménagement du territoire devaient être exclus de la hausse de la taxe sur les billets d'avion dès son entrée en vigueur au 1 er janvier 2020 , cette exemption s'appliquera finalement à une date ultérieure fixée par arrêté, le temps que la Commission européenne examine la conformité de cette disposition avec le droit de l'Union européenne.

La Commission européenne n'ayant été officiellement saisie que le 29 octobre dernier de la mesure législative, il est à craindre que les vols concernés subissent la hausse de la taxation en janvier prochain , ce qui pénaliserait les voyageurs de ces territoires éloignés ou enclavés. Cela traduit le manque d'anticipation du Gouvernement , s'agissant d'une mesure qui a été annoncée au début du mois de juillet.

B. UNE SUPPRESSION PROGRESSIVE DU TAUX RÉDUIT DE TICPE SUR LE GAZOLE NON ROUTIER QUI TIENT COMPTE DES ERREURS DE L'AN PASSÉ

L'article 16 du PLF pour 2020 vise à supprimer progressivement, entre 2020 et 2022, le tarif réduit de TICPE sur le gazole non routier (GNR) 7 ( * ) , à l'exception de certains usages dont les usages agricoles.

Cette suppression est assortie de mesures d'accompagnement en faveur des secteurs concernés 8 ( * ) : possibilité de plein droit de majorer le prix des contrats en cours, afin de pouvoir répercuter la hausse de la fiscalité, création d'un dispositif de « suramortissement » pour l'acquisition d'engins non routiers utilisant des carburants alternatifs, application en contrepartie d'un taux très réduit de TICPE pour les travaux statiques ou de terrassement des secteurs économiques particulièrement exposés à la concurrence (manutention portuaire, industrie extractive etc.).

Les prévisions de recettes supplémentaires pour l'État sont estimées à 200 millions d'euros en 2020 et à 870 millions d'euros par an à partir de 2023.

La suppression du tarif réduit de TICPE sur le GNR était déjà prévue dans le projet de loi de finances de l'année dernière - avant d'être retirée à la suite du mouvement des « gilets jaunes » - mais de manière brutale, puisqu'elle n'était pas lissée dans le temps et qu'elle ne comportait pas de mesures d'accompagnement, ce qui aurait notamment conduit les entreprises de travaux publics à supporter une hausse de fiscalité très importante d'un seul coup sans pouvoir la répercuter. La commission avait adopté un amendement pour la rendre progressive, en l'étalant sur quatre ans (jusqu'en 2022) .

Il est donc satisfaisant de constater que le dispositif proposé cette année prend en compte les critiques formulées lors de la discussion budgétaire de l'année dernière, et laisse le temps aux acteurs de s'adapter à la hausse de la fiscalité .

III. UNE RÉFORME DU CRÉDIT D'IMPÔT POUR LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE QUI PRIVILÉGIE LA LOGIQUE BUDGÉTAIRE À L'AMBITION D'AUGMENTER LE NOMBRE DE LOGEMENTS RÉNOVÉS

L'article 4 du projet de loi de finances pour 2020 vise à transformer le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), qui permet aux contribuables de bénéficier d'une réduction de leur montant d'impôt sur le revenu ou d'un remboursement au titre des dépenses qu'ils effectuent pour l'amélioration de la qualité énergétique de leur habitation principale, en aide financière directement perceptible au moment des travaux .

Au 1 er janvier 2020, le CITE sera remplacé par une prime de transition énergétique pour les ménages modestes et très modestes , versée par l'Agence nationale de l'habitat (Anah) lors de la réalisation des travaux et fusionnée avec les aides du programme « Habiter Mieux Agilité » de l'Agence. Les autres ménages continueront de bénéficier du CITE jusqu'au 31 décembre 2020, à l'exception des ménages les plus aisés (déciles de revenus 9 et 10) qui en seront exclus .

Par ailleurs, la prime comme le CITE seront versés non pas en fonction du prix d'achat des équipements ou des travaux de rénovation réalisés, mais de leur performance énergétique - à chaque type de dépense correspond un forfait particulier.

Au 1 er janvier 2021, le CITE sera supprimé et la prime bénéficiera à tous les ménages modestes et intermédiaires.

La transformation du CITE en prime présente l'avantage d'apporter une aide financière aux ménages dès la réalisation des travaux , sans que ceux-ci aient besoin de faire une avance de trésorerie. Fusionnée avec les aides de l'Anah, la nouvelle prime permettra de solvabiliser de manière plus importante les ménages modestes et très modestes .

Toutefois, le choix de recentrer les aides à la rénovation énergétique sur les ménages modestes, en excluant les ménages des déciles 9 et 10 du CITE, pourrait conduire à freiner le rythme des travaux de rénovation énergétique, ce qui va à l'encontre de l'objectif de rénovation de 500 000 logements par an que s'est fixé le Gouvernement dans le plan rénovation énergétique des bâtiments adopté en 2018. En effet, comme le rappelle l'évaluation préalable annexée au projet de loi de finances, 50 % des travaux de rénovation éligibles au CITE ont été réalisés par ces ménages en 2017.

Lors de l'examen du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a par conséquent présenté un amendement permettant à ces ménages de bénéficier du CITE au titre des travaux d'isolation des parois opaques. La commission a souhaité aller plus loin, en permettant à ces ménages de continuer à bénéficier du crédit d'impôt lorsqu'ils réalisent des travaux de rénovation globale de leurs logements énergivores (étiquettes F ou G) permettant un gain énergétique important (passage à une étiquette A, B ou C).

Par ailleurs, la commission regrette que plusieurs restrictions aient été apportées au CITE dans une logique d'économie budgétaire incompatible avec l'ambition d'augmenter le nombre de logements rénovés . C'est pourquoi, elle a adopté des amendements visant à :

- maintenir la possibilité pour les locataires de bénéficier du CITE au titre des travaux de rénovation réalisés dans leur habitation principale ;

- réintroduire l'éligibilité au CITE des chaudières à gaz à très haute performance énergétique qui, lorsqu'elles remplacent des chaudières anciennes comme des chaudières au fioul, permettent des gains énergétiques importants ;

- augmenter le montant de l'aide pour le remplacement des fenêtres à simple vitrage par des fenêtres à double ou triple vitrage de 40 à 100 euros par équipement, considérant que ces travaux permettent de réaliser des gains énergétiques non négligeables et qu'ils peuvent constituer un point d'entrée dans la rénovation énergétique et conduire par la suite à la réalisation de travaux plus ambitieux.

IV. UNE RÉFORME DU MALUS AUTOMOBILE
SOURCE DE COMPLEXITÉ POUR LES PROFESSIONNELS
ET LES CONSOMMATEURS

À la suite du scandale provoqué par le « dieselgate », un nouveau cadre réglementaire européen relatif à la mesure des émissions des CO 2 des véhicules a été élaboré. Le nouveau cycle d'essai WLTP (« procédure d'essai mondiale pour les voitures particulières et véhicules utilitaires légers »), qui remplace la norme NEDC (« nouveau cycle européen de conduite »), permet de mieux mesurer les émissions des véhicules, en étant plus proche de la conduite en conditions réelles, et conduit à réévaluer de 25 % en moyenne le niveau de ces émissions.

