N° 142

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2019

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2020 ,

TOME II

ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT :

Diplomatie culturelle et d'influence (Programme 185)

Par MM. Robert del PICCHIA et André VALLINI,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Christian Cambon, président ; MM. Pascal Allizard, Bernard Cazeau, Olivier Cigolotti, Robert del Picchia, Jean?Noël Guérini, Joël Guerriau, Pierre Laurent, Cédric Perrin, Gilbert Roger, Jean?Marc Todeschini, vice?présidents ; Mme Joëlle Garriaud?Maylam, M. Philippe Paul, Mme Marie?Françoise Perol?Dumont, M. Olivier Cadic, secrétaires ; MM. Jean?Marie Bockel, Gilbert Bouchet, Michel Boutant, Alain Cazabonne, Pierre Charon, Mme Hélène Conway?Mouret, MM. Édouard Courtial, René Danesi, Gilbert?Luc Devinaz, Jean?Paul Émorine, Bernard Fournier, Mme Sylvie Goy?Chavent, MM. Jean?Pierre Grand, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, MM. Jean?Louis Lagourgue, Robert Laufoaulu, Ronan Le Gleut, Jacques Le Nay, Rachel Mazuir, François Patriat, Gérard Poadja, Ladislas Poniatowski, Mmes Christine Prunaud, Isabelle Raimond?Pavero, MM. Stéphane Ravier, Hugues Saury, Bruno Sido, Rachid Temal, Raymond Vall, André Vallini, Yannick Vaugrenard, Jean?Pierre Vial, Richard Yung.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 2272 , 2291 , 2292 , 2298 , 2301 à 2306 , 2365 , 2368 et T.A. 348

Sénat : 139 et 140 à 146 (2019-2020)

SYNTHÈSE

Les crédits du programme 185 « diplomatie culturelle et d'influence » s'élèvent à 718 M€, en hausse de 2,6 % , repassant ainsi cette année, symboliquement, au-dessus de la barre de 700 M€. Ce programme appartient à la mission « Action extérieure de l'État » qui représente, au total, 2,9 Md€. Ce budget est donc globalement préservé mais son évolution globale masque des divergences importantes entre postes.

1. La hausse de ce budget est en effet entièrement imputable à une augmentation de la subvention versée à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) . Cette hausse, d'un montant de 24,6 M€ (+6 %) , est destinée à financer l'objectif de doublement du nombre d'élèves scolarisés dans les réseaux de l'enseignement français à l'étranger d'ici à 2030 . 30 nouveaux établissements ont été homologués à la rentrée 2019, contre 6 l'année précédente.

Cette nouvelle dynamique est très positive dans un contexte de concurrence accrue. Elle vise à valoriser l'un des meilleurs atouts de la France dans le domaine de la diplomatie culturelle et d'influence, la qualité des écoles et lycées français étant internationalement reconnue. Parallèlement toutefois, la baisse des emplois sous plafond de l'AEFE se poursuit. Ceux-ci sont passés de 6 235 en 2014 à 5 676 en 2020 (-9 %). La dynamique nouvelle est fragilisée par plusieurs hypothèques :

- En premier lieu, a fin de faciliter l'accès des familles françaises à l'EFE, il conviendra de privilégier les régions d'implantation de ces familles et de mener une politique d'aides à la scolarité qui soit à la hauteur de la dynamique de progression du réseau et des effectifs. Ce n'est pas le cas dans ce budget 2020 puisque les aides à la scolarité stagnent (105 M€ inscrits au programme 151).

- En deuxième lieu, le plan de développement de l'EFE comporte l'annonce de 1000 détachements supplémentaires de personnels titulaires de l'éducation nationale dans le réseau à l'horizon 2030. Cet effort est insuffisant puisque l'on vise un doublement du nombre d'élèves avec seulement 11 % de détachements supplémentaires . Ces détachements devront être optimisés par un pilotage conjoint des deux ministères concernés . La croissance du réseau reposera essentiellement sur l'emploi de recrutés locaux, formés au sein des 16 nouveaux instituts régionaux de formation. Une véritable transformation de la nature de l'enseignement français à l'étranger est donc en cours. Le maintien de la qualité de cet enseignement doit être une priorité.

