B. LE RENFORCEMENT DES MOYENS, CONFIRMÉ EN 2019, POUR MIEUX FAIRE CONNAÎTRE LE RÔLE ET L'ACTION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

1. Des dépenses de fonctionnement en légère augmentation pour 2019, avec l'objectif de « renforcer et professionnaliser les services »

Le Conseil constitutionnel comptera, au 1 er janvier 2019, 72 collaborateurs rémunérés à titre principal par l'institution auxquels s'ajoutent, à titre occasionnel, des rapporteurs adjoints, un conseiller technique issu de la Cour des comptes, des stagiaires et des collaborateurs temporaires (interprètes, etc. ), ce qui équivaut à un total de 64,4 ETP. Cet effectif, qui fait du Conseil constitutionnel l'une des plus petites cours constitutionnelles d'Europe, est à comparer aux 300 personnes travaillant pour la Cour de Karlsruhe et aux 200 personnes du Tribunal constitutionnel espagnol, même si l'on ne peut totalement établir un parallèle avec l'activité de ces deux instances. L'augmentation des dépenses de personnel lors des derniers exercices doit donc être relativisée.

Le Conseil constitutionnel a remplacé, avec la mise en place de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) en 2010, une partie de ses personnels de catégorie B par des agents de catégorie A, pour adapter ses effectifs aux nouveaux besoins. Cette nouvelle répartition, combinée à la prise en compte de l'ancienneté des personnels permanents et au recours à des personnels occasionnels nécessité par l'accroissement des activités de contrôle électoral, a rendu la hausse des dépenses de personnel inéluctable entre 2010 et 2018. Cette hausse est apparue raisonnable, d'autant qu'elle a partiellement été compensée par des économies sur les autres dépenses de fonctionnement.

Au titre de la professionnalisation des services a été organisée pour la première fois, au cours du premier semestre 2018, une revue des effectifs du Conseil constitutionnel, par statut, par catégorie et par service. Les fiches de poste de l'ensemble des personnels ont été actualisées en s'inspirant des fiches du répertoire interministériel des métiers de l'État. Ont été mis en place un entretien annuel d'évaluation professionnelle des personnels, qu'ils soient contractuels ou fonctionnaires, ainsi qu'un plan de formation 22 ( * ) . Enfin, le secrétariat général a vu son organisation enrichie avec la création d'un service chargé de la communication en février 2018.

Le budget consacré aux membres du Conseil constitutionnel est reconduit à l'identique pour 2019. Parmi les anciens Présidents de la République, membres de droit du Conseil constitutionnel, seul Valéry Giscard d'Estaing y siège actuellement 23 ( * ) . Le projet de loi constitutionnelle pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace, en cours d'examen à l'Assemblée nationale, prévoit la suppression du deuxième alinéa de l'article 56 de la Constitution, aux termes duquel les anciens Présidents de la République « font de droit partie à vie du Conseil constitutionnel » (article 10), tout en prévoyant une exception au bénéfice « des anciens Présidents de la République qui ont siégé au Conseil constitutionnel l'année précédant la délibération en conseil des ministres du projet de la présente loi constitutionnelle » (article 18). Votre rapporteur approuve ces dispositions.

Au total, les dépenses de fonctionnement devraient augmenter de 2,5 % en 2019 (+ 253 000 euros), pour atteindre 10,269 millions d'euros. Cette hausse est gagée à due concurrence par une diminution des dépenses d'investissement.

2. Une diminution à due concurrence des investissements

Le Conseil constitutionnel procède à l'entretien des locaux qu'il occupe dans l'aile Montpensier du Palais Royal.

Un ambitieux programme de travaux a été engagé depuis dix ans, qui a permis l'amélioration de l'accessibilité, le respect des normes de détection des incendies, l'aménagement et la rénovation des locaux.