Sans modification du cadre fiscal applicable aux véhicules, ce changement conduirait à une augmentation importante de la fiscalité et en particulier du malus automobile . C'est pourquoi l'article 18 du projet de loi prévoit de réviser le barème des taxes applicables aux véhicules.

Il procède par ailleurs à une simplification du cadre fiscal en fusionnant la taxe fixe régionale et la taxe de gestion lors de la délivrance du certificat d'immatriculation, et en intégrant dans le barème du malus automobile trois autres écotaxes sur les véhicules polluant s (taxe CO 2 pour les véhicules d'occasion, taxe annuelle sur les véhicules particuliers les plus polluants, malus sur les voitures puissantes), ce qui conduit à renforcer le montant du malus sur les véhicules les plus émetteurs .

Par ailleurs, cet article durcit l'ensemble du barème du malus automobile en abaissant le seuil d'émissions à partir duquel il s'applique de 117 à 110 grammes de CO 2 par kilomètre , et prévoit que ce barème soit remplacé au cours du premier semestre 2020 - à une date fixée par décret
- par un nouveau barème calculé selon la norme WLTP 9 ( * ) , qui s'appliquerait à partir d'un seuil d'émissions de 138 grammes de CO 2 par kilomètre .

Bien qu'elle s'applique à partir d'un niveau d'émissions plus élevé, cette nouvelle grille du malus ne permettra pas d'assurer la neutralité fiscale du changement de norme pour l'ensemble des véhicules . En effet, alors que dans le système NEDC, la valeur des émissions est mesurée par familles de véhicules, sur la base des émissions du véhicule représentatif de cette famille le plus favorable, la norme WLTP conduit à attribuer un niveau d'émissions à chaque véhicule, en fonction de ses caractéristiques et de ses équipements optionnels.

Le passage en cours d'année - à une date inconnue - au système WLTP conduira donc à une augmentation du montant du malus sur certains véhicules, ce qui est source de complexité pour les professionnels et pour les consommateurs. Plusieurs mois pouvant s'écouler entre le moment où la commande d'un véhicule est réalisée et la date de son immatriculation - date à laquelle le malus est appliqué -, le consommateur n'aura en effet pas de visibilité sur le montant effectif du malus qu'il devra acquitter.

C'est pourquoi la commission a adopté un amendement visant à reporter au 1 er janvier 2021 l'entrée en vigueur de la norme WLTP .

Par ailleurs, la commission est opposée à la suppression du compte d'affectation spéciale « aides à l'acquisition de véhicules propres » prévue par l'article 33 du projet de loi de finances 10 ( * ) . Bien que cette suppression permette de faciliter l'exécution budgétaire 11 ( * ) , elle rend moins lisible les montants dédiés au dispositif « bonus-malus », en mettant fin à l'affectation directe de la recette du malus au soutien à l'évolution du parc automobile. Par conséquent, la commission a adopté un amendement pour maintenir ce compte d'affectation spéciale .

Enfin, la commission a adopté un amendement visant à encourager l'acquisition de véhicules à faibles émissions par les entreprises , en augmentant les montants pouvant être déduits de l'impôt qu'elles acquittent au titre de l'amortissement de leurs véhicules à faibles et très faibles émissions.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 13 novembre 2019, la commission a examiné le rapport pour avis sur les mesures fiscales relatives à l'environnement et aux transports de la première partie du projet de loi de finances pour 2020.

M. Jean-François Longeot , rapporteur. - Il me revient de vous présenter les mesures fiscales relatives à l'environnement et aux transports du projet de loi de finances pour 2020 sur lesquelles notre commission s'est saisie pour avis.

Comme chaque année, le projet de loi de finances comporte un certain nombre de dispositions directement liées aux politiques publiques que nous suivons. Celui-ci ne déroge pas à la règle, puisqu'il contient plusieurs mesures importantes relatives aux transports et à la rénovation énergétique des bâtiments.

S'agissant de la fiscalité des transports, les quatre articles que je vais vous présenter (16, 18, 19 et 20) visent tous, d'une manière ou d'une autre, à augmenter les taxes sur le transport routier et sur le transport aérien.

Tout d'abord, le projet de loi de finances traduit les annonces faites par le Gouvernement en juillet dernier, à l'issue du deuxième Conseil de défense écologique, en prévoyant une diminution de 2 centimes d'euros par litre du remboursement de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur le gazole dont bénéficient les entreprises de transport routier de marchandises - ce qui représenterait une hausse de la fiscalité sur ce secteur de 70 millions d'euros l'année prochaine et de 140 millions d'euros à partir de 2021 - et une augmentation des tarifs de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (dite taxe « Chirac »), entre 1,50 et 3 euros par billet pour les vols intérieurs et intra-européens, et entre 9 et 18 euros pour les vols hors Union européenne, pour un produit supplémentaire de 180 millions d'euros par an.

Cette hausse des taxes sur le transport aérien et le transport routier permet de financer l'augmentation du budget de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), qui s'élèvera à près de 3 milliards d'euros l'année prochaine, conformément à la trajectoire prévue par le projet de loi d'orientation des mobilités.

Mais l'on peut regretter que cette hausse de la fiscalité soit conçue uniquement dans une logique de rendement budgétaire, pour pallier le manque de moyens de l'État pour financer les infrastructures de transports, et qu'elle ne s'inscrive pas dans une réflexion de plus long terme sur la transformation de ces secteurs, pour les accompagner à réaliser leur transition énergétique en s'orientant vers des technologies moins émettrices de gaz à effet de serre.

Les transporteurs routiers comme les compagnies aériennes que j'ai rencontrés m'ont dit qu'ils étaient prêts à supporter une hausse de la fiscalité, à condition que les recettes soient utilisées pour les aider à réduire leurs émissions.

Il me paraît essentiel que le secteur du transport routier de marchandises puisse, comme celui de l'automobile, bénéficier d'un contrat de filière lui donnant de la visibilité sur l'évolution du cadre fiscal et réglementaire à venir et sur les dispositifs de soutien mis en oeuvre en parallèle.

Par ailleurs, je regrette que la solution retenue pour faire contribuer ce secteur au financement des infrastructures de transport repose essentiellement sur les entreprises françaises et non sur les transporteurs étrangers qui s'approvisionnent en carburant en dehors de France, et qui par conséquent continueront à utiliser et à dégrader les infrastructures sans jamais contribuer à leur entretien. Alors même que tout l'enjeu identifié lors des Assises de la mobilité était de faire payer les poids lourds étrangers en transit... c'est donc une véritable occasion manquée !

S'agissant du transport aérien, alors que les vols vers la Corse et vers les territoires ultra marins ainsi que les lignes d'aménagement du territoire devaient être exclus de la hausse de la taxe sur les billets d'avion dès son entrée en vigueur au 1 er janvier 2020, cette exemption s'appliquera finalement à une date ultérieure fixée par arrêté, le temps que la Commission européenne examine la conformité de cette disposition avec le droit de l'Union européenne. Mais la Commission européenne n'a été officiellement saisie que le 29 octobre dernier, il est donc à craindre que ces vols subissent la hausse de la taxation en janvier prochain, ce qui pénaliserait les voyageurs de ces territoires éloignés ou enclavés. Il y a donc eu un vrai manque d'anticipation du Gouvernement, s'agissant d'une mesure qui a été annoncée au début du mois de juillet...