- En troisième lieu, plusieurs obstacles au développement immobilier du réseau doivent être levés.

2. Par ailleurs, une nouvelle stratégie nationale d'accueil et d'attractivité des étudiants internationaux est mise en oeuvre . Intitulée « Bienvenue en France », cette stratégie vise à améliorer les conditions d'accueil et à renforcer l'attractivité de la France auprès des pays émergents, d'Asie et anglophones, tout en maintenant des liens forts avec les pays francophones, tout particulièrement en Afrique. Cette réforme est notamment marquée par la mise en place de frais d'inscription différenciés pour les étudiants extra-communautaires, qui pourraient être remis en cause, à la suite d'une décision du Conseil constitutionnel du 11 octobre 2019.

Cette stratégie d'attractivité est fragile à de multiples titres :

- D'une part, les moyens qui lui sont consacrés sont insuffisants. Si une politique d'exonération a permis de limiter les effets de la hausse des droits d'inscription, ces exonérations sont supportées par un système universitaire déjà sous-financé. Pour 2020, les crédits des bourses du programme 185 sont stables à 64,6 M€. En dix ans (2008-2017), les crédits des bourses du gouvernement français (BGF) ont diminué de 43 %. Cette baisse s'est traduite, d'une part, par une réduction du nombre de bénéficiaires de bourses de 30 % et, d'autre part, par une baisse du montant unitaire des bourses de 18 %. Par ailleurs, une sous-consommation des crédits votés en loi de finances est observable . Ainsi, en 2019, les programmes 185 et 209 comportaient à eux deux 73,6 M€ de bourses destinés à être gérés par Campus France mais seuls 56,3 M€ ont été réellement confiés en gestion à l'opérateur, soit 76 %. Compte tenu de l'évolution déjà défavorable des crédits des bourses, il est impératif que ces crédits, inscrits en lois de finances, soient effectivement consommés .

- D'autre part, comme l'a souligné un rapport récent de la Cour des comptes, le système de gouvernance de l'accueil des étudiants en mobilité est insatisfaisant : il relève de plusieurs administrations, dont les deux agences, Campus France et Erasmus+, les établissements d'enseignement supérieur ainsi que les postes diplomatiques. Cette politique des bourses doit être recentralisée et mieux piloté e, grâce à une articulation repensée entre les différents acteurs. Un rapprochement des deux agences précitées paraît souhaitable. La politique des bourses doit devenir globalement plus visible , au plan international, par l'instauration d'une « marque » dédiée (autre que « bourse du gouvernement français ») avec des appels à candidatures mondiaux et un recrutement selon des critères unifiés .

3. Enfin, les moyens de la promotion du tourisme sont en baisse. Le 4ème Conseil interministériel du tourisme du 17 mai 2019 a demandé à Atout France d'importantes économies sur ses coûts de fonctionnement, c'est-à-dire principalement en termes de ressources humaines et d'immobilier.

Ces économies doivent s'élever, en 2020, à 4,4 M€ ce qui vient se cumuler avec une baisse de 10 ETPT du plafond d'emploi. La subvention pour charges de service public de l'opérateur passe de 32,7 M€ en 2019 à 30,9 M€ en 2020 (-6 %).

Le dynamisme du secteur touristique reste toutefois fragile. Avec 90 millions de touristes internationaux en 2018, la cible de 100 millions en 2020 paraît difficilement atteignable . Le premier trimestre 2019 a connu un repli. L'activité touristique est toutefois repartie à la hausse à compter d'avril. Dans un contexte international très concurrentiel, la mise en oeuvre d'une politique de compétitivité spécifique est indispensable. Celle-ci doit être menée par un opérateur implanté à la fois au plan national et à l'étranger, bien identifié et reconnu par le secteur.

Lors de sa réunion du mercredi 6 novembre 2019, la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption de l'ensemble des crédits de la mission « Action extérieure de l'État » .

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