En 2018, il s'est traduit par la restauration de la salle Montesquieu, au 3 ème étage et des travaux dans le Grand Salon afin de créer une ouverture sur la salle Mounet-Sully de la Comédie-Française.

Les dépenses d'investissement du Conseil constitutionnel devraient être réduites de 253 000 euros en 2019, soit un montant correspondant exactement à la hausse attendue des dépenses de fonctionnement. Ces dépenses permettront en particulier de financer des investissements informatiques et des travaux d'aménagement.

3. L'accentuation des échanges internationaux

Le Conseil constitutionnel a considérablement accentué, depuis deux ans, ses échanges internationaux , ce qui se traduit par des échanges sur l'organisation, le fonctionnement et la jurisprudence des cours constitutionnelles.

Trois principaux cadres d'échanges internationaux ont ainsi été mis en place. Ils donnent chacun lieu à une rencontre annuelle et à des échanges réguliers entre les services : le premier avec la Cour constitutionnelle fédérale allemande de Karlsruhe, le deuxième avec les cours constitutionnelles d'Europe du sud-ouest, le dernier avec les cours constitutionnelles francophones.

Ainsi, les échanges annuels entre le Conseil constitutionnel et la Cour constitutionnelle fédérale allemande de Karlsruhe se sont institutionnalisés et portent notamment sur l'articulation entre les textes nationaux et européens en matière de droits fondamentaux et le bon équilibre entre la sauvegarde de l'ordre public et la garantie des libertés fondamentales dans le cadre de la lutte antiterroriste.

Depuis 2017, le Conseil constitutionnel a, en outre, rejoint le réseau informel des cours constitutionnelles « latines », institué en 1999, qui comprend le Tribunal constitutionnel espagnol, le Tribunal constitutionnel portugais, la Cour constitutionnelle italienne. Il a vocation à se réunir chaque année pour échanger sur un thème juridique d'intérêt commun et sur l'évolution récente des différentes jurisprudences. La France a accueilli cette instance, à Albi, au mois de septembre dernier.

Le Conseil constitutionnel est également membre de l'association des cours constitutionnelles ayant en partage l'usage du français (ACCPUF), dont il a d'ailleurs suscité la création en 1997.

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a intensifié ses liens avec la Conférence des cours constitutionnelles européennes dont il est membre depuis 1987. Créée en 1972, à Dubrovnik, elle réunit actuellement 41 cours constitutionnelles européennes ou institutions analogues qui sont chargées du contrôle constitutionnel des normes.

Il a également adhéré, en 2013, à la Conférence mondiale sur la justice constitutionnelle, qui réunit plus d'une centaine de cours et conseils constitutionnels et cours suprêmes d'Afrique, des Amériques, d'Asie et d'Europe.

Les rencontres bilatérales ont elles aussi été renforcées en 2017 et 2018 24 ( * ) .

Votre rapporteur note la vitalité de ces échanges, a conscience de leur utilité, mais tient à souligner qu'ils doivent s'effectuer dans un cadre budgétaire contraint.

4. Mieux faire connaître le rôle du Conseil constitutionnel
a) La pérennisation d'actions de communication élargies

Diverses actions à destination de publics variés ont été lancées, visant à mieux faire connaître le rôle du Conseil constitutionnel. Il s'agit de diffuser son action auprès d'un public plus large que les seuls juristes. Ces opérations ont vocation à rappeler aux citoyens le rôle fondamental que jouent les cours constitutionnelles, en France comme ailleurs, dans la préservation des garanties fondamentales et des libertés individuelles. Votre rapporteur est convaincu qu'il s'agit là d'une action qui va bien au-delà de la simple communication et qu'il est essentiel que les citoyens aient une meilleure connaissance de la Constitution de leur pays.