Le projet de loi de finances prévoit par ailleurs de supprimer progressivement, entre 2020 et 2022, le tarif réduit de TICPE sur le gazole non routier (GNR), à l'exception de certains usages dont les usages agricoles.

Cette suppression est assortie de mesures d'accompagnement en faveur des secteurs concernés, comme la possibilité de plein droit de majorer le prix des contrats en cours, afin de pouvoir répercuter la hausse de la fiscalité, la création d'un dispositif de « suramortissement » pour l'acquisition d'engins non routiers utilisant des carburants alternatifs, ou encore l'application en contrepartie d'un taux très réduit de TICPE pour les travaux statiques ou de terrassement des secteurs économiques particulièrement exposés à la concurrence, comme la manutention portuaire ou l'industrie extractive.

La suppression du tarif réduit de TICPE sur le GNR était déjà prévue dans le projet de loi de finances de l'année dernière - avant d'en être retirée à la suite du mouvement des « gilets jaunes » -, mais elle devait s'appliquer de manière brutale, puisqu'elle n'était pas lissée dans le temps et qu'elle ne comportait pas de mesures d'accompagnement. Nous avions par conséquent adopté en commission un amendement pour la rendre progressive, en l'étalant sur quatre ans.

Cette année, le dispositif proposé prend en compte les critiques formulées l'année dernière, puisqu'il laisse le temps aux acteurs de s'adapter à la hausse de la fiscalité. Cela montre qu'en prenant le temps de la concertation, il est possible d'aboutir à des solutions de compromis acceptables !

J'en termine s'agissant des transports par l'article 18, qui prévoit une refonte du cadre fiscal applicable aux véhicules à moteur. À la suite du scandale provoqué par le « dieselgate », un nouveau cadre réglementaire européen relatif à la mesure des émissions des CO 2 des véhicules a été élaboré. Le nouveau cycle d'essai WLTP permet de mieux mesurer les émissions des véhicules, en étant plus proche de la conduite en conditions réelles, et conduit à réévaluer de 25 % en moyenne le niveau de ces émissions.

L'article 18 prévoit par conséquent de réviser le barème des taxes applicables aux véhicules pour tenir compte de cette augmentation des émissions constatées, et en profite pour simplifier le paysage fiscal en fusionnant la taxe fixe régionale et la taxe de gestion perçues lors de la délivrance du certificat d'immatriculation, et en intégrant dans le barème du malus automobile trois autres écotaxes sur les véhicules polluants (la taxe CO 2 pour les véhicules d'occasion, la taxe annuelle sur les véhicules particuliers les plus polluants, et le malus sur les voitures puissantes).

Par ailleurs, cet article durcit le barème du malus automobile en abaissant le seuil d'émissions à partir duquel il s'applique de 117 à 110 grammes de CO 2 par kilomètre. Le malus maximum passera en conséquence de 10 500 à 12 500 euros.

Enfin, le projet de loi de finances prévoit de supprimer le compte d'affectation spéciale « bonus-malus ». Or ce compte est un gage de transparence, puisqu'il affecte directement la recette du malus aux dispositifs de soutien à l'évolution du parc automobile que sont le bonus et la prime à la conversion. Par conséquent, je vous proposerai un amendement pour le maintenir.

Je viens maintenant à la réforme du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE). L'article 4 du PLF vise à transformer progressivement ce crédit d'impôt en aide financière directement perceptible directement au moment des travaux.

Le 1 er janvier 2020, le CITE sera remplacé par une prime de transition énergétique pour les ménages modestes et très modestes, versée par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) lors de la réalisation des travaux et fusionnée avec les aides du programme « Habiter Mieux Agilité » de l'Agence. Les autres ménages continueront de bénéficier du CITE jusqu'au 31 décembre 2020 à l'exception des ménages les plus aisés - déciles de revenus 9 et 10 - qui en seront exclus.

À partir du 1 er janvier 2021, le CITE sera supprimé et la prime bénéficiera à tous les ménages modestes et intermédiaires.

Cette réforme, annoncée depuis plusieurs années, a la particularité de simplifier les choses tout en les complexifiant !

La transformation du CITE en prime présente l'avantage d'apporter une aide financière aux ménages dès la réalisation des travaux, sans que ceux-ci aient besoin de faire une avance de trésorerie, et permet de solvabiliser davantage les ménages modestes et très modestes.

Mais en même temps, elle rend le dispositif plus complexe, puisque désormais les aides à la rénovation ne seront plus calculées en appliquant un taux unique au prix des travaux réalisés, mais seront modulées en fonction de leur performance énergétique. Ainsi, à chaque type de travaux correspondra un montant d'aide différent, montant qui variera également en fonction des ressources des ménages.

Par ailleurs, le choix de recentrer les aides à la rénovation énergétique sur les ménages modestes, en excluant les ménages des déciles 9 et 10, pourrait conduire à freiner le rythme des travaux de rénovation énergétique, ce qui irait à l'encontre de l'objectif de rénovation de 500 000 logements par an que s'est fixé le Gouvernement. En effet, 50 % des travaux de rénovation éligibles au CITE ont été réalisés par ces ménages en 2017.

Lors de l'examen du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a par conséquent présenté un amendement permettant à ces ménages de bénéficier du CITE au titre des travaux d'isolation des parois opaques. Je vous proposerai d'aller plus loin, en permettant à ces ménages de continuer à bénéficier du crédit d'impôt lorsqu'ils réalisent des travaux de rénovation globale de leurs logements énergivores - étiquettes F ou G - permettant un gain énergétique important
- passage à une étiquette A, B ou C.

Par ailleurs, je vous proposerai plusieurs amendements pour revenir sur des restrictions qui sont apportées au CITE l'année prochaine, dans une logique budgétaire qui n'est pas compatible avec l'ambition d'accélérer la rénovation énergétique des bâtiments.

Pour terminer, je vous proposerai tout à l'heure, conjointement avec Didier Mandelli, deux amendements directement liés à nos travaux récents sur le projet de loi d'orientation des mobilités. Le premier vise à réintroduire un dispositif de financement au profit des communautés de communes exerçant la compétence d'organisation des mobilités, en leur allouant une fraction de TICPE. Le second vise à supprimer la baisse de 45 millions d'euros de la compensation que l'État verse aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM), à la suite du relèvement du seuil de salariés à partir duquel les employeurs sont assujettis au versement mobilité opéré en 2016.

M. Claude Bérit-Débat . - Merci monsieur le rapporteur pour cette présentation. Nous partageons un certain nombre de vos analyses, notamment sur le fait que l'augmentation de la fiscalité sur les transports routiers et aériens ne permettra pas de financer des mesures pour aider ces secteurs à réduire leurs émissions.

Nous avons déjà dénoncé, lors de l'examen du projet de loi d'orientation des mobilités, la distorsion de concurrence que subissent les transporteurs nationaux qui supportent cette fiscalité par rapport à leurs homologues étrangers.

