C. LES CRÉDITS PRÉSENTÉS COMME RELEVANT DU PLAN D'INVESTISSEMENT DANS LES COMPÉTENCES CORRESPONDENT EN FAIT AU FINANCEMENT DE DISPOSITIFS DE DROIT COMMUN

Le gonflement du PIC par une présentation biaisée des crédits demandés

Dans le cadre du « Grand plan d'investissement » présenté le 25 septembre 2017, le Gouvernement a annoncé la mise en oeuvre d'un « plan d'investissement compétences » (PIC) au bénéfice des jeunes et des demandeurs d'emplois faiblement qualifiés. Ce plan doit être doté, selon le PAP, de 14 milliards d'euros 11 ( * ) sur la période 2018-2022. En 2019, première année pleine de mise en oeuvre de ce plan, les crédits consacrés au PIC sur le périmètre de la mission Travail et emploi seraient de 3 milliards d'euros en AE et 2,5 milliards d'euros en CP.

Ils seraient répartis comme suit :

- 848,67 millions d'euros en AE et 387 millions d'euros en CP au titre du programme 103 ;

- 586,24 millions d'euros en AE et 579,33 millions d'euros en CP au titre du programme 102 ;

- 11,8 millions d'euros en AE et en CP au titre du programme 155 ;

- 1,5 milliard d'euros en AE et en CP au titre d'un fonds de concours apporté par France compétences.

Ainsi que le présent rapport le met en évidence, une large part de ces crédits correspond en fait au financement de dispositifs déjà existants, qui auraient dû être financés même en l'absence de plan spécifique ou de la réorientation des sommes qui étaient collectées par les Opca. Il semble donc abusif de les présenter comme relevant d'un « effort sans précédent ».

L'action 3, créée avec la LFI pour 2018 retrace les crédits du programme 102 présentés comme relevant du plan d'investissement dans les compétences. Ces crédits progresseraient de 13,9 % en CP et 15,11 % en AE (586,24 millions d'euros en AE et 579,33 millions d'euros en CP). Cette progression s'explique toutefois largement par l'intégration dans cette action de dépenses qui relevaient en 2018 d'autres actions.

1. La progression des dépenses liées à la Garantie jeune

Initialement créé à titre expérimental 12 ( * ) , la Garantie jeune (GJ) a été généralisée par la loi du 8 août 2016 13 ( * ) , adoptée sous le quinquennat précédent. Il s'agit donc d'un dispositif pérenne, qui doit être financé chaque année. Présenter la GJ comme relevant d'un « effort sans précédent » consenti par le Gouvernement semble donc pour le moins discutable.

En 2018, la GJ représentait une dépense de 514,6 millions d'euros en AE et 503,3 millions d'euros en CP, dont une partie (35,96 millions d'euros) était prise en charge par des fonds européens (fonds social européen et initiative pour l'emploi des jeunes). Les crédits inscrits à l'action 4 étaient ainsi de 478,63 millions d'euros en AE et 467,31 millions d'euros en CP.

En 2019, le PAP maintient la cible de 100 000 nouveaux jeunes accompagnés, qui n'a pas été atteinte en 2018 (94 000) et prévoit un coût de 550,66 millions d'euros en AE et 543,74 millions d'euros en CP, dont 54,05 millions d'euros seraient pris en charge par les fonds européens.

Ainsi, les crédits inscrits au PLF au titre de la garantie jeune seraient en 2019 de 496,61 millions d'euros en AE et 489,69 millions d'euros en CP, dont, soit une progression de 3,75 % en AE et 5,69 % en CP.

Crédits demandés au titre de la Garantie jeune

(en millions d'euros)

Coût de l'allocation (AE= CP)

Coût de l'accompagnement

Co-financement européen
(AE = CP)

Crédits demandé

AE

CP

AE

CP

2018

354,6

160

148,68

35,96

478,63

467,31

2019

390,66

160

153,08

54,05

496,61

489,69

Source : PAP

2. L'intégration au PIC de dispositifs pérennes

Le champ de l'action 3 est par ailleurs élargi pour comprendre un certain nombre de dispositifs déjà existants, qui relevaient en 2018 de l'action 2 :

- les dépenses au titre du parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (Pacea), qui passeraient de 10 à 48 millions d'euros ;

- une partie des dépenses liées à la R2F, à hauteur de 41,64 millions d'euros 14 ( * ) .

Présenter ces dispositifs comme des éléments du PIC semble constituer un biais de présentation difficilement compatible avec l'exigence d'une information claire et loyale du Parlement. Toutefois, votre rapporteur se félicite de la forte augmentation des crédits dédiés au financement des Pacea.


* 11 La communication gouvernementale arrondit ce montant, qui figure dans le PAP, à 15 milliards d'euros.

* 12 Décret n° 2013-880 du 1 er octobre 2013 relatif à l'expérimentation de la « garantie jeunes ».

* 13 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 14 L'action 1 du programme 102 prévoit par ailleurs 201,2 millions d'euros au titre de la R2F.

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