La première édition de la Nuit du droit sur le seul site du Conseil constitutionnel le 4 octobre 2017 avait rencontré un réel succès, avec l'accueil de plus de 1 200 personnes au Conseil constitutionnel et des débats retransmis en direct sur le site Internet dédié (www.lanuitdudroit.fr) 25 ( * ) . Les thèmes abordés lors de la première édition, comme le « droit du travail », l'« environnement et le droit », les « libertés publiques » ou encore une conférence sur l'« intelligence artificielle » avaient permis de cibler un public plus varié qu'à l'accoutumée.

La seconde édition, le 4 octobre 2018, jour du soixantième anniversaire de la Constitution de la V ème République, a donné lieu à l'organisation de 125 événements (reconstitutions de procès, concours d'éloquence, débats, pièces de théâtre, tables rondes) dans plus de 60 villes, réunissant 40 000 participants.

Par ailleurs, un concours, intitulé « Découvrons notre Constitution » , en direction de jeunes scolaires , a également été lancé, pour la première fois le 23 août 2016, et reconduit depuis, avec pour objectif de sensibiliser les jeunes élèves de France à la Constitution et aux grands principes de la République, notamment les droits et libertés que la Constitution garantit.

La remise des prix de la première édition, le 7 mars 2017, a été l'occasion de souligner la mobilisation de 1 300 élèves, portant une cinquantaine de projets, sur l'ensemble du territoire. La deuxième édition, au cours de laquelle les élèves du cycle 3 (CM1, CM2, 6 ème ) et du cycle 4 (5 ème , 4 ème et 3 ème ) ont été invités à participer, a confirmé la forte implication du corps enseignant dans la démarche initiée par le Conseil constitutionnel et le ministère de l'Éducation nationale. On retiendra symboliquement que, parmi les lauréats, figuraient une unité pédagogique pour élèves allophones du collège Toulouse Lautrec de Toulouse et des élèves de section d'enseignement général et professionnel adapté du collège Les Étines du Coteau (académie de Lyon).

Toujours pour favoriser un rapprochement des citoyens, le Conseil constitutionnel a décidé de moderniser, depuis 2016, le mode de rédaction de ses décisions . L'objectif est de simplifier la lecture de ses décisions , ce qui conduit par exemple à ne plus utiliser de « Considérant » au début de chaque paragraphe, et d'en approfondir la motivation. Cette nouvelle méthode de travail a été initiée à l'occasion des deux décisions QPC rendues publiques le 10 mai 2016 26 ( * ) et a été maintenue depuis. Le Conseil constitutionnel a en outre instauré depuis trois ans un rapport annuel d'activité .

Le Conseil constitutionnel publie également sur son site Internet, depuis février 2017, la liste des « contributions extérieures » qui lui sont soumises à l'occasion d'une saisine sur le fondement de l'article 61 de la Constitution. Cet article permet au Président de la République, au Premier ministre, aux présidents des assemblées ou à 60 députés ou 60 sénateurs de saisir le Conseil constitutionnel d'une loi adoptée par le Parlement afin qu'il examine sa validité au regard de la Constitution avant qu'elle ne soit promulguée.

Au cours de cette procédure, le Conseil peut recevoir des « contributions extérieures », qualifiées en 1991 de « portes étroites » par le doyen Vedel, permettant à des professeurs de droit, à des professionnels mais aussi à des citoyens d'appeler l'attention du Conseil constitutionnel sur une question de droit précise. Le Conseil demeure souverain dans l'acceptation et l'utilisation des « portes étroites » mais la publication de la liste des « portes étroites » qui lui sont soumises à l'occasion d'un contrôle a priori de constitutionnalité participe d'un mouvement plus général de renforcement de la traçabilité de la norme. Votre rapporteur s'interroge sur l'éventuelle publicité du contenu de ces contributions extérieures. Le juge administratif ayant été saisi, il ne s'agit nullement de se prononcer, à ce stade, sur le fond. Toutefois, il s'agira dans tous les cas d'opérer un arbitrage dans la conciliation de deux principes : la traçabilité et l'indépendance des décisions rendues, d'une part, et le fait que ces contributions extérieures ne constituent en aucune manière des pièces de la procédure, d'autre part. En outre, une publicité systématique des contributions extérieures pourrait entraîner leur multiplication et exposer le Conseil constitutionnel à davantage de pression, ce qui n'est sans doute pas le but recherché par ceux qui en demandent la publication. Dès lors, la situation actuelle qui consiste à publier simplement le titre, l'objet et l'auteur des textes reçus paraît présenter de réels avantages dans la mesure où rien n'interdit de saisir l'auteur de la contribution pour qu'il décide de transmettre ou non un document dont le contenu, après tout, lui appartient.