Nous soutiendrons les deux amendements que vous proposez en concertation avec M. Mandelli sur le financement des AOM qui vont dans le même sens que ceux que nous avons déposés lors de l'examen du projet de loi d'orientation des mobilités.

S'agissant de la transformation du CITE en prime prévue à l'article 4, nous saluons cette proposition, mais nous déplorons la réduction de l'enveloppe budgétaire qui lui est consacrée et les effets que cela va engendrer sur l'atteinte des objectifs de rénovation des logements.

En ce qui concerne la suppression progressive des tarifs de TICPE pour les carburants non routiers, nous partageons les nombreuses inquiétudes des acteurs concernés. La hausse brutale du prix risque d'avoir des répercussions fortes pour les entreprises. Nous allons donc proposer une suppression plus douce sur trois ans en reprenant l'amendement de nos collègues socialistes de l'Assemblée nationale.

Sur l'article 18 et le durcissement du barème du malus écologique, nous approuvons le principe mais nous nous inquiétons du reste à charge pour les ménages modestes et souhaitons qu'ils soient davantage accompagnés lors de l'achat de véhicules propres.

Par ailleurs, le groupe socialiste défendra en séance publique un amendement visant à réduire à 5,5 % la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les transports du quotidien.

M. Olivier Jacquin . - J'apprécie le rapport qui vient d'être présenté. On peut se satisfaire que le principe « pollueur-payeur » avance un peu, même si cette avancée ne concerne pas le transport maritime.

Le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires a montré qu'il y avait un taux de fiscalité verte important dans notre pays, la question est de savoir comment utiliser ces recettes et comment accompagner les ménages en situation de fragilité.

L'augmentation de la taxation des poids lourds créera une distorsion de concurrence supplémentaire à l'égard des transporteurs nationaux. Il serait intéressant que notre commission se déplace un jour à Berchem au Luxembourg, où se trouve la plus grande station-service du monde, pour constater le pillage fiscal qui s'y organise au détriment de notre pays. C'est pour cette raison que j'ai proposé que l'écotaxe en Alsace soit également instaurée sur l'A 31, qui descend du Luxembourg vers le sud.

Plutôt que d'accentuer cette distorsion, une piste serait d'appliquer une taxe carbone aux donneurs d'ordres, afin de les inciter à recourir davantage aux transports les plus propres. La chaîne administrative est prête et ce système est beaucoup plus vertueux que celui proposé par le Gouvernement.

M. Jean-Pierre Corbisez . - Le compte d'affectation spéciale (CAS) « bonus-malus » récupère les malus et alimente le bonus et la prime à la conversion. L'année prochaine, les aides s'élèveront à 800 millions d'euros, dont la moitié au titre du bonus et l'autre moitié de la prime à la reconversion. Mais le bonus est réservé aux véhicules 100 % électriques et ne bénéficie pas aux véhicules à hydrogène.

Comment les ménages modestes peuvent-ils s'acheter un véhicule électrique qui coûte au moins 30 000 euros avec une prime à la reconversion de 5 000 euros seulement ?

Le compte d'affectation spéciale va être supprimé et ses lignes budgétaires noyées dans la mission « Écologie, mobilité et développement durable ». Le risque est donc que les recettes du malus ne servent pas qu'à financer la vente de véhicules propres.

Par ailleurs, comme l'a dit le rapporteur, nous allons, d'ici quelques semaines, voter l'application d'une nouvelle grille de malus. Le projet de loi de finances prévoit de réduire le seuil d'application du malus de 117 à 110 grammes de CO 2 par kilomètre.

Le Gouvernement entend appliquer au 1 er mars une autre grille du malus, calculée en fonction de la norme WLTP qui conduit à réévaluer à la hausse de 25 % les émissions des véhicules. Ainsi, un ménage achetant un véhicule au mois de janvier avec un malus écologique de 200 euros pourra, lorsqu'il le récupère au mois de mars, devoir acquitter un malus de 600 euros. En effet, l'application du malus écologique est basée sur la date d'immatriculation et non la date de commande du véhicule. J'invite donc mes collègues à bien regarder cet article 18 et à maintenir le compte d'affectation spéciale.

M. Guillaume Chevrollier . - Vous avez fait état d'une augmentation des recettes issues de la fiscalité écologique avec le constat que ces recettes vont alimenter le budget général et non des mesures écologiques. Comment améliorer le contrôle parlementaire pour permettre d'orienter effectivement ces financements vers de telles mesures ?

Je voudrais signaler que les professionnels du bâtiment et des travaux publics, surtout les petites entreprises, sont en grande difficulté malgré le lissage sur plusieurs années de la suppression du tarif réduit de TICPE sur le GNR.

Je souhaite également évoquer la contribution « éco-transport » déjà présentée par M. Jacquin. En tant que rapporteur, avez-vous entendu les porteurs de cette solution alternative qui consiste à faire payer les chargeurs ? Aujourd'hui, nous disposons des moyens techniques pour taxer les donneurs d'ordres, ce qui permettrait de faire prendre conscience du coût environnemental de la solution de transports. De plus, cela induirait des ressources financières intéressantes pour soutenir la rénovation des infrastructures. Je pense que c'est une solution intéressante et à creuser.

M. Guillaume Gontard . - La taxation sur l'aérien va dans le bon sens et je pense que l'on pourrait l'augmenter davantage. Sur la question du malus automobile, je trouve qu'on arrive au bout d'un système qui ne fonctionne pas, car il ne permet pas de baisser les émissions de CO 2 : les ventes de véhicules SUV ont été multipliées par quatre depuis 2010 avec des véhicules 50 % plus lourds et 80 % des véhicules ne supportent pas de malus écologique ou alors un malus inférieur à 500 euros. Par conséquent, je pense qu'il faut réfléchir à une taxe sur le poids des véhicules.

Sur le CITE, nous avions déjà fait des propositions dans le sens de sa transformation en prime les années précédentes, mais nous regrettons la baisse du budget qui lui est consacré. Pour rappel, en 2017, son montant s'élevait à 1,6 milliard d'euros. Nous sommes loin du compte en matière de rénovation et l'objectif de 500 000 logements rénovés par an paraît inatteignable.

Pour terminer, nous soutenons la mesure de la TVA à 5,5 % sur les transports du quotidien. Cette proposition est d'ailleurs une des recommandations du rapport de la mission d'information sur la gratuité des transports.

M. Benoît Huré . - Je suis en phase avec l'essentiel des propositions que notre rapporteur fait pour amender ce texte.

Je reste dans cette approche pragmatique : certes, il y a l'urgence climatique, mais il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Dans cette commission, nous avons une sensibilité aux enjeux climatiques. Mais je reste très réticent à certaines mesures d'application franco-française qui constituent des distorsions de concurrence par rapport aux autres pays européens, notamment la taxation des transports de marchandises ou des entreprises de BTP. Il convient d'agir au niveau européen plutôt qu'au niveau français. Les populations européennes sont plutôt favorables à ce genre de mesures ; il manque uniquement de la volonté politique.

Je suis également favorable à la TVA à 5,5 % sur les transports du quotidien.