b) La présence dématérialisée active du Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel est présent par voie dématérialisée à la fois à travers son site Internet, par le biais d'une application mobile et au travers des réseaux sociaux. S'ils peuvent, de prime abord, paraître anecdotiques en matière constitutionnelle, il ne faut pas négliger l'impact que ces dispositifs ont auprès des publics non juristes tout autant concernés au quotidien par les décisions rendues par le Conseil constitutionnel.

Votre rapporteur ne dispose pas encore des chiffres de fréquentation du site pour 2018, après l'accroissement significatif constaté en 2017 où un record de fréquentation avait été enregistré, correspondant à la fois aux pics constatés lors des années électorales et à la consultation des sites Internet des administrations publiques au sens large. Toutefois, la nouvelle interface du site Internet apparaît plus attractive et facilite les recherches des internautes.

S'agissant de la sécurité du site Internet du Conseil constitutionnel, une nouvelle infrastructure a été déployée en juin 2017, en prélude au déploiement d'une nouvelle version du site à la fin juillet 2019. Elle se compose de trois environnements distincts, c'est-à-dire trois niveaux successifs de sécurité qui peuvent être activés selon les types d'attaque. Pour vérification de la solidité de ce nouveau dispositif, ce nouveau site Internet est lui-même actuellement en cours d'expertise par une société spécialisée labellisée par l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI). Deux phases sont programmées : la première consiste en des tentatives d'accès « à l'aveugle », au même titre, qu'un attaquant et la seconde comprend un audit sur l'architecture des trois environnements.

Le Conseil constitutionnel a décidé de développer une application pour Smartphone depuis 2017. Cette application permet non seulement de garantir aux utilisateurs un affichage effectivement compatible avec leur support mobile, mais également de recevoir en temps réel des notifications. L'application mobile a fait l'objet de près de 3 000 téléchargements, ce qui est sans doute perfectible.

Enfin, le Conseil constitutionnel communique via les réseaux sociaux : son compte Twitter , par exemple, compte près de 112 000 abonnés 27 ( * ) . Toutes ces actions ont été développées à la suite de la mise en place, en février 2018 d'un service de la communication, par redéploiement interne.


* 22 Ce plan de formation des personnels du Conseil constitutionnel est pour partie conventionné avec l'Institut de la gestion publique et du développement économique (IGPDE) et le ministère de l'intérieur.

* 23 Jacques Chirac n'y siège plus depuis mars 2011, Nicolas Sarkozy depuis janvier 2013 et François Hollande n'a pas souhaité y siéger.

* 24 Depuis 2017, le président du Conseil constitutionnel a accueilli plusieurs de ses homologues des cours constitutionnelles de l'Union européenne (Belgique, Suisse, Allemagne, Espagne, Lettonie, République tchèque...) ou de l'espace francophone (Canada, Mali, Algérie...).

* 25 Le site Internet avait fait l'objet de 15 118 visites, 69 373 pages vues et 24 894 pages vues uniques. Cet événement a été relayé sur les réseaux sociaux avec, par exemple, 183 423 destinataires des tweets.

* 26 Décisions n os 2016-539 QPC et 2016-540 QPC.

* 27 À titre de comparaison, l'Assemblée nationale compte 238 000 abonnés, le Sénat 400 000 et l'Élysée 2,14 millions.

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