Sur l'affectation de la fiscalité environnementale au budget général, je n'ai pas d'état d'âme : c'est toujours le même contribuable qui paye, qu'il s'agisse de taxes environnementales ou d'autres taxes, et le budget général sert aussi à financer d'autres politiques publiques.

M. Michel Vaspart . - Les engins de travaux publics sont fabriqués aux États-Unis ; je ne suis pas sûr qu'ils puissent être alimentés en carburants alternatifs.

Lors de l'audition du président suppléant du Conseil des prélèvements obligatoires, j'ai été étonné qu'il évoque un montant de 87 milliards d'euros de prélèvements obligatoires au titre de la fiscalité verte. C'est deux fois plus que l'Allemagne ou que l'Espagne et 55 % fois plus que le Royaume-Uni. Si nous continuons sur cette voie, nous allons connaître des problèmes : n'oublions pas que le mouvement des « gilets jaunes » a été déclenché en réaction à l'augmentation de la fiscalité. Il faut donc faire très attention aux propositions que nous sommes amenés à faire au Sénat.

M. Hervé Maurey , président . - Merci au rapporteur pour la qualité de son travail et, par avance, pour les amendements déposés visant à donner des moyens financiers aux intercommunalités afin qu'elles puissent réellement exercer leur compétence « mobilité ».

La fiscalité écologique est nécessaire pour assurer la transition écologique mais elle doit, d'une part, se faire sans augmentation globale de la pression fiscale et être réellement affectée à la transition écologique, de manière transparente et, d'autre part, faire l'objet d'un accompagnement social et territorial. En effet, le poids de la transition écologique diffère selon le niveau de ressources des ménages ainsi que selon les milieux ruraux et urbains.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis . - Il est important de discuter de la fiscalité environnementale au niveau européen, compte tenu des enjeux en termes de concurrence. Le ministre de l'économie a récemment rencontré ses homologues européens afin d'aborder la question de la taxation de l'aérien. Je crois qu'il faut éviter que la fiscalité écologique ne devienne un poids économique.

Pour répondre à M. Chevrollier, effectivement, la proposition d'instaurer une contribution sur les chargeurs est intéressante mais elle s'avère complexe à mettre en place. En effet, une telle taxe pourrait poser un problème d'équité fiscale, dans la mesure où il serait difficile de la percevoir lorsque le bénéficiaire est situé hors de France. Je vous invite à déposer un amendement en séance afin d'ouvrir le débat sur ce sujet et d'inviter le Gouvernement à apporter une réponse claire sur ce sujet.

Je signale à M. Bérit-Débat que les amendements que je vous proposerai permettent de répondre à certaines de vos préoccupations.

M. Hervé Maurey , président . - Avant que le rapporteur ne présente ses amendements, je vous signale que le débat sur la première partie du projet de loi de finances aura lieu vendredi 22, samedi 23 et lundi 25 novembre.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis . - Mon premier amendement vise à intégrer dans le projet de loi de finances un dispositif de financement au profit aux communautés de communes qui exerceront la compétence d'organisation des mobilités mais qui, en l'absence de services réguliers, ne percevront pas de versement mobilité, en leur allouant une fraction de TICPE pour financer la mise en place de services de mobilité.

Cette fraction serait calculée de manière à ce que les communautés de communes perçoivent un montant de 10 euros par habitant, c'est-à-dire le montant moyen que coûte la mise en place d'un « bouquet de services de mobilité », comme du transport à la demande, du covoiturage, ou des vélos en libre-service.

L'amendement DEVDUR.1 est adopté.

L'article 4 du projet de loi prévoit, dans le cadre de la réforme du CITE, de supprimer la possibilité pour les locataires et les occupants à titre gratuit de bénéficier du crédit d'impôt au titre des travaux de rénovation énergétique qu'ils réalisent dans leur habitation principale.

Une telle restriction va décourager la rénovation des logements en location, qui font pourtant l'objet d'un nombre de rénovations insuffisant.

D'après une enquête de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) publiée en octobre 2018, 24 % des travaux de rénovation réalisés entre 2014 et 2016 dans des maisons individuelles ont été menés par des locataires, et 76 % par des propriétaires occupants.

C'est pourquoi, l'amendement que je vous propose vise à maintenir l'éligibilité des locataires et des occupants à titre gratuit au CITE, afin de continuer à encourager la réalisation de travaux dans les logements loués.

L'amendement DEVDUR.2 est adopté.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis . - L'amendement DEVDUR.3 vise à maintenir l'éligibilité des chaudières gaz à très haute performance énergétique au CITE.

L'article 4 du projet de loi prévoit que seuls les ménages modestes et très modestes pourront continuer à bénéficier d'une aide à l'achat de tels équipements, à travers la prime de transition énergétique.

Or les chaudières gaz à très haute performance énergétique, lorsqu'elles remplacent des chaudières anciennes comme des chaudières au fioul, permettent des gains énergétiques importants, et constituent, notamment dans les habitats collectifs, une solution indiquée là où les chaudières à biomasse ou à énergie solaire peuvent représenter des investissements coûteux ou inadaptés.

L'amendement DEVDUR.3 est adopté.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis . - Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, l'article 4 du projet de loi de finances recentre les aides à la rénovation énergétique sur les ménages modestes, en excluant les ménages des déciles 9 et 10 du CITE.

Or cela pourrait conduire à freiner le rythme des travaux de rénovation énergétique l'année prochaine, puisque, comme le rappelle l'évaluation préalable annexée au projet de loi de finances, 50 % des travaux de rénovation éligibles au CITE ont été réalisés par ces ménages en 2017.

Lors de l'examen du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a présenté un amendement permettant à ces ménages de bénéficier du CITE au titre des travaux d'isolation des parois opaques.

Cet amendement propose d'aller plus loin, en permettant à ces ménages de continuer à bénéficier du crédit d'impôt lorsqu'ils réalisent des travaux de rénovation globale de leurs logements énergivores (étiquettes F ou G) permettant un gain énergétique important (passage à une étiquette A, B ou C).

M. Claude Bérit-Débat . - Mon groupe votera contre cet amendement.

L'amendement DEVDUR.4 est adopté.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis . - Cet amendement vise à augmenter de 40 à 100 euros par équipement le montant du CITE dont les ménages peuvent bénéficier lorsqu'ils remplacement des fenêtres simple vitrage par des fenêtres à double ou triple vitrage.

En effet, ces travaux permettent de réaliser des gains énergétiques non négligeables lorsque les logements sont vétustes et peuvent constituer un point d'entrée des ménages dans la rénovation énergétique et conduire par la suite à la réalisation de travaux plus ambitieux.

Mme Michèle Vullien . - Je voterai contre cet amendement car lorsque les travaux portent uniquement sur le remplacement des fenêtres, cela ne sert à rien.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis. - L'Ademe a pourtant montré dans son étude que le remplacement du simple vitrage par du double vitrage permet des gains énergétiques importants.

Mme Michèle Vullien . - C'est faux !

M. Guillaume Gontard . - Dans le même sens de ce qui vient d'être dit, je pense qu'il faut encourager les rénovations globales des logements. Car même si les travaux isolés permettent un gain thermique, ils peuvent poser d'autres problèmes, notamment en termes de ventilation des logements.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis. - Oui, mais il est tout de même important de les faire.

M. Hervé Maurey , président. - J'observe que le Gouvernement a tenu, à cet égard, des propos contradictoires. La première année, on nous a expliqué que les travaux de remplacement des fenêtres étaient inutiles et désormais il semblerait que le discours inverse soit tenu.

L'amendement DEVDUR.5 est adopté.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis. - Cet amendement vise à augmenter les montants pouvant être déduits par les entreprises de l'impôt qu'elles acquittent au titre de l'amortissement de leurs véhicules à faibles et très faibles émissions, en portant le plafond du prix d'acquisition à partir duquel les charges ne sont pas déductibles pour l'établissement de l'impôt de 30 000 à 33 000 euros pour les véhicules à très faibles émissions et de 20 300 à 24 300 euros pour les véhicules à faibles émissions.

Il s'agit d'inciter fiscalement les entreprises à acquérir des véhicules électriques et hybrides afin d'accélérer le verdissement du parc automobile français.

L'amendement DEVDUR.6 est adopté.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis. - Comme je l'indiquais tout à l'heure, l'article 18 du projet de loi de finances prévoit d'adapter le cadre fiscal relatif aux véhicules à moteur suite au passage à la nouvelle réglementation en matière d'émissions WLTP.

Initialement envisagé au 1 er janvier 2020, le passage à la norme WLTP doit finalement être repoussé le temps d'adapter le système d'immatriculation des véhicules et de mettre en place un nouveau certificat de conformité électronique. L'article 18 prévoit ainsi une entrée en vigueur à une date fixée par arrêté, et au plus tard le 1 er juillet 2020.

Par conséquent, le barème du malus applicable au 1 er janvier 2020 sera remplacé au cours du premier semestre 2020 par un nouveau barème.

Or, bien qu'il s'applique à partir d'un niveau d'émissions plus élevé, ce nouveau barème ne permettra pas d'assurer la neutralité fiscale du changement de norme pour l'ensemble des véhicules. En effet, alors que dans l'ancien système, la valeur des émissions était mesurée par familles de véhicules, sur la base des émissions du véhicule représentatif de cette famille le plus favorable, la norme WLTP conduit à attribuer un niveau d'émissions à chaque véhicule, en fonction de ses caractéristiques.

Le passage en cours d'année au système WLTP conduira donc à une augmentation du montant du malus sur certains véhicules, ce qui sera source de complexité pour les professionnels et pour les consommateurs.

C'est pourquoi, le présent amendement vise à reporter au 1 er janvier 2021 l'entrée en vigueur de la norme WLTP.

L'amendement DEVDUR.7 est adopté.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis. - Cet amendement vise à supprimer la baisse de 45 millions d'euros de la compensation que l'État verse aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM), à la suite du relèvement du seuil de salariés à partir duquel les employeurs sont assujettis au versement mobilité opéré en 2016.

Outre le fait qu'elle revient sur l'engagement de l'État à compenser la perte de recettes subie par les AOM, cette baisse va à l'encontre des objectifs de développement des mobilités affichés par le Gouvernement, en privant les autorités organisatrices de ressources importantes pour financer leur politique de mobilité, et elle pénalise les collectivités qui ont fait des efforts pour encourager l'installation d'entreprises et la création d'emplois.

L'amendement DEVDUR.8 est adopté.

M. Jean-François Longeot , rapporteur pour avis. - L'article 33 du projet de loi de finances entend supprimer le compte d'affectation spéciale « aides à l'acquisition de véhicules propres », afin d'intégrer les dépenses relatives au bonus automobile et à la prime à la conversion au sein du budget général de l'État.

Cette suppression rend toutefois moins lisible les montants dédiés au dispositif « bonus-malus », en mettant fin à l'affectation directe de la recette du malus au soutien à l'évolution du parc automobile.

L'amendement que je vous propose vise donc à maintenir le compte d'affectation spéciale « bonus-malus ».

L'amendement DEVDUR.9 est adopté.

La commission a autorisé la publication du rapport pour avis.

LES AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Amendement DEVDUR-1

Article additionnel après l'article 2

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Une fraction du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques prévue à l'article 265 du code des douanes revenant à l'État est attribuée annuellement aux communautés de communes qui exercent la compétence d'organisation de la mobilité en application du III de l'article 1 er de la loi n°       du       d'orientation des mobilités et qui n'ont pas institué le versement mentionné à l'article L. 2333-66 du code général des collectivités territoriales.

Cette fraction est calculée de manière à ce que le montant versé aux communautés de communes s'élève à 10 euros par habitant.

II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Objet

Lors de l'examen du projet de loi d'orientation des mobilités, le Sénat s'était alarmé de l'absence de financement prévu pour permettre aux communautés de communes qui se saisiront de la compétence d'organisation des mobilités de développer une offre de transports dans les territoires qui en sont aujourd'hui dépourvus.

Dans la mesure où la plupart de ces intercommunalités ne mettront pas en place des services réguliers de transport, compte tenu du coût que de tels services représentent, elles ne bénéficieront pas des recettes du versement mobilité. Or, sans ressources dédiées et pérennes, les communautés de communes ne pourront pas mettre en place des services de mobilité, pourtant essentiels pour lutter contre les fractures sociales et territoriales et réduire les émissions de gaz à effet de serre.

En l'état actuel, le projet de loi de finances ne comporte aucune mesure permettant d'assure un financement dédié et pérenne de cette compétence.

C'est pourquoi, le présent amendement vise à attribuer aux communautés de communes qui exercent la compétence d'organisation des mobilités, et qui ne perçoivent pas de versement mobilité, une fraction de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) pour financer la mise en place de services de mobilité, d'un montant de 10 euros par habitant, c'est-à-dire le montant moyen que coûte la mise en place d'un « bouquet de services de mobilité » (transport à la demande, plateforme d'autopartage ou de covoiturage, vélos en libre-service, etc.).

Amendement DEVDUR-2

Article 4

I.- Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

II.- Alinéa 34, première phrase

Après le mot :

propriétaire

insérer les mots :

, locataire ou occupant à titre gratuit,

III. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

... - L'extension du crédit d'impôt pour la transition énergétique aux locataires et occupants à titre gratuit s'applique au crédit d'impôt prévu à l'article 200 quater du code général des impôts, sans incidence sur la définition de la prime mentionnée au II de l'article 4 du projet de loi de finances pour 2020.

... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'extension du crédit d'impôt pour la transition énergétique aux locataires et occupants à titre gratuit est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Objet

L'article 4 du projet prévoit que le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), qui sera maintenu en 2020 pour les ménages aux revenus intermédiaires, ne pourra plus bénéficier aux locataires et aux occupants à titre gratuit réalisant des travaux de rénovation énergétique dans leur habitation principale.

Une telle restriction pourrait décourager la rénovation des logements en location, qui font pourtant l'objet d'un nombre de rénovations insuffisant.

D'après l'enquête TREMI (travaux de rénovation énergétique des maisons individuelles) de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) publiée en octobre 2018, 24 % des travaux de rénovation réalisés entre 2014 et 2016 dans des maisons individuelles ont été menés par des locataires, et 76 % par des propriétaires occupants.

Par conséquent, le présent amendement prévoit de maintenir l'éligibilité des locataires et des occupants à titre gratuit au CITE au titre des travaux de rénovations qu'ils réalisent dans leur habitation principale.

Amendement DEVDUR-3

Article 4

I.- Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

- au 1°, les mots : « à très haute performance énergétique, à l'exception de celles utilisant le fioul comme source d'énergie », sont remplacés par les mots : « gaz à très haute performance énergétique » ;

II.- Alinéa 52, tableau, après la treizième ligne

Insérer une ligne ainsi rédigée :

«

Chaudières gaz à très haute performance énergétique

600 €

(Sans objet)

»

III. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

... - L'extension du crédit d'impôt pour la transition énergétique aux dépenses d'acquisition de chaudières gaz à très haute performance énergétique s'applique au crédit d'impôt prévu à l'article 200 quater du code général des impôts, sans incidence sur la définition de la prime mentionnée au II de l'article 4 du projet de loi de finances pour 2020.

... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'extension du crédit d'impôt pour la transition énergétique aux dépenses d'acquisition de chaudières gaz à très haute performance énergétique est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Objet

Cet amendement vise à maintenir l'éligibilité des chaudières gaz à très haute performance énergétique (THPE) au crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE).

L'article 4 du projet de loi prévoit que les ménages aux revenus intermédiaires ne pourront bénéficier du CITE que pour les chaudières fonctionnant au bois ou autres biomasses ou à l'énergie solaire thermique.

Seuls les ménages modestes et très modestes pourront continuer à bénéficier d'une aide à l'achat de chaudières gaz à THPE, à travers de la prime de transition énergétique.

Or de tels équipements, lorsqu'ils remplacent des chaudières anciennes comme des chaudières au fioul, permettent des gains énergétiques importants, et constituent, notamment dans les habitats collectifs, une solution indiquée là où les chaudières à biomasse ou à énergie solaire peuvent représenter des investissements onéreux ou inadaptés.

Amendement DEVDUR-4

Article 4

I. - Alinéa 49

Après les mots :

au 3° du b

insérer les mots :

et au o

II. - En conséquence, alinéa 52, tableau, dernière ligne, dernière colonne

Remplacer les mots :

(Sans objet)

par les mots :

150 € par mètre carré de surface habitable

III.- Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

... - L'extension du crédit d'impôt pour la transition énergétique aux dépenses de bouquet de travaux pour une maison individuelle réalisées par les ménages des 9 ème et 10 ème déciles n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.

... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'extension du crédit d'impôt pour la transition énergétique aux dépenses de bouquet de travaux pour une maison individuelle réalisées par les ménages des 9 ème et 10 ème déciles est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Objet

L'article 4 du projet de loi de finances vise à transformer le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) en aide financière directement perceptible au moment des travaux.

Au 1 er janvier 2020, le CITE sera remplacé par une prime de transition énergétique pour les ménages modestes et très modestes, versée lors de la réalisation des travaux par l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Les autres ménages continueront de bénéficier du CITE jusqu'au 31 décembre 2020 à l'exception des ménages les plus aisés (déciles de revenus 9 et 10) qui en seront exclus.

Le choix de recentrer les aides à la rénovation énergétique sur les ménages modestes, en excluant les ménages des déciles 9 et 10 du CITE, pourrait conduire à freiner le rythme des travaux de rénovation énergétique, ce qui va à l'encontre de l'objectif de rénovation de 500 000 logements par an que s'est fixé le Gouvernement dans le plan rénovation énergétique des bâtiments adopté en 2018. En effet, comme le rappelle l'évaluation préalable annexée au projet de loi de finances, 50 % des travaux de rénovation éligibles au CITE ont été réalisés par ces ménages en 2017.

Lors de l'examen du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a présenté un amendement permettant à ces ménages de bénéficier du CITE au titre des travaux d'isolation des parois opaques.

Cet amendement propose d'aller plus loin, en permettant à ces ménages de continuer à bénéficier du crédit d'impôt lorsqu'ils réalisent des travaux de rénovation globale de leurs logements énergivores (étiquettes F ou G) permettant un gain énergétique important (passage à une étiquette A, B ou C).

Amendement DEVDUR-5

Article 4

I.- Alinéa 52, tableau, deuxième colonne, troisième ligne

Remplacer le nombre :

40

par le nombre :

100

II. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

... - L'augmentation du montant du crédit d'impôt pour la transition énergétique applicable aux matériaux d'isolation thermique des parois vitrées s'applique au crédit d'impôt prévu à l'article 200 quater du code général des impôts, sans incidence sur la définition de la prime mentionnée au II de l'article 4 du projet de loi de finances pour 2020.

... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'augmentation du montant du crédit d'impôt pour la transition énergétique applicable aux matériaux d'isolation thermique des parois vitrées est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Objet

Cet amendement vise à augmenter de 40 à 100 euros par équipement le montant du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) dont les ménages aux revenus intermédiaires peuvent bénéficier au titre des fenêtres à double ou triple vitrage qu'ils installent en remplacement d'une fenêtre simple vitrage.

Les travaux de remplacement de fenêtres simple vitrage permettent de réaliser des gains énergétiques non négligeables lorsque les logements sont vétustes.

Comme l'a montré une étude de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie et du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) parue en octobre 2018, le remplacement de ces fenêtres permet une économie d'énergie comparable à l'isolation des combles et des murs, à surface égale.

Par ailleurs, le remplacement des fenêtres peut constituer un point d'entrée des ménages dans la rénovation énergétique et conduire par la suite à la réalisation de travaux plus ambitieux.

Amendement DEVDUR-6

Article 18

I. -  Alinéa 7

Remplacer le montant :

30 000 €

par le montant :

33 000 €

II. -  Alinéa 8

Remplacer le montant :

20 300 €

par le montant :

24 300 €

III. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'augmentation du plafond du prix d'acquisition des véhicules à faibles et très faibles émissions à partir duquel les charges ne sont pas déductibles pour l'établissement de l'impôt des entreprises est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Objet

Cet amendement vise à augmenter les montants pouvant être déduits par les entreprises de l'impôt qu'elles acquittent au titre de l'amortissement de leurs véhicules à faibles et très faibles émissions, en portant le plafond du prix d'acquisition à partir duquel les charges ne sont pas déductibles pour l'établissement de l'impôt de 30 000 à 33 000 euros pour les véhicules émettant mois de 20 grammes de CO 2 par kilomètre et de 20 300 à 24 300 euros pour les véhicules émettant entre 20 et 50 grammes de CO 2 par kilomètre.

Il s'agit d'inciter fiscalement les entreprises à acquérir des véhicules à faibles et très faibles émissions pour accélérer le verdissement du parc automobile français, considérant que plus de 50 % des véhicules neufs mis en circulation appartiennent à des entreprises ou à des administrations publiques et que, parmi ces véhicules, 79 % sont des véhicules diesel et seulement 4 % des véhicules électriques et hybrides.

Amendement DEVDUR-7

Article 18

I.- Alinéa 202

Après le mot :

vigueur

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

au 1 er janvier 2021.

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du report de l'entrée en vigueur du cadre fiscal relatif aux véhicules adapté à la norme d'émissions WLTP au 1 er janvier 2021 est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Objet

L'article 18 prévoit de réviser le barème des taxes applicables aux véhicules pour prendre en compte la hausse des émissions de véhicules constatées en application du nouveau cadre règlementaire européen WLTP. Initialement envisagée au 1 er janvier 2020, la mise en place de ce nouveau cadre fiscal doit être repoussée étant donné le retard pris pour adapter le système d'immatriculation des véhicules et mettre en place un nouveau certificat de conformité électronique.

L'article 18 prévoit ainsi un passage à la norme WLTP à une date fixée par arrêté, et au plus tard le 1 er juillet 2020. Ce faisant, le barème du malus applicable au 1 er janvier 2020 sera remplacé au cours du premier semestre 2020 par un nouveau barème.

Or, bien qu'il s'applique à partir d'un niveau d'émissions plus élevé, ce nouveau barème ne permettra pas d'assurer la neutralité fiscale du changement de norme pour l'ensemble des véhicules, étant donné que la nouvelle norme WLTP conduit à attribuer un niveau d'émissions à chaque véhicule et non à une famille de véhicules.

Le passage en cours d'année - à une date encore inconnue - au système WLTP conduira donc à une augmentation du montant du malus sur certains véhicules, ce qui sera source de complexité pour les professionnels et pour les consommateurs.

C'est pourquoi, le présent amendement vise à reporter au 1 er janvier 2021 l'entrée en vigueur de la norme WLTP.

Amendement DEVDUR-8

Article 21

I.- Alinéas 3 et 4

Supprimer ces alinéas.

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de la suppression du plafonnement de la compensation versée en application de l'article 15 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Objet

Cet amendement vise à supprimer la baisse de 45 millions d'euros de la compensation que l'État verse aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM), à la suite du relèvement du seuil de salariés à partir duquel les employeurs sont assujettis au versement mobilité opéré en 2016.

Outre le fait qu'elle revient sur l'engagement de l'État à compenser la perte de recettes subie par les AOM, cette baisse va à l'encontre des objectifs de développement des mobilités affichés par le Gouvernement, en privant les autorités organisatrices de ressources importantes pour financer leur politique de mobilité. Elle pénalise de surcroît les collectivités qui ont fait des efforts pour encourager l'installation d'entreprises et la création d'emplois.

Par ailleurs, elle s'ajouterait à la perte de recettes de 45 millions d'euros en 2023, puis de 30 millions d'euros par an à partir de 2024 que les autorités organisatrices connaîtront du fait de la réforme des modalités de franchissement des seuils sociaux prévue par la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (loi « PACTE » ).

Amendement DEVDUR-9

Article 33

Supprimer cet article.

Objet

L'article 33 du projet de loi de finances entend supprimer le compte d'affectation spéciale « aides à l'acquisition de véhicules propres », afin d'intégrer les dépenses relatives au bonus automobile et à la prime à la conversion au sein de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du budget général de l'État.

Cette suppression rend toutefois moins lisible les montants dédiés au dispositif « bonus-malus », en mettant fin à l'affectation directe de la recette du malus au soutien à l'évolution du parc automobile.

Par conséquent, le présent amendement vise à supprimer l'article 33 pour maintenir le compte d'affectation spéciale « bonus-malus ».

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mardi 15 octobre 2019

- Air France KLM : Mmes Anne-Sophie LE LAY , secrétaire générale, Béryl BALDOUS , directrice des affaires publiques.

Jeudi 24 octobre 2019

- Conseil national des professions de l'automobile (CNPA) : Mmes Dorothée DAYRAUT-JULLIAN , directrice des affaires publiques et de la communication, Clarisse PARIS , chargée des affaires publiques.

- Fédération Nationale des Transports Routiers : Mme Florence BERTHELOT , déléguée générale.

- Direction générale des finances publiques : MM. Martin KLAM , sous-directeur de la fiscalité des transactions, Michel GIRAUDET , adjoint au chef de bureau D2.

- Fédération nationale des travaux publics : MM. Julien GUEZ , directeur général, Jean-Christophe ANGENAULT , directeur de cabinet - directeur des relations institutionnelles, Mme Sophie CAHEN , conseillère auprès du directeur général.

- Comité des Constructeurs Français d'Automobiles : M. Nicolas LE BIGOT , directeur technique, environnemental et international, Mme Louise D'HARCOURT , chargée des affaires parlementaires.

Mercredi 6 novembre 2019

- Agence nationale de l'habitat : Mme Valérie MANCRET-TAYLOR , directrice générale, MM. Grégoire FRÈREJACQUES , directeur général adjoint

Jeudi 7 novembre 2019

- Fédération française du bâtiment : MM. Benoît VANSTAVEL , directeur des relations parlementaires et institutionnelles, Loïc CHAPEAUX , directeur des affaires économiques.

- Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie : M. Fabrice BOISSIER , Directeur général délégué.


* 1 Afin de couvrir l'ensemble du territoire par une autorité organisatrice de la mobilité, le projet de loi d'orientation des mobilités prévoit que les communes devront délibérer avant le 31 décembre 2020 pour transférer, à compter du 1 er juillet 2021, la compétence d'organisation des mobilités aux communautés de communes dont elles sont membres.

* 2 Voir les rapports de M. Didier Mandelli, faits au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, sur le projet de loi d'orientation des mobilités en première lecture ( http://www.senat.fr/rap/l18-368-1/l18-368-1.html ) et en nouvelle lecture ( http://www.senat.fr/rap/l19-085/l19-085.html ).

* 3 Conseil des prélèvements obligatoires, « La fiscalité environnementale au défi de l'urgence climatique », Septembre 2019.

* 4 Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

* 5 Après remboursement, le tarif de TICPE dû par les transporteurs routiers sera de 45,19 c€/ L au lieu de 43,19 c€/ L actuellement (contre 59,40 c€/ L pour le tarif normal).

* 6 Interview d'Élisabeth Borne au Journal du Dimanche, 16 septembre 2017.

* 7 Ce tarif passerait de 18,82 c€/ L en 2019 à 37,68 c€/ L en 2020, 50,27 c€/ L en 2021 puis rejoindrait celui du gazole routier à compter de 2022.

* 8 Hors usages agricoles, le gazole non routier est utilisé par les secteurs du bâtiment et des travaux publics pour 37 %, du transport ferroviaire pour 6 % et de l'industrie (de manière diffuse) pour 57 %.

* 9 La mise en place d'une grille de malus au format WLTP dès le 1 er janvier 2020, envisagée initialement, n'est pas possible compte tenu des difficultés opérationnelles qui ont été rencontrées pour adapter le système d'immatriculation des véhicules (SIV) et mettre place le nouveau certificat de conformité électronique.

* 10 Les dépenses relatives au bonus et à la prime à la conversion sont intégrées dans le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du budget général de l'État.

* 11 Les comptes d'affectation spéciaux devant être à l'équilibre, des ajustements en cours d'exécution budgétaire sont nécessaires en fonction du montant effectivement constaté des recettes du malus et du montant des aides versées.

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